Chapitre 2
Severus resta assis sur son fauteuil près de la fenêtre ouverte pendant très longtemps. Le ciel changeait déjà du noir d'encre au bleu sombre quand il alla finalement au lit, mais il y avait trop de pensées faisant la course dans sa tête pour même lui faire penser au sommeil, et encore moins pour le chercher.
Etait-il stupide ou raisonnable d'examiner sa vie quand on avait à peine dix-huit ans? Severus n'en était pas très sûr-il sentait que c'était peut- être un peu pitoyable. Mais alors il venait de fermer un livre et n'avait eu qu'un aperçu de ce qui était écrit sous la couverture de l'autre et avant de complètement ouvrir ce deuxième tome de sa vie, il voulait seulement, non, il se sentait forcé de comprendre le contenu du premier.
Etait-il déjà temps de se demander s'il avait réalisé tout ce qu'il voulait? Les signes extérieurs étant dix-sept A.S.P.I.C.s-pas exactement le score dont il avait rêvé, parce qu'il avait voulu égaler le succès de son père, mais pas mauvais non plus. La suivante, une fille de Serdaigle, en avait seulement récolté quinze. Alors, à moins de se juger trop sévèrement il pouvait être satisfait de ses succès universitaires. Il avait créé une potion dont on avait jamais entendu parler auparavant-malheureusement cela allait en rester ainsi et ne pourrait jamais être mis sur papier sur son curriculum vitae, du moins pas sur l'officiel. Et sa vie alors? S'il se disait la vérité, et c'était son intention sincère, les résultats n'étaient pas aussi splendides là. Pas suivant les critères communément appliqués, du moins. Il était complètement seul. Mme Rogue dépérissait à l'institut d'Inverness où il n'était pas allé lui rendre visite une seule fois depuis qu'elle y avait été emmenée. Pas qu'il le regrette mais c'était un fait qui devait être mentionné. Il était un Personne et resterait un Personne au cours des prochaines années, jusqu'à ce qu'il ait fini son apprentissage et soit devenu un maître de potions. Voldemort lui avait promis qu'il serait convoqué aux réunions les plus importantes des Mangemorts, bien que la convocation dusse arriver par hibou. Et il avait eu raison au sujet de Severus se sentant plus qu'humilié à la pensée que Nott, cet idiot, allait recevoir sa marque sombre dans l'avenir proche alors que lui, le brillant Severus Rogue, exhiberait un avant-bras intact, pas bien meilleur que celui d'une fille.
C'était moins la solitude que le sentiment d'un manque presque total d'orientation qui le dérangeait. Il avait passé dix-huit ans en isolement complet du monde réel et n'avait aucune idée de comment s'y déplacer. Comment était-il supposé se trouver un appartement? Quand Voldemort voulait- il qu'il contacte McLachlan? Combien d'argent y-avait-il dans son coffre? Eh bien, il était du moins facile de répondre à cette question-il irait voir cela à Gringott en tout premier lieu demain matin. Mais pour le reste, autant qu'il déteste ennuyer son tuteur avec de simples banalités, il devrait écrire à Lestrange. Severus supposait qu'il serait mieux d'avoir une idée d'où il voulait vivre avant de voir qui que ce soit qu'il devait voir pour louer un appartement. Ou une petite maison. Cette idée l'attirait beaucoup. Une petite maison avec un jardin où il pourrait cultiver ses propres herbes magiques et où Esmeralda aurait ses terrains de chasse. Oui, pensa-t-il, une chose était sûre: son chat lui manquait cruellement. Et il n'aimait certainement pas rester en chambre d'hôtel. Alors il devrait se chercher quelque chose demain, ce qui voulait dire qu'il devait écrire à Lestrange immédiatement.
Severus regarda sa montre; il était onze heures trente. Tom le barman ne serait probablement pas enchanté s'il voulait emprunter un des hiboux à courrier du chaudron baveur à une heure si tardive, mais il ne pouvait rien y faire. Priorité aux choses importantes, et tant pis pour le sommeil paisible de Tom. Il pêcha dans son coffre pour trouver du parchemin et une plume-non sans caresser tendrement ses livres rétrécis, qui avaient occupé le fond depuis très longtemps maintenant-et écrivit.
Cher St. Jean
Contrairement à ce que les gens pourraient croire, dix-sept A.S.P.I.C.s ne sont pas tout ce dont un jeune homme a besoin pour sa première sortie dans le monde. Peut-être serait-ce mieux si j'en avais seulement seize mais si je savais comment me procurer un endroit pour vivre.
Je suis sûr que vous avez beaucoup de choses importantes à faire mais pensez-vous pouvoir me dédier un peu de votre temps, pour jouer au chien d'aveugle? Je me suis rendu compte que séjourner dans des auberges n'est pas au sommet de ma liste des choses favorites à faire et ainsi je serais extrêmement reconnaissant si nous pouvions en terminer avec les problèmes de logement dès que possible.
Et je crois que je voudrais vous poser un peu plus de questions au sujet de McLachlan-je suis un peu perdu en ce qui le concerne.
En espérant avoir bientôt des nouvelles de vous, je reste
Sincèrement vôtre Severus Rogue
Comme il l'avait prévu, Tom n'était pas exactement ravi de devoir remplir la demande de hibou de son hôte peu avant minuit. Mais heureusement, le nom de Rogue rappelait encore quelque chose à ceux de sa génération, et donc il fut plus gentil que ce à quoi Severus s'était attendu.
Se sentant bien soulagé et beaucoup mieux qu'avant, Severus retourna à sa chambre et à ses réflexions, regrettant de ne pas avoir Esmeralda installée confortablement sur ses genoux, à ronronner et jouer avec ses doigts tandis qu'il restait assis à penser. Il essaya de s'imaginer il y a sept ans environ, sur le point d'entrer à Poudlard et essaya de mettre ces deux Severus Rogue l'un à côté de l'autre, afin de voir la différence. Il était plus grand maintenant, cela du moins était évident. Il avait été grand pour son âge quand il avait commencé l'école, et il était devenu un très grand homme jeune, un mètre quatre-vingt huit, et à son âge, il pouvait encore environ prévoir raisonnablement de grandir de deux ou trois centimètres. Comparé au petit bonhomme gauche qu'il avait été lors de sa première année, il avait certainement accepté son propre corps. Ses mains et pieds étaient longs et minces, mais plus trop larges. Son nez.eh bien, son visage avait changé un peu, et comme un changement vers quelque chose de pire n'avait pas été possible, cela devait avoir été une amélioration. Contrairement à beaucoup d'autres de ses pairs-il renifla en se rappelant Pettigrow, ressemblant à une des glaces les plus exotiques que composait Florian Fortarôme-il n'avait jamais eu de problèmes d'acné. Sa peau était toujours jaunâtre, mais du moins il n'avait pas eu de boutons. La prédiction qu'il s'était faite au sujet de son apparence, il y a exactement quatre ans, s'était presque révélée être exacte, bien que dans ce cas particulier il n'aurait pas eu d'objection à avoir eu tort. Il était moins laid maintenant qu'à l'âge de quatorze ans mais il ne serait jamais rien de plus qu'intéressant. Pas qu'il s'en soucie. La pensée de ne pas avoir de filles assemblées à sa porte, hurlant de rage hormonale, ne le dérangeait pas trop. Même Lucius, l'extraordinaire coqueluche de Poudlard, était devenu assez fatigué d'être pourchassé à chaque fois que ses orteils touchaient le sol hors du dortoir des garçons, sans parler de l'extérieur des quartiers de Serpentard.
Qu'y avait-il d'autre pour distinguer son moi d'aujourd'hui du Severus de première année, en dehors des changements physiques évidents? La connaissance, par-dessus tout. Il avait beaucoup appris au cours de ces années; dire qu'il avait lu la bibliothèque de Poudlard tout entière aurait seulement été une très légère exagération. Des expériences, mais surtout des expériences désagréables. D'une certaine manière, pensa-t-il, Poudlard était un microcosme qui vous enseignait les manières du monde si seulement vous étiez disposé à les apprendre. En dehors d'une certaine expérience pratique-comme par exemple les étapes nécessaires pour se trouver un appartement bien à soi, pensa-t-il avec un sourire désabusé-tout était là, particulièrement si vous étiez à Serpentard. Les hiérarchies, les alliances toujours-changeantes, les conflits, les jalousies, l'injustice, l'amour, à la fois mutuel et non réciprocité, les commérages-toute cette foire aux vanités était la même dans les murs du château antique qu'à l'extérieur. De ce point de vue, Poudlard avait été une école de la vie. Non scholae, sed vitae . en effet. Et, en restreignant ce point de vue, en faisant un autre pas vers l'objectivité, il dût convenir qu'il avait été mieux d'être Severus Rogue le Personne. Les étoiles comme Lucius ou Potter ou les filles McKinnon, n'avaient rien appris en termes de vie-ils étaient toujours manipulés avec des gants de velours et on leur épargnait les épreuves. C'était pour les perdants, les opprimés comme lui, que Poudlard devenait un camp d'entraînement pour la vie véritable. Ceci n'était pas grandement au crédit de l'école, car cela pouvait apporter quelques résultats très horribles, comme cela avait été le cas avec Patty Cropdon, une Serdaigle, qui s'est jetée de la tour d'astronomie, après avoir reçu un score de B.U.S.E.s manifestement moins brillant que celui de ses camarades de classe. Mais pour lui, la lutte continue avait mené à un aboutissement plutôt satisfaisant. Ca et ce que sa mère et son oncle lui avaient fait.
Il était resté fidèle à la promesse qu'il s'était faite à lui-même le dernier jour de ses vacances d'été trois ans auparavant: personne n'était parvenu à se frayer un chemin à travers la barrière qu'il avait érigée pour sa propre protection, personne ne s'était assez approché de lui pour avoir la moindre chance de le blesser. Même si Lestrange l'abandonnait ou le trahissait, il pourrait se débarrasser de cela d'un haussement d'épaules.
Seul Voldemort avait-eh bien, il n'avait pas brisé les murs, il les avait simplement traversés comme s'ils n'avaient pas existé, mais c'était tout à fait une autre histoire. Et donc il pensait de nouveau à Voldemort. Et il savait exactement pourquoi. Même s'il n'avait pas osé le regarder directement ---des regards de côté avaient déjà été suffisants pour le perturber profondément. Mais l'expérience lui avait enseigné que plus il reculait devant un problème, plus celui-ci était important et que cela n'avait absolument aucune utilité d'essayer de le fourrer dans un des tiroirs de son esprit. Il serait hors de vue pendant un certain temps vrai, mais ces tiroirs avaient l'habitude étrange de se rouvrir suivant leurs propres caprices et de répandre leur contenu quand il n'avait pas vraiment besoin qu'ils le fassent. Une autre chose qu'il avait apprise, et il l'avait apprise de la manière difficile. Il était mieux d'en finir avec cela maintenant. Le contact de Voldemort l'avait profondément excité.
Severus sentit sa bouche devenir sèche et il se leva pour se verser un verre d'eau. Il était toujours absolument sûr qu'il n'était pas homosexuel. Au contraire, la pensée d'un homme le touchant le faisait reculer. Seules les mains de Voldemort. Ce contact bref et presque irréel entre leurs lèvres quand il l'avait accueilli . La seule sensation à laquelle il pouvait vaguement comparer cela était l'effet des sourires de Yelena Malfoy. Ce qui, pour lui, était une preuve logique qu'il n'était pas homosexuel. Pas qu'il s'en serait inquiété mais il sentit que ce n'était pas le point clef. Etait-ce le sentiment de sécurité et de sécurité totale qui lui permettait de se détendre et d'admettre qu'il avait un corps? Alors il devrait mettre une petite annonce dans La Gazette des Sorciers « Jeune sorcier peu sûr de lui même cherche femme dominatrice Officier de l'Application de la Loi Magique pour conseils et finalement rapports sexuels. Motcode: Mangemort. » Non, pensa-t-il, avec un reniflement de dédain, certainement pas. Et si c'était le sentiment de sécurité, comment Mme Malfoy entrait elle dans l'image? Et pourquoi pas Lestrange? Il décida qu'il n'allait de toute manière pas trouver, du moins pas ce soir; pour l'instant il devrait se satisfaire d'avoir au moins admis ce fait à lui- même. Le ciel de nuit s'illuminait déjà au-dessus l'horizon, et donc il se leva finalement et alla au lit.
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Du thé n'était pas la meilleure chose après seulement quatre heures de sommeil. Mais au moins, il pouvait le boire au lit. Severus avait complètement oublié que l'autre nuit, il avait demandé au vieux Tom de le réveiller à huit heures, une demande dont il était incapable de trouver la raison tout de suite. Son cerveau était complètement occupé par le fait d'empêcher ses paupières de se baisser, et de diriger vers ses lèvres la main qui tenait la tasse. Quand il la reposa, il vit qu'il y avait un morceau de parchemin posé sur le plateau. Espérant que le lire ne causerait pas de disfonctionnement sérieux à d'autres parties de son corps, il l'ouvrit.
Cher Severus
Non seulement ce n'est pas un problème, c'est surtout un plaisir que de t'aider à t'établir dans le monde hors de Poudlard. Comme j'imagine que tu as très peu dormi après ce que tu as certainement perçu comme un jour très mémorable, je te conseillerais de te promener d'abord un peu dans le Chemin de Traverse et de me retrouver chez Houdini pour le déjeuner à 12 heures. Ensuite, nous pourrons aller chez M. Toddlington pour voir si la maison que notre ami commun a choisi pour toi te conviendra. Tu es bien sûr, libre d'en décider autrement. Si elle est à ton goût cependant, tu pourras emménager aujourd'hui-juste pour que tu puisses avertir Tom pour la chambre.
A toi
St. Jean Lestrange
Une maison! Bien sûr, ils avaient parlé d'où Severus aimerait vivre, ou plutôt il avait dit à Lord Voldemort combien il avait détesté la maison de Hounslow Ouest et qu'il s'était tellement habitué à habiter à la campagne que la pensée de devoir habiter dans un environnement urbain était assez énervante. Seulement, cela avait semblé tout à fait improbable que son maître ait pu aller si loin, seulement pour garantir son bien-être. Severus se sentait satisfait et fou de joie sans raison. Devrait-il risquer d'écrire à Clarissa au sujet de son chat tout de suite? D'une manière ou d'une autre il ne voulait pas emménager sans elle. Et même si son séjour au chaudron baveur durait quelques jours de plus il pouvait aller la chercher- après tout, elle n'avait pas été confiée temporairement aux Rosiers parce qu'il ne pouvait pas la garder ici avec lui, mais parce qu'il n'avait eu aucune idée de ce qu'il allait faire pendant les prochains jours. Il décida d'écrire à Clarissa maintenant et d'expédier la lettre au bureau de poste par hibou après le petit déjeuner.
Chère Clarissa
Penses-tu que je puisse te déranger ce soir? J'ai beaucoup de choses à te dire et j'enlèverais aussi probablement Esmeralda. Envoie-moi un message au chaudron baveur. A toi
Severus
Se sentant beaucoup mieux après une douche approfondie-il n'avait pas abandonné son habitude d'ensorceler l'éponge-il descendit vers le pub. Bien qu'il ne mange jamais beaucoup, hier avait été un jour de jeûne presque total, et il se réjouissait par avance d'un petit déjeuner copieux.
Il ne l'avait pas remarqué l'autre jour, car la tension avait été trop grande, mais c'était une sensation très étrange que d'être assis dans une pièce avec d'autres personnes, mais tout seul, seul à une table, sans le bavardage habituel de ses camarades. Vous ne remarquiez pas combien vous aviez pris une habitude, se dit-il, jusqu'à ce que vous dussiez l'abandonner. Pas une pensée profonde, mais certainement une pensée valide. Combien de fois s'était-il plaint, silencieusement ou tout haut, du vrombissement constant des voix qui l'empêchaient de penser clairement? Combien de fois s'était-il enfermé dans un silence entêté, refusant d'être entraîné dans un bavardage insensé? Mais il y avait cette différence entre se retirer dans ses propres pensées, avec la possibilité de se re-mêler à la conversation quand il le choississait, et ne pas avoir de compagnie, même si seulement pour la repousser. Severus se maudit de ne pas avoir apporté de livre-bien que ce ne soit pas le meilleur des comportements que de lire en mangeant, cela aurait fourni un minimum de distraction.
Alors il regarda plutôt les clients du chaudron baveur. Il n'y avait pas beaucoup de clients à ce moment de la journée et de l'année, puisqu'il était trop tard pour le petit déjeuner, du moins pour ceux qui devaient travailler et trop tôt pour le déjeuner. A une table dans le coin lointain, il aperçut quatre sorciers en uniforme du ministère, parlant à voix basse et n'étant manifestement pas beaucoup à leur aise. Peu étonnant, pensa-t- il, le personnel du ministère passait des temps difficiles, quel que soit le côté duquel ils étaient. Soit ils étaient des espions, soit ils étaient loyaux au ministre, il n'y avait rien au milieu. S'ils étaient des espions, ils devaient être constamment effrayés par les Aurors, les applicateurs de la loi et les hommes en civil du département du mystère, alors que ceux qui étaient encore loyaux envers le ministre avaient toujours peur d'être attaqués ou du moins contactés par les partisans de Voldemort. Ce qui était seulement bien fait pour eux. C'était le juste payement d'années, non, de décennies d'oppression, de fanatisme et de préjugés.
Comme attirées par un aimant, ses pensées revinrent encore une fois à la journée d'hier. A Voldemort, ses plans et ses buts. Bien sûr, il désirait la pureté du sang mais, plus que cela, il désirait la pureté de la pensée.
" Tu sais que mon père était un Moldu, " avait-il à moitié demandé, à moitié déclaré, et Severus avait acquiescé. "Alors pourquoi serais-je contre les sorciers prétendument de sang impur? Ce serait diriger mes efforts contre moi-même. Non, Severus. Mes idées sont bien plus grandes que ces petites considérations au sujet de savoir quel pedigree est plus noble. Bien sûr, la naissance est un problème, mais pas le principal-laisse cela aux Malfoys. Ils ne peuvent pas voir plus loin que leurs concepts puérils mais tu peux certainement le faire. Ce que je veux, ce que je désire vraiment, est de restituer la vieille magie élémentaire, qui n'est aucunement oubliée, mais à été complètement enterrée par des générations de lois, de ministres de la magie respectant ces lois, et de leurs petits chiens obéissants. Ils ne la comprenaient pas, donc en avaient peur, et en conséquence l'ont déclarée illégale. Les sortilèges impardonnables, les potions illicites, les charmes illégaux, restrictions, règles et dérectives. Bien sûr ceux qui ont peu d'intelligence et un esprit vascillant ont besoin d'avoir de telles restrictions auxquelles adhérer, parce que tout ce qu'ils veulent sont des certitudes. Ils aimeraient que tout ait des contours clairs, sans recoins, tout devrait être simple, compréhensible et prévisible. Mais la vie, Severus, la vie n'est pas comme cela. La magie n'est pas comme cela. La magie, la vraie magie, est si profonde que ton esprit tourne à fond quand tu ne fait qu'essayer de l'apercevoir. Il faut être fort pour supporter cela. Mais les gens ne veulent pas être forts. Ils désirent être dirigés, pour pouvoir mener leurs propres petites vies stupides et fades dans la paix et le calme. Et je les réveillerai. La plupart d'entre eux seront effrayés, et refuseront d'être réveillés. Nous n'avons besoin pas d'eux, Severus. Pendant cette première période, nous devons séparer le blé de la balle, afin de créer une génération nouvelle de sorciers à l'esprit fort et prêts à ressusciter ce qui a été déclaré mort pendant des siècles. Et c'est là que les nés de Moldus et demi-sang deviennent importants. Pense à tes camarades d'école! Ne t'es-tu pas aperçu que ceux de sang Moldu s'évertuaient plus intensément pour être reconnus? C'est le point crucial. Ils obéissent deux fois plus aux règles et sont deux fois plus obséquieux et serviles, parce qu'ils veulent désespérément confirmer qu'ils appartiennent à notre monde plus qu'à celui des moldus. Quand un sorcier sang-pur ferme les yeux, un sang-de- bourbe n'a rien de mieux à faire que de courir dénoncer. C'est pourquoi nous devons nous méfier d'eux et à moins qu'ils ne voient la vérité de nos buts, les éliminer. Ils se tiendraient sur notre chemin---les partisans les plus fidèles du ministère, disposés à défendre ce qui n'est pas vraiment à eux avec la dernière goutte de leur sang. Nous ne pouvons pas nous permettre d'en avoir trop parmi nous-oui, nous pouvons les mettre sous le sortilège d'Imperius ou leur donner de ta potion mais finalement il est mieux d'éliminer que de contrôler. Et-" il avait fait à Severus un sourire de conspirateur " Se débarrasser d'eux est une motivation valide pour mes Mangemorts oh-de-sang-si-pur. Si tu es chef, tu dois offrir à tes partisans un peu plus que simplement de la satisfaction spirituelle. Il n'y a rien de mieux pour les rassembler qu'une forte émotion qu'ils ressentent en groupe."
Et ceci, pensa Severus, montrait d'autant plus combien l'opinion que Voldemort avait de lui était haute: Non seulement il avait partagé ces idées avec lui, il n'avait non plus pas même considéré nécessaire d'inclure Severus dans ce processus de liaison, car il savait simplement que sa loyauté n'hésiterait jamais. Eh bien, il n'aurait certainement aucune raison d'être déçu ou de regretter d'avoir traité Severus Rogue différemment des autres. Avec un dernier regard dédaigneux au grouppe blotti de sorciers du ministère, Severus quitta sa table et sortit dans la lumière vive de l'été pour jeter un coup d'oeil à ses possessions terrestres.
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"Non Severus, pour la nième fois, ce n'était pas une erreur et tu ne dois pas le rembourser."
" Mais à qui est-ce? Vous n'avez pas encore répondu à cette question. A vous? A notre ami commun? Je ne peux pas simplement le prendre et arrêter d'y penser, ne comprenez-vous donc pas?"
" Toujours en train d'enquêter, n'est-ce pas ?" dit Lestrange d'un ton taquin. " mais sérieusement je te comprends. Passons simplement notre commande, et ensuite je te le dirai. Je n'ai pas encore mangé et j'ai un besoin désespéré de nourriture."
Ils commandèrent auprès de la sorcière blonde qui avait lorgné Lestrange depuis qu'ils étaient arrivés-au grand amusemement de Severus, son décolleté s'était abaissé de cinq centimètres quand elle était revenue à leur table pour apporter leurs boissons. Quand elle eut écrit leurs souhaits, avec des difficultés considérables, comme Severus s'en aperçut, et les laissa à contrecoeur, il vit que l'ourlet de ses robes révélait maintenant une paire de chevilles plutôt dodues.
" A ta santé, " dit Lestrange en levant son verre de vin blanc.
" A la vôtre, St. Jean, et merci pour tout."
Ils burent et, reposant son verre, Lestrange reprit le fil de leur conversation. " L'argent donc. Il vient des fonds de .euh, notre fraternité. Et par conséquent des coffres de ceux qui n'ont plus besoin de leur argent. Ce n'est pas pour acquitter notre ami commun de ses devoirs envers toi, en te payant pour tout ce que tu as fait, mais pour te donner une perspective sereine sur la vie, sans devoir t'ennuyer avec l'argent ou tourner et retourner chaque mornille dix fois avant de la dépenser. Tu es jeune, Severus et tu as besoin de vivre."
Severus était content d'avoir mangé suffisamment au petit déjeuner, autrement le vin en combinaison avec la chaleur de l'été lui serait immédiatement monté à la tête.
" D'accord, " dit-il , " je suppose que je peux l'accepter alors. Voulez- vous me parler de la maison?"
" Eh bien je suppose qu'il est mieux que tu la voies -Ah le déjeuner!" s'exclama Lestrange en donnant un sourire éblouissantà la serveuse, sourire qui avait simplement été dirigé vers la nourriture. Ce qui ne l'empêcha pas de prendre cela de manière personnelle et de balancer tant ses hanches que Severus craignit que sa colonne vertébrale ne se brise d'un coup sec.
Un court moment, ils furent occupés par leur nourriture, mais ensuite Severus risqua " La.euh, maison?"
" Oui, bien sûr. Désolé. J'ai été plutôt transporté de joie. Comme je le disais, ce sera mieux si tu la vois par toi-même, mais je suppose que tu l'aimeras bien. Toddlington est l'un de nous, il possède pas mal d'appartements et de maisons dans toute l'Angleterre. Celle que nous avons pensé pouvoir te convenir étant donné ta prédilection pour l'idylle rurale, n'est pas loin d'ici, dans le Chemin de la Nature. Un quartier vraiment agréable, que vous ne croiriez jamais pouvoir trouver dans Londres. C'est le repaire préféré des familles comme-il-faut avec de hauts revenus et un ou deux enfants. Chaumières, jardins, sortilèges de nettoyage de l'air, vraiment comfortable."
" Ne serait-il pas mieux que j'habite un quartier non-sorcier?"
Lestrange qui venait tout juste de mettre une fourchettée de lasagnes dans sa bouche, secoua la tête et avala. " Non, bien sûr que non. Pourquoi un sorcier choisirait-il de s'installer dans un quartier non magique? Probablement parce qu'il ne veut pas être vu par ses camarades-sorciers. Non, non, " dit-il en vidant son verre et faisant signe à la serveuse de lui en amener un autre, " C'est beaucoup moins suspicieux si tu restes parmi les nôtres."
Severus considéra ceci et s'aperçut qu'il devait être d'accord. " Encore autre chose, " dit-il, " Croyez-vous que le ministère pourrait me donner une permission spéciale pour Transplaner avant d'avoir dix-huit ans? J'ai passé tous les tests, c'est simplement une formalité maintenant. La pensée de devoir aller jusqu'à la maison de McLachlan dans le Kent tous les jours par Cheminette ne me rend pas trop heureux pour dire la vérité."
" Severus, de nos jours le ministère t'enchaîne et te bâillonne si tu ne fais que tenir ton balai de la mauvaise main. Ils sont si nerveux et tendus que je ne crois pas que tu aies une seule chance. Et cela attirerait l'attention sur toi, une attention peu désirée si je peux dire ainsi, ce qui est quelque chose à éviter absolument. Ce sera seulement pour trois mois, après tout. Et n'oublie pas que McLachlan, excentrique comme il l'est, ne tolère pas trop le traitement préférentiel des autres. Une autorisation prématurée pour Transplaner entre sans doute dans cette catégorie."
" Ce qui nous mène-"
" En effet " dit Lestrange avec un sourire, " Ce qui nous mène au sujet intéressant de McLachlan lui-même. La dernière fois que je l'ai vu remonte à huit ou neuf ans, mais je ne crois pas qu'il aura changé tant que cela à son âge. Eh bien, que puis-je te dire à son sujet?-Merci Mademoiselle, c'était vraiment d'excellent." Severus pensa que la fille allait s'évanouir. "Un café, Severus ? --Alors deux cafés s'il vous plait."
Severus se sentait agréablement étourdi par la chaleur, le vin et la nourriture et ainsi, n'était pas trop fâché par la description plutôt stérile que Lestrange lui fit de son futur instructeur.
" Tu sais " dit Lestrange, se penchant en arrière et étendant ses jambes, " il est difficile de décrire ce vieil homme. Il n'est pas très cohérent en tant que personne-demande à dix personnes qui le connaissent et tous te raconteront une histoire différente. Je m'entends tout à fait bien avec lui, probablement parce qu'il ne vivait plus avec ses apprentis dans sa maison, même de mon temps. L'avoir sur le dos vingt-quatre heures sur vingt- quatre aurait probablement produit des sentiments très différents. C'est un grand professeur cependant, jamais autoritaire mais inflexible quand il s'agit des faiblesses de ses élèves. Pas que tu en aies beaucoup, " ajouta- t-il avec un sourire. " et maintenant je suggère que nous allions voir Toddlington."
Ce qui se révéla être assez facile car M. Toddlington était si mince que, quand il ouvrait la porte seulement d'un petit centimètre pour scruter à l'extérieur, le visiteur de l'autre côté de la porte le voyait-tout entier. Cet homme-roseau était chauve, son crâne chauve poli jusqu'à renvoyer un éclat aveuglant, et il avait un nez très crochu qu'il n'aurait pas eu de difficultés à atteindre sans effort avec sa langue. Dès le moment où Severus le vit, il fut presque renversé de dégoût, mais dissimula cela prudemment. Après tout, il voulait seulement que cet homme lui loue une maison, et non le suivre jusqu'à l'autel.
L'homme-roseau était très content de voir le jeune M. Rogue, très heureux d'avoir un homme jeune si prometteur comme client, ce à quoi Severus répondit sèchement qu'il préférerait voir la maison avant d'accepter cette épithète.
" Bien sûr, bien sûr, c'est exactement ce que je voulais suggérer. Préféreriez-vous transplaner ou-"
"Non , " l'interrompit Severus, " Nous devons y aller par Cheminette, car je n'ai pas encore mon permis."
"Oui, certainement, messieurs, si vous voulez gentiment me suivre." il déguerpit dans la pièce adjacente où il alluma la cheminée. " La maison est au numéro 8, Chemin de la Nature, " continua-t-il entre beaucoup de saluts, tandis qu'il présentait la boîte de poudre de Cheminette aux deux sorciers, " Alors s'il vous-plaît-"
" Non-" cette fois ce fut Lestrange qui l'interrompit - " Allez y en premier, M. Toddlington. Après tout vous connaissez le chemin, " ajouta-t- il avec un large sourire qui masquait à peine le soupçon de l'acier dans sa voix. Avec un triste coup d'?il de côté, le sorcier mince avança dans les flammes et fut parti. " Quel rampant!" dit Lestrange avec ressentiment " Severus critique tout ce que tu peux, ou ce vieux bâtard va te plumer vivant." avec ces paroles de sagesse, il alla après M. Toddlington et Severus suivit quelques secondes plus tard.
Il était difficile de critiquer quand tout ce qu'il pouvait faire était de retenir des exclamations de pur enthousiasme. La maison était épatante. Par- dessus tout parce que ses murs semblaient se composer principalement de fenêtres. Ils étaient arrivés dans la salle de séjour, qui occupait toute la partie arrière de la maison et qui était très grande, environ six mètres sur quatre mètres cinquante, avec trois portes françaises s'ouvrant sur une terrasse, de laquelle quelques marches menaient dans le jardin. Les autres murs de la pièce n'avaient pas de fenêtre, et Severus calcula rapidement combien de livres il pourrait ranger là. Le Roseau les précéda jusqu'à l'une des deux portes, l'ouvrit et avec un geste théatral de la main, annonça " La cuisine!"
Pour Severus, elle avait l'air correcte, mais alors son expérience avec les cuisines était plutôt limitée. Ou plutôt il y avait deux extrêmes auxquels il pouvait la comparer, et rien au milieu : Hounslow Ouest et Poudlard. Celle-ci semblait être quelque part au milieu, un peu plus proche du modèle de Poudlard néanmoins. Il devait avoir eu l'air assez dubitatif, parce que Toddlington commença immédiatement à lui montrer les miracles de cette cage aux merveilles. Il misait son argent sur le mauvais cheval, néanmoins, parce que Severus ne s'intéressait pas vraiment aux cuisines. Il n'avait aucune tendance à cuisiner. Lestrange tira immédiatement parti de ceci et dit d'une voix traînante, tout en regardant paresseusement alentour comme pour détecter toutes sortes de défauts possibles, "Je suppose qu'il y a un elfe de maison ici, n'est-ce pas?"
Toddlington recula. "Eh bien. je ne sais pas vraiment -"
Lestrange se retourna et bondit. " Vous n'allez pas insinuer qu'un jeune érudit et cher ami de notre maître doit faire la cuisine et s'occuper lui- même de son linge? Vous pourriez vouloir écouter un peu plus attentivement la prochaine fois que vous recevrez des ordres."
"Je,.je " croassa le Roseau, " Ce que je voulais dire, Monsieur, est qu'il y a bien sûr un elfe de maison si M. Rogue le désire."
Severus, qui commençait à trouver ce jeu plutôt amusant, fit un clin d'?il à Lestrange dans le dos de l'autre sorcier et dit, en étouffant un bâillement, " Un elfe? Oui, bien sûr, je n'avais pas même considéré que c'était la peine de le mentionner."
Ayant ainsi perdu le premier round, Toddlington se traîna vers l'autre porte de la cuisine, qui était à gauche en entrant depuis le salon. Elle menait dans le hall d'entrée, du côté opposé duquel il y avait une autre porte, qui menait dans une petite pièce pouvant être utilisée comme bureau ou chambre d'invités, et l'escalier. Ils suivirent M. Toddlington au premier étage. En haut, il y avait deux chambres à coucher avec une salle de bain chacune, un autre bureau ou chambre d'amis et, directement au- dessus de la cuisine, une pièce qui pouvait servir de laboratoire. Pour une personne et un chat, il y avait certainement plus qu'assez d'espace.
Non seulement il y avait une abondance de lumière et d'air-un énorme soulagement après sept ans de vie dans les cachots-mais l'atmosphère était agréable et confortable. Severus se sentit immédiatement chez lui. Les planchers, les marches et les plafonds étaient en bois de bouleau, dont l'éclat argenté reflétait la lumière venant de l'extérieur, la cuisine avait des tuiles de terracotta et les deux salles de bain contenaient des très grandes baignoires. La maison avait un style presque méditerranéen et -Severus s'en aperçut soudain- cela ressemblait d'une manière ou d'une autre à une version plus élaborée de la maison de Voldemort en Albanie. S'il avait encore eu des doutes, ils auraient été balayés par cette prise de conscience. Amollir son enthousiasme au lieu de rebondir du haut en bas des escaliers devenait de plus en plus difficile. Alors il exprima la seule question qu'il avait.
" Et les meubles?" demanda-t-il, plus brusquement qu'il n'en avait eu l'intention, mais il contrôlait à peine sa voix.
A en juger du sourire et du signe de tête que Lestrange lui avait fait, cela avait été pile le bon ton.
"Eh bien, euh , nous, .euh, je, eh bien, j'avais l'intention de vous montrer la maison non meublée, parce que, vous en auriez, euh, une meilleure impression.".bégaya Toddlington.
" Comme c'est prévenant de votre part, " dit Lestrange, sa voix ruisselant de sarcasme, " Mais je suppose que vous avez conscience que cela influencera le prix, n'est-ce pas?"
" Le prix, oui, eh bien, " répondit le Roseau, hochant la tête avec tant de véhémence que, pour la seconde fois ce jour là, Severus eut peur que l'anatomie humaine puisse cèder au mouvement exagéré " Je. nous pourrions discuter de cela tout de suite, si cela vous va. Que diriez-vous de mille gallions?"
" Quoi!" s'exclama Severus, confondant le prix avec le loyer d'un mois, "Mille gallions! Maintenant vraiment-"
Il réalisa immédiatement le malentendu quand il vit que Lestrange pouvait à peine ravaler un sourire. " Vraiment, M. Toddlington, " dit-il, sa voix tremblant un peu d'hilarité réprimée, mais le sorcier ratatiné prit à l'evidence cela pour de la colère.
" Eh bien. neuf cents alors, mais c'est ma dernière proposition ou je suis ruiné."
" D'accord, " dit rapidement Lestrange, tendant sa main que Toddlington serra à contrecoeur. " Neuf cents donc. Allons signer le contrat."
Dix minutes plus tard, Severus possédait une maison, accompagnée d'une elfe de maison répondant au nom de Peggy. Elle fut immédiatement expédiée à la nouvelle maison de Severus pour faire du nettoyage de base.
" Je suggère " dit Lestrange en levant son verre de champagne, " Que pendant les premiers jours tu conjures simplement le mobilier dont tu as besoin et que tu le fixes avec un sortilège stabilisateur. Juste pour que ton lit ne se dissolve pas pendant que tu dors dedans. Après tu iras choisir ce que tu veux, en prenant ton temps."
Ils étaient assis sous un parasol chez Fortarôme, célébrant leur succès et regardant paresseusement les passants. Ou plutôt étant regardés par eux, en ce qui concernait Lestrange et la partie femelle des passants. Severus se demanda comment Tabitha réagissait à ce phénomène, même si Lestrange ne semblait pas le moins du monde intéressé. Mais ses explosions de rage jalouse chaque fois qu'une des élèves filles s'approchait de son amant étaient encore fraîches dans la mémoire de Severus.
" Vous savez "dit pensivement Severus "Cela me prendra probablement pas mal de temps avant que je sois habitué à l'idée de vraiment avoir une maison. Sans compter qu'il y a encore assez d'or dans ce coffre pour en acheter cinq autres."
" Je peux imaginer cela " répondit Lestrange, " A moins d'être né riche, devenir soudain riche doit être assez étourdissant." il posa son verre vide sur la table. " Crois-tu que je puisse te quitter maintenant? Mon frère et sa famille arriveront ce soir, alors que je ferais mieux de rentrer. J'espère que tu viendras nous voir un de ces jours, je suppose que Narcissa serait contente d'avoir quelqu'un de son âge à qui parler. Elle sera tout à fait excitée par le mariage imminent."
" Tant qu'elle ne s'attend pas à ce que je discute de la mode nuptiale avec elle." dit Severus, en se levant.
" Seule une femme avec un souhait de mourir essayerait de mentionner ce sujet en ta présence, mon cher garçon. Je t'enverrai un hibou quand tout le monde sera installé correctement. Peut-être, " ajouta-t-il avec une grimace, " que je viendrais chercher la consolation et la paix de ta maison de célibataire de temps en temps." et avec un dernier geste d'adieu, il transplana.
Severus décida qu'il pouvait tout aussi bien marcher jusqu'à sa nouvelle maison-l'entrée du Chemin de la nature était environ à cinquante mètres le long de la rue derrière une porte d'un vert brillant et à l'air innocent --- pour regarder les progrès de Peggy et s'offrir un autre tour de la maison. Puis il se rappela que ses bagages étaient encore au chaudron baveur, et décida qu'il les récupérerait tout de suite et ensuite utiliserait le réseau de Cheminette pour se rendre au numéro 8, dans le Chemin de la nature.
~~~~*~~~~
Severus n'avait jamais eu de doutes quant à la véracité des histoires d'horreur, d'abus et d'humiliation de Clarissa. Il avait vu les ecchymoses sur les bras et les jambes de la fille assez souvent après ses retours de vacances, et pour la plupart, c'est lui qui les avait guéris. Madame Pomfresh lui avait donné la recette d'un baume guérisseur qu'il avait préparé dans le laboratoire de Lestrange sous le regard interrogateur du professeur, qui savait qu'il ne fallait pas lui demander ce pour quoi il avait besoin de la préparation. Etant donné ses propriétés, il n'y avait aucun moyen de l'utiliser pour faire quelque mauvais tour, et si l'élève blessé en question choisissait de ne pas se tourner vers leur Directeur de Maison ni d'aller à l'infirmerie, poser des questions est aussi bien qu'inutile. Un Serpentard devait perdre un bras avant de se déclarer blessé et se tourner vers un professeur pour demander de l'aide.
Le seul membre de la famille Rosier duquel Severus ait déjà vu une photographie était Evan, son frère aîné, qui avait maintenant vingt-huit ans, grand et maigre comme sa soeur, avec les mêmes cheveux noirs frisés dont ils avaient hérité, comme lui avait dit Clarissa, de leur mère, mais il avait les yeux gris. Elle ne lui avait jamais montré une photo de ses parents, et d'une manière ou d'une autre Severus imaginait M. Rosier être le type-même du pervers, même s'il aurait dû savoir que de telles inclinaisons ne laissaient pas nécessairement leurs traces sur un visage humain. Son oncle n'avait certainement en rien eu l'air d'un abuseur bavant et cruel de garçons mineurs mais avait ressemblé à chaque centimètre au gentleman italien, jovial et un peu gros. Vous pouviez le voir dans les yeux si vous y regardiez de plus près, il y avait cet éclat d'avidité. seulement, il ne l'avait pas remarqué à temps.
Il ne le vit pas non plus lorsqu'il serra la main du sorcier aux cheveux bruns et aux yeux gris, qui n'était pas aussi grand que Severus l'avait imaginé, et avait l'air si ordinaire qu'il était difficile de croire que c'était lui qui avait violé sa propre fille d'innombrables fois et l'avait forcé à avaler de la Potion de Terminaison après l'avoir mise enceinte deux fois. M. Rosier était l'un des propriétaires de la compagnie Brossdur, les premiers producteurs de balais de Grande-Bretagne, et le cerveau technique du trio de propriétaires-les deux autres étant Salomon Kent, responsable du côté économique des affaires et Virginia Beckinsale, qui portait sur ses épaules la responsabilité des relations publiques de la compagnie. Rosier et Kent étaient amis de longue date, ils avaient été dans la même année à Poudlard, Rosier à Serpentard et Kent à Serdaigle, comme sa fille Edna.
Cela avait l'air si incroyablement., eh bien , bourgeois, si ordonné et cliché, pensa Severus, et néanmoins des choses épouvantables se passaient derrière cette façade si parfaitement respectable. Petite discussion gentille entre lui et le père de Clarissa, questions polies sur son avenir, compliments souriants pour ses spectaculaires A.S.P.I.Cs, présentations bien élevées son épouse et à son fils aîné. normalité, en un mot. Sauf pour Clarissa, qui était à la fois énervée et soumise, ne regardait pas Severus dans les yeux, et essayait de rester aussi loin que possible de son père. Quand elle alla chercher Esmeralda, revint dans le salon avec le chat dans ses bras et se baissa pour la poser sur les genoux de Severus, offrant ainsi à M. Rosier un aperçu à l'évidence tout à fait tentant de son postérieur, Severus attrapa d'un coup d'oeil l'expression sur le visage de son père. Il croyait ne pas être observé, car les deux autres membres de la famille avaient quitté la pièce, et ainsi n'avait pas considéré nécessaire de cacher le regard de pure lubricité duquel il entourait le corps de sa fille. Severus était content d'avoir Esmeralda qui l'accueillait avec des ronronnements et des coups de tête exubérants, car ainsi il pouvait cacher son propre embarras devant la scène.
Avec la conaissance qu'il avait, le dîner fut assez épuisant pour lui, considerant que Clarissa resta muette durant tout le repas, que parler poliment à M. Rosier demandait toute sa maitrise de lui-même, que Mme. Rosier était apparemment ailleurs, perdue dans ses pensées, et que Evan lui jetait constamment des regards significatifs-si c'était au sujet de sa prédendue relation avec Clarissa ou si cela faisait allusin à leur 'ami commun' Lord Voldemort, il ne le savait pas. Il s'excusa peu après qu'ils se soient tous levés de table avec le prétexte plausible qu'il avait de nombreuses choses à faire concernant sa nouvelle maison, et fut accompagné à la porte par Clarissa.
"C'est au numéro 8, Chemin de la Nature, viens un de ces jours, " lui murmura-t-il dès qu'ils furent hors de portée de voix du reste de sa famille. " J'ai beaucoup de choses à te dire et tu dois aussi voir la maison. Et tu pourras dire à tes parents que je t'ai demandé de m'aider à choisir les meubles-ce qui ne serait pas une mauvaise idée de toute façon."
" Ma mère ne sera pas là demain matin, " répondit-elle en chuchotant " Appelle-moi par Cheminette et demande moi de venir, pour que je n'aie pas à rester seule dans la maison avec lui."
Severus acquiesça, ramassa Esmeralda et se mit en route pour marcher jusqu'à chez lui--les Rosiers ne vivaient pas loin de sa maison, et son chat aurait fortement protesté contre un voyage par Cheminette.
Severus resta assis sur son fauteuil près de la fenêtre ouverte pendant très longtemps. Le ciel changeait déjà du noir d'encre au bleu sombre quand il alla finalement au lit, mais il y avait trop de pensées faisant la course dans sa tête pour même lui faire penser au sommeil, et encore moins pour le chercher.
Etait-il stupide ou raisonnable d'examiner sa vie quand on avait à peine dix-huit ans? Severus n'en était pas très sûr-il sentait que c'était peut- être un peu pitoyable. Mais alors il venait de fermer un livre et n'avait eu qu'un aperçu de ce qui était écrit sous la couverture de l'autre et avant de complètement ouvrir ce deuxième tome de sa vie, il voulait seulement, non, il se sentait forcé de comprendre le contenu du premier.
Etait-il déjà temps de se demander s'il avait réalisé tout ce qu'il voulait? Les signes extérieurs étant dix-sept A.S.P.I.C.s-pas exactement le score dont il avait rêvé, parce qu'il avait voulu égaler le succès de son père, mais pas mauvais non plus. La suivante, une fille de Serdaigle, en avait seulement récolté quinze. Alors, à moins de se juger trop sévèrement il pouvait être satisfait de ses succès universitaires. Il avait créé une potion dont on avait jamais entendu parler auparavant-malheureusement cela allait en rester ainsi et ne pourrait jamais être mis sur papier sur son curriculum vitae, du moins pas sur l'officiel. Et sa vie alors? S'il se disait la vérité, et c'était son intention sincère, les résultats n'étaient pas aussi splendides là. Pas suivant les critères communément appliqués, du moins. Il était complètement seul. Mme Rogue dépérissait à l'institut d'Inverness où il n'était pas allé lui rendre visite une seule fois depuis qu'elle y avait été emmenée. Pas qu'il le regrette mais c'était un fait qui devait être mentionné. Il était un Personne et resterait un Personne au cours des prochaines années, jusqu'à ce qu'il ait fini son apprentissage et soit devenu un maître de potions. Voldemort lui avait promis qu'il serait convoqué aux réunions les plus importantes des Mangemorts, bien que la convocation dusse arriver par hibou. Et il avait eu raison au sujet de Severus se sentant plus qu'humilié à la pensée que Nott, cet idiot, allait recevoir sa marque sombre dans l'avenir proche alors que lui, le brillant Severus Rogue, exhiberait un avant-bras intact, pas bien meilleur que celui d'une fille.
C'était moins la solitude que le sentiment d'un manque presque total d'orientation qui le dérangeait. Il avait passé dix-huit ans en isolement complet du monde réel et n'avait aucune idée de comment s'y déplacer. Comment était-il supposé se trouver un appartement? Quand Voldemort voulait- il qu'il contacte McLachlan? Combien d'argent y-avait-il dans son coffre? Eh bien, il était du moins facile de répondre à cette question-il irait voir cela à Gringott en tout premier lieu demain matin. Mais pour le reste, autant qu'il déteste ennuyer son tuteur avec de simples banalités, il devrait écrire à Lestrange. Severus supposait qu'il serait mieux d'avoir une idée d'où il voulait vivre avant de voir qui que ce soit qu'il devait voir pour louer un appartement. Ou une petite maison. Cette idée l'attirait beaucoup. Une petite maison avec un jardin où il pourrait cultiver ses propres herbes magiques et où Esmeralda aurait ses terrains de chasse. Oui, pensa-t-il, une chose était sûre: son chat lui manquait cruellement. Et il n'aimait certainement pas rester en chambre d'hôtel. Alors il devrait se chercher quelque chose demain, ce qui voulait dire qu'il devait écrire à Lestrange immédiatement.
Severus regarda sa montre; il était onze heures trente. Tom le barman ne serait probablement pas enchanté s'il voulait emprunter un des hiboux à courrier du chaudron baveur à une heure si tardive, mais il ne pouvait rien y faire. Priorité aux choses importantes, et tant pis pour le sommeil paisible de Tom. Il pêcha dans son coffre pour trouver du parchemin et une plume-non sans caresser tendrement ses livres rétrécis, qui avaient occupé le fond depuis très longtemps maintenant-et écrivit.
Cher St. Jean
Contrairement à ce que les gens pourraient croire, dix-sept A.S.P.I.C.s ne sont pas tout ce dont un jeune homme a besoin pour sa première sortie dans le monde. Peut-être serait-ce mieux si j'en avais seulement seize mais si je savais comment me procurer un endroit pour vivre.
Je suis sûr que vous avez beaucoup de choses importantes à faire mais pensez-vous pouvoir me dédier un peu de votre temps, pour jouer au chien d'aveugle? Je me suis rendu compte que séjourner dans des auberges n'est pas au sommet de ma liste des choses favorites à faire et ainsi je serais extrêmement reconnaissant si nous pouvions en terminer avec les problèmes de logement dès que possible.
Et je crois que je voudrais vous poser un peu plus de questions au sujet de McLachlan-je suis un peu perdu en ce qui le concerne.
En espérant avoir bientôt des nouvelles de vous, je reste
Sincèrement vôtre Severus Rogue
Comme il l'avait prévu, Tom n'était pas exactement ravi de devoir remplir la demande de hibou de son hôte peu avant minuit. Mais heureusement, le nom de Rogue rappelait encore quelque chose à ceux de sa génération, et donc il fut plus gentil que ce à quoi Severus s'était attendu.
Se sentant bien soulagé et beaucoup mieux qu'avant, Severus retourna à sa chambre et à ses réflexions, regrettant de ne pas avoir Esmeralda installée confortablement sur ses genoux, à ronronner et jouer avec ses doigts tandis qu'il restait assis à penser. Il essaya de s'imaginer il y a sept ans environ, sur le point d'entrer à Poudlard et essaya de mettre ces deux Severus Rogue l'un à côté de l'autre, afin de voir la différence. Il était plus grand maintenant, cela du moins était évident. Il avait été grand pour son âge quand il avait commencé l'école, et il était devenu un très grand homme jeune, un mètre quatre-vingt huit, et à son âge, il pouvait encore environ prévoir raisonnablement de grandir de deux ou trois centimètres. Comparé au petit bonhomme gauche qu'il avait été lors de sa première année, il avait certainement accepté son propre corps. Ses mains et pieds étaient longs et minces, mais plus trop larges. Son nez.eh bien, son visage avait changé un peu, et comme un changement vers quelque chose de pire n'avait pas été possible, cela devait avoir été une amélioration. Contrairement à beaucoup d'autres de ses pairs-il renifla en se rappelant Pettigrow, ressemblant à une des glaces les plus exotiques que composait Florian Fortarôme-il n'avait jamais eu de problèmes d'acné. Sa peau était toujours jaunâtre, mais du moins il n'avait pas eu de boutons. La prédiction qu'il s'était faite au sujet de son apparence, il y a exactement quatre ans, s'était presque révélée être exacte, bien que dans ce cas particulier il n'aurait pas eu d'objection à avoir eu tort. Il était moins laid maintenant qu'à l'âge de quatorze ans mais il ne serait jamais rien de plus qu'intéressant. Pas qu'il s'en soucie. La pensée de ne pas avoir de filles assemblées à sa porte, hurlant de rage hormonale, ne le dérangeait pas trop. Même Lucius, l'extraordinaire coqueluche de Poudlard, était devenu assez fatigué d'être pourchassé à chaque fois que ses orteils touchaient le sol hors du dortoir des garçons, sans parler de l'extérieur des quartiers de Serpentard.
Qu'y avait-il d'autre pour distinguer son moi d'aujourd'hui du Severus de première année, en dehors des changements physiques évidents? La connaissance, par-dessus tout. Il avait beaucoup appris au cours de ces années; dire qu'il avait lu la bibliothèque de Poudlard tout entière aurait seulement été une très légère exagération. Des expériences, mais surtout des expériences désagréables. D'une certaine manière, pensa-t-il, Poudlard était un microcosme qui vous enseignait les manières du monde si seulement vous étiez disposé à les apprendre. En dehors d'une certaine expérience pratique-comme par exemple les étapes nécessaires pour se trouver un appartement bien à soi, pensa-t-il avec un sourire désabusé-tout était là, particulièrement si vous étiez à Serpentard. Les hiérarchies, les alliances toujours-changeantes, les conflits, les jalousies, l'injustice, l'amour, à la fois mutuel et non réciprocité, les commérages-toute cette foire aux vanités était la même dans les murs du château antique qu'à l'extérieur. De ce point de vue, Poudlard avait été une école de la vie. Non scholae, sed vitae . en effet. Et, en restreignant ce point de vue, en faisant un autre pas vers l'objectivité, il dût convenir qu'il avait été mieux d'être Severus Rogue le Personne. Les étoiles comme Lucius ou Potter ou les filles McKinnon, n'avaient rien appris en termes de vie-ils étaient toujours manipulés avec des gants de velours et on leur épargnait les épreuves. C'était pour les perdants, les opprimés comme lui, que Poudlard devenait un camp d'entraînement pour la vie véritable. Ceci n'était pas grandement au crédit de l'école, car cela pouvait apporter quelques résultats très horribles, comme cela avait été le cas avec Patty Cropdon, une Serdaigle, qui s'est jetée de la tour d'astronomie, après avoir reçu un score de B.U.S.E.s manifestement moins brillant que celui de ses camarades de classe. Mais pour lui, la lutte continue avait mené à un aboutissement plutôt satisfaisant. Ca et ce que sa mère et son oncle lui avaient fait.
Il était resté fidèle à la promesse qu'il s'était faite à lui-même le dernier jour de ses vacances d'été trois ans auparavant: personne n'était parvenu à se frayer un chemin à travers la barrière qu'il avait érigée pour sa propre protection, personne ne s'était assez approché de lui pour avoir la moindre chance de le blesser. Même si Lestrange l'abandonnait ou le trahissait, il pourrait se débarrasser de cela d'un haussement d'épaules.
Seul Voldemort avait-eh bien, il n'avait pas brisé les murs, il les avait simplement traversés comme s'ils n'avaient pas existé, mais c'était tout à fait une autre histoire. Et donc il pensait de nouveau à Voldemort. Et il savait exactement pourquoi. Même s'il n'avait pas osé le regarder directement ---des regards de côté avaient déjà été suffisants pour le perturber profondément. Mais l'expérience lui avait enseigné que plus il reculait devant un problème, plus celui-ci était important et que cela n'avait absolument aucune utilité d'essayer de le fourrer dans un des tiroirs de son esprit. Il serait hors de vue pendant un certain temps vrai, mais ces tiroirs avaient l'habitude étrange de se rouvrir suivant leurs propres caprices et de répandre leur contenu quand il n'avait pas vraiment besoin qu'ils le fassent. Une autre chose qu'il avait apprise, et il l'avait apprise de la manière difficile. Il était mieux d'en finir avec cela maintenant. Le contact de Voldemort l'avait profondément excité.
Severus sentit sa bouche devenir sèche et il se leva pour se verser un verre d'eau. Il était toujours absolument sûr qu'il n'était pas homosexuel. Au contraire, la pensée d'un homme le touchant le faisait reculer. Seules les mains de Voldemort. Ce contact bref et presque irréel entre leurs lèvres quand il l'avait accueilli . La seule sensation à laquelle il pouvait vaguement comparer cela était l'effet des sourires de Yelena Malfoy. Ce qui, pour lui, était une preuve logique qu'il n'était pas homosexuel. Pas qu'il s'en serait inquiété mais il sentit que ce n'était pas le point clef. Etait-ce le sentiment de sécurité et de sécurité totale qui lui permettait de se détendre et d'admettre qu'il avait un corps? Alors il devrait mettre une petite annonce dans La Gazette des Sorciers « Jeune sorcier peu sûr de lui même cherche femme dominatrice Officier de l'Application de la Loi Magique pour conseils et finalement rapports sexuels. Motcode: Mangemort. » Non, pensa-t-il, avec un reniflement de dédain, certainement pas. Et si c'était le sentiment de sécurité, comment Mme Malfoy entrait elle dans l'image? Et pourquoi pas Lestrange? Il décida qu'il n'allait de toute manière pas trouver, du moins pas ce soir; pour l'instant il devrait se satisfaire d'avoir au moins admis ce fait à lui- même. Le ciel de nuit s'illuminait déjà au-dessus l'horizon, et donc il se leva finalement et alla au lit.
~~~~*~~~~
Du thé n'était pas la meilleure chose après seulement quatre heures de sommeil. Mais au moins, il pouvait le boire au lit. Severus avait complètement oublié que l'autre nuit, il avait demandé au vieux Tom de le réveiller à huit heures, une demande dont il était incapable de trouver la raison tout de suite. Son cerveau était complètement occupé par le fait d'empêcher ses paupières de se baisser, et de diriger vers ses lèvres la main qui tenait la tasse. Quand il la reposa, il vit qu'il y avait un morceau de parchemin posé sur le plateau. Espérant que le lire ne causerait pas de disfonctionnement sérieux à d'autres parties de son corps, il l'ouvrit.
Cher Severus
Non seulement ce n'est pas un problème, c'est surtout un plaisir que de t'aider à t'établir dans le monde hors de Poudlard. Comme j'imagine que tu as très peu dormi après ce que tu as certainement perçu comme un jour très mémorable, je te conseillerais de te promener d'abord un peu dans le Chemin de Traverse et de me retrouver chez Houdini pour le déjeuner à 12 heures. Ensuite, nous pourrons aller chez M. Toddlington pour voir si la maison que notre ami commun a choisi pour toi te conviendra. Tu es bien sûr, libre d'en décider autrement. Si elle est à ton goût cependant, tu pourras emménager aujourd'hui-juste pour que tu puisses avertir Tom pour la chambre.
A toi
St. Jean Lestrange
Une maison! Bien sûr, ils avaient parlé d'où Severus aimerait vivre, ou plutôt il avait dit à Lord Voldemort combien il avait détesté la maison de Hounslow Ouest et qu'il s'était tellement habitué à habiter à la campagne que la pensée de devoir habiter dans un environnement urbain était assez énervante. Seulement, cela avait semblé tout à fait improbable que son maître ait pu aller si loin, seulement pour garantir son bien-être. Severus se sentait satisfait et fou de joie sans raison. Devrait-il risquer d'écrire à Clarissa au sujet de son chat tout de suite? D'une manière ou d'une autre il ne voulait pas emménager sans elle. Et même si son séjour au chaudron baveur durait quelques jours de plus il pouvait aller la chercher- après tout, elle n'avait pas été confiée temporairement aux Rosiers parce qu'il ne pouvait pas la garder ici avec lui, mais parce qu'il n'avait eu aucune idée de ce qu'il allait faire pendant les prochains jours. Il décida d'écrire à Clarissa maintenant et d'expédier la lettre au bureau de poste par hibou après le petit déjeuner.
Chère Clarissa
Penses-tu que je puisse te déranger ce soir? J'ai beaucoup de choses à te dire et j'enlèverais aussi probablement Esmeralda. Envoie-moi un message au chaudron baveur. A toi
Severus
Se sentant beaucoup mieux après une douche approfondie-il n'avait pas abandonné son habitude d'ensorceler l'éponge-il descendit vers le pub. Bien qu'il ne mange jamais beaucoup, hier avait été un jour de jeûne presque total, et il se réjouissait par avance d'un petit déjeuner copieux.
Il ne l'avait pas remarqué l'autre jour, car la tension avait été trop grande, mais c'était une sensation très étrange que d'être assis dans une pièce avec d'autres personnes, mais tout seul, seul à une table, sans le bavardage habituel de ses camarades. Vous ne remarquiez pas combien vous aviez pris une habitude, se dit-il, jusqu'à ce que vous dussiez l'abandonner. Pas une pensée profonde, mais certainement une pensée valide. Combien de fois s'était-il plaint, silencieusement ou tout haut, du vrombissement constant des voix qui l'empêchaient de penser clairement? Combien de fois s'était-il enfermé dans un silence entêté, refusant d'être entraîné dans un bavardage insensé? Mais il y avait cette différence entre se retirer dans ses propres pensées, avec la possibilité de se re-mêler à la conversation quand il le choississait, et ne pas avoir de compagnie, même si seulement pour la repousser. Severus se maudit de ne pas avoir apporté de livre-bien que ce ne soit pas le meilleur des comportements que de lire en mangeant, cela aurait fourni un minimum de distraction.
Alors il regarda plutôt les clients du chaudron baveur. Il n'y avait pas beaucoup de clients à ce moment de la journée et de l'année, puisqu'il était trop tard pour le petit déjeuner, du moins pour ceux qui devaient travailler et trop tôt pour le déjeuner. A une table dans le coin lointain, il aperçut quatre sorciers en uniforme du ministère, parlant à voix basse et n'étant manifestement pas beaucoup à leur aise. Peu étonnant, pensa-t- il, le personnel du ministère passait des temps difficiles, quel que soit le côté duquel ils étaient. Soit ils étaient des espions, soit ils étaient loyaux au ministre, il n'y avait rien au milieu. S'ils étaient des espions, ils devaient être constamment effrayés par les Aurors, les applicateurs de la loi et les hommes en civil du département du mystère, alors que ceux qui étaient encore loyaux envers le ministre avaient toujours peur d'être attaqués ou du moins contactés par les partisans de Voldemort. Ce qui était seulement bien fait pour eux. C'était le juste payement d'années, non, de décennies d'oppression, de fanatisme et de préjugés.
Comme attirées par un aimant, ses pensées revinrent encore une fois à la journée d'hier. A Voldemort, ses plans et ses buts. Bien sûr, il désirait la pureté du sang mais, plus que cela, il désirait la pureté de la pensée.
" Tu sais que mon père était un Moldu, " avait-il à moitié demandé, à moitié déclaré, et Severus avait acquiescé. "Alors pourquoi serais-je contre les sorciers prétendument de sang impur? Ce serait diriger mes efforts contre moi-même. Non, Severus. Mes idées sont bien plus grandes que ces petites considérations au sujet de savoir quel pedigree est plus noble. Bien sûr, la naissance est un problème, mais pas le principal-laisse cela aux Malfoys. Ils ne peuvent pas voir plus loin que leurs concepts puérils mais tu peux certainement le faire. Ce que je veux, ce que je désire vraiment, est de restituer la vieille magie élémentaire, qui n'est aucunement oubliée, mais à été complètement enterrée par des générations de lois, de ministres de la magie respectant ces lois, et de leurs petits chiens obéissants. Ils ne la comprenaient pas, donc en avaient peur, et en conséquence l'ont déclarée illégale. Les sortilèges impardonnables, les potions illicites, les charmes illégaux, restrictions, règles et dérectives. Bien sûr ceux qui ont peu d'intelligence et un esprit vascillant ont besoin d'avoir de telles restrictions auxquelles adhérer, parce que tout ce qu'ils veulent sont des certitudes. Ils aimeraient que tout ait des contours clairs, sans recoins, tout devrait être simple, compréhensible et prévisible. Mais la vie, Severus, la vie n'est pas comme cela. La magie n'est pas comme cela. La magie, la vraie magie, est si profonde que ton esprit tourne à fond quand tu ne fait qu'essayer de l'apercevoir. Il faut être fort pour supporter cela. Mais les gens ne veulent pas être forts. Ils désirent être dirigés, pour pouvoir mener leurs propres petites vies stupides et fades dans la paix et le calme. Et je les réveillerai. La plupart d'entre eux seront effrayés, et refuseront d'être réveillés. Nous n'avons besoin pas d'eux, Severus. Pendant cette première période, nous devons séparer le blé de la balle, afin de créer une génération nouvelle de sorciers à l'esprit fort et prêts à ressusciter ce qui a été déclaré mort pendant des siècles. Et c'est là que les nés de Moldus et demi-sang deviennent importants. Pense à tes camarades d'école! Ne t'es-tu pas aperçu que ceux de sang Moldu s'évertuaient plus intensément pour être reconnus? C'est le point crucial. Ils obéissent deux fois plus aux règles et sont deux fois plus obséquieux et serviles, parce qu'ils veulent désespérément confirmer qu'ils appartiennent à notre monde plus qu'à celui des moldus. Quand un sorcier sang-pur ferme les yeux, un sang-de- bourbe n'a rien de mieux à faire que de courir dénoncer. C'est pourquoi nous devons nous méfier d'eux et à moins qu'ils ne voient la vérité de nos buts, les éliminer. Ils se tiendraient sur notre chemin---les partisans les plus fidèles du ministère, disposés à défendre ce qui n'est pas vraiment à eux avec la dernière goutte de leur sang. Nous ne pouvons pas nous permettre d'en avoir trop parmi nous-oui, nous pouvons les mettre sous le sortilège d'Imperius ou leur donner de ta potion mais finalement il est mieux d'éliminer que de contrôler. Et-" il avait fait à Severus un sourire de conspirateur " Se débarrasser d'eux est une motivation valide pour mes Mangemorts oh-de-sang-si-pur. Si tu es chef, tu dois offrir à tes partisans un peu plus que simplement de la satisfaction spirituelle. Il n'y a rien de mieux pour les rassembler qu'une forte émotion qu'ils ressentent en groupe."
Et ceci, pensa Severus, montrait d'autant plus combien l'opinion que Voldemort avait de lui était haute: Non seulement il avait partagé ces idées avec lui, il n'avait non plus pas même considéré nécessaire d'inclure Severus dans ce processus de liaison, car il savait simplement que sa loyauté n'hésiterait jamais. Eh bien, il n'aurait certainement aucune raison d'être déçu ou de regretter d'avoir traité Severus Rogue différemment des autres. Avec un dernier regard dédaigneux au grouppe blotti de sorciers du ministère, Severus quitta sa table et sortit dans la lumière vive de l'été pour jeter un coup d'oeil à ses possessions terrestres.
~~~~*~~~~
"Non Severus, pour la nième fois, ce n'était pas une erreur et tu ne dois pas le rembourser."
" Mais à qui est-ce? Vous n'avez pas encore répondu à cette question. A vous? A notre ami commun? Je ne peux pas simplement le prendre et arrêter d'y penser, ne comprenez-vous donc pas?"
" Toujours en train d'enquêter, n'est-ce pas ?" dit Lestrange d'un ton taquin. " mais sérieusement je te comprends. Passons simplement notre commande, et ensuite je te le dirai. Je n'ai pas encore mangé et j'ai un besoin désespéré de nourriture."
Ils commandèrent auprès de la sorcière blonde qui avait lorgné Lestrange depuis qu'ils étaient arrivés-au grand amusemement de Severus, son décolleté s'était abaissé de cinq centimètres quand elle était revenue à leur table pour apporter leurs boissons. Quand elle eut écrit leurs souhaits, avec des difficultés considérables, comme Severus s'en aperçut, et les laissa à contrecoeur, il vit que l'ourlet de ses robes révélait maintenant une paire de chevilles plutôt dodues.
" A ta santé, " dit Lestrange en levant son verre de vin blanc.
" A la vôtre, St. Jean, et merci pour tout."
Ils burent et, reposant son verre, Lestrange reprit le fil de leur conversation. " L'argent donc. Il vient des fonds de .euh, notre fraternité. Et par conséquent des coffres de ceux qui n'ont plus besoin de leur argent. Ce n'est pas pour acquitter notre ami commun de ses devoirs envers toi, en te payant pour tout ce que tu as fait, mais pour te donner une perspective sereine sur la vie, sans devoir t'ennuyer avec l'argent ou tourner et retourner chaque mornille dix fois avant de la dépenser. Tu es jeune, Severus et tu as besoin de vivre."
Severus était content d'avoir mangé suffisamment au petit déjeuner, autrement le vin en combinaison avec la chaleur de l'été lui serait immédiatement monté à la tête.
" D'accord, " dit-il , " je suppose que je peux l'accepter alors. Voulez- vous me parler de la maison?"
" Eh bien je suppose qu'il est mieux que tu la voies -Ah le déjeuner!" s'exclama Lestrange en donnant un sourire éblouissantà la serveuse, sourire qui avait simplement été dirigé vers la nourriture. Ce qui ne l'empêcha pas de prendre cela de manière personnelle et de balancer tant ses hanches que Severus craignit que sa colonne vertébrale ne se brise d'un coup sec.
Un court moment, ils furent occupés par leur nourriture, mais ensuite Severus risqua " La.euh, maison?"
" Oui, bien sûr. Désolé. J'ai été plutôt transporté de joie. Comme je le disais, ce sera mieux si tu la vois par toi-même, mais je suppose que tu l'aimeras bien. Toddlington est l'un de nous, il possède pas mal d'appartements et de maisons dans toute l'Angleterre. Celle que nous avons pensé pouvoir te convenir étant donné ta prédilection pour l'idylle rurale, n'est pas loin d'ici, dans le Chemin de la Nature. Un quartier vraiment agréable, que vous ne croiriez jamais pouvoir trouver dans Londres. C'est le repaire préféré des familles comme-il-faut avec de hauts revenus et un ou deux enfants. Chaumières, jardins, sortilèges de nettoyage de l'air, vraiment comfortable."
" Ne serait-il pas mieux que j'habite un quartier non-sorcier?"
Lestrange qui venait tout juste de mettre une fourchettée de lasagnes dans sa bouche, secoua la tête et avala. " Non, bien sûr que non. Pourquoi un sorcier choisirait-il de s'installer dans un quartier non magique? Probablement parce qu'il ne veut pas être vu par ses camarades-sorciers. Non, non, " dit-il en vidant son verre et faisant signe à la serveuse de lui en amener un autre, " C'est beaucoup moins suspicieux si tu restes parmi les nôtres."
Severus considéra ceci et s'aperçut qu'il devait être d'accord. " Encore autre chose, " dit-il, " Croyez-vous que le ministère pourrait me donner une permission spéciale pour Transplaner avant d'avoir dix-huit ans? J'ai passé tous les tests, c'est simplement une formalité maintenant. La pensée de devoir aller jusqu'à la maison de McLachlan dans le Kent tous les jours par Cheminette ne me rend pas trop heureux pour dire la vérité."
" Severus, de nos jours le ministère t'enchaîne et te bâillonne si tu ne fais que tenir ton balai de la mauvaise main. Ils sont si nerveux et tendus que je ne crois pas que tu aies une seule chance. Et cela attirerait l'attention sur toi, une attention peu désirée si je peux dire ainsi, ce qui est quelque chose à éviter absolument. Ce sera seulement pour trois mois, après tout. Et n'oublie pas que McLachlan, excentrique comme il l'est, ne tolère pas trop le traitement préférentiel des autres. Une autorisation prématurée pour Transplaner entre sans doute dans cette catégorie."
" Ce qui nous mène-"
" En effet " dit Lestrange avec un sourire, " Ce qui nous mène au sujet intéressant de McLachlan lui-même. La dernière fois que je l'ai vu remonte à huit ou neuf ans, mais je ne crois pas qu'il aura changé tant que cela à son âge. Eh bien, que puis-je te dire à son sujet?-Merci Mademoiselle, c'était vraiment d'excellent." Severus pensa que la fille allait s'évanouir. "Un café, Severus ? --Alors deux cafés s'il vous plait."
Severus se sentait agréablement étourdi par la chaleur, le vin et la nourriture et ainsi, n'était pas trop fâché par la description plutôt stérile que Lestrange lui fit de son futur instructeur.
" Tu sais " dit Lestrange, se penchant en arrière et étendant ses jambes, " il est difficile de décrire ce vieil homme. Il n'est pas très cohérent en tant que personne-demande à dix personnes qui le connaissent et tous te raconteront une histoire différente. Je m'entends tout à fait bien avec lui, probablement parce qu'il ne vivait plus avec ses apprentis dans sa maison, même de mon temps. L'avoir sur le dos vingt-quatre heures sur vingt- quatre aurait probablement produit des sentiments très différents. C'est un grand professeur cependant, jamais autoritaire mais inflexible quand il s'agit des faiblesses de ses élèves. Pas que tu en aies beaucoup, " ajouta- t-il avec un sourire. " et maintenant je suggère que nous allions voir Toddlington."
Ce qui se révéla être assez facile car M. Toddlington était si mince que, quand il ouvrait la porte seulement d'un petit centimètre pour scruter à l'extérieur, le visiteur de l'autre côté de la porte le voyait-tout entier. Cet homme-roseau était chauve, son crâne chauve poli jusqu'à renvoyer un éclat aveuglant, et il avait un nez très crochu qu'il n'aurait pas eu de difficultés à atteindre sans effort avec sa langue. Dès le moment où Severus le vit, il fut presque renversé de dégoût, mais dissimula cela prudemment. Après tout, il voulait seulement que cet homme lui loue une maison, et non le suivre jusqu'à l'autel.
L'homme-roseau était très content de voir le jeune M. Rogue, très heureux d'avoir un homme jeune si prometteur comme client, ce à quoi Severus répondit sèchement qu'il préférerait voir la maison avant d'accepter cette épithète.
" Bien sûr, bien sûr, c'est exactement ce que je voulais suggérer. Préféreriez-vous transplaner ou-"
"Non , " l'interrompit Severus, " Nous devons y aller par Cheminette, car je n'ai pas encore mon permis."
"Oui, certainement, messieurs, si vous voulez gentiment me suivre." il déguerpit dans la pièce adjacente où il alluma la cheminée. " La maison est au numéro 8, Chemin de la Nature, " continua-t-il entre beaucoup de saluts, tandis qu'il présentait la boîte de poudre de Cheminette aux deux sorciers, " Alors s'il vous-plaît-"
" Non-" cette fois ce fut Lestrange qui l'interrompit - " Allez y en premier, M. Toddlington. Après tout vous connaissez le chemin, " ajouta-t- il avec un large sourire qui masquait à peine le soupçon de l'acier dans sa voix. Avec un triste coup d'?il de côté, le sorcier mince avança dans les flammes et fut parti. " Quel rampant!" dit Lestrange avec ressentiment " Severus critique tout ce que tu peux, ou ce vieux bâtard va te plumer vivant." avec ces paroles de sagesse, il alla après M. Toddlington et Severus suivit quelques secondes plus tard.
Il était difficile de critiquer quand tout ce qu'il pouvait faire était de retenir des exclamations de pur enthousiasme. La maison était épatante. Par- dessus tout parce que ses murs semblaient se composer principalement de fenêtres. Ils étaient arrivés dans la salle de séjour, qui occupait toute la partie arrière de la maison et qui était très grande, environ six mètres sur quatre mètres cinquante, avec trois portes françaises s'ouvrant sur une terrasse, de laquelle quelques marches menaient dans le jardin. Les autres murs de la pièce n'avaient pas de fenêtre, et Severus calcula rapidement combien de livres il pourrait ranger là. Le Roseau les précéda jusqu'à l'une des deux portes, l'ouvrit et avec un geste théatral de la main, annonça " La cuisine!"
Pour Severus, elle avait l'air correcte, mais alors son expérience avec les cuisines était plutôt limitée. Ou plutôt il y avait deux extrêmes auxquels il pouvait la comparer, et rien au milieu : Hounslow Ouest et Poudlard. Celle-ci semblait être quelque part au milieu, un peu plus proche du modèle de Poudlard néanmoins. Il devait avoir eu l'air assez dubitatif, parce que Toddlington commença immédiatement à lui montrer les miracles de cette cage aux merveilles. Il misait son argent sur le mauvais cheval, néanmoins, parce que Severus ne s'intéressait pas vraiment aux cuisines. Il n'avait aucune tendance à cuisiner. Lestrange tira immédiatement parti de ceci et dit d'une voix traînante, tout en regardant paresseusement alentour comme pour détecter toutes sortes de défauts possibles, "Je suppose qu'il y a un elfe de maison ici, n'est-ce pas?"
Toddlington recula. "Eh bien. je ne sais pas vraiment -"
Lestrange se retourna et bondit. " Vous n'allez pas insinuer qu'un jeune érudit et cher ami de notre maître doit faire la cuisine et s'occuper lui- même de son linge? Vous pourriez vouloir écouter un peu plus attentivement la prochaine fois que vous recevrez des ordres."
"Je,.je " croassa le Roseau, " Ce que je voulais dire, Monsieur, est qu'il y a bien sûr un elfe de maison si M. Rogue le désire."
Severus, qui commençait à trouver ce jeu plutôt amusant, fit un clin d'?il à Lestrange dans le dos de l'autre sorcier et dit, en étouffant un bâillement, " Un elfe? Oui, bien sûr, je n'avais pas même considéré que c'était la peine de le mentionner."
Ayant ainsi perdu le premier round, Toddlington se traîna vers l'autre porte de la cuisine, qui était à gauche en entrant depuis le salon. Elle menait dans le hall d'entrée, du côté opposé duquel il y avait une autre porte, qui menait dans une petite pièce pouvant être utilisée comme bureau ou chambre d'invités, et l'escalier. Ils suivirent M. Toddlington au premier étage. En haut, il y avait deux chambres à coucher avec une salle de bain chacune, un autre bureau ou chambre d'amis et, directement au- dessus de la cuisine, une pièce qui pouvait servir de laboratoire. Pour une personne et un chat, il y avait certainement plus qu'assez d'espace.
Non seulement il y avait une abondance de lumière et d'air-un énorme soulagement après sept ans de vie dans les cachots-mais l'atmosphère était agréable et confortable. Severus se sentit immédiatement chez lui. Les planchers, les marches et les plafonds étaient en bois de bouleau, dont l'éclat argenté reflétait la lumière venant de l'extérieur, la cuisine avait des tuiles de terracotta et les deux salles de bain contenaient des très grandes baignoires. La maison avait un style presque méditerranéen et -Severus s'en aperçut soudain- cela ressemblait d'une manière ou d'une autre à une version plus élaborée de la maison de Voldemort en Albanie. S'il avait encore eu des doutes, ils auraient été balayés par cette prise de conscience. Amollir son enthousiasme au lieu de rebondir du haut en bas des escaliers devenait de plus en plus difficile. Alors il exprima la seule question qu'il avait.
" Et les meubles?" demanda-t-il, plus brusquement qu'il n'en avait eu l'intention, mais il contrôlait à peine sa voix.
A en juger du sourire et du signe de tête que Lestrange lui avait fait, cela avait été pile le bon ton.
"Eh bien, euh , nous, .euh, je, eh bien, j'avais l'intention de vous montrer la maison non meublée, parce que, vous en auriez, euh, une meilleure impression.".bégaya Toddlington.
" Comme c'est prévenant de votre part, " dit Lestrange, sa voix ruisselant de sarcasme, " Mais je suppose que vous avez conscience que cela influencera le prix, n'est-ce pas?"
" Le prix, oui, eh bien, " répondit le Roseau, hochant la tête avec tant de véhémence que, pour la seconde fois ce jour là, Severus eut peur que l'anatomie humaine puisse cèder au mouvement exagéré " Je. nous pourrions discuter de cela tout de suite, si cela vous va. Que diriez-vous de mille gallions?"
" Quoi!" s'exclama Severus, confondant le prix avec le loyer d'un mois, "Mille gallions! Maintenant vraiment-"
Il réalisa immédiatement le malentendu quand il vit que Lestrange pouvait à peine ravaler un sourire. " Vraiment, M. Toddlington, " dit-il, sa voix tremblant un peu d'hilarité réprimée, mais le sorcier ratatiné prit à l'evidence cela pour de la colère.
" Eh bien. neuf cents alors, mais c'est ma dernière proposition ou je suis ruiné."
" D'accord, " dit rapidement Lestrange, tendant sa main que Toddlington serra à contrecoeur. " Neuf cents donc. Allons signer le contrat."
Dix minutes plus tard, Severus possédait une maison, accompagnée d'une elfe de maison répondant au nom de Peggy. Elle fut immédiatement expédiée à la nouvelle maison de Severus pour faire du nettoyage de base.
" Je suggère " dit Lestrange en levant son verre de champagne, " Que pendant les premiers jours tu conjures simplement le mobilier dont tu as besoin et que tu le fixes avec un sortilège stabilisateur. Juste pour que ton lit ne se dissolve pas pendant que tu dors dedans. Après tu iras choisir ce que tu veux, en prenant ton temps."
Ils étaient assis sous un parasol chez Fortarôme, célébrant leur succès et regardant paresseusement les passants. Ou plutôt étant regardés par eux, en ce qui concernait Lestrange et la partie femelle des passants. Severus se demanda comment Tabitha réagissait à ce phénomène, même si Lestrange ne semblait pas le moins du monde intéressé. Mais ses explosions de rage jalouse chaque fois qu'une des élèves filles s'approchait de son amant étaient encore fraîches dans la mémoire de Severus.
" Vous savez "dit pensivement Severus "Cela me prendra probablement pas mal de temps avant que je sois habitué à l'idée de vraiment avoir une maison. Sans compter qu'il y a encore assez d'or dans ce coffre pour en acheter cinq autres."
" Je peux imaginer cela " répondit Lestrange, " A moins d'être né riche, devenir soudain riche doit être assez étourdissant." il posa son verre vide sur la table. " Crois-tu que je puisse te quitter maintenant? Mon frère et sa famille arriveront ce soir, alors que je ferais mieux de rentrer. J'espère que tu viendras nous voir un de ces jours, je suppose que Narcissa serait contente d'avoir quelqu'un de son âge à qui parler. Elle sera tout à fait excitée par le mariage imminent."
" Tant qu'elle ne s'attend pas à ce que je discute de la mode nuptiale avec elle." dit Severus, en se levant.
" Seule une femme avec un souhait de mourir essayerait de mentionner ce sujet en ta présence, mon cher garçon. Je t'enverrai un hibou quand tout le monde sera installé correctement. Peut-être, " ajouta-t-il avec une grimace, " que je viendrais chercher la consolation et la paix de ta maison de célibataire de temps en temps." et avec un dernier geste d'adieu, il transplana.
Severus décida qu'il pouvait tout aussi bien marcher jusqu'à sa nouvelle maison-l'entrée du Chemin de la nature était environ à cinquante mètres le long de la rue derrière une porte d'un vert brillant et à l'air innocent --- pour regarder les progrès de Peggy et s'offrir un autre tour de la maison. Puis il se rappela que ses bagages étaient encore au chaudron baveur, et décida qu'il les récupérerait tout de suite et ensuite utiliserait le réseau de Cheminette pour se rendre au numéro 8, dans le Chemin de la nature.
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Severus n'avait jamais eu de doutes quant à la véracité des histoires d'horreur, d'abus et d'humiliation de Clarissa. Il avait vu les ecchymoses sur les bras et les jambes de la fille assez souvent après ses retours de vacances, et pour la plupart, c'est lui qui les avait guéris. Madame Pomfresh lui avait donné la recette d'un baume guérisseur qu'il avait préparé dans le laboratoire de Lestrange sous le regard interrogateur du professeur, qui savait qu'il ne fallait pas lui demander ce pour quoi il avait besoin de la préparation. Etant donné ses propriétés, il n'y avait aucun moyen de l'utiliser pour faire quelque mauvais tour, et si l'élève blessé en question choisissait de ne pas se tourner vers leur Directeur de Maison ni d'aller à l'infirmerie, poser des questions est aussi bien qu'inutile. Un Serpentard devait perdre un bras avant de se déclarer blessé et se tourner vers un professeur pour demander de l'aide.
Le seul membre de la famille Rosier duquel Severus ait déjà vu une photographie était Evan, son frère aîné, qui avait maintenant vingt-huit ans, grand et maigre comme sa soeur, avec les mêmes cheveux noirs frisés dont ils avaient hérité, comme lui avait dit Clarissa, de leur mère, mais il avait les yeux gris. Elle ne lui avait jamais montré une photo de ses parents, et d'une manière ou d'une autre Severus imaginait M. Rosier être le type-même du pervers, même s'il aurait dû savoir que de telles inclinaisons ne laissaient pas nécessairement leurs traces sur un visage humain. Son oncle n'avait certainement en rien eu l'air d'un abuseur bavant et cruel de garçons mineurs mais avait ressemblé à chaque centimètre au gentleman italien, jovial et un peu gros. Vous pouviez le voir dans les yeux si vous y regardiez de plus près, il y avait cet éclat d'avidité. seulement, il ne l'avait pas remarqué à temps.
Il ne le vit pas non plus lorsqu'il serra la main du sorcier aux cheveux bruns et aux yeux gris, qui n'était pas aussi grand que Severus l'avait imaginé, et avait l'air si ordinaire qu'il était difficile de croire que c'était lui qui avait violé sa propre fille d'innombrables fois et l'avait forcé à avaler de la Potion de Terminaison après l'avoir mise enceinte deux fois. M. Rosier était l'un des propriétaires de la compagnie Brossdur, les premiers producteurs de balais de Grande-Bretagne, et le cerveau technique du trio de propriétaires-les deux autres étant Salomon Kent, responsable du côté économique des affaires et Virginia Beckinsale, qui portait sur ses épaules la responsabilité des relations publiques de la compagnie. Rosier et Kent étaient amis de longue date, ils avaient été dans la même année à Poudlard, Rosier à Serpentard et Kent à Serdaigle, comme sa fille Edna.
Cela avait l'air si incroyablement., eh bien , bourgeois, si ordonné et cliché, pensa Severus, et néanmoins des choses épouvantables se passaient derrière cette façade si parfaitement respectable. Petite discussion gentille entre lui et le père de Clarissa, questions polies sur son avenir, compliments souriants pour ses spectaculaires A.S.P.I.Cs, présentations bien élevées son épouse et à son fils aîné. normalité, en un mot. Sauf pour Clarissa, qui était à la fois énervée et soumise, ne regardait pas Severus dans les yeux, et essayait de rester aussi loin que possible de son père. Quand elle alla chercher Esmeralda, revint dans le salon avec le chat dans ses bras et se baissa pour la poser sur les genoux de Severus, offrant ainsi à M. Rosier un aperçu à l'évidence tout à fait tentant de son postérieur, Severus attrapa d'un coup d'oeil l'expression sur le visage de son père. Il croyait ne pas être observé, car les deux autres membres de la famille avaient quitté la pièce, et ainsi n'avait pas considéré nécessaire de cacher le regard de pure lubricité duquel il entourait le corps de sa fille. Severus était content d'avoir Esmeralda qui l'accueillait avec des ronronnements et des coups de tête exubérants, car ainsi il pouvait cacher son propre embarras devant la scène.
Avec la conaissance qu'il avait, le dîner fut assez épuisant pour lui, considerant que Clarissa resta muette durant tout le repas, que parler poliment à M. Rosier demandait toute sa maitrise de lui-même, que Mme. Rosier était apparemment ailleurs, perdue dans ses pensées, et que Evan lui jetait constamment des regards significatifs-si c'était au sujet de sa prédendue relation avec Clarissa ou si cela faisait allusin à leur 'ami commun' Lord Voldemort, il ne le savait pas. Il s'excusa peu après qu'ils se soient tous levés de table avec le prétexte plausible qu'il avait de nombreuses choses à faire concernant sa nouvelle maison, et fut accompagné à la porte par Clarissa.
"C'est au numéro 8, Chemin de la Nature, viens un de ces jours, " lui murmura-t-il dès qu'ils furent hors de portée de voix du reste de sa famille. " J'ai beaucoup de choses à te dire et tu dois aussi voir la maison. Et tu pourras dire à tes parents que je t'ai demandé de m'aider à choisir les meubles-ce qui ne serait pas une mauvaise idée de toute façon."
" Ma mère ne sera pas là demain matin, " répondit-elle en chuchotant " Appelle-moi par Cheminette et demande moi de venir, pour que je n'aie pas à rester seule dans la maison avec lui."
Severus acquiesça, ramassa Esmeralda et se mit en route pour marcher jusqu'à chez lui--les Rosiers ne vivaient pas loin de sa maison, et son chat aurait fortement protesté contre un voyage par Cheminette.
