Sirius se réveilla assez tard, le lendemain. Il avait eu tout de même un peu de mal à s'endormir, et avait dû prendre sa forme canine pour y parvenir. Mais il pouvait bien souffrir mille morts avant d'admettre ça en face de Lily.
Il se rendit compte que le soleil était déjà haut. Remus devait être levé, ainsi que James. Les autres… eh bien, il verrait bien une fois arrivé en bas. Il était tout de même curieux de savoir comment eux avaient réagi face à l'araignée. Il n'avait certainement rien entendu d'eux, hier soir.
Remus et James étaient assis à la table du petit déjeuner, discutant à voix basse, rigolant doucement. Ils se turent quand Sirius entra dans la cuisine, mais cela pouvait être parce que Remus était en train de boire son thé et que James venait justement de se lever pour faire griller le bacon.
- Bonjour, tout le monde, dit-il gaiement en s'asseyant à la table de la cuisine. Bien dormi ?
Il se contenta de deux grognements affirmatifs et commença à siroter son thé à son tour.
- Je trouve que l'araignée, c'était un peu de trop, hier, commenta Sirius sur le ton d'une conversation. Jusqu'aux serpents, ça allait, mais l'araignée…
Remus leva la tête avec une expression sincèrement surprise.
- L'araignée ??
- Oui, quand je suis rentré dans ma chambre, il y avait encore une énorme araignée dans mon lit… pourquoi ? Vous n'en aviez pas, vous ?
- Non, répondit James en s'asseyant à nouveau à la table. C'était peut-être un hasard ? Il y a beaucoup de bêtes, par ici…
- Ou alors, concéda Remus avec un sourire compatissant, tu n'aurais pas dû avouer à Lily que tu étais le cerveau de la plaisanterie d'hier.
- Et elle va m'en vouloir encore longtemps ? James, toi qui est notre expert en Lily ?
James échangea un regard incertain avec Remus.
- Oh, non, je ne pense pas. Elle doit s'être calmée. Peut-être. Je ne sais pas. Mais si ce n'est pas le cas, attends-toi à certains… désagréments. Elle ne va pas te lâcher de si tôt.
- Une araignée, tout de même, c'est méchant de sa part, si c'est vraiment elle qui a fait ça, dit Remus en frissonnant. Je n'aurais jamais cru ça d'elle.
Sirius les regarda attentivement, sans changer d'expression. Ils lui cachaient quelque chose… ils étaient bons acteurs, mais ils les avaient trop souvent vus mentir à des professeurs pour se laisser prendre à ce jeu lui-même. Cependant, ce n'était pas en les questionnant directement qu'il aurait une réponse. Ca devrait attendre qu'il découvre tout seul ce qu'ils tramaient dans son dos.
Il fit donc mine de n'avoir rien remarqué et continua de déjeuner en discutant de Quidditch avec ses amis.
De leur côté, Remus et James connaissaient trop Sirius pour ne pas s'apercevoir qu'il avait remarqué quelque chose. Mais s'il décidait de ne pas pousser les choses, eh bien… tant mieux pour eux, après tout.
Ils finirent leur déjeuner en jouant leurs jeux respectifs bien sagement, même lorsque Lily, puis Peter, descendirent à la cuisine à leur tour.
Un peu plus tard, Sirius sortit de la salle de bains en ruminant. Bien sûr, la maison de vacances de la famille Evans était fantastique, assez grande pour contenir les Maraudeurs (et ce n'était pas peu dire), mais tout de même, avec une seule salle de bains pour cinq personnes, ils avaient dû faire des arrangements stricts. Il aurait bien aimé savoir, en conséquence, comment il s'était débrouillé, avec tous ces arrangements, pour être le dernier à utiliser la salle de bains deux jours consécutifs. Avec Lily juste avant lui, en plus, et Lily, sans vouloir être méchant, passait un temps fou dans la salle de bains ! Il était l'heure de préparer le repas de midi ! Où était donc passée la matinée ?
Mais surtout, surtout, la jeune fille semblait prendre un malin plaisir à utiliser toute l'eau chaude disponible. Et une douche froide, même dans ce climat tropical, c'était une terrible épreuve.
Il entendit des conversations dans le salon. Ils devaient tous être là, à l'attendre. Ce n'était pas non plus sa faute si, en tant que dernier à utiliser la salle de bains, il avait aussi dû la nettoyer !
Il poussa la porte du salon, prêt à se plaindre haut et fort, et avec beaucoup d'exagérations, comme à son habitude, mais il se prit la deuxième douche froide de la matinée. Littéralement. Avec un seau particulièrement gros et lourd, par-dessus le marché. Et les rires de ses amis pour agrémenter le tout. En fait, Lily était carrément en train de devenir bleue, incapable de respirer à travers sa crise de fou rire. Remus combattait très fort sa propre envie de rire, ce qui résultait en un sourire bizarrement très carnassier.
- Je te l'avais dit, Lily, déclara James, le seul à avoir encore un semblant de sérieux sur le visage. Le haut de la porte, ce n'était pas vraiment le meilleur endroit pour poser le seau.
Remus finit par éclater de rire à son tour et Peter tomba de son fauteuil.
- Est-ce que vous avez quelque chose contre moi, aujourd'hui ? demanda Sirius, médusé. Ou alors c'est juste vraiment pas ma journée, et je vais me recoucher tout de suite pour attendre demain ?
Les expressions de ses quatre amis changèrent soudain pour un air parfaitement innocent. Il avait l'impression d'être soudain à la place de McGonagall, ou pire, Binns, lorsqu'ils mettaient le bordel dans leurs cours. Ils n'avaient jamais arrosé le professeur de Métamorphoses, cependant. Dommage.
- Te recoucher ? commenta Lily. Tu es sûr de vouloir prendre le risque ? Qui sait ce qu'il y a au fond de ton lit ?
Cette fois-ci, c'était sûr, Lily lui en voulait réellement. Mais comment était-elle parvenue à prendre les trois autres de son côté ? Sirius se sentait trahi, et très seul, tout à coup.
Il jeta un coup d'œil désabusé et implorant tour à tour à James et Remus, mais ils se contentèrent de lui adresser des sourires narquois. Evidemment, Peter se rangerait automatiquement du côté de Lily. C'était la maîtresse de maison, la "chef" du séjour. Au moins, il savait pourquoi il était le seul à avoir eu une araignée dans son lit.
- Traîtres ! lança-t-il. Je suppose qu'en plus, aucun de vous ne va me passer une serviette… sèche ?
Il montra la serviette de toilette qu'il tenait encore à la main lorsqu'il était sorti de la salle de bain, et avec laquelle il ne pouvait plus espérer se sécher. Des rires fusèrent à nouveau, et il décida de se sécher au soleil… et loin de ses soi-disant amis. Il pourrait peut-être aussi changer de chemise, et de short, tant qu'il y était.
S'il avait cru qu'il avait eu sa dose de malheurs pour la journée, il se trompait. Il semblait, ce jour-là, être le souffre-douleur particulier du hasard. Il s'étala de tout son long dans le couloir en marchant sur… une peau de banane – mais que faisait une peau de banane par terre, en plein milieu du couloir ? Quelques tiges de ronce s'étaient mystérieusement retrouvées sur sa chaise lorsqu'il s'assit à la table, à midi. Il passait toujours au moment où quelqu'un ouvrait une porte, de sorte qu'il reçut sur le nez bon nombre de portes ce jour-là.
Pour un peu, et si les blagues n'avaient pas été aussi bon enfant, Sirius se serait cru tout d'un coup un fils oublié de la lignée des Malefoy. Qu'avaient-ils à s'acharner sur lui ? Si encore ils avaient leurs baguettes et faisaient des farces normales, il aurait su comment se défendre, à quoi se préparer. Mais Lily leur fournissait une source inépuisable, semblait-il, de classiques moldus. Il ne pouvait rien prévoir. Ca pouvait lui tomber dessus à chaque coin de couloir.
Il ne fut pas mécontent de voir le soir arriver. Il n'avait pas besoin de prétexter qu'il était épuisé pour aller se coucher tôt : il l'était réellement. Il allait gentiment vérifier tous les coins de sa chambre et se coucher tranquillement, et peut-être que demain serait un autre jour, de préférence un meilleur autre jour.
- Où tu vas, Sirius ?
Il se retourna. C'était Remus, qui le regardait avec… encore ce sourire carnassier. C'était une manie, ils ne pouvaient donc pas le laisser tranquille ?
- Je vais me coucher, je suis épuisé.
- Tu ne veux pas jouer aux échecs avec moi ? implora le loup-garou.
- Tu as le choix entre trois autres adversaires, pourquoi moi ?
- Peter ne veut pas, et James et Lily sont dans un coin du salon, interdit d'approcher à moins de vingt mètres. S'il te plaît.
Remus pouvait se faire sacrément implorant, quand il le voulait. Il savait faire des yeux de chien battu bien mieux que Patmol lui-même. Une grande fierté de Remus-le-Maraudeur.
- Une seule partie, alors. Et parce qu'au point où j'en suis, je ne crains plus un peu de ridicule.
- Merci !!
Ils retournèrent dans le salon. Remus n'avait pas tort. Dans un coin sombre, assis sur un profond fauteuil, James et Lily étaient dans les bras l'un de l'autre, discutant à voix basse, échangeant parfois un baiser, totalement ignorants du monde qui les entourait. Peter était assis avec un livre au bout de la grande table. Sirius s'installa à côté de lui, en face de Remus, qui disposait déjà l'échiquier, et un paquet de dragées surprises de Bertie Crochue à côté. Peter leva un œil intéressé sur les friandises, et la partie commença.
C'était un peu déconcertant de jouer avec un jeu Moldu, au début, et c'était d'ailleurs comme ça que Lily avait réussi à battre un Remus un peu perdu au début du séjour. Grâce à ça, mais aussi parce que Lily était devenue une bonne joueuse d'échec durant ses années à Poudlard. Très différente de la petite fille de onze ans qui savait à peine comment jouer.
Remus, cependant, n'avait jamais eu aucun mal à s'adapter, quelque soit la situation. Et Sirius était loin d'être aussi bon joueur que Lily, sans parler de Remus lui-même. Ce qui expliquait qu'au bout de dix minutes, il était déjà en mauvaise posture.
- Dépêche-toi, Sirius…
- Je réfléchis ! Laisse-moi donc un peu de temps… Pouah ! Qu'est-ce que c'est que ça ? Sardine aux fraises ? Depuis quand il y a des mélanges ?
- Ce n'est pas un mélange, intervint Peter, c'est un des plats préférés des Gobelins.
- C'est répugnant… et ils ont mis ça dans des dragées surprises ?
- Sirius…
- Je joue, je joue…
Il tendit la main pour prendre une nouvelle dragée – la chance allait bien tourner un jour – mais Remus tira le sac de dragées à lui, le gardant hors de portée de Sirius, qui se leva pour essayer de l'atteindre tout de même.
- Je te donnerais les dragées lorsque tu auras joué !
- Bourreau ! Juste une !
- Pas avant que tu aies joué ! Maintenant assieds-toi et fais ton mouvement ! Je sais que ça te fait mal, mais tu n'as pas le choix ! Tu es en échec ! Regarde ton roi !
Sirius voulut se rasseoir en grommelant. Quelle ne fut pas sa surprise lorsqu'il ne rencontra que du vide là où aurait dû être sa chaise ! Il tomba sur les fesses, par terre, avec un sérieux manque d'élégance.
Le choc passé, il se rendit compte que sa chaise avait été reculée de cinq mètres derrière lui. Et il n'avait certainement pas fait ça, quelque soit la brusquerie avec laquelle il s'était levé. Son regard se fixa sur Peter qui, apparemment oublieux de l'incident, se servait à nouveau de dragées surprises. Remus le regardait avec un sourcil levé, la parfaite image de la Surprise incarnée. Il pouvait presque déjà l'entendre lui demander ce qui lui était arrivé. Mais il explosa avant que quiconque ait pu faire un commentaire.
- Ca suffit, maintenant ! Je ne vais pas rester ici et me faire avoir pour votre simple plaisir ! Je vais me coucher !
Tout le monde dans le salon se tint immobile et silencieux jusqu'à ce qu'ils entendent la porte de la chambre de Sirius claquer violemment. James et Lily se levèrent et vinrent s'asseoir à la table avec Remus et Peter, l'air gêné.
- On n'a pas été un peu trop loin, là ? demanda Remus.
- Mais non, répondit Lily. Tout est parfait, il ne reste plus qu'à tout préparer pour la journée de demain. N'oublie pas de mettre ton réveil, Peter.
- Mais…
- Pas de mais qui tienne, trancha James. On a dit qu'on le ferait, on ne va pas se défiler maintenant.
- Sirius va nous assassiner pour ça, dit pensivement Remus en rangeant ses pièces d'échecs.
- Je ne donne pas cher de notre peau, non, confirma James. Allons-y.
A/N : Je déteste les AN… hum… alors je vais faire ça vite. Désolée d'avoir mis aussi longtemps pour ce chapitre. Voilà. Avec l'université qui reprend, ça risque de recommencer. Désolée d'avance.
