Chapitre Cinq : The Potions Master (28/03/2003 upd : 10/08/2003)
– CHAPITRE CINQ –
The Potions Master
La première semaine que Rook
passa à Hogwarts fut plutôt éprouvante. Murmures
et chuchotements naissaient sur son passage où qu'il
aille, certains élèves allant même jusqu'à
faire demi-tour pour repasser devant lui et multiplier
ainsi leur chance d'apercevoir la fameuse
cicatrice. Cela était déjà assez difficile à supporter
en soi, sans y ajouter le fait que le château se
révélait être un parfait labyrinthe. D'innombrables
escaliers le constituaient, dont certains ne menaient
pas toujours au même endroit – cela dépendait
en fait des jours – et d'autres comportaient
une marche escamotable qu'il fallait se souvenir
d'enjamber. Il s'agissait heureusement
toujours de la même, quoique, parfois, les soirs
d'Halloween, elle changeât de place, histoire
de faire une bonne blague. Il y avait aussi des
portes qui refusaient parfois de s'ouvrir
selon leur humeur, et des murs déguisés en porte
qui côtoyaient des portes déguisées en mur, pour
donner le change. Il était particulièrement
difficile de se trouver des repères, car tout bougeait
sans cesse de place : les gens dans les tableaux
se rendaient visite les uns aux autres, et même
les armures grinçantes circulaient la nuit dans
les couloirs. Arriver à l'heure à son cours
était une véritable gageure.
Et il y avait aussi les fantômes…
Il n'y avait rien de plus déplaisant –
aussi désagréable qu'une douche glacée –
que de se faire traverser par un de ceux-ci en ouvrant
une porte au moment même où il passait au travers.
Les fantômes, cependant, aidaient volontiers les
nouveaux élèves de leur propre Maison à se retrouver
dans ce dédale. Nearly Headless Nick, par exemple,
le fantôme résidant à la tour des Gryffindor. C'était
le fantôme portant une fraise que les premières
années avaient déjà rencontré en compagnie du fantôme
des Hufflepuff – Fat Friar, le gros moine
–, alors qu'ils attendaient pour entrer
dans la Grande Salle. Son vrai nom était Sir Nicholas
de Mimsy-Porpington, et il devait son surnom au
fait qu'on avait essayé sans succès de le
décapiter : sa tête, malheureusement, tenait
encore par quelques bribes de peau. Elle lui retombait
parfois sur l'épaule quand il n'y prenait
pas garde, comme si elle avait été montée sur charnière.
Seul, le Bloody Baron n'aidait jamais à guider
les élèves. Pas qu'il y mit de la mauvaise
volonté, mais il aurait fallut en premier lieu que
les élèves de Slytherin osent lui adresser
la parole.
Cependant, faire partie de la
même Maison que le Bloody Baron avait aussi des
avantages car errait également dans les couloirs
une toute autre sorte de fantôme – si on pouvait
appeler cela un fantôme… – : Peeves,
le poltergeist. Peeves, à l'exception des
autres fantômes, n'étaient pas d'une
blancheur nacrée. Il avait l'apparence d'un
petit homme aux yeux méchants coiffé d'un
chapeau à clochettes coloré et portait une cravate
orange autour du cou. Il était toujours à l'affût
d'un mauvais coup pour ennuyer les élèves.
Il bombardait les nouveaux de morceaux de craie,
tiraient les tapis sous leurs pieds et ne se gênait
pas pour faire entendre des bruits particulièrement
grossiers. Mais Peeves évitaient de trop s'en
prendre aux Slytherin, car lui aussi craignait le
Bloody Baron – et le sinistre fantôme était
à peu près le seul qui eut de l'emprise sur
lui.
Un autre ennemi juré de Peeves
était Argus Filch, mais par malheur, c'était
aussi l'ennemi juré des élèves, qu'il
haïssait presque autant que le poltergeist. Filch
arpentait les couloirs à l'affût de la moindre
incartade, accompagné de sa chatte appelée Mrs Norris
– une créature grisâtre et décharnée, avec
de gros yeux globuleux comme son maître et aussi
sournoise que celui-ci. Le concierge pouvait apparaître
tout aussi soudainement qu'un fantôme devant
vous, car il connaissait les passages secrets truffant
l'école comme personne (à part peut-être les
jumeaux Weasley). Rook et Marius réussirent à se
le mettre à dos dès le premier jour. Filch les surpris
alors qu'ils essayaient d'ouvrir une
porte, qui par malchance, s'avéra être celle
ouvrant sur le couloir interdit du troisième étage.
Marius avait eu beau lui expliquer qu'ils
s'étaient perdus, il n'en voulut rien
croire, et c'est le professeur Quirrell, qui
passait par là, qui réussit à les sortir de ce mauvais
pas. Rook, quant à lui, se promit de ne plus jamais
se fier à l'albinos en ce qui concernait les
raccourcis.
Mais ce n'était pas tout,
d'arriver à trouver son chemin jusqu'à
la salle de classe. Il fallait encore arriver à
suivre les cours… Et la magie, ce n'était
pas seulement remuer une baguette magique en murmurant
des paroles bizarres. Et non…
Chaque mercredi soir, les premières
années étudiaient les étoiles et le mouvement des
planètes, observant le ciel au télescope en écoutant
les instructions du professeur Sinistra, une grande
sorcière un peu myope dans les yeux vagues
lui donnaient toujours l'air d'être un peu
dans la Lune. Trois fois par semaine, ils avaient
cours de Botanique dans les serres, à l'arrière
du château, avec le professeur Sprout, une petite
sorcière toute potelée qui leur enseignait les secrets
des plantes et des champignons. Il y avait aussi
les cours d'Histoire de la Magie, qui étaient
de loin les plus ennuyeux. Le professeur Binns était
le seul professeur fantôme de l'école. Un
soir, alors qu'il était déjà très vieux, il
s'était endormi devant la cheminée, et quand
il s'était levé le lendemain pour aller donner
son cours, il ne s'était pas rendu compte
qu'il avait laissé son corps derrière lui…
Il parlait sans cesse d'une voix basse et
monocorde, et les élèves devaient lutter pour ne
pas s'endormir. Flitwick, le professeur d'Enchantements,
était, lui, un minuscule sorcier qui devait monter
sur une pile de livres pour voir par-dessus son
bureau. Il manqua en tomber quand il reconnut Rook
à son premier cours.
Le professeur McGonagall, par
contre, qui enseignait la Métamorphose, était stricte
et intelligente, et Rook vit sa première impression
confirmée : c'était là un cours où il
ne ferait pas bon chahuter. Pour la première leçon,
le professeur leur fit une démonstration :
elle transforma son bureau en cochon, avant de lui
rendre sa forme d'origine. Mais les élèves
s'étaient vite rendu compte qu'ils étaient
encore loin d'en faire autant… Ils durent
s'exercer à essayer de changer une allumette
en aiguille, et, malgré de nombreuses explications
compliquées, aucun ne réussit à obtenir un résultat,
à l'exception de Blaise. Le petit brun,
en effet, y réussit du premier coup, étonnant
fortement le professeur McGonagall. Celle-ci montra
l'aiguille à toute la classe, faisant rougir le
petit brun jusqu'aux oreilles. Il avoua cependant
peu après à Rook, qui continuait de
s'acharner sur sa propre allumette, qu'il
n'avait strictement aucune idée de
comment il avait fait… Il fut d'ailleurs
bien incapable de renouveler son exploit.
Mais le cours que les élèves
attendaient avec le plus d'impatience était
le cours de Défense contre les Forces du Mal. Cependant,
tous furent rapidement déçu : l'enseignement
de Quirrell était loin d'être très convaincant…
La classe et son turban empestaient l'ail,
ceci, d'après les rumeurs, pour éloigner
le vampire qu'il avait rencontré en Roumanie
et qu'il craignait de voir un jour débarquer
à Hogwarts. Quant au professeur, le moindre bruit
le faisait sursauter, et il faillit s'évanouir
quand Marius fit tomber accidentellement sa baguette
à terre. Il faut dire que celle-ci, en touchant
le sol, avait claqué comme un pétard.
Enfin, le vendredi, Rook, Marius
et Blaise réussirent à trouver sans aide le chemin
vers la Grande Salle, où était servi le petit déjeuner.
'Quel cours on a, aujourd'hui ?'
demanda Rook en remplissant son assiette d'omelette.
'Cours de Potions avec le
professeur Snape, en commun avec les Gryffindor,'
répondit Blaise, qui connaissait déjà son emploi
du temps par cœur.
'Cool !' fit
Marius. 'C'est notre directeur. Il paraît
qu'il avantage tout le temps ses propres élèves,
on va pouvoir se la couler douce sans soucis…'
McGonagall, qui était la directrice
des Gryffindor, n'était pas, elle, du genre
à avantager ses élèves… ni aucun autre que
ce soit d'ailleurs. Et Marius détestait son
cours. McGonagall ne le quittait pas de l'œil
de toute l'heure, surveillant chacun de ses
gestes – ce qui était probablement très sage.
Marius avait déjà réussi – assez involontairement
pourtant – à se faire remarquer à tous les
cours qu'il avait eu, et avait dû à chaque
fois déménager au premier rang, sous la vigilance
constante et souvent soucieuse des professeurs,
craignant une quelconque catastrophe.
À ses côtés, Rook garda le silence.
Le cours de Potions… Ce serait la première
fois depuis la rentrée qu'il se retrouverait
en face du professeur Snape. Il se sentait bizarrement
un peu nerveux…
À ce moment, une centaine de hiboux
entrèrent, survolant les tables. Ils apportaient
le courrier, cherchant dans la masse des élèves
celui ou celle devant lequel ils déposeraient lettre
ou paquet. Mais soudain, il y eut un froissement
d'ailes et des hululements indignés, alors
que tous les hiboux et chouettes s'empressaient
vers la sortie. Une boule noire avait fondu au travers
d'eux comme une flèche, allant jusqu'à
pourchasser les retardataires d'un croassement
impérieux. Puis le volatile se laissa tomber en
piqué et atterri juste devant Rook, au milieu des
murmures. L'oiseau s'avéra être une
corneille, au plumage noir comme la nuit, aux yeux
brillants de malice. Elle attendit sagement, lissant
ses plumes. Tous les élèves la fixèrent, s'échangeant
des regards inquiets. Un tel oiseau, messager de
mauvaise augure, était rarement utilisé pour acheminer
le courrier… à moins que celui-ci ne fut emprunt
de mauvaises intentions, ou à la rigueur, porteur
de très très très mauvaises nouvelles. À qui donc
cet oiseau de malheur allait-il délivrer son message ?
'Salut, Jet.'
La corneille crailla lugubrement
en réponse, alors que tous regardaient à présent
Rook, qui avait parlé.
'C'est… c'est
TON oiseau ?!' s'exclama Blaise,
alors que Rook décrochait avec difficulté le message,
essayant d'éviter les coups de bec de la corneille.
'Mais… c'est
une corneille… !' fit Marius.
'Merveilleux sens de l'observation,
Marius,' rétorqua Rook, qui déchira l'enveloppe,
en sortant un mot griffonné. 'C'est
de Hagrid…'
Cher
Rook,
Je
sais que tu es libre le vendredi après-midi. Si
tu venais chez moi prendre une tasse de thé vers
trois heures ? Nous discuterons de ta première
semaine. Tu peux répondre en envoyant ta corneille.
Elle est très intelligente, car elle avait deviné
que j'allais t'écrire… mais elle
m'a quand même donné des coups de bec.
Hagrid.
Rook emprunta une plume à Blaise
pour noter sa réponse au dos du papier, puis noua
son message à la patte de sa corneille, qui ne lui
facilita pas la tâche avec ses gesticulations.
'Jet !! Allez, calme-toi…
aie ! Mais… Stupide oiseau, vas-tu…
JET !! Non, reviens !! RENDS-MOI MON BACON !!!'
Mais l'oiseau, moqueur,
le nargua un instant en tournoyant bruyamment au-dessus
de sa tête, avant de s'en aller à tire d'aile
porter son message.
Vint après le cours de Potions.
Si vraiment Snape avait l'habitude d'avantager
ses élèves, il était heureux alors que Rook ait
fait partie des Slytherin, car qui aurait pu imaginer
alors ce que cela aurait donné s'il avait
appartenu aux Gryffindor ? Rook, depuis le
banquet de début d'année, avait déjà deviné
que le professeur Snape n'appréciait pas beaucoup
sa présence. Il put se rendre compte qu'en
fait, Snape ne le supportait pas du tout.
Les élèves virent rapidement que,
tout comme le professeur McGonagall, le professeur
Snape avait le don de maintenir sans effort le silence
dans une classe. Le local, déjà, était plus que
sordide. Situé dans les cachots, les murs en étaient
couverts de bocaux de formol dont il valait mieux
ne pas s'inquiéter du contenu si on tenait
à garder son petit déjeuner. Dans ce décor froid
et repoussant, la figure blême du professeur Snape
et ces yeux noirs et vides achevaient de rendre
l'endroit tout à fait effrayant.
Snape commença par faire l'appel,
restant un instant curieusement silencieux avant
de citer le nom de Rook Sharp. Et bien que sa voix
semblât receler à ce moment là une profonde nuance
de mépris, alors que ses yeux fusillaient l'intéressé,
il ne fit aucun commentaire. Rook, lui, s'était
forcé à soutenir son regard et murmura un "présent"
étouffé, le professeur enchaînant avec l'élève
suivant sur la liste.
La suite du cours fut horrible.
Snape s'en prit de suite et ostensiblement
à Rook à l'étonnement de tous, car il était
rare – si cela était déjà arrivé d'ailleurs
– que Snape s'acharnât ainsi sur un
des élèves de sa propre Maison. Il le questionna
impitoyablement et injustement sur le contenu du
premier cours, lui reprochant de ne visiblement
pas s'être donné la peine d'ouvrir son
livre avant de venir, et alliant à ses réprimandes
quelques pointes au sujet de sa célébrité
qui, comme il le souligna, n'allait pas passer
ses examens à sa place… Tout cela était ponctué
par les ricanements de Malfoy et de ses deux sbires,
Crabbe et Goyle, à qui Snape ne fit aucune remontrance.
Rook avait bien feuilleté ses
livres dès qu'il les avait eus, mais savait
que Snape n'avait pas le droit d'exiger
de lui qu'il en ait déjà tout retenu. Aussi
soutenait-il son regard sans flancher, en répondant
simplement qu'il ne savait pas. Seules deux
autres personnes levaient la main à chaque question :
une fille de Gryffindor qui s'appelait Hermione
Granger et le petit Blaise. Mais Snape n'en
tenait aucun compte.
'Non je ne sais pas ce qui
se passe en ajoutant de la racine d'asphodèle
en poudre à une infusion d'armoise,'
fit finalement Rook, très calme mais dont une étrange
lueur brilla dans le regard. 'Mais je sais
ce que j'obtiens en y ajoutant du nitre et
du…'
'Silence !!'
Le rire qui avait commencé à fuser
chez Marius s'étrangla dans sa gorge :
Snape semblait soudain plus que furieux. Il se pencha
vers Rook, menaçant, et lui chuchota à l'oreille,
de façon à ce que le garçon fut le seul à entendre.
'Je serais bien aise à vous
voir réaliser pareille performance, Sharp, car j'aurais
dès lors l'immense plaisir de vous faire renvoyer
illico de cet établissement. Sachez qu'ici
la pratique de la Magie Noire est proscrite…
Ceci tient lieu de premier avertissement. Il n'y
en aura pas de second.'
Rook ne broncha pas et Snape se
redressa. Hermione Granger, qui s'était levée,
la main tendue au-dessus de sa tête, attendait toujours,
espérant être interrogée. Mais Snape lui intima
sèchement de s'asseoir et, effrayé, Blaise
baissa de même immédiatement sa main.
'Pour votre information
à tous, et puisque, pour ne pas changer, il semble
que je sois encore amené à enseigner à une bande
de cornichons, sachez que le mélange d'asphodèle
et d'armoise donne un somnifère si puissant
qu'on l'appelle the Draught of Living
Death. Et bien ? Qu'attendez-vous
pour noter ??!'
Il reprit ensuite chacune des
questions qu'il avait précédemment posées
à Rook, en énonçant simplement les réponses, et
la demi-heure suivante se déroula en une active
prise de notes.
Ensuite Snape répartit les élèves
deux par deux autour de leur chaudron, et leur fit
préparer une potion destinée à soigner les furoncles.
Rook fit équipe avec Marius, et Blaise se retrouva,
à son grand désappointement, avec Hermione Granger.
Il n'appréciait visiblement pas ses manières
de Mademoiselle-Je-Sais-Tout. Il semblait oublier
cependant que de ce côté, il n'avait
rien à lui envier... Pendant ce temps, Snape
passait parmi les élèves, dispensant critiques et
remontrances. Seul Malfoy n'eut aucune remarque.
Peut-être le professeur éprouvait-il pour
celui-ci quelque sympathie, ayant probablement remarqué
l'inimitié qui l'opposait à Rook.
Il y eut un dernier incident avant
la fin du cours. Un soudain nuage de fumée verte
emplit le cachot, ainsi qu'un sifflement.
Neville Longbottom, un élève de Gryffindor, avait
réussi à faire fondre son chaudron, répandant son
contenu sur le carrelage. Tous montèrent instantanément
sur leur tabouret, mais Neville resta là à gémir
de douleur : aspergé par le produit, des furoncles
commençaient à lui pousser sur les bras et les jambes.
Snape fit disparaître d'un geste de sa baguette
la potion répandue sur le sol et retira des points
à Gryffindor pour la potion ratée de Neville :
il avait ajouté les épines de porc-épic avant de
retirer le chaudron du feu. Il somma Seamus Finnigan
de le conduire à l'infirmerie. Puis, injustement,
il s'en prit à nouveau à Rook, qui avait préparé
sa potion à côté de celle de Neville et lui reprocha
de ne pas l'avoir prévenu à temps.
'Vous espériez paraître
plus brillant s'il ratait sa potion, n'est-ce
pas, Sharp ?'
Excédé, Rook ouvrit la bouche
pour répliquer, mais Marius lui tira la manche pour
l'arrêter.
'Laisse tomber… tu
ne vois pas qu'il te cherche ?'
C'était vrai, Rook devait
bien le reconnaître, Snape n'avait cessé de
le harceler depuis le début du cours, le poussant
à bout dans l'espoir de le voir répliquer,
ce qui lui aurait probablement permis de l'exclure
du cours… En remontant les escaliers, après
la fin de la leçon, Marius et Blaise se questionnaient
sur la raison qui pouvait bien pousser ainsi Snape
à s'acharner sur leur ami.
'Il te hait, on dirait…'
fit Blaise de sa petite voix fluette, en remontant
ses lunettes. 'Mais tu ne lui as jamais rien
fait, hein, Rook ?'
Mais Rook ne répondit pas. Il
croyait savoir, lui, bien précisément pourquoi le
professeur Snape ne le supportait pas…
'Au fait, c'est quoi
cette histoire de nitre dans l'infusion de
je-ne-sais-plus-quoi ?'
'Oublie-ça, Marius…'
fit sèchement Rook, semblant soudain irrité.
Et il pressa le pas, alors que
les deux autres se dévisageaient, étonné de ce mouvement
d'humeur.
Rook s'en voulait de s'être
ainsi laissé emporter, mais après un tel cours,
qui n'aurait eu les nerfs à fleur de peau ?
Snape avait failli lui faire perdre son sang-froid.
Qu'avait-il cherché en lui parlant de cette
préparation à base de nitre ? À lui démontrer
que lui aussi n'était pas en reste en Magie
Noire ? Avait-il essayé par là de remonter
dans son estime ? Rien ne prouvait que cela
ait fonctionné… Et puis, que pouvait bien
lui importer l'opinion de Snape à son sujet ?
Il n'avait rien à lui prouver… Il n'était
rien pour lui, et se fichait bien de ce qu'il
pouvait penser. Rook décida de chasser le sombre
professeur de son esprit pour le reste de la journée.
La porte s'entrouvrit, et Hagrid les laissa entrer, retenant par son collier un énorme molosse noir. Mais le chien s'échappa et sauta de suite sur Marius… lui débarbouillant les oreilles. L'animal, comme son maître, était beaucoup moins féroce qu'effrayant.
'Faites comme chez vous,' dit Hagrid en leur montrant la table où trônait un gâteau au milieu de tasses.
La cabane ne comportait qu'une seule pièce, dont un des coins était occupé par un immense lit recouvert d'une courtepointe. Des jambons étaient suspendus au plafond et un feu crépitait doucement dans l'âtre, faisant chanter une bouilloire en cuivre.
'Je vous présente Blaise,' fit Rook, alors que le petit brun s'installait à table, dévorant le gâteau des yeux.
'Ah ! T'es le p'tit Zabini, hé ? M'rappelle bien ton père… 'L'en connaît un bout sur les créatures magiques…'
'Et voici Marius…'
'Assied-toi mon garçon…' Et il l'aida à se débarrasser de Fang qui semblait vouloir lui faire la toilette entière. 'Et ta chauve-souris ? Encore en vadrouille ?'
'Oh… elle va, elle vient… Elle finit toujours par revenir.'
Le gâteau était trop cuit et trop dur, mais ils n'en dirent mot, finissant leur part jusqu'à la dernière miette. Ils lui racontèrent leur première semaine et Hagrid les écouta volontiers, ponctuant leur récit de ses propres anecdotes… Mais quand Marius remit sur le tapis le dernier cours de Potions, Hagrid leur dit de ne pas y prêter attention : le professeur Snape n'avait jamais aimé grand monde parmi ses élèves.
'Mais on dirait vraiment qu'il hait Rook personnellement !' insista le petit brun.
'C'est des bêtises. Pourquoi le haïrait-il donc ?'
Rook aurait préféré qu'on change de sujet, mais il ne put s'empêcher de voir que Hagrid avait détourné les yeux en répondant. Un soupçon le saisit. Le géant savait-il malgré tout quelque chose à ce sujet ?
'Parle-moi de ton père, Blaise,' fit alors Hagrid pour détourner la conversation. 'A-t-il eu affaire à de nouvelles créatures ?'
La discussion embraya sur le travail de Mr Zabini et Rook laissa errer son regard, rencontrant un morceau de journal posé sur la table. Il s'agissait d'un article découpé dans le Daily Prophet, le journal officiel des sorciers.
'Je ne savais pas que Gringotts avait été cambriolé…' laissa échapper Rook, les yeux sur l'article.
'Gringotts a été cambriolé ??!' s'exclama Marius. 'Dingue !! Qu'est-ce qui est arrivé aux voleurs ??'
'Rien justement. C'est ça qui est bizarre,' fit Rook.
'Ce devait être de puissants Mages Noirs !!' murmura Blaise, impressionné, alors que Hagrid ne semblait pas vraiment goûter le tour que prenait la discussion.
'Tiens !' Rook fronça les sourcils. 'Ça c'est passé exactement le jour où…'
Mais Hagrid l'interrompit à cet instant, proposant une part de gâteau supplémentaire que tout le monde refusa poliment. Cette fois, Rook sentit nettement que Hagrid fuyait son regard.
En rentrant au château, Rook demeura silencieux tout le chemin. Cet article lui donnait pas mal à réfléchir. Il avait complètement oublié cette histoire du coffre 713 et du Vous-Savez-Quoi. L'article lui avait tout remis en mémoire. Le cambriolage avait eu lieu le jour même où lui et Hagrid s'y était rendu. L'article ne disait pas quel coffre avait été forcé, mais les gobelins prétendaient que rien n'avait été volé, le coffre ayant été vidé le jour même. Le jour même. Était-ce vraiment là une coïncidence ? Quelqu'un avait-il essayé de dérober le mystérieux paquet enrobé de papier kraft ? Le propriétaire du coffre avait-il eu vent de la tentative et avait-il envoyé Hagrid récupérer le paquet juste à temps ? Et où pouvait bien être ce paquet maintenant ?
Rook se posait aussi une autre question : Hagrid savait-il quelque chose au sujet de Snape qu'il ne voulait pas lui dire ?
