Chapitre Treize : Through the Trapdoor (20/06/2003 ; upd 10/08/2003)
– CHAPITRE TREIZE –
Through the Trapdoor
Les examens commencèrent par
un temps radieux, et c'était une pitié que de devoir
s'enfermer pour les épreuves écrites dans des salles
immenses où régnait une chaleur étouffante. Tous
les élèves avaient spécialement reçu pour l'occasion
de nouvelles plumes qui avait été ensorcelées avec
un Anti-Cheating Spell et cela leur donnait un goût
effroyable quand on les suçotait à la recherche
d'un mot qui vous échappait.
Il y avait des épreuves pratiques,
aussi, bien sûr. Comme chaque année, Flitwick désespérait
de voir un jour un élève réussir à faire danser
parfaitement des claquettes à un ananas. Le pauvre
n'avait jamais pensé qu'il s'agissait peut-être
là plus d'un problème de rythme que de magie…
L'examen de Métamorphoses consistait
à transformer une souris en tabatière. Ceux qui
avaient le malheur de passer dans les derniers devaient
auparavant passer une demi-heure à essayer d'attraper
un des petits rongeurs qui commençaient à connaître
la chanson et s'enfuyaient à la vue de la moindre
baguette magique. Mrs Norris, elle, semblait follement
s'amuser à courir après des tabatières à moustaches…
L'examen de loin le plus redouté
était celui de Potions. Le fait de devoir se souvenir
de la façon dont on préparait une Forgetfulness
Potion avec Snape épiant le moindre de vos gestes
juste derrière votre dos avait le don d'en paralyser
plus d'un. Madam Pomfrey avait l'habitude de recevoir
à cette occasion à l'infirmerie nombre d'élèves
au bord de la crise de nerfs. Heureusement, un dé
à coudre de Forgetfulness Potion et il n'y paraissait
plus. Si c'était le genre d'humour qu'aimait à cultiver
Snape, bien peu l'appréciait…
Rook traversa la plupart de ces
épreuves dans un état qu'il aurait pu décrire comme
semi-comateux. S'attendre à chaque instant
à voir surgir Lord Voldemort en plein milieu de
la classe et y faire un massacre n'était pas spécialement
le meilleur moyen d'apaiser son stress. Pour ne
rien arranger, le sommeil le fuyait, sa cicatrice
l'élançant douloureusement depuis son aventure dans
la forêt. De même, ses vieux cauchemars étaient
revenus encore pires qu'avant, agrémentés cette
fois d'une silhouette encapuchonnée et ruisselante
de sang argenté.
Bien qu'ils fussent inquiets de
sa mauvaise mine et de ses traits tirés, Blaise
et Marius ne semblaient pas aussi soucieux que Rook
au sujet de la Pierre. Après tout, eux n'avaient
rien vu dans la forêt, ils n'avaient pas de cicatrice
qui les brûlait et si le retour de Vous-Savez-Qui
les terrifiait, celui-ci ne les visitait cependant
pas dans leurs rêves… Les examens étaient bien suffisants
à occuper leurs pensées pour qu'ils se soucient
en plus de ce que Snape ou n'importe qui d'autre
pouvait bien manigancer.
Enfin le dernier examen prit fin
– il s'agissait de celui du professeur Binns – et
au soulagement de ne plus devoir réviser s'ajouta
la joie d'avoir devant soit une semaine entière
encore à s'amuser avec insouciance avant d'obtenir
ses résultats.
Rook, Blaise et Marius étaient
sortis dans le parc et déambulaient ainsi au hasard.
Blaise ne pouvait s'empêcher de revenir sur sa dernière
copie, ce qui horripilait au plus haut point Marius.
Celui-ci avait fini par se jeter sur lui et s'était
mis impitoyablement à le chatouiller pour le faire
taire. Rook les regardaient tous deux avec amusement
quand son sourire s'effaça, et il porta la main
à son front. Ses amis stoppèrent de suite leur jeu.
'C'est encore ta cicatrice ?'
demanda Blaise.
'Mais non, je me suis tordu le
pied !' s'exclama Rook avec humeur. 'Bien sûr
que c'est ma cicatrice, qu'est-ce que tu crois ?!!'
Blessé, Blaise rentra la tête
dans les épaules. Rook se sentit soudain très mal
à l'aise.
'Je suis désolé,' fit-il plus
doucement en s'asseyant à côté de ses amis, sa main
frottant toujours son front. 'C'est juste que… Ça
n'arrête pas ces temps-ci…'
'Tu devrais aller voir Madam Pomfrey,'
fit Marius, qui aurait probablement pu atteindre
l'infirmerie les yeux fermés – ce qu'il avait dû
en effet faire le jour où un accident de baguette
lui avait collé un pancake sur le visage.
'Je ne suis pas malade !'
rétorqua Rook, que la douleur persistante rendait
irritable. 'Je voudrais juste comprendre ce que
ça veut dire… J'ai l'impression que c'est un signal…
que quelque chose de terrible va arriver.'
Marius et Blaise se jetèrent un
coup d'œil.
'Rook, tu sais bien que la Pierre
ne risque rien tant que Dumbledore veille sur elle…
Et rien ne dit que Snape ait finalement trouvé comment
passer devant Fluffy.'
'Sans oublier que je serais sûrement
Ministre de la Magie avant que Hagrid laisse tomber
Dumbledore,' ajouta Marius.
'Le jour où tu seras Ministre
de la Magie, je me ferais Muggle, Marius !'
fit alors Rook, et tous trois éclatèrent de rire.
Ce petit moment de gaieté avait
aidé à détendre Rook. Il laissa errer son regard
sur le paysage, passant des reflets scintillants
dansant sur la surface du lac aux arbres sombres
de la Forbidden Forest. Au loin un hibou se dirigea
hâtivement vers l'École, un message dans son bec.
Le seul à lui avoir régulièrement envoyé des lettres
étaient Hagrid, s'aperçut-il. Ses pensées se portèrent
sur le garde-chasse. Sacré Hagrid… il avait été
le premier à l'accueillir et à s'occuper de lui
à son arrivée en Angleterre. Et ses histoires de
dragons… Rook laissa échapper un sourire. Il avait
fini par l'avoir, son dragon…
Marius et Blaise sursautèrent
soudain quand Rook bondit sur ses pieds.
'Quoi ?!'
'On doit aller voir Hagrid. Maintenant !
Tout de suite !'
Rook était soudain devenu si pâle
que ses amis crurent d'abord qu'il avait une nouvelle
crise de migraine plus violente que les autres mais
le brun s'était précipité dans la direction de la
cabane du géant. Ses amis lui emboîtèrent le pas,
interdits.
'Pourquoi veux-tu voir Hagrid ?'
fit Marius quand il l'eut rattrapé.
'Tu ne trouves pas ça bizarre,
toi, que la chose que désire le plus Hagrid soit
de posséder un dragon, et que justement cette année-ci,
par hasard, il rencontre un type avec un œuf de
dragon dans sa poche ?'
'Où est-ce que tu veux en venir ?'
fit Blaise en fronçant les sourcils.
Ils avaient atteint l'orée de
la Forbidden Forest et contournèrent la cabane.
Hagrid était assis derrière, en bras de chemise,
et décortiquait des petits pois. Il les accueillit
avec un sourire.
'Hello, les garçons ! Vous
voulez kek'chose à boire ?'
Marius allait répondre avec enthousiasme
mais Rook lui coupa la parole.
'Hagrid ! Cette nuit où vous
avez gagné Norbert, est-ce que vous vous rappelez
à quoi ressemblait cet étranger avec qui vous avez
joué aux cartes ?'
'Absolument pas,' répondit distraitement
le géant. 'Il a tout l'temps gardé son capuchon
sur la tête… C'est pas si étonnant,' fit-il en voyant
leur air étonné. 'On rencontre souvent d'drôles
de gars au Hog's Head – c'est l'nom du pub au village.
Pourquoi cett'question ?'
'De quoi avez-vous parlé ensemble ?
De Hogwarts ?'
Hagrid fronça les sourcils, essayant
de se souvenir.
'Oui, j'crois bien qu'on a parlé
de Hogwarts… Il voulait savoir c'que j'faisais comme
travail. Il aimait qu'je lui parle de tout'sortes
de créatures… J'lui ai dit alors qu'j'avais toujours
rêvé d'avoir un dragon. … Heu… J'me souviens plus
trop bien, il 'arrêtait pas de m'payer à boire…
Ah oui, il m'a dit qu'il avait un œuf de dragon
et qu'y voulait bien l'jouer aux cartes. Mais il
voulait êt' sûr qu'je saurais bien m'en occuper.
Alors j'lui ai dit qu'après Fluffy, un dragon ça
d'vait pas être trop difficile à élev…'
'Vous lui avez parlé de Fluffy… ?'
le coupa Rook, essayant de garder son calme.
'Bien sûr, il était très intéressé.
J'lui ai raconté comment Fluffy pouvait être adorable,
dès qu'on savait comment l'prendre. Y suffit d'lui
jouer un peu d'musique et il s'endort tout d's…'
Hagrid sembla soudain horrifié.
'J'aurais jamais dû vous dire
ça !! Oubliez ça tout d'suite, vous entendez ?!
Hey !! Où allez-vous ?!'
Les trois garçons ne s'arrêtèrent
pour souffler que quand ils furent arrivés dans
le hall.
'Il faut prévenir Dumbledore…'
fit Blaise. 'C'était soit Snape, soit Vous-Savez-Qui
qui était sous ce capuchon, et Hagrid lui a tout
raconté quand il l'a fait boire…'
'Je veux bien,' fit alors Rook
d'une voix sardonique. 'Mais quelqu'un a-t-il la
moindre petite idée de l'endroit où se trouve le
bureau de Dumbledore ?'
Tous trois regardèrent autour
d'eux, interdits. Ils venaient de se rendre compte
à l'instant même qu'aucun d'eux ne savait où le
Directeur avait son bureau.
'Tu aurais dû faire plus de bêtises,
Marius… Peut-être y aurais-tu été envoyé un jour,
et on saurait alors où aller…'
'Ça c'est bas, Sharp, très bas…'
rétorqua Marius, qui faisait semblant d'être atrocement
vexé.
'Qu'est-ce que vous faites tous
les trois ici ?' fit alors une voix dans leur
dos.
C'était McGonagall. Elle avait
une grosse pile de livres dans les bras et les observait
d'un air soupçonneux. Trouver là trois élèves,
et des Slytherin en plus, n'était visiblement
pas pour lui plaire.
'Nous voudrions voir le professeur
Dumbledore…' fit alors Rook.
'Le professeur Dumbledore ?'
McGonagall haussa un sourcil. 'Qu'est-ce que vous
lui voulez… ?'
'Et bien… c'est… On ne peut pas
vous le dire,' tenta maladroitement Blaise.
McGonagall fronça le nez. Selon
toute vraisemblance, la réponse ne lui plaisait
qu'à moitié et reforçait sa méfiance.
'Ah vraiment ? Et bien sachez
que le professeur Dumbledore vient de partir il
y a peu. Il a reçu un message urgent du Ministre
de la Magie qui l'appelait à Londres.'
Les trois garçons pâlirent instantanément.
'Il est parti ? Mais… mais
ce que je dois lui dire est de la première importance !'
'Plus important que le Ministre
de la Magie, Mr Sharp ?' fit McGonagall, l'air
sceptique.
'C'est… c'est à propos de la Philosopher's
Stone…' finit par lâcher Rook.
Les livres que tenait le professeur
s'écroulèrent bruyamment dans le hall. Visiblement,
elle ne s'était pas attendue à cela.
'Comment êtes-vous au courant ?'
fit-elle sèchement.
'Professeur, quelqu'un cherche
à voler la Pierre…'
'Personne ne va voler la Pierre,'
le coupa-t-elle. 'Elle trop bien protégée. Je ne
sais pas comment vous avez fait pour apprendre tout
ça, mais ce ne sont pas vos affaires… Maintenant
retournez tous les trois dehors, au soleil !'
Et après avoir repris ses livres,
elle s'éloigna de son petit pas sec.
Mais il était hors de question
qu'ils ressortent.
'C'est cette nuit que cela va
se passer,' fit Rook. 'Snape va profiter de l'absence
de Dumbledore pour voler la Pierre. Je suis sûr
que c'est lui qui a envoyé ce message, c'est un
faux ! Il a tout manig…'
Mais Blaise laissa échapper un
cri, l'interrompant. Rook et Marius se retournèrent
d'un seul mouvement. Snape était derrière eux.
'Bonjour…' fit-il d'une voix onctueuse.
'Et bien et bien… Que faites-vous donc à traîner
ici tous les trois, alors qu'il fait si bon dehors ?
Vous devriez faire attention… On pourrait croire
que vous complotez encore quelque mauvais coup.
Il me déplairait tout particulièrement
que vous fassiez encore perdre des points à notre
Maison…'
Snape les fusilla du regard et
Rook eut du mal à ne pas baisser les yeux. Cela
semblait être devenu un jeu entre eux, Snape s'efforçant
de lui faire baisser la tête et Rook résistant de
toute la force de son orgueil.
'C'est le dernier avertissement,
Sharp,' susurra le professeur d'un air inquiétant.
'Si je vous surprends encore à vous promener dans
les couloirs la nuit, je vous assure que je vous
ferais renvoyer illico… Je vous souhaite une bonne
journée.'
Snape fit demi-tour et s'éloigna,
les pans de sa longue cape noire flottant derrière
lui.
Les trois garçons avaient fait
mine de retourner dans le parc, mais s'étaient arrêtés
en haut des marches de pierre.
'Voilà ce qu'on va faire,' fit
Rook. 'On va se cacher près du couloir interdit
et surveiller quiconque s'en approche…'
'Et si Snape vient ?' demanda
Blaise avec un tremblement dans la voix.
'On avisera à ce moment-là…'
Mais ils ne purent mener à bien
leur plan, car à peine eurent-ils atteint le troisième
étage que McGonagall les surprit et elle n'eut aucun
mal à deviner ce qui leur avait trotté dans la tête.
'Croyez-vous vraiment que vous
serez plus difficile à passer que toute une série
d'enchantements ?' tonna-t-elle. 'Cessez de
vous occuper de cette histoire ! Si je vous
surprends encore à traîner dans le coin, j'en réfèrerais
au Directeur de votre Maison !'
Ils ne se firent pas prier pour
filer, et regagnèrent leur salle commune. Celle-ci
était presque déserte et ils s'isolèrent dans un
coin, ne souhaitant pas être dérangés. La précaution
était cependant inutile, les autres Slytherin leur
faisaient en effet toujours la tête. Même la bande
de Malfoy avait renoncé à surveiller le moindre
de leur mouvement et les ignorait royalement.
'Il ne nous reste guère de solution…'
murmura Rook, le visage sombre mais décidé.
Il leva les yeux sur ses amis
et ceux-ci furent surpris de les voir s'éclairer
d'une étrange lueur.
'Ce soir, je descendrais par la
trappe et je m'emparerais de la Pierre avant lui…'
'T'es complètement cinglé !'
s'exclama Marius.
'Tu as entendu Snape et McGonagall,'
s'écria Blaise à son tour. 'Tu vas te faire renvoyer !!'
'Mais quelle importance !'
siffla alors Rook d'une voix âpre. 'Vous ne comprenez
toujours pas ? Si Snape réussit à prendre la
Pierre, alors Voldemort retrouvera toute sa puissance !
Vous vous rendez compte de ce que ça veut dire ?!
Tout redeviendra comme avant !' Les
deux autres se tassèrent sur leur siège. 'Je ne
peux pas laisser faire ça ! Et je ne vais pas
attendre tranquillement qu'il vienne me tuer. Je
veux tenter ma chance ! Je descendrais par
cette trappe et personne, même pas vous, ne pourra
m'en empêcher…'
Puis il ajouta, les dents serrées,
la haine brillant dans ses yeux : 'Ce monstre.
A tué. Ma mère…'
'Je comprends,' fit alors Marius,
en baissant le regard.
La voix de Rook s'adoucit, mais
elle n'avait rien perdu de sa détermination.
'Je prendrais l'Invisibility Cloak.
C'est heureux que je l'ai récupérée…'
'Elle arrivera à nous couvrir
tous les trois ?' fit alors la petite voix
flûtée de Blaise.
Rook le fixa soudain, les yeux
écarquillés.
'Tous… tous les trois ?'
'Bien sûr, crétin ! Tu crois
peut être qu'on va te laisser y aller tout seul ?'
fit alors Marius d'un ton enjoué. 'Tu sais bien
que sans nous, t'es incapable de faire quoique ce
soit…'
Rook ne releva pas. Une étrange
chaleur l'avait envahi, et son cœur se remplit d'espoir.
C'était étrange comment le simple fait de savoir
ses amis à ses côtés pouvait lui donner soudain
l'impression d'être quasi invincible…
Lentement la salle se vida, les élèves regagnant leur dortoir.
Quand le dernier quitta la pièce, Rook monta silencieusement chercher sa Cape. Il ne tenait pas à réveiller Malfoy, Crabbe et Goyle. Quand il redescendit, rien n'était venu troubler les ronflements sonores qui emplissaient le dortoir. Mais l'obscurité qui y régnait l'avait empêché de voir qu'en fait, seuls deux des trois lits étaient occupés.
'On devrait essayer la Cape ici,' murmura Rook. 'Pour vérifier qu'elle nous couvre bien. Je n'aimerais pas voir la tête de Filch s'il surprend un de nos pieds se promener dans…'
'Qu'est-ce que vous êtes encore en train de mijoter… ?' fit alors une voix traînante qui les fit sursauter.
Malfoy sortit de derrière un fauteuil, les toisant avec mépris. Rook dissimula de suite la Cape derrière lui.
'Vous vous apprêtiez encore à sortir, pas vrai ? À la chasse au dragon, ou aux vampires… Vous trouvez que vous n'avez pas encore eu assez d'ennui comme ça ?'
'Mêle-toi de ce qui te regarde Malfoy !' claqua le voix de Marius.
'Mais ça me regarde justement, Nott ! C'est aussi à ma Maison que vous allez encore faire perdre des points si vous vous faites prendre…'
Tout en parlant, Malfoy s'était glissé entre eux et le passage secret du mur.
'Qu'est-ce que tu comptes faire pour nous en empêcher, Malfoy ?' fit alors Rook, qui avait pris un air menaçant.
'Mais rien…' ricana le blond. 'Je vais juste aller me promener aussi… du côté du bureau du porfesseur Snape par exemple…'
'Ça je ne crois pas,' fit alors Marius d'une voix douce.
'Ah non ?' le toisa Malfoy, en fronçant ses pâles sourcils.
'Malfoy… ?'
'Qu'est-ce que tu veux, Nott ? Me supplier de me taire… ?'
'Oh non. Je voulais juste te dire que… je ne suis absolument pas… mais alors là, pas du tout… désolé… de faire ça !'
Et sans prévenir, Marius sortit sa baguette de sa poche et la brandit vers Malfoy, criant dans le même mouvement : 'Petrificus Totalus !'
Les bras de Malfoy se joignirent soudain à ses flancs, ses jambes se collèrent ensemble et son corps se rigidifia. Il vacilla un instant avant de tomber lourdement face en avant. Blaise se précipita et le retourna. Les lèvres du blond étaient collées ensemble, l'empêchant de parler, et seuls ses yeux pouvaient encore bouger. Ils roulaient en tout sens en jetant des regards mi-furieux mi-effrayés.
'Marius, qu'est-ce que t'as fait ?!'
'C'est le Body-Bind Curse,' fit Marius, les yeux écarquillés. 'Wow !! Mais ça a marché !! J'ai lancé un sort et ça a marché !!!'
'Excellent, Marius…' fit Rook en lui tapotant l'épaule. 'Maintenant on y va… On n'a plus de temps à perdre.'
Et il les entraîna dehors. En passant auprès de son éternel ennemi, Marius ne put s'empêcher de se pencher.
'On viendra te délivrer plus tard, Draco, my Dear…' fit-il d'un air faussement désolé. 'Ou… peut-être pas…' ajouta-t-il avec un clin d'œil perfide.
Si Malfoy avait pu crier, même Peeves aurait appris quelques mots de vocabulaire…
Il y eut une deuxième alerte quand ils atteignirent l'escalier menant au troisième étage. Peeves étaient là, flottant dans les airs. Ils faisaient des plis dans le tapis afin d'y faire trébucher les élèves. Il se redressa soudain, clignant ses petits yeux méchants.
'Qui est là ?' cria-t-il. 'Je sais qu'il y a quelqu'un… même si je ne peux pas vous voir…'
Les garçons stoppèrent et retinrent leur souffle. Ils firent précipitamment machine arrière et retournèrent dans le couloir. Plus loin, Peeves grommela encore quelques instants, soupçonneux, mais n'ayant plus rien entendu, il finit par reprendre sa besogne malintentionnée.
'Qu'est-ce qu'on fait ?' murmura Blaise.
'Va falloir faire un détour', grogna Rook, que ce contre-temps irritait.
Ils firent lentement demi-tour, toujours dissimulés sous la cape quand soudain quelque chose d'argenté leur passa au travers, leur glaçant les sangs. Tous trois stoppèrent instantanément, pétrifiés. Ils tournèrent lentement leur tête vers le fantôme qui venait de les traverser. Celui-ci avait dû se rendre compte de l'étrangeté de l'affaire, car il avait stoppé net. Lentement il se retourna à son tour, une expression de profonde perplexité sur sa figure hâve et blême. Blaise grinça des dents. C'était le Bloody Baron.
Le fantôme des Slytherin resta longtemps immobile, fronçant légèrement ses sourcils au-dessus de ses yeux caves, fouillant le vide devant lui. Puis, sans qu'aucun changement d'expression ne se marque sur ses traits figés, il ânonna, d'une voix sinistre et sans timbre :
'Jeunes
Slytherin en vadrouille
En
quête d'un coup pendard
Ne
craignez plus les embrouilles
Je
m'occupe de ce mouchard…'
Ils entendirent comme un hoquet étranglé quand l'esprit frappeur se rendit compte de la présence du redouté fantôme. L'attitude de celui-ci changea du tout au tout, se faisant plus humble, enjôleuse… Peeves s'excusa de façon obséquieuse de s'être trouvé ainsi si malencontreusement sur le chemin de sa Sanglante Seigneurie, pour finir par s'embrouiller dans ses flatteries et disparaître avec un petit pop.
Sous la Cape, Rook, Blaise et Marius étaient toujours figés. Le Bloody Baron les avait vus… Ou du moins, il les avait identifiés comme des Slytherin. Et loin d'en référer à Filch, Snape ou quiconque, il les avait aidés à se débarrasser de Peeves. Mais ce n'était pas cela qui les avait le plus confondus.
Le Bloody Baron s'exprimait en faisant des vers… !
Mais même Marius n'aurait jamais osé en rire.
Une fois Peeves hors du chemin, le Bloody Baron avait continué sa promenade nocturne sans plus se soucier d'eux. Ils s'empressèrent donc dans les escaliers et enfin arrivèrent devant la porte du couloir interdit. Ce fut pour découvrir qu'elle était déjà entrouverte.
'Snape est arrivé avant nous…' fit Rook d'une voix sombre.
Ils restèrent un instant indécis, contemplant la porte.
'Il est encore temps,' reprit Rook. 'Si vous avez changé d'avis, je ne vous en voudrais pas…'
'Tu vas arrêter de dire des bêtises et pousser cette porte, oui ?' lui rétorqua Marius. Et les trois garçons, toujours sous la Cape, s'avancèrent.
Devant eux, Fluffy s'agita, tendant ses têtes dans leur direction. Il ne pouvait pas les voir, mais ses trois fois deux narines frémissaient dans l'air… À ses pieds gisait une harpe.
'C'est sûrement Snape qui l'a apportée avec lui. Apparemment, Fluffy se réveille dès qu'on arrête de jouer…'
'On fait comment nous ? Vous croyez que je peux essayer de chanter ?' proposa Marius.
'Je ne crois pas,' fit précipitamment Blaise. 'Je pense que Fluffy ne s'endort que quand il entend quelque chose d'harmonieux…'
Rook se mordit les lèvres pour ne pas rire alors que Marius se retournait vivement vers Blaise.
'Est-ce que tu veux dire par là que je chante faux ??!'
'Mais non, Marius, tu as une très jolie voix,' fit Rook. 'Entre le craillement de Jet et le couinement de Scabbers, je dirais…'
'Avec comme un soupçon du miaulement de Mrs Norris', ajouta ingénument Blaise.
'Il est juste malheureux que tu ne chantes pas dans les ultra-sons comme Shadow…' l'acheva un Rook pince-sans-rire.
Marius prit une mine affreusement vexée : 'Je vous déteste…'
Rook porta sa main à son cou, sortant un pendentif de sous sa robe : le médaillon que lui avait offert Ariella pour Noël. Il l'entrouvrit doucement, et après un déclic, des notes légères en fusèrent. Fluffy cessa immédiatement de grogner. Ses six yeux clignèrent, puis l'animal s'affaissa, tombant profondément endormi.
Les trois garçons s'extirpèrent de la Cape, que Rook plia soigneusement pour la déposer dans un coin. Son médaillon égrenant toujours la discrète mélodie, ils s'approchèrent du terrible gardien, qui ronflait maintenant à ne plus faire trembler que les murs. Marius s'approcha de la trappe et empoigna l'anneau qui y était scellé. Avec un grincement, le panneau s'ouvrit, révélant un puits profond et obscur.
'Bon, ben… Pas d'échelle, pas de corde… je suppose qu'on doit sauter…' fit le garçon.
'Je passe le premier,' fit péremptoirement Rook en donnant son pendentif à Blaise.
Il prit une inspiration et s'assit au bord de la trappe. On ne voyait rien à l'intérieur… le fond était indiscernable.
'S'il m'arrive quoi que ce soit,' fit-il. 'Vous filez envoyer un hibou à Dumbledore, c'est compris ?'
Les deux autres hochèrent la tête. Rook jeta un dernier regard au fond de l'abîme où battaient ses pieds et il sauta.
Il était extrêmement désagréable d'ainsi tomber dans le vide, quand ni les murs ni rien d'autre autour de vous n'était perceptible. Impossible de savoir si le sol se rapprochait, ni quand se préparer à l'atterrissage… Il y eut juste un léger FLUMP quand Rook s'enfonça dans quelque chose de mou. Il faisait trop sombre pour voir sur quoi il était tombé, mais au toucher, cela ressemblait à une sorte de plante…
'C'est bon !' cria-t-il. 'Vous pouvez venir !!'
D'en bas, le carré de la trappe ne paraissait pas plus grand qu'un dé à coudre. Il entendit le déclic du médaillon que l'on refermait, et Fluffy poussa un grognement. Mais les deux autres avaient déjà sauté. La plante – si c'en était bien une – tressaillit quand ils l'atteignirent à leur tour.
'Qu'est-ce que c'est que ce truc ?' grogna Marius en gigotant.
'Aucune idée… Ça a dû être mis là pour adoucir la chute… Qu'est-ce que… Nom d'un serpent !'
'Quoi ?'
'Je ne peux plus bouger !!' s'exclama Rook.
Sans qu'il s'en rende compte, la plante avait commencé à l'enlacer de ses vrilles, longues et puissantes comme des tentacules. Il les sentait maintenant s'enrouler autour de ses bras et de son torse, resserrant de plus en plus leur prise. À entendre les exclamations étouffées de ses amis, elle avait entrepris le même travail avec eux.
'Arrêtez de bouger !' fit alors Blaise. 'C'est un Devil's Snare !!'
'Merci beaucoup, Blaise… Maintenant au moins, je sais ce qui essaye de m'étouffer !' lâcha Marius, d'une voix légèrement stressée.
'Comment faire pour s'en débarrasser… ?' articula Rook, qui commençait à avoir du mal à respirer et s'efforçait de garder son calme.
'Qu'a dit Madam Sprout, encore ?…' marmonnait le petit brun.
'Blaise, dépêche-toi !'
'Ça aime l'humidité… et l'obscurité… Marius !! Tu sais attraper ta baguette ? Tes petites flammes vertes, vite !!'
'Ma baguette, ma baguette, t'en as de bonnes toi…' grogna Marius en gesticulant… 'Ça y'est je l'ai !'
Immédiatement, un éclat verdâtre jaillit de son côté alors que les petites flammes crépitaient joyeusement… À leur contact, les vrilles se déroulèrent, se rétractant comme des serpents. Dès qu'il fut libéré, Marius s'empressa de venir aider ses amis…
'Si c'est ça le petit tour de Sprout, je me demande ce que nous réservent les autres,' grommela-t-il.
Ils s'engagèrent alors dans un tunnel qui s'enfonçait de plus en plus dans la terre. Bientôt ils discernèrent devant eux une lueur et un bruissement curieux qui s'amplifiait au fur et à mesure qu'ils approchaient. Une autre pièce s'offrit à leur vue, avec un plafond à volutes très haut. On y voyait comme en plein jour et une myriade de ce qui leur sembla des petits oiseaux brillants la parcourait en tous sens. En face, il y avait une grande porte en bois.
'Vous croyez qu'ils vont nous attaquer pour nous empêcher de passer ?' fit Blaise.
'On va voir… Tous les trois en même temps. Trois… deux… un. Go !'
Ils se précipitèrent, la tête courbée, et se protégeant de leurs mains, mais ils arrivèrent sans encombre de l'autre côté. Marius fit tourner la clinche, mais la porte ne bougea pas.
'C'est verrouillé…'
Rook et Marius baissèrent les yeux sur Blaise.
'Alohomora,' fit le petit garçon en brandissant sa baguette.
Marius tenta à nouveau d'ouvrir, mais sans succès.
Rook s'était retourné, observant la multitude de petits oiseaux scintillants.
'Ils doivent bien être là pour quelque chose, non ?' fit-il quand les autres lui jetèrent un regard intrigué.
Rook fronçait les sourcils, tentant de suivre chaque mouvement des volatiles… Un sourire éclaira son visage.
'Ce ne sont pas des oiseaux, ce sont des clés ailées ! Il faut attraper la clé qui ouvre la porte…'
'Ah oui ? Et comment on fait ça ? Tu sais voler, toi ?' fit alors Marius.
'Regardez ! Là ! Des balais !' s'exclama Blaise.
'Tout a été prévu, mon cher Marius,' sourit Rook, mais il remarqua alors la mine défaite de son ami. 'Euh… Toi, tu restes et tu surveilles la porte, d'accord ?'
Marius hocha vivement la tête. Sa dernière aventure sur balai l'avait un peu refroidi…
Blaise n'était pas très habile non plus sur un balai – en fait, il avait un peu le vertige – mais au moins lui pouvait voler plus de cinq minutes sans se retrouver par terre. Sur les indications de Rook, il se contenta donc de rabattre les clés d'un endroit à l'autre, sans s'élever plus de 1 mètre 50 du sol. Rook se chargeait d'attraper la clé. Mais comment déterminer laquelle était la bonne ?
'C'est sûrement une vieille clé à l'ancienne, en argent comme la poignée,' cria Marius.
Sur son balai, Rook se sentait dans son élément. Après tout, cela ne semblait pas plus difficile que d'attraper le Snitch au cours d'un match de Quidditch… Le garçon jetait des regards partout, essayant de repérer la bonne clé. Les entraînements et les matchs avaient eu au moins cela de positif qu'ils avaient renforcé son acuité visuelle. Soudain, dans un tourbillon de clés enchantées, il la vit. Elle avait une aile tordue, comme si quelqu'un l'avait déjà attrapée… Rook empoigna le manche de son balai et plongea. Dès l'instant où elle s'était sentie repérée, la clé avait filé à toute vitesse, se jetant au milieu de ses sœurs et tentant de se dissimuler dans la masse. Mais on ne trompait pas l'œil du meilleur plus jeune Attrapeur depuis un siècle aussi facilement… Quelques secondes plus tard, Rook tenait solidement sa proie, qui se débattait dans son poing dans l'espoir de s'échapper. Il dut s'y prendre à deux fois avant d'arriver à l'introduire dans la serrure, puis il tourna. Il y eut un déclic et la porte s'ouvrit… La clé profita de l'occasion pour s'enfuir et rejoindre les autres, un peu penaude.
Marius jeta un œil de l'autre côté mais il faisait tellement sombre qu'il ne pouvait rien discerner. Alors tous trois se décidèrent à entrer. À peine la porte se fut-elle refermée avec un grincement dans leur dos qu'un faisceau lumineux jaillit soudain, et ils écarquillèrent les yeux.
Devant eux s'étalait un échiquier géant… Soigneusement rangées à leur place, les pièces les dépassaient facilement d'une tête et semblait avoir été taillées dans la pierre. De l'autre côté du jeu, il y avait une nouvelle porte.
'Laissez-moi deviner… On va devoir jouer une partie, c'est ça ?' grimaça Rook.
Marius se frotta les mains. Ses yeux brillaient d'excitation : il était dans son élément.
'Bien,' fit-il. 'Apparemment, on joue avec les noirs… Et c'est aux blancs de commencer.'
Mais rien ne bougea. Les pièces semblaient attendre.
'Peut-être qu'on doit prendre part au jeu… je veux dire… physiquement ?' tenta Blaise.
Le Roi noir tourna alors lentement sa face vers lui, comme pour l'approuver.
Marius fronça les sourcils, réfléchissant. Rook était étonné de voir comment son visage, d'habitude rieur et insouciant, pouvait se faire grave et posé quand il jouait à ce jeu. Mais Marius avait toujours considéré très sérieusement les échecs…
'Blaise, tu prends la place de cette Tour. Rook, tu vas sur la case du Cavalier là-bas.'
Ainsi firent-ils, lui faisant aveuglément confiance. Les deux pièces cédèrent leur place dès que les deux garçons eurent mis le pied sur le plateau. Marius, lui, choisit la place d'un Fou. Quand ils furent tous prêts, un Pion blanc se déplaça de deux cases en avant.
La partie s'annonça rapidement intéressante. Les noirs furent les premiers à perdre un des leurs. Blaise et Marius firent la grimace quand un Fou blanc s'empara d'un de leurs Pions, l'assommant violemment avec son fléau avant de le traîner hors de l'échiquier. Rook ne broncha pas. Bientôt, il y eut autant de pièces noires que de pièces blanches hors du plateau. Marius avait dû intervenir plusieurs fois pour sauver ses deux amis, mis en danger par une offensive de l'ennemi.
Rook avait un peu de mal à suivre le déroulement de la partie. Il était même incapable de dire qui était en train de prendre le dessus sur l'autre. Mais il faisait confiance à Marius, il ne l'avait encore jamais vu perdre. Blaise, au contraire, semblait un peu mieux se rendre compte de ce qui se passait… Le petit garçon, cependant, devenait de plus en plus soucieux, et finit par se tourner vers son ami. C'était à leur tour de jouer, et Marius semblait perdu dans ses réflexions.
'Tu ne vas pas faire ça, hein, Marius ?!' fit alors soudain Blaise.
Rook nota la détresse dans sa voix, et commença à s'inquiéter aussi.
'Qu'est-ce qui se passe ? Qu'est-ce qu'il veut faire… ?'
'Il va se laisser prendre !' répondit Blaise, les larmes aux yeux.
Marius leva un regard tourmenté vers Rook, et le brun sut que sa décision était prise et que rien ne pourrait l'en faire changer. Mais Blaise ne semblait pas vouloir l'accepter.
'Ne bouge pas !' s'exclama Marius, alors que le petit brun avait fait un geste pour le rejoindre. 'Si tu quittes ta place, on perd !'
'Mais… !'
'Blaise… Je t'en prie…'
Le petit brun renonça à quitter sa place, mais recommença à tirailler ses manches en reniflant.
'Rook… Je t'explique, parce qu'apparemment Blaise a déjà compris. Je vais me laisser prendre par la Reine, là… Comme ça Blaise pourra avancer et mettre le Roi en échec…'
'Mais je ne veux pas…' gémit Blaise, qui pleurait pour de bon cette fois. La simple idée de voir l'immense Reine blanche se jeter sur Marius lui faisait horreur.
'Blaise… Ça ne m'enchante pas plus que toi, mais c'est la seule solution si on veut gagner… Tu t'en es bien rendu compte aussi, ça, non ?' Le petit garçon parcourut le plateau des yeux à travers ses larmes. Il sembla se rallier à l'avis de Marius, car il baissa la tête. 'On n'a pas le choix, tu vois bien… Est-ce que je peux compter sur toi ?'
Blaise, hoquetant, se tourna vers Rook. Le brun se sentit profondément remué par sa détresse, mais que pouvait-il faire ? À son tour, il observa le jeu. Il comprenait ce que Marius voulait effectuer… Mais c'était un bien lourd sacrifice. Il n'osa jeter un œil aux pièces inertes amoncelées en dehors du plateau.
'Je peux compter sur toi, Blaise ?' insista Marius, les yeux fixés sur le petit garçon.
Blaise lui fit face, essuyant tant bien que mal sa figure baignée de larmes, avant de gravement hocher la tête. Marius le rassura d'un léger sourire.
'Tout se passera bien.'
Il prit une profonde inspiration puis…
'Attends…'
Blaise et Marius se tournèrent d'un seul mouvement vers Rook. Le garçon avait sorti sa baguette magique.
'Je ne crois pas que l'on puisse passer en force, Rook,' fit l'albinos avec un léger rictus. 'Il faut jouer le jeu…'
'Je suis bien d'accord,' fit alors Rook avec un étrange sourire. 'Mais rien ne dit que l'on doive respecter les règles… Hey toi, le Fou ! Viens là !'
Sous les yeux éberlués des deux autres, l'autre Fou noir qui s'était fait prendre quelques instants auparavant remonta sur l'échiquier et vint se positionner à l'endroit que Rook lui désigna.
'Là où je l'ai placé, tu devrais pouvoir le sacrifier et obtenir le même résultat,' fit Rook, alors que les pièces blanches s'agitaient en secouant leur tête avec colère. 'Confundo !' leur fit-il soudain en brandissant sa baguette, et instantanément les pièces se calmèrent.
Marius avait rapidement étudié la solution – frauduleuse – de Rook et avait reconnu que celle-ci était tout aussi applicable. Quant aux pièces blanches, elles agissaient maintenant comme si elles ne s'étaient pas aperçues de l'ajout.
'Un Confundus Charm !' s'exclama Blaise, qui avait instantanément retrouvé le sourire. 'Ça c'est une superbe idée, Rook !'
Le brun ne put s'empêcher de rougir, regrettant de ne plus avoir l'Invisibility Cloak sous la main pour pouvoir se dissimuler en dessous.
'Mais c'est de la triche !' fit Marius, que l'idée semblait embêter.
'Nom d'un serpent, Marius, tu es un Slytherin, ou quoi ?'
'N'empêche… je n'ai pas besoin de tricher pour gagner aux échecs !'
Apparemment, Marius était vexé.
'Il ne s'agit pas de gagner aux échecs, mais de franchir cette porte,' s'écria alors Rook. 'Et je veux que vous soyez tous les deux avec moi !'
'Rook a raison, Marius…' intervint alors Blaise. 'Maintenant, si on terminait cette partie, hein ?'
Marius laissa échapper un sourire et acquiesça. Il déplaça le Fou comme prévu, comme prévu celui-ci se fit prendre par la Reine (qui le massacra méchamment, cela dit en passant, et Blaise jeta un coup d'œil à Marius de l'air de dire : 'Tu vois, comme on a bien fait !'). Blaise s'avança alors, mettant le Roi blanc en échec. L'énorme couronne de celui-ci tomba à ses pieds, et instantanément les pièces cessèrent de bouger. Au bout de la pièce, la porte s'ouvrit avec un grincement. Les garçons se précipitèrent. Ils avaient passé la troisième épreuve.
'Bon,' fit Blaise, alors qu'ils parcouraient à nouveau un étroit couloir. 'Nous avons eu le Devil's Snare de Sprout, les clés ont sûrement été enchantées par Flitwick, et je pense que McGonagall a pu métamorphoser les pièces d'échecs pour leur donner vie.'
'Donc, il reste les épreuves de Quirell et de Snape…' conclut Marius.
Une nouvelle porte apparut devant eux. Après un regard aux deux autres, Rook l'entrouvrit et jeta un œil. Blaise et Marius le virent tressaillir, puis ouvrir et s'avancer franchement.
'On n'aura pas à se tracasser cette fois…'
Au milieu de la pièce, empestant les égouts, un troll était étendu, assommé. Une bosse énorme surmontait son front.
'Je suis content de ne pas avoir à l'affronter celui-là…' fit Marius avec une grimace de dégoût.
Rook ne répondit rien. Le souvenir de sa dernière rencontre avec un troll lui était revenu, assez désagréablement en mémoire. À lui tout seul, il avait réussi à s'en débarrasser, mais il devait bien reconnaître qu'il ne savait toujours pas comment il avait bien pu faire… Il n'avait pas aimé la façon dont Dumbledore l'avait regardé et encore moins celle de Snape.
'Sortons vite d'ici, ou je vais vomir,' fit Blaise en se ruant vers la porte en face, le col de sa robe remontée sur son nez.
La pièce suivante n'avait rien de très effrayant… juste une table en son milieu, et sur cette table… sept flacons remplis de divers liquides colorés.
'Ça, c'est le test de Snape…'
Tous trois s'approchèrent alors, mais à l'instant où ils touchèrent la table, un feu surgit derrière eux. C'était clairement un feu magique, car les flammes en étaient violacées. Au même instant, des flammes noires s'élevèrent devant eux, leur bloquant la route. Ils ne pouvaient plus ni avancer, ni reculer. Rook se saisit alors d'un parchemin traînant sur la table, le déroula et lut.
'Qu'est-ce que ça dit ?,' questionna Blaise quand il eut fini.
Rook eut un sourire légèrement narquois.
'C'est des vers…,' fit-il. 'Snape a dû demander au Bloody Baron de les rédiger pour lui…'
'J'espère…,' fit comiquement Marius. 'Je ne sais pas si je pourrais survivre à une journée où deux des plus sinistres personnages de ma connaissance s'avèreraient être des poètes accomplis.'
'Bon, je résume : ça dit que parmi ces flacons, deux contiennent du vin d'ortie, trois contiennent du poison, et les deux autres permettent de passer, l'un les flammes violettes, l'autre les flammes noires… Il se ramollit, le Snape. Ça ne nous donne que trois chances sur sept de mourir…'
'Tu veux dire qu'on doit choisir au hasard ?'
'Non, il donne quatre indices… Un : on trouve toujours un poison à gauche d'un vin d'ortie. Deux : les deux flacons aux extrémités ne contiennent pas la même substance, et aucune ne permet d'aller de l'avant. Trois : le plus petit flacon et le plus grand ne contiennent pas de poison. Quatre : les seconds à droite et à gauche, bien que différents à la vue, ont le même goût. Voilà… Quelqu'un comprend ce charabia ?'
Le visage de Blaise s'éclaira.
'C'est évident…'
'Merci, Blaise… On ne se sent absolument pas idiot, maintenant. Tu peux expliquer ?'
'Cela n'a rien à voir avec de la magie ! C'est de la logique, tout simplement… Et c'est très malin, car peu de sorciers en ont…'
'Nous sommes d'authentiques sorciers, alors, parce qu'on pige rien, nous !' lâcha Marius, après un coup d'œil au visage perplexe de Rook.
'Shhh ! Laissez-moi réfléchir !'
Et Blaise s'empara du parchemin, remonta ses lunettes et le relut attentivement, tout en pointant du doigt divers flacons. Enfin, un grand sourire s'élargit sur sa figure et il claqua des doigts.
'Enfantin…'
'Il répète encore une fois que c'est facile et je l'étrangle,' maugréa Marius tout bas, de façon à ce que seul Rook l'entende. Le brun eut un sourire compatissant et se tourna vers Blaise.
'Lequel permet d'avancer ?'
'Celui-là !'
Blaise pointa du doigt le plus petit des flacons. Rook le prit, regardant son contenu.
'Il n'en reste que pour une seule personne, malheureusement…'
Tous trois s'entreregardèrent.
'Quel flacon permet de revenir sur ses pas ?' fit alors Rook. Blaise lui montra celui à l'extrême droite. 'Vous allez en boire, tous les deux… Non !' fit-il pour couper à toute protestation. 'Je veux que vous vous dépêchiez de gagner la volière pour envoyer un hibou à Dumbledore et le prévenir. Prenez les balais pour remonter à travers la trappe – et fais attention à toi Marius ! –, mon pendentif devrait garder Fluffy tranquille. Moi…'
Il s'interrompit, et son visage se fit plus grave.
'Moi, je vais entrer et affronter Snape. J'essaierais de le retenir le plus longtemps possible. Peut-être que je pourrais l'empêcher de prendre la Pierre…'
'Mais si… si Tu-Sais-Qui est avec lui… ?'
Rook baissa les yeux sur le petit visage inquiet de Blaise.
'Je l'ai déjà rencontré une fois, et c'est lui qui a dégusté… Pourquoi l'histoire ne se reproduirait-elle pas ?'
Mais si Blaise sembla rassuré, Marius devina bien que le sourire qu'affichait le brun était un peu forcé.
'Buvez !' Rook leur tendit le flacon.
Ils en prirent chacun une gorgée et frissonnèrent.
'Ça va ?' Une pensée subite venait de le prendre. Et si Blaise s'était trompé ? Et s'ils avaient bu du poison ?
Mais Marius le rassura. La boisson leur donnait juste l'impression d'avoir soudain reçu un seau d'eau glacée sur la tête.
'Rook… Fais attention à toi.'
'Dépêchez-vous… !' Et Rook les poussa dans les flammes pourpres.
Les deux garçons les traversèrent sans le moindre mal et passèrent la porte, après un dernier regard en arrière.
Rook se retrouva seul. Il prit le minuscule flacon et le contempla pensivement. Derrière la prochaine porte, il verrait Snape. Tous deux lutteraient pour obtenir la Pierre… Il avait été loin de soupçonner, quand il avait choisi de s'inscrire à Hogwarts plutôt qu'à Durmstrang, que tout se terminerait ainsi. D'un geste vif, il avala le contenu du flacon et frissonna. C'était comme s'il venait d'avaler des glaçons. Il s'avança alors vers le feu. Un moment, il hésita, passant sa main au travers. Les flammes le léchaient sans qu'il n'en éprouve le moindre désagrément. Alors il avança franchement, traversant l'étendue qui le séparait de la porte. Il ouvrit celle-ci, entra dans la nouvelle pièce – la dernière – et il vit.
Quelqu'un était là – mais ce n'était pas Snape. Ce n'était même pas Voldemort…
