Secret de famille

by Lazuli

d'après « Hunter X Hunter »

Go

Gon se leva de son bureau. Il n'y avait rien à faire, il n'arrivait pas à se concentrer sur son cours de Maths. Les nombres dansaient sous ses yeux, et il avait beau lire et relire les propriétés énoncées, leur sens lui échappait. Il alla regarder par la fenêtre. Le soleil venait juste de disparaître à l'horizon, et les premières étoiles scintillaient déjà. Gon aimait bien regarder le ciel. Il ne croyait pas en Dieu, mais aimait l'idée que ses parents connaissaient là-haut le bonheur et la paix éternelle. Regarder le ciel le rendait toujours vaguement mélancolique. C'était une sensation qu'il affectionnait, et il avait passé beaucoup de temps le soir, allongé dans l'herbe en regardant le ciel, lorsqu'il était encore à l'île de la Baleine. Maintenant qu'il habitait en ville, il devait se contenter de regarder par la fenêtre, de sa chambre. Encore quelque chose qu'il avait dû abandonner, en venant ici.

Trois coups timides frappés à sa porte le tirèrent de sa rêverie. Il se retourna, et s'écria, d'une voix enjouée :

« Entrez ! »

La porte s'entrouvrit doucement, laissant apercevoir dans l'entrebâillement de la porte la fine silhouette de Mito. Celle-ci s'avança silencieusement, souriant gentiment à Gon, mais celui-ci nota la tristesse dans ses yeux. Il s'assit sur son lit, invitant ainsi Mito à faire de même. Ils gardèrent le silence un moment, puis.

« Gon.

- Mito-san ?

- Gon, dis-moi. Es-tu heureux ici ? Est-ce que tu vas mieux ? »

Gon soupira. Sa « crise de pleurs » de l'avant-veille avait culpabilisé Mito.

« Je t'assure, Mito-san, je vais beaucoup mieux. Je vais me plaire ici, il me faut juste un peu de temps pour m'adapter à ma nouvelle vie ! Et puis. tu sais, ma déprime n'était pas seulement due au déménagement.

- Oh. Je m'en doutais un peu. »

La figure de Mito s'éclaira d'un sourire. Gon la regarda, heureux d'avoir pu enlever toute tristesse de son visage, mais sans comprendre ce qui avait pu faire naître son sourire.

« Gon, tu as rencontré quelqu'un, n'est-ce-pas ? »

Gon se figea. Que disait-elle ? Lui, Gon, aurait. rencontré quelqu'un ? Mito avait toujours connu toutes ses émotions sans qu'il ait besoin d'en parler. Mais là. lui, Gon, serait. amoureux ? Dans son esprit régnait la confusion. Le seul visage qui s'imposait à lui, depuis qu'il était à Padokia, était celui de Kirua. Et il n'était pas amoureux de Kirua. Il se rendit compte alors qu'il n'avait pas pris le temps de s'arrêter sur ses sentiments, depuis le déménagement, et que, en ce moment même, ceux-ci lui paraissaient très flous. Il n'arrivait pas à définir ce qu'il ressentait. C'était un sentiment étrange, qu'il n'avait jamais éprouvé auparavant. Avant, il avait toujours su mettre un nom sur ce qu'il ressentait. Mais là. Devant son silence, Mito répondit :

« Écoute, tu m'en parleras lorsque tu le désireras, d'accord ? Et tu me présenteras cette personne. »

Elle lui ébouriffa tendrement les cheveux, sortit de la chambre, et referma silencieusement la porte derrière elle.

Gon s'étendit sur son lit, les bras en croix et les yeux grands ouverts. Ce qu'il éprouvait pour Kirua. qu'était-ce ? De l'amitié ? De l'amitié très forte, différente de celles que Gon avait connues jusqu'alors ? Ou bien. était-ce de l'amour ? Gon ferma les yeux. Son envie si forte d'être l'ami de Kirua. la douleur au creux de son ventre lorsque celui-ci l'avait rejeté. sa joie démesurée d'avoir pu parler avec lui presque normalement. son omniprésence dans son esprit.et surtout. son c?ur qui s'était mis à battre sans raison lorsque Kirua s'était penché sur lui. Il rouvrit les yeux. La certitude s'imposa à lui, éclatante, évidente. Ce n'était pas de l'amitié. Il aimait Kirua. Il était amoureux. Il sourit. Cette chère Mito, elle savait avant lui ce qu'il ressentait. Il resta ainsi, le regard dans le vide, jusqu'à ce que la fatigue l'emporte dans le sommeil.

Il se trouvait dans une grande chambre, luxueuse et richement meublée. Sur les murs s'étalaient des étagères remplies des livres anciens, et près de la porte était installé un magnifique secrétaire en chêne massif. Sur le mur opposé se trouvait un immense lit à baldaquins, dont les rideaux, assortis au couvre-lit, étaient taillés dans un velours bleu-roi brodés d'or. Sur le lit était allongé Kirua, ses mains nonchalamment placées derrière sa nuque, qui le dévisageait en souriant. Gon s'approcha, fébrile et tremblant. Il traversa la pièce, lentement, en direction du lit, se rapprochant de plus en plus. Il posa enfin sa main sur l'un des rideaux, s'arrêta, et regarda Kirua. Celui-ci ne souriait plus, et des larmes coulaient de ses yeux. Son visage trahissait une profonde angoisse, une grande terreur, et il fixait en tremblant un point situé à trois mètres derrière Gon. Celui-ci se retourna, et se trouva face-à-face avec un homme immense, torse nu, aux muscles saillants et aux longs cheveux blancs. L'homme ignorait totalement la présence de Gon. Il regardait Kirua, et lui souriait. Kirua paraissait terrifié, tétanisé par cette apparition. Sur un geste de l'homme, il se leva, tremblant de tout son corps. L'homme tourna les talons, et s'éloigna. Sans un regard pour Gon, Kirua lui emboîta le pas, la tête baissée, les bras recroquevillées sur sa poitrine. Ils sortirent de la pièce, et la porte se referma à double tour.

Gon s'éveilla à l'aurore, des images pleins la tête. Il se rappelait avoir fait un rêve, un rêve étrange, énigmatique, à la fois triste et agréable. Il tenta de se souvenir, mais les images s'échappaient au fur et à mesure qu'il tentait de les saisir. Il ne lui restait plus rien à présent. Juste une impression désagréable de vide. Il haussa les épaules, et sauta du lit. Ce n'était qu'un rêve après tout, un rêve qui ne valait certainement pas la peine que l'on s'en souvienne. Il bâilla bruyamment, fit quelques assouplissements pour garder la forme et achever de se réveiller complètement, s'habilla et descendit prendre son petit déjeuner. Il fit un grand sourire à Mito, avala son bol de chocolat chaud et un grand verre de jus de pomme, dévora ses cinq tartines de pain à la confiture de cerise jusqu'à s'en être barbouillé tout autour de la bouche, se lava les dents et le visage, puis partit pour le lycée, son sac sur le dos.

C'était à nouveau une belle journée qui s'annonçait. Gon prit la direction du parc municipal, qu'il avait repéré la veille. Là, il s'assit sous un saule, et laissa vagabonder ses pensées. Kirua. Gon sentit une impression bizarre en lui. Il ne s'était pas encore habitué à cette idée. Il aimait Kirua. De tout son c?ur. De tout son être. Il ne voulait pas, et n'avait jamais voulu s'en faire un ami. Il voulait davantage. Ce sentiment qu'il avait si vite éprouvé pur lui n'était pas de l'amitié. Mais de l'amour. De l'amour. Gon sourit. L'expression lui semblait si étrange, dans sa propre bouche. Il n'avait jamais sérieusement envisagé que cela pourrait lui arriver. Kirua. Gon ne savait pas quelle attitude il devait opter, maintenant que ses sentiments pour lui étaient clairs. Devait-il les lui annoncer ? Les lui cacher ? Gon était un garçon franc, c'est pourquoi il n'avait pas hésité à avouer son amitié à Kirua, quand bien même celui-ci le détestait. Mais à présent. c'était différent. Devait-il lui dire son amour, au risque de le perdre complètement ? Cela ne lui fera-t-il pas mal ? Gon soupira. Il ne pouvait pas lui dire, pas tant qu'il ne le connaissait mieux. Ses sentiments pourraient le blesser, ou le rendre mal-à-l'aise. Il attendrait.

Il se leva d'un bond, et continua son chemin, passant parmi les arbres, en respirant leurs odeurs familières. Il aimait le calme qui régnait ici, ce silence, cette fraîcheur moite et complice, ces douces lumières matinales. Il marchait doucement, sans but, flânant juste au hasard parmi les bosquets. Il laissait son esprit vagabonder, laissant le temps filer paresseusement. Il passa ses mains sur les écorces des arbres, inspira à pleins poumons le parfum des violettes, et s'arrêta longuement pour écouter le chant des oiseaux dans la futaie. Tout cela le détendait, l'apaisait. Il ne se sentait vraiment à sa place que parmi les arbres, dans le silence des forêts. C'était là son élément. Il aurait pu passer des journées entières ici, simplement à se sentir vivre, au milieu de toute cette vie végétale. Il regarda sa montre, machinalement, afin de juger le temps qui lui restait avant l'inévitable échéance. Il resta figé, bouche ouverte, tandis que ses prunelles s'agrandissaient dans ses yeux. Les cours avaient déjà commencé. Sans prendre le temps de réfléchir, il se mit à courir, vite, très vite. S'il se dépêchait, il y serait en cinq minutes. Il accéléra, et continua sa course, sans prendre le temps de respirer. Ce n'est qu'arrivé devant la porte de la salle, après avoir gravi les escaliers quatre à quatre, qu'il se rendit compte qu'il était en nage, ne tenant plus sur ses jambes qu'en s'appuyant contre le mur. Il s'autorisa trente secondes de repos, pour reprendre son souffle, et frappa à la porte.

Après s'être excusé auprès du professeur de Japonais, il alla rejoindre sa place, à côté de Kirua, sans oser croiser son regard. Il ne savait pas trop comment se comporter avec lui. Tout cela était trop neuf, trop nouveau pour lui. Il voulait lui parler, lui sourire, le regarder encore et encore, mais il se sentait soudain timide, gauche et maladroit. Il avait également l'impression que faire comme si ses sentiments étaient restés les mêmes serait injuste envers lui. Il resta donc là, gêné, sans savoir que faire. Le rouge sur son visage et la rapidité des battements de son c?ur n'étaient pas seulement dû à la course qu'il venait de faire. Pour masquer son désarroi, il récita à mi-voix l'alphabet occidental, qu'il voulait connaître au plus vite. À côté de lui, il sentait la présence de Kirua, la tête baissée sur son cahier, silencieux et travailleur.

« A. B. C. (note de l'auteur : prononcer toujours à l'anglaise) »

Il le guettait du coin de l'?il, mine de rien, fasciné par les glissements rapides et souples de son feutre sur son cahier.

« D. E. euh. F. »

Sa main était très pâle, presque blanche comparée à la sienne.

« G... H..... I..... »

On apercevait de temps à autre le début de son bras, sortant de sous la manche de son pull.

« J......................... K....... M..

- L.

- Pardon ?

- Tu as oublié le L, entre le K et le M.

- Oh. »

Gon leva les yeux vers lui. Kirua le regardait, d'un regard gris d'où ne ressortait aucune hostilité, mais presque.. de la sympathie ?

« Non, pensa Gon, je me fais des idées. »

Kirua s'apprêtait à replonger dans son cahier, lorsqu'il eut la présence d'esprit d'ajouter :

« C'est vrai, tu as raison. Merci ! »

Sur les lèvres de Kirua se dessina l'ébauche d'un sourire, qu'il réprima bien vite, pour détourner un peu trop rapidement le regard. Gon resta un instant sans bouger. Le temps d'un éclair, Kirua avait souri, d'un sourire bienveillant, d'où ne ressortait aucune antipathie. Il avait été si beau, pendant cet instant-là ! L'espace d'une seconde, Gon avait pu envisager l'existence d'un autre Kirua, amical et chaleureux, un Kirua qui ne le repousserait pas, un Kirua qui serait heureux, et avec qui il pourrait l'être. S'il pouvait seulement arriver à le faire s'exprimer, ce Kirua-là !

Il passa le reste de la matinée perdu dans ses pensées, le regard dans le vague. Seule la sonnerie stridente annonçant la pause de midi le sortit de sa léthargie. Il cligna des yeux, comme quelqu'un que l'on réveille brusquement, se redressa sur sa chaise et sortit son panier-repas. Il se tourna vers Kirua, et demanda, comme il en avait pris l'habitude :

« Kirua, on mange ensemble ? »

Une fois de plus, Kirua ignora la question, ramassa ses affaires consciencieusement, et sortit de son sac son propre panier-repas. Puis il se leva, tournant le dos à Gon, et murmura :

« Si tu veux. »

Puis il partit vers la porte, sans un regard pour Gon qui resta là, bouche bée, abasourdi par les mots que Kirua venait de prononcer. Puis, dès qu'il eut pris conscience de ce qui venait de se passer, il ramassa ses affaires à la hâte, et courut derrière lui pour le rattraper.

Ils s'installèrent derrière le gymnase, sur le banc à l'ombre du cerisier. Gon ne put s'empêcher de penser que la dernière fois qu'ils s'y étaient retrouvés, Kirua avait refusé son amitié avec violence. Et maintenant, il l'avait. presque invité à manger avec lui ! Gon sourit. Kirua l'acceptait enfin, au moins comme ami. Il avait peut-être une chance, après tout. Il s'assirent sur le banc, et mangèrent en silence. Kirua ne le regardait pas, et faisait comme s'il n'était pas là, mais il tolérait sa présence. C'était déjà un bon début ! Gon chercha quelque chose à dire, pour briser ce silence, mais rien ne lui venait à l'esprit. Alors il se tut, se contentant d'apprécier ce moment. Il était seul avec Kirua, sous cet arbre. Il était bien. Il mangeait lentement, appréciant chaque bouchée. Kirua lui, mangeait rapidement, avec des gestes répétés, sans regarder ce qu'il mangeait. Pourtant, son riz avait l'air avoir été cuit avec soin, et les légumes qui l'accompagnaient dégageaient une odeur savoureuse.

Kirua s'arrêta, et se tourna vers lui un regard interrogateur. Gon se sentit rougir.

« Euh. C'est bon ?

- Je ne sais pas.

- Comment ça ?

- Je ne fais pas attention à ce que je mange, ça n'a aucun intérêt pour moi. Je mange parce qu'il faut me nourrir, je ne fais pas attention au goût.

- Oh.

- De toute manière, je mange ça tous les midis depuis si longtemps que je n'y fais même plus attention.

- .

- Tu en veux ?

- Hein ?

- Tu en veux non ? Tu regardes ça avec appétit.

- Euh. Mais je ne veux pas te priver de nourriture ! »

Kirua plaça d'autorité le bol contenant le riz sur les genoux de Gon, et lui tendit ses baguettes. Celui-ci hésita, puis tendit la main. Il se sentit rougir lors du bref contact de leurs peaux. Puis il resta là, ne sachant que faire. Il regarda Kirua, qui s'apprêtait à se lever. Ce don n'était-il qu'un moyen pour lui de partir plus vite ? Comment faire pour le retenir ?

« Kirua !

- Oui ?

- On échange alors ! »

Il lui tendit son sandwich au jambon. Kirua le regarda, incrédule, hésitant. Il approcha sa main, et prit le sandwich. Bref contact à nouveau. Il restèrent là, tous les deux, gênés, puis Kirua mordit avidement dans le sandwich. Gon saisit une bouchée de riz.

« C'est comme un baiser indirect. » se dit-il en les portant à sa bouche.

À nouveau, il se sentit rougir.

Lorsque se fut l'heure de reprendre les cours, Gon se leva à regrets, et suivit Kirua jusqu'à la salle 405. L'après-midi passa sans qu'ils ne s'adressent la parole, mais Gon sentait que quelque chose entre eux avait changé, et son c?ur s'en gonflait de joie. Kirua ne le regarda pas, et fit, comme à son habitude, comme si personne n'était assis à côté de lui, mais Gon ne sentait plus de répulsion venant de lui. Il l'acceptait, enfin. Il lui fallait maintenant être patient, et les barrières de Kirua finiraient par tomber, jusqu'à révéler. le vrai Kirua. Gon se sentait radieux comme il ne l'avait jamais été. Il avait envie de se lever, de danser dans la salle de classe, et de crier sa joie au monde entier. Lorsque les cours furent terminer, il partit courir dans le parc, jusqu'à s'épuiser complètement physiquement, sans parvenir à atténuer l'allégresse qui le remplissait tout entier. Il finit par rentrer chez lui, essoufflé, un sourire de béatitude sur son visage.

Lazuli : Et voilà, Gon a compris ses sentiments pour Kirua (pas trop tôt !). Euh. Zushi a complètement disparu de l'histoire. Tant mieux, un gêneur en moins ! ^-^ Eh, n'ayez pas peur de moi, je suis totalement inoffensive ! Je ne sais pas si vous l'avez remarqué, mais j'aime bien Mito. Elle est chouette. Gon a de la chance d'avoir une « mère » comme elle. C'est vrai que je la fait apparaître souvent. J'adore Silva, aussi. J'aime bien l'image que j'ai crée de lui dans cette fic ^^ (un peu de modestie voyons !) Et vous ? Q'en pensez-vous ? N'hésitez surtout pas à me laisser des reviews en me donnant vos goûts ! Et donnez-moi aussi votre avis de l'histoire, même si vous ne l'aimez pas (mais dans ce cas, vous ne serez certainement pas allé jusque là.)