Ecrit pour AllenKune sur le thème : possession et manipulation.

Avertissement pour contenu sexuel, voyeurisme non-consensuel, immoralité générale, c'est le point de vue de Dracula.


Dracula sent la nuit tomber, ses forces augmenter peu à peu, jusqu'à atteindre une puissance divine et diabolique. Il pourrait quitter son cercueil, invisible et meurtrier, pour se nourrir de l'équipage du bateau...

Non, il ne peut se permettre un répétition de ce qui est arrivé quand il se dirigeait vers l'Angleterre. Un appétit dévorant, des hommes inquiets, et finalement, un bateau vide, presque à la dérive, qui n'aurait jamais touché l'Angleterre si Dracula n'avait pas contrôlé le vent.

Cette fois, il ne peut pas perdre une seule heure ; on le poursuit.

Il réfrène donc ses instincts, et repense au sang de Mina Harker. Il en sent presque le goût délicieux, coulant dans sa bouche par saccades. Oh, ce soir-là, Jonathan Harker était avec les autres, armé et ceint de fleurs d'ail, inaccessible. Mais son trésor le plus précieux était sans protection, et Dracula s'en est emparé.

Il repense à son propre sang, coulant dans les veines de Mina, faisant d'elle une créature de la nuit. Elle proteste, mais il ne sera pas longtemps avant qu'elle cède, qu'elle obéisse à l'appel du sang, et rejoigne Dracula. Bien sûr, elle emmènera son époux trop dévoué avec elle, et Jonathan Harker cessera d'être l'épine qui agace l'esprit de Dracula, celui qui a réussi à s'enfuir.

Dracula aurait dû boire son sang au tout début, plutôt que de jouir de sa peur, de se réserver ce plaisir pour plus tard. Mais il gagnera quand même, à la fin.

En ces instants, juste après le crépuscule, Mina est à lui plus que jamais. Il tend sa volonté, et peut voir par ses yeux la cabine de train, il peut entendre ce qu'elle entend. Il peut presque lire ses pensées, pas complètement comme un livre, plus comme quelques photographies observées une fraction de seconde. Mais cela suffira pour se tenir à l'abri de ces chasseurs aux illusions de grandeur.

Mina est en compagnie de Jonathan, la main dans la sienne. Dracula peut en sentir la chaleur, mais il ne contrôle pas encore assez Mina pour lui faire baisser la tête, observer cette main, ce poignet où battent les veines. Mais le résultat est le même quand une bouffée de désir enveloppe Mina - elle vient de Dracula, et il n'avait même pas prévu de la partager, mais ce débordement avive son plaisir. Mina rougit, regarde le charmant visage de Jonathan, et elle veut l'embrasser, boire le sang à ses lèvres, son désir et celui de Dracula se mêlant. Dracula canalise toute l'influence qu'il peut avoir sur elle, pour en faire une créature assoiffée, sculptée de désir et de larmes. Elle se penche vers Jonathan...

"Non !" s'exclame Mina, se levant brusquement. "Non, ne m'embrasse pas ! Ah, je le veux tellement, mais je sais quels en sont les dangers, quand ma chère Lucy l'ignorait encore. Je t'en prie, mon cher époux, attends encore un peu. Bientôt tout sera fini !"

Dracula veut gemir de frustration - mais alors Jonathan pose doucement sa main sur la joue de Mina, et il peut la sentir - comme s'il avait lui même une joue chaude et douce. Jonathan embrasse Mina dans le cou, la caresse sous sa chemise, murmure à son oreille une déclaration d'amour éternel, et la convainc de se rasseoir sur la banquette. Puis il se met à genoux, comme un suppliant, bien trop loin des dents blanches et pointues de Mina; Dracula frissonne d'un plaisir qui n'est pas le sien, qui lui appartient pourtant, comme Jonathan et Mina lui appartiennent.

Bientôt, il cultivera si fort le désir dans le corps de Mina qu'elle ne pourra plus se retenir de mordre. Bientôt, ils seront ses serviteurs, et les autres morts, tués dans leur sommeil.

Et quand Jonathan s'agenouillera pour lui, toutes les erreurs qu'il a pu commettre depuis le début seront oubliées.