Note : Bonjour tout le monde ! Voilà le deuxième chapitre. J'ai rien à dire dessus, à part que Loki se comporte de manière particulièrement énervante. Aussi, il fait plus ou moins la longueur moyenne des chapitres de cette fic, pour vos donner un ordre d'idée. Des gros bisous.
CHAPITRE 2
Quelque part entre sommeil et réalité, Loki entendait un son mécanique, régulier, qui forçait son esprit hors de la torpeur dans laquelle il baignait avec complaisance. Il mit un long moment à identifier ces bruits comme les battements de son propre cœur. C'était une chose étrange que d'entendre la preuve de sa propre vie, alors que celle-ci n'existait plus. Le vide l'avait absorbée, il y avait de cela une éternité ou une toute petite seconde.
Une variété de sensations désagréables lui parvint progressivement. Il avait mal partout. Sa tête criait, son torse brûlait, et pire que tout, sa magie avait disparu. Plus aucune énergie ne parcourrait ses membres. Il se sentait aussi faible et démuni qu'un nouveau-né.
Il ouvrit les yeux, vit une surface blanche qui lui enflamma les rétines, détourna le regard et tomba sur le haut de son torse. Il s'aperçut qu'il était bizarrement vêtu, d'un tissu blanc et de mauvaise qualité, mais ce n'était pas ce qui le perturbait le plus. Il existait, il avait survécu au vide, et il était forcé de s'en souvenir, à présent.
Ses poignets étaient retenus de part et d'autre d'un lit, accrochés par d'étranges appareils. Ceux-ci ressemblaient à la plupart des entraves que Loki avait déjà connues, exception faite des deux étranges cercles bleus qui luisaient au centre du dispositif froid et métallique. Leur lumière avait quelque chose de familier. Il fit rapidement le lien entre ces choses et la disparition soudaine de sa précieuse magie.
« On dirait que la belle au bois dormant s'est réveillée, l'accueillit une voix moqueuse.
Loki tourna la tête en direction de la voix et oui, il connaissait ce midgardien. Il se souvenait de New York, leur brève confrontation et de son comportement particulièrement agaçant. Il plissa les yeux en essayant de mieux l'apercevoir. L'homme se tenait debout, à une distance respectable du lit et il portait un tas de ferraille et de fils entre ses bras. Il avait l'air épuisé, traits tirés, vêtements froissés et sales, et Loki aperçut du sang sur ses mains. Sa bouche était tirée en un sourire narquois qui ne parvenait pas tout à fait à cacher la tension qui l'habitait. On trompait difficilement le dieu du mensonge, après tout.
- Bonjour à vous aussi, Stark. » Répondit Loki à travers la brume qui l'envahissait encore. Il s'étonna de l'aisance avec laquelle les mots sortirent de sa bouche, et faillit manquer le reniflement moqueur qui suivit sa salutation.
« Vous pouvez cesser vos menaces maintenant, nous savons tous les deux que vous n'allez pas me livrer à vos amis du SHIELD, s'impatientait Loki depuis son lit.
Tony stoppa son petit discours de bienvenue et son rangement pour croiser les bras sur son torse, curieux de la façon dont son tout nouveau prisonnier venait d'arriver à cette conclusion.
- Et pourquoi pas ? Tu crois peut-être que je me soucie de ce qui arrivera à tes fesses de meurtrier ? Parce que dans ce cas, j'ai une info en exclusivité pour toi, Rudolphe. J'en ai vraiment à rien à foutre.
Le dieu haussa les sourcils, l'air un peu trop satisfait de lui-même pour un gars mort sur un tapis deux jours auparavant. Il l'énervait déjà prodigieusement.
- Je n'aurais jamais la prétention de penser cela, Stark. Je sais que vous ne vous souciez guère de ce qui pourrait arriver à ma charmante personne. Mais j'ai de bonnes raisons de croire que vous vous faites plus de tracas à propos de ces petites choses, répondit-il en pointant de son menton l'une des menottes que Tony avait conçues.
Tony s'enjoignit à rester de marbre parce que merde, l'enculé avait parfaitement raison. Ledit enculé poursuivit sans se soucier de son silence.
- Si je ne m'abuse cette technologie est similaire à celle que vous portez sur vous. En suivant les résultats de notre dernière rencontre, vous l'avez adaptée afin de supprimer mes capacités. C'est très bien pensé de votre part, je vous l'accorde, mais cette technique a une petite faiblesse. Vous ne voudriez pas que vos chers amis espions soient trop renseignés à propos de ce qui vous maintient en vie, n'est-ce pas ? Sans compter les usages détournés qu'ils pourraient en faire.
- T'es un peu trop bien renseigné, l'interrompit Tony, dans une vaine tentative d'arrêter un raisonnement qui le mettait mal à l'aise. Loki eut carrément l'audace de rire à cette remarque.
- J'ai mes sources, oui, répondit-il simplement. À partir de là, la suite est logique. Sans ces menottes, difficile de me remettre au SHIELD. Avec ma magie, ce serait un jeu d'enfant de m'échapper de n'importe quelle nouvelle geôle inextricable ils pensent avoir inventée, et je n'aurais ensuite plus qu'à exercer ma vengeance sur vous. Ou votre peuple innocent, cela pourrait se montrer plus efficace. »
Il ponctua sa tirade d'un sourire radieux qui donna envie à Tony de frapper dans ses dents parfaitement alignées. Pour ce qui devait être la millième fois, il regretta d'avoir bu cette nuit, d'avoir voulu jouer au héros, et d'avoir sauvé le putain de psychopathe qui avait envahi sa planète. Il aurait vraiment dû le laisser mourir la bouche ouverte sur ce putain de tapis.
« Peut-être bien, admit-il. T'as raison, je n'ai aucune putain d'envie de voir le SHIELD fouiller dans ma technologie. Mais ce que Monsieur je-sais-tout semble avoir oublié, c'est qu'Asgard dispose de menottes au moins aussi efficaces que les miennes. À la seconde même où Thor reviendra avec son stupide marteau, ce sera fini pour toi.
Loki n'eut pas l'air très impressionné.
- Et après ? Ils me renverront dans les geôles d'Asgard dont je me suis déjà échappé. La belle affaire.
- Ou le SHIELD insistera pour te prendre en charge puisqu'apparemment, les prisons de l'Olympe ont des problèmes de sécurité, rétorqua Tony, principalement pour être chiant.
- Menottes ou pas menottes, votre SHIELD ne me retiendra pas longtemps, Stark. Vous feriez bien de ne pas l'oublier, siffla le dieu.
Tony sourit, principalement parce que le regard noir de son prisonnier lui faisait froid dans le dos, et qu'il était hors de question que celui-ci s'en aperçoive. Il s'occupa en ramassant le reste de son matériel avant de se diriger vers la porte.
- SHIELD ou Asgard, pour être honnête avec toi Rudolphe, je m'en fous comme de ma première cuite, lui dit-il le plus calmement possible. T'es baisé dans tous les cas. Sur ce, ne fais pas trop de bêtises en mon absence ! »
Il ne jeta pas un regard en arrière et la porte claqua avec lui. Loki et son étrange sagacité lui tapaient déjà sur le système.
Tony se trouvait au beau milieu d'un appel où il expliquait à son agent de presse que non, il n'avait pas fait exprès de rater sa séance photo de la veille, mais qu'ils avaient déjà un million de photos de lui, et que personne n'avait besoin d'un million de photos de Tony Stark, même s'il était très bel homme, lorsque JARVIS l'interrompit. Évidemment. Pourquoi avait-il cru qu'il aurait le droit à un peu de tranquillité déjà ?
« Monsieur ? Il semblerait que le prisonnier se soit échappé.
- Excusez-moi, la strip-teaseuse est là, dit-il, et il raccrocha. Comment ça échappé ?! Il est réveillé depuis genre trente minutes !
- Monsieur Odinson se trouve dans la cuisine. »
Tony pesta, appela son armure et se précipita en direction de la pièce envahie. Il espérait que Loki n'avait pas touché aux pizzas qui moisissaient dans son congélateur. On ne savait jamais quand une envie impérieuse de pizza pouvait frapper.
Il s'attendait à moitié à trouver un champ de bataille. Sa cuisine, sa tour, en fumée. Du sang partout, des cadavres hurlants et suppliants. Une musique dramatique peut-être. Loki dans toute sa splendeur, armure, cornes et cape au vent, en train de rire comme un maniaque au milieu des décombres.
Le dieu était bel et bien là, assis sur sa table en marbre, parce qu'évidemment, Monsieur ne pouvait pas utiliser les chaises comme tout le monde, non, non. Il avait l'air concentré sur un pot qu'il tentait d'ouvrir en le fracassant contre le dossier d'un de ses fauteuils de designer. Original.
« Qu'est-ce que tu ne comprends pas dans : ne pas faire de putain de bêtises ?! s'égosilla-t-il en pointant un propulseur sur son invité. Lâche ce… Est-ce que c'est du beurre de cacahuète ?! Tout de suite !
Loki tourna un regard peu impressionné dans sa direction. Il portait toujours sa blouse blanche et, avec ses cheveux en bordel et son pot de beurre, il avait l'air plutôt ridicule. Mais Tony n'était pas idiot au point de relâcher sa vigilance maintenant. Ridicule ou pas, le gars restait dangereux.
- T'es sourd ou quoi ? Descends de là et pose cette merde !
Un flash plus tard et un projectile heurta son casque avec un bruit sonore. Tony cligna des yeux une fois, deux fois.
- Est-ce que tu viens de me jeter cette merde à la figure ?! hurla-t-il alors que la réalisation lui parvenait lentement.
Il allait mourir. Pas sur le champ de bataille en héros. Pas entouré de sublimes femmes après une soirée un peu trop arrosée. Ses nerfs allaient lâcher et il s'écroulerait en convulsant comme un vieillard. Loki repartirait en sifflotant avec son putain de pot, l'arme du crime, et on retrouverait son pauvre cadavre sur le carrelage froid de sa cuisine.
- Je n'ai aucun problème d'audition, merci beaucoup, répondit le dieu. Et putain, il avait l'air de trouver tout ça très drôle, cet enfoiré. J'avais simplement envie d'un en-cas, vous savez, par rapport au fait que j'aie passé plusieurs jours inconscient et sans nourriture ?
- Très drôle Rudolphe, vraiment, je me roule par terre là, dit Tony en relevant sa visière. Et est-ce que par hasard, tu n'aurais pas pu, oh, je sais pas moi, demander gentiment ?!
- Je pensais que vous comptiez me laisser mourir de faim.
Il avait donné sa réponse d'un ton si peu convaincu que Tony fut saisie par l'envie de lui renvoyer son pot de merde à la gueule, et d'ensuite l'achever pour enterrer son corps dans un endroit où personne ne le retrouverait jamais.
- Oui, parce que je me suis cassé le cul à te sauver la vie pour ensuite te regarder mourir de faim, gros malin. Très logique. Comment est-ce que tu as réussi à te débarrasser des menottes même ? demanda-t-il en faisant la liste mentale des matériaux qu'il avait utilisés pour la fabrication.
- Je les ai cassées, naturellement, dit le dieu.
- Arrête de te foutre de ma gueule, ces trucs pourraient retenir un putain de rhinocéros.
Loki trouva sa remarque hilarante parce qu'il rit si fort qu'il manqua de tomber de sa stupide table en marbre.
- Voyons Stark, pas les menottes. » Rit-il encore, et il brandit ses deux mains l'air d'une bonne blague.
L'information mit un moment à arriver au cerveau de Tony. Il contempla, médusé, l'angle suspect des poignets en face de lui, les hématomes qui se formaient et les petites égratignures.
« Mais t'es un putain de malade ! C'est quoi ton problème ?! hurla-t-il avant d'avoir pu bien peser ses prochains mots. Tu préfères te briser les os plutôt que quoi ? Demander à bouffer ?! Putain de merde, et moi qui pensais que j'avais un problème d'ego.
Son emportement sembla au moins un peu calmer le dieu. Tony s'avança vers lui, toujours agacé.
- Allez hop, on retourne te coucher, princesse. Je vais t'emmener un sandwich si c'est tout ce qu'il te faut pour ton bonheur.
- Je veux goûter ces cacahuètes, décréta Loki en sautant de la table.
- Oui, oui, allez, plus vite que ça. Me force pas à utiliser l'armure ! »
Loki grogna, mais chose étrange, le suivit docilement. Le gars était vraiment fêlé, c'était la seule explication possible, décida Tony.
Plus tard, après s'être assuré que son invité était rassasié, que tous ses pansements étaient remis en place, que ses mains guérissaient, et qu'il dormait du sommeil des bienheureux, Tony consulta les enregistrements de l'évasion. Il garda bravement le regard fixé sur la vidéo, mais finit par l'arrêter plus tôt que prévu. Vraiment, ça avait l'air douloureux.
Pourquoi Loki avait-il ressenti le besoin de s'infliger ça plutôt que de demander à être nourri, ou même juste de supporter patiemment la soi-disant terrible faim qui le tenaillait, Tony n'en avait aucune putain d'idée. Mais ce qui le questionnait le plus, c'était de l'avoir retrouvé gentiment installé dans sa cuisine. Le dieu n'avait même pas fait mine de vouloir s'échapper. Tony ne savait pas s'il pouvait se téléporter (peu importait à quel point il détestait ce mot.), mais une chose était sûre : il avait été libre de ses menottes pendant de longues minutes, ce qui impliquait un contact illimité avec sa magie et il n'avait rien tenté. Pas de trucs bizarres, d'évasion, ou même de tentative de meurtre.
Tony était pourtant certain que son invité ne lui souhaitait pas que du bien. Après tout, il le retenait contre son gré et agitait les menaces d'Asgard et du SHIELD sous son nez. À sa place, lui-même ne se serait pas privé de s'enfuir et d'aller faire des trucs de super-vilain.
Perplexe, Tony tourna son regard vers la vidéo live que JARVIS affichait. De nouveau attaché à son lit, Loki dormait en toute innocence, les yeux fermés et la bouche entrouverte. Tony n'était pas sûr de bien aimer cela.
« Le petit-déjeuner de la princesse, annonça-t-il le lendemain en poussant la porte du pied.
Du fond de son lit, le dieu se retourna pour lui jeter un regard inquisiteur. Malgré une nuit complète de sommeil, il n'avait pas l'air plus reposé que la veille. Enfin, Tony savait que lui-même ne faisait pas meilleure figure.
- J'espère que vous n'avez pas l'intention de me donner la becquée.
Tony retint un ricanement, parce qu'il n'allait certainement pas montrer au psychopathe qu'il appréciait son sens de l'humour. Il posa le plateau dont il s'était armé sur les genoux du dieu et se retourna pour aller chercher de quoi lui enlever provisoirement ses chaînes.
- Très drôle, Rudolphe. Non, je propose un compromis : tu gardes les bracelets et je te détache. »
Le regard du dieu se fit curieux tandis que Tony se penchait pour déverrouiller le dispositif à l'aide d'une clef. De cette façon, sa magie resterait sous contrôle, mais il pourrait bouger autant qu'il le souhaiterait. Tony n'était pas vraiment emballé par cette perspective : magie ou pas, son invité avait toujours une force surhumaine, et plus rien ne l'empêcherait de lui briser le cou si l'envie lui en prenait. Mais il était prêt à prendre le pari. S'il l'avait laissé tranquille la veille, il n'y avait théoriquement aucune raison pour qu'il se mette à vouloir le tuer en plein milieu du petit-déjeuner.
Du moins, il l'espérait.
« Je n'ai jamais eu de ravisseur aussi prévenant que vous Stark, ironisa le dieu. Je m'en souviendrai en temps voulu.
- Le temps de quoi ? demanda stupidement Tony.
- Eh bien, lorsque je prendrai ma revanche en tuant tous vos petits Avengers un par un, naturellement. Et avec cela, il lui jeta un sourire éblouissant, de ceux qui creusent un visage et éclairent les regards. Tony déglutit.
- Naturellement… Est-ce que c'était une blague ? Parce que je paierais pas pour voir ton stand-up.
Loki eut un petit rire en prenant sa tasse de café. Tony nota distraitement que ses mains semblaient de nouveau parfaitement fonctionnelles, exception faite d'une ou deux tâches sombres. Mais l'étaient-elles vraiment ? Il demanderait à JARVIS de passer des scans plus tard.
- Je préfère laisser planer le doute, si cela ne vous dérange pas.
- J'espère que tu sais que tu es un énorme enfoiré.
- Si vous pensiez être le premier à me le faire remarquer... Rassurez-vous, je n'ai pas une très haute opinion de votre personne non plus, Stark. »
Tony haussa les épaules et sortit son téléphone dans l'espoir d'avoir l'air occupé pendant que l'autre mangeait son petit-déjeuner. Évidemment, il eut bien du mal à se concentrer. L'idée qu'à tout moment Loki pouvait se lever et l'assassiner sur place prenait un peu trop de place dans son esprit.
Le dieu but une petite gorgée de thé et rompit le silence qui s'était installé entre eux.
« Je ne voudrais pas jouer à l'oiseau de mauvais augure, mais notre cher Thor pourrait mettre un bon moment à revenir sur votre petite planète.
Tony fit de son mieux pour ne pas paraître trop mal à l'aise à l'idée que son invité pourrait, effectivement, se transformer en pensionnaire à long terme.
- Et que veux-tu que j'y fasse exactement ? Il ne se balade pas avec un téléphone.
Loki reposa sa tasse sur sa soucoupe. Un bruit délicat emplit la pièce.
- Je suis en proie à un ennui terrible. Croyez-moi Stark, me laisser trop longtemps seul avez mes pensées ne finirait pas bien pour vous.
Ce n'était pas ce à quoi Tony s'attendait. Il haussa les sourcils.
- Sérieusement ? T'es prisonnier, mon gars. Dans la tour Avengers, pas dans un cinq étoiles. Je vais pas te faire le service et les divertissements.
- À votre guise, mais je vous aurais prévenu, lui répondit le dieu. Je suppose que cela m'apprendra à être gentil.
- Très menaçant Rudolphe, vraiment, je suis terrifié. Mais juste pour que tu saches, je n'aurais aucun scrupule à appeler le SHIELD illico presto si tu commences à aller trop loin, okay ? Je suis pas non plus suicidaire, ils se débrouilleront bien, même sans mes superbes menottes. On a un truc qui s'appelle le sédatif.
Loki rit, et cette fois-ci, il n'y eut rien de joyeux.
- Oh, j'en prends bien note. »
Tony ramassa le plateau et referma les chaînes. Le verrou émit un petit bruit. Il allait quitter la pièce lorsque Loki l'interrompit.
« J'ai quelque chose à ajouter, venez-là.
Tony s'approcha, très méfiant.
- J'espère que ce n'est pas une ruse pour me briser le cou. Je n'ai jamais été très fan de ce genre de blagues.
Le visage du dieu était considérablement plus proche, ses yeux, plissés en deux fentes, cherchaient les siens. Il se pencha près, trop près de son oreille, comme s'il allait lui chuchoter un secret avant d'articuler soigneusement :
- Je n'ai jamais eu de ravisseur aussi charmant que vous, Stark. »
Tony se recula vivement malgré lui. Loki se fendait d'un large sourire goguenard. Il faillit en jeter son stupide plateau, et il pouvait dire au tremblement des lèvres du dieu qu'il retenait un rire.
« Ha ha. Et bien, je n'ai jamais eu de prisonnier aussi casse-couilles Rudolphe. Maintenant, excuse-moi, mais j'ai mieux à faire que de m'occuper de ta petite personne.
- Je n'en doute pas, je vous en prie, vous pouvez partir quand vous voulez.
- C'est ma maison ! Je ne pars pas parce que tu m'en donnes la permission, mais parce que j'en ai envie ! C'est quoi ton problème ?! »
Le rire de Loki résonna dans ses oreilles longtemps après qu'il eut fermé la porte.
Tony restait fort peu rassuré lorsqu'il quitta la tour quelques heures plus tard. Les menottes avaient été resserrées, les chaînes théoriquement incassables, le lit soudé au sol, mais tout son esprit restait agité, tourné en direction de Loki et de ses airs sournois.
En maudissant Pepper, Stark Industrie et son propre père parce que tout était prétexte à maudire Howard Stark, Tony s'installa avec le café qui lui avait coûté vingt bonnes minutes de retard supplémentaires dans le siège en bout de table qui lui était réservée. Il était presque à l'heure.
Pepper lui jeta un regard désapprobateur de là où elle se tenait. Télécommande en main, elle expliquait avec pédagogie et clarté les chiffres qui s'affichaient derrière elle. Apparemment, elle avait pour projet d'ouvrir une nouvelle branche consacrée à la recherche en Europe. Tony ne voyait pas pourquoi elle avait besoin de son support (ou de celui des rescapés d'EHPAD qui l'entouraient, pour ce que cela valait), mais il se retint sagement de commenter sur le sujet. Oui, il était vraiment le meilleur des amis qu'on puisse trouver, merci beaucoup.
Il fut interrompu dans sa séance d'auto-félicitation mentale par une vibration de son portable. Tentant un air dégagé et ouvrit un message de JARVIS. Okay, génial. Il n'avait même pas besoin de le lire pour savoir que ça puait du cul.
« Désolé tout le monde, urgence de super-héros, vous savez ce que c'est, annonça-t-il en attrapant sa veste. Il prit tout de même une seconde pour s'arrêter auprès de son amie avant de s'enfuir comme un voleur.
- Pepper, s'il te plaît, tu sais que je t'adore, mais arrête de faire chier tout le monde avec tes réunions à rallonge. On sait tous que tes idées sont géniales.
La rousse leva les yeux au ciel, excédée.
- Tout le monde ne peut pas se permettre d'ouvrir des nouvelles branches transatlantiques sans considération Tony. Tu as pensé au personnel ? Aux locaux ? Les projections sont plutôt favorables, mais on ne sait même pas si ça va être rentable parce que tu sais que la recherche…
- Je sais, l'interrompit-il gentiment. Mais tout sera parfait, Pep. C'est ton idée après tout.
- Vil flatteur, soupira-t-elle. Allez, file. Et fais-moi le plaisir de répondre plus souvent à mes mails d'accord ?
- À vos ordres, chef ! »
Une fois dans le taxi et assuré qu'il se trouvait loin des oreilles indiscrètes, Tony saisit son portable.
« Okay, J ? Donne-moi un résumé de la situation.
- Je suis désolé, monsieur. Monsieur Odinson semble avoir trouvé le moyen de se libérer de ses chaînes.
- Comment ? J'ai les clefs sur moi, s'interrogea-t-il en fouillant ses poches pour les trouver. Évidemment, elles n'y étaient pas.
- L'enfoiré, grogna-t-il.
- Je ne l'aurais pas mieux formulé monsieur, lui répondit l'intelligence artificielle. Si j'étais vous, je demanderais au chauffeur d'accélérer, il a mis la main sur la carte et les codes de votre compte courant.
- Pardon ?! Mais contacte la banque, non, non, oublie ça, ça risquerait d'alerter quelqu'un. Juste, passe-moi ce petit psychopathe, tu veux ?
- À vos ordres, monsieur. »
Tony attendit un petit instant, maudissant la circulation new-yorkaise. La voix posée du dieu résonna dans l'habitacle et c'était définitivement bizarre de l'entendre au travers d'un téléphone.
« Un problème Stark ? Vous interrompez ma session de shopping. C'est bien ainsi que vous les midgardiens appelez ceci, n'est-ce pas ? demanda-t-il très poliment.
- Ta session de shopping financée par mon argent enfoiré ! Arrête ça tout de suite !
- Ou quoi ? Vous allez appeler le SHIELD ? Soyez un peu compréhensif Stark, la blouse que vous m'avez offerte est absolument affreuse, j'ai besoin d'une nouvelle garde-robe, lui répondit-il. Tony commençait à connaître l'animal, et malgré son ton très tranquille, et il était sûr qu'il se marrait.
Heureusement pour lui, la tour était en vue. Il stoppa le chauffeur, exaspéré, et trottina jusqu'à l'entrée en pestant.
- Continue comme ça et je te jure que je vais t'éventrer sur place ! le menaça-t-il.
- J'ai hâte de voir ça. » Fut la seule réponse qu'il reçut, et Tony aurait juré entendre des clics réguliers à l'autre bout de l'appareil.
Effectivement, Loki se trouvait dans le salon où il était arrivé plus mort que vivant peu de temps auparavant. Il s'était installé sur son canapé en cuir, pieds nus sur le tapis fraîchement lavé, un des derniers ordinateurs Stark sous le nez, et la carte de crédit de son hôte fermement en main. Il leva à peine les yeux de l'écran lorsque Tony fit irruption dans la pièce.
« Lâche cette carte tout de suite enfoiré ! JARVIS, envoie mon armure au moindre truc suspect, ordonna-t-il.
- La violence, toujours la violence, railla le dieu. Qu'en pensez-vous Stark ? Plus beige ou anthracite ? demanda-t-il en tournant l'écran vers lui.
- Dior ? Sérieusement ? Déjà entendu parler d'Armani ?! Et il ferma l'ordinateur sous le regard outré du dieu qui leva ses deux mains en l'air. Tony remarqua qu'il portait toujours les bracelets. Oh, et il s'était débarrassé de la blouse.
- Est-ce que ce sont mes vêtements ?!
- Eh bien, ils se trouvaient dans votre dressing. Un peu serrés, mais une vraie amélioration par rapport à ma tenue précédente.
C'était étrange de voir Loki dans des vêtements humains, ses vêtements plus précisément. Il ne reconnaissait pas le pantalon, un truc noir et souple, mais il se souvenait très bien d'avoir porté le pull brun l'hiver dernier.
- Je te déteste très officiellement, soupira-t-il en s'affaissant sur le fauteuil qui se tenait près du canapé.
- Vous devriez, c'est le signe d'un esprit bien équilibré.
Tony eut un souffle entre exaspération et amusement.
- Rends-moi les clefs petit malin, demanda-t-il en tendant sa main vers le dieu. Je suppose que tu les as prises pendant ton petit numéro de charme tout à l'heure ? C'est un peu un soulagement, je dois t'avouer que j'ai marché cinq minutes.
Loki eut un petit rire qui dévoila ses dents blanches et il rejeta la tête en arrière avant de lui rendre docilement les clefs. Celles-ci clinquèrent, suspendues entre eux. Il avait les doigts très fins, ne put s'empêcher de remarquer Tony en récupérant son bien.
- Mes excuses, Stark, mais votre expression était hilarante. De plus, je pense bel et bien que vous êtes charmant. Dommage pour vous, je n'aime pas être enfermé.
- Merci pour le compliment, mais t'es pas mon genre Rudolphe. Je préfère mes conquêtes moins… cornues. Et peut-être moins meurtrières aussi.
Loki rit encore, et vraiment, Tony savait qu'il avait de l'humour, merci bien, mais le dieu devrait vraiment arrêter de faire ça parce que la situation devenait trop absurde pour lui.
- Ah… Je vous aurais pris pour quelqu'un de moins ennuyeux, mais peu importe, j'aurais quelque chose à vous demander Stark. Disons, une faveur.
- Absolument hors de question, répondit-il du tac au tac. Je suis prêt à admettre que t'es un peu sympa, mais ça ne veut pas dire que j'ai oublié que t'étais aussi un gros malade qui tente de conquérir des planètes des autres dans son temps libre.
- C'est terriblement réducteur, j'ai beaucoup d'autres occupations.
- Comme quoi ? Voler les honnêtes gens en claquant leur argent durement gagné dans des costumes à deux mille euros ? Excuse-moi si j'ai du mal à te faire confiance sur le sujet, mais t'as pas exactement fait preuve du meilleur comportement pendant tes quoi… oh, à peine deux jours de conscience.
Loki émit un reniflement moqueur, croisa délicatement ses jambes avant de se pencher sur lui.
- Uniquement parce que je m'ennuyais, Stark… Laissez-moi juste un peu plus de marge et je vous promets que je serais sage comme une image.
Tony avait du mal à comprendre ce que le dieu lui suggérait. Peut-être parce que c'était la deuxième fois de la journée qu'il approchait son visage ainsi, avec ses yeux très verts et ses airs de requin. Il était prêt à admettre qu'il était mal à l'aise. Et moins prêt à admettre qu'il n'était pas que mal à l'aise, ce qui était un plus gros problème. Oh, il n'avait pas envie d'y penser.
- Alors quoi ? Je te laisse te balader en toute liberté au risque de te voir assassiner n'importe qui à n'importe quel moment ? Tu sais quoi ? C'est une idée très intéressante, mais je crois que je préfère l'option B, où tu restes sagement attaché dans ta nouvelle chambre.
- Voyons Stark, si vous voulez me voir attaché dans une chambre, il vous suffit de me le demander gentiment.
Tony s'étouffa, et se recula dans son fauteuil pour tousser à sa guise. Il entendit le rire grave et bas du dieu du coin de l'oreille. Il allait tuer cet enfoiré.
- Ce n'était pas ce que je proposais cependant, reprit ce dernier, indifférent à la toux frénétique de son hôte. Mettons, vous me retirez juste les chaînes et je consens à garder vos bracelets à alimentation super secrète en échange. Qu'en pensez-vous ?
Tony, qui venait tout juste de parvenir à calmer sa toux, fit de son mieux pour parler fermement et pas comme un phoque asthmatique et qui courrait un marathon. Enfin, nageait un marathon. Bref.
- Tu crois peut-être que je sais pas que même sans magie, tu gardes une force style je peux soulever des voitures dans mon sommeil ? C'est toujours non, Rudolphe. Je suis peut-être assez stupide pour te sauver la vie, mais pas suicidaire, merci beaucoup. On en a déjà parlé.
- Considérez que je serais considérablement plus reposant à vivre, insista Loki. Vous ne pouvez pas avoir envie de vivre dans la peur constante d'une de mes nouvelles évasions, qui, comme je viens de vous le démontrer, se trouvent être inévitables. Nous en avons déjà parlé ce matin, nous n'avons aucune idée de quand Asgard décidera de s'intéresser à votre monde, ce qui vous promet de longs mois, voire des années de souffrance nerveuse à mes côtés.
Il avait raison, l'enfoiré, réalisa Tony. Il n'avait aucune envie de passer ses journées à stresser de revenir chez lui pour trouver sa tour complètement brûlée. Néanmoins, il protesta pour la forme.
- Des années ? Tu exagères…
- Nous n'avons pas la même notion du temps que vous, les midgardiens, lui rappela le dieu. Vous avez ma parole, je serai un prisonnier exemplaire.
Tony grogna, mais il se sentait battu. Il avait d'autres choses à faire que de passer sa vie à surveiller un dieu du chaos récalcitrant. L'idée d'une trêve n'était pas si mauvaise.
- Très bien, mais tu gardes ces menottes tout le temps. Si j'apprends que tu les as retirées, même pour aller chier, je vais chercher mon armure pour te rattacher à ce putain de lit, je me suis fait comprendre ? céda-t-il.
- Parfaitement, acquiesça le dieu, sourire en coin. Elles me suivront comme mon ombre.
- T'as intérêt. Et je veux pas te voir te balader en dehors de la tour non plus, JARVIS jouera aux espions en permanence.
- Pas de problème, j'adore le voyeurisme. »
Tony leva les yeux au ciel tandis que le dieu décroisait les jambes et quittait le canapé avec enthousiasme.
Il espérait vraiment qu'il ne venait pas de faire une énorme erreur.
