Les notes seront toujours en fin de chapitre et les TW en début de chapitre. Enjoy.
- CHAPITRE I -
Les ténèbres s'étaient installées depuis plusieurs heures déjà. Une de ces nuits sans lune, sans étoiles, sans une seule guidance. Aussi grisante que glaçante, elle forge aux âmes esseulées un réconfort timoré. À cette pensée, l'expression de son visage se resserra. Il se sentit s'arrêter, dévisageant le ciel maintenant recouvert d'une toile compacte de nuages fuligineux. Ont les entendaient ronronner suavement, aux oreilles des mortels, un funeste présage qui restera sourd. Oui, il en était certain maintenant : il allait pleuvoir à nouveau.
Porté par ses pensées, il se remit en route. D'une main distraite, il se caressa ses lèvres gercées avec la pulpe de ses doigts ankylosées par le froid. Il sourit jaune, amer. Il lui vint en mémoire les fois où il rêvassait lors de battues, ralentissant le pas et annihilissant sa vigilance. Ils l'attendaient au loin, toujours. Oui, ses coéquipiers exaspérés qui le sermonnait vainement de ne plus se mettre en danger intimement dans une telle situation. Puis lui qui clopinant jusqu'à eux avec le sourire aux lèvres, les joues chauffé par la gêne et le cœur embaumé par la camaraderie. Sa bouche s'emplit d'une sensation astringente et ses poings se serrèrent. Depuis quand ne s'étaient-ils pas vus ? Depuis quand n'avaient-ils plus croisé leurs regards ? Si seulement cela ne s'était jamais produit. Mais quoi, déjà ? Il s'était forcé à oublier. Son nez se retroussa.
Il arriva à la lisière d'une forêt aussi verdoyante qu'angoissante. Il jeta un dernier regard autour de lui. Le brouillard s'accentuait lascivement. La chaîne de montagnes, aux pics enneigés disparaissant au-delà du ciel ébène, lui faisait affront avec assurance. Rien d'anormal. Alors il plongea, la respiration coupée et les sens en alertent, pensant pouvoir échapper au poids suffocant qui grandissait en lui.
Il se mit à humer l'air, familier aux senteurs caractéristiques des épicéas, des sapins et des mélèzes. À ses pieds, le sol détrempé s'amusait à répondre au poids de ses pas par des couinements qui l'irritèrent au premier instant. Cela devait faire plusieurs heures qu'il errait dans un sous-bois qui lui paraissait sans fin. Finalement, il se retrouva à la bordure d'un cours d'eau puissant sorti hors de son nid. Un peu plus loin dans une ouverture, longeant la face lisse d'une falaise, une cascade se déversait furieusement dans le vide. Les pluies torrentielles qui se sont déversées dans la région en sont sûrement la cause. Sans vraiment y réfléchir plus longtemps il y plongea la tête avant de la retirer par un sursaut, surpris par la fraîcheur de l'eau. Il prit le temps de s'observer sur le reflet de l'eau. Agité, il n'en trouva qu'une masse difforme et compacte. Indifférente, déshumanisée. Vide.
Une sueur froide le fit frissonner. Il repartit sans assouvir sa soif. Et maintenant ? D'un geste négligé, il se plaqua les cheveux vers l'arrière. À cet instant-là, un crachin(1) se mit à tomber, mourant par-delà l'herbe marécageuse. Puis vint une tempête qui se mêla à l'abîme de la nuit et à l'étouffement langoureux d'un brouillard trop épais. Fatigué, il s'arrêta là quelque part et attendit quelque chose, les yeux vitreux. Un moment, quelques heures. Il ne savait plus. Il n'en avait que faire.
Une prise dans ses tripes le réveilla brutalement. Singulièrement… vaseux ? Il entendit un souffle haché et sifflant. Il voulait voir s'il y avait quelqu'un, mais ses yeux peinaient à s'ouvrir. Avec un effort qui lui était agonisant, il ne réussit à distinguer la moindre chose entre ses cils. "Personne." Ah, mais c'était le sien. Il referma ses yeux, rassuré, puis glissa sa langue sur ses dents. D'ailleurs, il avait soif, sa bouche était pâteuse et sa langue engourdit. "Repose-toi". C'était la meilleure chose à faire, mais il faisait froid, trop froid. Il se sentait gelé, ne pouvait plus bouger, ni même trembler. Avant de pouvoir penser à autre chose, d'étranges lumières se mirent à vibrer en une valse bigarrée(2) lui donnant quelques relents de nausées. Plus grand-chose n'avait de sens à présent. Les sens… il les sentait comme amplifiés, distordus, égarés. Une sorte de quiétude se répandit, l'aspirant à se laisser bercer par le gouffre de son inconscient. "En paix."
"En paix…?" Répéta-t-il confus.
Soudain, il écarquilla les yeux. Une colère sourde s'éveillant dans tout son être. Aux aguets, comme libéré d'un mauvais sort, il se redressa sur ses coudes écorchés en ignorant avec difficulté l'odeur nauséabonde qui emplissait ses narines. Il ne lui fallut pas longtemps avant de comprendre.
Oui. Il comprit, mais bien trop tard que, sa partie de chasse était achevée.
En effet, il était dorénavant sa proie.
"Merde…" Son sang ne fit qu'un tour. Il se releva d'un seul bond, ignorant le panaché de tâches qui obstruait sa vue. Il devait le trouver, vite. Il n'avait plus de temps.
Une détonation cauchemardesque arrêta l'air, les courants d'eau, le ciel et la terre. Saisi d'effroi, il ne put que réprimer une sueur froide sans oser se retourner. Il réfléchit, peut-être trop vite ou peut-être passez assez.
Il était là, derrière. Une puissance, comme jamais il n'en avait rencontré, aussi écrasant que démoniaque. Il y avait cette odeur aussi, accompagnant celle du marécage qui lui faisait face, celle d'une mort certaine. L'air se condense puis disparu, ce fut à nouveau cette atmosphère suffocante et empoisonnée. Il eut l'impression d'accueillir en son sein des braises ardentes glissées malicieusement par les immortels.
Serait-ce la Parque(3) ? Il oscilla vaguement entre excitation et peur, émerveillement et répugnance, ne sachant que penser. N'y avait-il aucune promesse pour le maintenir en vie ? En avait-il envie ? S'il échouait ?
Dans un réflexe qui le surprit, il réussit à souffler un rire rance ignorant le déluge de larmes roulant sur ses joues meurtries. Il contient tant bien que mal ses sanglots, gardant l'honneur en tout instant. Puis, il se mit à rire incontrôlablement. L'un de ces rires qui ne sonne pas bon, presque damné, tournant sur lui-même prêt à chavirer.
La créature lui faisait enfin face. De toute sa laideur, elle lévitait à quelques mètres du sol. Elle avait le teint gris, un semblant de corps humain squelettique aux longs bras achevés par des pattes griffées et aux jambes cagneuses. Une immonde excroissance, recouverte de visages pétrifiés par l'horreur, l'obligeait à se recroqueviller sur lui-même. Enfin, son visage n'affichait que les cavités d'un visage aux yeux arrachés, la gueule édentée et grande ouverte.
Il s'entendit dégainer l'épée qu'il portait sur son dos. Le voilà, le combat. Après plusieurs mois à la recherche d'une créature avec laquelle il pourrait s'amuser. Il avait dû affronter tant de misérables créatures, faiblardes, sans jamais pouvoir mettre en avant sa force à lui. Car il pouvait affronter plus, toujours plus, pour protéger ce monde. Protéger ceux qu'il aime.
Créature d'un autre monde qui s'était trop approché de la frontière des Hommes. Mais ce qu'elle ignorait, c'était son arrivée en enfer. Il allait scinder cette chose en deux.
La créature se lança et il en fit de même sans un vacillement. Crachant sa langue recouverte d'un venin aux perles corrosives, il les contourna d'une impulsion vers l'arrière.
"Saloperie, cracha-t-il entre ses dents serrées, se sentant presque trahi par la perfidie attaque. Je pensais que tu étais celle que j'avais ressentie plus tôt ! Je n'ai pas le temps de jouer avec toi, conclut-il hâtivement."
Il n'eut à peine le temps de finir sa phrase qu'une douleur lancinante au flanc gauche lui coupa le souffle. Les yeux écarquillés, il vit une autre créature d'un genre similaire à la première, mais en même temps bien distincte. Haute de plusieurs mètres, imposante, dégoulinante de sang coagulé et de sa propre chair étirée en lambeaux. Elle était reliée à la première par un cordon sortant de son ventre limpide et enflé, d'où se percevaient les chairs en putréfactions.
Elle avait réussi, au-delà de sa carrure, à le prendre par surprise et à lui arracher la moitié de ses tripes. "Impensable". Il n'en avait jamais été informé d'une telle agilité et d'un tel silence. Il n'en avait jamais rencontré d'ailleurs. Les créatures qui s'égarent dans le monde des mortels sont toutes singulières, ne gardent en commun leurs aspects effrayants, leurs cris repoussants et leurs insatiables faims de chair humaine. Il n'était pas dans l'habitude de ces choses d'unir une sorte de partenaire ou même de réfléchir, elles se lançaient corps perdu de front. Alors, pourquoi ne leur avaient-ils pas avoué la vérité ?
Ses sourcils se froncèrent lorsqu'il ne comprit plus vraiment le sens de ses propres réflexions. À nouveau, il régurgita mollement du sang. Il y en avait plein le sol, autour de ses pieds. Une immense flaque dont la terre mouillée aspirait la moindre goutte, laissant ressortir un pétillement de bulles qui le prirent en hypnose un moment. Il leva une main pour toucher l'herbe tâchée pour finir par arracher une petite fleur. Il l'observa doucement, apaisée par les teintes chaudes ainsi que le bout singulier des pétales. Il n'en avait jamais vu des comme ça. Il avait l'impression qu'elle était en feu. Son émerveillement s'estompa lorsqu'il se rendit compte qu'il était à plat ventre, la joue contre terre.. Il n'avait même pas fait attention. Quand était-il tombé ? Qu'importe, c' était fini.
Alors, il attendit. Mais rien ne vint. Le regard voilé, il se contenta de fixer l'horizon sans savoir que trois paires d'yeux l'observaient juste au-dessus de son corps inerte et de ceux des deux créatures vaincues, déchiquetées et étalées autour de lui.
Notes de bas de page (références) :
(1) Crachin : Petite pluie fine et dense.
(2) Bigarré : De couleurs disparates et non harmonieuses.
(3) La Parque : Le destin, la mort. Provenance mythologique Les Parques, une triade de divinités féminines romaines (Nona, Decima et Morta) analogues aux Moires grecques, chargées de filer, dévider et couper le fil des vies humaines.
Notes de l'auteur (NDA) :
Merci pour votre lecture ! J'espère que ce chapitre vous a plût. Il parait un peu flou, énigmatique, mais c'est volontaire. Je vous avoue que tout ce qu'il se passe dans cette histoire, ferons sens progressivement. Aussi, il est normal qu'aucun nom/sobriquet n'a été donné exprès. Je m'en excuse quand même pour tous ces "Il, il, il, il, lui, il, il, il". Ca m'a pas mal agacé pendant l'écriture, mais c'était nécessaire !
Il y a sûrement des coquilles et/ou des fautes à certains endroits, rapportez-les moi si jamais. Faites-en de même si le texte présente trop d'incohérences ou s'il manque intelligibilité.
Aussi, j'avoue ne pas savoir ce que je vais en faire, mais sûrement la finir un jour. C'est certain. Et puis, je sais à quel point c'est frustrant d'attendre des suites en vain ! J'aimerais en faire au moins une vingtaine de chapitres.
Bref, enfin un Sukuna x Yūji, un vrai de vrai. Je vais essayer de les garder IC, mais c'est une tâche assez complexe. Je n'aime pas vraiment quand les personnages sont trop différents, à moins qu'il y ait une raison dans le développement de la fanfiction.
Progressivement je vous indiquerais les nouveaux tags/TW en annotation avant la lecture du chapitre. J'en garde certains qui ne sont pas nécessaires et qui vous spoilerons plus qu'autre chose. Donc, s'il vous plaît prenez-en connaissance c'est impératif. Il est possible qu'il n'y en ait absolument aucun...de TW. Je ne sais fichtrement rien de ce que je vais pondre là.
Si vous avez des questions, n'hésitez pas.
Anecdote :
Prodótēs (προδότης) se prononce prod-ot'-ace.
Clause de non-responsabilité (le disclamer, en gros..) :
Je ne possède pas le manga Jujutsu Kaisen (呪術廻戦), ni aucun des personnages associés. Le manga Jujutsu Kaisen (呪術廻戦) a été créé par Gege Akutami (芥見下々) et appartiens à Shūeisha Inc. (株式会社集英社). Cette histoire est uniquement destinée à des fins de divertissement. Je ne tire aucun profit de cette histoire. Tous les droits du manga Jujutsu Kaisen (呪術廻戦) appartiennent au Shūeisha Inc. (株式会社集英社).
Toutes les personnes susmentionnées ignorent complètement que moi et mes histoires existent. That's so sad.
