Hermione sursauta lorsqu'elle entendit Draco transplaner derrière elle. Elle referma "Lever le voile du futur" et le balança sur le sofa.
Draco n'était pas parti longtemps, mais elle s'était tellement ennuyée qu'elle avait décidé de remonter le canapé. Elle s'était installée dessus pour entamer sa lecture, avait lu quelques chapitres (sans grandes conviction), et voilà qu'il débarquait de nouveau.
- C'était rapide, lui dit-elle.
- Hm.
Draco était contrarié, cela se voyait comme le nez au milieu de la figure. Il s'avança vers le sofa et marqua une pause devant pour indiquer à Hermione de lui laisser une place.
- Ca ne s'est pas bien passé, on dirait. dit-elle doucement.
Le serpentard lui jeta un regard en coin en s'affalant dans le canapé.
- Tu es vraiment très perspicace, c'est de là que te viens ta réputation de petite génie ? ironisa t-il froidement.
Hermione ne releva pas. Puis, elle l'aperçu chercher quelque chose à l'intérieur de sa veste. Il attrapa sa baguette et fouilla plus profondément sa poche avant de sortir ce qui semblait être une petite fiole.
- Amplificatum.
Hermione écarquilla les yeux. Une bouteille de ... Whisky ? La gryffondor se retrouva tellement sidérée qu'elle en perdu sa voix. Draco rangea sa baguette, comme si de rien n'était, et observa quelques secondes l'étiquette d'un air désabusé. Puis, il dévisa le bouchon et en avala une gorgée.
- Euh ... Qu'est-ce qu'il se passe ? demanda Hermione.
Draco grimaça légèrement alors que le whisky sec descendait dans sa gorge et s'attardait sur sa langue. Il ne répondit rien. Hermione le dévisagea, si bien qu'au bout de deux autres gorgées il se tourna légèrement vers elle et la questionna du regard. Elle eu du mal à s'exprimer tant la situation était lunaire.
- Qu'est-ce que tu fais ? réussi t-elle à articuler
- Je bois, répondit-il d'un ton monocorde
- Mais pourquoi ?
- Et toi, pourquoi tu as toujours besoin de tout savoir, hm ? Toujours tout comprendre. Pourquoi ci, dit-il en penchant la bouteille à gauche, pourquoi ça, reprit t-il en la penchant à droite. Toujours entrain de poser des questions et de te mêler de ce qu'il ne te regarde pas.
Hermione, bouche bée, le fusilla du regard alors qu'il reprenait une gorgée.
- Quoi ? Dit-il après avoir avaler l'alcool qui lui brûlait le palais.
- Tu fais n'importe quoi ! Arrête. Tout de suite. Ce n'est pas sérieux. Donne moi cette bouteille.
Hermione tendit la main pour saisir le whisky, mais Draco la leva au dessus de sa tête juste à temps.
- Oh, pardon. J'en oublie mes manières, peut-être voudrais-tu un verre, Granger ? persifla t-il
- Bien sûr que non ! Et tu ne devrais p...
Draco ricana, lui coupant la parole.
- Qu'est-ce qu'il te fais rire ?
- Ca m'aurait étonné.
- De quoi ?
- Que miss coincée-en-cheffe ai déjà trempée ses lèvres dans autre chose que du jus de citrouille; se moqua t-il.
Hermione laissa échapper un hoquet, outrée.
- Ce n'est pas la question ! Ce n'est pas sérieux. On est sensé resté un minimum vigilant, et toi tu ... Tu bois ?!
Draco fit mine de trembler de peur, une moue faussement apeurée sur le visage.
- Cesse de faire l'enfant !
- Et cesse d'être une véritable emmerdeuse, murmura t-il en se penchant vers elle avant de se réadosser à l'accoudoir.
Hermione plissa les yeux.
- Très bien, grogna t-elle. Fais ce que tu veux. Je commence à comprendre pourquoi toutes vos missions tombent à l'eau, si se saouler à la moindre petite contrariété est une tradition chez les mangemorts.
Le regard de Draco s'assombrit. Dos à l'accoudoir, il se tenait assis face à elle. L'un de ses coudes reposait sur le dossier tandis qu'il jouait avec le goulot de son autre main, une jambe pliée sur le sofa, l'autre posée au sol, Il ne dit rien pendant plusieurs secondes et se contenta de l'observer, ses mâchoires se contractant alors que son regard pourtant si clair devenait étrangement noir et perçant. Hermione, assise à l'autre bout du sofa, droite comme un piquet, détourna les yeux. L'espace d'un instant, elle cru qu'il allait répliquer en lui lançant une méchanceté. Mais d'un coup les traits de son visage se détendirent et l'air sinistre qui l'avait saisi disparu aussi vite qu'il était apparu.
- Moi au moins je sais me détendre. Quelqu'un ici ne peux pas en dire autant...
- Quelqu'un ici sait parfaitement bien s'amuser, quand il le faut.
Draco pouffa d'un rire condescendant.
- Ce n'est pas sérieux. Et si des raffleurs arrivaient ?!
- Si ces charognards arrivent, ce qui est très peu probable étant donné que je connais leurs routines de patrouilles, ils tomberaient nez-à-nez avec moi. Si tu as peur, Granger, tu peux retourner dans ton armoire.
Hermione jeta un regard assassin au serpentard. Il esquissa un sourire mesquin et ferma les yeux en portant la bouteille à ses lèvres.
La bouteille n'atteint pas ses lèvres. Il sentit les coussins s'affaisser sous un poids qui n'était pas le sien. Lorsqu'il ouvrit les yeux alors que la bouteille lui échappait des doigts, Hermione s'était avancée sur le canapé et l'attrapa d'un geste vif. Leurs regards se croisèrent, une fraction de seconde, avant qu'elle ne s'écarte et se rassoie de son côté, un petit rictus victorieux au coin des lèvres.
- Pincez moi je rêve, s'exclama Draco. Miss coincée écoute la voix de la raison.
Hermione s'esclaffa tandis qu'elle examinait l'étiquette de la bouteille.
- C'est cela ! Draco Malfoy la voix de la raison, pouffait t-elle. Non, j'en ai juste marre de me disputer avec toi, et je m'ennuie à mourir.
- Fais attention, normalement les enfants n'ont pas le droit de boire ce genre d'alcool.
- La ferme, Malfoy.
Hermione amena la bouteille à ses lèvres et bu une gorgée. Lorsque le liquide entra dans sa bouche, elle n'avala pas tout de suite et se retient de cracher le breuvage tant il lui brûlait la langue. Ce n'était pas du Whisky "pur feu" pour rien. Les larmes lui montèrent aux yeux sous le regard amusé de Draco, qui attendait patiemment sans se départir de son attitude nonchalante.
Hermione bu, sentant l'alcool glisser le long de sa gorge, et toussota quelques fois avant de tendre la bouteille au serpentard, qui ricana d'une voix rauque.
- Ce n'est vraiment pas bon, articula Hermione.
- Ce n'est pas fait pour. Si je voulais quelque chose de bon, j'aurais ramené un vin français.
- Je suppose ...
Plusieurs minutes passèrent sans qu'aucun d'eux n'ajoute quoi que ce soit d'autre. Ils se contentait de fixer le mur en face d'eux, se passant de temps en temps la bouteille de whisky. C'était une sensation étrange, que d'être entrain de partager une bouteille ensemble. S'il avait réussi à plaisanter, l'ambiance était redevenue un peu plus lourde alors que chacun sombrait dans ses pensées. Puis, au bout d'un moment, Hermione retourna son attention vers Draco. Il avait appuyé son avant bras sur son genoux, et balançait lentement la bouteille de whisky d'un mouvement de main las. Elle ne l'avait pas remarqué, mais ses phalanges étaient abîmées. Comme s'il avait cogné sur quelque chose. Elle resta pensive quelques instants, puis demanda d'une voix calme.
- Qu'est-ce qu'il s'est passé, chez toi ?
Le mangemort se raidit légèrement alors qu'il observait le liquide ambré qu'il faisait tourner dans la bouteille; maintenant vidée de moitié. Il ne répondit rien. Hermione soupira.
- Tu sais Draco, on est pas obligés de s'entendre. Mais on peut essayer de se comprendre, non ?
Le serpentard l'observa intensément du coin de l'œil, le visage figé dans une expression indéchiffrable. Elle aura essayé. Discuter avec Draco n'était pas de tout repos, tant pis s'il ne voulait pas faire d'effort. Au moins aura t-elle eu la maturité de rendre leur quarantaine forcée un peu moins pénible.
- Hermione ?
La jeune femme sursauta presque et tourna la tête vers Draco, les yeux ronds. Jamais il ne l'avait appelée Hermione; jamais, depuis qu'elle était entrée à Poudlard à ses onze ans, le jeune Malfoy ne l'avait appelé par son prénom.
- C'est dur à faire, un patronus ?
Hermione en était restée bouche bée. Elle lui avait demandé plusieurs fois s'il était sérieux, et voyant qu'il commençait à perdre patience, s'était résignée à le reconnaître: Draco Malfoy faisait un effort.
Enthousiaste à l'idée de partager ses connaissances, elle se redressa contre le dossier du sofa et se tourna entièrement vers lui. Elle lui expliqua tout ce qu'elle savait. A son grand étonnement, il ne la coupa pas une seule fois, se contentant de poser quelques questions ça et là lorsqu'elle marquait une pause. Elle lui apprit qu'il s'agissait d'une forme très pure et complexe de magie que peu de sorciers réussissaient à maîtriser totalement.
- Donc, tout le monde n'y arrive pas ? demanda Draco.
- Malheureusement, non. Il faut voir ça comme ... une projection de forces positives qui représentent la personnalité du lanceur de sort. C'est comme l'expression d'un "soi" profond. D'ailleurs, certains sorciers s'étonnent de découvrir l'animal qui en sort.
- Hm ... acquiesça Draco en hochant légèrement la tête. Que veux tu dire par "une projection de forces positives" ?
- Eh bien, cela peut-être ... La joie, par exemple. Ou bien l'espoir, l'amour. Harry nous avait demandé de nous concentrer sur le souvenir le plus heureux qu'on pouvait se remémorer, et d'en revivre chaque détails. Mais j'imagine que plusieurs méthodes peuvent amener au même résultat, du moment que l'intention reste bienveillante.
Le visage de Draco s'était quelque peu assombri.
- Comment ça ?
- Eh bien ... Si un sorcier venait à vouloir utiliser ce sort à de mauvaises fins... il se retournerait contre lui.
- Comment ?
- Je ne sais pas si c'est un cas général mais .. c'est arrivé à un mage noir, Raczidian. Il a été... dévoré vivant par une ordre d'asticots...
Hermione eu un haut le cœur et lorsqu'elle tourna la tête vers Draco, ce dernier la dévisageait, une expression de dégout déformant ses traits. Puis il abaissa son regard et sembla soudainement prit dans ses pensées, l'air sombre. Hermione hésita.
- Qu'est-ce qu'il y a ? finit-elle par demander timidement.
Draco serra les dents avant de terminer le fond de bouteille qu'il restait, cul sec.
- Je ne pense pas que serais capable de jeter ce sort, dit-il gravement.
Hermione cilla.
- Pourquoi pas ?
Draco s'appuya sur ses genoux, les sourcils froncés. Comme s'il avait voulu partir, fuir de nouveau la situation, mais qu'il s'était repri au dernier moment. Il se mordait l'intérieur des joues et jouait avec la chevalière en argent qu'il portait à l'annuaire droit.
- C'est toi qui l'a dit. Une "projection de forces positives". Je ne vois pas comment je pourrais "projeter" quoi que ce soit de ce genre ... Je ne vaut pas mieux que mon père, cracha t-il d'un ton dédaigneux.
Hermione fut prise de court. C'était donc ça qui le tracassait réellement ? Malfoy avait peur de ressembler à son père ? Hermione avait les méninges en feu. Il avait parlé avec tant de gravité, tant de ressentiment... Se pouvait-il qu'il regrette d'être ce qu'il était ?
- Je ne pense pas, s'entendit -elle dire, le ton presque trop résolu.
- Quoi ?
- Tu n'es pas comme ton père, Draco.
Le serpentard ne répondit rien. Il l'observait intensément et Hermione eu l'impression qu'il cherchait des traces de sarcasme ou de mensonges sur les traits de son visage. Lorsqu'il n'en trouva aucun, son expression changea.
- Si tu ne m'avais pas aidée, l'autre nuit, je serais morte à l'heure qu'il est. Je ne pense pas que ton père aurait hésité une seule seconde à me tuer de ses mains. Toi, tu m'as aidé. Ne pense pas que ce geste efface les années de persécution. Mais ...
Elle réfléchit quelques instant avant de reprendre. Le visage de Draco exprimait toujours cette expression qu'elle n'arrivait pas à déchiffrer.
- Tu n'es pas quelqu'un de mauvais, Draco. Tu n'es qu'un incommensurable idiot. Et je suis sûre que si tu le voulais vraiment, tu pourrais être bien plus.
Draco sentit son cœur se fendre en deux et détourna le visage de celui d'Hermione.
Pas quelqu'un de mauvais... Son cœur se serrait si fort dans sa poitrine qu'il avait l'impression de manquer d'air. L'alcool lui brouillait surement l'esprit, car il eu envie de tout lui raconter. Tout raconter à cette fille qu'il détestait et qui le détestait en retour. Lui raconter à quel point il était terrifié et seul. A quel point les chaînes qui le tenaient prisonnier se resserraient un peu plus chaque jour qui passait. Comme il n'avait nul part où être lui, et personne à qui se confier.
Draco se rendit alors compte qu'il avait plus échangé avec la petite née moldue en quelque jours qu'il ne l'avait fait avec n'importe qui depuis des années. Il pouffa du nez.
- Quoi ? demanda Hermione.
- Arrête de raconter des conneries de bonne femme et montre moi ta loutre, Granger.
Hermione plissa les yeux.
- Pourquoi ? Pour que tu ries de moi ? Non merci, ronchonna t-elle.
- Non. Parce que tu ne voudrais pas rater une occasion de prouver que tu es meilleure que moi dans un domaine, et que c'est toi la gentille de l'histoire, répondit-il, un sourire en coin sur les lèvres.
Hermione se leva et se planta devant lui en le menaçant de sa baguette alors qu'il levait les mains au ciel en signe de reddition, sans se départir de son rictus mutin.
- Si tu te moques ...
Il la coupa en acquiesçant d'une moue exagérément entendue, puis elle lui tourna le dos.
- Spero patronum.
Aussitôt, une lueur bleutée et brillante s'échappa du bout de sa baguette et dansa dans les airs tel un ruban de satin. Draco se redressa, obnubilé. Le trait de lumière tourna dans l'air avant de prendre la forme d'une loutre, bondissante du sol au plafond, se mouvant comme si l'air qui emplissait le grenier avait été l'eau agitée d'une rivière.
Hermione afficha un air satisfait.
- Je me demande si ta fouine sera blonde, lui dit-elle d'un ton farceur.
Draco ri.
Elle ne savait pas si c'était à cause de l'alcool, mais elle se rendit compte qu'elle était entrain de passer un bon moment. Elle observa son patronus danser autours du sofa, le sourire aux lèvres. Les derniers jours avaient étés si stressants, traumatisants même, qu'elle avait oublié qu'une telle sensation de bien-être pouvait lui étreindre le cœur. Peut-être était-ce le whisky, mais elle se sentait légère et si détendue qu'elle manqua de trébucher lorsqu'elle voulu ranger sa baguette dans sa poche. Cette dernière roula sur le plancher, un peu plus loin. Hermione se retourna vers Draco, qui avait observé la scène et secouait la tête de droite à gauche d'un air désabusé. Elle leva les yeux au ciel en soufflant et partie ramasser sa baguette. Elle dû se concentrer pour ne pas tomber à la renverse lorsqu'elle se pencha, et dû s'y reprendre à deux fois avant que des doigts se réussissent à attraper sa baguette. Elle souffla de plus belle en se relevant, chancelante et se retourna.
Lorsqu'elle aperçu Draco, son sang ne fît qu'un tour et elle se figea sur place.
Il était entre de la fixer; adossé dans le fond du sofa, un bras étendu contre le dossier et l'autre nonchalamment posé sur l'accoudoir, les jambes légèrement écartées. Ses grands yeux clairs remontaient doucement le long de son corps, et elle cru sentir un feu brûlant suivre la route de son regard. Ses hanches, son ventre, puis sa poitrine, sa gorge, sa bouche et finalement, il la regarda droit dans les yeux. Il ne détourna pas le regard.
Ses cheveux platine été tirés vers l'arrière, à l'exception de quelques mèches qui dansaient devant ses yeux désormais étrangement plus sombres. Ses longs doigts fin caressaient machinalement l'accoudoir du sofa. Hermione sentit son ventre se nouer lorsque ses yeux rencontrèrent enfin les siens. C'était comme si, soudainement, la tension entre eux s'était transformée. Comme si, d'un coup, l'atmosphère était devenue plus lourde. Draco, lui, ne bougeait pas non plus. Ses yeux brillaient d'une intensité qu'elle ne reconnaissait pas. La gryffondor eu l'impression qu'une vague de chaleur la parcouru; ou bien était-ce le whisky ? Elle ouvrit la bouche, confuse, alors que les mots se perdaient dans sa tête.
Soudain, un bruit sourd retentit à côté d'eux. La loutre se dissipa instantanément dans l'air alors qu'ils se retournèrent simultanément et blêmirent de concert. Une grande silhouette encapée se tenait devant eux. Une silhouette sombre et menaçante.
Severus Rogue.
