Chères lectrices, chers lecteurs,
Pour ceux qui ne connaissent pas Dark Souls 3, ou même qui ne sont pas familiers avec l'univers des Dark Souls, sachez que j'ai essayé d'écrire pour que l'histoire soit compréhensible par tous. Le récit étant basé sur un jeu, le réalisme en pâtit un peu. Le moins possible j'espère.
Pour ceux qui connaissent déjà le jeu, sachez que j'ai pris quelques libertés, comme ajouter des lignes de dialogue à des pnj (que j'ai interprétés à ma manière en tâchant de respecter leur caractère), supprimer certains feux, ou légèrement changer l'agencement du décor pour la logique de l'histoire.
Attention : j'ai l'intention de raconter l'intégralité de l'histoire (ma version, tout du moins). Si vous n'avez pas terminé le jeu, gare aux spoilers !
Bonne lecture !
NB : mon emploi du temps étant irrégulier, je ne peux hélas garantir la sortie régulière de nouveaux chapitres.
La cloche sonnait une nouvelle fois et son écho, porté par le vent, résonnait jusqu'au vieux cimetière.
Il y eut un mouvement parmi les tombeaux épars et morcelés. Un de ceux jadis enterrés là, appelé par le son de la cloche, se relevait. L'être ressuscité ouvrit les yeux sur le ciel d'un blanc laiteux ; son cercueil dévoré par les âges était déjà ouvert. Lentement, il posa les mains sur les rebords de son lit de pierre, se hissant péniblement hors de ce qui aurait dû être sa dernière demeure. Faisant fi de ses membres engourdis et des cendres qui souillaient l'armure ternie par le temps qui le couvrait, le revenant se saisit de l'épée à double tranchant et du large bouclier qui avaient été enterrés avec lui.
Étrangement, et bien que se sachant mort, il ne s'étonna pas de se sentir toujours fait de chair et d'os. Il toussa plusieurs fois – depuis combien d'années l'air n'avait-il pénétré ses poumons ? – avant de faire un premier pas hésitant hors de la tombe. Il lui fallut quelques secondes de plus pour maîtriser à nouveau pleinement ses mouvements.
La cloche avait cessé de sonner et son écho s'était tu. Pourtant, dans la poitrine du chevalier ressuscité, l'appel était toujours présent. Il ne connaissait pas encore la raison de son réveil, mais il savait qu'il y en avait une. Une mission importante l'attendait ; il en était certain. Et cette tâche primait sur toutes les questions qui auraient dû être ses priorités. Qui était-il ? Quel était son nom ? Pourquoi la cloche l'avait-elle réveillé, lui ? Comment se faisait-il qu'il soit aussi "frais" qu'avant sa mort ? Comment était-il mort d'ailleurs ? Il l'ignorait, mais il priait pour que sa quête l'amène à trouver les réponses sur la route.
Il affermit sa prise sur la garde de son épée droite et se mit en marche. Il n'avait pas encore quitté le cimetière qu'il rencontra ce qu'il identifia instinctivement comme un ennemi : une "carcasse" – un cadavre ambulant n'ayant plus qu'une fine peau livide sur des os anguleux. Le corps décharné était debout, à une dizaine de mètres, les bras ballants, ses orbites vides dirigées vers le ciel, drapé dans une sorte d'ample robe noire. Il ne fallut pas longtemps au combattant en armure pour remarquer l'épée cassée que tenait la créature. Le ressuscité avait encore un peu de mal à bouger comme il l'entendait. Par sécurité, il préféra lever son bouclier et avancer lentement vers son ennemi. Ce dernier fit soudain pivoter son regard vide vers le mort-vivant en armure avant de charger, son épée brisée brandie au-dessus de la tête, en poussant ce qui aurait dû être un cri si ses cordes vocales ne s'étaient déjà décomposées.
La victoire fut rapide car l'échange de lames tint plus de l'exécution que du combat. La carcasse tomba inerte aux pieds du chevalier dans un râle sonore. Les âmes qu'elle transportait vinrent immédiatement se greffer au vainqueur. Il ne s'en étonna pas. Il savait qu'il en était ainsi, que c'était l'ordre naturel des choses : le fort prend au faible sa vie et son âme.
Sans plus de considération pour sa victime, le guerrier poursuivit sa route. Il avait à peine fait quelques pas que des corbeaux affamés s'approchaient déjà du corps qu'il laissait derrière lui. Intérieurement, il savait que c'était la première d'une longue liste de victimes. Il savait qu'il devrait tuer, encore et encore. Il ne savait pas pourquoi, mais il en était certain.
Le destin lui donna rapidement raison : d'autres carcasses avaient investi les lieux et barraient la route du chevalier. Il n'eut pas plus de mal à les abattre que la première, quand bien même il fut surpris de trouver des lanciers et des arbalétriers dans le lot.
Le seul chemin qui sortait du cimetière – ouvrant un splendide panorama sur des montagnes qui émergeaient d'une épaisse couche nuageuse – longeait une falaise balayée par un vent violent. La curiosité poussa le ressuscité à jeter un œil depuis le rebord. Un frisson le parcourut et il recula vivement quand il constata qu'il était impossible de voir, à travers les nuages, plus de dix mètres au-dessous de lui. Soudain très prudent, il longea la paroi rocheuse de profil.
L'unique passage praticable – d'où l'on pouvait voir une construction massive posée sur une falaise un peu plus loin – menait à un petit promontoire où trônaient les restes d'un feu. Une épée noire torsadée était plantée dans la terre, au milieu de cendres blanches. Des cendres d'os. Encore une fois, cela ne surprit pas le chevalier. Il se sentait même très proche de ce résidu de campement, jusqu'à en avoir une sensation de déjà-vu. Alors qu'il avançait la main vers la garde de l'épée enfoncée dans le sol, une faible chaleur enveloppa le guerrier solitaire. Bientôt, et sans qu'il sache comment, il avait tendu sa chaleur vers l'épée. Le feu se raviva de lui-même.
Une petite flamme dansait maintenant dans les cendres. Fasciné, le chevalier enleva son casque et s'agenouilla pour mieux admirer le feu qui venait de naître. Comme dans un songe, une vague brume l'entoura momentanément, juste le temps qu'il inspire doucement, juste le temps que le calme s'empare de lui. Quelque chose en lui pulsait au même rythme que la flamme. Ce n'était pas son cœur, il le savait, car celui-ci ne battait pas. Ou plutôt, il ne battait plus. Et cela lui paraissait normal. Ne s'était-il pas réveillé dans un caveau ? Il eût été étonnant d'avoir un palpitant actif en tant que mort-vivant. Il sourit à cette idée.
Le chevalier sans nom ne tarda pas à se remettre en route. D'autres carcasses – qui elles avaient une épée entière – semblaient l'attendre, mais toujours avec aisance, il s'en débarrassa en quelques coups de taille. Il progressait vite mais s'arrêta net avant de franchir une arche encadrée par deux torches. Une appréhension inexpliquée s'empara de lui.
