Dans le salon de son sanctuaire, Luna partageait avec Ollivander un plat de pain et de fromages. Depuis leur emprisonnement commun, les deux sorciers étaient restés en contact. Régulièrement, ils se retrouvaient autour d'un repas ou d'une boisson, discutant à bâtons rompus du temps qu'il faisait ou de la puissance du crin de telle ou telle espèce fantastique.
Et parfois, avant ou après cette collation, Ollivander passait un moment entre les mains de lady Hécate. Garrick était toutefois un client unique en son genre. Il n'éprouvait aucun frisson, aucun désir, aucun plaisir à participer aux cérémonies proposées par Luna. Si ça avait été quelqu'un d'autre, elle aurait sans doute mit fin aux séances depuis longtemps.
Quand le fabricant de baguettes venait, le scénario était toujours le même, à mille variations près. Luna recréait les conditions de leur détention commune et Ollivander se retrouvait à nouveau prisonnier. Sauf qu'il n'était pas torturé et qu'il pouvait mettre fin à cette situation d'un simple mot.
Ce jour-là n'avait pas fait exception à la règle. Luna l'avait enchaîné à un mur semblant fait d'une froide pierre grise et l'avait plongé dans le noir.
Transi dans la fine robe élimée que lui avait donné Luna, Garrick avait commencé à trembler.
– Chante pour moi, petit demoiselle, avait-il murmuré en claquant des dos.
Et, comme au temps de la cave du manoir Malefoy, Luna s'était mise à chanter. Elle chantait L'hippogriffe qui ne voulait pas voler, une comptine surgie de son enfance. Et c'était comme un bouclier contre la peur et le désespoir.
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Luna reprit une généreuse part de Morbier tout en écoutant Ollivander professé à propos des bois magiques :
– ... et c'est ainsi que sont faites la plupart des baguettes : à partir d'arbres non magiques dont les racines puisent dans des courants magiques anciens. Toutefois, pour des cas spécifiques, je pense qu'il peut être intéressant d'utiliser des essences purement magique, comme du Saule cogneur ou du Tilleul envoûtant.
– Monsieur Ollivander, que feriez-vous si un ancien ennemi passait la porte de votre boutique ?
Le vieux sorcier ne s'étonna pas outre mesure de ce changement brutal de conversation.
– Un ancien ennemi de qui ? Du ministère ? De l'Ordre du Phénix ? De l'Association des fabricants de baguettes ?
– Disons... un ennemi personnel.
– Comme un Malefoy, par exemple ? la questionna Garrick, l'air de rien.
Luna acquiesça d'un hochement de tête.
– Et que me vaut cette question, jeune fille ? demanda Ollivander avec un regard inquisiteur.
– Nous n'avons qu'à dire qu'il s'agit d'un exercice de pensée. Imaginons qu'une personne semblable à Drago Malefoy entre ici et demande à bénéficier de mes largesses, que me conseilleriez-vous de faire ?
– C'est ton domaine ici. Entre ces quatre murs, c'est toi qui fais la loi. Et rien ne t'oblige à accepter tout le monde, particulièrement des personnes t'ayant fait du mal.
– Vous me conseilleriez de fermer ma porte à cette personne ?
– Grand Merlin, non ! Je dis seulement que tu as toujours cette possibilité. Toutefois, les affaires sont les affaires et les Gallions n'ont pas d'odeur. À moins que cela ne te mette dans une position vraiment désagréable, je te dirais d'accepter tous les clients potentiels. Trier ses clients en fonction de l'éthique, c'est mauvais pour le commerce. J'ai moi-même accueilli les Malefoy dans ma boutique, le père et le fils ayant eu besoin de nouvelles baguettes à l'issue de la guerre. Chêne rouge et plume de phénix pour Drago. 28,75 cm, assez souple, combative et inventive. Lucius a arrêté son choix sur une baguette en frêne avec un cœur en crin de licorne. 31 cm. Une baguette exceptionnellement fidèle qui n'obéira jamais à personne d'autre.
– Et ça n'a pas été trop dur de leur faire face à nouveau ?
– Je me suis concentré sur mes baguettes. Et sur l'idée que ces deux ventes échappaient à cette vieille branche de Magdaly Gregorovitch.
Luna était pensive.
– Je pense que ceux qui m'entourent s'attendent à ce que je repousse cette personne.
– Ce n'est pas parce que tu réagis différemment d'eux que tu es dans l'erreur, Luna. En fait, je pense que tout se résume à une question assez simple : est-ce que la venue de Drago, ou de cette personne qui lui est semblable, te procure un violent sentiment négatif ?
– Non. Juste de la curiosité.
– Alors, accueille-le. Et n'oublie pas, rien n'est définitif. S'il devient insupportable, tu pourras toujours le mettre dehors avec un bon coup de balai au fesse. Et si tu as besoin d'en discuter, et bien, nos boutiques ne sont qu'à quelques pas l'une de l'autre.
Ils se quittèrent peu de temps après, Luna plantant une bise sonore sur la joue gauche d'Ollivander en guise d'au revoir.
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Drago Malefoy avait réussi à sauver les apparences.
La pommade qui lui avait passé Lovegood avait bien fonctionné. La trace de brûlure sur son front avait rapidement disparu et personne n'en avait rien vu. Le dispositif d'espionnage avait été démonté sans attirer l'attention de qui que ce soit. L'exposition chez Mapple et Maplle avait fourni un sujet de conversation léger pendant plusieurs repas. Et dans l'atelier des Cythère, les propos personnels avaient été implicitement bannis pour le moment.
Pourtant, sous la surface, Drago s'enlisait. Les images qu'il avait vu l'obsédait. Il en venait à regretter amèrement le jour où il avait fouillé le bureau de son père. À partir de ce moment-là, il avait mis le doigt dans un engrenage infernal qui était en train de le broyer.
Le jour du rendez-vous avec Luna, fruit d'une décision unilatérale de Lovegood elle-même, approchait. Quand il avait affirmé n'avoir aucune intention de s'y rendre, il ne mentait pas. Mais alors que la date approchait, l'idée de s'y rendre faisait son chemin.
Il espérait que ça lui changerait les idées. Il espérait que cela créerait de nouvelles images dans sa tête, des images qui chasseraient et remplaceraient celles de ses parents.
Il avait la sensation tenace de se vautrer et s'embourber dans des détritus immondes. Il ne pouvait de toute façon pas se sentir plus sale. Il voulait remuer la boue au fond de lui.
Et puis, si c'était assez bien pour son père, ça devait l'être pour lui aussi.
Et ainsi, inconsciemment, il continuait à mettre ses pas dans ceux de son père.
Car il était, avant toute chose, l'héritier des Malefoy.
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Ce fut donc encore empli de doutes qu'il se retrouva au Chemin de traverse le jour du rendez-vous. Une question le frappa soudain. De combien d'argent allait-il avoir besoin ? Luna Lovegood avait bien spécifié lors de leur première entrevue qu'elle n'avait pas l'habitude d'exercer gratuitement. Or, il ne connaissait pas les tarifs pratiqués par Luna Lovegood. Et il ne connaissait aucune activité semblable qui pourrait lui servir de comparatif.
Il passa donc à Gringott et emplit ses poches d'un mélange de menue monnaie et de grosses pièces d'or.
Arrivé devant le lampadaire, il hésita. Après tout, il n'était pas trop tard pour faire demi-tour. Il soupira avant d'entamer la procédure d'ouverture, pestant contre lui-même et son manque de compétence en auto-métamorphose.
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Dans le bureau, Luna l'attendait, un léger sourire aux lèvres, comme si elle n'avait jamais douté de sa venue.
– Comment se passe l'ouverture de ton Troisième Œil, Drago ?
Il fallut quelques instants à Drago avant de se rappeler que Luna avait décrété que sa blessure était le fruit d'une tentative de développement de ses capacités médiumniques.
– Mal. Jusqu'à ce matin, je ne savais même pas si je viendrais ici ou non.
Luna éclata d'un rire sonore. Excessif. Pourtant, cela ne semblait pas si drôle que ça à Drago.
– As-tu des attentes, cette fois ?
Drago passa sa langue sur ses lèvres sèches.
– Je voudrais savoir ce que ça fait d'être attaché. Et peut-être... fouetté.
« La pomme n'est pas tombé loin du pommier » pensa Luna.
– Voilà qui est dans mes cordes, dit Luna, riant à son propre jeu de mot.
Drago tritura nerveusement ses poches pleines d'or.
– Je ne sais pas trop... combien d'argent je suis censé te donner.
– Je t'ai prévu une séance d'une heure. Ça fera donc 20 Gallions.
Luna se leva avant de reprendre la parole :
– Je vais me préparer. Tu peux laisser l'argent sur le bureau avant d'aller te doucher. Ensuite, attends-moi nu dans la chambre. Mais d'abord, Drago, donne-moi ta baguette.
Drago la lui confia sans discussion.
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Quand elle entra dans la chambre, une dizaine de minutes plus tard, elle trouva Drago vêtu d'un peignoir bordeaux, en train de faire les cent pas dans la pièce.
– Nous allons commencer notre entrevue par un peu d'apprentissage, indiqua Luna. J'attends des personnes qui viennent me voir régulièrement qu'elles respectent certaines consignes.
– Je ne fais pas partie de ces personnes.
– Vraiment ? Pourtant, tu es là. Pour la deuxième fois.
Les yeux gris de Drago se plongèrent dans les siens, brûlant d'envie de la contredire. Mais sa langue fut plus disciplinée.
– Qu'attends-tu de moi ?
– Premièrement, je t'avais demandé de m'attendre nu. Et, sauf indication contraire, ce sera toujours le cas à l'avenir.
Drago défit la ceinture de tissu qui maintenait son vêtement fermé et s'approcha du porte-manteau suspendu à la porte. Il fit glisser le peignoir le long de ses bras et le pendit. Peu à l'aise, il resta immobile, ne montrant à Luna que son dos nu. Elle ne s'en offusqua pas. Elle n'avais pas besoin qu'il se retourne pour le moment.
– Fais trois pas en arrière. Bien. Mets toi à genoux. Les bras le long du corps.
Drago s'exécuta avec des gestes un peu raide, sans la regarder directement.
Alors qu'elle donnait ses instructions, Luna tourna autour de Drago, vérifiant qu'il se positionnait comme elle le souhaitait, le corrigeant parfois en le touchant du bout de sa baguette.
– Voi-là. Voilà comment je veux te voir quand j'entre ici. Voilà la façon dont tu dois te tenir jusqu'à ce que j'arrive. Voilà la position que j'attends de toi quand je te demande de m'attendre.
Drago acquiesça. Luna le laissa quelques instants dans cette position, afin que son corps la mémorise. Elle en profita pour passer en revue ses accessoires, s'attardant sur un martinet aux multiples lanière de cuir. Une bonne manière de découvrir la morsure du fouet.
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Il était temps pour Drago de quitter la posture d'attente et d'adoration. Luna lui demanda de se mettre debout. D'un sort, elle lui banda les yeux et d'un autre, elle fit venir à elle deux cordes. Elle accrocha la première au mur, la déroula et la laissa tomber bruyamment aux pieds de Drago.
– Qu'est-ce que tu fais, Luna ?
Elle ne lui répondit pas. Elle n'aimait pas qu'il utilise son prénom. Il brisait l'illusion qu'elle tentait de mettre en place, l'arrachant à son rôle en la ramenant brutalement à la réalité. Elle installa la seconde corde, sur le mur faisant face à la première.
– Luna ? répéta Drago avec inquiétude.
Luna perdit tout envie de jouer avec le martinet. Elle devait affermir sa position.
– Dame Hécate, Drago. Nodare !
Les cordes s'élevèrent, s'enroulèrent autour des poignets de Drago et se tendirent d'un coup, obligeant le jeune homme à écarter largement les bras.
– Que vais-je devoir faire, Drago, pour que tu te souviennes de mon nom ?
– Je vais faire attention, dame Hécate, promis le sorcier.
– Je vais m'en assurer. Flagellum.
Et sa baguette devint un fouet invisible entre ses mains. Elle l'éleva et l'abattit d'un coup sec, faisant vibrer l'air de sa lanière de pure magie.
Drago poussa un cri de surprise. Sous les coups, son dos s'échauffa. Sa chair ne se déchirait pas, mais elle se striait des longues lignes rouges. Il ne fit plus un bruit, serrant les mâchoires à chaque impact. Seul le sifflement de l'air déchirait par intermittence le silence.
Luna prenait son temps, laissant le temps à Drago d'imaginer et de craindre la violence du coup d'après.
Quand Luna jugea que Drago portait suffisamment de marques, elle cessa de le fouetter. Elle s'approcha de sa nuque et susurra à son oreille :
– La punition est terminée. Passons au plaisir.
Elle lui rendit la vue, mais ne mit pas fin à son sort de Flagellation. Elle changea juste de cibles. Avec des coups plus doux, elle commença par viser ses cuisses. Puis, lui faisant face, elle fit glisser sa baguette le long de son visage, avant de lui infliger un coup sec sur le poitrail.
– N'oublie pas qui je suis.
Elle recula d'un pas. Le corps de Drago réagissait. Le sang rougissait ses joues et commençait à gonfler son sexe. Elle repassa derrière lui, s'attaquant cette fois à ses fesses, alternant de sa baguette caresses et morsures. Après la brutalité des premiers assauts de Luna, le corps de Drago appréciait d'être traité avec plus de douceur.
Quand elle jugea qu'elle avait amené Drago aussi loin qu'elle le pouvait sur le chemin du plaisir, elle le détacha, lui rendant sa liberté de mouvement, et le laissa seule, afin qu'il puisse terminer la séance comme il le souhaitait.
