Chapitre 3

Le sauver

Théodore porta Drago jusqu'à la salle de bain où Granger avait rempli la baignoire d'une eau légèrement fumante. Il lui demanda de le dévêtir alors qu'il se mettait à fouiller dans les armoires et tiroirs de Blaise. La sorcière hésita un instant. Théo le remarqua et lui conseilla de ne pas penser au passé : Drago avait besoin d'elle, c'était une nécessité de le dénuder. Elle balbutia, parlant de consentement et de pudeur. Théodore sourit en lui rappelant que c'était un mal pour un bien et qu'elle avait dû voir des garçons plus séduisants que Drago dans son état actuel. Elle rougit :

« Ron est le seul garçon avec qui…

- Oh non, pitié : mes chastes oreilles de Serpentard ! » se moqua Théodore en continuant à chercher dans les armoires de la pièce.

Il en sortit plusieurs flacons et petites boites dont il versa le contenu dans le bain. La sorcière l'observa faire un instant, lui demandant ce qu'il préparait. Théodore expliqua qu'il avait beaucoup étudié la préparation de certains remèdes, en plus des soins de médicomagie. Le mélange de potions et d'herbes qu'il avait versé dans l'eau devait aider la peau de Drago à guérir mais aussi soulager ses poumons et ses muscles avant que Blaise revienne avec les potions adéquates. Une fois Drago déshabillé, ils le soulevèrent pour le glisser dans la baignoire. Sa peau était si pâle et il était si maigre qu'on pouvait voir ses veines bleutées et ses os. Ses cheveux autrefois si soignés étaient rasés de très près. Son visage de jeune aristocrate était creusé et une vilaine cicatrice courait sur une partie de sa figure. Mais le pire fut lorsque Granger bougea son bras gauche. Elle hoqueta d'effroi en voyant que là où se trouvait autrefois sa Marque des Ténèbres, une horrible brûlure sombre tâchait la peau de leur ancien camarade.

« Qu'est-ce que c'est ?

- On dirait qu'il a été brûlé. La Marque est faite de magie noire, ça n'a fait que la déformer…

- Et tu as vu son visage ? » demanda Granger. « Ce ne sont pas les Détraqueurs qui ont pu faire une chose pareille.

- Et si ce sont les prisonniers, ils n'ont sûrement pas fait ça sans la complicité des gardiens.

- C'est horrible.

- Bienvenue dans le monde des Serpentards, ma chère, » railla Théodore en prenant une éponge naturelle pour nettoyer Drago.

Ce dernier était à peine conscient. Parfois, il gémissait. D'autrefois, il semblait perdre connaissance. Théodore et Granger se chargèrent de le nettoyer en attendant Blaise qui tardait à revenir. Il affirma qu'elle aurait pu faire une excellente infirmière, ce qui la fit sourire. Le jeune médicomage profita de cet instant de calme pour lancer un regard vers la sorcière. Il était étonné qu'elle soit restée pour les aider. Drago n'avait jamais été très tendre avec elle. Il lui avait même, disons-le clairement, pourri sa scolarité. Théodore inspira.

« Je te dois des excuses, Granger. Je me suis comporté comme un vrai con, hier.

- C'est vrai, » fit-elle. « Blaise m'avait prévenue que Drago était le genre de sujet qui te faisait devenir complètement débile. Mais, la sous-sorcière que je suis accepte tes excuses de sang si pur.

- Tu n'es pas une sous-sorcière, » répondit Théodore. « Mon père m'a appris à me méfier et à haïr les moldus. Tu viens de leur monde, avec leurs « idées. » Le problème avec les nés-moldus, c'est que vous arrivez en voulant tout révolutionner sans respecter nos coutumes et croyances ancestrales. Un peu comme un Grapcorne dans un magasin de porcelaine… On se croit supérieur parce qu'on est sorcier de génération en génération, parce qu'on ne fait qu'un avec la magie. Mais tu as un talent et une intelligence indéniables qui prouvent que tu mérites que la magie t'ait choisie.

- Tu sais, j'avais si peur de ne pas être à la hauteur en arrivant à Poudlard que je me suis efforcée d'être la meilleure de notre classe, » avoua Granger.

« Ouais, bah tu aurais pu avoir quelques mauvaises notes. Ça nous aurait évité quelques coups de bâtons à Drago et à moi…

- Je suis désolée. Je ne savais pas que mes notes avaient pu vous faire du tort.

- Une sang-de-bourbe avec d'excellentes notes, première de la promo ? Bien évidemment qu'avec des pères comme les nôtres ça n'a pas joué en notre faveur. Mais c'est le passé maintenant. » Théodore se détourna de Granger et observa un instant Drago. « Merci de l'avoir sorti de cet enfer. J'avais dit à Blaise que j'avais peur de ce qu'il était devenu… Je n'étais pas préparé à ça.

- Drago va s'en sortir, il est fort. Et il va avoir un excellent médicomage pour prendre soin de lui. Tout ira bien maintenant, » le rassura Hermione alors que Blaise rentrait enfin.

Ils sortirent Drago du bain. Ils le séchèrent et Théodore appliqua d'abord plusieurs baumes médicinaux sur son corps avant de le rhabiller. En voyant Drago nager dans les vêtements de Blaise, Hermione se rappela son ami Harry en première année. Lui aussi portait des vêtements trois fois trop larges. Le jeune médicomage soigna ensuite la cicatrice qu'il avait au visage, lui appliqua une pommade qui, selon lui, devait atténuer fortement l'aspect de cette dernière. Théodore passa la journée au chevet de Drago, lui appliquant pommades, baumes lui administrant potions. Hermione dû partir pour se rendre à son travail, Blaise décida de travailler depuis le bureau qu'il s'était aménagé dans l'appartement. Lorsque le soleil commença sa lente descente dans le ciel, Théodore était épuisé. Il quitta la chambre où Drago dormait profondément et se laissa tomber sur le divan. Blaise se plaça derrière lui et massa doucement ses épaules.

« Et maintenant ? » demanda le bellâtre.

« Attendre est le maître mot en médicomagie. Son état devrait s'améliorer dans la nuit.

- Et après ?

- Je m'occuperai de la malnutrition. Drago doit se remplumer. Et aussi de son physique. Je peux sûrement refaire pousser ses cheveux plus vite et améliorer l'esthétique de sa cicatrice au visage.

- Tu ne peux pas la faire disparaître complètement ?

- Elle est trop ancienne et elle a été mal soignée, » expliqua Théodore. « Je peux juste l'estomper un peu.

- Et mentalement, tu le crois comment ?

- J'en sais rien… On le découvrira bien assez tôt, » soupira le médicomage. « Je vais me coucher, je vais devoir être en pleine possession de mes moyens lorsqu'il se réveillera.

- Tu ne dors pas avec lui ? » demanda Blaise en le voyant aller vers sa chambre et non celle de Drago.

« J'y ai pensé mais… C'est avant tout mon ami et patient. Je vais me réveiller à chaque son qu'il émettra tellement je m'inquiète pour lui… » Blaise acquiesça, il comprenait.

Après une nuit de repos bien méritée, Théodore quitta sa chambre et alla directement dans la chambre où il avait laissé Drago. Il trouva le lit vide et paniqua quelques instants avant de découvrir son ami recroquevillé dans un coin de la pièce. Drago avait les yeux dans le vague et se balançait d'avant en arrière. Physiquement, il semblait aller mieux. Les remèdes de Théodore avaient fonctionné. Il s'en félicita avant de s'approcher lentement de Drago, l'appelant doucement. Drago leva soudain des yeux terrorisés vers lui.

« Drago, c'est moi, Théo. Tu te souviens de moi ?

- Le gardien a dit que je devais obéir à la dame. Où est la dame ? » demanda Drago, péniblement, comme s'il était aphone.

« Granger ? Elle est chez elle. Tu es chez Blaise, en sécurité.

- Je dois obéir à la dame.

- D'accord, si tu veux je peux lui écrire pour qu'elle vienne après sa journée de travail ? » proposa calmement Théodore. « Mais en attendant, je dois continuer à te soigner. Tu comprends ?

- Où est la dame ? Je dois obéir à la dame. »

Théodore fronça les sourcils. Drago n'avait pas semblé se souvenir de lui ou du prénom de Blaise. Cela lui fit mal au cœur. Et il avait sûrement dû subir un lavage de cerveau pour être aussi obstiné par l'idée d'obéir à Granger sur ordre d'un gardien. Drago ne se souvenait même plus de la sorcière.

« Je suis médicomage, Drago. Je dois te soigner. Tout ira bien maintenant. Tu es en sécurité ici. »

Théodore et Blaise faisaient face à une terrible frustration. Pour eux, Azkaban avait détraqué l'esprit de Drago. Le pauvre agissait comme un pantin. Lorsqu'il était suffisamment en forme, le blond ne mangeait, n'aller faire ses besoins, ne prenait sa douche et ne dormait que sur ordre. Mais parfois, son état physique revenait à la figure de Théodore comme un boomerang : Drago était épuisé et ne bougeait quasiment pas de son lit. Le plus étrange pour Blaise fut de constater que dès qu'il le pouvait, leur ami glissait hors de son lit et restait allongé à même le sol. Il ne mangeait également qu'avec les mains et hurlait de terreur s'il se retrouvait dans le noir. Le pire était le moment où Théodore menait Drago dans la salle de bain pour l'aider à se laver et pour soigner certaines de ses blessures. L'ancien aristocrate semblait terrifié par la baignoire remplie d'eau et il ne se calmait que lorsque Théodore lui proposait une douche à l'eau froide.

Hermione passait tous les matins avant de partir au cabinet. Elle prenait des nouvelles de Drago, discutait un instant avec Théodore puis demandait gentiment à son ancien rival de bien écouter le médicomage. Drago semblait donner à Hermione une grande importance. Ce rituel du matin dura dix jours durant lesquels le blond reprenait du poids, la cicatrice sur son visage s'affinait, ses cheveux se mettaient à pousser plus vite. Mais malgré tous leurs efforts, Drago semblait ne pas se souvenir d'eux. Théodore se mit à brasser une étrange potion qu'Hermione ne reconnut pas. Il lui expliqua alors avec fierté qu'il avait travaillé auprès d'un potionniste français pour financer ses études. Le Maître en Potions l'avait pris comme apprenti uniquement parce qu'il avait reçu, enfant, l'enseignement de Rogue. Et c'était auprès de ce génie français qu'il avait développé une potion qui lui avait valu son embauche à l'hôpital de Berlin.

« Elle permet de soigner les pertes de mémoires temporaires, celles principalement dues à des traumatismes crâniens. Mais en la modifiant légèrement, je pourrais peut-être faire en sorte qu'il se souvienne de nous.

- Je n'arrive pas à comprendre pourquoi il ne se souvient de personne, » avoua la sorcière.

« Azkaban est un traumatisme à lui seul. Si les Détraqueurs dévorent les souvenirs heureux des prisonniers, l'esprit de Drago a peut-être trouvé comme unique moyen de défense de refouler ces souvenirs. La mémoire de sa vie d'avant est peut-être enfouie profondément.

- Et cette potion pourra l'aider à se souvenir, à faire comprendre à son cerveau que les Détraqueurs ne sont plus là, » comprit Hermione. « Ce potionniste devait être le meilleur pour que tu aies eu cette idée.

- Non, Rogue était le meilleur, » rectifia malicieusement Théodore. « Tu n'imagines pas comment cet acariâtre pouvait être respecté par ses pairs. Ce fut un honneur pour moi d'aller chez les Malefoy tous les étés pour suivre avec Drago ses cours particuliers. »

Le brassage de la potion dura trois jours. Puis, Théodore y plongea un cheveu de chacun d'entre eux avant de la faire boire à Drago en expliquant à Blaise et Hermione que les effets n'étaient malheureusement pas immédiats. Parfois, il fallait une journée aux patients pour recouvrer la mémoire. D'autres fois, il leur fallait plusieurs jours pour se souvenir uniquement que de quelques bribes. La mémoire était quelque chose de très compliqué à soigner. Pour Drago, il fallut deux jours. Alors qu'Hermione et Blaise s'apprêtaient à quitter l'appartement pour aller au travail, le blond sortit lentement de sa chambre et leur lança un regard perdu, avant de prendre la parole.

« Sang-de-Bourbe », souffla-t-il. « Je t'appelais comme ça avant, non ? » Surprise, Hermione acquiesça, ce qui fit grimacer Drago. « Ce n'est pas joli comme surnom. Je n'étais pas gentil avec toi…

- C'est le passé. Je t'ai pardonné depuis longtemps.

- Alors, nous sommes amis maintenant ? » demanda Drago, d'une voix presque enfantine.

Hermione posa son sac à main et se dirigea vers lui pour le prendre dans ses bras. Drago se mit alors à pleurer à chaudes larmes, tout en s'accrochant à sa veste. Blaise et Théodore s'approchèrent pour le réconforter tandis que Hermione le berçait doucement. Lorsqu'il finit par la lâcher, Théo le tira contre lui en lui expliquant qu'elle et Blaise devaient aller travailler.

« Tu vas continuer à te souvenir petit à petit, je vais répondre à chacune de tes questions, » promit Théodore en le guidant jusqu'au divan.

Chaque jour, Drago recouvrait peu à peu la mémoire. Son état physique s'améliorait grandement. Théodore était plus confiant et rassuré. Entre deux soins, les deux amis discutaient longuement. Le blond se rappelait Poudlard et Théodore lui racontait des anecdotes amusantes qui s'étaient passées durant leur scolarité. Parfois, Drago décrivait le physique de quelqu'un et le brun lui donnait le nom de la personne, lui indiquait s'ils étaient en bons termes ou non. Quelques fois, Drago osait évoquer Azkaban. Théodore l'écoutait toujours avec bienveillance et ne posait jamais de question afin d'éviter de rentrer dans des détails sordides qu'il ne voulait pas connaître. Drago lui apprit qu'il n'était pas enfermé dans une cellule mais qu'il avait travaillé les journées dans une sorte de mine et que le soir les travailleurs étaient parqués dans de vastes salles servant de dortoirs.

Drago avait développé une peur affreuse de l'eau. Il se douchait rapidement à l'eau froide mais paniquait en voyant la baignoire remplie. Théodore supposa que cette nouvelle phobie devait avoir un lien avec le fait que la prison était entourée d'une mer agitée. Le soir, Drago voulait absolument dormir avec une petite lumière, aussi faible soit-elle. Cela le rassurait et lui donnait la preuve que les Détraqueurs ne viendraient pas le reprendre. Mais malgré tous ces efforts et les progrès de Drago, Théodore devait avouer qu'il ne retrouvait pas chez le blond celui qui était autrefois son ami. Drago était devenu effacé, obéissant, sa raillerie n'existait plus. Un bout de l'âme de son ami était resté à tout jamais à Azkaban, il devait en faire le deuil et se réjouir que Drago ait une chance de refaire sa vie.

Drago referma le livre qu'il avait emprunté sur une étagère de Blaise. Il n'avait pas lu depuis dix ans et ses yeux fatiguaient trop vite. Il avait trouvé ce petit ouvrage d'un auteur moldu nommé Alexander Pope. Sa mère adorait lui lire des poésies, le dimanche sous la véranda de leur manoir. Drago appréciait la plume de ce moldu. Il trouvait sa poésie équilibrée et sereine, un véritable régal pour son esprit qu'il tentait de ranimer. Mais fatigué, il préféra quitter la chambre et ranger soigneusement l'ouvrage à sa place. Discrètement, il sortit dans le couloir et marcha silencieusement jusqu'à l'arche qui menait dans le salon. Il s'arrêta un instant en entendant les voix de ses deux amis, Blaise et Théodore. Le bellâtre rentrait d'une journée de travail au Magenmagot.

« Tu m'as l'air épuisé, » lui fit remarquer Théodore.

« M'en parle pas. J'ai plaidé toute l'après-midi… Et ce bougre d'Edouard m'a donné du fil à retorde dans une affaire… D'ailleurs, tu devrais lui écrire puisque tu es ici pour un petit moment.

- Oh non, pitié…

- Quoi ? Il m'a demandé à plusieurs reprises quand est-ce que tu reviendrais dans le coin ! Il est plutôt mignon et intelligent.

- Il est trop Poufsouffle pour un Serdaigle !

- Allez, pour un soir ou deux. T'as besoin de te changer les idées.

- Jolie façon de dire que j'ai besoin de sexe, » se moqua Théo.

« Tu as besoin d'une vie sociale surtout ! » répliqua Blaise.

Théodore soupira bruyamment. Drago s'approcha légèrement pour les observer. Les deux garçons étaient affalés sur le divan, Bo était allongé sur les cuisses de Théo. Il demanda soudain à Blaise quand celui-ci allait cesser de vouloir le caser avec n'importe qui. Blaise haussa les épaules en ricanant.

« Franchement, tu veux me marier à Drago et maintenant tu remets Edouard sur le tapis… C'est lourd à force.

- Non, rectification : Drago, c'est surtout pour éviter que le Ministère change d'avis et le remette à Azkaban.

- En me mariant avec lui ?

- C'est ton meilleur ami et l'un des mecs les plus sexy de Poudlard.

- C'était il y a dix ans, nous avons changé et il ne mérite pas d'être enfermé dans un faux mariage juste pour fuir l'Angleterre.

- En partant, qui saura que vous êtes mariés ? Vous pourriez être frères !

- Vive la ressemblance ! » se moqua une nouvelle fois Théodore.

Drago sortit de sa cachette et ils se turent subitement en le remarquant quitter le couloir sombre. Tous deux se redressèrent, comme des enfants pris en faute. Bo miaula pour se plaindre du changement brutal de position de Théodore. Blaise se leva et se gratta nerveusement la nuque. Il s'excusa auprès de Drago et lui demanda d'oublier ce qu'il venait d'entendre. Mais le blond refusa d'un signe de tête et lui demanda ce qu'ils entendaient par « fuir l'Angleterre ». Mal à l'aise, Blaise lui expliqua alors l'idée qu'ils avaient eu, Hermione et lui : puisque Théodore utilise depuis dix ans un autre nom que celui par lequel il est connu au Ministère, ils pouvaient éventuellement se marier et demander au Magenmagot un changement de peine, pour passer d'une condamnation d'emprisonnement à domicile à un exil hors du territoire anglais. Drago resta silencieux un instant puis fronça les sourcils en se tournant vers Théodore.

« Tu n'approuves pas cette idée ? » lui demanda-t-il avec calme.

« On parle d'un mariage pas d'un simple bout de parchemin à signer.

- Techniquement si, » souffla Blaise. Drago les observa tour à tour. « Et toi, qu'est-ce que tu en penses, M ?

« Je ne veux pas y retourner… Tu penses qu'ils pourraient venir me récupérer ici ?

- Si tu fais de la magie un peu trop puissante ou que tu quittes l'appartement, ils pourraient. En fait, ils pourraient profiter de n'importe quel prétexte pour changer d'avis, » fit Blaise.

« Et tu dis que ce n'est qu'un bout de parchemin à signer ?

- On peut vous marier ici, en communauté restreinte Je représenterais Théo MacMillan, médicomage à Berlin Hermione serait ton avocate. Il n'y aurait qu'à déposer votre déclaration de mariage au Ministère. Ensuite, on demanderait une nouvelle fois au Magenmagot de réfléchir à ton cas. Si tu es marié à un médicomage reconnu et respecté et qu'il t'emmène hors du territoire, on pourrait demander que tu sois condamné à l'exil et annuler les vingt années que tu dois encore faire.

- Et on irait où ? » questionna Drago.

Blaise se mordit la lèvre puis alla chercher son sac. Théodore et Drago l'observèrent. Il fouilla à l'intérieur et en ressortit un parchemin soigneusement roulé. Il le tendit au blond qui le déroula avec précaution. Une jolie écriture ronde expliquait que la précédente lettre de Blaise tombait à point nommé car un médicomage avait quitté ses fonctions dans la Réserve d'Animaux Fantastiques fondée par Norbert Dragonneau. Drago leva les yeux du parchemin, il fronça à nouveaux les sourcils.

« J'ai demandé à tous mes contacts si quelqu'un recrutait un médicomage. Luna Lovegood s'est mariée avec le petit-fils de Norbert Dragonneau. Ils gèrent depuis la côte ouest des Etats-Unis une île dans le Pacifique qui a été transformée en Réserve Naturelle, aucun moldu ne peut y aller et seuls les employés de la Fondation Dragonneau sont autorisés à s'y rendre, » expliqua Blaise. « L'endroit rêvé pour refaire sa vie sous les cocotiers, loin du Magenmagot. Théo y soignerait les dresseurs.

- Quelles sont nos chances ? » demanda Drago.

« Tu n'es pas sérieux ? » intervint Théodore. « On ne peut pas se marier et partir comme ça.

- Tu as perdu ton travail à Berlin pour venir me soigner, » lui répondit Drago, toujours avec calme. « Il faut bien que tu retrouves un travail. Et pourquoi ne pas nous marier ? Tu as dit que je comptais énormément pour toi et tu aimes les garçons, non ?

- Tu ne peux pas m'épouser ! Tu n'aimes pas les garçons à ce que je sache.

- Personne ne m'intéressait à Poudlard et ça fait dix ans que je suis enfermé. Je suis incapable, moi-même, de dire ce que j'aime ou ce que je n'aime pas. Si c'est la seule solution… Rien ne t'empêchera d'avoir un amant si nous n'arrivons pas à nous entendre physiquement.

- Je dois y réfléchir… »

Théodore sembla perdu. Il se redressa et se dirigea vers l'entrée de l'appartement. Blaise et Drago ne dirent rien lorsqu'il prit sa veste et transplana. Théodore arriva au Chaudron Baveur. C'était la fin d'après-midi, les boutiques commençaient à fermer et le Pub sorcier se vidait peu à peu de ses clients journaliers. Théodore poussa la porte et se faufila jusqu'à une table. Un serveur vint rapidement prendre sa commande, personne ne sembla le reconnaître, contrairement aux Aurors du Ministère. Il souffla en prenant la chope de Bièraubeurre qu'on lui servit. Sous la table, sa jambe se secouait nerveusement. Il n'avait pas aimé ce qu'il venait de se passer chez Blaise. Drago avait réagi de manière trop froide, trop distante. Il savait pourquoi son meilleur ami avait été ainsi : cette manière de réfléchir était typiquement celle de quelqu'un qui souhaitait avant tout se protéger. Mais entre meilleurs amis et amants, les choses étaient bien différentes et le fait que Drago puisse parler de rapprochements physiques entre eux était la goutte de potion qui avait fait déborder le chaudron.

Théodore était à sa deuxième bière lorsqu'il vit entrer deux têtes rousses. De sa table, il observa discrètement les jumeaux Weasley saluer plusieurs sorciers et passer commande au bar. Théo pensa qu'il ne manquait plus qu'eux pour finir d'achever sa soirée morose. Il portait sa chope à ses lèvres quand un des frères se dirigea subitement vers lui. C'était celui avec les deux oreilles. Il prit la chaise devant Théodore et s'y installa comme si de rien n'était. Le Serpentard lui lança un regard acerbe tandis que son frère les rejoignait avec leurs bières.

« J'ai failli ne pas te reconnaître, » fit le jumeau aux deux oreilles. « On a cru que tu étais parti pour toujours.

- Eh bien, je suis revenu. Maintenant vous pouvez y aller, ça me fera un peu d'air.

- Toujours aussi aimable, hein ? » fit le mono-oreille. « Pourquoi noies-tu ton chagrin, hein ?

- Je ne suis pas triste.

- Alors c'est qu'il est furax ! » remarqua double oreilles. « On ne te lâchera pas tant que tu ne nous diras rien.

- Vous allez donc me faire chier toute la soirée ? » demanda Théodore.

« Hermione avait dit que tu savais te montrer grossier.

- Qu'est-ce qu'elle vient faire dans la conversation ? » questionna à nouveau Théo. « Ah oui, elle est toujours avec votre frère… »

Les deux jumeaux hochèrent la tête et Théodore leva les yeux au ciel. Les deux Griffondors étaient comme des sangsues. Ils ne le lâcheraient pas tant qu'ils n'auraient pas ce qu'ils voulaient. Le Serpentard soupira en leur demandant ce que la sorcière leur avait dit. Il fut assez soulagé d'apprendre que Granger n'était pas entrée dans les détails. Pour eux, il avait quitté son emploi à Berlin pour revenir ici prendre soin de Drago, qu'ils avaient réussi à sortir d'Azkaban. Théodore se frotta d'abord le front puis passa la main derrière sa nuque. Voyant que le Serpentard était tracassé, les jumeaux se penchèrent légèrement vers lui. Le frère avec qu'une oreille lui rappela qu'il les avait sauvés et qu'ils lui en seraient toujours redevables.

« On s'est quitté en mauvais termes la dernière fois parce que tu étais sous le choc. Mais très sincèrement, si on peut t'aider en quoique ce soit, on sera toujours là, » lui confia celui à deux oreilles.

« Blaise craint que le Ministère renvoie, pour une raison obscure, Drago là-bas. Et il a donc trouvé une idée de merde pour être sûr que Drago soit définitivement libre.

- Et ce n'est pas génial comme nouvelle ? Ça doit vraiment être une solution de merde alors !

- Sauf si cette nouvelle consiste à épouser mon meilleur ami, enfermé depuis dix ans à Azkaban, et partir en exil avec lui. »

Le pavé était jeté dans le chaudron. Les deux frères ne dirent rien durant un instant qui sembla interminable pour Théodore. Puis, après un échange de regards, celui avec les deux oreilles lâcha un juron à faire rougir Peeves.

« Mais tu es homo ? » demanda-t-il ensuite. Théodore acquiesça. « Et Drago ? » Théodore haussa les épaules. « Donc il faudrait pour sauver ton meilleur ami que tu n'as pas revu depuis une décennie, te marier avec lui et partir loin pour ne jamais revenir ?

- C'est si bien résumé, Fred, » fit l'autre jumeau. « Mais tu as des sentiments ou une attirance pour Drago ?

- Non, j'en ai eu, il y a très longtemps. Mais les blonds, ce n'est pas mon truc.

- Et vous iriez où ?

- Dans une réserve pour animaux magiques dans le Pacifique. »

Les deux frères échangèrent un nouveau regard. Cette fois, ce fut Georges qui prit la parole.

« Notre frère travaille avec les dragons depuis des années. Si tu parles de celle qu'on pense, cette réserve est l'une des meilleures au monde. Il la décrit comme un endroit paradisiaque, ceux qui y travaillent viennent du monde entier. Et ils y sont heureux de refaire leur vie là-bas, auprès des Animaux Fantastiques de Dragonneau. Ça serait l'endroit idéal pour vous deux pour repartir de zéro.

- Et personne là-bas ne vous connaît. Techniquement, comment savoir que vous êtes mariés ? Vous pourriez être des cousins, des potes, ou un couple libre. L'endroit parfait pour s'inventer une vie.

- Et donc, je n'aurai pas à partager ma vie avec Drago, si je vous suis ?

- En toute logique, oui. Hermione et Blaise sont assez doués pour entourlouper le Magenmagot, pour lui faire croire que vous êtes un heureux petit couple. Une fois partis, personne du Ministère ne viendra voir ce qu'il se passe chez vous, » affirma George.

« Finalement, tu te fais du mouron seulement pour un bout de parchemin signé à la va vite, » déclara Fred.

Théodore finit d'une traite sa bière. Peut-être avaient-ils raison ? Peut-être avait-il paniqué pour pas grand-chose ? Granger et Blaise devaient savoir ce qu'ils faisaient et loin du Ministère de la Magie, Drago et lui pouvaient se réinventer une vie, un passé, un présent et un avenir. Il tituba lorsqu'il se releva. Cela faisait plusieurs années qu'il n'avait pas bu. Trois chopes de bière et le voilà qui était soûl. Il s'excusa auprès des jumeaux Weasley et transplana. Les deux frères échangèrent un énième regard jusqu'à ce que George rompe le silence entre eux :

« Tu ne crois pas qu'on aurait pu lui dire pour la réserve ?

- Partir d'ici est la meilleure solution pour ces deux-là, on aurait risqué de faire échouer l'idée d'Hermione et de Blaise.

- Heureusement que Ron ne sait pas tenir sa langue…

- Ginny n'est pas mieux, hein ? Tu crois que Nott sait que Blaise fait dans la joueuse de Quidditch ?

- Blaise serait probablement déjà castré ou mort pour ça, s'il l'avait découvert ! » se moqua George.

- Bon, ça mettra de l'animation sur cette jolie petite île ! »

Théodore arriva devant l'appartement de Blaise. Il se faisait tard et il ne fut pas surpris d'entendre le bellâtre ronfler lorsqu'il entra. Mais Drago était encore éveillé. Il était assis sur le divan et caressait distraitement Bo. Le blond semblait attendre Théodore car il se leva en le voyant s'approcher.

« Tu sens l'alcool », remarqua Drago.

« Je suis allé au Chaudron Baveur. J'avais besoin de me vider l'esprit.

- Parce que Blaise te demande de m'épouser ?

- Disons que me lier ainsi à mon meilleur ami n'était pas un futur que j'avais envisagé.

- Nos parents ont bien vu leurs mariages arrangés sans avoir leur mot à dire. Cela n'a pas empêché les miens d'être heureux, d'une certaine façon.

- C'est ça que tu voudrais pour nous ?

- Je veux retrouver ma liberté. Je ne veux plus avoir peur. Je veux être heureux. Je sais que je peux avoir confiance en toi, que je suis en sécurité avec toi, que nous étions heureux.

- Oui, mais comme amis, pas comme amants ni encore moins comme époux, » fit Théodore.

« Peut-être que tu pourrais m'initier à ce genre de choses ? Peut-être que j'aimerais le faire avoir toi ? »

Théodore soupira avant de lui expliquer que ça ne fonctionnait pas comme ça, qu'ils devaient avoir un minimum de sentiments. Et dans le cas de Théo, il avait beau adorer Drago et l'aimer comme un frère, cela faisait bien longtemps qu'il ne le regardait plus comme un petit ami potentiel ou même un fantasme d'un soir. Drago sembla déçu et Théo comprit qu'il venait de réduire à néant le plan que le blond s'était imaginé.

« Nous pouvons quand même nous marier et partir dans cette réserve, si tu veux. Mais une fois là-bas, on pourrait se faire passer pour des frères ou des cousins ?

- L'affiliation est peu flagrante.

- Nous sommes des Sang-Pur, nous avons bien en commun quelques ancêtres, » rigola doucement Théodore.

« Des demi-frères ?

- Oui, tu serais mon demi-frère et je devrais prendre soin de toi. Ça se tient.

- Et nous serions enfin de la même famille, comme dans nos rêves d'enfants.

- Je dirai à Blaise que nous acceptons son plan.

- Tu crois qu'il y aura des hippogriffes ? Je n'aime pas les hippogriffes… »

Théodore sourit, Drago semblait chercher l'explication à son ressentiment envers ces horribles bestioles. Le brun embrassa le blond sur le front et lui demanda d'aller au lit. Celui-ci acquiesça avant d'obéir sagement.

Coucou tout le monde

18 reviews pour le chapitre précédent ! Merci beaucoup !

Je suis heureuse que cette histoire plaise autant.

J'espère que ce chapitre aura autant d'engouement voire plus !

Des bisous !

Tata comme on dit ici !