Chapitre 1.
Comme si sa vie n'avait pas été démolie par la faute d'une simple formule...
Cho... Si tu savais comme je t'aime...
Cedric baissa la tête lentement et prit les mains de la jeune fille dans les siennes.
Je te protégerai toujours et je resterai à tes côtés, quoi qu'il advienne, je te promets...
Cho sourit et murmura:
Je veux vivre ma vie avec toi, avoir des enfants, fonder un foyer...
-Tu ne crois pas que tu as encore le temps ma Cho ?
-Du temps, on n'en a jamais assez, Cedric, jamais assez... On croit l'attraper mais il nous file entre les doigts... On croit qu'il nous en reste suffisamment pour vieillir heureux et il est déjà trop tard... Prends garde à toi... Reste avec moi, s'il te plaît... Toujours. Je ne suis rien sans toi... Tu es ma seule raison de vivre. J'ai si peur pour toi, Cedric...
-Je resterai avec toi, Cho, ne t'inquiète pas. Je t'aime.
Cedric se pencha vers elle et elle l'attrapa par le cou pour lui murmurer au creux de l'oreille deux mots, deux mots si simples... Et pourtant les derniers.
Cho, debout !
-M'man... Il est quelle heure ?
-Six heures et demi ! Je vais partir au travail, il faut que je t'explique ce que tu dois faire aujourd'hui... Tu as bien dormi ?
Cho se frotta les yeux et marmonna un vague Oui oui suivit d'un long bâillement qu'elle ne put retenir. Mrs Chang lui donna les instructions du jour...Ménage, vaisselle, lessive, cuisine...
Merveilleux moment en perspective, soupira Cho.
-Allez, demoiselle, ne fais pas cette tête, va ! Bon, je file au travail, moi, bonne journée ma puce, bisous !
-Oui, oui... Au revoir maman.
Quelques minutes plus tard, la voiture quittait le grand parc du manoir Chang.
Cho s'assit sur son lit pour réfléchir à sa nuit. Toujours ce rêve, omniprésent... Ces mots-là trop maigres et trop banals qui avaient servi d'adieux à Cedric...
Cedric...Depuis le début de l'été, elle n'avait fait que penser à lui...Il y avait ce manque qui lui serrait le coeur, ce profond sentiment d'injustice...Et surtout cette incompréhension.
Depuis son retour de Poudlard, elle ne s'était plus habillée que de noir et avait pris l'habitude de toujours rester seule. Il n'était pas rare qu'une phrase, un mot, une expression ne lui rappelle son ancien petit ami...Alors, elle sortait dans le parc, grimpait dans un saule centenaire et pleurait toutes les larmes de son corps. Ses parents n'étaient au courant de rien. Ils s'étaient simplement demandés pourquoi leur fille paraissait si troublée. Cho avait expliqué l'histoire de Voldemort, son retour, l'immense mobilisation des Mangemorts, l'insécurité, la peur...Tout. Tout, sauf Cedric. C'était si difficile de faire semblant...De sembler enjouée chaque jour, comme si rien ne s'était passé...Comme si sa vie n'avait pas été démolie par la faute d'une simple formule...
La famille Diggory, quant à elle, n'avait pas eu beaucoup de temps pour faire son deuil...En effet, dès la mi juillet, les Mangemort s'étaient rendus chez eux. Les voisins avaient tout entendu et raconté à la Gazette du Sorcier, le lendemain, les yeux encore écarquillés d'horreur et le coeur toujours battant. Cho avait relu l'article des centaines de fois et le connaissait désormais par coeur...Surtout ce témoignage poignant, dramatique, désespérant:
Il y a d'abord eut quelques interpellations dans la rue...raconte Mrs Jones, qui vivait en face des Diggory, je somnolais et j'étais prête à m'endormir...Aussi, j'ai cru rêver...Puis j'ai perçu...Comment dire ? Un souffle froid, même depuis mon lit, je le sentais ! Une voix aiguë, à donner la chair de poule...Une voix de mort, de sang, de terreur et d'agonie...Le froid a pénétré mes entrailles...Je me suis levée pour fermer la fenêtre. Là, j'ai vu des hommes, cagoulés, tout de noir vêtus, qui s'affairaient devant la porte des Diggory...L'un a jeté l'Alohomora, permettant ainsi aux autres de pénétrer dans l'habitation. En retrait, une silhouette était appuyée contre un arbre, un peu plus grande que les autres... C'était elle qui dirigeait l'opération, donnait les ordres. C'était elle qui parlait de cette voix de mort....Je ne comprenais pas ce qu'il se passait, je n'ai pas réalisé...J'ai entendu des bruits chez les Diggory...Mrs Diggory qui criait tandis que son mari tentait d'éloigner les Mangemorts...Puis il y a eut une lumière verte intense, et la voix de Mrs Diggory s'est éteinte. Là, lui a hurlé...Je ne comprenais pas ce qu'il disait mais sa voix était pleine de souffrance et de haine...Puis, à nouveau cette lumière verte. Ensuite, le silence absolu...Une minute plus tard, le groupe d'hommes est ressorti de la maison et c'est éloigné. Mais l'un d'eux s'est arrêté au milieu de la rue, a pointé sa baguette magique vers la maison, tout en murmurant une formule...Et la marque des ténèbres est apparue. J'ai secoué mon mari, lui ai ordonné de se réveiller, et de m'emmener loin. Mais lui n'avait pas tout vu, n'avait pas tout entendu. Je lui ai désigné la marque des ténèbres du doigt, en hurlant. Il m'a serrée dans ses bras et m'a murmuré que tout était fini....Mais c'est faux et stupide, je le sais...Ca ne fait que commencer. Le Seigneur des Ténèbres est de retour... S'il y a un Dieu, là-haut, quelque part dans le ciel, qui m'entend, je lui murmurerai, je lui supplierai de laisser les humains en paix...Nous avons suffisamment souffert il y a quinze ans de cela...Il ne faut pas que ça recommence.Plus jamais.
Chaque édition de la Gazette rapportait une nouvelle série d'horreurs. Cho se faisait livrer le journal par hibou postal, sa seule correspondance avec le monde sorcier dans sa famille moldue. Les élèves de Poudlard ne lui écrivaient pas, cette année, en proie à une gêne particulièrement tenace vis à vis de la jeune fille. Elle n'était plus Cho Chang, mais L'ancienne petite amie de la première victime de Son retour. Personne ne savait ce qu'il s'était passé exactement...Le Seigneur des Ténèbres était de retour, avec pour première victime d'une longue liste Cedric Diggory. Mais comment était-il mort ? Qu'avait-il dit ? Qu'avait-il fait ? Mystère...
Pourtant Cho éprouvait ce besoin de savoir, de comprendre...Cela demeurait important pour qu'elle puisse enfin faire son deuil. La compassion lui faisait mal plus qu'elle ne l'aidait.
Qui pourrait la secourir maintenant ? L'exorciser de ce fantôme... En boucle, elle revoyait Cedric lui murmurer pour la première fois Je t'aime Cho, en la fixant, plein de tendresse, de ses grands yeux gris... Comme dans un film en noir et blanc, elle se revoyait répondant Je t'aime aussi, Cedric Diggory... Ce baiser à n'en plus finir, ce sourire heureux et complice...
Pourquoi était-il parti ? Pourquoi lui ?
Cho soupira. Une seule solution s'offrait à elle. Elle sortit une plume et une feuille de parchemin du tiroir de son bureau, s'attabla et écrivit soigneusement:
Cher Harry...
Elle reposa la plume. Elle n'avait pas envie des formules habituelles de politesse qui ne se prêtaient guère à la situation. Il fallait en venir directement à l'essentiel...Que c'était difficile d'écrire une lettre ! Elle reprit:
Cher Harry,
Ici Cho Chang. Voilà, comme tu l'imagines sûrement, cet été est affreusement difficile pour moi. Je souffre énormément et j'ai très besoin de Cedric.
Elle roula en boule le parchemin. Elle ne parvenait pas à exprimer ce qu'elle ressentait. En soupirant, elle prit une nouvelle feuille et écrivit:
Harry,
Voilà, j'ai beaucoup de mal à me remettre du décès (Sa gorge se serra) de Cedric...C'est une période assez difficile et j'aurais besoin de savoir ce qu'il s'est passé exactement... Si jamais tu te sens près à m'expliquer, me raconter, réponds-moi. Sinon, sache que je respecte ta décision, j'imagine que toi aussi, tu traverses un moment éprouvant... Si tu ne veux pas reparler de tout ça, je comprends tout à fait....
Porte-toi bien,
Cho Chang
Elle soupira. La lettre était un rien trop solennelle. Mais tant pis.
Quelques minutes plus tard, Cassiopée, sa chouette, s'envolait dans le ciel rosissant du matin.
Cho descendit à la cuisine et entreprit de se préparer un petit déjeuner copieux. Depuis la mort de Cedric, elle avait perdu une demi dizaine de kilos...Demeurant déjà trop frêle, la jeune fille devait absolument grossir à nouveau...Elle n'aimait pas jouer avec sa santé.
Elle se dirigea vers la télévision, un bol rempli à rabord de céréales au chocolat dans les mains, et l'alluma.
Tiens, tiens, murmura-t-elle, les informations...Tant mieux.
Elle s'assit en tailleur sur son canapé, caressant distraitement son chat venu se pelotonner contre elle.
Il semblerait qu'un groupe de serial killer quelque peu singulier soit en activité en ce moment. Partout dans le monde, les assassinats se multiplient... Et certaines caractéristiques pour le moins étranges en commun pour un bon nombre de meurtres sont à noter : Les médecins sont formels, aucune marque de strangulation, d'empoisonnement, aucun impact de balle, pas la moindre coupure, pas la moindre égratignure... De plus, la plupart du temps, il n'y a pas eu de violation de domicile, personne n'a forcé la porte ou la serrure...Bref, c'est là l'oeuvre d'habiles magiciens extrêmement dangereux...C'est en Grande-Bretagne que ces crimes sont les plus nombreux, tenez-vous sur vos gardes ! Cette nuit, à Birmingham, une jeune fille a sauvé toute sa famille de la mort...Sur place, notre envoyé spécial, Mike Bazers.
