Bonjour à tous! Voici le chapitre 5...j'espère qu'il vous plaira. Personnellement, j'ai beaucoup aimé la fin...J'adore Draco, il est tellement...Draco!! C'est vraiment un très beau texte, et j'espère que j'arrive à retranscrire un tant soit peu de sa beauté...Enfin, j'attends vos impressions, comme toujours. Merci à tous ceux qui me reviewent, c'est vraiment gentil!
Elava: oui, c'est vrai que ces quelques chapitres ne sont pas très gais par rapport au début, et celui-ci ne fait pas exception à la règle...mais il y a tout de même une petite lueur d'espoir. J'espère que tu aimeras! Et merci!
Lululle: voici la suite! J'espère qu'elle sera à la hauteur!
Falyla: merci mille fois! merci de me supporter (dans les deux sens), c'est gentil! Et j'espère que tu es toujours contente de la traduction. S'il y a des trucs qui clochent, n'hésite pas à me le dire. Et puis je t'encourage de toutes mes forces pour ta fic, elle est géniale!! Gros bisous.
Marika Jedusor: merci de ta review, bien que je ne sache pas ce qu'est une 'toune'...Désolée lol. Merci encore!
Nicolina: je suis contente qu'elle te plaise. Merci pour tous ces compliments! Et puis voici la suite! Bises.
Nagisa Moon: oui, peut-être que la réaction de Harry est un peu excessive, mais il a tellement peur du regard des autres...Torturé le petit! Et puis oui, Sirius sera bien présent dans la fic, donc tu dois être contente! Pour Lupin par contre, je ne sais pas, étant donné que je lis la fic au fur et à mesure que je la traduis...Oh, au fait, tu vas me détester, mais j'ai mis deux ou trois [], désolée...Je sais, c'est affreux...lol. Mais c'était pour la bonne cause (à part un tout petit délire...)!! Merci encore!! Bises.
Fannie: bah, Harry n'est pas énervant, il est juste mal dans sa peau...Bon d'accord, je reconnais que je le défends un peu...Et j'avoue que Ron m'est assez sympathique dans cette fic...C'est une première! Et j'aime énormément Hermione, elle a un rôle génial. Ben, Draco a demandé à Hermione le livre L'Art de l'Amour parce qu'il parlait des satyres...Et puis il sait au fond de lui qu'il est amoureux de Harry...Il est moins bloqué que le ptit brun, enfin, il n'y a pas de mal!! Merci pour tes reviews! Ciao!
Caro: hello!! Pfff, qu'est-ce que je peux répondre à ça, moi, à part 'MERCI!!!' ? Tu dois me trouver d'un banal...M'enfin, c'est pour ça qu'on m'aime (entre autres)! Merci d'être toujours là, c'est (Draki)chou! lol. Gros bisous!!
Electrastars: ton message m'a fait vraiment plaisir! Je suis contente que tu aimes cette fic, surtout si tu n'est pas une fana de Draco! En effet, beaucoup disent que c'est le meilleur slash H/D...Pour l'instant, j'avoue que je suis assez d'accord...L'auteur (un garçon qui plus est) est vraiment doué. Merci encore!!
CONTE D'HIVER
Durant les semaines qui suivirent, la tension dans la tour de Gryffondor alla de Mal en Pis, passa par Sacrément Affreuse et finit par se stabiliser à Totalement Insupportable. A la mi-novembre, le temps exceptionnellement doux pour la saison eut une fin rapide lors d'une journée étrangement calme pendant lequel le temps fit un revirement total, et un front froid arriva rapidement du nord-est, amenant avec lui des vents cinglants et des matins à l'air glacial et vif. La température chuta d'environ dix degrés en deux jours, mais quel que soit le froid mordant qui sévissait à l'extérieur du château, ce n'était rien à comparer de la froideur qui régnait désormais dans le dortoir des garçons de cinquième année, dans la tour de Gryffondor.
Les sentiments de Ron étaient les plus faciles à voir. Il ne cachait en aucune façon sa consternation, sa peine et sa colère à l'égard de Harry, et il se disait qu'ils auraient dû se disputer violemment, se bagarrer, se ficher trois ou quatre bonnes raclées, s'effondrer ensanglantés et brisés, et en arriver à un point où le dialogue - et une explication - aurait été la seule solution. Ron ne cessait de rejouer ce scénario dans sa tête, toujours avec la même fin: Harry s'excusant du mieux qu'il pouvait et avec des tonnes de sincérité, en disant que lui, Harry, était totalement à blâmer, que Ron était et serait toujours son ami - comment pouvait-il avoir été aussi aveugle? Et puis bien sûr, Ron pardonnerait de bonne grâce à Harry (probablement pas sur-le-champ, mais plutôt vers Noël) et puis ils redeviendraient les meilleurs amis à l'amitié solide comme un roc, rigolards, s'entendant comme larrons en foire, qu'ils étaient depuis qu'ils s'étaient rencontrés dans le Poudlard Express quatre années et des poussières auparavant. Mais comme Hermione lui disait si souvent: Ron, réveille-toi; cette histoire va tellement loin maintenant que je n'arrive vraiment pas à voir comment elle pourrait s'arranger. Et malheureusement pour Ron, Harry n'avait visiblement pas lu ce scénario-là, parce qu'il ne faisait que l'ignorer, comme si la pièce était vide, comme si la voix de Ron n'était pas perceptible sur la fréquence d'écoute de Harry. Ron trouvait cette attitude plus blessante, bouleversante et exaspérante que n'importe quelles insultes, menaces ou méchancetés. Le plan de Ron était de harceler Harry pour que cela débouche sur une redoutable confrontation, cependant, cela restait une impasse douloureuse et affreuse, alors que Ron était furieux contre lui-même pour se soucier autant de cette affaire et que Harry se contentait d'aller et venir nonchalamment comme bon lui semblait, ce qui accentuait encore la rancune de Ron qui était déjà élevée.
La plupart des autres Gryffondors ressentait la même chose que Ron, à des degrés moindres néanmoins. Le véritable moment fatidique était arrivé environ deux semaines après le cours de Soins aux Créatures Magiques, cours que Hermione avait identifié comme étant le point de départ des problèmes. Le professeur McGonagall avait déboulé à la table des Gryffondors pendant le petit déjeuner, et avait exigé que Fred et George viennent immédiatement dans son bureau. Oh la la, se dirent les Gryffondors, plutôt amusés, qu'ont-ils bien pu faire encore? Mais ce n'était pas du tout ce que tout le monde soupçonnait. Environ dix minutes plus tard, les jumeaux réapparurent au petit déjeuner, avec la même expression affichée sur leurs visages identiques: ils étaient furibonds. Oh mon Dieu, songea Ron, ils se sont fait renvoyés. Ginny lui prit la main alors qu'il se faisait le porte-parole de la table désormais silencieuse.
"Fred? George? Qu'est-ce qui s'est passé?" demanda-t-il à voix basse, son esprit passant en revue à toute vitesse une douzaine de possibilités extravagantes. Mais rien de ce qu'il pensait ne se rapprochait de ce qu'ils répondirent.
"Harry Potter..." articula Fred.
"...s'est retiré de l'équipe de Quidditch de Gryffondor" termina George.
"McGonagall dit qu'on doit trouver et entraîner un nouvel attrapeur avant le match contre Poufsouffle de la semaine prochaine..."
"...donc on doit faire les épreuves de sélection tout de suite. Ce soir en fait"
Ce fut le scandale immédiat. La colère de Ron atteignit de nouveaux sommets et assis sur sa chaise, il bouillait littéralement de rage. Ginny fut très inquiète à son sujet, en fait au sujet de ses trois frères. Jusqu'à ce point, le conflit, si on pouvait appeler ça comme ça, avait semblé concerner uniquement Ron et Harry, avec Hermione et Ginny reléguées au rang de spectatrices, mais à présent, la Maison entière se sentait tout particulièrement visée par les actions de Harry. Comme Hermione et Ginny en discutèrent en cachette un peu plus tard, Harry avait eu de la chance de ne pas être au petit déjeuner ce matin-là. Il aurait pu être lynché, ou pire. Vu les airs outrés des Weasley, tout aurait pu arriver.
L'occasion du match contre Poufsouffle avait été un autre tournant dans la tour des Gryffondors. Fred et George sélectionnèrent Ron comme nouvel attrapeur, ce qui fut un autre tourment pour Ron. Devait-il refuser le poste, sachant que cette occasion se présentait à lui uniquement parce Harry était 'indisponible' et pire encore, sachant qu'il lui avait été offert sans vergogne par ses propres frères, ou devait-il sauter sur l'occasion et penser à l'honneur de sa Maison? Ce fut Hermione qui le convainquit de relever le défi, et il fut heureux de l'avoir écoutée. La semaine précédant le match, il n'avait fait que s'entraîner, avec les jumeaux lui faisant faire des exercices sur toutes sortes de figures jusqu'à la nuit tombée, toutes les pensées concernant Harry complètement oubliées. Et son habilité s'améliora sensiblement. Bien sûr, il n'était pas Harry. Personne ne volait comme Harry, avec l'aisance et la grâce d'un oiseau de mer, et personne à l'école en dehors de Harry possédait un Eclair de Feu. Mais Ron avait donné absolument tout ce qu'il avait et même davantage, et ça avait presque était payant. Dégingandé et gauche comme il était, monté sur un Balaitout 6 [j'ai essayé d'innover, c'est 'Cleansweep' en VO...], totalement distancé même par les Poufsouffles, il avait poursuivi, esquivé et plongé du mieux qu'il le pouvait, et même si Poufsouffle gagna par 170-80, Ron avait été accueilli en héros de retour dans sa tour. Harry n'avait pas assisté au match, et il ne fut pas non plus présent à la fête qui se déroula dans la salle commune des Gryffondors, et pour une fois, Ron ne s'en rendit pas compte. McGonagall lui avait fait un large sourire et lui avait donné vingt points pour ses efforts remarquables, et la Maison lui avait porté un toast avec de la bière-au-beurre amenée en fraude par les jumeaux, ce qui avait couronné ce jour glorieux. Mais plus tard, alors qu'il était couché dans son lit, entendant Harry remuer de la manière insensible, absente, et anonyme avec laquelle il faisait tout à présent, Ron fut profondément attristé en pensant que ce moment-là, un des meilleurs de sa vie, était seulement arrivé à cause du comportement inexplicable de Harry; cependant, malgré la fureur qu'il avait contre lui, aucune des félicitations que Ron avait reçue n'avait compté pour lui sans une tape dans le dos de Harry lui-même. Après la tension insupportable précédant la rencontre Gryffondor/Poufsouffle, l'hostilité entre Ron et Harry atteignit le même niveau qu'auparavant, ce qui voulait dire que Ron se remit à essayer de provoquer Harry pour qu'ils se battent, tandis que Harry demeurait impassible devant tout ce que Ron faisait, disait, pensait ou ressentait.
Les sentiments de Hermione étaient bien plus compliqués que ceux de Ron. Elle avait bien plus de raisons de se plaindre du comportement de Harry que Ron, parce que non seulement elle devait supporter que Harry l'ignore comme si elle n'existait pas, mais elle devait personnellement recoller les morceaux de la vie des deux plus jeunes Weasley qui avait été effondrés par ce qui avait pris le contrôle de Harry, quoi que ce fut. Elle avait été un soutien précieux pour Ron, toujours là pour lui, l'encourageant pour ses entraînements de Quidditch, le consolant quand les actes de Harry le faisaient se sentir plus bas que terre, étant furieuse contre Harry pour ce qu'il faisait à Ron. Et, grands dieux, Ron avait commencé à la remarquer. Enfin, il pouvait difficilement faire autrement. Ils étaient en compagnie l'un de l'autre du petit déjeuner à l'heure du coucher, et même si Harry n'était absolument jamais avec eux, elle avait aimé les moments qu'ils avaient passés ensembles, quelles que soient les raisons qui se trouvaient derrière tout ça. Et la soirée qui avait suivi le match contre Poufsouffle, quand Ron avait souri et ri comme il ne l'avait pas fait depuis des semaines, elle avait senti une douce chaleur s'installer entre eux, ce qui avait été une sensation merveilleuse. Il ne l'avait pas embrassée, ni même montré qu'il en avait l'intention, mais il l'avait simplement prise dans ses bras, refusant de la laisser partir, l'étreignant pendant une éternité, voulant qu'elle soit à ses côtés toute la soirée, voulant partager ce mini-triomphe avec elle. Elle avait eu plus de problèmes pour s'occuper de Ginny. Hermione ne pouvait lui apporter aucune parole de réconfort, et le temps passant, il s'avéra que la meilleure chose pour Ginny était simplement de passer du temps avec Ron et les jumeaux, avec lesquels elle se sentait chez elle et pouvait essayer d'oublier l'inexplicable impolitesse de Harry.
Mais derrière tout ça, Hermione était terriblement inquiète au sujet de Harry, d'une manière différente de Ron. Elle ne pouvait se résoudre à essayer de le contrarier comme le faisait Ron, à soupirer pour lui comme Ginny, ou même à faire une croix sur lui comme le reste de la Maison. Elle savait que Harry avait un grave problème, mais son refus catégorique de la laisser s'approcher de lui signifiait qu'elle était incapable de lui apporter de l'aide. Elle savait, car elle faisait très attention à ce genre de choses, que Harry n'avait assisté qu'à quatre repas durant ces cinq dernières semaines; même lors du banquet d'Halloween, il n'avait presque mangé rien et était resté assis à côté de Neville, sans piper mot, une quinzaine de minutes avant de s'en aller. Elle savait également qu'il n'avait pas dormi correctement depuis ce même laps de temps, et qu'il perdait du poids à une vitesse alarmante. Elle l'observait en silence pendant les cours, alors qu'il se tenait à l'écart, allant de cours en cours sans parler à personne, disposant ses livres et ses plumes sans aucun soin sur son bureau, manquant dates limites sur dates limites pour ses devoirs, perdant un nombre incalculable de points en Potions à cause de son inattention; alors qu'elle le regardait, elle pouvait voir les cernes sous ses yeux, l'expression effrayée son visage, l'air de solitude impénétrable qui l'entourait tel un brouillard. Et quelquefois, elle hurlait intérieurement en le regardant, et devait se maîtriser physiquement pour ne pas se précipiter vers lui, le serrer dans ses bras et lui supplier de lui parler. Oh mon dieu Harry, comment puis-je t'aider si tu ne me laisses pas t'approcher? L'affaire du Quidditch avait été la goutte d'eau qui avait fait déborder le vase. S'il y avait bien une chose que Harry aimait faire, c'était voler. Elle avait écrit deux fois à Sirius, mais ses réponses avaient été évasives: ne bouge pas et essaie de faire avec, je suis sûr que tout finira par s'arranger. Elle était même allée voir McGonagall, qui avait plus ou moins dit la même chose. En plus de cela, Hermione savait bien mieux que Ron ce qui troublait Harry, et ses soupçons commençaient à la ronger. Elle avait suivi sa pensée, discutant avec Hagrid des satyres, étudiant à fond tout ce qu'elle pensait pouvoir s'y rapporter, et elle en était arrivée à la seule conclusion possible. Alors elle avait simplement espéré que celle-ci s'en aille. Mais elle n'était pas partie, et elle ne partirait pas. Bientôt, se dit-elle. Je vais devoir parler à Ron bientôt, sinon nous le perdrons pour toujours.
Harry lui-même avait touché le fond quelques semaines plus tôt. Dans ses moments les plus lucides, il savait qu'il s'en était tenu rigoureusement au plan qu'il avait élaboré l'autre matin près du lac, et bien qu'il ne puisse pas juger de la réussite ou de l'échec de son projet, il se disait que tant qu'il camperait sur ses positions, il éviterait le pire. Il n'était dorénavant plus ami avec Ron. A présent, quand il devrait finalement révéler son secret, il aurait déjà surmonté la douleur de la perte de Ron. Et bon dieu, quelle douleur ça avait été. Voir et entendre Ron, le visage baigné de larmes, le supplier de lui dire ce qu'il avait fait de mal, avait été très proche de le briser. Mais il avait en quelque sorte réussi à garder une apparence extérieure froide alors qu'intérieurement, il avait bouilli, avec un mélange de honte, de remords et de dégoût de lui-même. Et bon sang, ce qu'il lui manquait; c'était comme s'il avait perdu un membre. Il avait observé Ron de dessous les tribunes donner tout ce qu'il avait dans le match contre Poufsouffle et s'était dit qu'il s'en était très bien sorti, et qu'il aurait tellement voulu le féliciter. Et il avait observé avec plaisir le rapprochement grandissant de Ron et Hermione, sachant que sous peu ils seraient ensembles et qu'il ne leur manquerait pas. Il n'avait pris aucun plaisir à ignorer Ginny, mais ça avait tout à fait marché: ok, elle n'avait pas encore réellement commencé à chercher quelqu'un d'autre, mais ce n'était sûrement qu'une question de temps. Seamus et Dean ne lui adressaient plus la parole, tout comme Neville, ce qui lui éviterait à présent l'humiliation d'être rejeté par eux plus tard. Mais ce genre de pensées 'rationnelles' ne lui venaient que pendant ses moments de lucidité. Pendant les autres moments, en fait la plus grande partie de son temps et de loin, il se noyait dans une dépression si profondément enracinée en lui qu'il pouvait traverser des jours entiers et ne se souvenir de rien. Il savait qu'il ne mangeait pas; les repas étaient tellement pénibles; alors de temps en temps, il allait aux cuisines et bravait les bavardages insupportables de Dobby pour se mettre quelque chose dans le ventre, mais il n'avait pas très souvent le coeur à ça. Il avait depuis longtemps oublié ce que c'était de dormir correctement. Torturé par des insomnies destructrices, il vagabondait dans le château et les jardins la nuit, les mêmes pensées désespérées tournant sans cesse dans sa tête jusqu'à l'aube, moment où il se préparait à endurer une nouvelle journée insignifiante dans un nuage d'indifférence. Son apparence physique était désormais si misérable qu'il avait totalement arrêté de se regarder dans une glace. Ses résultats était si bas que McGonagall l'avait convoqué dans son bureau, furieuse, et avait exprimé sa forte déception, mais il n'arrivait même pas à se rappeler ce qu'elle lui avait dit. Rogue lui avait enlevé cinquante points pour l'avoir surpris à errer dans les jardins au milieu de la nuit, mais il n'était ni honteux ni préoccupé de l'honneur de sa Maison. Et Hermione. Elle l'observait, tout le temps, le forçant à croiser son regard, refusant d'être mise à l'écart. Elle jetait des coups d'oeils réprobateurs à son corps maigre, à son aspect miteux, aux cernes sous ses yeux. Et elle savait. Elle savait.
Les seules lueurs d'espoir de sa vie étaient les moments passés avec Sirius. Ils s'étaient retrouvés chaque samedi à la Cabane Hurlante depuis leur premier pique-nique environ cinq semaines plus tôt, et peu à peu Sirius s'était mis à décortiquer la noirceur des humeurs de Harry et à essayer d'amadouer son filleul pour qu'il lui dise quel cancer lui pourrissait les entrailles. Harry trouvait l'attente de ces rencontres avec son parrain bien mieux que le fait d'avoir à éluder les questions et à fournir de fausses réponses, mais quand même il ne pourrait pas se passer de ces journées, quel que soit le danger que courait Sirius. Chaque semaine, c'était pareil. Sirius transplanait à l'intérieur de la Cabane Hurlante, et ils se partageaient la nourriture pendant que Harry parlait, quelquefois sans s'arrêter, toujours de tout et de rien, mais parlant quand même. Parfois, ils passait des journées entières sans adresser la moindre parole à quelqu'un, une fois pendant une semaine complète; et être capable de parler, même de rien du tout, lui faisait l'effet que la vie resurgissait en lui. Mais ensuite Sirius commençait sa 'thérapie', encourageant Harry à parler de ce qui l'ennuyait, de pourquoi Ron et Hermione ne venaient jamais avec lui, de pourquoi Sirius recevait régulièrement des hiboux à propos du bien-être de Harry. Mais il était hors de question que Harry lui dise un jour ce qui, et qui était dans son esprit chaque minute de sa vie éveillée. Il ne pouvait pas lui dire qu'il errait dans les jardins au milieu de la nuit avec seulement une pensée en tête. Il ne pouvait pas lui dire que la plus grande partie de son âme était dévorée par un désir qu'il ne pouvait se résoudre à reconnaître. Il ne pouvait pas lui dire qu'il avait tellement peur de ce que ses amis - sa famille - penseraient de lui qu'il les avait repoussés, par crainte d'être rejeté. Et il ne pouvait certainement pas lui dire qu'il essayait de se retenir de se donner du plaisir par peur de l'image que son subconscient ferait apparaître, et pourtant quelquefois, le désir devenait si fort, si irrépressible, qu'il se retrouvait en train de se masturber avec une frénésie désespérée dans le but singulier d'entrevoir exactement ce qui, ou plutôt qui, il essayait par tous les moyens de nier l'existence pure et simple. Oh mon Dieu, non. Il ne pouvait lui dire aucune de ces choses. Bref. Ensuite, Harry se la bouclait, refusant amèrement cette incursion dans sa vie privée, jusqu'à ce qu'il finissent par se séparer tristement, sachant tous les deux qu'ils feraient les mêmes choses la semaine suivante, Harry sachant que c'était la seule chose qu'il attendait avec impatience. Le samedi de mi-novembre après que le temps ait viré de bord pour le nord, ils se retrouvèrent de la même façon pour la sixième fois, et comme on pouvait s'y attendre, il se passa les mêmes choses. Mais cette fois-ci, Sirius décida qu'il ne pouvait plus ignorer l'écrasante évidence. Harry était malade. Dangereusement affaibli, souffrant de malnutrition, totalement épuisé. Après avoir tenté en vain de persuader Harry d'aller prendre ne serait-ce qu'une potion de sommeil chez Madame Pomfresh, il s'arrangea pour le voir à la même heure le week-end suivant, l'étreignit chaleureusement pour lui dire au revoir, puis fouilla dans ses poches à la recherche d'un parchemin et d'une plume. Il écrivit rapidement et succinctement - S'il vous plaît, faites quelque chose. Je suis terriblement inquiet. Sirius - puis entreprit l'opération délicate de se métamorphoser en Patmol, puis il alla à Pré-au-Lard, se glissa furtivement dans la Volière à la Poste, se changea en Sirius et envoya un hibou à Dumbledore, avant de se transformer une nouvelle fois en Patmol et de sortir sans bruit, à la recherche d'une cachette où il pourrait redevenir humain et transplaner sans que personne ne le voie.
Passant inaperçu de la plupart de l'école, mais pas de tous, un autre garçon avait également des problèmes. L'état d'esprit de Draco n'avait pas fait l'objet d'un débat public comme celui de Harry, mais c'était seulement parce que Draco faisait de son mieux pour veiller à ce que rien ne transparaisse. Mais pour le peu de monde qui pensait être proche de lui, c'était impossible de ne pas savoir que quelque chose le déchirait. Crabbe et Goyle voyaient - comment ne le pourraient-ils pas? - qu'il n'avait pas fait une seule farce ni un seul mauvais tour aux Gryffondors depuis des semaines. Pansy le remarquait, la petite garce toujours à faire des minauderies, et était constamment en train de lui demander comment il allait et qu'est-ce qu'elle pouvait faire pour l'aider. Et, Granger le remarquait. Elle le surveillait de près, depuis le jour dans la bibliothèque où ils s'étaient pris le bec à propos de ce livre français sur les satyres. Elle savait, il n'y avait pas l'ombre d'un doute. Draco se demandait tout le temps si elle en avait parlé à Potter, mais il décida que non. Tout le monde à l'école savait que Potter ne parlait à personne depuis des semaines, pas même à Granger, pas même à son frère d'armes Weasley. Mais quand même, pourquoi Granger n'avait-elle pas suivi ce qu'elle avait appris? Donc, dans cette situation horriblement incertaine, Draco sauvait les apparences. Il se pavanait dans les couloirs. Il lançait des remarques narquoises pendant les cours. Il tenait sa cour au souper à la table des Serpentards. Mais ce n'était plus lui.
Alors que l'angoisse existentielle [traduction du fameux 'angst'] et le déni de Harry avait eu comme conséquences une sérieuse dépression et des insomnies, l'esprit de Draco analysait tout d'une manière réaliste, froide et claire. Il avait vu l'état lamentable dans lequel Harry avait sombré, et il ressentait du mépris pour lui. Enfin, quelquefois c'était du mépris; le reste du temps, c'était...de la compassion. Et de la compréhension. Et de l'affection? Et à la base de tout cela, il y avait de l'attirance. C'était indéniable à présent. Draco avait eu amplement l'occasion d'étudier le déclin de Harry car il se sentait inexplicablement mieux quand il pouvait voir Harry, et donc il l'observait autant qu'il le pouvait. Il s'asseyait derrière lui en cours, comme ça il pouvait fixer ses cheveux en bataille et le dos de sa robe de sorcier; aux repas, il s'asseyait à une place bien précise pour que si jamais Harry faisait une de ses très rares apparitions dans la Grande Salle, il puisse le voir; et chaque nuit il parcourait silencieusement le château et les jardins, jusqu'à ce qu'il l'aperçoive, marchant encore et encore. Draco s'asseyait alors là où il pouvait le regarder arpenter le terrain de Quidditch à la lumière des étoiles ou escalader les rochers autour du lac en éclairant le chemin de sa baguette, heureux de ces moments de relative paix que la vue de Harry lui accordait, mais détestant la nécessité de ses propres actes. Il se demandait souvent pourquoi Harry ne semblait pas pouvoir tirer la même force de lui que lui-même le faisait avec Harry. Il doit simplement avoir rejeté mon existence, songeait-il. S'il m'a renié jusqu'à ce que je ne sois plus rien, alors il ne pensera jamais à me regarder, donc il se peut qu'il ne le découvre jamais. Après tout, il n'avait pas vraiment regardé quelqu'un depuis des semaines. C'était dans ces moments-là qu'il se sentait le plus proche de Harry, et qu'il ressentait un chagrin énorme en voyant ce garçon enveloppé d'une si grande douleur. Un jour, se disait Draco, il faudra que je te sorte de cette dépression, avant que...oh merde non, pas ça. Tu ne serais pas aussi stupide, hein, Potter? T'as plutôt intérêt.
Et en réalité, il avait désormais une explication quant au fait que la proximité de Potter lui fasse cet effet-là. Il savait quel était le problème. Il savait ce qui se passait, ce qui s'était passé. Il se sentait à la fois intimidé et furieux contre ça, mais il éprouvait une sorte de soulagement aussi. Il n'y avait qu'une seule marche à suivre, et même si l'idée en elle-même était inimaginable, il savait au moins qu'il avait un moyen de se sentir mieux. Mais à quel prix? Au mieux, cela signifierait le début de quelque chose d'horriblement inconnu; au pire, une humiliation indescriptible, un rejet dévastateur et la fin de tout ce qu'il avait jamais vécu. Oh mon dieu. Ressaisis-toi, Draco. Il doit y avoir un moyen de faciliter les choses. Tu as deux personnes, empêtrées dans la même pagaille. L'un est arrogant, l'autre têtu; mais les deux sont tellement farouchement indépendants que c'est sûrement voué à l'échec dès le départ. Mais Potter, se dit-il, si on ne fait pas bientôt quelque chose, alors moi je vais devenir fou et toi, tu es tellement instable en ce moment que tu pourrais, tu pourrais...Il arrêta le fil de ses pensées. Il ne pouvait pas envisager cette possibilité. C'était inconcevable.
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Les samedis, il n'y avait pas cours, ce qui était tout aussi bien, car Seamus et Dean étaient bien en retard pour leurs devoirs, et les week-ends leur offraient la possibilité de rattraper ce retard. Cependant, ils ne prenaient pas souvent cette opportunité, et ce samedi ne fit pas exception à la règle.
"Où il est? Vite, où il est bon sang?" siffla Seamus pendant que Dean fouillait rapidement la malle de Harry. "Allez, il pourrait revenir d'une minute à l'autre!"
"Je ne sais pas! Il n'est pas là, il doit l'avoir caché ailleurs"
"Il n'y a aucun autre endroit. On a regardé partout. Il doit être là-dedans. Ote-toi de là et laisse-moi y jeter un coup d'oeil"
Seamus écarta brusquement Dean et farfouilla dans la malle de Harry, de haut en bas. Ca avait l'air d'une extraordinaire intrusion dans la vie privée - par l'enfer, c'était une extraordinaire intrusion dans la vie privée - mais lui et Dean en avaient maintenant assez d'attendre que l'humeur de la tour s'éclaircisse suffisamment pour qu'ils puissent demander directement à Harry s'ils pouvaient l'emprunter. Et ça ne le dérangerait sûrement pas: s'il leur avait parlé, il aurait été obligé de dire 'oui', car il ne leur avait jamais rien refusé auparavant. Logique vacillante, certes, mais Seamus en était désormais plus ou moins persuadé. Sa main tomba par hasard sur ce qu'il cherchait: un ouvrage petit et mince, fait à la main et relié de cuir. Il sortit Le Livre de Sorts des Garçons (Edition Spéciale) et le regarda.
"Je l'ai!" s'écria Seamus d'un air triomphant.
Il souriait comme un dément et Dean rit. "Fais voir!"
Seamus ouvrit le livre. Tous deux se rapprochèrent le plus possible et Seamus le feuilleta jusqu'à ce qu'il trouve ce qu'ils cherchaient: le sort de Charlie Weasley provenant de Roumanie. "Ah!" chantonna Seamus. "Moi d'abord!"
"Pas question, petit con irlandais. J'ai ouvert la malle. A moi l'honneur"
"Ouais, mais je l'ai trouvé, petit pervers londonien. Fiche le camp et laisse-moi une demi-heure"
"Une demi-heure! T'as pas besoin d'une demi-heure. Ca t'a jamais pris aussi longtemps, avec ta technique de merde. Si tu veux une demi-heure, alors je passe le premier. Dix minutes et puis tu peux avoir le livre tant que tu veux"
"Dix minutes!" fit Seamus, riant comme un bossu. "Dix minutes!!! Espèce d'amateur! T'as quel âge, Dean? Tu veux vraiment que dix minutes?"
"Enfin, peut-être quinze" dit Dean, riant autant que Seamus, et essayant d'arracher le livre des mains de Seamus. Il réussit à l'empoigner et le tira fortement, et les deux garçons - riant tous deux et refusant de lâcher le livre - tombèrent comme des masses en se chamaillant.
"Laisse tomber, Deano, petit branleur!"
"Hé, lâche-le ou..."
Le bruit d'un livre se déchirant en deux résonna dans la pièce et réduisit les deux garçons au silence, qui se regardèrent l'un l'autre avec l'air de quelqu'un qui est soudainement surpris dans une position hautement compromettante.
"Oh merde" dirent-ils à mi-voix.
Alors qu'une feuille voletait doucement jusqu'au sol, la porte s'ouvrit. Le bout de parchemin dériva et s'arrêta juste aux pieds de Harry.
"Oh merde" répétèrent-ils doucement.
Harry se baissa et ramassa la page, puis s'approcha de Seamus et Dean. Ils restèrent à terre dans leur enchevêtrement plutôt bizarre et ils lui tendirent chacun en silence une moitié de livre. Harry mit les deux parties du livre dans sa main gauche et les tapota de sa baguette, s'éclaircit la gorge et marmonna 'Reparo'. Le livre se reconstitua miraculeusement de lui-même dans un claquement de feuilles et de fils. Harry se dirigea vers sa malle, reposa le livre à l'intérieur, puis s'agenouilla et murmura une incantation sur son coffre, si doucement que ni Seamus, ni Dean ne purent comprendre le sort de verrouillage qu'il avait utilisé. Il y eut un certain malaise quand les deux garçons se relevèrent, puis les trois se firent face.
"Pourquoi n'avez-vous pas tout simplement demandé?" dit Harry, d'une voix sans émotion.
"Parce que Harry, ça fait six semaines que tu nous parles pas" répondit audacieusement Seamus.
"Et qu'est-ce qui vous a fait croire que vous aviez le droit de fouiller dans mes affaires?" reprit Harry, aussi platement qu'auparavant.
"Ben, on pensait, enfin, je pensais que si nous en avions parlé, tu aurais dit 'oui'. Mais comme on se parlait pas, tu ne pouvais dire ni oui ni non. Donc, j'ai comme qui dirait pris le 'oui' comme implicite, et j'ai convaincu Dean. Comme si, tu vois, t'étais parti en vacances et qu'on voudrait t'emprunter un truc" dit Seamus, conscient que son idée avait l'air bien plus discutable quand elle était exprimée à voix haute.
"En plus" fit Dean, "c'est pas comme si c'était un secret. On sait ce qu'il y a dans ce bouquin. C'est nous qui l'avons écrit, si tu te souviens..."
"Oui" dit Harry, les yeux lui piquant un peu. "Bien sûr que je m'en souviens. C'était un cadeau, quand...". Il laissa sa phrase en suspens.
"Quand...quand on était tous copains, Harry" avança Seamus. "Quand en fait tu étais un des meilleurs copains qu'on puisse imaginer. Quand Neville et nous, on avait l'habitude d'apprécier ta compagnie plus que n'importe qui. Et quand Ron avait l'habitude de tirer du soutien, de l'énergie et de l'amour du fait d'être ton ami. Maintenant, il bout et fulmine et, quand il en a trop sur le cœur, il va pleurer sur l'épaule de Hermione. Mais tu ne sais pas ça, Harry, parce que tu nous parles plus. Et tu t'en fous"
Harry resta silencieux pendant quelques temps. La rencontre avec Sirius dont il venait juste de revenir l'avait assez vidé émotionnellement, et il n'avait pas du tout envie d'être en la compagnie de Seamus et Dean. Il devrait simplement s'en aller. Mais il ne pouvait pas. Quelque chose le tiraillait en lui. Il détestait le fait que Seamus et Dean croient qu'il ne se préoccupait pas d'eux. Les mots se formèrent d'eux-mêmes sur ses lèvres sans qu'il en soit réellement conscient: "Mais je ne me fous pas de vous, Seamus" dit-il enfin, d'une voix presque inaudible, et une larme unique s'échappa de son œil droit. Il l'essuya précipitamment, de crainte qu'ils ne voient ce signe de faiblesse. "Je n'ai jamais cessé de me soucier de vous tous, c'est juste que, je ne peux plus être le Harry que vous connaissiez..."
Seamus se pencha en avant et posa doucement la main sur l'épaule de Harry. Il articula en silence 'Va chercher Ron' à Dean, lequel quitta la pièce rapidement et discrètement. "Alors pourquoi Harry", poursuivit-il, "t'es-tu comporté comme un parfait salaud?"
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Le hibou arriva dans le bureau de Dumbledore pas même dix minutes après que Sirius l'eût envoyé. Un chat-huant intelligent et empressé, pour lequel c'était toujours un plaisir de faire une course qui l'amenait à l'école, et porter une missive au directeur en personne, c'était vraiment un honneur. Dumbledore leva les yeux de son bureau en entendant le tapotement contre la fenêtre, et le hibou reconnaissant voleta dans la pièce, faisant quelque peu l'intéressant, après qu'il l'eût laissé entrer.
"Viens par ici, mon petit" dit Dumbledore avec un sourire. "Voyons voir quelles nouvelles tu nous apportes". Le hibou atterrit en douceur sur le poignet de Dumbledore et lui présenta le message, acceptant avec gratitude une petite friandise que le vieil homme lui tendait. Puis, quand il eût lu le mot gribouillé et laissé repartir par la fenêtre le hibou plein d'entrain, son expression devint pensive.
"Qu'est-ce que c'est, monsieur le Directeur?" demanda Rogue, sa voix mielleuse essayant de montrer un minimum d'intérêt. "Quelque chose de grave?"
"Peut-être, oui, peut-être, Severus. Dites-moi, comment va Draco Malfoy?"
Rogue fut quelque peu décontenancé. "Cela a-t-il un rapport avec ce message?" Dumbledore resta silencieux, attendant poliment la réponse à sa première question. "Différent. Calme. Mettant son énergie dans son travail. Lunatique. Insomniaque aussi, je pense. Un adolescent normal. Pourquoi?"
"Comment savez-vous qu'il souffre d'insomnies?"
"Je l'ai vu errer dans le château la nuit. Dans les jardins quelquefois aussi"
"Vraiment? Je ne me souviens pas que des points aient été enlevés pour cet écart de conduite de la part de M. Malfoy. Cependant, il y a eu récemment un retrait de cinquante points pour M. Potter pour le même crime, me semble-t-il...". Rogue remua, mal à l'aise, mais Dumbledore, ayant marqué un point, ne laissa pas Rogue patauger dans l'inconfort et poursuivit presque immédiatement: "Bref. Un adolescent normal". Dumbledore laissa sa phrase en suspens tandis qu'il sortait l'Orbis de son bureau et observait les minuscules lucioles qui reflétaient l'intensité des sentiments qui entouraient Harry et Draco. Il se tourna vers McGonagall. "Minerva, parlons de Harry. Comment s'en sort-il?"
"Il ne s'en sort pas, Albus. Il est en état de malnutrition, épuisé, déprimé et désespéré. Paralysé par son manque d'assurance et par les insomnies. Dangereusement faible, et instable. Je suis profondément inquiète. Nous devons faire quelque chose"
"C'est plus ou moins ce que dit le mot de Sirius"
"Sirius? Sirius Black?" grogna Rogue. "Depuis combien de temps est-il à nouveau dans le coin?"
"Depuis que cette histoire entre le jeune Potter et M. Malfoy a attiré mon attention". Dumbledore toucha à nouveau l'Orbis. "Il aide sur mon invitation, Severus"
"Quelle histoire entre Potter et Malfoy?" grimaça Rogue, tentant de dissimuler sa curiosité.
"Severus, êtes-vous aveugle?". La voix de McGonagall était coupante comme un rasoir. "Harry est à peine lui-même depuis cinq ou six semaines. Il ne parle à personne à l'école. La seule conversation qu'il ait, c'est avec son parrain, une fois par semaine. Il n'a ni mangé, ni dormi depuis des semaines. Franchement, Severus, vous lui donnez des cours aussi souvent que moi. N'avez-vous donc pas remarqué?"
"Je ne fais pas attention au comportement de mes élèves en dehors de mes cours. Leurs lubies d'adolescents ne sont pas mes affaires en tant que professeur de Potions"
Dumbledore observait les chamailleries de ses deux plus anciens collègues, songeant à prendre la parole pour les arrêter, mais il se rassit avec l'Orbis et décida de laisser les choses suivre leur cours.
"Lubies d'adolescents? Et vous êtes le Directeur d'une Maison, Severus. Si vous vous souciez un tant soit peu de vos élèves, vous auriez remarqué que Potter et Malfoy sont tous les deux en proie à quelque chose qu'ils ne peuvent pas contrôler. Malfoy est plus doué pour le cacher, c'est tout. Et je proteste énergiquement quant aux cinquante points que vous avez enlevés à Potter comme punition. Ses camarades de Gryffondor ne devraient pas en subir les conséquences, surtout que Potter fait tout ce qu'il peut pour s'en sortir, à sa manière il est vrai. J'ai vu Potter et Malfoy tous les deux errer dans le château nuit après nuit, et notez Severus que je n'ai jamais pénalisé Malfoy de cette façon"
"Sans doute parce que il est difficile de punir des élèves quand vous êtes sous votre apparence féline, Minerva". Rogue se méfiait des Animagi, dont il n'avait jamais réussi à maîtriser l'art. Mais son commentaire agaça McGonagall à un point auquel il ne s'était pas attendu.
"La différence entre vous et moi, Severus, est que, bien que je sorte souvent la nuit, et plus particulièrement ces temps-ci, et que je parcoure le château et les environs sous la forme d'un chat, je le fais pour deux raisons bien précises. Premièrement, je suis extrêmement inquiète à propos de Harry et je trouve plus facile de vérifier qu'il va bien en le suivant de près. Deuxièmement, les autres chats du château et des alentours sont les témoins de tout et sont une bonne source d'informations; vraiment, Mrs Norris et Pattenrond le chat de Granger sont des excellents collègues sous ce rapport. Alors que vous, Severus, vous patrouillez dans les couloirs pour pouvoir pénaliser. Et pénaliser uniquement les non-Serpentards, bien sûr"
"Peut-être que si vous m'aviez laissé savoir ce qu'était cette crise imminente..."
"Réunion au sommet!" s'écria Dumbledore. "C'est comme ça que ça s'appelle? Vous avez raison, Minerva. Nous ne pouvons plus le laisser seul; je suis inquiet pour les deux garçons. Vous deux, Sirius Black, Pompom, dans mon bureau, demain matin à dix heures. Je vais envoyer un hibou à Sirius sur-le-champ. Minerva, veuillez mettre Severus au courant de toute l'histoire, s'il vous plaît"
Dumbledore sourit avec bienveillance aux deux professeurs et la réunion, sembla-t-il, fut terminée.
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Dean descendit précipitamment dans la salle commune et trouva Ron et Hermione en train de parler tranquillement dans un coin avec Neville.
"Ron, monte, vite!" dit Dean à voix basse, pour que le reste de la salle commune n'entende pas. "On dirait que...peut-être que Harry a commencé à parler. Il est avec Seamus là"
"Et pourquoi devrais-je accourir à la minute où Harry m'appelle? Bon sang Dean, j'ai passé assez de temps à l'attendre"
"Ok Ron, c'est à toi de décider. Mais, ce n'est pas ça. Harry ne t'a pas appelé. C'est juste que Seamus a l'air d'avoir enfin établi une sorte de contact avec lui, et il pensait que tu aimerais peut-être être présent. Harry ne sait même pas que je suis venu te chercher"
Hermione serra la main de Ron, pour manifester son espoir, sa joie, son soulagement, ou celui de Ron, elle ne savait pas. Ron parla au petit groupe. "Ok. Ecoutons ce qu'il a à dire"
Mais alors qu'ils s'engageaient tous dans les escaliers, Harry descendit, évitant tous leurs regards, et quitta la salle commune. Seamus apparut tout de suite après lui, et regarda Harry sortir de la pièce. "Désolé, les gars" fit-il tristement. "Je croyais qu'il allait parler. Mais il se l'est bouclée et est parti, fidèle à ses habitudes"
"Bon" dit Hermione, prenant les choses en main. "Réunion au sommet. Il faut qu'on parle, et je vais commencer. Dortoir des Garçons, dans cinq minutes. Neville, trouve Ginny; Ron, Seamus, et si vous alliez voir Dobby pour nous prendre un casse-croûte?"
"Bien sûr" fit Ron. "Herm, est-ce que tu sais ce qui se passe?"
"J'ai bien peur que oui, je crois"
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Les samedis étaient toujours plus difficiles que les autres jours de la semaine. Sans la distraction qu'apportaient les cours, Draco était bon pour broyer du noir pendant des heures entières. Et étendu sur son lit dans le dortoir des garçons de cinquième année de Serpentard, ce samedi matin-là après le changement de temps, Draco était assurément en train de broyer du noir. Pour autant que ce genre de choses soit quantifiable, il se sentait encore plus mal que d'habitude, bien que 'plus mal que d'habitude' eût cessé d'avoir une véritable signification depuis que 'habitude' en lui-même était devenu 'intolérable' quelques semaines auparavant. Et alors que Draco était emporté par le même tourbillon qui l'emportait chaque jour - un cercle de besoin et de déni psychologiques que Draco analysait et comprenait pour ensuite essayer de les réfuter -, ses réponses étaient également les mêmes chaque jour, au point qu'il savait combien de temps il broierait du noir, à quel moment il ne supporterait plus le dortoir, l'endroit où il commencerait à chercher Potter, et dans quel ordre il fouillerait le château et les jardins jusqu'à ce qu'il le trouve. Et alors il l'observerait de loin, le fait de le regarder atténuant un peu le besoin, mais accentuant le déni, jusqu'à ce que la vision de Harry ne lui soit plus d'aucun réconfort, parce que tout cela ne faisait que lui dire qu'il avait envie de plus que simplement le regarder. Et ce matin-là, Draco venait d'atteindre le moment où il s'arrêtait de broyer du noir et partait à sa recherche, quand il se dit soudainement 'Putain de merde' et décida d'essayer quelque chose d'autre ce jour-là.
Il se brossa les cheveux, se servant d'un sort coiffant pour faire retomber juste quelques mèches blondes sexy qu'il savait qu'elles faisaient tourner les têtes, se brossa les dents et enfila un pull vert bouteille en cachemire dernier cri que sa mère lui avait envoyé, avec un jean noir moulant en moleskine [ne vous marrez pas, c'est de la peau de taupe lol. Si si, je vous jure!!] et une paires de bottes en peau de dragon [pour ceux qui connaissent 'Obsession', c'est le retour des bottes en peau de dragon!! lol]. Il fit tournoyer sa plus épaisse cape d'hiver noire en la mettant sur ses épaules et quitta le dortoir à grandes enjambées déterminées, appréciant le bruit sourd et masculin de ses bottes sur le sol de pierre, et il augmenta le rythme de ses foulées jusqu'à ce que sa cape ondule derrière lui de façon plaisante. Un des grands miroirs de la Maison Serpentard lui dit tout ce qu'il avait besoin de savoir: il était fringant, charmant, élégant, irrésistible. Oui, totalement irrésistible. Le miroir siffla doucement pour montrer son approbation, et la joie intérieure que lui procura ce sifflement se révéla par un sourire extérieur, et Draco se trouva à utiliser des muscles faciaux dont il avait oublié l'existence. Le simple fait de se servir de ces muscles sembla élargir son sourire, et au miroir suivant il entr'aperçut le reflet d'un jeune homme qu'il ne reconnut pratiquement pas. Putain, t'es bien Malfoy, pensa-t-il, le disant presque à voix haute.
"Ooh, Draco, qui est l'heureuse élue?" gazouilla Pansy alors qu'il traversait la salle commune en direction des jardins.
"Pas toi, bébé" dit-il, accentuant le ton grave de sa voix pour rajouter à l'image fugace qu'il donnait à la salle commune un peu plus de sex-appeal. "En fait, ce n'est pas une fille" poursuivit-il à voix basse en quittant la pièce.
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Merde, ça a été à deux doigts. Il avait presque craqué en parlant à Seamus. Quelque part, Seamus lui avait juste assez tapé sur les nerfs pour qu'il commence à lui faire avouer son plan, mais heureusement, il avait réussi à s'obliger à partir avant que cela n'arrive. Et c'était vraiment une bonne chose, parce qu'on aurait dit que Ron et les autres étaient en train de monter les escaliers dans leur direction, et il savait qu'il n'aurait pas eu la force de tous leur résister. Surtout Ron.
Harry avait toujours trouvé le samedi, après qu'il eût discuté avec Sirius, le moment le plus difficile de la semaine à occuper, le moment où il trouvait encore plus éprouvant d'être à côté des autres. Donc après avoir quitté Seamus dans le dortoir, il s'était naturellement dirigé vers le lac, où un lieu de l'autre côté de l'étendue d'eau était devenu son endroit préféré pour s'asseoir et réfléchir dans la solitude. La solitude était un truc marrant. On pouvait vivre dedans toute la semaine, évitant le contact avec les autres et esquivant les situations difficiles, mais c'était seulement quant on était vraiment géographiquement éloigné de ces mêmes personnes et des ces mêmes situations que la véritable solitude entrait en action. Et Harry avait découvert qu'il appréciait une telle solitude, pour quelques raisons révélatrices.
Harry avait beau s'avouer que la dépression profonde dont il souffrait était réelle, et il avait beau savoir que l'ignorer pouvait se révéler dangereux, il semblait prendre un plaisir et une satisfaction sinistres en se laissant descendre dans des puits de désespoir toujours plus profonds. Comme par exemple marcher près du bord d'une falaise; flirter avec le danger était, à un certain niveau, excitant, exaltant. Et parfois, quand il était vers le lac, soit le jour pendant les week-ends, soit la nuit pendant la semaine, Harry se servait de cette solitude comme d'un moyen qui lui permettait de réfléchir à sa propre mortalité. En regardant les eaux noires, profondes et gelées du lac, il s'asseyait à la frontière de la vie et de la mort, sachant qu'un seul instant de courage le verrait plonger avec dignité dans les profondeurs et ne plus être tourmenté par le fait d'être amoureux de Malfoy. C'était devenu une sensation délicieuse, comme une drogue: flirter avec le danger suprême, laisser la dépression de prendre une telle emprise sur soi qu'un tel acte semblait logique. Et même si Harry était conscient que c'était seulement sa dépression qui le faisait se sentir comme ça, et que ce problème ne valait pas la peine de se tuer, il savait également que c'était seulement pendant ces moments de pure solitude, quand il laissait son esprit penser à ces pensées inconcevables, qu'il se sentait réellement vivant - vivant de la même façon que lorsqu'il tournoyait librement en de larges cercles sur son Eclair de Feu.
Et comme si souvent depuis ces dernières semaines, Harry s'assit au milieu des rochers de l'autre côté du lac, regardant le château, regardant les montagnes et les forets au-delà, et noyant son regard dans l'eau éternelle, et pensant à Malfoy, à ce qu'il aimerait lui dire, et à ce qu'il aimerait faire avec lui, si seulement Malfoy et lui étaient des personnes différentes et que le monde soit différent lui aussi. Il faisait un froid de canard, mais plutôt que de resserrer sa cape contre lui et de se blottir contre les rochers, Harry s'obligea à arrêter de frissonner et essaya de contrôler la température de son corps pour qu'il ne ressente pas le froid. Les premiers flocons de neige de l'hiver tourbillonnèrent autour de sa tête et se mirent à tomber silencieusement sur le lac, chaque flocon atterrissant délicatement sur la surface de l'eau et ne formant plus qu'un sans effort avec ces séduisantes ténèbres. Le temps cessa d'avoir de l'importance. Il y avait simplement la neige, le froid, l'eau, et Malfoy.
"Bonjour Potter". La voix vint de derrière lui, ce qui ramena tout de suite l'esprit de Harry au moment présent. Et quand même, il lui fallut quelques instants pour situer d'où venait la voix.
"Bonjour Malfoy" dit Harry, sans se retourner. "Qu'est-ce que tu fais ici?". Harry remarqua que son cœur ne bondissait pas de joie, mais qu'il n'avait aucune montée de haine.
"J'étais juste allé faire un tour et je t'ai vu assis ici" dit Malfoy en guise de réponse. "Je peux m'asseoir?"
Harry se retourna et le regarda. Il était plus que beau, ses vêtements, son visage, ses dents, la neige posée sur ses cheveux parfaits. "Si tu veux" fit Harry. "Mais pourquoi tu veux t'asseoir?"
"Je sais pas trop, pour être franc" dit Draco en enlevant la neige d'un rocher à une faible distance de Harry. "Peut-être parce que je t'ai déjà vu assis là, et que ça à l'air d'être un bon coin"
Draco s'assit et le silence régna pendant un petit moment. Harry se sentait légèrement énervé. Qu'est-ce qu'il fait là, bon sang? Pourquoi est-il aimable? Essaie-t-il de me jouer un tour? Mais il ne peut pas, parce qu'il ne peut pas absolument pas savoir ce que je pense de lui...Oh mon dieu, pourquoi est-il ici, dans mon endroit, me ridiculisant dans ma tranquillité?
A quoi pense Harry? N'a-t-il vraiment aucune idée de ce que je pense de lui? Mais malgré cette légère anxiété, Draco se sentait mieux qu'il ne l'avait été depuis des semaines, étant aussi proche de Harry, même compte tenu de la température.
"T'en veux une?". La voix de Draco sembla plus forte que nécessaire, étant donné qu'elle venait de briser plusieurs minutes de silence. Harry le regarda; il tenait un paquet de cigarettes.
"Malfoy, pourquoi t'es sympa avec moi?"
"Tu préférerais que je sois grossier?"
"Au moins, je saurais où j'en suis"
"Hmmm, c'est difficile de pas savoir où on en est, hein?"
Harry ne savait vraiment pas quoi penser de ces quelques mots qu'ils venaient d'échanger et ne répondit pas, mais Draco tendait toujours le paquet de cigarettes. "Alors, t'en veux une ou pas?"
"Je sais pas. J'ai jamais fumé. On dit que ça tue"
"Ouais, je sais, j'aime assez ça chez les cigarettes"
"Ok". Harry en prit une. "Qu'est-ce que je fais?"
"Aspire légèrement pendant que j'allume le bout. Tu vas sûrement tousser au début, mais ça passera". Harry mit la cigarette à ses lèvres et Draco sortit, non pas sa baguette, mais un briquet en bronze qu'il ouvrit d'une pichenette adroite et il tourna la molette d'un coup sec pour faire apparaître une flamme claire et dansante qu'il approcha près du visage de Harry. Celui-ci mit le bout de sa cigarette dans le feu et comme prévu, il toussa un peu.
"Je crois pas que je m'y suis bien pris" dit Harry.
"Attends, elle n'est pas allumée correctement. Laisse-moi faire". Draco prit la cigarette à Harry et la porta à ses propres lèvres, l'alluma, puis la repassa à Harry. C'était un geste incroyablement intime, mais aucun des deux ne remarqua une quelconque gêne chez l'autre. Draco alluma la sienne, en regardant Harry. Harry se dit que la cigarette avait un goût fort et fumé, mais pas désagréable.
"Tu fumes souvent? Je croyais que c'était une habitude moldue" hasarda Harry après un autre court instant de silence.
"Oui, c'est surtout les moldus; enfin, du moins pour les cigarettes. Beaucoup de vieux sorciers ont des pipes. Et, non, je suis pas un fumeur endurci. J'en ai fumé..." - il regarda dans son paquet et compta les cigarettes qui restaient - "huit de toute ma vie. Non, juste sept; tu en as une bien sûr"
"Merde alors" fit Harry peu de temps après. "J'ai un peu la tête qui tourne"
"Ouais" dit Draco. "Sympa, hein? La nicotine est un décontractant ou un truc dans le genre. C'est bien pour déstresser un peu . Mais c'est pas facile de fumer dans le château. Il faut aller dehors. D'ailleurs, dehors c'est mieux, t'as tout ton temps, même sans cigarette. J'ai remarqué que t'étais souvent dans les jardins"
"J'aime bien y être. Il y a moins de monde. Des fois, je sors la nuit. En fait, la plupart des nuits. C'est beau ici au clair de lune"
"Hmmm, je sais"
Ce que Draco savait exactement, s'il savait que Harry sortait la nuit ou si Draco lui-même savait à quel point c'était beau ici la nuit, Harry ne posa pas la question. Il n'en ressentait pas le besoin. Il se sentait de plus en plus détendu au fil des minutes qui s'écoulaient, mais il ne savait pas si c'était dû à la cigarette ou à la présence de Draco. Il parcourut à nouveau le lac du regard, puis écrasa sa cigarette sur un rocher. Evitant toujours le regard de Draco, Harry reprit la parole. "Eh ben, c'est une première. Deux premières en fait: une cigarette et une conversation avec toi"
"Oui. Bizarre, hein?". Draco écrasa sa propre cigarette. "Et pas du tout désagréable. Ni la cigarette, ni la conversation". Il observa Harry qui regardait en direction du château. "Enfin. Ca caille. Je vais rentrer. Ne reste pas trop longtemps, tu vas geler". Draco se leva.
Harry se tourna pour lui faire face. "Ok. Merci Malfoy"
"Merci Potter". Draco fit tomber la neige de ses cheveux, resserra sa cape autour de lui et s'en alla.
Harry se remit à regarder au-delà du lac, et il observa Draco retourner au château. Il se sentait détendu et à l'aise, et il ne s'était pas senti comme ça depuis très longtemps.
J'espère que ça vous a plu. J'attends vos commentaires et je vous dis à bientôt pour la suite.
