~ Talantes, parc ~
Quatre regardait le jeune mercenaire près de lui. Celui-ci s'amusait à lancer des morceaux de pain aux différents oiseaux qui passaient sur le lac. Ses yeux brillaient d'amusement quand il voyait deux canards se disputer le même morceau. Un sourire étira ses lèvres fines quand Trowa se baissa et tendit la main vers un palmipède plus hardi que les autres. Il se rendit alors compte de la différence existante entre lui et le jeune. Jamais il ne lui serait venu à l'idée de s'amuser avec une bande de volatiles. Pourtant cela avait l'air amusant. Mais il n'osa pas franchir le pas, il resta derrière la barrière à admirer le profil du guerrier. Un léger vent faisait virevolter ses cheveux. Le tableau lui plaisait énormément. Le même désir que ce matin le traversa. Il avait beaucoup réfléchi durant la nuit, se demandant si c'était de l'attirance, un simple désir physique. Mais il s'était rendu compte qu'il voulait plus, qu'il voulait le connaître, son enfance, ses rêves : tout, il voulait tout savoir de lui. Le seul problème était ce tatouage présent sur son bras. Trowa n'était pas libre, il était lié. * Pourtant hier il m'a pris dans ses bras ! Non ! Je sais que c'était simplement pour me consoler. Je ne suis qu'un idiot ! Il faut que j'arrête de penser à lui. Il faut que je me maîtrise *. Il passa la main dans le sac que lui avait remis Rashid, et serra la petite boîte contenant l'oiseau de jade. Il savait pertinemment que Trowa l'avait désigné pour lui faire plaisir De par ses lectures, il avait appris que les mercenaires n'accordaient que peu d'intérêt aux bijoux encore une différence entre eux. Sa main frôla ensuite le coffret dans lequel se trouvaient les deux anneaux. Son mariage. Il n'arrivait pas à croire que demain il serait marié avec cette femme. * Mon dieu ! Que dois-je faire ? Je suis perdu. Si seulement j'avais le courage de lui dire non. Mais alors, tous ces gens seraient condamnés à cause de ma faiblesse *. Il soupira légèrement et releva la tête pour se trouver nez à nez avec un regard vert. Trowa le fixait, aucune expression ne montrait vers quoi se tourner ses pensées. Fermé, lointain, beau…
" Peut-être devrions-nous rentrer ? Tu dois être fatigué ".
" C'est à vous de décider Votre Altesse. Je me sens parfaitement bien ".
J
Tout à ses jeux avec les volatiles multicolores, Trowa pouvait sentir le regard du prince sur lui. Celui-ci ne lui avait pas encore remis son présent, et Trowa devait s'avouer assez inquiet quant à ce moment. Le fait surtout de s'attacher au blond lui faisait peur. * Ce pourrait-il qu'il soit mon Lié ? *. Il secoua la tête légèrement et sourit en regardant deux petits canetons tirer un morceau de pain comme si leur vie en dépendait. * Tout est tellement compliqué, je ne sais plus quoi penser, j'aimerais bien avoir une vie aussi simple que ces oiseaux *. Après quelques instants, il se leva puis marcha lentement vers la barrière où le prince se tenait. Celui-ci avait arrêté de le regarder et semblait perdu dans ses pensées. Ses courtes mèches blondes tombaient sur son visage. Trowa sentit son cœur se serrer quand le regard sérieux du prince rencontra le sien. Mais il ne laissa rien paraître de son émoi. * Il est vraiment beau, rayonnant comme le soleil… Mais qu'est-ce que je raconte, ce n'est pas mon genre de dire des trucs pareils…*.
" Peut-être devrions-nous rentrer ? Tu dois être fatigué ".
Trowa lui répondit. Il se sentait bien en sa présence, chose rare, surtout en si peu de temps. Il lui avait fallu presque deux ans pour se faire un seul ami à l'académie, et là, en l'espace de vingt quatre heures, il avait envie de partager un peu de lui avec ce parfait étranger. Il se rappela alors une question qu'il avait posée au devin peu après qu'il leur eût prédit leur destin.
~ + ~
" Tu as une question à me poser, mon petit ? ".
Le vieil homme fixait le petit brun face à lui. Il se souvenait parfaitement de sa séance de prédiction éprouvante avec cet enfant. Pour le moment, le jeune le regardait attentivement et semblait chercher ses mots.
" Quand…Quand on rencontre son Lié, comment on le sait ? ".
* Toujours les bonnes questions, comme me l'a fait remarquer son professeur… Comment pourrais-je lui répondre ?... *.
" Hé, bien, tu as envie de passer du temps avec lui, de tout savoir de lui. Quand tu le rencontreras, tu le sauras, cela se passe de la même façon pour chacun d'entre nous ".
" Oui, mais… ".
Trowa baissa la tête.
" Je suppose que tu penses à ta carte ? ".
Il acquiesça vivement.
" Hum…Il est vrai que cette carte… ".
" Heero a tiré la même ! Pourquoi ? Qu'est-ce que cela signifie ? ". Le coupa-t-il.
Le vieil homme haussa les sourcils, et Trowa sembla réaliser son idiotie. Normalement on ne parlait à personne de son tirage, sauf de ce que la vie réservait comme futur métier. Il baissa la tête et s'excusa vivement. * Hum…Je ne sais pas quoi lui dire…*.
" S'il vous plaît, maître, dites moi ce que vous pensez de tout cela, vraiment… ".
" Mon pauvre enfant, ce que je pense ? Hé, bien, je vais te dire la vérité, car tu as eu le courage de venir m'en parler. Je pense que Heero et toi serez liés mais que ce ne sera pas le Lien. Je crois que chacun d'entre vous rencontrera une autre personne qui vous sera plus chère. Oui ! Je sais cela te paraît impossible, mais c'est ce que je pense, dès que tu rencontreras cette personne, il n'y aura plus qu'elle… ".
" Mais…Et Heero ? ".
" Oh ! Tu ne l'oublieras pas, de même que lui, mais je pense que le même destin que toi l'attend, alors tu n'as pas à t'en faire de ce côté là, lui aussi trouvera le bonheur ! ".
" Alors quand je rencontrerai mon Lié, je le saurai immédiatement ? ".
" Oui, enfin, peut-être pas immédiatement, mais tu le devineras… ".
~ fin + ~
" … Que celle de Luce, mais correcte tout de même ".
Trowa sortit de ses pensées, et entendit la fin de la phrase, il bougea la tête faisant un signe qui ne voulait rien dire. En tous cas le prince parut ravi car il lui prit le bras et l'entraîna à sa suite. Trowa se sentit légèrement mal à l'aise sous le contact mais il le laissa faire, un léger sourire florissant sur ses lèvres.
J
~ salle d'arme ~
Duo regarda avec stupeur la petite femme brune qui venait de pénétrer bruyamment dans la pièce. * Mince, je crois que je n'arriverais même pas à faire autant de bruit en une seule fois ! *. Petite, vêtue d'une tenue traditionnelle de l'est, elle se tenait les mains sur les hanches et fixait avec colère le pauvre homme qui avait voulu sauvegarder la dignité bafouée de la princesse. Duo regarda alors vers les deux duellistes, et il se retint de ne pas éclater de rire. Les deux hommes avaient abaissé leurs armes, et regardaient avec surprise la femme qui les avait arrêtée . Ils ressemblaient à deux enfants pris en faute, la bouche légèrement ouverte en une protestation qui ne voulait pas sortir. La brune s'approcha avec fermeté des deux guerriers et se campa devant son * ami ? frère ? amant ? *, il ne pouvait le deviner, ils se ressemblaient beaucoup.
" Eh, bien ? Qu'as-tu à dire pour ta défense ? ".
" Mais Meiran, cet homme a bafoué la dignité de la princesse, je ne pouvais pas le laisser faire ! ". Meiran se tourna alors vers la blonde qui n'avait pas bougé depuis son entrée fracassante.
" Est-ce vrai ? Il ne se bat pas par plaisir ? Cela m'étonne qu'il ait une raison valable ".
Réléna resta sans voix et acquiesça doucement. * Hum, elle a l'air facilement impressionnable, cette princesse. Pauvre Quatre je le plains, si elle n'est même pas capable de s'exprimer *. La princesse se décida tout de même à parler et les deux jeunes femmes entamèrent un dialogue qu'il préféra ne pas écouter. Son attention revint vers les deux hommes, et à sa grande surprise, il eut le temps d'apercevoir deux sourires jumeaux vite réprimés. Il haussa les sourcils, sa curiosité avivée. * J'ai vraiment l'impression qu'ils se connaissent. D'ailleurs tout à l'heure ils donnaient plus l'air de se parler que de vraiment se battre, je ne reconnaissais même pas la façon de se battre d'Heero *. Il s'avança doucement vers les deux hommes.
" Hum…Je crois qu'elles vont parler un moment, non ? ".
L'étranger l'examina attentivement puis observa les femmes.
" Oui, je le pense aussi… ".
Ils se regardèrent tous les trois. Puis il sourit.
" Et bien, je pense que vous aimeriez panser vos blessures, vous lavez et changer de vêtements, non ? ".
" Ca c'est une excellente idée ! ".
Duo sourit face à l'empressement du jeune homme. Heero quant à lui acquiesça silencieusement. Ils se dirigèrent alors tous les trois vers la sortie.
" Oh ! Mais ne vous inquiétez pas, je suis certaine qu'ils auront reçu les bijoux que vous désirez ". * Ah ! Les femmes, quand je pense qu'il n'y a pas cinq minutes, elle était outragée, voilà maintenant qu'elle parle de ses bijoux *. Duo referma la porte derrière lui. Il s'approcha du brun aux cheveux attachés.
" Je m'appelle Duo, et je suis un ami de Heero ! J'espère que tu ne lui en veux plus ! ".
Heero haussa un sourcil mais ne le contredit pas. L'étranger regarda sa main tendue, puis leva doucement la sienne.
" Wu Fei Chang, et non je ne lui en veux plus, il fallait bien que je joue mon rôle de garde du corps ! Tu as tout de même exagéré, en tous cas tu sais te battre ".
* Hum…Se connaissent-ils ou pas ? Je n'arrive pas à le deviner *. Heero ne lui répondit pas. Se contentant d'un vague signe de tête, il se dirigea alors vers sa chambre.
" Eh ! Hee-chan, attends nous ! ".
J
/ Hum…Tu devrais faire encore plus de bruit /.
/ Ha,Ha ! Tu n'aimes pas mon entrée, mon amour ? /.
/ Peuf, tu aurais pu être un peu plus discrète ! /.
Wu Fei regarda sa femme s'approcher d'eux. Il prit la position qui seyait à ce genre de situation. Il joua le rôle d'un enfant pris en faute par sa mère. * Qu'est-ce qu'il faut pas faire ! *.
/ Toujours en train de rechigner ? /.
/ Hn…/.
Meiran se campa directement face à eux.
" Eh, bien ? Qu'as-tu à dire pour ta défense ? ".
Il se retint de ne pas éclater de rire devant l'air hyper sérieux de la jeune fille. Prenant une contenance de grand guerrier, il lui répondit.
/ Tu sais que je t'aime toi ? /.
Une lueur d'amusement et d'amour passa dans les yeux de la brune qui lui sourit légèrement. Elle lança un bref regard à Heero, puis se tourna vers la princesse.
* Bien, c'est parfait, elle va lui faire oublier l'outrage et tout va rentrer dans l'ordre. Heureusement que cette stupide femelle n'a aucune mémoire *.
/ Je t'ai entendu Wu Fei Chang ! /.
/ Oh ! Tu vas pas me dire le contraire quand même ! /.
Un éclat de rire lui répondit. Il sourit légèrement et regarda vers Heero. Celui-ci lui fit un signe et sourit très légèrement. Son attention se posa alors sur l'autre personne présente dans la pièce. Celui-ci se dirigeait vers eux.
" Hum…Je crois qu'elles vont parler un moment, non ? ".
Ses yeux se portèrent tout d'abord sur les longs cheveux attachés, ils devaient lui arriver au moins à la taille. Il voyait que l'homme en prenait soin. Son visage souriant n'était pas déplaisant, en tous cas il avait de magnifiques yeux violets, d'une teinte qu'il n'avait jamais vu auparavant. * Ce ferait une belle couleur pour un tatouage, hum…Il faudrait que j'essaie de la réaliser *. Se rendant compte de son inquisition, il lui répondit. Ensuite ils s'examinèrent tous les trois sans rien dire. Quand enfin le natté proposa qu'ils aillent se laver, il répondit avec ferveur, chose qu'il regretta mais il avait vraiment envie de se changer. Il n'appréciait absolument pas l'odeur du sang il n'était pas un guerrier après tout. Il sortit de la pièce. Le natté choisit cet instant pour se présenter, il lui répondit et ajouta même une légère excuse à l'attention de Heero, même si celui-ci n'en avait pas besoin. Il savait parfaitement que Heero prenait son rôle au sérieux, il avait toujours été ainsi, et si devoir s'abaisser devant lui était un moyen de réussir la mission, il l'aurait fait. Wu Fei avait parfois du mal à comprendre ses motivations. Pourquoi se battait-il ? Lui, il se battait pour Meiran, mais Heero ? Pour Trowa ? Il était capable de se défendre seul. Pour son peuple ? Wu Fei ne le croyait pas. Alors pour qui ?. Tout à coup une phrase retint son attention. * Hee-chan ? J'ai bien entendu ! *. Il regarda le châtain courir après Heero et se dit qu'après tout peut-être que Heero trouverait bientôt une raison de se battre…
J
Heero tentait désespérément de ne pas éclater de rire devant la mine sombre de Meiran. Ce qui d'ailleurs n'était absolument pas dans sa nature. Il avait toujours apprécié la spontanéité de la jeune fille, sa gentillesse. Il l'avait accepté près de lui au même titre que Trowa et Wu Fei. Mais là, elle jouait si bien la comédie qu'il aurait pu facilement être trompé. Il prit la tête de circonstance et joua les étonnés. Pendant l'échange des deux amants puis avec la princesse, il se surprit à observer Duo. Celui-ci avait l'air de se retenir de rire. Ses joues s'étaient légèrement colorées, lui donnant l'air d'un enfant. Le désir de passer ses doigts dans les longs cheveux le reprit. Pour lui, Duo était une énigme. Ses nombreuses cicatrices laissaient envisager qu'il avait été durement maltraité, mais pourtant il avait toujours le sourire, même s'il devinait ce tempérament factice. Il avait envie de le connaître d'avantage, de partager un peu de lui. * Mais comment je peux penser des choses pareilles ! Je ne le connais même pas ! Pourquoi suis-je si attiré ? Ce pourrait-il que…*. Il sentit tout à coup le regard de Wu Fei sur lui. Il lui fit un signe puis lui sourit rapidement, lui faisant comprendre que tout allait bien. Puis il vit Duo s'approcher d'eux du coin de l'œil. Il écouta distraitement les paroles qu'échangèrent ses deux vis à vis puis acquiesça sur le fait d'aller se changer. * Hum…Sûr, heureusement que Trowa n'est pas la, je crois que je me serais fait tuer sur place, avec tout ce sang et ses éraflures *. Le fait de penser à Trowa lui fit du bien, Trowa avait toujours eu l'effet de le calmer. Il était comme un baume sur ses blessures, Trowa était l'une de ses raisons de vivre. Et maintenant, il semblait y en avoir une autre…
" … je suis un ami de Heero !… ".
Il ne put s'empêcher de réagir à ces quelques mots, mais il ne répliqua rien. * Son ami ? Après tout pourquoi pas ? *. Il entendit ensuite les quelques mots de Wu Fei. * Mais pourquoi s'excuse-t-il ? Il n'a rien à se reprocher ! Il ne changera jamais ! *. Il lui fit un signe puis se décida à aller se changer. Il se raidit en entendant l'exclamation de Duo et continua plus rapidement sa marche. * Pourquoi ? Pourquoi j'aime qu'il m'appelle ainsi ? Cela me fait la même impression qu'avec Trowa. Suis-je… Non ! C'est impossible ! Pas en si peu de temps ! Heero reprends toi, tu es un guerrier, tu n'as rien à voir avec ces choses ! *. Il soupira doucement et se laissa rattraper par le papotage qui recommençait…
J
~ Talantes, salle du trône ~
" Vous voulez dire que vous n'avez pas avancé d'un pas ? ".
Le soldat tremblant s'inclina derechef, on voyait parfaitement qu'il aurait préféré être ailleurs que devant l'empereur fulminant. * Grr. Je n'aurais jamais dû envoyer cet imbécile de Howard ! Il est incapable de prendre des décisions *. Il décida de prendre un peu de repos. Il se leva puis congédia tous les hommes présents dans la pièce. * Hum…Je vais devoir m'occuper de ce problème moi même ! De toute façon, un petit voyage dans le nord me fera du bien *. Tout à ses pensées, il se dirigeait vers sa chambre quand il entendit des murmures venir d'un des salons sur sa droite. Curieux, il s'approcha sans bruit de la porte entrouverte et écouta la conversation.
" Comment peux-tu être sûr que nos armées vont venir vers Talantes ? ".
Il haussa les sourcils. Il avait reconnu la voix du mercenaire aux yeux verts.
" Hum…Cela me paraît évident. Ils ne vont pas rester les bras croisés alors que les gens près de la frontière se font exterminer par ces soldats ".
" Oui, tu as sans doute raison… ".
" De toutes façons, ça ne nous regarde plus, nous ne faisons plus parti de leur clan ".
" Heero ! Je… ".
L'empereur en avait assez entendu. Souriant, il se dirigea rapidement vers le bureau de son ministre de guerre. * Alors comme ça, ils croient pouvoir envahir Talantes ? Ha, Ha, ces idiots, je vais leur montrer de quoi je suis capable ! *. Il ouvrit brutalement la porte, faisant sursauter l'homme aux longs cheveux blonds déjà présent.
" Ministre Zechs ! Je veux que vous fassiez revenir une partie de l'armée à Talantes ! Je sais de source sûre, que les mercenaires vont attaquer la ville ". Son jeune ministre ouvrit des yeux surpris et se leva pour s'incliner.
" Votre Altesse ? Vous pensez qu'ils vont nous attaquer ? ".
" Hum…N'est-ce pas ce que je viens de dire ! Idiot ! ".
* Quel imbécile ! Il va falloir que je m'en débarrasse, il me tape sur les nerfs !*. Zechs recula et hocha vivement la tête.
" Bien je vais aussitôt envoyer un messager pour demander à notre armée de revenir ! ".
" Bien ! Fait vite ! ".
Il ressortit de la pièce très content de lui. * Ah ! Cela mérite une petite friandise ! Voyons voir ces nouveaux esclaves venus du sud *…
