Si je t'aime…
Chapitre II : Hé ! Jack !
Auteur : Lojie
Date : 22 Août 2003
Disclaimer : Characters of Alias belong to J.J. Abrams, Bad Robot and ABC.
Ship : S/Sa/I/Other
Rating : PG-13
Genre : Angst/Aventure/Drama
Spoilers : post-Telling
Note de l'auteur : Je publie ce second chapitre dès maintenant puisqu'il a été écrit durant le même après-midi que le premier. Je vous préviens, le brouillard autour du personnage de Sark ne devient pas plus clair dans ce chapitre, et Sydney enrage comme d'habitude lol
¤¤¤ ¤¤¤ ¤¤¤
Les portes automatiques de l'hôpital cédèrent le passage à une Sydney Bristow de mauvaise humeur. Une légère anxiété nouait son estomac. Elle s'était aperçue que la dernière fois qu'elle avait vu Sark, c'était à Stockholm. Il avait dû changer en deux ans. Elle avait souvent croisé Natti Hugues qui aimait plaisanter avec Weiss, mais jamais le jeune tueur. Il restait dans sa cellule quand il n'était pas en mission et Sydney n'avait jamais éprouvé l'envie ou le besoin de descendre lui rendre une petite visite.
Pour leurs retrouvailles, Sydney avait revêtu un pantalon noir fluide, une veste du même tissu et du même ton, une banale chemise beige et des lunettes de soleil opaques. Habillée ainsi, elle paraissait froide et distante, une dame de glace intouchable et insensible. Elle ne voulait aucune familiarité avec Sark. Elle le considérait en partie responsable de la mort de Francie. Aiguillée par un infirmier, elle trouva rapidement la chambre de Natti Hugues. Deux colosses gardaient la porte d'entrée. Ils la laissèrent passer après vérification de son badge. Sydney sourit intérieurement en pensant qu'elle aurait pu les mettre au sol en moins de trois secondes si elle l'avait voulu.
La scène qui se présenta sous ses yeux la surprit même si elle n'en laissa rien paraître. Elle reprenait ses bonnes vieilles habitudes d'espion. Natti pâle comme un linge, était étendue sur son lit. Sa poitrine se levait et s'abaissait avec difficulté alors qu'une armée de fils et de machines la maintenait en vie. Elle dormait. Assis sur une chaise, Sark était tout près d'elle. Il portait un vieux jean et une chemise défraîchie, ses cheveux n'étaient pas coiffés et il faisait dos à l'entrée. Sydney devina qu'il tenait l'une des mains de Natti entre les siennes.
" Bonjour mademoiselle Bristow, " déclara-t-il avec sarcasme sans se retourner. " Cela faisait longtemps que nos chemins ne s'étaient pas croisés… Deux ans je crois… "
Il l'avait entendu entrer. Peut-être n'avait-elle pas encore réacquis toutes ses aptitudes d'espion. Elle s'approcha calmement et se plaça de l'autre côté du lit, observant un instant les traits tirés et fragiles du visage de Natti.
" Nous allons devoir travailler ensemble, en attendant. " Déclara-t-elle du ton le plus neutre possible.
Sydney osa enfin regarder Sark de face. Ses yeux étaient toujours aussi bleus et froids. Le blond de ses cheveux s'était paré d'une teinte plus cendrée. Il avait forci de mâchoire et surtout de carrure. Elle le soupçonnait d'avoir gagné quelques derniers centimètres depuis Stockholm. Une moue arrogante se dessina sur ses minces lèvres : certaines choses dont elle se serait volontiers passée ne changeaient pas.
Immobile, il ne répondait pas. Gênée par le silence, même relatif à cause des machines qui entouraient Natti, Sydney reprit :
" J'ai vu la vidéo de votre dernière mission. Pas de chance. "
Toujours aucune réponse. Sark l'observait en détail, il la dévisageait comme s'il la voyait pour la première fois. Son manège agaçait Sydney qui se contrôlait tant bien que mal.
" Alors comme ça vous avez abattu votre tuteur quand vous aviez huit ans ? "
" Sept ans et demi, " rectifia-t-il amusé. " C'était mon premier meurtre. "
Il semblait tirer une certaine fierté de sa précocité avec le crime. Sydney ne put empêcher une moue dégoûtée de s'esquisser sur son visage :
" Et ce ne fut pas le dernier, " ajouta-t-elle, venimeuse.
Il haussa distraitement les épaules et réorienta son attention vers Natti. Elle crût capter un regard plus doux quand il observait sa partenaire. Ou peut-être était-ce simplement son imagination. Bon, se motiva-t-elle intérieurement, fini de plaisanter.
" Nous partons dans deux heures pour la France. Je vous conseille de vous préparer dès maintenant. Je vous brieferais en vol. "
Il acquiesça mais ne semblait pas avoir entendu. Il ne bougeait pas.
" Maintenant, " insista Sydney qui perdait patience.
Sark jeta un coup d'œil au poignet de l'agent : le bracelet. Ses mâchoires se crispèrent le temps d'une fraction de seconde. Sydney savait que ce n'était pas de la peur mais plutôt de la haine. Il se leva enfin, la tête légèrement inclinée vers le bas, le regard rivé sur Sydney. Cette posture rappela à la jeune femme qu'il n'était pas un homme avec qui l'on pouvait plaisanter. C'était un monstre coupable de crimes aussi horribles les uns que les autres.
Elle devait rester sur ses gardes.
¤¤¤
L'avion filait au-dessus de l'atlantique. Sydney avait depuis longtemps terminé le briefing. Sark et elle devaient s'introduire chez Stéphan Devot, apparenté à la mafia française, ancien lieutenant de Sloane. Il vivait pompeusement dans un petit manoir de Provence. En Europe de l'Ouest, le trafic de prostitués et d'armes à feu en provenance de l'Est était très lucratif depuis la chute du mur. Il s'était récemment mis à la drogue en rachetant de larges champs d'opium en Afghanistan qui malgré la récente guerre post-9/11, avait rapidement retrouvé ses anciennes habitudes.
Un agent infiltré par le Quai d'Orsay avait informé dans l'un de ses comptes-rendus un récent entretien entre Devot et un ancien contact : Sloane. Sydney savait qu'il était la clef de ce qui avait pu lui arriver durant ses deux ans d'absence. Ils auraient passé un accord et l'ancien agent de la CIA aurait transmis un CD à Devot. Elle et Sark devaient récupérer ce CD, placé à l'abri dans un coffre-fort du manoir. Aimant les festivités, le maître des lieux organisait une petite réception réunissant la crème de la mauvaise société. Sark s'y présenterait comme tout bon méchant qui se respecte et Sydney serait " sa copine du moment ".
Dans trois heures, ils y seraient. La jeune femme était répugnée à l'idée de se faire passer pour un objet sexuel, soumis à Sark de surcroît. Ce dernier n'avait manifesté aucune émotion, aucune réaction quand elle l'avait briefé sur la mission. Puis il s'était tourné vers le hublot et n'en avait pas décroché son regard. Sydney décida de tenter une approche. Elle n'avait beau ne pas l'aimer, quelque chose le fascinait chez lui. Peut-être le mystère qui l'entourait.
Elle s'assit sur le siège à côté de lui mais il ne bougea pas. Il n'était ni tendu, ni détendu. Il était juste là, le regard dans les nuages. Qu'est-ce qui pouvait bien se passer derrière ces pupilles glacées ?
" Je ne connais pas votre prénom, " déclara-t-elle, son ton sous-entendait une réponse.
Quelques secondes passèrent sans qu'il ne réagisse. Alors qu'elle allait se lever, marmonnant des grossièretés à voix basse, Sark se retourna vers elle :
" Sark, " articula-t-il lentement comme s'il savourait les syllabes.
" Ce n'est pas votre prénom. Je parle de celui que vous avez acquis à la naissance. "
Il l'observa quelques instants, un sourire malin se glissa sur ses lèvres et il se para de cet air supérieur que Sydney détestait tant. Il trouvait amusant que la courageuse et renommée Sydney Bristow s'intéresse à lui.
" Je l'ai oublié, " mentit-il sans chercher à le cacher.
Elle ne trouva pas ça drôle et lui jeta un regard désabusé. Malgré cela, sa curiosité était la plus forte. Elle voulait en savoir plus sur lui, surtout depuis que tout le monde semblait lui cacher quelque chose à propos de l'ancien homme de main de Sloane.
" Et pourquoi avez-vous tué votre tuteur ? "
Un vif éclat de haine rendit son regard tranchant durant une fraction de seconde. Puis ses pupilles bleues retrouvèrent aussitôt leur froideur habituelle. Il ne répondit pas et se tourna de nouveau vers le hublot. La discussion était terminée.
¤¤¤
Sydney et Sark se présentèrent dans une porche clinquante aux grilles de l'entrée du manoir. Ils furent admis sans problème par les gardiens. Stéphan Devot semblait connaître le jeune tueur. Celui-ci arrêta la voiture devant une volée de marches blanches qui conduisait à un lumineux hall d'entrée orné de miroirs et de lustres. Un groom partit garer la porche tandis que bras-dessus, bras-dessous, le couple monta les marches. Sydney portait une robe rouge et voyante, trop vulgaire à son goût, très courte avec un large décolleté. Ses lèvres étaient aussi rouges que sa robe et un maquillage charbonneux entourait ses yeux noisettes. Sark était comme à son habitude, vêtu d'un complet noir impeccable, rasé finement et ses mèches blondes légèrement relevées à l'aide de gel.
Ils se mêlèrent à la foule des lieux. Sydney nota que la plupart des femmes présentes étaient des prostituées de luxe. Génial… Aucun homme n'avait intérêt à oser poser ses mains sur elle. Mais heureusement, la présence de Sark à ses côtés était très dissuasive. Il avait acquis une certaine réputation dans le milieu. Depuis la disparition d'Irinia Derevko et la discrétion de Sloane, personne ne savait réellement pour qui il travaillait. Beaucoup prétendait qu'il était encore à la botte de The Man, ce qui n'était peut-être pas faux, d'autres clamaient qu'il travaillait à son compte. Une minorité un peu plus éclairée que la masse, le soupçonnait d'agir pour le compte de la CIA.
Un visage familier s'approcha brusquement du couple. Sydney reconnut aussitôt Stéphan Devot grâce aux photos du dossier qu'on lui avait transmis. Il ne ressemblait en rien au méchant proxénète de base. C'était un homme vêtu sobrement et avec goût, sa peau était hâlée par le soleil de la région, ses cheveux châtains avaient adopté quelques reflets blonds. Ses yeux en amandes étaient d'un brun profond et magnétique, son visage était ovale, ses lèvres épaisses sans être disproportionnées et son nez droit et fin. Il se présentait comme le stéréotype parfait du séducteur expérimenté qui vivait pleinement sa quarantaine.
Une femme asiatique aux traits délicats et à la tenue élégante, était pendue à son bras. Sydney eut soudainement très honte de sa robe rouge. Stéphan Devot était un homme distingué et elle remarqua qu'il ne lui jeta qu'un bref regard dédaigneux avant de se tourner vers Sark :
" Cela faisait longtemps, gamin, " dit-il en français.
" Sept ans, " répondit Sark dans la même langue, souriant modestement.
" J'ai un peu suivi ton parcours même si tu t'es fait discret ces derniers temps, " reprit Stéphan en acceptant un verre de champagne proposé par un serveur.
Sydney et Sark en prirent un eux aussi. La jeune asiatique refusa.
" Je le devais, " répondit le tueur avec calme. " Quand les gens commencent à trop parler sur vous, c'est mauvais. Il vaut mieux se faire oublier pour mieux revenir. "
" Il faut dire que travailler avec un homme aussi peu discret que Sloane, ce n'était pas la meilleure idée qui soit. "
" Pourtant d'après la rumeur, il paraît que vous vous êtes vus récemment, " rétorqua Sark sans se laisser impressionner par le ton hautain du Français.
Stéphan parut amusé et inquiet à la fois que l'homme face à lui ait eu vent de cet entretien. Sydney bouillonnait intérieurement. Elle aurait aimé agir mais elle était confinée à son rôle de cruche Américaine qui ne comprenait rien à la discussion.
" Tu es plutôt bien renseigné pour quelqu'un qui essaye de se faire oublier, " nota Stéphan avec cynisme.
" Comme vous le disiez il y a sept ans, j'ai toujours été votre meilleur disciple. "
Le Français sourit à cette allusion que Sydney ne comprenait pas. Sark ? Un disciple de Devot ? Le quadragénaire s'excusa pour aller à la rencontre d'autres personnes. Le couple en profita pour aller danser une valse, non pas par plaisir, mais pour pouvoir observer sans éveiller l'attention le système de sécurité autour d'eux. Le coffre fort se trouvait au premier étage. L'accès par les escaliers semblait improbable. Trop surveillé.
Ils jouèrent le couple amoureux et décidèrent de faire une promenade côté jardins où d'autres personnes marchaient au clair de lune. Sark assomma le premier garde qui était posté contre la façade, Sydney s'occupa du second. Ils les cachèrent ensuite derrière des rosiers. A l'aide de grappins, ils escaladèrent le mur jusqu'à un balcon au second étage, là où se trouvait le bureau et le coffre-fort de Devot. Grâce à l'obscurité, les rares promeneurs dans les jardins ne les remarquèrent pas.
Sydney jurait silencieusement contre sa robe trop étroite. Elle parvint à ne pas se faire distancer par Sark et ils arrivèrent sur le balcon. Il découpa la vitre pour pouvoir tourner la poignée et ouvrir la fenêtre. Avant d'entrer, elle souffla un peu de poussière à vingt centimètres du sol. Un trait rouge apparut brièvement. Ils l'enjambèrent puis s'approchèrent du meuble qui abritait le coffre-fort. Il ne semblait pas y avoir de caméra. Dans le cas contraire, ils ne tarderaient pas à le savoir. Sark posa un boîtier contre le coffre et ce dernier s'ouvrit après un clac sonore. Sydney fouilla aussitôt à l'intérieur et trouva parmi les liasses de billets une carte colorée. Curieuse, elle l'ouvrit et y lut un simple mot à voix haute :
" Perdu. "
Sark et Sydney sursautèrent quand la lumière s'alluma. Stéphan Devot et plusieurs de ses hommes se tenaient sur le pas de la porte, les braquant avec leurs armes. Les deux espions se relevèrent doucement, les mains en l'air. Apparemment, il y avait une caméra.
" Hé ! Jack ! " S'exclama Stéphan d'un ton dur qui tranchait avec celui mielleux qu'il avait employé tout à l'heure. " Je te croyais plus malin que ça ! "
Sydney se tourna surprise vers Sark. Il s'appelait Jack ? Il n'avait pas vraiment la tête à porter ce prénom.
" Je me doutais bien que je ne trouverais pas ce que je veux dans le coffre, " répondit le tueur avec ironie.
" Si c'est ça que tu cherches, " déclara Stéphan en brandissant un CD d'une poche intérieure de son veston. " Sache que je ne m'en sépare jamais. "
L'homme se tourna vers ces hommes et ordonna de mettre le couple aux fers.
¤¤¤
Fin du second chapitre
Petit Mot de la Fin : J'avoue que ce second chapitre ne vous a pas vraiment fait avancer à propos de toutes les questions présentées dans l'épisode précédent. Quoique maintenant, vous savez le prénom de Sark ;) Des révélations arrivent dans le troisième chapitre et vous allez savoir comment Sark a été un disciple de Stéphan Devot.
Prochain chapitre : " Sang-Froid. "
Chapitre II : Hé ! Jack !
Auteur : Lojie
Date : 22 Août 2003
Disclaimer : Characters of Alias belong to J.J. Abrams, Bad Robot and ABC.
Ship : S/Sa/I/Other
Rating : PG-13
Genre : Angst/Aventure/Drama
Spoilers : post-Telling
Note de l'auteur : Je publie ce second chapitre dès maintenant puisqu'il a été écrit durant le même après-midi que le premier. Je vous préviens, le brouillard autour du personnage de Sark ne devient pas plus clair dans ce chapitre, et Sydney enrage comme d'habitude lol
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Les portes automatiques de l'hôpital cédèrent le passage à une Sydney Bristow de mauvaise humeur. Une légère anxiété nouait son estomac. Elle s'était aperçue que la dernière fois qu'elle avait vu Sark, c'était à Stockholm. Il avait dû changer en deux ans. Elle avait souvent croisé Natti Hugues qui aimait plaisanter avec Weiss, mais jamais le jeune tueur. Il restait dans sa cellule quand il n'était pas en mission et Sydney n'avait jamais éprouvé l'envie ou le besoin de descendre lui rendre une petite visite.
Pour leurs retrouvailles, Sydney avait revêtu un pantalon noir fluide, une veste du même tissu et du même ton, une banale chemise beige et des lunettes de soleil opaques. Habillée ainsi, elle paraissait froide et distante, une dame de glace intouchable et insensible. Elle ne voulait aucune familiarité avec Sark. Elle le considérait en partie responsable de la mort de Francie. Aiguillée par un infirmier, elle trouva rapidement la chambre de Natti Hugues. Deux colosses gardaient la porte d'entrée. Ils la laissèrent passer après vérification de son badge. Sydney sourit intérieurement en pensant qu'elle aurait pu les mettre au sol en moins de trois secondes si elle l'avait voulu.
La scène qui se présenta sous ses yeux la surprit même si elle n'en laissa rien paraître. Elle reprenait ses bonnes vieilles habitudes d'espion. Natti pâle comme un linge, était étendue sur son lit. Sa poitrine se levait et s'abaissait avec difficulté alors qu'une armée de fils et de machines la maintenait en vie. Elle dormait. Assis sur une chaise, Sark était tout près d'elle. Il portait un vieux jean et une chemise défraîchie, ses cheveux n'étaient pas coiffés et il faisait dos à l'entrée. Sydney devina qu'il tenait l'une des mains de Natti entre les siennes.
" Bonjour mademoiselle Bristow, " déclara-t-il avec sarcasme sans se retourner. " Cela faisait longtemps que nos chemins ne s'étaient pas croisés… Deux ans je crois… "
Il l'avait entendu entrer. Peut-être n'avait-elle pas encore réacquis toutes ses aptitudes d'espion. Elle s'approcha calmement et se plaça de l'autre côté du lit, observant un instant les traits tirés et fragiles du visage de Natti.
" Nous allons devoir travailler ensemble, en attendant. " Déclara-t-elle du ton le plus neutre possible.
Sydney osa enfin regarder Sark de face. Ses yeux étaient toujours aussi bleus et froids. Le blond de ses cheveux s'était paré d'une teinte plus cendrée. Il avait forci de mâchoire et surtout de carrure. Elle le soupçonnait d'avoir gagné quelques derniers centimètres depuis Stockholm. Une moue arrogante se dessina sur ses minces lèvres : certaines choses dont elle se serait volontiers passée ne changeaient pas.
Immobile, il ne répondait pas. Gênée par le silence, même relatif à cause des machines qui entouraient Natti, Sydney reprit :
" J'ai vu la vidéo de votre dernière mission. Pas de chance. "
Toujours aucune réponse. Sark l'observait en détail, il la dévisageait comme s'il la voyait pour la première fois. Son manège agaçait Sydney qui se contrôlait tant bien que mal.
" Alors comme ça vous avez abattu votre tuteur quand vous aviez huit ans ? "
" Sept ans et demi, " rectifia-t-il amusé. " C'était mon premier meurtre. "
Il semblait tirer une certaine fierté de sa précocité avec le crime. Sydney ne put empêcher une moue dégoûtée de s'esquisser sur son visage :
" Et ce ne fut pas le dernier, " ajouta-t-elle, venimeuse.
Il haussa distraitement les épaules et réorienta son attention vers Natti. Elle crût capter un regard plus doux quand il observait sa partenaire. Ou peut-être était-ce simplement son imagination. Bon, se motiva-t-elle intérieurement, fini de plaisanter.
" Nous partons dans deux heures pour la France. Je vous conseille de vous préparer dès maintenant. Je vous brieferais en vol. "
Il acquiesça mais ne semblait pas avoir entendu. Il ne bougeait pas.
" Maintenant, " insista Sydney qui perdait patience.
Sark jeta un coup d'œil au poignet de l'agent : le bracelet. Ses mâchoires se crispèrent le temps d'une fraction de seconde. Sydney savait que ce n'était pas de la peur mais plutôt de la haine. Il se leva enfin, la tête légèrement inclinée vers le bas, le regard rivé sur Sydney. Cette posture rappela à la jeune femme qu'il n'était pas un homme avec qui l'on pouvait plaisanter. C'était un monstre coupable de crimes aussi horribles les uns que les autres.
Elle devait rester sur ses gardes.
¤¤¤
L'avion filait au-dessus de l'atlantique. Sydney avait depuis longtemps terminé le briefing. Sark et elle devaient s'introduire chez Stéphan Devot, apparenté à la mafia française, ancien lieutenant de Sloane. Il vivait pompeusement dans un petit manoir de Provence. En Europe de l'Ouest, le trafic de prostitués et d'armes à feu en provenance de l'Est était très lucratif depuis la chute du mur. Il s'était récemment mis à la drogue en rachetant de larges champs d'opium en Afghanistan qui malgré la récente guerre post-9/11, avait rapidement retrouvé ses anciennes habitudes.
Un agent infiltré par le Quai d'Orsay avait informé dans l'un de ses comptes-rendus un récent entretien entre Devot et un ancien contact : Sloane. Sydney savait qu'il était la clef de ce qui avait pu lui arriver durant ses deux ans d'absence. Ils auraient passé un accord et l'ancien agent de la CIA aurait transmis un CD à Devot. Elle et Sark devaient récupérer ce CD, placé à l'abri dans un coffre-fort du manoir. Aimant les festivités, le maître des lieux organisait une petite réception réunissant la crème de la mauvaise société. Sark s'y présenterait comme tout bon méchant qui se respecte et Sydney serait " sa copine du moment ".
Dans trois heures, ils y seraient. La jeune femme était répugnée à l'idée de se faire passer pour un objet sexuel, soumis à Sark de surcroît. Ce dernier n'avait manifesté aucune émotion, aucune réaction quand elle l'avait briefé sur la mission. Puis il s'était tourné vers le hublot et n'en avait pas décroché son regard. Sydney décida de tenter une approche. Elle n'avait beau ne pas l'aimer, quelque chose le fascinait chez lui. Peut-être le mystère qui l'entourait.
Elle s'assit sur le siège à côté de lui mais il ne bougea pas. Il n'était ni tendu, ni détendu. Il était juste là, le regard dans les nuages. Qu'est-ce qui pouvait bien se passer derrière ces pupilles glacées ?
" Je ne connais pas votre prénom, " déclara-t-elle, son ton sous-entendait une réponse.
Quelques secondes passèrent sans qu'il ne réagisse. Alors qu'elle allait se lever, marmonnant des grossièretés à voix basse, Sark se retourna vers elle :
" Sark, " articula-t-il lentement comme s'il savourait les syllabes.
" Ce n'est pas votre prénom. Je parle de celui que vous avez acquis à la naissance. "
Il l'observa quelques instants, un sourire malin se glissa sur ses lèvres et il se para de cet air supérieur que Sydney détestait tant. Il trouvait amusant que la courageuse et renommée Sydney Bristow s'intéresse à lui.
" Je l'ai oublié, " mentit-il sans chercher à le cacher.
Elle ne trouva pas ça drôle et lui jeta un regard désabusé. Malgré cela, sa curiosité était la plus forte. Elle voulait en savoir plus sur lui, surtout depuis que tout le monde semblait lui cacher quelque chose à propos de l'ancien homme de main de Sloane.
" Et pourquoi avez-vous tué votre tuteur ? "
Un vif éclat de haine rendit son regard tranchant durant une fraction de seconde. Puis ses pupilles bleues retrouvèrent aussitôt leur froideur habituelle. Il ne répondit pas et se tourna de nouveau vers le hublot. La discussion était terminée.
¤¤¤
Sydney et Sark se présentèrent dans une porche clinquante aux grilles de l'entrée du manoir. Ils furent admis sans problème par les gardiens. Stéphan Devot semblait connaître le jeune tueur. Celui-ci arrêta la voiture devant une volée de marches blanches qui conduisait à un lumineux hall d'entrée orné de miroirs et de lustres. Un groom partit garer la porche tandis que bras-dessus, bras-dessous, le couple monta les marches. Sydney portait une robe rouge et voyante, trop vulgaire à son goût, très courte avec un large décolleté. Ses lèvres étaient aussi rouges que sa robe et un maquillage charbonneux entourait ses yeux noisettes. Sark était comme à son habitude, vêtu d'un complet noir impeccable, rasé finement et ses mèches blondes légèrement relevées à l'aide de gel.
Ils se mêlèrent à la foule des lieux. Sydney nota que la plupart des femmes présentes étaient des prostituées de luxe. Génial… Aucun homme n'avait intérêt à oser poser ses mains sur elle. Mais heureusement, la présence de Sark à ses côtés était très dissuasive. Il avait acquis une certaine réputation dans le milieu. Depuis la disparition d'Irinia Derevko et la discrétion de Sloane, personne ne savait réellement pour qui il travaillait. Beaucoup prétendait qu'il était encore à la botte de The Man, ce qui n'était peut-être pas faux, d'autres clamaient qu'il travaillait à son compte. Une minorité un peu plus éclairée que la masse, le soupçonnait d'agir pour le compte de la CIA.
Un visage familier s'approcha brusquement du couple. Sydney reconnut aussitôt Stéphan Devot grâce aux photos du dossier qu'on lui avait transmis. Il ne ressemblait en rien au méchant proxénète de base. C'était un homme vêtu sobrement et avec goût, sa peau était hâlée par le soleil de la région, ses cheveux châtains avaient adopté quelques reflets blonds. Ses yeux en amandes étaient d'un brun profond et magnétique, son visage était ovale, ses lèvres épaisses sans être disproportionnées et son nez droit et fin. Il se présentait comme le stéréotype parfait du séducteur expérimenté qui vivait pleinement sa quarantaine.
Une femme asiatique aux traits délicats et à la tenue élégante, était pendue à son bras. Sydney eut soudainement très honte de sa robe rouge. Stéphan Devot était un homme distingué et elle remarqua qu'il ne lui jeta qu'un bref regard dédaigneux avant de se tourner vers Sark :
" Cela faisait longtemps, gamin, " dit-il en français.
" Sept ans, " répondit Sark dans la même langue, souriant modestement.
" J'ai un peu suivi ton parcours même si tu t'es fait discret ces derniers temps, " reprit Stéphan en acceptant un verre de champagne proposé par un serveur.
Sydney et Sark en prirent un eux aussi. La jeune asiatique refusa.
" Je le devais, " répondit le tueur avec calme. " Quand les gens commencent à trop parler sur vous, c'est mauvais. Il vaut mieux se faire oublier pour mieux revenir. "
" Il faut dire que travailler avec un homme aussi peu discret que Sloane, ce n'était pas la meilleure idée qui soit. "
" Pourtant d'après la rumeur, il paraît que vous vous êtes vus récemment, " rétorqua Sark sans se laisser impressionner par le ton hautain du Français.
Stéphan parut amusé et inquiet à la fois que l'homme face à lui ait eu vent de cet entretien. Sydney bouillonnait intérieurement. Elle aurait aimé agir mais elle était confinée à son rôle de cruche Américaine qui ne comprenait rien à la discussion.
" Tu es plutôt bien renseigné pour quelqu'un qui essaye de se faire oublier, " nota Stéphan avec cynisme.
" Comme vous le disiez il y a sept ans, j'ai toujours été votre meilleur disciple. "
Le Français sourit à cette allusion que Sydney ne comprenait pas. Sark ? Un disciple de Devot ? Le quadragénaire s'excusa pour aller à la rencontre d'autres personnes. Le couple en profita pour aller danser une valse, non pas par plaisir, mais pour pouvoir observer sans éveiller l'attention le système de sécurité autour d'eux. Le coffre fort se trouvait au premier étage. L'accès par les escaliers semblait improbable. Trop surveillé.
Ils jouèrent le couple amoureux et décidèrent de faire une promenade côté jardins où d'autres personnes marchaient au clair de lune. Sark assomma le premier garde qui était posté contre la façade, Sydney s'occupa du second. Ils les cachèrent ensuite derrière des rosiers. A l'aide de grappins, ils escaladèrent le mur jusqu'à un balcon au second étage, là où se trouvait le bureau et le coffre-fort de Devot. Grâce à l'obscurité, les rares promeneurs dans les jardins ne les remarquèrent pas.
Sydney jurait silencieusement contre sa robe trop étroite. Elle parvint à ne pas se faire distancer par Sark et ils arrivèrent sur le balcon. Il découpa la vitre pour pouvoir tourner la poignée et ouvrir la fenêtre. Avant d'entrer, elle souffla un peu de poussière à vingt centimètres du sol. Un trait rouge apparut brièvement. Ils l'enjambèrent puis s'approchèrent du meuble qui abritait le coffre-fort. Il ne semblait pas y avoir de caméra. Dans le cas contraire, ils ne tarderaient pas à le savoir. Sark posa un boîtier contre le coffre et ce dernier s'ouvrit après un clac sonore. Sydney fouilla aussitôt à l'intérieur et trouva parmi les liasses de billets une carte colorée. Curieuse, elle l'ouvrit et y lut un simple mot à voix haute :
" Perdu. "
Sark et Sydney sursautèrent quand la lumière s'alluma. Stéphan Devot et plusieurs de ses hommes se tenaient sur le pas de la porte, les braquant avec leurs armes. Les deux espions se relevèrent doucement, les mains en l'air. Apparemment, il y avait une caméra.
" Hé ! Jack ! " S'exclama Stéphan d'un ton dur qui tranchait avec celui mielleux qu'il avait employé tout à l'heure. " Je te croyais plus malin que ça ! "
Sydney se tourna surprise vers Sark. Il s'appelait Jack ? Il n'avait pas vraiment la tête à porter ce prénom.
" Je me doutais bien que je ne trouverais pas ce que je veux dans le coffre, " répondit le tueur avec ironie.
" Si c'est ça que tu cherches, " déclara Stéphan en brandissant un CD d'une poche intérieure de son veston. " Sache que je ne m'en sépare jamais. "
L'homme se tourna vers ces hommes et ordonna de mettre le couple aux fers.
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Fin du second chapitre
Petit Mot de la Fin : J'avoue que ce second chapitre ne vous a pas vraiment fait avancer à propos de toutes les questions présentées dans l'épisode précédent. Quoique maintenant, vous savez le prénom de Sark ;) Des révélations arrivent dans le troisième chapitre et vous allez savoir comment Sark a été un disciple de Stéphan Devot.
Prochain chapitre : " Sang-Froid. "
