CHAPITRE 4: Arrêté.

Le jour de la rentrée, Harry sortit du dortoir _ pour ensuite accéder aux cuisines _ avec un mélange d'excitation et d'inquiétude. Il avait dressé un bilan positif de ses deux mois passés à Poudlard et connaissait à présent de nombreux sortilèges utiles en cas de duels. Il avait travaillé ses patronus et s'était fait quelques amis parmi les créatures du lac et de la forêt. Hier encore, il s'était rendu en compagnie d'Hagrid au coeur des bois à la rencontre d'Aragog. Malgré leur "discussion", le jeune homme ne semblait pas prêt à venir la voir seul, d'autant plus la certaine «distance» qu'elle avait gardé dans ses propos envers lui. Quant à sa carte, elle n'avait jamais été aussi complète. Deux jours auparavant, il avait encore découvert une magnifique salle _ bien que petite_ exposant de nombreuses potions embaumant l'air et envoûtant quelque peu Harry. Parmi elles, il avait repéré la célèbre abstrab, nécessaire à la préparation d'une mixture qui permettait d'absorber des idées ou qualités abstraites (on l'utilisait pour la conception des pensines). Il avait passé ainsi toute la journée à fouiller et découvrir divers mélanges _certains dangereux et d'autres éblouissant de magie_ qui intéresseraient même l'élève le plus révulsé à cette matière _en locurence, lui_. Le jeune sorcier avait une fois de plus mis de côté le fait que la salle puisse être ensorcelée tout comme la bibliothèque, trop hypnotisé pour réfléchir aux risques encourus...

Harry prit son balai, l'enfourcha et piqua droit vers le rez-de-chaussée en évitant les escaliers mobiles. Il se redressa à ras du sol, accéléra un maximum vers les deux grandes portes, sortit sa baguette, fit un geste, les portes s'ouvrirent, il fonça de plus belle et... freina en catastrophe devant des professeurs abasourdis.

_ Mr POTTER!, hurla Rogue qui avait cru sa dernière seconde arriver. COMMENT...

_ Désolé! Je suis désolé!, dit précipitamment Harry en descendant rapidement de son balai.

Les professeurs Rogue, Flitwick, Mac Gonagall, Chourave et Dumbledore se tenaient en réunion, tous blancs comme des linges devant la soudaine apparition, excepté Dumbledore, calme comme à l'accoutumée. Seuls les professeurs Vector, Sinistra, Bibine, Hagrid, Gobe-Planche, Binns et Trelawney étaient absents.

_ VOLER DANS LE CHÂTEAU EST STRICTEMENT INTERDIT!

Rogue bouillait de rage. Il ne lui fallait jamais extrêmement longtemps pour exploser contre Harry.

_ Calmez-vous professeur Rogue, dit doucement Mac Gonagall qui tentait de reprendre une respiration normale, la main sur le coeur.

_ CECI VOUS VAUDRA UNE RETENUE, POTTER! ET CINQ POINTS...

_ Pardon!, le coupa durement le professeur de métamorphose.

La menace du professeur de Potions l'avait brusquement sorti de sa récente peur.

_ Il me semble que le décompte des points ne commence que ce soir!, s'exclama-t-elle, le teint tournant du blanc au rouge.

_ Mais...

_ Severus, Minerva, calmez-vous. Aucun point ne sera enlevé à Gryffondor, expliqua posément Dumbledore.

Harry avait à son tour pâli en voyant la tournure que prenait la dispute entre Mac Gonagall et Rogue. Alors que ce dernier allait répondre, le Directeur leva la main pour le faire taire.

_ Cependant...

Et il se tourna vers Harry.

_ Tu te devais de respecter les règles Harry. Tu auras donc une retenue.

Harry baissa les yeux. La rentrée n'allait pas être des plus joyeuses. Si seulement il s'était douté de leurs venues matinales... Le professeur Rogue esquissa un petit sourire victorieux. Dumbledore reprit:

_ Bien. Maintenant que le problème est clos, que diriez-vous d'un bon petit déjeuner! Les émotions creusent!, dit-il sur une pointe de malice. Harry, tu te joins à nous?

Harry ne ressentait pas l'envie de partager son repas avec Rogue mais sentit que son refus ne serait pas très bien perçu par le corps professoral. Il acquiesça donc silencieusement. Il les suivit alors qu'ils s'installaient autour de la table des Serdaigle, profitant de l'absence des élèves pour modifier légèrement leurs habitudes, et le Directeur lui fit signe de prendre place à sa gauche. Harry s'assit. Malgré son malaise à manger avec ses professeurs, le jeune sorcier ouvrit de grands yeux devant la salle. Elle était immense. Quatre tables avaient été rajoutées, et une complétait celle des professeurs. Pourtant habitué à sa splendeur, la pièce l'époustouflait une fois de plus. Les sorts d'agrandissement qui avaient été jetés devaient être d'une puissance phénoménale pour ne pas donner lieu à de terribles conséquences sur la solidité de la structure de Poudlard. Dumbledore en était certainement l'auteur... Les Première année n'avaient qu'à bien se tenir. Ils allaient être plus que surpris... Les nouveaux aussi, d'ailleurs... Et les Anciens, finalement...

Le repas apparut. Harry se fit le plus discret possible. Il était embarrassé d'être au milieu d'un groupe auquel il n'appartenait pas, surtout après avoir écopé d'une retenue. En face de lui, le professeur Flitwick semblait affamé alors qu'il tartinait quelques biscottes. Mac Gonagall était en face de Dumbledore, le dos droit: elle remuait lentement son thé. Harry jeta un coup d'oeil aux mets exposés (des plats français) et se versa du chocolat chaud dans son bol. Il aperçut avec surprise que son mentor prenait la même boisson. Rogue avait décidé d'être le plus loin possible du jeune sorcier _ce qui n'était pas pour lui déplaire_ et était à la gauche de Mac Gonagall. Il buvait un café noir brûlant. Enfin Mme Chourave était à la droite de Dumbledore et semblait être animée du même appétit que Flitwick. Ils discutaient calmement de certaines personnes que Harry ignorait. Celui-ci écoutait à peine. La retenue de Rogue le hantait et lui interdisait de se focaliser sur la conversation. Mais une question de Mac Gonagall le sortit de son retrait.

_ Vous vous êtes donc assuré de ses compétences en Défense contre les Forces du Mal ?

_ Sans aucun doute Minerva. Je pense qu'elle sera excellente à ce poste. Merlin sait que nous avons besoin que les élèves aient un bon niveau en ce domaine...

_ Vous avez raison Dumbledore, couina Flitwick. Je ne pense pas que cet homme aurait été à la hauteur de ce travail bien qu'il soit doué dans d'autres... matières, finit-il sombrement.

_ Il vient tout de même ici, par le train avec les autres professeurs. Je pense qu'il ne peut assurer sa sécurité autre part. Voldemort est à sa recherche.

Seuls Harry et Dumbledore ne tressaillirent pas.

_ Vous êtes bien généreux de lui offrir votre aide, déclara Mme Chourave. Si cela ne tenait qu'à moi...

_ Il peut nous être utile, je pense, coupa doucement Mac Gonagall. Les infirmières ne viennent pas ?

_ Elles ont déjà déjeuné. Elles ont encore beaucoup de travail à vrai dire, renseigna Flitwick.

_ Vous pensez pouvoir lui faire confiance ?, questionna Rogue en s'adressant à Dumbledore, passant ainsi sous silence l'intervention au sujet de Mesdames Pomfresh et Vivebien.

_ Je ne pense pas qu'il nous trahira. Voldemort le tuerait même s'il lui apportait tout ce qu'il souhaitait.

Mac Gonagall regarda rapidement vers Harry, celui-ci le nez dans son bol, après avoir légèrement tremblé.

_ Il en a conscience, continua Dumbledore.

_ Quelles que soient ses motivations, je ne relâcherai pas mes gardes. Je reste méfiante, dit Mac Gonagall. Après tout, il s'agit d'un ancien mangemort qui ne revient plus dans les rangs de Vous-Savez-Qui parce qu'il s'est fait prendre et que sa lâcheté l'a poussé à la trahison. J'aurai donc toujours un oeil sur ce Karkaroff.

Harry manqua de s'étrangler en avalant de travers. Du chocolat chaud se renversa et il posa son bol en essuyant rapidement la table avec une serviette, rouge de confusion. Sentant les regards gênés des professeurs sur lui, il balbutia un rapide "pardon, désolé". Mac Gonagall ouvrit des yeux ronds et se tourna vers Dumbledore.

_ Je croyais qu'il était au courant pour Karkaroff et son statut...

Mais Dumbledore ne l'écoutait pas. Il fixait Harry qui tentait de remettre un peu d'ordre sur la table. Celui-ci le savait. Pourtant, il gardait les yeux rivés sur son bol. Les professeurs demeuraient silencieux. Ils ne connaissaient que trop bien cette attitude que le Directeur adoptait quand il était prêt de découvrir quelque chose. Harry sut qu'il lui devait une explication: le professeur savait lire en lui.

_ J'ai fait un rêve, murmura-t-il, peu de temps avant de vous voir, Professeur.

Mac Gonagall arrêta de tourner sa cuillère. A présent, tous étaient attentifs aux propos du garçon. Dumbledore devait les avoir renseignés sur ses "visions". Harry, hésitant, reprit:

_ En fait, c'était euh... le matin même.

Le jeune sorcier se reprocha de ne pas lui en avoir parlé lors de leur conversation. Dumbledore sembla comprendre pourquoi. Harry, toujours gêné d'être le centre de l'attention générale, poursuivit :

_ Et j'ai la certitude que Karkaroff a été dévo... euh, tué par un loup-garou.

Flitwick lâcha sa biscotte. Mac Gonagall se laissa enfoncer dans sa chaise.

_ Veux-tu nous raconter Harry ?

La voix du professeur Dumbledore était douce. Ce qui procurait une sensation étrange à Harry était que son professeur de Potions l'écoutait attentivement.

_ Je sais seulement qu'il essayait de s'enfuir dans sa grotte et que Voldemort _ tressaillements de Flitwick, Chourave, Mac Gonagall et Rogue_, pardon, a ordonné à un loup-garou de le tuer. Il a dit ensuite que l'Angleterre l'attendait.

Harry fit la grimace en finissant sa phrase. L'Angleterre m'attend. Non, ce n'était définitivement pas bon signe... Le silence régnait dans la grande salle à présent. Sans doute, fallait-il un moment pour digérer la nouvelle, pensait-il. Il était dur de se réhabituer aux temps difficiles... Dumbledore reprit la parole en s'adressant aux professeurs.

_ Bien, je pense que nous allons accueillir notre... invité comme il se doit. Je crois qu'une partie des plans de Voldemort vient d'échouer Harry, lui dit-il enfin en lui souriant.

Harry esquissa un bref sourire en retour et finit son bol rapidement. Il s'éloigna, le balai en mains. Il ne voulait pas subir les regards désolés des professeurs quant à ses cauchemars devenus une partie de son quotidien.

A l'heure du déjeuner, Harry omit délibérément de rejoindre le corps professoral pour le repas. La soirée approchait et le jeune sorcier sentait une boule de nervosité creuser son estomac. Les quelques sortilèges qu'il avait révisé s'étaient révélés inefficaces quant à effacer son appréhension croissante. Les multiples moyens dont Voldemort pourrait se servir à chaque instant défilaient en lui. Il imaginait une entrée en force de son armée dotée d'horribles créatures avides de sang, une destruction des barrières protectrices du château suivie d'une tentative de massacre au milieu d'une cohue d'élèves hystériques. Il voyait un portoloin sous forme de lettre lui tomber droit dans les mains et l'entraînant dans le cimetière des Jedusor. Il pensait à un Fudge soumis à l'Imperium qui dirigerait ses ennemis vers lui, inconscient de ses actes. Il supposait un Voldemort réussissant à contrer suffisamment les charmes de Sirius pour laisser passer un rat du nom de Queudver qui viendrait lui livrer le dernier des Potter. Harry tentait de garder la tête froide et de ne pas plier devant la phobie des portoloins et du Polynectar. Il était possible que les nouveaux élèves arrivant à Poudlard ne soient qu'une troupe de mangemorts "déguisés". Le faux Karkaroff n'en était qu'un parmi tant d'autres... Ou alors, l'attaque prendrait naissance dans le lac, des créatures tels que les Loupios, capables de vivre aussi bien dans l'eau que sur terre, pénétreraient dans l'enceinte de l'école par le tunnel dont les sirènes lui avaient parlé. Peut-être même que la bataille avait déjà commencé. Et elle se passait dans le train, avec ses amis, en ce moment... Harry se secoua mentalement. Il se maudit d'avoir de telles pensées. Ses amis ne risquaient rien, Dumbledore avait renforcé les protections. Et pourtant... Le doute s'installait. Harry pria pour que les calèches se montrent rapidement avant qu'il ne cède à la peur. Ses mises en scène tragiques le mettaient à torture. Il implora le ciel que Voldemort ne s'en prenne qu'à lui. Il lui était déjà difficile de supporter le poids de culpabilité sur la mort de Cédric, il ne s'en remettrait pas d'être la cause de souffrances chez ses camarades. Les élèves étaient en danger ce soir. Et il en était l'unique responsable. Neville, Seamus, Parvati, Lee, Justin, Colin, Susan... Tous étaient insouciants du risque qu'ils encouraient en le fréquentant. Et tous ces nouveaux... Ils pensaient qu'en étant à Poudlard, leur sécurité était garantie. N'avaient-ils pas compris ? Jamais ils ne seraient en sûreté en se scolarisant dans le même établissement que le "Survivant". Harry aurait aimé pouvoir les avertir, leur hurler dessus, leur crier de ne pas venir, de rester chez eux, tant qu'il en était encore temps. Mais il restait ici, dans le dortoir, tournant comme un lion en cage. Sentant qu'il allait de pire en pire, il vérifia l'état de son uniforme qu'il venait de vêtir et descendit au rez-de-chaussée.

Déambulant dans les couloirs du château, Harry fut témoin d'un étrange spectacle. Des dizaines d'elfes, habitués à la présence du jeune sorcier, s'employaient aux dernières tâches de rénovation des salles de classe. Avec une efficacité incomparable, ils astiquaient les armures, faisaient léviter tables, bureaux, chaises et armoires, organisaient leurs placements, modifiaient l'emplacement des cadres, réparaient les carreaux des fenêtres... Le silence dans lequel le travail s'effectuait rendait la scène on ne peut plus surnaturelle. Un elfe, restaurant la solidité des murs en bouchant des petites fissures, agita des signes frénétiques de la main en apercevant le jeune sorcier.

_ Harry Potter!, s'exclama-t-il, enthousiaste.

_ Bonjour Dobby.

_ Harry Potter vient rendre visite à Dobby ?, demanda la petite créature, les yeux globuleux scintillant.

_ Je passais juste par là, à vrai dire, avoua le jeune homme. Comment vas-tu ?

_ Dobby est en pleine forme, monsieur! Et...

Il se mit à chercher quelque chose du regard. Son visage s'éclaira. Il tira par la manche un Harry aux yeux ronds vers l'entrée d'une autre salle, le lâcha et lui montra du doigt un elfe de dos en train de soulever plusieurs chaises.

_... Winky aussi monsieur!

L'interpelée se retourna à l'entente de son nom et, avec un grand sourire, vint à leur rencontre.

_ Bonjour Winky, dit gentiment Harry.

Le jeune sorcier ignorait comment s'y prendre avec elle, leur avant-dernière rencontre avait fini sur un "Vous êtes un fouineur!". Depuis, l'approcher était devenue difficile...

_ Comment te sens-tu ?

_ Winky va très bien monsieur! Winky s'est remise des révélations de son ancien maître, et elle aime beaucoup son nouveau maître, dit-elle fièrement.

Dobby, à côté, semblait très content du comportement de Winky qu'il ne lâchait pas des yeux. Celle-ci poursuivit:

_ Winky voudrait s'excuser auprès de vous, Harry Potter, et de son attitude... aux cuisines..., dit-elle en baissant la tête, comme si elle s'apprêtait à recevoir un châtiment.

_ Ce n'est pas grave, Winky, tu ne pouvais pas savoir... Barty Croupton nous a tous trompés, je n'ai rien vu non plus, la rassura Harry.

Celle-ci redressa vivement la tête, étonnée de ne pas être réprimandée et par la sincérité du jeune homme.

_ Dobby a raison monsieur! Vous êtes un grand sorcier!

Harry rougit. Non, vraiment, il ne savait pas comment réagir face à l'admiration que lui portaient ces elfes.

_ Qui est ton nouveau maître, Winky ?, demanda Harry en changeant de sujet. Si je peux le savoir, bien sûr, s'empressa-t-il d'ajouter par peur d'être à nouveau insulter de fouineur.

_ Ooh..., fit-elle mystérieusement, Harry Potter le connaît... Il le connaît sous le nom de Sniffle, répondit l'elfe en lui adressant un clin d'oeil.

Dobby, qui restait silencieux devant l'échange, clignait des paupières. Il ne comprenait à l'évidence rien des propos entretenues par Winky et le jeune sorcier. Harry, quant à lui, ouvrit des yeux ronds.

_ Sniffle ?! Mais alors... Sniffle est là!, s'exclama Harry, au plus grand étonnement de Dobby.

_ Oui, mon maître et moi sommes arrivés au château il y a moins d'une heure. Monsieur Rémus Lupin et lui discutent à l'extérieur avec monsieur Dumbledore. Mon maître voulait être là aujourd'hui malgré son travail. Mon maître m'a dit que je pouvais tout vous dire...

L'elfe semblait fière d'avoir un maître dont elle gardait de grands secrets. Dumbledore avait du penser que la confier à Sirius lui serait un excellent antidote aux événements qu'elle avait mal vécu en Juin dernier. Elle aimait prouver qu'elle était digne de confiance et avait ressenti une grande peine lors de son renvoi. Elle avait une seconde chance de montrer ses qualités à garder des confidences et n'était pas prête de la gâcher.

_ Je vais le voir!, dit précipitamment Harry. Merci Winky! Merci Dobby! Prenez soin de vous!, leur cria-t-il en s'éloignant rapidement en marche arrière.

Le jeune sorcier attendit juste des échos de leurs au revoir avant de disparaître de leurs champs de vision. Il courut vers la sortie et regarda impatiemment dans les environs du parc. Il perçut deux silhouettes au loin sur sa droite qui semblaient se rapprocher. Harry marcha vite et manqua de trébucher sur sa robe dans sa hâte. Son visage rayonna en distinguant nettement les traits de son parrain et de son ancien professeur de Défense contre les Forces du Mal. Ils parlaient calmement quand Harry se joint enfin à eux.

_ Harry!, s'exclama Sirius à la vue de son filleul.

_ Bonjour Sirius!, dit Harry, un sourire aux lèvres.

Sirius s'approcha et l'étreignit. Son geste ne gêna pas Harry, bien que ce fut la première fois qu'il le faisait. Il lui tapa amicalement le dos en retour avant de se desserrer de lui. Son parrain avait l'air en forme. Les cheveux coupés et le teint coloré, il ressemblait davantage au jeune homme au physique avantageux de la photo de mariage de ses parents. Harry se tourna vers Lupin et, toujours avec un grand sourire, le salua.

_ Bonjour Professeur.

_ Bonjour Harry. Appelle-moi Rémus...

_ Ou Lunard, coupa Sirius, les yeux brillants de malice.

_ ... Je ne suis plus ton professeur, dit-il simplement.

Harry acquiesça. Il se remit face à son parrain et fronça les sourcils. Avant qu'il ne puisse dire un mot, Sirius énuméra sur ses doigts:

_ Hagrid est dans la forêt, les professeurs sont dans la grande salle pour préparer l'arrestation de l'imposteur, Mme Pince, Rusard et les infirmières sont dans leurs locaux respectifs, les fantômes restent à l'intér...

_ D'accord, d'accord! J'ai compris!, intervint Harry en obligeant Sirius de baisser sa main.

_ Nous venons juste de nous entretenir avec Dumbledore, informa Rémus. Tes révélations sont... troublantes.

L'ancien professeur semblait être à peine au courant que le jeune sorcier était sujet à des visions nocturnes.

_ Oui... Ca en fera toujours un de moins, dit Harry en haussant les épaules.

Il pensait toujours à la possibilité que les nouveaux élèves soient des mangemorts "déguisés"...

_ C'est pourquoi, pour plus de sécurité, je vais devenir ton garde du corps, déclara fièrement Sirius, en bombant le torse.

Harry ouvrit les yeux de surprise. Sirius allait rester ici! Mais comment allait-il...

_ Ou plutôt ton chien de garde, finit dans un murmure son parrain, se dégonflant.

Lupin et Harry partirent d'un petit rire devant la mine déconfite de Sirius.

_ Tu vas me surveiller en te postant aux portes de l'école?, demanda le jeune sorcier en pouffant à l'idée de voir son parrain se transformer en chien de pierre, comme l'une des statues du château, les yeux rivés sur son filleul.

_ Bien sûr que non. Je serai ton chien.

Harry arrêta brusquement de rire. Son parrain était sérieux: il le protégerait véritablement.

_ Les chiens sont interdits, fit-il remarquer.

_ Ta lettre de Poudlard n'a pas été lue avec beaucoup d'attention, je vois, observa tranquillement Rémus.

Harry rougit légèrement. Lupin avait toujours des airs de professeur pour lui.

_ Elle est identique tous les ans, à quelques lignes près, se défendit-il.

_ Les chiens sont permis cette année, comme d'autres animaux d'ailleurs. Sirius sera avec toi... Je te plains, soupira faussement Rémus.

Sirius lui lança un regard féroce exagéré. Harry se dit que l'année serait loin d'être triste avec Sirius comme compagnon.

_ Et vous... euh, toi, tu feras quoi ? Tu vas rester ici, n'est-ce pas ?

Le jeune sorcier priait pour que ce soit le cas.

_ Non, je dois diriger Alkilan. Je repars demain, répondit Rémus.

Il y avait un mélange d'émotions dans sa voix. Sans doute était-il triste de se séparer d'un ami qu'il n'avait pas revu depuis des années mais Harry devinait qu'il était enfin heureux de se rendre utile à la société. Et puis, en étant sous les ordres de Dumbledore, il espérait sûrement regagner la confiance du directeur qu'il avait perdu en lui cachant que les trois autres maraudeurs étaient devenus des animagi non-officiels pour lui.

_ Qu'est-ce que c'est, Alkilan?

_ La nouvelle prison pour sorciers, expliqua Sirius. Il en faut bien une... Lunard n'est pas en travail officiel, le ministère ignore l'existence d'Alkilan. On a fait en sorte pour qu'il n'y ait pas de fuites... C'était plutôt laborieux mais je pense qu'on y est arrivés, dit-il en regardant Rémus en quête d'approbation.

Ce dernier hocha la tête en signe affirmatif. Il y eut un silence pesant. Les deux maraudeurs tentaient de se convaincre eux-mêmes de la réussite de leur entreprise sans y croire vraiment. Après tout, avec Voldemort, on peut jamais être sûr... Sirius se secoua vivement la tête, comme pour chasser ses mauvaises pensées.

_ Harry, dit-il en prenant un air grave, Lunard et moi avons quelque chose à t'annoncer.

Le jeune sorcier sentit venir le pire. Il n'aimait pas du tout le ton de son parrain. Rémus gardait le regard bas et Harry ne put déchiffrer les émotions qui se lisaient dans ses yeux. Sirius avait un comportement identique. On n'aurait pu croire qu'ils étaient plongés dans une grande concentration pour ne laisser échapper aucun indice dans leur attitude qui aurait pu aider Harry à deviner ce qui se préparait à venir. Les secondes passèrent, interminables. Harry était sous la torture. Alors qu'il allait dire "Quoi?!", Sirius prit son inspiration, jeta un coup d'oeil à Rémus et...

_ Bon anniversaire!, dirent-ils d'une même voix.

Harry fut stupéfait. Il ne pouvait plus dire qu'il s'était préparé à tout, car, de toute évidence, il ne s'était pas attendu... à ça. Les deux amis de son père lui avaient joué un tour et ils prenaient maintenant un air presque... enfantin.

_ Me...Merci, bredouilla-t-il, encore dans l'incompréhension.

Sirius et Rémus partirent à rire devant la mine incrédule du jeune homme.

_ Vous êtes de sacrés bons acteurs, souffla le jeune sorcier, qui se remettait de ses émotions.

Les trois se sourirent. L'ancien professeur sortit sa baguette, chuchota un sort d'apparition, et trois objets apparurent: une chemise scolaire et... deux oreilles de chauve-souris.

_ Sous ma forme de chien, on n'a pu aller faire les boutiques, Lunard et moi. Et même si on a un mois de retard, on voulait te les offrir, expliqua son parrain.

Harry regardait les présents, ne sachant pas quoi dire.

_ C'est...

Il chercha le mot: magnifique, gentil, beau,... Mais il s'entendit dire "C'est... C'est quoi ?".

_Ce sont des yltrauscults, répondit fièrement Sirius, en montrant les oreilles de chauve-souris.

_ Des quoi ?, répéta Harry, pas sur d'avoir bien entendu.

_ Des yltrauscults.

Son parrain prit son inspiration et épela le mot. Il brillait dans ses yeux une joie infantile.

_ Il s'adaptent à tes oreilles, se fondent en elle, si tu préfères. Tu peux capter la RITM ou écouter la chanson de ton choix, qu'elle soit moldue ou de notre monde. Tu peux également retrouver des chansons que tu as déjà entendu dans ta vie mais dont tu ne te souviens pas. Pour les enlever, tu dois tirer sur tes lobes.

Harry ouvrait de grands yeux devant sa contemplation.

_ Il y a plusieurs options comme casque anti-bruit, volume de fond... Tu peux y accéder en écoutant la voix de la notice. Il suffit juste d'y penser et elle te renseignera.

Le jeune sorcier sembla un instant hypnotisé par les présents.

_ C'est magique..., souffla Harry, le regard ne quittant pas les cadeaux.

Son parrain n'aurait pu paraître plus ravi.

_ Attends de voir celui de Rémus. Il est... magique, lui aussi, lui sourit Sirius.

Harry releva la tête vers son ancien professeur.

_ La chemise, c'est vous ?

Rémus acquiesça.

_ Il ne fallait pas, murmura Harry, rougissant devant tant d'attention.

Il connaissait les problèmes financiers de Lupin à cause sa condition de loup-garou (heureusement qu'il occupait à présent un poste rémunéré par Dumbledore, ses habits étaient moins miteux) et il ne l'avait fréquenté qu'en tant qu'élève. Le fait qu'il lui offre un cadeau lui allait droit au coeur. Il devait vraiment avoir aimé son père pour agir ainsi avec son fils...

Le jeune sorcier observa la chemise: elle semblait être en peau de dragon et une ceinture l'entourait pour en refermer le contenu. Il l'ouvrit, voulut caresser la matière mais, à sa grande surprise, sa main s'enfonça à l'intérieur. Cette chemise n'avait pas de fond! Il regarda de l'autre côté, s'attendant à voir son bras réapparaître après avoir traversé la couverture. Il ne vit cependant rien. Il releva les yeux vers Rémus, l'interrogeant du regard. Celui-ci arborait un petit sourire.

_ Cette chemise est conçue de façon à ce que tu puisses ranger toutes tes fournitures scolaires à l'intérieur. Tu n'auras plus besoin de sac. Pour récupérer ce qui t'est nécessaire, tu laisses ta main ainsi et tu appelles intérieurement l'objet choisi. Tu t'en saisiras dans la seconde. Tu peux en outre y entreposer tout ce que tu souhaites transporter sans qu'elle ne change de poids.

Harry était bouche bée devant un tel présent. Il ne retirait plus son regard de la peau de dragon.

_ Elle provient de Roumanie, poursuivit Sirius. Lunard et moi y sommes restés quelques jours quand on tentait de retrouver un Ancien aveugle. Il était incapable de lire nos lettres de rassemblement, mais il nous est très utile: il est spécialisé dans le domaine de la sensibilité, comme Arabella Figg.

_ Et les yltrauscults proviennent d'Afrique, compléta Lupin. Nous avons assez voyagé, il faut dire. On a donc pensé à te ramener des cadeaux non commercialisés en Angleterre. Les yltrauscults sont ensorcelés uniquement dans ce pays. C'est le seul qui contient des chauve-souris vampires, dont les oreilles sont assez grandes pour faciliter le charme.

_ Woaw, vous avez du en voir des choses..., murmura Harry, toujours envoûté par la chemise et les yltrauscults.

_ Oui... Et non, fit Rémus en penchant sa tête de gauche à droite. Notre travail nous a privés de beaucoup de merveilles.

Le jeune sorcier décida enfin de s'arracher de sa contemplation pour redevenir un membre plus actif de la conversation.

_ En tout cas, je tiens à vous remercier. Ils sont vraiment... magiques, déclara Harry qui ne trouvait décidément pas un terme mieux approprié.

Les deux maraudeurs lui sourirent de plaisir. Harry aperçut la montre de Rémus. L'heure lui manquait cruellement depuis qu'il n'avait plus la sienne. Lupin suivit le regard du jeune sorcier et la lut, fronçant les sourcils.

_ Les élèves ne vont pas tarder, Sirius. Tu devrais...

Mais il n'eut pas le temps de finir sa phrase qu'un beau chien noir au poil luisant aboyait en signe de compréhension. Rémus regarda alors Harry.

_ Je vais regagner mes locaux à présent. Il vaut mieux éviter que des élèves aperçoivent un loup-garou à Poudlard, si on ne veut pas créer de mouvement de panique exagéré du côté des Serpentard..., finit-il dans une grimace.

Le Gryffondor en lui refaisait surface.

_ Tu devrais ranger tes affaires, Harry, avant qu'ils n'arrivent.

Harry acquiesça.

_ Je vous... Je te revois demain?, bafouilla le jeune sorcier.

Il avait du mal à tutoyer son ancien professeur. Il était difficile de changer cette habitude quand on éprouvait un grand respect envers la personne concernée et qu'on ne la côtoyait pas autant que l'on voudrait.

Rémus sourit.

_ Bien sûr.

Il se tourna vers Sirius.

_ Au revoir Patmol, fit-il en lui caressant les poils de la tête dans le sens inverse, provoquant ainsi un grognement gentil de la part du chien.

Après un dernier signe de salut, il s'éloigna, laissant Harry et Patmol se rendre seuls au dortoir des Gryffondor.

Les mains se réfugiant dans les manches de sa robe, Harry les réchauffait de son souffle. Les soirées se faisaient fraîches à l'approche de l'automne. Cependant, le froid ne semblait pas atteindre Patmol, allongé à côté de lui, la tête entre les deux pattes avant et le regard rivé sur le parc. Le jeune sorcier attendait patiemment l'arrivée des calèches, finalement moins tendu qu'il ne le pensait, grâce à la présence de Patmol. Il était assis sur les marches menant à l'entrée du château, les jambes repliés vers lui. Harry se sentait même à l'aise dans ce silence: il avait cru qu'il lui serait étrange de rester aux côtés de l'animagus sans converser. L'expérience avait démontré le contraire. Soudain, il entendit les portes s'ouvrirent derrière lui. D'un même mouvement, Patmol et lui se retournèrent. Tous les professeurs de Poudlard étaient là, excepté le professeur Vector qui se trouvait dans le train pour surveiller les élèves, Hagrid, Gobe-Planche, Trelawney et Binns, qui n'étaient d'aucun secours quand il s'agissait de se battre. Ils passèrent devant Harry, certains lui souriant, d'autres le toisant d'un air mauvais _ Rogue, de toute évidence _ et marchèrent en silence vers le milieu du parc. Le jeune sorcier les observait attentivement. Ils disparurent au détour d'une tour et le silence total revint. Seule une légère brise s'entendait. Au loin pourtant, Harry vit des calèches arrivées. Il tendit le cou, tout comme Patmol, et les compta: trois. Seulement trois. Non, ce n'était pas possible, il n'y avait pas aussi peu d'élèves... Ca ferait dans les quoi, douze? Non, c'était définitivement impossible... A moins qu'une attaque... Harry allait une fois de plus imaginer des horreurs quand il s'aperçut que les personnes à bord étaient bien trop grandes pour être des élèves. Les nouveaux professeurs! Harry se frappa mentalement de ne pas y avoir songé plus tôt. Ils étaient maintenant assez prêts pour que le jeune sorcier puisse distinguer parmi eux le faux Karkaroff. La première calèche comprenait le professeur Vector, qui avait quitté les élèves à Pré-Au-Lard, et trois inconnus. Dans la deuxième n'était assise aucune personne dont le visage était familier au jeune sorcier. Enfin, la dernière transportait Mme Maxime, très visible de par sa "forte ossature" et une minuscule femme, les deux occupant pourtant tout l'espace. Les calèches tournèrent pour aller disparaître derrière la même tour où les professeurs de Poudlard s'étaient auparavant dirigés. Quelques secondes avant, le faux Karkaroff avait reconnu Harry et un regard s'était échangé. Le jeune sorcier avait caché un maximum sa haine et l'avait observé indifféremment. Il voulait garantir la surprise totale qui l'attendait... L'imposteur ne devait pas se douter que Harry savait quelque chose. Le jeune homme, par delà la peur qu'il ressentait surtout à l'égard de ce qui était imprévu pour lui-même, se sentit curieux: il aimerait connaître son véritable nom... Mais il le saurait bientôt. Il se remit à attendre, le chien immobile, aussi ennuyé que lui à rester là, sans rien faire. Les minutes passèrent...

Ron et Hermione devaient certainement bavarder avec ses autres compagnons de classe, ou Fred et George. Ils ignoraient tout de ce qui était possible d'arriver ce soir. Il faudrait les avertir... Harry avait hâte de discuter avec eux, de savoir si le séjour d'Hermione chez les Weasley s'était bien déroulé... Il jeta un coup d'oeil à Patmol: celui-ci exécutait un bâillement digne de figurer dans le livre des records. Il lui sourit et se retourna vers le parc. Soudain, il aperçut des points mobiles à l'horizon: les calèches! Cette fois-ci, les élèves étaient à l'intérieur, il n'y avait aucun doute. Le nombre était bien trop impressionnant. Il se releva et s'épousseta. Patmol se mit en position assise. Dès qu'elles furent assez près, Harry commença à chercher du regard ses amis: il vit Parvati et Lavande, Ernie, Malefoy avec Crabbe et Goyle (une grimace de dégoût s'afficha clairement sur son visage), Dean et Seamus... Ou étaient Ron et Hermione? Il sentait alors quelqu'un lui tirer la manche. Patmol lui avait saisi la robe. Il aboya vers la droite. Harry regarda les calèches dans la direction que lui indiquait son parrain et... Oui! Il repéra les cheveux roux de Ron, assis à côté d'Hermione et en face de Neville et Ginny. Il commença à marcher, Patmol sur les talons. Enfin, elles furent bientôt assez proches pour s'arrêter. Les élèves commencèrent à descendre, des deuxième aux septième années, tous dans de grandes discussions. Quelques regards étonnés virent Harry s'approcher. Il ne se situait plus qu'à deux mètres d'eux quand il prit une voix doucereuse et dit dans le dos de ses amis:

_ Mr Weasley! Cinq points retirés pour bavardage excessif!

Ron prit un teint livide avant de se retourner et s'apercevoir de la présence de son ami.

_ Harry!, s'exclama Hermione avant de se jeter à son cou, l'étouffant presque.

Le jeune sorcier, pris au dépourvu, jeta un regard interrogateur à Ron par dessus l'épaule de son amie.

_ Hermione est très démonstrative maintenant, ce doit être l'âge..., dit le garçon roux pour toute explication.

La jeune fille se desserra de Harry, nullement offensée par le commentaire de Ron, et sourit.

_ Content de te revoir Rogue, fit Ron en donnant une tape amicale dans le dos de Harry.

Les trois amis éclatèrent de rire.

_ Woaw, Harry, tu en as un beau chien!, fit remarquer Neville en trébuchant dans sa descente de la calèche.

Patmol, vers qui tous les regards étaient maintenant tournés, se dressa fièrement.

_ Oui, je vous présente Patmol, fit Harry d'un ton solennel.

_ Bonjour Patmol, dit Hermione en lui frottant la tête.

_ Salut Patmol, fit Ron en lui adressant un clin d'oeil significatif.

_ Tu vas le garder dans la chambre?, demanda Seamus, qui se joignait à eux d'un air inquiet.

_ Oui, mais ne t'inquiète pas. Il est très propre.

Seamus sembla soulagé. Il s'approcha de l'animal.

_ Eh bien Patmol, bienvenu à Gryffondor!

_ Patmol? On a dit Patmol?

Des voix familières surgirent de derrière. Le groupe se retourna. Fred et George s'approchaient à leur tour. Ils regardèrent le chien, Harry, puis encore le chien. Fred s'agenouilla à la hauteur de l'animagus et lui parla:

_ Alors c'est toi Patmol?, lui demanda-t-il d'un air curieux.

Le chien aboya et hocha la tête en signe affirmatif.

_ Mais c'est qu'il est intelligent le toutou!, s'exclama George.

_ Pourquoi Patmol ?, interrogea Ginny, tentant de ne pas rougir devant le jeune sorcier.

_ A cause de la douceur de ses pattes, c'est évident!, s'exclama Ron, l'air faussement désespéré.

Fred se tourna vers le jeune sorcier.

_ Bon choix de nom Harry, lui dit-il en lui adressant un clin d'oeil.

_ Viktor!, cria Hermione en faisant de grands gestes du bras.

Elle faisait signe à un grand garçon, situé à quelques calèches d'eux, de venir.

Ron regarda dans la direction. Il semblait aussi impatient de le revoir, malgré l'enthousiasme prononcé d'Hermione qu'il n'appréciait habituellement pas vraiment. Le joueur de Quidditch s'avança et fit un salut général. Ils allaient commencer à engager la conversation quand Mac Gonagall apparut. Avec un Sonorus, elle s'adressa à l'assemblée:

_ Tous les élèves doivent rejoindre rapidement la grande salle en vue du banquet. Prenez la gauche en entrant. Merci.

Elle annula le sortilège avec un Sourdinam et vint vers Harry. Neville, Seamus et les autres se dirigèrent vers les portes du château. Viktor, Ron et Hermione se mirent à discuter activement entre eux pour laisser en retrait Harry et Patmol avec le professeur qui semblait vouloir parler au jeune sorcier en privé. Quand le professeur arriva à sa hauteur, ils s'arrêtèrent et elle lui chuchota:

_ Note.

_ Note? Que je note quoi?, questionna Harry sans comprendre.

Devant le regard exaspéré du professeur, Harry comprit sa stupidité.

_ Ah! Nott! C'est lui!

Karkaroff avait été arrêté et identifié par les professeurs. Soudain, Harry se rappela: Nott avait un fils. Un fils du même âge que lui.

_ Et son fils?, demanda-t-il.

Ron se retourna pour vérifier où était Harry et quand il le vit en pleine discussion avec Mac Gonagall, toujours en retrait par rapport à la foule, il préféra ne pas le rejoindre.

_ Dumbledore le convoque demain pour l'en informer. Il continuera malgré tout ses études.

Ils se remirent en route, Patmol, l'oreille tendue.

_ Nous l'avons soumis au Veritaserum. Il ne sait malheureusement rien d'autre sur l'attaque de ce soir, continua-t-elle dans un murmure. Vous-Savez-Qui prend ses précautions. Ses adeptes ne sont jamais au courant de tous ses plans.

Ils approchaient inévitablement des portes et bientôt, ils seraient entendus. Mac Gonagall accéléra dans son rapport.

_ Quant à lui, il devait tenter de vous enlever dans le courant de l'année, le plus tôt possible, bien sûr, au cas où ce qui devrait se passer ce soir se déroulerait mal. Vous-Savez-Qui l'avait prévenu qu'il comprendrait vite le plan mené. Dumbledore voulait que je vous mette au courant.

Et elle quitta le jeune sorcier sans qu'il n'est le temps de dire quoi que ce soit pour se frayer ensuite un passage et tourner sur sa droite: elle accueillerait bientôt les Première année. Harry la suivit du regard puis jeta un coup d'oeil. vers Patmol. On pouvait lire dans son regard "Tout se passera bien, Harry".

_ Qu'est-ce qu'elle te voulait Mac Gonagall ?, questionna Hermione, une fois qu'elle eut réussi à le rejoindre, tentant de ne pas se faire écraser au milieu de tout ce monde.

_ Je vous le dirai au repas, quand les autres se seront retournés.

Ron acquiesça et ils entrèrent enfin dans la grande salle. Des exclamations d'admiration retentirent de tout côté. Les élèves étaient éblouis par la beauté et la superficie de la pièce. Le plafond enchanté était teinté de rouge, le soleil se couchant après une magnifique journée d'arrière saison. Deux tables étaient à l'effigie de chaque maison, les nouveaux se répartissant selon leur désir. Harry prit place en face de Ron, Hermione à sa gauche, elle-même assise au côté de Krum. Tout autour d'eux, les conversations allaient de bon train. A droite comme à gauche, on entendait "Bonjour, moi c'est Mandy Rance et toi?", "Je suis Calinda Chon", "Moi, c'est Saïro Alim", "Salut", "T'es en quelle année?", "C'est beau ici, tu ne trouves pas?"... Harry éprouvait une étrange sensation. Jusqu'à maintenant, il connaissait de près ou au moins de vue la plupart des visages de Poudlard, ce qui lui donnait une impression de "famille". Et voilà qu'une multitude de gens inconnus, typés, se présentaient, riaient et discutaient, en l'attente de la venue des Première année. L'école était une sorte de rassemblement universel. Une fois de plus, il pria pour que rien n'arrive ce soir. L'ambiance était trop chaleureuse pour être brisée. Ron et Hermione semblaient emportés par l'allégresse générale. Un sourire radieux était fixé sur leurs visages. Leurs yeux brillaient et leurs têtes ne cessaient de se tourner dans tous les sens. Une fois que tous les élèves furent assis, le vacarme continuait de plus belle. Chaque rentrée était bruyante, mais le double d'élèves présents augmentait considérablement le bruit. Dumbledore, à la table des professeurs, était aux anges malgré les menaces qui planaient sur eux. Le tapage assourdissant n'était pour lui que la douce musique de la vie. D'autres professeurs cependant, semblaient moins enthousiastes que le Directeur. Le bruit ne leur convenait guère aux vues de leurs grimaces. Le professeur Dumbledore, bien malgré lui, intervint pour le bonheur de ses collègues.

_ Allons, allons! Du calme! Les Première année seront bientôt là, informa-t-il.

Aussitôt, on eut dit que le volume diminuait. Les élèves étaient cependant toujours en grande conversation, mais les chuchotements remplaçaient peu à peu les fortes intonations. Harry se tourna vers ses amis.

_ A votre avis, lequel d'entre eux est notre nouveau Professeur de Défense contre les Forces du Mal ?

Les trois amis regardèrent vers la table des professeurs.

_ Je verrai bien celui avec ses arcades sourcilières proéminentes, suggéra Hermione. Il a l'air d'avoir eu à affronter pas mal de dangers.

En effet, un homme habillé sombrement donnait une impression de ne pas avoir été épargné par la vie de par son physique plutôt tourné à son désavantage.

_ Le gorille?, s'exclama Ron. J'espère pas!

_ Ce n'est pas lui, c'est une femme cette année, informa Harry.

_ Ah bon? Alors peut-être... elle!, fit la jeune sorcière en montrant discrètement du doigt une jeune femme d'une trentaine d'années qui parlait de façon posée avec les infirmières.

Harry haussa les épaules d'ignorance.

_ Peut-être...

_ Moi, je préférerais!, déclara le garçon roux, convaincu de la gentillesse du professeur grâce au sourire sincère qu'elle affichait à Mme Vivebien.

_ Il y a deux infirmières cette année?, demanda Hermione en remarquant les deux robes blanches qui discutaient avec le professeur.

_ Oui, elle, c'est Mme Vivebien. Elle est gentille, renseigna le jeune sorcier.

_ Tu es déjà allé à l'infirmerie ?!, dit Ron, plus fort qu'il ne l'aurait souhaité.

_ Bien sûr, Ron, c'est évident!, fit la jeune fille en levant les yeux au ciel. Harry s'est fait jeté un sort de réparation oculaire. Il n'a plus de lunettes, tu n'as pas vu?

Ron ouvrit la bouche pour lancer une réplique cinglante.

_ Où est Patmol ?, coupa Harry en regardant autour de lui, évitant aux deux autres de commencer à se chamailler.

A peine eut-il le temps de se poser la question qu'une tête de chien apparut de dessous la table, confirmant sa présence.

_ Pourquoi est-il ici?, questionna Ron à voix basse, de peur de se faire entendre.

Harry sourit et le chien disparut dessous la table. Le cercle des trois amis se resserra.

_ Patmol est... mon chien de garde, informa Harry. Il reste prêt de moi au cas où...

Le jeune sorcier regarda autour pour vérifier qu'ils n'étaient vraiment pas écoutés et reprit en chuchotant:

_ Cet été, j'ai acheté mes fournitures à l'aide de Polynectar au Chemin de Traverse. J'y ai rencontré Malefoy et ses deux gorilles.

Ses deux amis haussèrent les sourcils d'étonnement pour les froncer presque aussitôt.

_ J'ai réussi à l'approcher, faire connaissance et lui soutirer des informations concernant leurs pères.

_ Comment tu as fait?!, demanda Ron, stupéfait par les initiatives de son ami et surtout par leur réussite.

_ Je vous expliquerai au dortoir. L'essentiel, c'est que j'ai appris qu'une attaque serait menée contre moi ce soir.

Hermione mit sa main devant la bouche et Ron écarquilla les yeux de terreur.

_ Ne vous inquiétez pas, les rassura de suite le jeune sorcier en constatant leurs réactions. Une partie de ses plans a échoué.

Pas ceux de ce soir..., lui rappela cependant une voix dans sa tête qu'il s'efforça de ne pas écouter.

_ Que veux-tu dire?, questionna Hermione, se reprenant rapidement.

_ Karkaroff devait être logé à Poudlard cette année. C'est un traître à Voldemort, pardon, fit-il devant leurs frissons, il voulait le tuer. Dumbledore allait l'aider. Sauf que j'avais auparavant découvert, dans un de mes cauch... euh, rêves, qu'il s'était fait tuer par un loup-garou obéissant à Vol..., pardon, Vous-Savez-Qui. Donc, le Karkaroff qui venait ce soir était un imposteur, bien que je me demande comment il a prit un morceau du vrai..., dit Harry, le regard bas et une grimace sur le visage. Bref, les professeurs l'ont attendu et l'ont juste fait prisonnier. Mac Gonagall m'a informé qu'il n'était au courant de rien d'autre _ ils l'ont soumis au Veritaserum_.

Il marqua une pause.

_ Au fait, vous savez de qui il s'agit en réalité?, leur sourit-il.

Ses amis furent coupés dans leur assimilation des propos de leur ami. Ron prit un air solennel.

_ Pitié, dis-moi qu'il s'agit de Malefoy.

Harry hocha la tête en désaccord et son ami se dégonfla, déçu.

_ Nott.

Leurs yeux s'agrandirent mais ils ne purent répondre quoi que ce soit car les portes s'ouvrirent enfin dans un grand grincement pour laisser entrer les première année. Ceux-ci, gênés d'être le centre d'attention générale, s'avancèrent d'un pas hésitant, Mac Gonagall marchant droitement dans l'allée, les guidant vers le choixpeau qui venait d'être posé par Rusard. Harry les suivit du regard, devinant leur appréhension. Lui-même avait été terrifié lors de son arrivée à Poudlard. Il s'interrogeait sur les épreuves à passer pour être définitivement accepté dans l'école et Ron ne l'avait pas aidé en lui disant qu'il s'agissait peut-être de faire de la magie ou de combattre un troll. Certains d'entre eux prenaient cependant un air fier et assuré. Il entendit son ami murmurer:

_ Voilà des petits Serpentard tout frais.

Harry sourit devant la remarque tout en continuant de les observer. Il se mit à regarder également les têtes silencieuses de la table située en face qui contemplait aussi les nouvelles recrues. Parmi elles, il aperçut Cho. Il se retourna de suite, l'évitant. Depuis qu'il l'avait vu en larmes lors du banquet de fin d'année, il n'osait plus la regarder en face. Avant, son coeur s'accélérait et ses joues s'empourpraient dans leurs croisements. Maintenant, le sentiment de sereinité et de joie s'était effacé pour laisser transparaître une sensation malaise des plus désagréables. Il devait se rendre à l'évidence: il ne voyait plus Cho, mais une preuve vivante de son échec face au sauvetage de la vie de Cédric. Et cet été, il n'avait fait qu'éviter d'y penser, elle et Cédric. A partir d'aujourd'hui, ses souvenirs le hanteraient à chacune de leurs rencontres. Le choixpeau finit de chanter. Le jeune sorcier était resté plongé dans ses réflexions et n'avait pas fait attention aux nouvelles paroles.

_ Quand j'appellerai votre nom, vous mettrez le chapeau sur votre tête et vous vous assiérez sur le tabouret. Je commence: Ansy, Piers!

Un jeune garçon s'approcha timidement et mit le chapeau sur sa tête.

_ SERDAIGLE!, cria le chapeau après quelques secondes de silence.

Les deux tables concernées applaudirent bruyamment. Les acclamations se faisaient plus denses, cette année.

_ Aurt, Suzie!

_ Eh, Harry!, souffla discrètement Ron.

Le jeune homme se retourna vers lui.

_ Ca risque de durer longtemps à cause des Première année des autres pays. Alors en attendant, je te donne ça. C'est pour ton anniversaire, comme nous n'avions pas le droit de t'envoyer de cadeaux...

Il sortit de sa poche ce qui ressemblait à première vue à une balle mais lorsque Harry s'en saisit, il s'aperçut qu'il s'agissait d'un oeil enfermé dans une capsule ronde.

_ Merci Ron. Qu'est-ce que c'est ?, demanda-t-il dans un murmure pendant que "Babs, Laura" était envoyée à Poufsouffle.

_ C'est un troisième oeil. Ca t'aidera pour les cours de Trelawney.

Harry ouvrit des yeux ronds. Devant l'air hébété de son ami, le garçon roux rit doucement.

_ Je plaisante. C'est un oeil de faucon ensorcelé. En le serrant dans ta main, tu peux lui commander d'enregistrer tout ce qu'il y a autour de toi et il te le retranscrira sous formes d'hologrammes dès que tu lanceras le sortilège de révélation. Je pensais que cela te serait utile pour prouver à Rogue que Malefoy est le responsable de nos bagarres. Bien que je ne pense pas qu'il lui enlèvera des points quand même...

Harry lui sourit en le remerciant à nouveau, plaça l'oeil dans sa poche et applaudit alors que "Bralckilt, Bertrand" s'installait à leur table.

_ Bones, Meredith!

Un petite fille blonde s'avança à son tour. Elle devait certainement être la petite soeur de Susan, en cinquième année de Poufsouffle. A en croire Hagrid, les Bones étaient d'excellents sorciers qui avaient péri durant l'ascension de Voldemort, tout comme les Prewett et les McKinnon. Les deux jeunes filles étaient orphelines, victimes du malheur répandu par l'immonde mage noir...

_ Cart, Calista!

_ Harry, j'ai quelque chose pour toi, moi aussi, murmura Hermione.

Et elle lui tendit une montre.

_ J'ai remarqué que tu avais cassé l'ancienne pendant la deuxième tâche alors...

_ Merci beaucoup Hermione, je m'en serais acheté une sinon, lui sourit Harry en soulignant combien son cadeau lui était utile. Eh! Elle est comme ta pendule, Ron!

_ Oui, mais avec les personnes de ton choix, expliqua son amie. Tu peux toujours avoir l'heure et... elle est étanche, cette fois-ci.

_ Il faut lancer un sortilège spécial ?

_ Oui, tiens, voici le mode d'emploi.

Et la jeune fille fit glisser un parchemin à côté des couverts de Harry. Le jeune sorcier y jeta un coup d'oeil. et "programma" sa montre d'un coup de baguette. Il la mit alors à son poignée.

_ On peut dire que je suis équipé maintenant, constata Harry.

Hermione et Ron lui sourirent. Ils se reconcentrèrent tous les trois sur la répartition. Harry vit qu'Hagrid avait rejoint les professeurs et étaient assis à la droite de Madame Maxime. Flitwick était à côté de la minuscule dame qui avait partagé sa calèche avec la directrice de Beauxbâtons. Harry sourit. Des paires se formaient selon la taille... Il continua de regarder les membres du corps professoral. Une femme, d'une laideur très repoussante, avait des pustules sur tout le corps et des verrues sur sa paupière, ce qui l'empêchait d'ouvrir son unique oeil central correctement. Vêtue d'une robe miteuse, elle ressemblait aux sorcières telles que les percevaient les moldus: vieilles et bossues. On ne pouvait cependant pas deviner facilement son âge... Une harpie..., songea Harry. A sa gauche, un homme, d'apparence jeune, contrastait énormément avec l'harpie par son élégante robe blanche et ses cheveux blonds, raides et soignés qui arrivaient certainement à la hauteur de ses genoux. Il observait tranquillement la cérémonie. Un vieillard, en revanche, semblait s'endormir par la monotonie de la répartition. Harry ne souhaitait pas l'avoir en cours. Mais il ne se fit pas de soucis. Il devait certainement être un deuxième professeur d'histoire de la magie... Le jeune sorcier fut attiré par un regard posé sur lui: une femme, de l'âge de Mac Gonagall, le fixait intensément. Dès qu'il l'observa en retour, elle détourna les yeux.

_ Tibugue, Rolan...

BANG!

Les grandes portes s'ouvrirent à la volée. Harry et tous les autres tournèrent vivement la tête. Dans l'entrée, Fudge et une dizaine d'hommes approchaient d'un pas strict vers le centre de l'allée. Instinctivement, le jeune sorcier serra la main sur sa baguette. Il avait reconnu aux côtés du ministre Lucius Malefoy. Dumbledore, de l'autre côté de la salle, se leva pour contourner la table de professeurs. Mac Gonagall, elle, fit signe aux Première année restants de rester auprès d'elle. Des murmures s'élevèrent parmi les élèves.

_ Monsieur Fudge. Que me vaut l'honneur de cette visite... imprévue?, demanda calmement Dumbledore.

Il s'avançait lentement vers lui, à quelques mètres de Harry. Le ministre sortit un parchemin de sa robe.

_ J'ai été informé, peu de temps avant, d'un témoignage qui m'amène en ce lieu pour une affaire de la plus haute importance, dit Fudge sans prendre le peine de saluer le directeur.

On sentait que la tension qui était né entre les deux hommes en Juin dernier n'avait fait que croître au cours de l'été. Harry, quant à lui, lâcha sa baguette. Il s'agissait d'un problème du ministère. Si cela concernait Poudlard ou que Fudge attaquait l'organisation de l'école, le professeur Dumbledore saurait se défendre. Quelques murmures envahirent la salle. Les élèves s'interrogeaient sur l'étrange comportement du ministre. Pourquoi intervenait-il maintenant?

_ Et peut-on savoir en quoi consiste cette affaire, Mr Fudge?

Fudge regarda le professeur d'un air qui se voulait intimidant et déclara:

_ Je dois procéder à l'arrestation de Mr Potter, ici présent, pour le meurtre de Cedric Diggory.