CHAPITRE 6: La rentrée d'une légende.
Des centaines d'yeux fixaient le jeune sorcier, certains apeurés, d'autres toujours abasourdis par son entrée matinale et enfin des visages qui le regardaient, plein d'espoir. Le Survivant était peut-être accusé à tort. Pour la première fois, Harry regardait les différentes têtes, calmement. Il n'avait plus rien à craindre, son innocence serait établie. Sa seule préoccupation, maintenant, était de faire disparaître les crampes de son estomac. Il aperçut rapidement les enfants des Weasley, repérables de par leurs cheveux roux. Ils étaient médusés, sidérés. Ils l'observaient comme s'il s'agissait d'un mirage, d'un miracle, un mort revenu d'outre-tombe. Harry leur adressa un bref sourire mais leurs expressions restèrent figées. Hermione, assise à côté d'un Ron aux yeux écarquillés au maximum en l'attente de la suite des événements, tenait sa main sur tout le visage, cachant joues et bouche. Son regard était rouge, des larmes contournant ses doigts. Quoique fut la réaction de Harry, leurs comportements restèrent inchangés. Cho, à la table des Serdaigle, avait une expression indéchiffrable, et ce, à la plus grande frustration du jeune homme. Sa réaction, plus que toutes les autres, lui importait énormément: il voulait qu'elle croit sincèrement à son innocence. Malefoy et ses camarades Serpentard semblaient répéter d'une voix muette et unanime "C'est pas vrai! Mais c'est pas vrai!". Harry pensa alors qu'il ne devait pas oublier à se montrer froid envers le ministre. La suite des événements en dépendrait. Mac Gonagall paraissait se retenir de se jeter sur Fudge pour lui crier "Alors?!" tout en ne lâchant pas Harry de vue. Ses mains se crispaient sur la table, les jointures de ses doigts blanches. Quant à Rogue, eh bien... Il restait Rogue, le visage interdit.
Dumbledore mit la main dans le dos de Harry pour l'obliger à poursuivre sa marche, ce dernier s'étant inconsciemment arrêté. Dès qu'ils eurent atteint le devant de la table des professeurs, Fudge s'éclaircit la voix:
_ Lors de la détention de Mr Potter à Azkaban, une conversation privée entre Mr Macnair et un inconnu a été enregistré grâce à un oeil de faucon ensorcelé, révélant ainsi que Mr Macnair a menti lors de son témoignage. Il aurait voulu lui jouer "un mauvais tour". Mr Potter est donc innocent. Le ministère va, par conséquent, enquêter dès à présent sur les raisons du comportement de Mr Macnair et le pourquoi de son mensonge. Je vous prie de bien vouloir accepter nos excuses pour l'interruption causée il y a deux jours.
Le ministre fit face à Harry pour lui serrer la main en signe de réconciliation et de salut, mais le jeune sorcier, entrant parfaitement dans le rôle qu'il s'était fixé, la refusa, le regard féroce. Légèrement gêné, Fudge se dirigea vers la sortie quand une voix l'interpella:
_ Et pour ce qui concerne Vous-Savez-Qui? Vous croyez ce garçon, n'est-ce-pas?
Le professeur Mac Gonagall avait parlé. Elle se refusait à laisser partir le ministre sans être certaine qu'il allait enfin réagir.
_ Je suis désolé, mais les preuves données, suffisantes pour la disculpation de Mr Potter, sont loin de justifier quoi que ce soit concernant Vous-Savez-Qui. Les deux affaires sont indiscutablement distinctes.
_ Mais... Mais vous ne pouvez pas croire à une simple coïncidence?, balbutia le professeur de métamorphoses, proche de l'hystérie.
L'aveuglement apparent du ministre l'emplit vite de rage. Elle s'était levée et se forçait à ne pas hurler sur Fudge.
_ Enfin, regardez sa cicatrice! Et le sang qui en coule! Tout ça ne vient pas d'une fréquentation pure et simple des Détraqueurs!, fulmina-t-elle.
_ Madame, une cicatrice saigne parce qu'elle a reçu un cognement, rien d'autre!, s'exclama Fudge sur une fausse défensive.
Harry admira intérieurement les efforts fournis par le ministre pour une impeccable mise en scène. Mac Gonagall se révélait une adversaire redoutable, quoique la réaction latente de Fudge méritait largement le duel verbal.
_ Minerva, calmez-vous. Mr Fudge et moi-même nous sommes entretenus. Rien ne le convaincra à modifier ses décisions, dit calmement Dumbledore.
Il se tourna vers le ministre, le regard dur. Harry se questionnait: est-ce que tous les sorciers réputés d'Angleterre passaient par une école d'acteurs?
_ Nous espérons cependant que Mr Macnair, coupable de l'emprisonnement injuste d'un élève mineur, se trouvera sévèrement puni de son crime.
Il jeta un dernier coup d'oeil furieux à Fudge avant de se retourner et d'entraîner Mac Gonagall en retrait par les épaules, malgré elle. Le Directeur devait l'avertir au plus vite des véritables événements, sans quoi, le ministre serait victime d'une rafale déchaînée de colère. En effet, les paroles du Directeur ne semblaient pas apaiser la fureur du professeur de Métamorphoses, ce qui était rare. Elle n'était pas résignée à partir sans un espoir à l'horizon. La poigne de Dumbledore sur l'épaule de Mac Gonagall se fit plus ferme.
_ Mais...
_ Venez Minerva, vous avez besoin de calme, la coupa Dumbledore.
Ils s'éloignèrent dans la direction opposée du ministre qui faisait de même, la démarche rapide et le teint rouge. Il devait partir en supportant que le Directeur ait le dernier mot, ce qui, même pour une mise en scène, était toujours quelque peu déshonorant. Mac Gonagall ne cessait de proférer des insultes à voix basse. Harry perçut dans ses murmures incompréhensibles "espèce d'idiot", "inouï", "paroxysme de l'imbécillité". Réalisant qu'il restait seul debout, il se dirigea vers le fond de la table des Gryffondor. Ses jambes lui étaient toujours douloureuses d'avoir trop marché mais pour le moment, seul un bon repas mérité comptait. Les centaines d'yeux ne le quittaient pas. Pourtant, il avait décidé que rien ne l'atteindrait. Après sa capture, ce toisement général était sans importance. Il mangerait en compagnie de ses amis, quoi qu'en pensent les autres. Il vit les têtes rousses des Weasley et s'approcha. Il aperçut une place vide, en face de Ron et d'Hermione. Parvati, les yeux qui s'écarquillaient de plus en plus en comprenant qu'il allait s'asseoir à côté d'elle, fit un bond sur la gauche. Avant que Harry n'ait eu le temps de s'installer, un chien noir surgit de dessous la table et se jeta sur lui, manquant de le faire tomber. Le jeune sorcier éclata de rire devant l'enthousiasme de Patmol et lui caressa le pelage du dos.
_ Oui, moi aussi, je suis content de te revoir Patmol!, s'exclama-t-il, euphorique aux retrouvailles.
Ses paroles se répercutèrent en écho. S'ils n'étaient pas déjà au comble de l'ébahissement devant le retour du jeune sorcier, les élèves l'étaient devenus en voyant que le Survivant riait, un rire sincère, alors qu'il revenait précisément d'Azkaban.
Le chien aboya joyeusement. On pouvait cependant ressentir dans son regard qu'il mourait d'envie de lui poser mille questions.
_ Tu t'assoies à côté de moi?, lui demanda Harry.
Patmol hocha vigoureusement la tête et poussa légèrement Parvati, profondément choquée, sur sa gauche. Harry s'installa à son tour sur le banc. Aussitôt, un grand soulagement l'envahit: ses jambes ne supportaient plus le poids de son corps à présent. Sur la table apparurent plats succulents, boissons chaudes et froides, mets de différents pays, de quoi nourrir un régiment. Le jeune sorcier, le regard brillant, murmura:
_ Merci Dobby.
Il était certain que c'était cet elfe qui avait préparé ce somptueux petit déjeuner. A peine eut-il dit cela qu'un mot apparut devant lui où on pouvait lire: "De rien, monsieur le grand Harry Potter. Bon retour parmi nous". Harry sourit, prit une serviette et s'en essuya les mains, les ressortant magiquement et parfaitement propres. Il se passa également un coup rapide sur le visage. Il observa ensuite avec dégoût l'état final de la serviette qu'il posa loin de lui. A sa gauche, Patmol le regardait, les yeux pétillants de bonheur. Le jeune sorcier se nourrit d'une grosse cuillerée d'une spécialité canadienne.
_ Ah, cha va bien mieux, déclara Harry, la bouche pleine.
Il redressa enfin la tête pour regarder ses camarades. Tous silencieux, il se sentit légèrement gêné. Ce dont il avait besoin maintenant, c'était oublier tout ce qui venait de se passer et engager une conversation normale. Que les légers cognements contre l'assiette s'entendent de l'autre côté de la salle n'était guère encourageant. Harry entreprit d'adresser à ses amis ses pensées les plus pressantes.
_ Ron, je voulais te remercier une fois de plus pour ton cadeau. Il m'a vraiment sauvé la vie, dit-il en le fixant dans les yeux.
Ron tenta de sortir de son mutisme pour lui répondre.
_ Oui... Il t'a servi plus tôt que je ne l'aurai pensé...
Et il retomba dans son silence, se rendant compte que ce n'était pas ce qu'il voulait dire. Il fallait converser sur des sujets banals, ne pas rappeler des moments difficiles à son ami. Mais c'était plus complexe à dire qu'à faire...
_ Et le tien aussi m'a servi, finit Harry en s'adressant à Hermione.
La jeune fille esquissa un bref sourire à Harry et se passa les mains sur le visage pour se donner une allure plus présentable. Après tout, tout irait bien maintenant, elle n'avait pas à montrer des yeux rouges... Pourtant... Il leur était réellement difficile de dialoguer avec une personne que l'on sait avoir échappé à Azkaban et de Celui-Dont-On-Ne-Doit-Pas-Prononcer-Le-Nom...
_ Je suis là, d'accord?, assura gentiment Harry en les regardant droit dans les yeux.
Cette fois-ci, ils sourirent vraiment, approuvant rapidement de la tête, mais gardant un air triste, ineffaçable. Le jeune sorcier, bien qu'un peu découragé par ce manque de réponses, reprit une fois de plus:
_ Alors, qu'est-ce qui s'est passé pendant mon absence?
Leurs regards l'évitèrent. Aux autres tables, les commérages reprenaient peu à peu. Contempler une personne, même si l'on sait être le commencement d'une véritable légende vivante, devenait à la longue un tantinet lassant. Sans parler des torticolis naissants... Chez les Gryffondor, les têtes dodelinaient dans l'hésitation. Ron fut le premier à prendre la parole, tentant de s'éclaircir la gorge.
_ Ben... Dès que Fudge est parti avec, avec toi, balbutia-t-il, Dumbledore a ordonné un rassemblement des professeurs dans la salle du fond. Binns est venu finir la répartition des Première années et il nous a surveillés. C'était le désordre complet. Les Serpentard ricanaient, fit-il dans une grimace de dégoût, d'autres... d'autres t'insultaient en disant qu'il savait bien depuis longtemps que tu étais un... un assassin, et il y a eu plusieurs bagarres. Surtout les Gryffondor contre des Serpentard..., finit-il sur une toute petite voix.
_ Vous ne vous êtes pas battus quand même?!
C'était au tour de Harry d'être stupéfait. Quelques uns de la table eurent un regard coupable, dont Ron... et Hermione.
_ Même Patmol nous a aidés, fit Ron dans un petit sourire, reprenant peu à peu une attitude normale.
Dans la salle, les élèves rediscutaient entre eux à présent tout en gardant un oeil sur Harry.
_ Patmol!, s'indigna Harry en fixant son parrain.
Le chien se mit une patte sur le museau, cachant ses yeux, comme par peur de se faire réprimander. Une partie de la table des Gryffondor, plus centrée sur Harry que les autres, éclata de rire devant la réaction du chien. Ron se sentait à l'aise maintenant. Son ami ne semblait pas avoir le moral sérieusement atteint. Ses camarades réagirent de même.
_ J'espère que tu as croqué le genou de Malefoy au moins, finit-il, le regard toujours dur en apparence.
Les rires furent francs cette fois-ci. Même Hermione, qui n'était toujours pas entrée dans la discussion, avait l'air mieux et eut un petit rire. La bonne humeur de Harry, malgré les événements qu'ils venaient de vivre, était contagieuse. Le chien émit un aboiement joyeux. Le jeune sorcier reprit une bouchée et continua:
_ Et après?
_ Samedi matin, les autres élèves ont été répartis. Comme leur répartition ne s'était pas déroulée vendredi soir comme prévu, ils devaient choisir leur maison pour une nuit. Les mots de passe ont été changés le lendemain. Et l'après-midi, on a du choisir nos options..., dit Ron.
_ Ron a été pris dans le journal, il en est le rédacteur en chef, annonça Hermione en souriant fièrement au garçon roux.
_ Vraiment?!, s'étouffa presque Harry.
Il n'en revenait pas. Ron, rédacteur en chef! Il se serait plutôt attendu à Hermione, avec son art de manier l'écriture... Ron se redressa, l'air suffisant.
_ J'ai fait une enquête au ministère cet été, du moins là où les non-membres ont le droit de circuler, et j'ai envoyé un article sur leur organisation et des suggestions pour une meilleure efficacité, avec des interviews de plusieurs personnes dont mon père et Percy!, expliqua-t-il.
_ Jamais je n'aurais pensé que tu t'y serais intéressé, avoua le jeune sorcier en se disant que finalement, il ne connaissait pas tout de ses amis. Dans ce cas, toutes mes félicitations!
_ Merci, rougit Ron. Mais je n'aurais jamais eu le poste si Hermione s'était présentée... Heureusement qu'elle ne l'a pas fait, elle m'a dit que le travail de préfète lui prendrait suffisamment de temps..., ajouta-t-il avec un sourire.
Ce fut au tour d'Hermione de rougir face à Harry qui contemplait le badge, jusqu'ici passé inaperçu.
_ Woaw! Félicitations à toi aussi Hermione! Bien que cette nouvelle m'étonne beaucoup moins que la précédente...
_ Merci Harry.
_ Je vais devoir être prudent cette année, si je veux sortir en douce..., fit Harry avec une mine dépitée.
Les trois amis éclatèrent de rire. Harry les regarda. Hermione était préfète et Ron, rédacteur en chef. Quant à lui, il était attrapeur. Ils avaient une place évidente au coeur de leur maison, quand on y pensait... Pour Harry, il occupait son poste depuis longtemps, pour Hermione, c'était à prévoir... Maintenant, il comprenait mieux pourquoi Ron avait tenu à montrer ses talents de journaliste, il n'allait plus être dans l'ombre de quiconque, il aurait lui aussi une place bien à lui... Un don de reporter... On pouvait dire que son ami l'avait eu...
_ Dis-donc Ron, j'espère que tu me laisseras tranquille... Tu ne vas pas jouer les Rita Skeeter...
_ Ne t'inquiète pas pour ça, dit Ron en souriant, je dirai même qu'on va pouvoir avoir notre revanche sur la presse...
Son ton était comploteur. Il était flagrant qu'il préparait quelques mauvais coups...
_ Tu oublies la présence de tes chers collègues Ron, je te rappelle, souligna Hermione.
_ Collègues? Pourquoi, qu'est-ce qu'ils ont ses collègues?, demanda Harry d'un air étonné.
_ Ben, les professeurs ont tenu à ce qu'il y ait des membres de chaque maison pour réaliser le journal, expliqua Ron, déçu.
_ Des articles du journal vont être écrits par des Serpentard?!, s'exclama Harry, légèrement affolé.
_ Oui, mais chaque article doit être approuvé par la moitié des journalistes au moins pour être publié, renseigna Hermione, toujours au courant de tout. Et comme chaque maison représente un quart des membres, ils ne peuvent pas utiliser le journal à de mauvaises fins...
Harry soupira de soulagement.
_ N'empêche qu'on n'est pas gâtés du côté des Gryffondor..., grogna Ron. Les deux Crivey ne me disent rien qui vaillent...
_ Crivey?!, s'étrangla Harry. Oh non, pas ça...
_ Oh si..., répondit Ron en compatissant.
_ Je suis maudit, déclara Harry, laissant tomber sa fourchette dans son assiette.
_ Potter?
Harry se retourna. Mac Gonagall, qui venait de l'appeler, lui tendit des parchemins. Elle avait l'air à présent beaucoup plus apaisé et... fière de son élève. Dumbledore l'avait renseigné...
_ Ce sont des informations concernant les différentes options proposées. Vous devrez me rendre vos choix dans l'après-midi, sur la table de mon bureau. Les horaires des séances hebdomadaires de Quidditch vous sont également fournies. D'autre part, Mmes Pomfresh et Vivebien vous attendent pour soigner vos blessures. Vous n'avez que votre cicatrice où...?, demanda-t-elle d'un air inquiet.
_ Euh, j'ai été blessé au sommet de la tête aussi, mais sinon, je n'ai rien de grave je crois, rassura-t-il.
Il était évident que Mac Gonagall et les élèves attirés par l'arrivée du professeur dans la conversation auraient voulu savoir comment ses blessures avaient été produites. Cependant, il n'en fut rien.
_ Bien, je vous souhaite une bonne journée, Potter. Et... Un bon retour dans notre maison, rajouta-t-elle un peu tremblante, n'osant pas y croire.
_ Merci, Professeur.
Il prit les parchemins et les étudia soigneusement, le ventre plein, tandis que Mac Gonagall s'éloignait.
_ Hermione et moi nous sommes inscrits au Cours contre les Détraqueurs, informa Ron.
_ Oui, je n'y ai pas cru au début. Tu te rends compte! Nous devons savoir nous défendre face à ces créatures et aucun programme de Défense contre les Forces du Mal jusqu'en Septième année exclue n'en comprenait l'apprentissage!, se révolta Hermione, indignée.
_ Je ne pense pas que je vais m'y inscrire..., murmura Harry en consultant la liste des options. Eh, ils donnent des cours de Musique!
_ Ron n'a pas voulu s'y inscrire, mais moi, j'y vais!, fit une Hermione enthousiaste, sa rébellion passagère contre l'organisation des cours envolée.
Ron fit la grimace. Il se voyait mal jouer de la lyre... Harry hocha la tête en signe négatif.
_ Ca non plus, je ne suis pas si intéressé... Ah! Combat avec Armes Magiques! Ce cours ne doit pas être mal!, s'anima Harry. Qu'en dis-tu Patmol?
Le chien approuva d'un signe de tête. Décidément, il devait passer pour définitivement étrange...
_ Ah ça... je ne m'y suis pas inscrit non plus. Il paraît qu'on en fait en Septième année alors..., dit Ron en haussant les épaules.
_ Quant à moi, je me vois mal me battre avec des bâtons rebondissants ou...
_ Des bâtons rebondissants?!, s'exclama Harry l'intérêt croissant. Mmh, je crois qu'il va falloir que j'y réfléchisse...
_ Et je crois que la dernière option restante est Les Sports Moldus, informa la jeune fille en coupant court aux pensées de Harry.
_ Je parie que Malefoy s'y est inscrit, dit Ron sur un ton ironique.
Hermione et Harry éclatèrent de rire. Malefoy et les autres Serpentard devaient s'être sentis insultés par une telle proposition. S'étant calmés, le jeune sorcier reprit:
_ Cette option aussi m'intéresse..., souffla Harry en lisant le programme.
_ Hein?!, firent Hermione et Ron d'une seule vive voix.
_ Mais... Ces cours seront d'un ennui mortel!, s'exclama son ami, ne comprenant pas ce que des sports sans magie pouvaient apporter.
_ Je confirme, bien que je sois fille de moldus!, dit Hermione en hochant vigoureusement la tête.
_ On y apprend des techniques de défense et d'attaque en arts martiaux, expliqua patiemment le jeune sorcier en leur montrant les parchemins. On peut acquérir plus de réflexes...
_ Mais tu as le Quidditch pour ça!, s'emporta le garçon roux, tentant de raisonner son ami. Et tu as déjà d'excellents réflexes, si tu veux mon avis.
_ Imagine que je dois me défendre sans magie!
_ Ca n'arrivera jamais, affirma Hermione avec certitude.
_ Et Neutermagia alors?!, répliqua Harry avec véhémence.
Il était sûr qu'ils lui demanderaient ce que c'était lorsque Ron répondit, à sa plus grande surprise:
_ Aah ça... personne ne nous le lancera...
_ Oui, c'est sûr, approuva Hermione. De toute façon, un Expelliarmus et on obtient le même résultat...
_ Raison de plus!, riposta le jeune sorcier, interloqué par leurs réactions défaitistes.
_ Sans magie, on ne peut pas s'en sortir, point final, fit Ron dans l'acceptation de la dure réalité.
_ Dis-moi aussi que, sans baguette, j'étais condamné à mourir à Azkaban!, rétorqua le jeune sorcier emporté et plus fort qu'il ne l'aurait voulu, attirant à lui encore plus de regards.
Hermione et Ron restèrent pétrifiés devant ses paroles, ne savaient pas quoi dire. Ils venaient de rétablir finalement le dialogue qui s'annonçait laborieux avant de recevoir subitement une belle douche glacée. Harry, quant à lui, comprit son erreur. Il évita le regard de tous ses camarades, se tourna involontairement vers le chien et finit par fixer son assiette. Patmol, malgré son pelage noir, donnait l'impression d'avoir blanchi à la prononciation du lieu maudit. Le jeune sorcier soupira en se disant qu'il se conduisait stupidement à effrayer ainsi inutilement ses amis et se reprit, plus posément.
_ Excusez-moi, ça m'a échappé.
_ C'est... C'est pas grave Harry, chuchota Hermione d'une petite voix.
_ Après tout, ce ne sont que des options...
_ Oui, des options..., murmura Ron.
Harry, sentant que faire repartir la conversation sur un ton léger serait difficile, proposa:
_ Ca vous dirait de rendre visite à Hagrid ?
_ Oh, oui!, s'enthousiasma Ron, ravi que le jeune sorcier ait pu trouver une alternative.
_ Harry..., hésita Hermione, tu ne crois pas que tu devrais d'abord...
Et elle montra sa cicatrice.
_ Hermione a raison, Harry, tu devrais te rendre d'abord à l'infirmerie..., avoua Ron en constatant une fois de plus l'état misérable de son ami.
_ Oui, j'y vais, soupira le jeune sorcier.
Allez se faire soigner n'était jamais une partie de plaisir, en général; en tout cas, en ce qui concernait Harry.
_ Non, on y va, rectifia Hermione, un sourire aux lèvres.
Harry le lui rendit et ils sortirent tous trois de la grande salle, des dizaines de regards posés sur eux.
Après une longue visite aux infirmières qui s'occupèrent toutes les deux de Harry en lui obligeant à boire d'horribles potions qui l'aideraient, paraît-il, à cicatriser une blessure qui lui aurait coûté cinq points de suture et à refermer des petites coupures (pour la fameuse marque, rien à faire... aucun livre médical ne conseillait véritablement), le jeune sorcier s'était rendu au dortoir pour se laver et se changer. Les habits étaient à la limite du rattrapable, avec toutes leurs taches... Enfin propre et ne sentant plus de besoin à part celui de dormir qu'il repousserait au maximum (il n'était pas pressé de ressentir la fureur de Voldemort), il se dirigea en compagnie de ses amis vers la cabane du garde-chasse, Patmol sur les talons. L'animagus semblait ne plus vouloir le quitter.
Ils frappèrent à la porte, Hagrid leur ouvrit et les accueillit chaleureusement. Il regardait toujours Harry sans le quitter des yeux, pour s'assurer de son état de santé et hésitait à le prendre dans ses bras. Tout le sang qu'il avait vu sur le jeune sorcier le rebutait à le serrer contre lui, par peur d'appuyer sur des blessures invisibles. Il les fit donc installer à sa table, le thé et des petits gâteaux durs comme de la pierre dessus. Il alla ensuite dans le fond de sa cabane et récupéra une mallette en bois, longue de cinquante centimètres environ, polie, vernie et aux rainures claires, qu'il ramena sur la table, face à Harry.
_ Tiens, c'est pour ton anniversaire, dit-il dans un grand sourire. J'avais prévu de te la donner ce soir, mais je crois que tu l'as bien assez mérité pour l'avoir maintenant. De toute façon, elle est prête.
Harry, après un "merci" chuchoté, les yeux écarquillés devant le présent, tira timidement le couvercle pour en découvrir le contenu. A l'intérieur étaient entreposées de magnifiques plumes, toutes différentes, fixées dans des étuis réguliers, légèrement penchés. Parmi elles, il reconnut celle à la beauté éblouissante du Phénix. Le jeune sorcier comprit: Hagrid avait demandé à Dumbledore l'autorisation de prendre une plume à Fumseck. Devant le somptueux cadeau, Harry gardait des yeux brillants.
_ Hou là là, Hagrid..., souffla le jeune homme.
_ Je les ai taillées moi-même, affirma-t-il fièrement. Elles proviennent de différents oiseaux des pays de l'Est.
Le jeune sorcier avait raconté en route le rapport du voyage du demi géant à ses deux amis. Ceux-ci étouffèrent des exclamations d'admiration.
_ Chacune a des propriétés différentes. Je te les ai notées sur un parchemin.
Et il montra du doigt un papier de la mallette.
_ Il y en a pour les beuglantes aussi?, demanda avidement Ron.
_ Pour en envoyer une à Malefoy?, suggéra Harry, tentant de lire les pensées de son ami.
_ Non, à Percy. Il m'a légèrement énervé cet été..., avoua le garçon roux dont le froncement des sourcils laissaient deviner qu'il avait été plus qu'agacé par son frère aîné. Avec son nouveau poste, il se prend pour Merlin...
_ Celle-ci l'est, informa Hermione, le nez dans le parchemin. Par contre, vous n'avez pas indiqué la fonction de celle du phénix, Hagrid...
_ Je vous laisse deviner pour celle-là, expliqua le demi géant. Dumbledore m'a dit que tu trouverais sûrement Harry...
Les trois amis observèrent la plume en plissant les yeux de concentration.
_ Bah, fit Ron en haussant les épaules, il suffit de trouver le nom d'un sentiment et de rajouter le suffixe "ante". On a que l'embarras du choix.
Il commença à énumérer toutes les possibilités.
_ Les plaisantes, les barbantes, les ennuyantes, les craquantes, les croquantes...
_ Ron, tu dévies légèrement sur ton adoration pour la nourriture là, pas les sentiments!, s'exclama Hermione, l'air faussement réprobateur.
Puis, après avoir levé les yeux au ciel, elle proposa:
_ Ce peut être euh... des pleurantes, des suppliantes, des aimantes...
_ Des espérantes..., coupa Harry. Non, ça n'existe pas... Le phénix... Mmh, à chaque fois que je l'ai entendu, c'était quand je me suis retrouvé face au basilic et sous le dôme avec Voldemort (tressaillements de Hagrid, Ron et Hermione), pardon... Pour moi, ça me donnait de l'espoir... Peut-être des confiantes?, proposa-t-il.
_ Oui, c'est ça!, confirma joyeusement Hagrid pendant que le garçon roux se questionnait sur le dôme en question.
Dans le train, en Juin dernier, Harry les avait informé sur l'identité des mangemorts et un fil d'or qui avait relié leurs deux baguettes, lui permettant ainsi d'échapper à Voldemort. Mais il avait délibérément omis de mentionner les échos qui étaient apparus ainsi que le dôme où on percevait le chant du Phénix. Il n'avait pas non plus raconté de détails sur la mort de Cédric... Quant à son "entretien" avec Barty Croupton, il s'était gardé de dire que son retour à Poudlard n'avait pas été la fin de son cauchemar. Il n'imaginait pas l'état de Ron et d'Hermione s'ils avaient appris que l'un de leurs professeurs préférés cette année-là était un mangemort. Pourtant, ils s'étaient interrogés sur le pourquoi des arrêts des cours de Défense contre les Forces du Mal et le comportement étrange de Maugrey après cette date...
_ Hagrid..., souffla Hermione, des confiantes... La confiance est vraiment quelque chose de difficile à exprimer dans une lettre... La plume de Phénix doit être très puissante...
_ Pourquoi?, demanda Harry, intéressé.
_ Plus le sentiment est difficile à exprimer, plus la puissance de l'animal doit être grande. Une plume de coq suffirait pour créer une adaptée aux beuglantes, la colère monte très vite en nous, mais l'espoir..., murmura Hermione, admirative.
Harry l'observait tranquillement tandis que Ron continuait à regarder le contenu de la mallette.
_ Dis Harry, ça ne te fait rien de me prêter celle des beuglantes? Je dois en faire parvenir une à Fudge aussi...
Harry se frappa le front.
_ Fudge! J'ai complètement oublié de vous avertir!, s'exclama-t-il en se reprochant de ne pas y avoir pensé plus tôt.
_ De quoi?, questionna Hagrid. A part de nous dire qu'il est le plus abrut...
_ Il est de notre côté!, coupa Harry.
_ Quoi?!, firent-ils tous d'une seule vive voix, un aboiement de stupeur les accompagnant.
_ Oui! Attendez, laissez-moi vous expliquer..., dit Harry en prenant son inspiration, tout le monde suspendu à ses lèvres. Grâce à l'oeil, j'ai enregistré Vol..., pardon, Vous-Savez-Qui, quand j'étais dans ma cellule...
A ses mots, tous blanchirent dangereusement.
_ Fudge a été obligé d'y croire... Mais vous savez que Malefoy, Crabbe et Goyle ont des pères mangemorts et qu'ils veulent le devenir aussi... Ah, ça non, vous ne le saviez pas...
Ses amis faillirent s'étrangler sous le choc de la nouvelle.
_ Ils auraient donc prévenu leurs pères par courrier pour préparer une guerre ouverte avant que Fudge n'ait le temps de rassembler des forces. D'où la mise en scène que vous avez vu ce matin, finit-il, appréciant l'effet de ses propos sur les autres.
_ Mais c'est... Mais c'est, balbutia Ron, ayant peine à y croire, mais c'est génial!
_ Stupéfiant!, s'exclama Hermione.
_ Magnifique!, dit Hagrid de sa grosse voix.
Patmol aboya d'approbation.
_ Et ce n'est pas tout, ajouta Harry. J'ai dit à Fudge qu'une des cibles de Vol..., Vous-Savez-Qui, était le gardien des baguettes des criminels. Il va donc détruire toutes leurs armes et placer cet homme sous haute protection.
Tous soupirèrent de soulagement sauf un chien qui semblait quelque peu nerveux.
_ Bien sûr, celles des innocents sont gardées dans un autre lieu tenu secret, dit le jeune sorcier en adressant un clin d'oeil discret à Patmol.
L'animagus eut l'air d'être soulagé, lui aussi.
_ Mais comment vont-ils savoir qui sont les innocents et qui..., commença Hagrid.
_ Je l'ai rêvé. Et tous mes rêves sont réels maintenant, informa Harry. Tous ceux enfermés à Azkaban à ce jour sont coupables de meurtres. Ils sont tous des mages noirs qui ne tarderont plus à manifester leur puissance ravivée.
Le groupe resta silencieux. Seule le tic-tac de la grande horloge résonnait dans la pièce, comme un compte à rebours entamé. Puis, comme s'ils avaient tous besoin d'un peu de temps pour assimiler tranquillement les informations, le demi géant prit le pichet.
_ Encore un peu de thé?
La journée se déroula rapidement. Harry s'était rendu dans le bureau de Mac Gonagall pour y déposer son dossier d'inscription à Combat avec Armes Magiques et Sports Moldus _ il n'en avait pas reparlé avec ses amis de peur de retomber dans un désaccord_ et allait maintenant dîner dans la grande salle. La fatigue était plus présente que jamais d'avoir passé une nuit blanche. Ses yeux semblaient avoir été remplacés par d'énormes poches où s'empilait continuellement du sable. Malgré tout, il tenait à rester éveillé jusqu'au bout de la soirée. Alors qu'ils s'installaient à la table des Gryffondor, Dumbledore s'approcha du jeune sorcier.
_ Ta baguette Harry, lui dit-il en la lui donnant.
_ Merci Professeur.
_ Je tiens à te dire que Mr Fudge, malgré sa nervosité de ce matin, a récupéré assez de son calme pour te faire parvenir par mon intermédiaire ses plus sincères excuses. Quant à moi, je ne peux assez te remercier pour... ton aide.
Le professeur se retenait de lui parler trop explicitement les initiatives tardives de Fudge autour d'une foule d'élèves.
_ Je te rends donc ton oeil de faucon. Très spéciale, cette conversation, fit-il dans un clin d'oeil.
Il se tourna vers l'ensemble de ses camarades.
_ Bon appétit.
Des murmures de remerciement timides se firent entendre. Il était toujours impressionnant que le Directeur leur adresse personnellement la parole. Après son éloignement, ils commencèrent à manger. Les discussions allaient de bon train, contrairement au repas de midi où les élèves avaient une nouvelle fois parlé dans des chuchotements, des coups d'oeil à la volée vers le jeune sorcier. Mais ce soir, ils semblaient tous enthousiastes.
_ J'ai raté quelque chose?, demanda Harry, ayant la désagréable impression d'avoir manqué l'annonce d'un événement important qui allait se produire bientôt.
Pour toute réponse, Ron et Hermione eurent un sourire qui disait qu'ils en savaient plus que lui mais qu'ils ne révéleraient rien.
_ Tu verras plus tard, dit mystérieusement son ami.
Harry eut beau essayer leur tirer les vers du nez avec des "Allez!..." insistants et des "S'il vous plaît!..." suppliants sans oublier les "Un indice, juste un!", rien n'y fit. Ron et Hermione demeuraient interdits. Abandonnant, le jeune sorcier soupira et aborda un autre sujet.
_ Vous savez quels sont les noms et les matières des différents professeurs maintenant?
_ Oui, la dame minuscule à côté de Flitwick enseigne l'Anglais pour ceux qui ont un peu de mal à se familiariser avec la langue, renseigna Hermione. Elle se nomme Mlle Tambouille.
_ Le gorille enseigne la Défense contre les Forces du Mal pour les élèves de Beauxbâtons et... du Tibet, je crois. Ca ne doit pas être très efficace. Ils sont pour la paix absolue là-bas. Pas question de riposter. C'est quoi déjà son nom, Hermione?
_ Mr Strikken.
_ Il y a des élèves du Tibet?, questionna Harry, étonné.
_ Oh oui, mais ils sont peu. Des élèves proviennent même du Canada, des Etats-Unis, et deux ou trois d'Afrique. Certains partageront des cours avec nous, informa Hermione. Parfois, leur programme est semblable au nôtre alors... Pour ce qui est de l'homme grand et blond, reprit-elle, il s'appelle Mr Infly et donne des cours d'enchantement.
_ La femme qui semble être une de tes fans, ajouta Ron, amusé, est un professeur de musique, Mme Euterpe.
Harry regarda la femme qui, tout comme la dernière fois, détourna les yeux de lui. Elle avait une coiffure et des vêtements excentriques qui rappelaient vaguement des instruments. Sa robe avait des boutons assimilables aux trous d'une flûte et ses longs cheveux tenaient, par on ne sait quel miracle, en forme de harpe.
_ Celui qui est vieux et qui dort toujours enseigne...
_ Ne m'en dit pas plus, Ron. Je parie que c'est l'histoire de la magie, coupa Harry, sûr de lui.
Ron pouffa de rire. Hermione eut l'air stupéfaite.
_ Comment as-tu deviné?, demanda-t-elle.
Mais les rires de Ron qui redoublèrent suffirent à la jeune fille à saisir l'humour des garçons. Elle fronça les sourcils.
_ L'histoire de la magie n'est pas une matière ennuyeuse, défendit-elle.
Ron ne reprit pas un air sérieux pour autant. Sentant que la bataille était perdue d'avance pour les convaincre de son point de vue, elle préféra continuer les présentations.
_ Ce monsieur s'appelle Morphéos. La harpie, dit-elle avec une grimace de répulsion, fait dans la divination.
Maintenant que Hermione l'avait renseigné, cela lui paraissait évident. La laide femme s'appuyait sur une canne au bout de laquelle était placée une sorte de boule de cristal.
_ C'est Melle Grée, c'est ça?, questionna Ron.
La jeune fille approuva silencieusement. Le garçon roux esquissa un petit sourire.
_ Elle doit avoir du mal avec son troisième oeil, déjà qu'il lui en manque un deuxième...
Hermione et Harry, qui auraient du sentir un minimum de compassion pour la harpie, ne purent réprimer un éclat de rire.
_ Tu devrais lui prêter le tien, Harry.
Et leurs rires ne firent que se prolonger. Un fois véritablement calmé, Harry dévisagea les quatre professeurs restants, ceux qu'il n'avait pas eu le temps d'observer le soir de la rentrée, exceptée la jeune femme. Mais à ce moment-là, Dumbledore fit tinter son verre pour restaurer le calme et écouter ses prochaines paroles. Hermione se pencha vers Harry et murmura à toute vitesse:
_ Là, Lord Rodard, magie noire, Duckeens, botanique, Maddy, soins aux créatures magiques et Lyth, défense contre les forces du mal... la nôtre.
Harry observa la jeune femme qui serait leur nouveau professeur mais son regard se détacha vite d'elle pour se poser sur Dumbledore.
_ Bien, comme vous vous en doutez, cette année, le tournoi de Quidditch nécessitera une plus grande organisation: huit équipes s'opposeront à partir de fin Septembre.
Huit équipes! Fin Septembre! Harry n'en revenait pas. Chaque année, les matches débutaient en hiver, le temps de trouver de nouveaux remplaçants, se réentraîner et créer un esprit d'équipe. Le tournoi serait marqué par la précipitation, sans aucun doute.
_ Le nombre des équipes n'est pas définitif, l'organisation des matches non plus. Nous préférons cependant vous avertir de l'hypothèse à venir la plus probable: deux équipes attribuées à chaque maison dont chacune adoptera un nom différent. Libre à vous de choisir lequel. Les sélections des membres manquants se feront dans le mois. Je conseille en outre à chacune des maisons d'élire au moins un de leurs deux capitaines parmi les anciens au plus tôt. Si, pendant le repas, il semblerait qu'un accord unanime ait lieu sur le choix du nouveau dirigeant, nous vous prions de bien vouloir nous en informer. Nous reparlerons de l'organisation des matches dans deux semaines. Il est évident que les huit équipes ne pourront pas toutes se rencontrer durant l'année. Nous vous expliquerons par conséquent deux alternatives établies par les professeurs et moi-même. Ce sera tout pour le moment. Merci.
Quelques applaudissements enthousiastes se firent entendre et aussitôt les élèves retournèrent dans leurs discussions. Fred, George, Katie et Alicia vinrent entourer un Harry un peu surpris.
_ On te veut pour nouveau capitaine, annonça directement Fred. On est tous d'accord.
_ Pardon?, fit Harry, stupéfait à présent.
_ Cherche pas, tu es capitaine, point final, dit Georges.
_ Oui, si Fred l'était, il faudrait George aussi. On ne peut pas promouvoir l'un sans l'autre!, expliqua vivement Alicia.
_ Quant à nous deux..., commença Katie.
Elles se regardèrent, souriantes, et comme si elles avaient des idées en tête:
_ Noon!, firent-elles sur un ton exagéré.
_ Et pourquoi pas?, questionna Harry.
Bien qu'il soit peu à peu entraîné vers une joie intense à l'idée de devenir capitaine, Harry en voulait connaître les véritables raisons.
_ Eh bien, pendant ton absence, nous avons eu des échos, commença Alicia.
_ Des échos des Serpentard, expliqua Katie.
_ Et tu sais combien il est important pour nous d'entretenir de bonnes relations avec leurs équipes, ajouta Fred.
_ D'excellentes relations, continua George en hochant la tête en signe d'approbation.
_ Et que nous ferions tout par conséquent pour leur plaire, poursuivit Katie.
_ Surtout quand on apprend que Malefoy va certainement devenir leur nouveau capitaine, informa Alicia.
_ Nous nous devons de le féliciter, dit Fred d'un ton solennel.
_ Et quoi de plus réjouissant pour lui que ta promotion?, proposa George.
_ Attendez, attendez!, coupa Hermione. Vous l'élisez... pour faire enrager Malefoy?
Fred prit un air outré, la main sur le torse.
_ Bien sûr que non! Nous l'élisons parce qu'il prend des initiatives...
_ ... innove à chaque fois..., continua Katie.
_ ... nous fait gagner tout le temps..., poursuivit Alicia.
_ ... a le don incroyable d'attraper le vif quitte à se suicider..., ajouta George.
_ ... et pour faire enrager Malefoy!, finit Fred sur un ton de victoire.
Ron et Hermione éclatèrent de rire devant leur petit jeu, commençant à aimer l'idée du petit tour joué à Malefoy. Harry, pour sa part, avaient les joues en feu devant la tonne de compliments qui se déversait sur lui.
_ Tu n'as pas d'autre choix que d'accepter, dit George sur un ton sentencieux.
_ C'est d'accord, bien sûr, répondit timidement Harry.
_ Super!, s'exclamèrent les jumeaux.
_ Je vais le dire à Mac Gonagall, annonça Alicia en se levant.
_ Non!, répliqua précipitamment Harry, provoquant l'étonnement de tous. Je veux dire... Pourquoi maintenant?
_ Que veux-tu dire?, lui demanda Katie.
_ Mac Gonagall est pour la discrétion absolue quand il s'agit de garder secret nos stratégies, expliqua Harry. Vous vous rappelez pour mon Nimbus 2000... Or, déclarer publiquement qui est le capitaine donne des indices aux autres équipes sur la façon dont la notre va être entraînée...
Il se sentait gêné d'intervenir aussi directement après sa promotion. Mais cette opportunité ne devait pas lui glisser entre les doigts.
_ Tu veux dire qu'elle n'annonce à personne que tu es notre capitaine?, dit George en plissant les yeux pour mieux cerner la tactique du jeune sorcier.
_ Ce sont nos directeurs de maison qui doivent être au courant. Uniquement eux, affirma Harry.
_ Harry a raison, approuva Hermione. Votre capitaine influence votre entraînement. Le premier travail d'une équipe pour espérer la victoire est de connaître les points forts et les points faibles des adversaires.
_ En ne révélant rien, ils ne pourront pas savoir nos tactiques, poursuivit Harry.
Il ajouta d'un air sournois:
_ Je n'ose imaginer la tête que Malefoy ferait si son équipe était la première contre laquelle nous jouions lors de l'annonce de mon titre sur le terrain, juste avant de commencer le match...
Les visages de ses amis s'éclairèrent.
_ Oh oui..., souffla Ron. N'oublie pas ton oeil de faucon sur jour-là...
_ Eh! Regardez!, coupa Hermione. Malefoy s'est levé!
En effet, le jeune Serpentard se dirigeait fièrement vers la table des professeurs pour parler avec Rogue.
_ Je suis sûre qu'il veut que tout le monde voie qu'il a été choisi à l'unanimité, dit Katie avec dégoût.
_ C'est surtout qu'ils ont été obligés de voter pour lui, poursuivit Harry sur un ton haineux, regardant Malefoy parader. Son père écrirait à Dumbledore sinon...
Comme si Dumbledore les craignait..., se dit-il en levant intérieurement les yeux au ciel.
_ Mac Gonagall t'attend, on dirait, souligna Ron en s'adressant à son ami. Elle souhaite peut-être que tu refermes la grande bouche de Malefoy en montrant que toi aussi, tu as été élu à l'unanimité.
_ On peut dire qu'elle sait combien Malefoy t'apprécie, ajouta Hermione.
_ Eh! Viktor Krum s'est levé aussi à la table des Poufsouffle!, s'exclama Alicia, le teint virant au blanc.
_ C'était prévisible..., murmura Ron, déglutissant difficilement. Ils ne le connaissent peut-être pas à Poudlard, mais si quelqu'un doit être capitaine, c'est bien lui...
_ Tu as un adversaire de taille, Harry, souffla Fred.
Harry ne répondit rien. Pour lui, il était certain que la Coupe de Quidditch pour sa première année en tant que capitaine lui filerait entre les doigts. Mais une autre pensée l'obstinait: qu'importe qu'il perde ou gagne face à Krum, il allait jouer contre le plus grand attrapeur mondial. Combien de personnes pouvaient dire avoir eu une expérience aussi unique en son genre?
Alors que Krum donnait l'avis des Poufsouffle à Mme Chourave, tous les élèves le fixaient. Ses camarades de la même maison se dressaient orgueilleusement et ceux de Serdaigle, Gryffondor ou Serpentard étaient tétanisés à l'idée de le combattre.
_ On est mort, murmura Ron.
_ Ouh, Ron, tu sais que tu encourages beaucoup Harry, là, ironisa Hermione.
_ Sans rire, on ne peut viser que la deuxième place, répondit-il, abattu moralement.
_ Mac Gonagall t'attend toujours Harry, remarqua Alicia.
En effet, le professeur de métamorphoses semblait prier intérieurement que Harry lui donne un avis unanime, les regards narquois de Rogue et Chourave lui devenant insupportables. Finalement, elle décida de s'avancer vers la table des Gryffondor.
_ Alors, vous avez du mal à vous décider?, leur demanda-t-elle, en s'asseyant à une place libre.
Il était évident qu'elle aurait voulu que ce ne soit pas le cas. Mais elle semblait résignée.
_ Non, pas du tout, répondit Katie.
_ Nous avons choisi Harry, informa Alicia.
Le visage de Mac Gonagall s'éclaira. Cependant, elle eut un regard étonné.
_ Mais pourquoi ne m'en avez-vous rien dit?
_ Eh bien, comme nous l'a expliqué notre nouveau capitaine, dit fièrement George, pour embrouiller les autres équipes.
_ Pardon?, fit une Mac Gonagall à l'air incrédule.
_ Pour résumer, disons simplement qu'en ne connaissant pas l'identité de notre dirigeant, ils ne connaîtront pas nos techniques, ou notre façon de nous préparer aux matches, expliqua Fred.
_ Il s'agit d'une nouvelle arme secrète: créer la confusion, finit Katie.
Mac Gonagall n'aurait pas pu paraître plus fière de sa maison.
_ Je ne m'attendais pas du tout à ça, avoua-t-elle. Toutes mes félicitations pour ce nouveau poste, Potter.
_ Merci, Professeur.
_ Je ne lâcherai pas votre nom publiquement. La surprise sera trop belle, ajouta-t-elle en créant un étonnement général.
Les Gryffondor restaient perplexes: leur directrice devenait presque sournoise quand il s'agissait de gagner au Quidditch. Mac Gonagall, l'air aux anges à l'idée de rabattre le caquet de ses collègues ultérieurement, se leva pour rejoindre sa place auprès de Dumbledore.
_ Ca va être dur de tenir sa langue, dit Alicia. Qui n'a pas envie de dire à quelle point notre équipe est brillante?!
_ Je suis d'accord avec toi, répondit Katie. Les autres Gryffondor vont nous faire légèrement la tête. Ils vont dire qu'on ne leur fait pas confiance, mais il ne faut absolument pas de fuites.
_ Ou de belles grosses fuites, au contraire, compléta Harry.
_ Quoi?!, fit le groupe en même temps.
_ Mais je croyais..., bégaya Fred, éberlué.
_ De fausses fuites, expliqua Harry. Vous pouvez toujours dire que vous êtes capitaines. Ils s'entraîneront selon un mauvais fondement.
leurs visages laissaient place à l'ébahissement.
_ D'accord, dit Ron. Dîtes-nous qui vous êtes et qu'avez-vous fait de Harry?!
Le reste du groupe éclata de rire.
_ Depuis quand tu es devenu aussi... perfide?, demanda Ron, ne revenant toujours pas de tous les complots que son ami établissait.
_ Depuis que Malefoy a paradé dans l'allée. Son orgueil m'exaspère au plus au point, déclara Harry.
_ Il promet en tant que capitaine, souffla Fred à George.
_ Bon alors, vous avez compris, résuma Hermione, tandis que Roger Davies s'avançait dans l'allée; sa nomination s'étant déroulée trois ans auparavant, aucune surprise n'était au rendez-vous.
_ Qui est le capitaine de l'équipe de Gryffondor?, demanda-t-elle, souriante.
_ MOI!!, s'exclamèrent ensemble tous les joueurs dans un flot de rires.
_ Harry, va te coucher! C'est la quarantième fois au moins que tu bailles!, dit d'un air désespéré Ron.
_ Il a raison, murmura Seamus, tu as une de ces têtes...
A part Ron, Hermione et le groupe de Quidditch, trop excité au sujet des matches à venir pour repenser aux événements de la journée, les autres camarades de Harry semblaient fournir un effort surhumain pour reparler normalement à Harry.
Le jeune sorcier ne répondit rien. Il était neuf heures et la fatigue menaçait d'avoir raison sur son sommeil d'une minute à l'autre. Il se mit dans son lit malgré lui. Il ne s'endormirait pas. Ou plutôt, il ne voulait pas s'endormir. Peut-être ne se rappellerait-il pas de ses cauchemars, comme pour la plupart du temps, mais les sensations qu'il éprouverait au réveil seraient plus que dérangeantes. A contre coeur, il ferma les yeux.
Et les rouvrit. Harry ne comprit pas tout de suite pourquoi il se sentait aussi... en forme. Voldemort se rapprochant... Il discernait dans sa bouche comme un drôle de goût, comme s'il avait avalé une des potions de Mme Pomfresh. Des hurlements provoqués par l'Endoloris... Il se mit en position assise, les paupières encore un peu collées. Il réalisait qu'il ne se souvenait plus de ses cauchemars ou presque (quelques images réapparaissaient parfois) quand il aperçut avec surprise autour de son lit Dumbledore et Mme Vivebien. Ses camarades, dans le dortoir, dormaient profondément, enroulés dans leurs draps froissés.
_ Professeur? Mme Vivebien? Que faîtes-vous ici?, s'étonna le jeune sorcier.
Le Directeur analysa avec étonnement la réaction du jeune sorcier.
_ Apparemment, tu ne te souviens de rien, constata Dumbledore dans un chuchotement.
Il ne voulait pas réveiller les autres élèves.
_ Me souvenir de quoi?, continua Harry dans un murmure, perplexe.
Neville poussa un beau ronflement.
_ De quoi te rappelles-tu Harry?, fit le professeur, les sourcils froncés.
_ De m'être endormi... et réveillé, dit-il en sentant sa réponse profondément ridicule.
Il devait être quatre heures du matin. Que pouvait-il s'être passé encore qui ait nécessité leur déplacement?
_ Tu dors toujours ainsi?, poursuivit Dumbledore, le visage interdit.
_ Oui, acquiesça le jeune sorcier, voyant de moins en moins ce qu'il se cachait sous ses propos mystérieux, ou plutôt voulut voir de moins en moins, comme à son habitude.
_ Dans ce cas Mme Vivebien, vous pouvez commencer à préparer des provisions de potion novox, conseilla le professeur à l'infirmière, en soupirant presque imperceptiblement.
_ Pourquoi? Est-ce que... je parle dans mon sommeil?, demanda-t-il, quelque peu désorienté.
Il connaissait la mixture pour avoir commencé à lire plus attentivement les cours de potions de sixième année. Cependant le regard triste de l'infirmière lui fit pressentir le pire.
_ Est-ce que... je crie?
Son teint blanchit devant Mme Vivebien qui l'évitait.
_ Tes camarades sont allés prévenir le professeur Mac Gonagall dans ses appartements hier soir. Tu criais dans ton sommeil. Mme Pomfresh a tenté de te réveiller, en vain, et a donc fini par te donner de cette potion pour que tes amis puissent dormir, malgré tout. Les autres remèdes contre la douleur se sont révélés inefficaces, même celle du sommeil sans rêves, ce à quoi je ne m'attendais guère. Je ne te cache pas que tes amis ont été quelque peu affolés. Nous nous sommes ensuite relayés à ton chevet pour être là quand tu arrêterais d'essayer de hurler et de s'assurer de ton état de santé à ton réveil.
_ Ooh... Merci, dit Harry, ne sachant pas quoi dire, sous le coup de l'émotion. Je vous assure que je vais bien... maintenant.
_ Je vous laisse une gourde de potion ici, pour les nuits à venir, jeune homme, informa Mme Vivebien. Une cuillerée pour une heure. Donc, trois cuill...
_ C'est inutile, coupa Harry tandis que l'infirmière s'apprêtait à lui préparer une dose. Je me lève.
Mme Vivebien haussa les sourcils de surprise.
_ Mais, il n'est que quatre heures...
_ Ne vous en faîtes pas Viviane, rassura Dumbledore, Harry se sent parfaitement en forme.
L'infirmière regarda Dumbledore, Harry puis encore Dumbledore, l'air étonné.
_ Bien. Si vous le dîtes...
Elle reprit ses affaires et sortit du dortoir.
_ Je suppose qu'il va te falloir une permission pour te promener la nuit, Harry. Tu ne voudrais pas rester enfermé dans une chambre où tout le monde dort... Excepté Patmol.
Harry se tourna. Patmol, au pied du lit, était resté silencieux jusqu'ici, l'observant.
_ Inutile de te dire que ton compagnon était plus que soucieux...
Harry sourit à l'animagus. Ses cris devaient l'avoir profondément angoissé pour qu'il reste ainsi éveillé. Mais Harry savait à quel point ils étaient déchirants. Seulement, il n'osait se l'avouer. Dumbledore fit apparaître un mot signé à son nom sur le lit du jeune sorcier.
_ Merci, Professeur, murmura Harry.
Le directeur sourit avant de prendre le chemin de la sortie dans un silence majestueux. Harry tourna alors la tête vers Patmol.
_ Tu veux te promener avec moi?
Habillé et lavé, le jeune sorcier entreprit une marche nocturne en compagnie de Patmol dans les profondeurs de Poudlard. Il souhaitait lui montrer le mot des Maraudeurs et la salle de duel qu'il avait découverte. Sirius avait reprit forme humaine, loin des regards curieux des internes au collège, et lui avait conté les aventures qui s'en rattachaient. Elles étaient étrangement semblables à ce qu'avait imaginé Harry. Parvenus à la salle, Sirius étouffa des exclamations d'admiration, ébloui par sa beauté et sa superficie. Harry dut se résoudre à attendre quelques minutes avant que son parrain ne s'arrache de sa contemplation. Ils s'assirent sur des matelas, face à face d'un à deux mètres, et restèrent un moment silencieux, appréciant simplement d'être là, un peu en "famille", sans fausse apparence. Cependant, les inquiétudes que Sirius gérait à l'égard de son filleul depuis son arrestation surgirent de son mutisme, incapable de les garder cachées plus longtemps. Harry s'y était attendu. Il l'avait lu dans son regard impatient.
_ Es-tu certain de ne te rappeler de rien, Harry?, demanda subitement Sirius d'une voix quelque peu tremblante.
Le jeune sorcier ne fit même pas semblant de faire croire qu'il ne savait pas de quoi son parrain parlait. Le regard parcourant la salle sans la voir, il répondit:
_ Non. Enfin si... Je ne le sais pas moi-même.
Il disait ses pensées à haute voix, exerçait sur lui une introspection dont Sirius était témoin. S'il devait parler à coeur ouvert, ce serait avec lui, un membre de sa famille.
_ J'ai comme des flashs au réveil, des souvenirs d'eux. Ils s'effacent rapidement parce que je ne veux pas les voir. Je me refuse à les garder en tête. Au début de l'été, ils ne partaient pas avant quelques minutes... malgré tous mes efforts. Peut-être que peu à peu, ma volonté a eu raison d'eux. Je ne m'en rappelle plus. Si je le voulais, il faudrait que je me concentre... mais comme je ne le veux pas... ils disparaissent. Seul un événement important m'obligerait à m'en souvenir je pense... C'est mon subconscient qui doit me le faire savoir... Mais la plupart du temps, à mes réveils, je m'interdis de me les remémorer...
_ Tu vois toujours par Voldemort?
Dumbledore l'avait tenu au courant de sa discussion, cet été. Harry acquiesça silencieusement.
_ Ton don de sensibilité ressort davantage depuis son retour, dit Sirius, perdu dans ses songes.
_ Mon don?, s'étonna Harry.
Sirius hocha la tête en signe affirmatif.
_ Ta mère avait le don de sensibilité. Ils étaient une dizaine à le posséder dans le monde, dont Arabella Figg. Elle te l'a transmis. C'est ce qui explique l'intensité de tes cauchemars, du moins c'est ce que je pense. Ce don n'est pas obligatoirement héréditaire, comme beaucoup d'autres.
Soudain, une pensée traversa l'esprit de Harry.
_ Sirius... Quand j'ai été transporté à Azkaban...
Son parrain pâlît. L'idée que son filleul y ait passé un séjour l'emplissait d'une peine intense. Il aurait aimé connaître tous les détails de sa capture, songeait à son évasion (il avait du s'enfuir durant un duel, comme le dernière fois, pas pendant son emprisonnement à côté des Détraqueurs...). Cependant, il ne voulait pas obliger Harry à raconter quelque chose dont il n'avait pas envie... lui-même ne le faisait que rarement.
_ Les Détraqueurs, et je pense le rapprochement de Voldemort aussi... Tu connais les effets de ses créatures sur moi, n'est-ce pas?
_ Oui, Lunard m'a raconté, dit simplement Sirius, avide de savoir la suite.
_ Eh bien, je crois que leurs présences simultanées expliquent que j'ai vu l'intégralité des événements de la nuit où j'ai eu cette cicatrice.
Harry marqua une pause pour laisser le temps à Sirius d'assimiler la nouvelle. Son parrain ouvrit les yeux de stupeur et d'effroi.
_ Tu as... tout vu?, lui demanda-t-il d'une voix étranglée.
_ Oui, et au commencement, avant que Voldemort n'arrive, ma mère était très nerveuse. Tu crois qu'elle pressentait ce qui allait arriver?, questionna-t-il dans un murmure.
_ C'est possible, en effet. Elle a pu ressentir un grand danger, mais rien de plus, dit Sirius, essayant de reprendre un minimum de contenance. Ce don ne se commande pas et est très peu maîtrisable. Il ne peut malheureusement pas être très clair.
_ Elle..., commença difficilement Harry, tentant de se remémorer ses souvenirs douloureux, elle écrivait. Elle a fait transmettre un message par hibou avant que Voldemort ne vienne. Tu sais à qui il aurait pu être destiné?
_ Non, je n'en ai aucune idée, songea Sirius, le regard vide. Nous pouvons toujours demander à Dumbledore ou Lunard...
Harry continuait de penser à cette fameuse nuit, les détails affluant dans son cerveau. Une boule se formait dans sa gorge.
_ Mes parents étaient désarmés quand il est venu..., souffla-t-il.
Son parrain reperdit toute couleur.
_ C'est impossible, ils ne se séparaient jamais de leurs baguettes, dit-il, l'air ahuri.
_ C'est ce que je pensais. Dans ce cas, pourquoi en étaient-ils dépourvus ce soir-là?
Les dos voûtés, ils semblaient abattus.
_ Pettigrow..., murmura Sirius avec dégoût.
Devant l'air interrogateur de Harry, il entreprit de s'expliquer:
_ Tous les sorciers cachent leurs précieuses baguettes, tu le sais. Une de nos plus grandes peurs est d'en être un jour démuni... Nous, nous les rangions devant tout le monde, dans notre petit groupe. Je savais où Lunard, Peter, James et Lily les dissimulaient comme eux pour la mienne. Peter a du s'en emparer discrètement peu de temps avant l'attaque, dès que James serait sorti avec Lily et toi...
Ils restèrent silencieux, tentant de gérer de leur mieux leur haine commune envers le traître de rat.
_ Tu sais ce qu'il m'a dit, Voldemort, quand il s'est approché de moi?, dit Harry dans une grimace.
Tous ses lâches le répugnaient. Sirius fit "non" de la tête.
_ Il m'a chuchoté qu'il se devait de suivre la tradition, avoua-t-il en serrant les dents.
Son parrain eut une expression d'incompréhension.
_ La tradition, répéta Harry, la colère prenant place à la peine.
_ J'ignore ce qu'il voulait dire par là, murmura son parrain, plongé dans ses réflexions.
Le jeune sorcier s'efforça d'oublier sa haine croissante en pensant à autre chose. Il n'allait pas s'énerver contre Sirius alors qu'il ne s'était pas révolté face au tueur lui-même! Il respira lentement alors que Sirius réfléchissait, en vain apparemment, puis reprit:
_ Rémus est parti à Alkilan?
Son parrain, pris au dépourvu par le changement flagrant de sujet, répondit:
_ Oui, malgré lui. Il était comme fou à l'annonce de ton arrestation. Il pensait aux Détraqueurs... Je pense qu'il serait allé tuer Fudge de ses mains si sa raison ne lui avait pas ordonné de me retenir, moi, de faire un massacre... J'ai profité du repas de midi, hier, pour porter un message à la volière, tant que tous les élèves mangeaient... Il devrait sûrement revenir ces jours-ci te revoir. En tout cas, cela ne m'étonnerait pas de sa part... Dumbledore lui a demandé de continuer son travail. Il lui a confié qu'il n'hésiterait pas à le joindre s'il avait besoin de son aide. Mais contre Fudge, personne ne peut vraiment quelque chose...
_ Il est de notre côté maintenant. C'est l'essentiel, rassura Harry.
Ils restèrent un moment silencieux, pensant aux événements qui se produiraient probablement dans les prochains mois. Puis, Sirius, ressentant quelques crampes aux jambes à force de rester assis, se leva. Il jeta quelques coups d'oeil à la pièce et dit:
_ Tu sais Harry, si tu te réveilles chaque matin aussi tôt, nous avons du temps de libre pour nous deux. Que dirais-tu si je t'apprenais quelques trucs dans cette salle?, proposa-t-il.
Le visage de Harry s'éclaira.
_ Vraiment? Tu voudrais? Mais... Et toi? Tu as besoin de repos, non?
_ Je dormirai pendant tes cours. Ne compte pas sur moi pour t'accompagner en Potions...
Harry rit doucement.
_ Bien. Alors, viens ici que je t'explique, commença Sirius, un enthousiasme grandissant.
Le jeune sorcier se leva vivement et son parrain prit un ton professoral.
_ Je ne vais pas t'enseigner des sorts ou charmes que tu apprendras en cours. Ce à quoi tu vas être confronter ici sont les quatre éléments.
Devant l'air interrogateur de Harry, il poursuivit:
_ James et moi nous sommes intéressés à cette initiation hors programme parce que les quatre éléments nous entourent en permanence. Que tu sois prisonnier dans une salle vide n'affaiblit pas tes défenses si tu sais les maîtriser. Ici, aucun objet n'est à ta portée, et pourtant, l'air est présent. En recourant à ces techniques, tu peux t'en servir comme un précieux allié. Apprends à les contrôler et tu ressentiras les ondes magiques qui t'environnent. A Poudlard, elles sont très faciles à repérer. En percevant ces ondes et en les manipulant, tu contrôles bien mieux ta magie. Le problème est que cet apprentissage doit être quotidien. C'est ce qui rebutait la plupart des autres élèves, parfois trop fatigués pour travailler deux heures par jour en plus de leur travail scolaire. Lunard ne pouvait pas: ses métamorphoses de pleine lune le rendaient trop faible pour poursuivre l'entraînement durant ces périodes.
_ C'est pourquoi vous étiez les deux meilleurs élèves de Poudlard, mon père et toi, conclut Harry.
_ J'ignorais que tu savais que nous avions un bon niveau. Enfin..., dit Sirius en haussant les épaules.
Il fit un petit sourire et...
_ Maintenant, assis-toi, respire un bon coup et écoute les professionnels te guider.
