Chapitre Trois : The Cosy Little Nest (23/08/2003)

– CHAPITRE TROIS –

The Cosy Little Nest

Rook se redressa dans son lit, sa première réaction étant d'afficher l'air le plus froid et distant qu'il put. Blaise l'avait ignoré tout l'été… Mais il se rappela alors que ce n'était pas de la faute du petit garçon mais bien celle de Dobby et sa rancune fondit aussitôt. Blaise était resté sur le pas de la porte, indécis. Rook reconnut la petite expression misérable qu'affichait d'ordinaire celui-ci quand il avait peur d'être rejeté.
'Bonjour Blaise…' fit-il avec un léger sourire, de son ton le plus avenant et amical.
La petite voix flûtée murmura un timide salut en retour. Blaise avait baissé les yeux et semblait étudier attentivement les lattes du plancher. Rook se tut. Le petit brun en avait visiblement gros sur le cœur, mais semblait ne pas savoir comment commencer. Il est sûrement en colère contre moi, pensa Rook avec regret. Parce qu'il n'a reçu aucune réponse de ma part…
'Tu… tu m'en veux ?' lâcha cependant finalement Blaise d'une toute petite voix, prenant Rook complètement au dépourvu.
Le brun haussa les sourcils. Lui en vouloir ? Mais pourquoi ? Un instant il se demanda si Blaise lui avait vraiment écrit cet été, et si l'interception de son courrier par Dobby n'avait été qu'une coïncidence… Mais il se rappela avoir remarqué au moins une lettre dont les pattes de mouche indiquant le destinataire avaient clairement été tracées par Blaise. Alors… ?
'Pourquoi devrais-je t'en vouloir ?' demanda-t-il, un peu inquiet.
Son regard croisa celui vibrant de Blaise. Le petit garçon hésita, puis finit par lâcher le morceau.
'J'ai écrit plusieurs fois pour t'inviter et… tu n'as pas répondu.'
La dernière phrase avait été prononcée tout bas, presque indistinctement, comme s'il craignait que Rook puisse prendre ça comme un reproche. Après tout, il ne pouvait pas reprocher à Rook ne pas vouloir aller chez lui… D'après le peu que son ami lui en avait raconté, sa famille provenant d'une longue lignée de sorcier, et il habitait un immense château, probablement étaient-ils aussi très riches… Qui voudrait quitter un endroit aussi confortable pour l'humble petite maison d'un modeste employé du Ministère ? Qui voudrait seulement passer l'été avec un petit garçon brun et pleurnicheur, toujours le nez fourré dans ses livres et…
'J'aurais été vraiment ravi d'accepter ton invitation…'
Blaise releva le nez, n'osant croire en ce qu'il avait entendu. Mais Rook lui souriait.
'Seulement, pour faire court,' reprit celui-ci,' je n'ai pas reçu tes lettres. Ni les tiennes, ni celles de quiconque d'autre…'
'C'est vrai ?' s'exclama Blaise, ravi. 'Mais c'est formidable !!'
Mais il se rattrapa vite, semblant se rendre compte que ce qu'il venait de dire pouvait être mal interprété.
'Je veux dire… c'est chouette que tu veuilles bien venir à la maison. Mais c'est bizarre pour les lettres… Comment ça se fait… ?'
'Je vais tout te raconter, promis. Ets-ce que je m'habiller d'abord et prendre mon petit-déjeuner ?'
'Bien sûr, je vais te laisser… Maman est en bas, tu n'as qu'à nous rejoindre.'
Rook arqua un sourcil.
'On était inquiet pour toi…' se crut obligé d'expliquer Blaise. 'De n'avoir aucune nouvelle, je veux dire. Et puis ce matin, à peine arrivé au bureau, papa nous a envoyé un message. Il a dit que tu venais d'arriver et que tu avais reçu un avertissement du Ministère cette nuit pour avoir fait de la Magie…'
'Ce n'était pas moi…' fit Rook en se renfrognant. 'Je t'expliquerais…' ajouta-t-il devant l'air perplexe de Blaise.
'Ça m'étonnais aussi… Mais Maman et moi, on a décidé de venir te chercher…'
'Me chercher ? Tu veux dire… pour que j'aille chez vous ?'
'Bien sur… enfin, si tu veux toujours bien…'
'Si je veux ?! Mais c'est super !!'
La joie de Rook n'était pas feinte. Après plus de la moitié des vacances passée dans une relative solitude, l'idée de vivre chez Blaise lui semblait follement séduisante. Beaucoup plus que de se retrouver seul à nouveau au Leaky Cauldron avec rien que le vieux Tom comme l'année passée. Et le sourire qui illumina le visage du petit brun lui mit autant de baume au cœur.

*
Après une rapide toilette, Rook descendit rejoindre Blaise dans la salle. Celle-ci était déserte à l'exception d'une seule table occupée et Rook y reconnut la maman de son ami, qu'il avait entraperçue à la gare à la fin de l'année passée. Elle jetait des regards mi-intéressés mi-effrayés autour d'elle, et regardait suspicieusement un miroir qui lui avait déjà fait quelques remarques désobligeantes sur sa tenue et sa coiffure. Rook se souvint qu'elle était Muggle, mais en s'approchant, il convint que le miroir devait vraiment être difficile, ou myope, car il la trouva très jolie. Habillé très simplement d'un chemisier à fleur sur un pantalon clair, elle semblait encore assez jeune. Ses longs cheveux châtains avaient été ramenés en arrière et maintenu par une barrette. Elle avait de doux yeux bruns, avec un nez un peu pointu qui faisait se dire au jeune garçon qu'elle ne devait cependant pas manquer de caractère. Elle sourit quand il s'approcha et Rook aima son sourire.
'Madame Zabini… Je suis enchanté de vous rencontrer…'
'Tu peux m'appeler Stéphanie, Rook,' fit-elle avec un très léger accent français, alors que Rook se sentait stupidement rougir. 'Blaise nous a beaucoup parlé de toi… Charlotte mourait d'envie de te rencontrer. Assied-toi…'
Rook se rendit alors compte qu'il était resté bêtement debout. Il baissa les yeux et s'assit précipitamment, rougissant d'autant plus. Il avait dû paraître bien impoli à ainsi fixer la jeune femme ! Il remarqua, installée entre Stéphanie et Blaise, une petite fille – probablement la fameuse Charlotte – aussi brune que l'était son frère et qui le dévisageait d'un regard perçant, tout en dissimulant à moitié son visage derrière une immense tasse de chocolat brûlant.
'Bonjour Charlotte…' fit-il.
La petite fille battit des paupières mais ne dit rien, gardant ses grands yeux bruns suspicieux fixés sur Rook.
'Elle est un peu intimidée,' s'excusa Stéphanie avec un clin d'œil, et Blaise ricana. Profitant que sa mère regardait maintenant ailleurs, Charlotte jeta un regard furieux à son frère.
Tous quatre déjeunèrent de fort bon appétit et Rook raconta la stupéfiante histoire de Dobby, sans pour autant parler du prétendu complot – cela lui aurait déplu de paraître trop mélodramatique devant la maman de Blaise. Il se contenta d'expliquer que la créature avait intercepté tout son courrier, sans qu'il sache bien pourquoi, puis avait jeté ses bagages au travers du pilier… Stéphanie avait écouté les yeux écarquillés.
'Je n'ai encore jamais entendu parler d'un House-Elf se comportant de façon si bizarre. Il est vrai que nous n'en avons pas à la maison, Pietro' – Rook supposa qu'il devait s'agir là du papa de Blaise… – 's'y est toujours opposé. Et après tout qu'en ferions-nous, puisque nous avons un lave-vaisselle ?'
Rook haussa un sourcil surpris, se demandant ce que pouvait être un laafvéssaile, mais Blaise sourit et lui souffla qu'il lui montrerait.
'C'est quand même une histoire bien étrange…' murmura Stéphanie. 'Je suis curieuse de savoir ce qu'en penserait Pietro. Après tout, il s'y connaît un peu avec ces créatures. Tu reprends un croissant, Rook ? Charlotte ?'
Charlotte sursauta et cessa un instant de fixer Rook pour prendre le croissant qu'elle mouilla consciencieusement dans son chocolat. Alors qu'il terminait son propre croissant, Rook nota l'air préoccupé de Blaise.
'Je me demandais à qui pouvait bien appartenir cet House-Elf….' répondit Blaise à sa question. 'Je veux dire… bloquer tes lettres, jeter tes affaires… ça ressemble à une farce, non ?… Et il n'y a pas tant de famille que ça à posséder des House-Elves… On les trouve souvent dans des manoirs ou des châteaux et se sont souvent là les demeures de très vieilles familles de sorciers… Qui parmi eux pourrait vouloir te jouer un si mauvais tour ?'
Une idée frappa alors soudain Rook, qui comprenait maintenant où Blaise voulait en venir. Tous deux s'entreregardèrent. Un même nom semblait s'être instantanément formé sur leurs lèvres.
'Draco Malfoy.'
'Allons allons Blaise… ce n'est pas parce que ton père a eu des mots avec Lucius Malfoy qu'il faut suspecter sa famille entière de vous faire des misères…' les interrompit Stéphanie. Mais avant que Rook ait put questionner Blaise sur ce qui s'était passé entre Mr Zabini et Mr Malfoy, Stéphanie avait repris.
'Alors Rook, tu es juste de passage, ou tu restes ici jusqu'à la rentrée ?'
'… Jusque… jusqu'à la rentrée,' fit-il. Il espérait qu'on ne lui poserait pas de question. Il n'avait pas encore envie de parler de sa famille maintenant…
Stéphanie jeta un rapide regard à son fils avant de se tourner à nouveau vers Rook.
'Ça te plairait de venir à la maison… ?' demanda-t-elle gentiment.
Rook sourit immédiatement et hocha la tête.
'Blaise m'a déjà demandé. Ce serait avec plaisir, Mad…'
'Stéphanie…' l'interrompit la jeune femme.
'Sté… Stéphanie.' Et Rook enragea de se sentir à nouveau rougir.
La jeune femme se leva avec entrain.
'Bien, puisque c'est réglé et que tout le monde a fini, on va pouvoir y aller… Hélas.' Et elle eu une comique petite grimace.
'Maman n'aime pas voyager avec la Floo powder…' chuchota Blaise à l'oreille de Rook.
Après avoir réglé sa note auprès de Tom et demandé qu'on lui fasse parvenir ses bagages chez Mr et Mme Zabini, Rook rejoignit Blaise, Stéphanie et Charlotte (qui se dissimulait maintenant à moitié derrière sa mère) dans une petite pièce située au bout du couloir derrière le bar. C'était un charmant petit salon, au milieu duquel trônait une ample cheminée. Stéphanie sortit une petite urne de son sac, et la tendit à Rook. Rook prit une pincée de Floo powder ainsi que Blaise.
   'Le nom de la maison est Cosy Little Nest, Rook. Blaise va passer devant toi, tu n'auras qu'à le suivre.'
Blaise jeta sa poignée de Floo powder dans l'âtre et le feu tourna au vert émeraude, ses flammes ronflant soudain et s'élevant presque jusqu'au manteau. Baise entra dans la cheminée, cria 'Cosy Little Nest !' et disparut. Rook s'approcha à son tour, jeta sa pincée de Floo powder et s'avança franchement dans les flammes, en criant sa destination. Il se sentit soudain comme aspiré vers le sol à travers un immense tourbillon, comme de l'eau dans un évier dont on viendrait de retirer le bouchon. Il tournait à une vitesse folle, et ses oreilles étaient emplies d'un grondement assourdissant. Ce n'était pas la première fois qu'il voyageait de cette façon, même si c'était loin d'être son mode de déplacement préféré. Il se força à garder les yeux ouverts au travers des flammes vertes dansant devant lui… Plusieurs cheminées défilèrent, lui laissant entrevoir des maisons inconnues puis soudain tout s'arrêta net et il avança vivement un pied, pour atterrir presque dans les bras de Blaise. Celui-ci remontait ses lunettes sur son nez, et ses courts cheveux bruns, d'habitude impeccablement coiffés, étaient tous hérissés.
'J'adore ça…' fit Blaise avec un grand sourire, tentant de replaquer maladroitement ses mèches avec ses mains. 'Attention…'
Il tira Rook plus loin pour laisser le passage à Charlotte, qui, à peine rentrée, se précipita hors de la pièce, non sans jeter un regard aigu dans la direction de Rook. Puis Stéphanie fit son entrée. Malgré le désordre dans sa chevelure et ses vêtements un peu froissés, il la trouva tout aussi jolie…
'Vraiment, ça ne vaut pas l'autobus…' murmura celle-ci en soupirant, ramenant ses cheveux épars derrière ses épaules. Et Rook, qui n'avait jamais pris que le Knight Bus et qui ne trouvait pas celui-ci plus reposant, acquiesça cependant, simplement heureux de savoir qu'elle aussi n'aimait pas le voyage par Floo powder. La voix de Stéphanie le sortit de son songe. 'Blaise, mon chéri, tu montres sa chambre à Rook ?'
'Oh maman… et s'il veut dormir avec moi dans ma chambre, il peut, hein, m'man, dis ?'
Stéphanie soupira, puis jeta un œil aux garçons. Rook s'efforça de donner la meilleure impression possible, bien que cela ne fut pas totalement dans le but de dormir dans la chambre de Blaise…
'Seulement s'il le veut chéri, et à condition que vous ne passiez pas vos nuits à bavarder… Maintenant, montez…'
Et Blaise entraîna son ami dans les escaliers.
'Là c'est la chambre d'ami,' fit-il une fois arrivé au palier. 'Et là c'est ma chambre… tu veux… tu veux dormir où ?' demanda-t-il d'un petit air inquiet.
'Dans la même chambre que toi bien sûr…' sourit Rook, amusé. Les mimiques à moitié gênées et à moitié suppliantes de son ami lui avaient manquées. Blaise ne semblait pas avoir changé à ce niveau, peut être avait-il un peu grandi cependant… Rook suivit le petit brun dans sa chambre, notant au passage qu'une porte à l'opposé se refermait vivement sur un petit visage pointu.
'Ne te trompe pas sur cette soi-disant timidité… Charlotte est une vrai peste, quand elle veut,' fit Blaise. 'Là je crois qu'elle se contente encore seulement de t'étudier…'
'De… m'étudier ?…' fit Rook, ne sachant qu'en penser.
'Ouaip. Après, elle passera à l'attaque et te bombardera de questions. Et elle peut être très indiscrète, je te préviens… Ne te laisse pas faire !'
Rook parcourut la pièce du regard. C'était une jolie chambre aux murs peints à la chaux d'une jolie couleur claire. Une bibliothèque bondée, quelques livres épars sur le bureau, un lit impeccablement refait. Cela ne l'étonnait pas de la part du propre et ordonné petit Blaise. Il vit sur le rebord de la fenêtre ce qu'il prit d'abord pour une vieille chaussette sale, mais reconnut par après comme étant Scabbers, le vieux rat de Blaise. Celui-ci dormait, réchauffé par un rayon de soleil. Quelques cadres représentant Blaise et sa famille en vacances ou dans ce qui lui semblait être un parc d'attraction de Muggles, au vu de leur accoutrement, décoraient les murs. Certaines images bougeaient et d'autres restaient étrangement figées. Blaise lui dit que c'était normal, ces dernières ayant été prises par l'appareil Muggle de sa mère. Rook s'arrêta devant la photographie d'un jeune sorcier, dont la ressemblance avec le père de Blaise était frappante.
'C'est Matheo,' fit le petit brun. 'Mon demi-frère… Je t'ai déjà parlé de lui, hein ?'
Rook acquiesça, alors qu'en face de lui le jeune sorcier lui faisait un discret signe de la main. Matheo était le fils de la précédente Madame Zabini. Celle-ci et le père de Blaise s'étaient séparés il y avait une petite quinzaine d'année. Mr Zabini avait ensuite rencontré la maman de Blaise lors de vacances dans le sud de la France, lui raconta le petit brun.
'Papa déménagera le lit de la chambre d'ami ici quand il rentrera ce soir … puisqu'on ne peut pas faire de magie.'
'Je devrais en effet m'en abstenir…' murmura Rook, se souvenant de la lettre du Ministère. Puis, voyant que Blaise le fixait, attendant visiblement un avis : 'C'est une très jolie chambre…'
Blaise rougit de plaisir.
Rook demeura un instant songeur, avant de s'asseoir sur le bord du lit.
'Ecoute, Blaise,' fit-il, hésitant. 'Je… je n'ai pas tout dit ce matin, à propos de Dobby…'
Et il le mit au courant de l'avertissement…
Balise resta silencieux un moment. Il avait fait de grands yeux en entendant la menace du complot, mais maintenant, il paraissait plus calme.
'Honnêtement, je crois vraiment que c'est une sale blague… Ça ne m'étonnerais pas que cela vienne de Draco Malfoy, tu sais comme il te déteste… Je suis sûr qu'il a envoyé Dobby avec cette stupide histoire pour t'empêcher de revenir à Hogwarts.'
'Hm… c'est bien possible…'
Rook ne savait trop qu'en penser. Mais il était sûr d'une chose : il ne rentrerait pas chez lui, et ne mettrait jamais les pieds à Durmstrang. Tout compte fait, Blaise devait avoir raison… Ça ne pouvait être qu'une blague stupide. Le genre de blague qu'était capable de concocter un Malfoy… Cela lui rappela quelque chose.
'Au fait, que s'est-il passé entre Lucius Malfoy et ton père ?'
'Oh ça… Ils se sont encore disputés devant tout le monde dans le hall du Ministère et papa a reçu un blâme de son patron. Même s'il ne travaille pas vraiment pour le Ministère, Mr Malfoy y a ses entrées et a beaucoup d'influence… ou plutôt beaucoup d'argent, comme dit papa….'
'C'est pour ça qu'ils se sont disputés ?'
'Non, c'est au sujet des House-Elves de Malfoy… Il paraît qu'il les traite très mal et papa a horreur de ça… mais il ne peut rien faire. Et jamais Malfoy ne leur donnerait des vêtements.'
'Ton père s'occupe des House-Elves dans son travail ?' Rook se rappelait que le père de Blaise travaillait pour le Department for the Regulation and Control of Magical Creatures
'Non plus maintenant…', répondit Blaise. 'Son département est constitué de trois divisions : la Being Division, qui s'occupe des créatures magiques dont l'intelligence est telle qu'elles peuvent être assimilées aux êtres humains la Spirit Division, qui s'occupe des fantômes et autres poltergeists et enfin la Beast Division, qui s'occupe du reste. Avant papa travaillait pour l'Office of House-Elf Relocation de la Being Division, mais il a été muté après à la Beast Division, parce qu'il s'en prenait trop souvent à Lucius Malfoy…'
'Dobby ne semblait pas être très bien traité par son Maître, en effet…'
'Tu vois ? Je suis sûr que c'est bien une blague de Draco Malfoy, alors… tu ne devrais pas t'inquiéter de cela… Viens ! Je te fais visiter la maison…'
'Tu me montreras le … valésaile ?'
'La-ve-vai-sel-le… Oui bien sûr… mais je sais pas comment ça marche !!'
C'était la première fois que Rook se retrouvait dans une maison avec autant d'objets d'origine Muggle. Outre les cadres de la famille de Stéphanie, où des Muggles en drôle de costume sombre semblait figé en une éternelle grimace, il fut stupéfié devant l'antique horloge suisse à balancier. Celle-ci ne disait pas l'heure à haute voix quand on la lui demandait, elle n'avait pas d'aiguille supplémentaire indiquant le temps à l'extérieur, les graduations étaient simplement numérotées de 1 à 12 (et dans l'ordre !!), et Rook avait fini par penser que celle-ci ne produirait jamais rien de spécial comme les photographies Muggles quand l'heure pile sonna. Une petite porte s'ouvrit au sommet de l'horloge et un minuscule oiseau sorti au bout d'un ressort, clamant 'coucou coucou !'
Rook resta bouche bée devant le spectacle étrange, demandant finalement s'il s'agissait d'un vrai oiseau. Blaise tenta bien de lui expliquer que ce n'était qu'un jouet mécanique, mais fini par renoncer… Rook tapota avec sa baguette la petite porte derrière laquelle l'oiseau s'était réfugié, mais rien de neuf ne se produisit.
'Il faut attendre que la grande aiguille ait refait tout le tour du cadran pour qu'il ressorte…' fit patiemment Blaise.
'Mais il doit bien sortir pour manger, non ?'
Blaise soupira et renonça à expliquer…
Une autre surprise attendait Rook dans la cuisine. Blaise lui montra enfin le lave-vaisselle, mais aussi le grille-pain, le micro-onde et le four, le frigo et toute ces choses banales pour un Muggle mais que Rook n'avait encore jamais vu. Il n'était pas loin d'envier Blaise d'avoir ainsi la chance de découvrir tant de surprenantes choses…
'Ça lave vraiment la vaisselle ?' questionna-t-il pour au moins la dixième fois, en regardant d'un air perplexe ce qui ne lui semblait après tout n'être qu'une grosse boîte métallique blanche et lourde. 'Où est-ce qu'un House-Elf se cache dedans ?'
La matinée se passa rapidement en exploration de la maison. C'était une très jolie habitation, claire et propre, meublée simplement mais avec goût. Stéphanie était sortie un instant pour faire des courses et quand elle rentra il était prêt de midi et les garçons mouraient de fin. Il l'aidèrent à dresser la table et se régalèrent de sandwich à la charcuterie et à la marmelade. Charlotte était descendue silencieusement, le visage dissimulé dans une boule de fourrure que Rook reconnu comme étant un Puffskein. Sa mère l'obligea à le déposer à terre pendant le repas, et Rook suivit un instant avec fascination l'immense langue serpentine de l'animal fureter sous les meubles à la recherche de petits insectes et d'araignées. Charlotte ne quitta pas Rook des yeux, mais celui-ci n'y prêta plus attention. Il se souvenait avoir été semblablement dévisagé par Blaise dans le train, lors de leur première rencontre, mais le petit garçon avait rapidement fini par entamer la conversation. Il semblait cependant que Charlotte ait besoin de plus de temps pour en arriver à ce stade. Il nota qu'elle semblait beaucoup plus méfiante que son frère, son petit visage pointu lui faisant penser à une souris.
Après avoir aidé Stéphanie à ranger la table, les garçon écrivirent une longue lettre à Marius pour lui expliquer les derniers évènements. Puis ils sortirent pour jouer dehors et Charlotte les suivit discrètement. Elle avait repris son Puffskein dans ses bras et celui-ci laissait échapper un léger bourdonnement traduisant son contentement.
Le jardin était assez petit et soigné, tout entouré de hauts murs. La moitié en était occupée par un potager. Blaise emmena Rook tout au fond, où une porte était dissimulée à moitié sous le lierre.
'Je vais te montrer les animaux de papa…' fit-il d'une voix mystérieuse.
Il toucha la poignée du bout de sa baguette magique et murmura le mot de passe : Purple Bubble. La porte s'ouvrit doucement et les trois enfants se glissèrent dans l'ouverture.
'SORTEZ D'LA, SALES GOSSES !!' fusa soudain un voix rauque qui les fit sursauter. 'Vauriens !! Rastaquouères !! Allez-vous-en !!'
'Oh ça va, Barky ! Silence !' s'écria Blaise, alors que Rook voyait accourir vers eux une espèce de très gros furet. 'C'est un Jarvey, Rook…'
Rook se pencha vers le Jarvey, qui continuait à crier des insultes en un flot presque ininterrompu en leur tournant autour, l'air très fâché.
'Ils parlent toujours comme ça… pas moyen d'avoir une conversation avec eux,' fit Blaise en haussant les épaules. 'Mais on peut lui apprendre des gros mots et il les répète…' ajouta-t-il avec un rictus mauvais.
'Barky…' fit alors une petite voix derrière eux… 'Gentil Barky, viens mon Barky… viens chercher les gnomes !! Les vilains gnomes !!'
  'Vilains !! Sortez de là ! Sales bêtes ! Bande de zouaves !!' cria plus fort le Jarvey, alors que Charlotte, qui avait ouvert la porte, le laissait passer dans le jardin.
'Bon, au moins on en est débarrassé…' soupira Blaise. 'Viens par ici, Rook.'
Rook suivit le petit brun le long d'un sentier dans ce qu'il lui sembla être un grand parc. De hauts murs l'entouraient également, à peine visible derrière les arbres. Au bord du sentier démarrant de la porte, il y avait des enclos, quelques-uns uns plutôt petits, d'autres nettement plus étendus et même certains recouverts de grillages comme une volière. Blaise se déplaça de l'un à l'autre, sifflant parfois pour faire apparaître une des créatures.
'Des Fairies…' fit-il en lui montrant de minuscules créatures ailées à l'apparence humaine. 'Ils sont très vaniteux, applaudis-les ou ils vont se fâcher…'
Et pour montrer l'exemple, Blaise frappa dans ses mains, en lâchant des 'Oh' et des 'Ah' émerveillés. Devant lui les Fairies, semblant ravis, sortirent de l'ombre des feuillages et commencèrent une danse mettant en valeur les contours irisés de leurs ailes.
'C'est vrai qu'ils sont jolis,' fit Rook, alors qu'il applaudissait. Charlotte se contenta de renifler dédaigneusement, en caressant son Puffskein.
'Papa les garde pour décorer la maison à Noël…' ajouta Blaise, alors qu'il l'entraînait vers un autre enclos. Celui-ci était rempli d'arbres assez touffus, et on ne discernait pas grand chose.
'Où est-il ?' murmura Blaise en fronçant les sourcils. 'Je suis sûr qu'il est là et qu'il nous observe… Il nous a certainement entendu…'
Rook regarda alors Charlotte ramasser un caillou et le lancer de toutes ses forces dans les arbres…
'Charlotte !! Tu es folle ? Tu pourrais le blesser !!' s'écria Blaise, visiblement furieux.
Mais la petite fille haussa les épaules comme si cela n'était pas important, pointant un doigt triomphant vers un des arbres où des taches de lumières rouges venaient soudain d'apparaître.
'Il est là…' fit-elle du ton de quelqu'un très satisfait de lui-même
'Apel !!' fit alors Blaise d'une voix douce. 'Viens Apel, c'est nous… N'aie pas peur !!'
Les flashs de lumière rouge disparurent et, sans doute rassuré par la voix bien connue, une étrange créature s'approcha d'eux, se balançant d'une branche à l'autre, aussi souplement qu'un singe.
'Un Clabbert…' siffla Rook d'étonnement.
L'animal ressemblait à un croisement entre un singe et une grenouille. Sa peau était nue, d'un vert marbré, ses membres étaient longs et souples, ses pieds et ses mains palmés. Deux minuscules cornes pointaient au sommet de sa tête, et sa large bouche lui fendait le visage d'un large sourire. Mais le Clabbert les fixaient craintivement de ses grands yeux globuleux. Les grosses pustules au milieu de son front était encore un peu rouge, et Rook se souvint que celles-ci, en cas de danger, devenaient écarlates et flashaient…
Il y avait quantité d'autres créatures étranges dont Rook ne connaissaient que le nom. Un couple de Knarl, qui ressemblaient comme deux gouttes d'eau à des hérissons mais avaient la détestable habitude de saccager les jardins quand on leur offrait de la nourriture quelques Moke, des petits lézards vert argenté qui avaient le pouvoir de rétrécir jusqu'à devenir indiscernables une colonie de Mooncalves, qui, puisqu'ils ne sortaient de leur terrier que les nuits de pleines lunes pour danser dans les champs et y tracer de complexes motifs géométriques, ne montrèrent pas le bout de leur nez des Bowtruckles qu'ils ne parvinrent pas à voir non plus, à cause de leur petite taille et de leur furieuse ressemblance avec des brindilles. Mais l'animal qui captiva le plus Rook était un de ceux installés dans la plus grande volière au centre du parc. Celle-ci contenait entre autres un couple de Diricawls, de gros oiseaux aux plumes duveteuses, quasi dépourvus d'aile, qui jouaient constamment à disparaître et réapparaître dans une volée de plume – un sortilège particulier avait été lancé sur la volière pour qu'ils ne puissent réapparaître à l'extérieur de celle-ci – et un Fwooper d'un rose flashy, dont il fallait régulièrement renforcer le Silencing Charm, son chant pouvant conduire à la folie. Avec un petit air mystérieux, Blaise avait entraîné Rook au bord du grillage et l'avait laissé un instant chercher sans mot dire. Au moment au Rook se demandait ce qu'on lui voulait exactement, son œil attrapa un éclat doré…
'Blaise… Qu'est-ce que c'est que ça ?' demanda-t-il fiévreusement, n'osant croire à sa chance.
'Je pensais bien que le meilleur plus jeune Attrapeur depuis un siècle ne pourrait manquer de le voir…' fit Blaise avec un grand sourire. 'Mais pas un mot, hein ? Si jamais ça se savait, Papa aurait de gros ennuis…'
'Nom d'un serpent, Blaise… Il est… il est magnifique…'
Et Blaise sourit devant le regard émerveillé de Rook qui tentait de suivre les mouvements vifs de la petite boule de plume dorée.
Un Golden Snidget.
Il était préférable en effet de ne pas révéler la présence d'un Golden Snidget chez les Zabini : ce petit oiseau était strictement protégé depuis qu'il avait failli disparaître. La chasse au Golden Snidget avait été un sport très à la vogue dans le passé, le fait de réussir à en attraper un étant tenu comme un véritable exploit. Malheureusement, le minuscule oiseau survivait rarement à un tel traitement. Au cours de l'histoire, on introduisit la capture d'un Golden Snidget dans le jeu de Quidditch, un des joueurs – appelé le Chasseur, l'ancêtre de l'actuel Attrapeur – était chargé de le pourchasser. Quand la chasse et la capture de cet oiseau devenu très rare furent interdites, il fut remplacé par l'actuel Golden Snitch.
Quand ils eurent fait le tour du parc, le sentier les ramena à la porte du jardin. À ce moment celle-ci s'ouvrit sous une forte poussée, et Barky le Jarvey leur fonça dessus.
'Vilains !! Bachi-bouzouk !! Chenapans ! Sortez ! Sortez !!'
Et au loin, la voix de Stéphanie les appela : 'Blaise ! Charlotte ! Votre père est rentré !!'
'Il est déjà cinq heures ?' s'exclama Blaise, et tous les trois s'empressèrent, prenant bien garde de renfermer Barky derrière eux.
Quand ils entrèrent dans la cuisine, ça sentait bon le ragoût et Mr Zabini était déjà attablé.
'Ah ! Bonjour mon garçon,' fit-il en serrant la main de Rook. 'Heureux de te voir, Blaise se faisait un sang d'encre pour toi…' Blaise plongea le nez dans son assiette pour cacher sa rougeur. 'Et comment va ma petite princesse ?'
Charlotte grimpa sur les genoux de son père afin de lui plaquer deux gros baisers sur les joues.
Mr Zabini paraissait plus vieux que la maman de Blaise. Il était assez petit et tout brun, mais ses cheveux commençaient à être clairsemé sur le front. Il avait perpétuellement un sourire aux lèvres et ses yeux clignotaient de malice.
'Et comment s'est passé ta journée, papa ?' questionna Blaise quand tout le monde fut à table devant une large portion de ragoût.
'Tu ne t'es pas encore disputé avec Lucius Malfoy, au moins, chéri ?' fit Stéphanie.
'Oh non,' s'exclama joyeusement Mr Zabini. 'Cette fois, c'est à Weasley qu'il a eu affaire. Arthur tient très à cœur son projet de nouveau Muggle Protection Act et il multiplie les perquisitions… Je suis sûr qu'il meurt d'envie de visiter Malfoy Mansion,' gloussa-t-il.
'Arthur Weasley ? C'est le père de Ron et des jumeaux ?' s'informa Rook.
'C'est ça,' fit Blaise. 'Il travaille au Misuse of Muggles Artefacts Office. Ce type adore tout ce qui est Muggle… Quand il vient à la maison, il court d'une pièce à l'autre avec des yeux émerveillés, sans pouvoir articuler d'autres mots que "fascinant", "ingénieux" et "formidable"…'
'Blaise… Tu exagère un peu, non ?' fit Stéphanie, tentant de garder son sérieux.
'Maman… À chaque fois qu'il vient, il parcourt la cuisine en appuyant sur tous les boutons, et il attend de voir ce que ça fait… !' Rook s'étrangla soudain, dissimulant sa subite rougeur derrière sa serviette. C'était ce que lui-même avait fait ce matin et Blaise semblait très bien s'en souvenir, à voir le rictus ironique peint sur son visage alors qu'il le dévisageait..
'Le plus drôle,' ajouta Mr Zabini, dont les yeux pétillaient d'amusement. 'C'est que Arthur a son garage rempli d'objets Muggles, qu'il démonte et remonte en les ensorcelant… J'ai même entendu dire,' fit-il en baissant la voix, 'qu'il avait fait en sorte de modifier une voiture pour qu'elle puisse voler… S'il devait perquisitionner chez lui, il devrait immédiatement se mettre lui-même aux arrêts… !'
'Je ne crois pas qu'il soit le seul dans le cas, chéri…' lâcha alors Stéphanie d'un air innocent.
Mr Zabini cessa de suite de rire. Rook reconnut son expression. C'était la même que Blaise affichait quand il était très mal à l'aise. Il se rappela alors le Golden Snidget et sourit.
'Mais… mais chérie…,' balbutiait Mr Zabini. 'Tu sais qu'il y a une lacune dans la loi… je veux dire… Seul le fait de blesser ou de capturer un… Tu-Sais-Quoi est répréhensible. Si par hasard une de ces Tu-Sais-Quoi se retrouve dans une volière sans qu'on ait eu l'intention de l'y mettre, cela ne constitue pas une…'
'Oooh Pietro Zabini !!' s'exclama Stéphanie en riant. 'Toi et Arthur Weasley !! Il n'y en a pas un pour rattraper l'autre ! Figure-toi que Molly m'a rapporté que Arthur lui avait sorti semblable salade au sujet de sa voiture volante !!'
'Ah… heu… Et au fait, les enfants, comment s'est passé votre journée ?' fit joyeusement Mr Zabini, dans un évidente tentative de détourner la conversation.