Chapitre 37 : Pas de repos avec les filles

Je me réveillai en sursaut et mis quelques secondes avant de reconnaître le décor de ma Pokéball. L'adrénaline parcourait inutilement mes veines, j'étais en sécurité ici. Je pris le temps de retrouver mon calme essayant d'oublier le cauchemar dont je venais de brutalement sortir.

Cela faisait un petit moment que mes nuits étaient à nouveau calmes, j'avais espéré que cela aurait continué. Je supposais que la course-poursuite de la veille avait ravivé mes craintes et mes cauchemars.

Encore perturbé et sachant que retrouver le sommeil serait peine perdu, je décidai de sortir de ma balle. Le salon était plongé dans le noir. J'attrapai ma queue dans une main avant d'allumer une petite flamme. Cela était suffisant pour voir sans risquer de cramer le mobilier.

J'attrapai la télécommande de la télévision et coupai aussitôt le son. Puis j'éteignis ma flamme et m'assis sur le canapé. Je passai rapidement la chaîne d'informations continues qui parlait encore de Milly mais aussi celles montrant des matchs Pokémon. Je finis par regarder un film auquel je ne comprenais rien du tout. Cela me changeait un peu les idées et je restai de longues minutes à fixer l'écran avant de me lever pour aller me désaltérer.

Je me dirigeai silencieusement vers la cuisine pour prendre un verre d'eau. En passant dans le couloir, un bruit très discret attira mon attention. Quelqu'un était en train de se moucher, je supposai que Milly en était à l'origine. Elle était encore en train de pleurer ? Depuis le temps, elle devait avoir pleuré toutes les larmes de son corps.

Je restai un moment à écouter ses sons discrets avant de prendre une décision. Une fois devant sa porte, je toquai doucement et silence se fit. Je patientai quelques secondes, avant de murmurer :

-C'est moi. Si tu … veux discuter … pas forcément de choses déprimantes mais plutôt pour te changer les idées … ou avoir un peu de compagnie … je suis là.

Je me retins de soupirer. Je m'exprimais toujours maladroitement dans ces circonstances. Il fallait que je sois plus sûr de moi, elle voulait probablement avoir quelqu'un sur qui s'appuyer et pas l'inverse.

Je l'entendis bouger et je pris une bonne respiration avant que la porte s'ouvre doucement.

-Ça ne te dérange pas ? demanda-t-elle, tout bas en fixant mes pieds.

-Je suis déjà passé par là. Je sais que c'est plutôt difficile donc si je peux aider même un peu …

Je laissai ma phrase en suspens, lui laissant le temps de réfléchir.

-Entre. répondit-elle rapidement en me laissant passer.

Je pénétrai dans la pièce plongée dans la pénombre. Seule la lampe de chevet apportait un peu de lumière. Projetant des ombres derrière le mobilier sommaire de la pièce.

Une grande étagère remplie de livres et de quelques bibelots se trouvait dans un coin, accompagnée d'un petit fauteuil.

Milly alla s'asseoir sur le lit au centre de la pièce après avoir refermé la porte. Je marquai un temps d'hésitation sur l'endroit ou m'installer, avant de choisir le sol.

-Tu peux venir à côté de moi. me proposa-t-elle.

Je repensai à Karen qui m'avait demandé la même chose lorsqu'elle avait voulu se confier. Je n'étais pas en terrain totalement inconnu ce qui me rassura un peu. J'acceptai sa proposition et profitai du confort du matelas avant de marquer une pause.

Fallait-il que l'on s'allonge et que je la prenne dans mes bras ? Non ça n'était pas le genre de Milly.

Je fis une approche avec mon aile qui l'entoura comme pour l'enfermer dans un cocon de chaleur. Voyant qu'elle ne me repoussait pas, je voyais là une petite victoire. Je ne devais pas avoir fait de boulette.

-Merci. fit-elle en se serrant contre moi.

J'hésitai sur la suite, Karen disait que les câlins et les chatouilles aidaient à remonter le moral et à se changer les idées. Mais je ne me voyais pas faire ça à Milly. Je passai une de mes mains dans son dos pour le lui frotter de haut en bas.

Je restai silencieux écoutant ses petits reniflements. Au bout d'une longue minute ou peut-être plus, elle amorça la conversation.

-Désolée.

-De quoi ?

-De t'avoir réveillé.

-Pas du tout, j'étais allé me servir un verre d'eau quand je n'ai entendu te moucher. Sans ça … je ne t'aurais pas entendu.

-Tant mieux … et encore merci de m'avoir sortie de là.

-Si tu continues, je vais aussi te remercier à chaque fois pour m'avoir sorti de là. la taquinai-je sans rencontrer de succès.

Un nouveau silence suivit et je repensai à la télévision que je n'avais pas éteinte, tant pis.

-Comment tu as fait ? me demanda-t-elle soudainement.

-Fait quoi ?

-Pour dépasser tout ça ?

-Je n'ai pas encore atteint ce stade.

-Ce n'est pas l'impression que j'ai.

-La colère que je ressens est toujours présente, mais elle est plus apaisée. Ce n'est pas facile à expliquer … C'est comme une rivière en crue qui sort de son lit et ravage tout. Une fois l'orage passé, elle redevient calme. Une nouvelle vague peut arriver mais je veux la contrôler pour qu'elle ne détruise pas tout.

-Je comprends. Je dois avouer que j'ai eu très peur quand je t'ai fait partir sans rien en plein hiver. Je me disais qu'à cause de moi tu étais probablement mort.

-Pardon, j'aurais dû te faire un signe.

-Au contraire, tu as bien fait de garder tes distances. Ils t'auraient peut-être retrouvé.

-J'aurais quand même pu t'envoyer un mot. Pardon.

-Ce n'est pas grave, au final, tu vas bien et tu es toujours libre ?

-Oui. Même si j'en ai marre de devoir me cacher.

-Je vais devoir vivre dans l'ombre moi aussi.

-Pas longtemps je pense. Une nouvelle coupe et couleur de cheveux, tu devrais être méconnaissable.

-Je n'ai pas envie de raccourcir mes cheveux.

-Ça repoussera.

-Ce n'est pas une raison.

-De toute manière, on ignore ce qu'ils ont prévu de faire.

-Tu … penses qu'il y a des chances pour que je puisse récupérer mes Pokémons ? dit-elle soudainement la voix tremblante.

-Je ne sais pas. Tu as bien quelqu'un qui pourrait s'occuper d'eux en attendant ?

-La Team Rocket ne risque pas de se venger sur eux ? Ils ne le méritent pas. Ils n'ont pas à être responsables de mes choix.

-Tu es toujours leur dresseuse. C'est à toi seule qu'ils obéissent. tentai-je de la rassurer, taisant la probable vérité.

Ils allaient sûrement essayer de leurs soutirer des informations, ou les utiliser comme appâts pour faire sortir Milly de sa cachette. Rien de bien joyeux en perspective.

-Tant mieux. Je m'en voudrais s'ils leur arrivaient malheur … Tu n'arrivais pas à dormir toi aussi ?

-Cauchemars plutôt.

-Ah … tu veux en parler ?

-Non. Je suis là pour te remonter le moral, même si je suis nul dans ce domaine.

-Je vois. Mais sache que je suis contente que tu sois là avec moi. Cela fait du bien de ne pas être seule.

-Je ne suis pas si inutile finalement.

-Les amis, ce n'est jamais inutile.

Je lui répondais d'un hochement de tête et laissai le silence nous envelopper.

-Je peux te poser une ou deux questions un peu personnelles ? Tu n'es pas obligé d'y répondre.

-Vas-y.

Elle marqua une pause qui m'inquiéta sur le sujet qu'elle souhaitait aborder.

-Qu'est-ce qu'il s'est passé après que tu … te sois fait capturé ?

Je n'en revenais pas qu'elle souhaite parler de ce sujet en particulier, encore plus maintenant.

-Je ne veux pas en parler.

-D'accord. C'est juste que … je voulais savoir pourquoi … enfin si tu détestais les humains à cause d'eux maintenant.

-C'est une réponse compliqué à répondre. dis-je avant de réfléchir. Le fait de passer de l'autre côté m'a donné un point de vue totalement différent. Je dois avouer … que les humains me font peur. Pas ceux que je connais bien entendu, mais j'appréhende chaque nouvelle rencontre.

-Tu n'as plus peur des Pokémons alors ?

-Je ne dirais pas non, mais un Pokémon ne peut pas en cacher un autre si tu vois ce que je veux dire. Il ne peut pas non plus … me priver de ma liberté. À cause de ça, les humains sont bien plus terrifiants.

-C'est très intéressant ce que tu dis. Je ne voyais pas les choses sous cet angle.

-Je te rassure moi non plus.

-Maintenant j'ai encore plus de questions, c'est malin.

Au moins cela lui changeait les idées, elle semblait moins triste.

-Sur les rapports entre espèces ?

-Et pas que ! Tu as la chance de pouvoir les comprendre, je trouve ça déjà énorme ! La barrière de la langue est un véritable mur. Je me demande comment ils peuvent se comprendre entre eux aussi.

-Je ne peux pas te répondre. Je les entends parler comme toi et moi.

-C'était direct ou progressif ? fit-elle très insistante.

-Tu prévois de faire une thèse là-dessus ? rigolai-je.

-Pourquoi pas. Oh !

Je me tournais vers elle ne comprenant pas ce qu'il l'avait fait sursauter. Elle me fixait avec des yeux brillants, elle devait se retenir de pleurer mais pourtant elle souriait. Je n'y comprenais décidément plus rien.

-Je n'avais pas réalisé jusqu'ici mais, tout ça a dû définitivement clore mes fiançailles !

-Car tu étais toujours promise à ce connard ?

-Histoire de famille. se justifia-t-elle en se levant.

-Si je comprends bien, tu ne l'aimais pas ?

-Je pense surtout que j'essayais de m'en convaincre. Après tout, je n'avais pas le choix. Je me disais que je finirai bien par l'aimer. Je savais qu'il ne m'appréciait pas, donc je faisais des efforts pour trouver LA Milly qu'il pourrait apprécier. Ça n'aurait été qu'un mariage entre amis, mais c'est fini maintenant. Je suis libre.

-Tu es sûre ? Un horrible hybride t'a kidnappé. Ton ex-prince charmant doit l'avoir mauvaise. Il risque de vouloir te reprendre.

-Qu'il essaye pour voir !

Je ne pus m'empêcher de rigoler face à son air déterminé. Elle ne tarda pas à me suivre.

-Vu que la princesse a disparue. repris-je une fois plus calme. Sûrement qu'elle a été tuée et dévorée par le méchant. Qu'est-ce que la Milly face à moi compte faire à l'avenir ?

Elle se pencha vers moi pour que nos visages soient à la même hauteur et me regarda avec un peu trop d'insistance.

-Laisse le rôle du méchant à Neil. Le rôle du chevalier blanc sur son Galopa te convient mieux.

-Il a fait peur à son Galopa ton chevalier noir. rigolai-je un peu mal à l'aise par sa proximité.

-Ou il est assez fort pour s'en passer.

Je détournai le regard sur le côté pour fixer la lampe qui éclairait la pièce.

-En même temps, c'est du deux en un. Il a ses propres flammes et des ailes pour se déplacer. Avoir un Galopa serait sûrement une gêne.

-Rawr ! s'écria Milly en me poussant.

Je sursautai pris au dépourvu par sa réaction. Je perdis l'équilibre et partis en arrière. Inconsciemment, je tentai de me rattraper et saisis son bras, l'entraînant dans ma chute. Je restai totalement perdu, elle venait de péter les plombs ou quoi ?

Elle ne resta pas sur moi et roula sur le côté, bloquant une de mes ailes sous elle avant exploser de rire.

Au moins, j'avais plus ou moins atteint mon objectif de lui remonter le moral. Je me doutais qu'elle était en train de relâcher toute la pression d'un coup mais elle allait réveiller tout le monde à ce rythme.

-Milly doucement.

-Si tu avais vu ta tête ! annonça-t-elle rapidement avant de se remettre à rigoler.

Je fixais le plafond essayant de me retenir, cela du se lire sur mon visage car elle me lança une pique.

-Ne t'y mets pas aussi, je ne vais jamais pouvoir m'arrêter.

Je me cachai avec ma seule aile libre et pouffais à mon tour.

J'ignore combien de minutes s'écoulèrent mais quand notre fou rire se calma enfin, j'étais aussi détendu que lessivé.

-J'en peux plus, j'ai trop rigolé. annonça Milly toujours allongé sur le dos à côté de moi.

-Pareil. Ça fait du bien.

-Oh oui.

Je fermai un instant les yeux appréciant le calme.

-Dis, Rei.

-Hum ?

- Ça t'intéresserait de faire équipe avec moi ?

-Hein ?

Je me tournai vers elle, surpris. Elle fixait le plafond, mais je voyais dans son regard qu'elle réfléchissait.

-Je suis libre de faire ce que je veux maintenant. J'ai toujours aimé les Pokémons et voulu les comprendre. Avec toi à mes côtés, on pourrait aider les deux camps à mieux se comprendre et trouver un équilibre. Faire avancer les choses pour mieux vivre ensemble.

-Pour rappel, on est des criminels recherchés tous les deux.

-À Kanto oui, mais le monde est vaste.

-On verra demain. fis-je trop fatigué pour débattre.

-D'accord.

Je fermai les yeux et réalisai qu'il serait plus poli que je retourne dans ma balle. N'entendant ni demande ni reproche de Milly, je me laissai emporter par le sommeil.

Le lendemain se passa plus calmement, bien que j'avais dû essuyer les reproches de la gente féminine dès le réveil. Yushin avait dû avoir les oreilles qui sifflent aussi.

Pour ma défense, la forêt de Jade n'était ni réputé pour la densité de sa population humaine, ni pour être un endroit de rencontre. Il était tout à fait normal que j'eus quelques lacunes. Je savais qu'il n'était pas bien vu de dormir avec quelqu'un que l'on ne connaissait pas, mais pas avec une amie.

Cela sembla amuser Milly qui ne semblait pas être en tort. Elle nous regarda quelques minutes avant de venir à mon aide.

Le reste de la journée fut partagée entre la préparation des repas et les questions ininterrompues de la blonde. Elle voulait tout savoir sur « l'autre côté » du monde que j'avais expérimenté.

Lorsque les vendeuses et leur Goupix revinrent dans l'appartement à la fin de leur journée, ce fut un soulagement pour moi. Même Chu n'était pas arrivée à la distraire assez longtemps pour que je puisse m'esquiver dans ma Pokéball.

La mère de Pixie s'affala dans un fauteuil et s'étira tel un Miaouss.

-Je commence à me faire vieille, en prenant de l'âge la batterie se recharge moins bien. soupira-t-elle.

-Tu n'es pas si vieille maman. la taquina Pixie.

-Si vieille. répéta-t-elle. Tu aurais pu dire que j'étais encore jeune.

-Ça ne sert à rien de mentir.

-Toute une éducation à refaire là aussi.

-Commence par Rei déjà.

-Vous n'allez pas recommencer. grommelai-je.

-T'es un cas perdu de toute manière. me lança leur Goupix toujours aussi aimable.

-Non, on a plus important. On a reçu des instructions. fit la plus âgée, gagnant toute notre attention. Milly, on va te faire prendre le ferry pour aller à Johto. On est pressé par le temps donc on va éviter de trop traîner pour faire tes papiers. Et qui dit nouvelle identité, dit relooking !

-Je comprends. répondit-elle moins enjouée. Que dois-je faire ?

-Rei, tu peux venir cinq minutes ? J'ai un truc à te demander, c'est perso. m'interpella Pixie.

Je la suivis avec Chu et je fus surpris de la voir prendre les escaliers en direction du rez-de-chaussée. Elle alluma la boutique dont les stores étaient fermés pour la soirée avant de s'asseoir sur un des tabourets situés derrière le comptoir.

-Maintenant qu'on est enfin seuls, on va pouvoir mettre les choses au clair. commença-t-elle d'une voix sérieuse.

Mon regard descendit vers Chu, qu'est-ce que j'avais bien pu faire ? Ma Pikachu sembla aussi perdu que moi.

-De quoi tu parles ? demandai-je à la demi-Raichu.

-Tu joues à quoi avec Milly exactement ?

-On en a déjà parlé. C'était une erreur de m'endormir dans sa chambre. J'ai compris, je ne recommencerai plus.

-Tu as fait pareil avec Karen ?

-Hein ? Non.

-Alors tu as voulu profiter qu'elle n'était pas bien …

-Pas du tout. C'est une amie et comme je ne dormais pas non plus, j'ai voulu lui remonter le moral. Elle pouvait me dégager quand elle voulait.

-On parle de Rei. ajouta Chu. Il est à mille lieux de penser à ça, il ne se passera jamais rien.

Pixie nous regarda tour à tour dubitative. Agacé, je décidai de lui balancer mon avis à la figure.

-Franchement, j'ai autre chose à faire que de me taper des filles. J'en ai même pas envie d'ailleurs. Sans compter que tu m'as vu ? Il faudrait vraiment être tordu pour avoir envie de faire quelque chose avec moi. Toi au moins tu ressembles plus à une humaine.

-Mais et Karen ?

-C'est aussi une très bonne amie, ça n'ira pas plus loin.

-J'avais plutôt l'impression que c'était ta petite amie. Quand tu as disparu, elle était tellement inquiète. Je suis sûre qu'elle aurait retourné ciel et terre pour te retrouver.

-Elle agit comme ça avec tout le monde, enfin avec les personnes auxquels elle tient. En plus elle a déjà un petit copain.

-Il est au courant que tu as squatté chez elle pendant des mois ?!

-Oh oui, il vit avec elle.

Elle me regarda comme si j'avais une deuxième tête venait de pousser.

-Tu vivais avec eux. conclut-elle.

-Bien entendu, je n'allais pas vivre à la cave quand même.

-Mais … mais il ne t'a rien dit ? Il était d'accord ?

-Je pense que s'il avait pu, il m'aurait mis direct à la porte. Mais il connaît Karen, quand elle a une idée derrière la tête, c'est dur de l'arrêter. Après, il était bizarre, je pense qu'il me tolérait mais parfois il m'engueulait sans raison. Pourtant je lui ai dit qu'il n'avait rien à craindre, je ne comptais pas lui piquer sa copine.

-Je n'ose imaginer ce que tu as pu dire ou faire. soupira Pixie.

-Il n'y a que Rei pour se retrouver dans ce genre de situation. rigola Chu.

-Et toi tu l'aimes ? me lança-t-elle.

-Je te trouve bien curieuse. me défendis-je avant d'avoir une idée. Je te réponds si tu me dis avant ce que tu penses d'Ivan.

-Qu'est-ce qu'il vient faire dans cette conversation ?

-Si tu veux parler de relation amoureuse, tu dois avoir plus d'expériences que moi. Et je suis curieux de savoir où vous en êtes.

-Moi aussi. ajouta Chu.

Je la vis rougir, j'ignore si c'était de gêne ou de colère mais sa réaction m'amusa.

-J… je ne dirais rien. De toute manière, tu es de mèche avec lui. J'en suis sûre !

-Pas du tout. C'est avec vous deux que j'ai le plus interagis à la planque. mentis-je. Je me demandai si ça avait évolué depuis.

-Avant de t'occuper des histoires des autres, occupe-toi des tiennes.

-Je gère très bien de mon côté.

-Vraiment ? dit-elle d'une voix taquine.

-Oui et je n'ai pas besoin que tu t'en occupes. lui lançai-je.

-Prouve-le moi.

-Pardon ?

-Appelle Karen. C'est l'occasion, tu as un téléphone juste là.

Je remarquai l'appareil posé sur le comptoir à côté de la caisse.

-Il est tard, elle doit dormir. commençai-je.

-Il est sûr que ça ne la dérangera pas si c'est toi.

-Je n'ai pas son numéro de toute manière.

-Si ce n'est que ça, je m'en occupe !

Je la vis se lever et se saisir de la petite machine.

-Non, ça ira franchement. Elle doit être énervée vu ce qu'il s'est passé hier. Je préfère attendre que la pression redescende, disons dans trois ou quatre jours.

-Je t'assure, elle n'est pas en colère.

-Comment peux-tu en être si sûre ?

-Elle a appelé cet aprèm.

-Tu ne lui as pas dit que j'étais ici ?!

-Bien sûr que non. Je lui ai dit que je me renseignai. Mais elle avait l'air très inquiète.

-C'est normal ça, elle est toujours inquiète.

-Tu pourrais au moins lui dire que tu vas bien. m'encouragea Chu.

-C'est décidé ! s'exclama Pixie en se saisissant du combiné et pianotant dessus.

-Si elle apprend que je suis ici, elle va venir. m'exclamai-je. Tu veux rester dans l'anonymat non ?

-Quand on a des amis, il faut prendre soin d'eux. Elle stresse et c'est comme ça que tu l'as remerciée d'avoir pris soin de toi ? fit-elle avec un grand sourire alors que la tonalité se fit entendre grâce au haut-parleur.

-Arrête tes bêtises. dis-je en essayant de lui voler l'appareil.

Elle l'éloigna en même temps qu'un second bip retentissait.

-Raccroche ce putain de téléphone ! lui criai-je dessus.

-Allo ? dit une nouvelle voix.

Je me taisais aussitôt, de peur qu'elle m'ait entendu.

-Bonsoir Karen, c'est Pixie, désolée de t'appeler aussi tardivement. dit joyeusement cette imbécile.

Elle ne perdait rien pour attendre !

-Ce n'est pas grave, c'est gentil. J'ai entendu crier, tout va bien ?

-Oui, oui, tout va bien. continua-t-elle sur le même ton. Je viens te donner des nouvelles.

-Merci beaucoup ! Encore désolée de te déranger, tu es la seule que je connais qui pouvait avoir rapidement des nouvelles.

La demi-Raichu me regarda passer ma main devant mon cou pour lui faire savoir le sort que je lui réservais.

-Je me doute. Je te le passe, je te préviens, il est de mauvaise humeur. À la prochaine. finit-elle en me tendant le téléphone.

Je le regardai hésitant. Je pouvais toujours raccrocher sans dire un mot mais elle risquait de rappeler. J'étais définitivement bloqué. Je jetai un regard noir à Pixie qui me fit un petit au revoir de la main avant de repartir en direction de l'étage.

-Rei ? hésita Karen qui n'avait toujours aucune réponse.

-Salut. Ça faisait longtemps. Comment vas-tu ? La forme ? commençai-je gentiment après avoir enlevé le haut-parleur.

-Très bien Monsieur je-raconte-n'importe-quoi-dans-mes-lettres.

-Que veux-tu, il y a eu des changements de dernière minute. Mais tout était prévu, la preuve tout s'est bien passé.

-Non ça ne va pas ! Y a une traque à l'homme dans tout le pays, là ! s'exclama-t-elle.

-À ce point ?

-Tu ne regardes pas les informations ?!

-J'évite justement.

-Tu devrais, c'est très instructif.

-Je ferai ça quand Milly ne sera plus là.

-Elle valait la peine que tu prennes autant de risques ? demanda-t-elle plus calme.

-Oui, c'est elle grâce à elle que je suis libre.

-Je comprends. Elle est toujours avec toi ?

-Pour le moment. Comme elle n'a pas le moral, j'évite ce qui peut lui rappeler ce qu'elle a perdu.

-Tu prends soin d'elle.

-J'ai été à la bonne école.

-Comment ça ?

-J'ai appris des trucs en te voyant faire.

-Tu lui as fait des chatouilles ?!

-Je n'oserai pas !

-... Vous... avez fait quoi exactement ?

-Ben on a discuté côte à côte.

-Rien de plus ? Pas de rapprochements plus... physiques ? Je veux tout savoir !

Je n'arrivais pas à dire si elle semblait en colère, inquiète ou curieuse. Elle me faisait un peu peur, j'avais tout intérêt à passer à table.
-Je lui ai juste fait un câlin pour lui remonter le moral, comme tu l'as déjà fais. Après on a rigolé et on s'est endormis.

Je l'entendis pousser un gros soupir. Puis me dire d'une voix légèrement plus enjouée : -Bon, elle avait bien besoin de ça, donc ça passe pour cette fois. Il faut prendre soin de ses amis donc je ne te reprocherai rien. Elle rit doucement puis s'interrompit d'un coup pour dire d'une voix plus forte :

-Attends mais si, j'ai des choses à te reprocher ! Tu t'es encore mis en danger ! Promets-moi de ne pas recommencer.

-Karen, tu sais bien que je ne peux pas te promettre ce genre de choses.

-Tu peux me dire à quoi tu joues là ?

-Pardon ?

-J'ai bien compris que dans tes lettres, tu veux me faire croire que tout va bien. Alors que ce n'est pas du tout le cas. Je suis déçue que tu me mentes de la sorte.

-Ce n'est pas ça.

-Alors pourquoi tu ne me dis pas la vérité ?

-Je ne veux pas que tu t'inquiètes.

-Je m'inquiète tout le temps. Tu sais, il n'y a pas de honte à demander de l'aide.

-Je n'ai pas besoin de ton aide. J'en reçois déjà assez. dis-je avant de continuer moi sèchement. Tu as une vie plutôt paisible, ne la gâche pas pour des conneries. Je ne veux pas que tu finisses comme Milly.

-Tu sais que mon équipe est bien plus forte que toi ? répondit-elle après un moment de réflexion.

-Et alors ?

-Tu as tout intérêt à m'avoir près de toi.

-Je viens de te dire que je ne voulais pas t'impliquer plus que ça. m'agaçai-je.

-Et moi je ne veux pas te perdre. me cria-t-elle soudainement. Je t'aime, moi !

Je restais silencieux ne sachant que dire. Pourquoi me disait-elle ça ? Elle se contredisait, elle voulait que je reste en vie mais disait des trucs pour lesquels Herbi me tuerait?

À moins qu'il n'y ait un autre sens... C'est ça ! Elle ne m'aime qu'en tant qu'ami ... oui c'était le plus logique. Il était évident que je serais continuellement en danger, je ne pouvais pas mentir là-dessus. Il ne fallait pas non plus la pousser à venir ici.

-Pareil... dis-je calmement, réfléchissant à une solution.

-Bien, nous sommes d'accord sur ce point au moins. Sache que c'est moi qui décide de ce que je veux faire de ma vie. Si je souhaite être à tes côtés en dépit des risques, accepte le, ou fais-toi une raison.

-Tu peux me crier dessus autant que tu veux. Je ne te laisserai pas venir tant que la situation ne se sera pas améliorée.

-Tu as peur que je te gène avec ton amie ? me dit-elle légèrement en colère maintenant.

-Pardon ?

-Tu préfère avoir une jolie humaine à tes côtés et jouer au héros. Plutôt que me voir c'est ça ?!

-Mais pas du tout.

-Alors pourquoi, elle a le droit d'être à tes côtés ?!

-Elle n'a pas eu le choix, c'est tout.

-Donc si je n'avais pas le choix tu …

-N'y pense même pas ! Je suis juste là pour qu'elle se sente moins triste. râlai-je. Elle est comme moi lorsque tu m'as trouvé. Elle a tout perdu et elle est poursuivie.

-Elle t'a toi.

-Mouais, bonjour le lot de consolation. De toute manière c'est temporaire. Nos chemins vont bientôt se séparer à nouveau.

-Franchement, je ne dirais pas non à son lot de consolation. dit Karen soudainement plus calme.

-Ha ha très drôle. fis-je un peu mal à l'aise.

Si Herbi était là, je ne donnerai pas cher de ma peau. D'ailleurs, il devait écouter Karen de l'autre côté, il pouvait pas faire quelque chose ? C'était sa copine après tout.

-Bon si tu ne veux pas que je vienne. Quand viendras-tu me voir ? tenta-t-elle.

-Lorsque ce sera plus calme.

-C'est-à-dire ?

-Je n'en ai aucune idée.

-Dans un mois, une semaine, demain ? Je peux te cacher sans problème tu sais.

Effectivement, mais je n'avais pas envie de passer mes journées enfermées. Au moins, à notre maison temporaire, je pouvais sortir sans crainte.

-Un mois, peut être. J'ignore ce qu'il va se passer.

-Ils ne peuvent pas laisser ta Pokéball dans ma boite aux lettres ? Je te renverrai ensuite.

-Ne dis pas n'importe quoi.

-Je suis sérieuse. C'est facilement réalisable, simple, discret et sans risques.

-On verra, je dois y aller. On m'appelle. m'excusai-je.

-Déjà ?! Tu me rappelles très bientôt ?

-Hum … demain soir, si je peux.

-C'est noté ! À demain et sois sage.

-Je compte rester à glander sur le canapé en lisant des livres, si ça peut te rassurer. Bref, bisous.

-Bisous !

Je poussai un soupir de soulagement en raccrochant avant de reposer le téléphone. J'avais réussi à ce qu'elle ne vienne pas.

Je ne la comprenais décidément pas, elle avait le job de ses rêves, des Pokémons qui tenaient à elle et même un petit ami depuis des années. Je comprenais qu'elle me considère comme un ami mais pas besoin de s'inquiéter autant ou de tout risquer.

Au moins, elle était d'accord avec moi au sujet de Milly. J'avais bien agi, c'est les deux autres qui se sont montées la tête pour rien. Je laissai rapidement tomber mes réflexions. J'allais uniquement gagner un mal de tête à chercher des réponses à mes questions et c'était tout.

-Ça c'est bien passé ? me demanda Chu voyant que je restai silencieux.

-Oui, juste une petite prise de tête stupide. Pourquoi il faut que les relations entre les gens soient aussi compliquées ?!

-Ah ça, je te rejoins. Je crois que c'est dû à des non-dits ou à une mauvaise interprétation.

-J'aurais mal compris un truc ?

-Te connaissant, probablement.

-Je lui demanderai demain soir alors.

-Ce sera le plus simple.

-Ou pas.

-Je serai là, au pire, je te soufflerai les bonnes réponses.

-Pourquoi pas. répondis-je en lui caressant la tête.

-Et si on remontait ? J'ai envie de voir la transformation de Milly.

-Sans moi alors.

-Tu préfères voir le grand final ?

-Exactement. On me demandera une seule fois si ça lui va bien. Je n'aurais qu'à dire oui et c'est tout.

-T'es bête. rigola mon amie.

-J'évite les situations à risque, c'est tout. Être dans la même pièce avec trois femmes à fond sur la mode … brrr.

Je finissais de manger mon petit déjeuner et regardai les filles dans le salon. Elles vérifiaient une dernière fois la valise de Milly, ou Sélène devrais-je dire maintenant.

Ces cheveux avaient été teints en brun et coupés en carré à hauteur de ses épaules. Elles y étaient allées à fond, même ses sourcils avaient pris cette couleur plus foncée.

-C'est tout bon. annonça Milly en refermant sa valise.

-Papiers ?

-Dans mon sac à dos.

-On va pouvoir y aller.

Ce qui m'étonnait le plus, c'était la tenue qu'elle portait. Je n'aurai jamais pensé la voir porter un t-shirt accompagné d'une salopette en jean délavé et des baskets aux pieds.

-Rei, tu pourrais arrêter de la fixer, ça devient malsain là. commenta inutilement la rousse.

-Je … J'admirais le relooking. Vous n'avez rien laissé au hasard.

-Le meilleur déguisement est celui que l'on ne remarque pas.

-Je me suis bien amusée aussi. ajouta Milly en souriant.

-Tout le plaisir est pour nous.

-Il est temps pour moi d'y aller. fit la fausse brune tristement en voyant les aiguilles de la pendule accroché au-dessus de la télévision.

-Tout va bien se passer. Ils ne s'attendent pas à ce que tu quittes le pays aussi vite.

-Je ne me sens pas rassurée quand même.

Elle nous fit ses adieux d'une étreinte chacun. J'étais un peu déçu de ne pas pouvoir l'accompagner jusqu'au bateau.

Elle récupéra sa valise les yeux brillants. Je me doutais qu'elle devait se retenir de pleurer.

-N'oublie pas de nous donner des nouvelles surtout. ajoutai-je.

-Promis. Chu veille bien sur Rei. Je te paierai en pomme s'il est entier quand je le reverrais.

-Prépare le sac, je ne le lâcherai pas d'une semelle. traduisis-je.

Cela eut le mérite de la faire rigoler, elle nous remercia une dernière fois avant de disparaître dans l'escalier.

-Je vais la suivre à distance pour être sûr que tout se passe bien. me dit Pixie en lui emboîtant le pas.

-ça va faire vide ce soir. annonça la dernière humaine présente. Ton taxi ne devrait plus tarder à arriver. Tu vas pouvoir retrouver Yushin et Drake.

-D'accord … Je peux aider à faire quelque chose en attendant ?

-Finir de ranger le petit déjeuner et faire la vaisselle si tu veux. Je redescends tenir la boutique.

-Ok.

Je ne perdis pas de temps et me mis aussitôt au travail. Le seul moyen de les remercier pour le moment était de partir tout en laissant l'appartement propre. Le livreur devait arriver vers midi, il me restait une bonne heure. Je devrais pouvoir bien avancer.

Je terminai de sécher et rangeai la dernière tasse. Avant de passer un coup d'aspirateur et faire la poussière. Quarante minutes passèrent soudainement, le bateau avait déjà dû partir. C'était bizarre, j'étais content que Milly soit à l'abri, mais triste de savoir que je ne la reverrai pas avant des années. Si on se revoyait un jour

… D'ailleurs, je n'aurais plus d'accès à un téléphone ce soir ! Il fallait que j'appelle Karen au moins pour la prévenir. Je ne pouvais pas descendre le récupérer tout de suite. Quel idiot je faisais ! Je me creusai la tête jusqu'à voir ma Pikachu en train de jouer aux petits chevaux sur le canapé.

-Chu ! J'ai besoin de ton aide !

-Il se passe quoi ?

-J'ai besoin que tu ailles chercher le téléphone en bas.

-Hein ? Pourquoi f… Oooh je vois. termina-t-elle avec un air taquin. Je vais te chercher ça tout de suite.

Elle eut tout juste le temps de descendre du canapé qu'un nouvel arrivant faisait son entrée.

-Rei, on a un souci. fit le Goupix inhabituellement affolé. Le bateau de Milly se fait attaquer.


Fin du chapitre

Un petit cliffanger pour changer. Cela vous avez manqué pas vrai ?

Concernant le Goupix de la mère de Pixie, il n'a pas trop interagi dans ce chapitre. Il ne faut pas s'en étonner, il est très silencieux de base mais observe ce qu'il se passe.