NdA : Il faut savoir quand terminer une histoire. J'ai longuement hésité mais je crois que c'est ce qui convient le mieux. Je vous laisse découvrir. Merci à tous pour votre suivi et vos reviews ! J'espère qu'on se retrouvera bientôt, via les commentaires ou sur une autre histoire. ;-)


- 7 -

Le capitaine ramena les prisonniers seul jusqu'à Los Angeles. Il les laissa à la garde du sergent Garcia puis se dépêcha de repartir en direction de l'hacienda de la Vega.

Quand il arriva, don Alejandro faisait les cent pas dans le patio.

– Don Alejandro, où est don Diego ?

– Dans sa chambre.

La réponse n'était pas du tout celle à laquelle s'attendait le militaire.

– Il a refusé tout dialogue sur le chemin du retour, expliqua l'hidalgo. Sitôt arrivé, il est allé s'y enfermer avant que quelqu'un ne le voit. J'ai confié les chevaux aux vaqueros puis j'ai voulu le rejoindre…. Il refuse d'ouvrir !

La dernière phrase alarma le capitaine.

– Don Alejandro, la blessure de Diego est grave. Ne croyez-vous pas que…

– Grave ? le coupa-t-il inquiet. À quel point ?

– Avez-vous un moyen d'ouvrir la porte ? esquiva Arturo.

Le don secoua la tête négativement. Il commençait à avoir véritablement peur pour son fils.

Toledano se rua à l'étage, le don sur les talons. Il ne s'embarrassa pas de politesse, l'heure était trop grave. Il tambourina à la porte.

Bam bam bam.

– Don Diego !

Bam bam bam.

– Don Diego, si vous m'entendez, ouvrez ! Don Diego !

Le bruit que faisait le capitaine aurait réveillé un mort. Il alerta plusieurs domestiques qu'Alejandro eut la présence d'esprit de renvoyer en se souvenant qui était son fils.

– Don Diego ! appelait toujours le capitaine.

Il était prêt à enfoncer la porte même s'il doutait y arriver.

– Don Die…

Il y eut un léger cliquetis de serrure. Arturo actionna la poignée et ils s'engouffrèrent dans la pièce.

Diego était assis contre le mur près de la porte, torse nu. Il était parvenu à défaire le bandage mais l'enlever avait terminé d'arracher les points. La douleur, la fièvre et la fatigue avaient eu raison de ses forces après l'énergie déployée dans l'après-midi. Les appels du capitaine l'avait difficilement ramené à lui, il s'était traîné jusqu'à la porte qu'il avait eu bien du mal à ouvrir.

– Je vais vous aider, proposa Arturo en passant son bras autour de ses épaules.

Il le releva en même temps qu'Alejandro refermait la porte. Une fois étendu sur son lit, Diego respira mieux.

– Seigneur ! s'écria son père en découvrant l'ampleur des dégâts.

La largeur comme la profondeur de la blessure était effrayante mais c'était la peau rougie et le signe d'infection qui l'était davantage. Arturo n'en revenait pas.

– Vous êtes parvenu à vous recoudre seul !?

– Mal, vous le constatez.

– Rien n'aurait résisté au choc que vous avez subi ni aux efforts que vous avez fourni ensuite. Le docteur Avila pourrait peut-être…

– Non.

C'était un refus clair et définitif, Arturo n'insista pas. Il fouilla la pièce du regard pour trouver le nécessaire de couture.

– Pas ici, murmura Diego. Père ?

– Oui, mon fils. Dis-moi comment t'aider.

Le jeune homme indiqua comment ouvrir le passage secret de sa chambre.

– Sur la table.

La scène était surréaliste mais aucun d'eux n'avait le temps de le réaliser. Alejandro disparut chercher le matériel pendant qu'Arturo attrapait une chaise en vue des soins.

– Capitaine ? s'étonna Diego.

– Vous n'êtes pas le seul à avoir dû soigner une plaie faute de médecin. Tenez, mordez-ça.

Le plus surprit à la nouvelle fut malgré tout l'aîné des de la Vega.

– Vous n'allez pas…

– Préférez-vous vous en charger, don Alejandro ?

Il secoua la tête négativement. Le militaire se mit à l'ouvrage.

Le temps s'étira mais Diego, enfin soigné, put se laisser aller au repos. Ses compagnons le regardèrent dormir quelques instants avant de se concerter. Et maintenant ?

.

Les heures puis les jours filèrent. Soigné mais toujours faible, Diego garda le lit. Son père s'occupa de préparer les médicaments dont il avait besoin, suivant scrupuleusement ses indications. Il s'étonna de l'étendue de ses compétences en la matière et se demanda à combien de reprises son fils avait dû recourir à ces potions et ces onguents. Le jeune homme esquiva toutes les questions, tout comme il refusa de s'étendre sur l'origine de sa blessure ou les actions passées de Zorro. Il n'était pas encore prêt à partager cela avec son père.

Le capitaine Toledano ne revint à l'hacienda que deux jours plus tard. L'arrestation des Limenes et sa future prise de poste le contraignirent à demeurer au pueblo. Quand il parvint enfin à se rendre chez les de la Vega, ce fut accompagné du sergent Garcia. Le soldat voulait vérifier si son ami allait bien. Don Alejandro avait fait savoir qu'il avait pris froid et devait se reposer quelques jours. Cela inquiétait Garcia – et par la même la plupart des habitants de Los Angeles – qui n'était pas habitué à le savoir si mal en point. Il fut soulagé en découvrant don Diego assis dans un fauteuil du salon à leur arrivée. S'il paraissait un peu pâle, il n'était pas si mal qu'on le disait.

– Don Diego, je suis rassuré de vous voir comme ça !

– Mon père s'est inquiété un peu vite, sergent, sourit Diego. Bernardo n'est pas encore revenu de son voyage et je crois qu'être garde-malade lui convient assez peu.

Le concerné leva les yeux au ciel en retenant une remarque.

– Vous êtes sûr d'aller mieux ? interrogea le capitaine Toledano.

– Je suis en parfaite santé, capitaine.

Il le prouva en passant du fauteuil à une chaise à table pour le dîner qu'ils devaient partager ensemble. Tout le temps que dura le repas, le capitaine se demanda s'il n'avait pas rêvé ces derniers jours. Don Diego allait tellement bien... ce n'était pas possible qu'il soit l'homme blessé qu'il ait soigné. Lui, Zorro ? Impossible !

Pourtant c'était bien le cas. Diego lui-même le lui avait confirmé et il se souvenait encore très bien d'avoir recousu la plaie à sa poitrine.

– Vous allez donc nous quitter, capitaine ? demanda-t-il.

Perdu dans ses réflexions, le militaire eut un sursaut. Avec indulgence, Diego reformula sa question sur son prochain départ.

– Oui, confirma Arturo en se reprenant. Je vais rejoindre ma femme et mon fils. Le temps de faire nos bagages et nous serons de retour à Los Angeles. Définitivement je l'espère.

– Nous l'espérons également. Je suis seulement navré que notre chez commandant par intérim doive renoncer à son poste.

– Oh, ne le soyez pas, don Diego ! répondit aussitôt Garcia. Je préfère être un simple sergent et servir un commandant comme le capitaine Toledano !

Le ton de sa voix disait toute l'admiration et le respect qu'il avait pour lui. Arturo le remercia pour sa confiance et enchaîna sur la magnifique terre qu'était la Californie.

– Elle demande de la patience et du travail mais elle a beaucoup à offrir, confia don Alejandro quand ils abordèrent la vie de ranchero.

La richesse des de la Vega était de notoriété commune, ainsi que son dur labeur. Don Alejandro avait passé sa vie à faire fructifier son héritage et Diego suivait enfin sa voie.

– Vous devez être un homme comblé, don Alejandro.

– Presque, capitaine. Je le serai quand Diego acceptera enfin de se marier et de me donner des petits-enfants.

– Père !

– Je ne rajeunis pas, Diego.

– Votre père a raison, n'est-ce-pas sergent ?

– Oui, capitaine, je suis d'accord. Vous devriez vous marier, don Diego.

Il développa toutes les raisons qu'il aurait à le faire, avant de lister les femmes célibataires à qui il pourrait faire la cour.

Diego fusilla du regard son père et le capitaine. Le militaire se pencha vers lui, amusé.

– Vous pouvez donner le change avec ou sans masque, señor, mais ce n'est pas un morceau de tissu qui vous sauvera cette fois. Vous vous marierez tôt ou tard. J'ai d'ailleurs ouïe dire qu'une certaine Lolita Pulido revenue d'Espagne ne vous laissait pas indifférent…

Diego le regarda étonné. Comment pouvait-il savoir cela ?

– Le célèbre Renard n'est pas le seul a avoir des oreilles partout. Si je me réjouis d'œuvrer avec lui pour protéger Los Angeles, je suis bien plus intéressé de savoir quelle femme lui passera la bague au doigt.

Diego éclata de rire.

– Nous verrons, capitaine, nous verrons.

Pour l'heure il prenait le temps de guérir. Quand Bernardo arriverait dans quelques jours il aurait bien des choses à lui raconter.

Les quatre hommes trinquèrent à la Californie et à l'avenir. Diego se dit qu'il avait enfin trouvé sa place mais que sa mission la plus difficile à l'avenir ne serait pas d'agir comme Zorro.

Ce serait de vivre sans masque…

Fin