Bonjour tout le monde !
J'espère que vous allez bien. Me revoici avec ce nouveau chapitre qui est, bon sang, un gros morceau là encore !
J'ai mis une fois de plus pas mal de temps à l'écrire, j'ai fait quelques réécritures dessus car je voulais en être satisfaite. Comme j'ai une sacrée tendance à développer et sur-développer des choses qui devraient être plus intuitives, j'ai essayé de faire des efforts là-dessus. Vous me direz ce qu'il en est : si ça se ressent ou si c'est un échec critique aha ^^
Par ailleurs, j'aimerais connaître votre opinion sur la longueur des chapitres : j'ai l'impression de faire des sacrés pavés et je me dis que ça gêne peut-être la fluidité de la lecture. N'hésitez pas à me dire si vous pensez qu'il vaut mieux que je découpe davantage.
Merci beaucoup à Meephoebo (merci pour les compliments !) , Fleur d'Ange (promis, ça avance ;) quelques petites épines sur le chemin mais ça avance aha) et Aliénor (merci plein pour le commentaire sur les personnages secondaires, c'est un grand objectif pour moi que de développer tout ça en évitant d'être trop caricaturale) pour vos commentaires, ça fait super plaisir et ça encourage beaucoup !
Sans plus tarder, la suite ! N'hésitez pas à donner votre avis et à bientôt ! :)
SGSGSGSGSGSGSGSGSGSGSGSGSGSGSGSGSG
Revenir habiter dans la maison de son enfance bouleversa Hermione plus qu'elle ne l'aurait aimé. Dès son arrivée, la jeune femme avait erré dans les recoins de son ancien foyer où tout était resté strictement à l'identique. Hormis un détail, essentiel. La belle brune avait contemplé durant de longues heures en silence les photographies de famille. Sur l'une d'entre elles, on apercevait sa mère dans le salon en train de jouer du piano, le visage radieux tourné vers l'objectif. Sur une autre, son père, dans son cabinet de dentiste, fier comme un paon. Certaines où ils se tenaient main dans la main, d'autres où ils dansaient. Quel que soit l'endroit où elle posait les yeux, Hermione reconnaissait chaque souvenir lié à leur vie commune. Il ne manquait qu'un élément : elle.
Lorsqu'il n'y avait eu plus le moindre doute que Voldemort tenterait par tous les moyens de les détruire, la jeune femme avait dû se résoudre au pire. Elle avait effacé son existence entière de l'esprit de ses parents et les avait envoyés en Australie afin de les éloigner le plus possible des affrontements. Une fois la paix revenue, Hermione avait mené son enquête pour les retrouver. Elle s'était rendue dans un petit village au sud du pays. Ses parents y avaient construit une ferme et menaient une vie paisible au sein de leur communauté. C'était tout ce qu'elle avait eu besoin de savoir. La jeune femme était rentrée à Londres, le cœur lourd mais serein.
Elle avait gardé la maison, comme un rappel constant des sacrifices qu'elle avait dû mener. Et à cet instant précis de sa vie, Hermione était soulagée d'avoir fait ce choix.
La jeune femme retrouva bien vite ses marques. Elle passa de longues heures assise dans le jardin derrière la maison, à réfléchir sur son parcours. Bien vite, les choses se dénouèrent dans l'esprit de la sorcière. Hermione réalisa d'abord qu'elle et Ron avaient précipité les choses dès la fin de la guerre. L'époque était à la liesse générale et le monde avait besoin de nouvelles réconfortantes. Leur mise en couple avait été une de ces réponses. Ils ne s'étaient pas posés de questions sur leur avenir, tant ils avaient été heureux et soulagés d'être en vie. Et puis huit années s'étaient écoulées.
La pluie s'installa les jours suivants. Hermione se replia à l'intérieur et commença à faire le tri de la maison tout en continuant de dresser le bilan de sa propre vie. Huit ans plus tard, où en était-elle ? La jeune femme fut forcée de constater que les choses ne s'étaient pas déroulées comme elle l'avait imaginé. Lorsqu'elle était adolescente, Hermione avait très vite pris sa décision : elle travaillerait au sein du Ministère de la Magie et bouleverserait l'ordre établi. Elle se savait faite pour cela, c'était ce qu'elle désirait au plus profond de son cœur. Son travail acharné en était la preuve. Et si les choses progressaient peu à peu, Hermione savait qu'elle ne lâcherait rien et continuerait à gravir les échelons pour enfin, se hisser au sommet et changer les choses. Ce serait le travail d'une vie entière.
C'est alors qu'elle rangeait les vêtements de sa mère qu'Hermione trouva enfin la réponse à sa question. Ses mains s'immobilisèrent. Elle porta un chemisier à ses lèvres et huma le parfum. Des larmes perlèrent à ses yeux. La sorcière s'assied sur le bord du lit un instant. Puis elle termina le carton qui était face à elle et quitta la pièce en fermant doucement la porte. Une fois dans sa chambre, la belle brune ramassa ses affaires et les remit dans son sac de voyage. Elle vérifia que tout était à sa place et referma les portes de la maison familiale. Adressant un dernier regard en arrière vers la façade familière, la sorcière s'évanouit en un instant, ne laissant qu'une tempête de feuilles virevoltantes sur son passage.
o O o
Cela faisait quelques heures que Sirius déambulait, l'air préoccupé, dans les rues londoniennes. Son regard d'acier se portait sur les enseignes moldues devant lesquelles il passait, d'un pas souple. Mais rien ne semblait arrêter l'animagus.
Il prit le croisement suivant et arriva dans Birch Street. Des friperies s'étalaient là, quelques laveries automatiques et enfin un square peuplé d'enfants criards. Sirius n'y prêta qu'une attention sommaire. Ses pas le firent passer devant une façade toute de bleu foncé où s'étirait une grande vitrine bien agencée. Il ralentit légèrement. Ses yeux se posèrent sur les ouvrages mis à disposition des passants désœuvrés. Chaque livre était posé sur une étagère disposant de quelques lampions. De petites étiquettes à la calligraphie élégante donnaient un aperçu de l'œuvre présentée. L'animagus s'arrêta complètement et leva la tête. Les mots « La Librairie du 7e » étaient dessinés à l'encre dorée sur le haut de la façade. Il ouvrit la porte en bois d'ébène qui fit tinter un carillon cristallin.
La librairie fleurait les livres anciens et la menthe poivrée. Elle comportait deux niveaux. Le rez-de-chaussée laissait défiler des étagères massives qui croulaient sous les œuvres de poche. Dans un coin de la boutique reposait une grille en fer forgé sur laquelle des peintures et gravures étaient affichées. Sirius se balada dans les rayonnages, davantage attentif à l'agencement de la boutique plutôt qu'aux titres qu'il avait en face des yeux.
À l'extrémité de la boutique, une jeune femme le regardait. Ses yeux verts avaient tout de suite été attirés par le nouvel arrivé. Grand, brun aux cheveux longs, vêtu d'un blouson de cuir. Il possédait cette faculté dont certains hommes seulement sont dotés : celle de devenir en un clin d'œil le centre de l'attention du monde alentour, sans faire le moindre effort manifeste pour cela.
Sirius leva à son tour les yeux vers la jeune femme. Celle-ci referma le livre qu'elle avait dans les mains et lui sourit. Elle avait un visage rond et amène, parcouru de taches de rousseur. Ses rondeurs étaient mises en valeur par une chemise blanche et un veston bleu nuit ainsi que par une jupe longue qui descendait en coupe droite jusqu'à des bottines lacées marron. Ses cheveux longs et roux étaient maintenus en un chignon par une pince dorée, comportant deux petites plumes d'augurey rose. Le sorcier lui rendit son sourire.
« Je peux vous aider ? » demanda la rousse en attendant qu'il arrive à sa hauteur.
L'inconnu esquissa un rire gêné. Ses yeux étaient d'un gris irisé qu'elle trouva aussitôt fascinant.
« À dire vrai, je suis un peu dans une impasse… , expliqua Sirius en jetant des coups d'œil à la ronde.
- Éclairez-moi, l'invita à poursuivre la jeune femme.
- J'ai visité quelques garages pour proposer mes services et le dernier m'a demandé de lui ramener des choses précises. Il a parlé d'une lettre et d'un autre objet…
- Une lettre de motivation et un CV ? demanda la gérante en haussant un sourcil.
Le visage du grand brun s'illumina. Les sourcils de la jolie rousse se haussèrent davantage.
- Comment est-ce possible que vous ne sachiez pas le faire ? Vous n'avez jamais travaillé auparavant ? demanda-t-elle, incrédule.
- Si, j'ai… Je me suis occupé. Des boulots çà et là, répondit le sorcier en jouant la carte de l'assurance.
Le sourire de la jeune femme se fit plus amusé.
- J'ai du mal à vous croire. Vous me paraissez être le genre de type qui n'a pas besoin de se retrousser les manches. Laissez-moi deviner… Si j'en juge par vos vêtements, je dirais rentier ? proposa-t-elle.
Sirius la regarda pendant un instant avant d'esquisser un grand sourire ingénu.
- Peut-être ?
La jolie rousse éclata de rire.
- Vous aimez cultiver le mystère, vous… Et qu'est-ce que vous espérez trouver dans ma boutique alors ?
- Je me suis dit qu'il n'y aurait pas meilleur endroit pour répondre à mes questions qu'une librairie. Vous savez, le réceptacle de tous les savoirs au monde, ce genre de choses… répondit Sirius, avec davantage de bravade.
- Et comme vous avez bien fait ! »
Elle le jaugea davantage du regard, un sourire amusé flottant sur ses lèvres. Sirius ne fléchit pas. Enfin, elle reposa l'ouvrage qu'elle avait dans les mains et les mit sur ses hanches.
« Voilà ce qu'on va faire : je peux vous conseiller des ouvrages qui traitent de la question. J'ai peut-être même quelques articles dans la réserve… Ou je peux aussi vous apporter directement mon aide. En échange…
- En échange ?
- D'un verre, conclut-elle en accentuant son sourire.
Sirius esquissa un rire surpris. Il passa une main sur sa joue rugueuse et redirigea son regard d'acier vers son interlocutrice.
- C'est une pratique répandue d'inviter à sortir les hommes qui passent la porte de votre établissement ?
- Eh, on est à Londres, répliqua la jolie rousse sans flancher.
Le sourire du sorcier s'accentua. Il fit un pas vers elle.
- Entendu. Vendredi ?
- Dix-neuf heures », conclut-elle avec le même air malicieux.
Sirius sortit peu après de la boutique, un fin sourire aux lèvres.
o O o
Hermione revint à son domicile dans l'après-midi. Ron n'était pas encore rentré du Ministère. Lorsqu'elle apparut dans leur salon, la jeune femme passa une main sur l'étagère où trônaient les photos de leur vie commune. Ses yeux se posèrent sur tout ce qu'ils avaient construit ensemble. La sorcière s'assied dans le canapé et attendit.
Ron arriva dans la cuisine en un transplanage. Il épousseta les gouttes de pluie qui tombaient de ses cheveux roux en pestant. Alors qu'il s'apprêtait à se servir un verre, le sorcier aperçut sa compagne debout dans le salon, qui le regardait. Un large sourire naquit sur les lèvres de ce dernier.
« Tu es rentrée » lança-t-il en tendant ses bras vers elle.
Hermione répondit doucement à son étreinte.
« Oui. » murmura-t-elle.
Alors que Ron se penchait pour l'embrasser, ses yeux se posèrent sur la jeune femme. Hermione répondit à son regard. Le visage du jeune homme perdit de sa superbe.
« Oh… » se contenta-t-il de dire.
Hermione ouvrit la bouche, mais aucun mot n'en sortit. Ron fit un pas en arrière et eut un rire incrédule. Il se frotta l'arrière du crâne.
« Nom de Dieu…, murmura-t-il, sans vouloir y croire.
- Ron… Assieds-toi avec moi », demanda Hermione, aussi calme que possible.
Trop stupéfait pour la contredire, le sorcier s'installa sur le canapé. La jeune femme s'assied à côté de lui, ses mains se joignant aux siennes.
« J'ai pris le temps de réfléchir…, commença-t-elle.
- Herm, je ne suis pas sûr d'être prêt à entendre ça », avoua Ron en levant les yeux vers elle.
Hermione hésita à son tour. Elle plongea son regard dans celui de son compagnon. Ron occupait une telle part de son existence. Elle mordit sa lèvre inférieure mais reprit.
« Je te dois une réponse. », déclara-t-elle d'une voix sourde.
Ron sembla prêt à répliquer. Mais il finit par lâcher un profond soupir, baissant la tête.
« C'est non alors ? »
Hermione prit une inspiration et hocha la tête. Elle sentait déjà l'émotion l'étreindre. Ron releva les épaules pour lui faire face.
« Herm, je ne comprends pas… On est heureux, ensemble, plaida le jeune homme.
- Je le sais Ron. Mais tu me demandes quelque chose que je ne peux pas te donner.
- Jamais ? finit-il par demander.
- Non, affirma Hermione en le regardant droit dans les yeux.
- Pourquoi ? relança-t-il, d'une voix désemparée.
- Parce que… Parce que ça n'est pas pour moi, balbutia Hermione en serrant davantage les mains de son compagnon. Ça ne l'a jamais été. Et j'ai eu beau me laisser porter par les événements, cet état de fait n'a pas changé. Depuis mes premiers pas à Poudlard, j'ai su que je voulais changer le monde des sorciers et des sorcières. Je veux devenir Ministre de la Magie. Et ça n'est pas une carrière qui se construit en parallèle avec des enfants… »
Ron l'écouta sans la couper. Sa tête retomba entre ses épaules tandis qu'il poussait un profond soupir. Un long moment passa, où Ron resta plongé dans ses réflexions. Puis il finit par reprendre la parole.
« Hermione… Si c'est vraiment ce que tu souhaites, alors il faudra bien que je l'accepte. » murmura le jeune homme en hochant la tête.
Les mains de la jeune femme vinrent se saisir du visage de son compagnon pour le forcer à la regarder.
« Ne fais pas ça, déclara-t-elle d'une voix d'où pointait l'émotion.
- Qu'est-ce que tu veux dire ? balbutia Ron.
- Ce n'est pas la solution, Ron, et tu le sais très bien.
- Alors quoi ? Qu'est-ce qu'il faudrait faire ? Que l'on se sépare ?! C'est ridicule, s'exclama le sorcier en s'empourprant.
Hermione ne répondit rien et se contenta de le regarder. Les yeux du jeune homme s'agrandirent sous la stupeur.
- Non… Non, tu plaisantes.
- Quelle option nous reste-t-il ? s'exclama à son tour la sorcière, aux abois.
- Hermione… Par Merlin, mais c'est nous ! C'est de nous que tu parles !
- Je le sais parfaitement ! s'écria la jeune femme tandis que des sanglots montaient à ses yeux. Je sais à quoi je renonce Ronald, n'en doute pas un seul instant.
- Mais tu n'as pas à renoncer, puisque j'accepte qu'on n'ait pas d'enfants ! »
Hermione ferma les yeux et prit le temps de calmer la frénésie qui venait répondre à celle de son partenaire. Une longue inspiration lui laissa reprendre ses esprits. Elle leva un regard douloureux vers lui.
« Ron… Je vais te poser une question et je veux que tu y répondes avec la plus grande franchise. »
Ce dernier leva les yeux au ciel, prêt à reprendre l'affrontement. Le silence persistent de sa compagne l'obligea à y renoncer.
« Réfléchis et dis-moi si tu pourras pleinement t'épanouir toutes ces décennies à venir sans jamais avoir d'enfants. » demanda Hermione en dardant un regard inflexible vers lui.
Ron fronça les sourcils et s'apprêta à prendre la parole. Mais il resta immobile, sondant son cœur. Les secondes passèrent et son regard se plissa davantage. Il finit par relever la tête, un regard résigné marquant son visage.
« Non. »
Hermione hocha la tête, l'air aussi grave que lui. Tous deux restèrent un instant sans prononcer le moindre mot. Leurs mains étaient toujours jointes en une étreinte crispée. Ce fut Ron qui rompit le silence entre eux.
« Mais Hermione… Je t'aime. » murmura-t-il, le cœur brisé.
Cette dernière sentit sa carapace se fissurer. Elle passa une main tendre sur le visage de son compagnon.
« Je sais, balbutia-t-elle dans un nouveau sanglot. Et je t'aime aussi, Ron. Je t'ai aimé toutes ces années, n'en doute pas. Mais je ne peux plus continuer… »
Ron resta muet, comme sonné par un coup retentissant. Hermione demeurait immobile, ne sachant que faire. Une part d'elle lui ordonnait de fuir l'appartement tant elle avait honte de briser le cœur de son partenaire. Une autre semblait tout aussi sonnée que lui à l'idée que leur rupture était dorénavant actée. De longues minutes passèrent ainsi sans que l'un d'entre eux n'esquisse un geste pour partir. Puis, presque naturellement, les deux jeunes gens se regardèrent et se prirent dans leurs bras. Hermione sentit son cœur se serrer davantage lorsque les pleurs de Ron mouillèrent le col de sa chemise. Mais elle resta là, s'agrippant plus fort encore à son ancien amant, laissant à son tour les larmes rouler sur son visage.
o O o
Les jours qui défilèrent furent difficiles tant pour Ron que pour Hermione. Mais ils décidèrent d'y faire face ensemble. Le jeune homme annonça qu'il s'installerait dans l'ancien appartement de George en attendant de trouver un nouveau logement. Hermione protesta, expliquant que c'était à elle de quitter leur logement et d'en trouver un autre. Ron ne lui avait répondu qu'avec un sourire triste qui lui avait fendu le cœur. Il avait préparé un sac de voyage et avait quitté les lieux le lendemain. Tous deux s'étaient mis d'accord pour conserver quelques temps le secret de leur séparation. Décembre approchant, Ron et Hermione étaient conscients qu'il leur faudrait en parler avant les fêtes de Noël mais ils n'avaient pas encore le cœur de l'annoncer à leur famille. Hermione se voyait déjà brisant tous les espoirs de Molly Weasley et le chagrin l'accablait à chaque fois qu'elle y songeait. Ron ne s'en sentait pas non plus capable.
Hermione se retrouva ainsi seule dans leur appartement. La situation lui semblait encore tellement saugrenue. Elle avait passé des années ici en compagnie de Ron. Ils s'étaient construit au fur et à mesure du temps ce foyer… et elle avait mis fin à cette ère. Hermione pleurait leur relation passée, mais au fond d'elle-même reposait la singulière conviction d'avoir fait le bon choix. Leurs aspirations futures ne pouvaient se rejoindre et la jeune femme n'était pas prête à sacrifier son plan de carrière pour adhérer à une vie qui ne lui correspondrait pas. Même pour Ron. Ainsi, la douleur de la séparation était présente, mais la sorcière savait que cela passerait. Pour le moment, il était temps de se concentrer sur elle-même et de laisser le temps agir.
o O o
Novembre laissa sa place à décembre. Un vif froid s'installa dans tout le pays à mesure que les fêtes de fin d'année avançaient. Ce fut une nuit particulièrement venteuse qui vint accueillir Ginny et Harry alors qu'ils quittaient le square Grimmaurd pour se rendre dans l'appartement de leurs meilleurs amis. Ron et Hermione les avaient invité à diner afin de leur parler de quelque chose d'important. Le couple transplana devant l'immeuble et fut accueillie par Hermione. Cette dernière esquissa un sourire plein d'émotion et les serra tous deux dans ses bras.
« Hey Hermione, tout va bien ? s'inquiéta Harry tandis qu'il répondait à son étreinte.
- Oui, oui, assura cette dernière en hochant la tête. Ça me fait plaisir de vous voir. »
La sorcière brune les invita à entrer dans l'appartement. Ron les attendait dans le salon, des verres à la main. Il embrassa les deux nouveaux venus et les invita à s'asseoir sur le canapé. Ginny et Harry remarquèrent aussitôt le même sourire triste sur le visage du sorcier. Ils prirent les verres préparés par Ron et burent une gorgée. Hermione s'installa à côté de Ron, sur les fauteuils en face d'eux. Ils se jetèrent un regard en biais, mal à l'aise.
« Bon, qu'est-ce qui se passe ? finit par demander Harry, inquiet. Quelque chose est arrivé ? »
Hermione lança de nouveau un regard en direction de Ron. Ginny observa la scène et ses yeux s'écarquillèrent. Sa main se crispa sur l'accoudoir du canapé.
« Oh Merlin… , murmura-t-elle, estomaquée.
- Quoi ? Quoi ? demanda Harry à la ronde.
Hermione regarda sa meilleure amie, la mine sombre. Puis elle prit la parole.
- Ron et moi, on a quelque chose à vous dire. Tous les deux, on… »
o O o
Sirius ouvrit la porte sur un George frigorifié. Ce dernier entra en un éclair dans la maison des Black, poussant un profond soupir.
« Quelle plaie ce temps ! Je crois que j'ai perdu l'usage d'au moins trois de mes doigts de pied. Et les autres vont probablement se détacher d'une minute à l'autre. » grogna-t-il en se séparant à regret de son blouson et de son bonnet.
Sirius éclata de rire et l'invita à s'installer dans le salon. Il y entra quelques minutes plus tard, tenant une choppe fumante dans chaque main. George hocha la tête pour le remercier.
« Qu'est-ce que c'est ?
- Thé noir, cardamone et cannelle.
- Mon royaume pour un vin chaud, se lamenta le Weasley en acceptant toutefois ce que lui tendait son camarade.
- Noël approche, on pourra peut-être franchir le cap et boire une coupe de champagne, annonça Sirius avec un sourire sans joie.
- Ne me fais pas trop rêver Sirius, je suis un jeune homme sensible », répondit George, sardonique.
Le sourire de Sirius s'accentua et tous deux trinquèrent. Le jeune rouquin poussa un soupir de soulagement à mesure qu'il se réchauffait.
« Des félicitations s'imposent, lança-t-il en direction de Sirius.
Ce dernier haussa un sourcil, interloqué.
- J'ai cru comprendre que tu avais trouvé de quoi t'occuper, expliqua George avec un sourire.
- Comment tu es au courant de ça ?
- Ginny m'a dit que tu avais trouvé un endroit dans lequel tu retapais de vieux bolides.
Sirius eut un temps d'arrêt puis répondit bien vite.
- Effectivement, je fais quelques heures par semaine dans un garage de Camden Town. Le gérant cherchait une paire de mains motivées.
- Ça te plait alors ?
Le sourire de Sirius se fit plus dévorant.
- C'est le rêve. Lorsque j'étais plus jeune, j'ai passé des heures à bricoler la mienne. James ne pouvait plus me voir en peinture tant je rabâchais encore et encore les dernières modifications que je lui apportais. C'était tout ce que j'avais, cette moto.
Le regard de l'animagus se perdit dans les souvenirs.
- C'était le bon temps. Je suis ravi de replonger là-dedans. Et puis ça me permet de voir autre chose.
- Tu m'étonnes… Travailler pour des Moldus : je crois que tu as atteint le seuil de tout ce que tu pouvais faire endurer au souvenir de cette charmante Walburga, répliqua George avec un rictus.
- Il me reste encore à en épouser une afin de parfaire la déchéance de la famille Black, rajouta Sirius, hochant la tête comme s'il évaluait ses chances.
George haussa un sourcil circonspect à la remarque de son ami. Ce dernier s'en aperçut et un rictus orna ses lèvres espiègles.
- Ça n'est pas dans les cartons, affirma-t-il en prenant une gorgée.
- Tu me rassures. Il y a suffisamment de chambardements comme ça dans la famille sans que tu viennes en rajouter de ton côté. » soupira le Weasley en s'adossant contre le fauteuil.
Ce fut au tour de Sirius de lancer un regard interrogatif vers son camarade. George termina son thé et leva la tête. Son visage paisible se mut en un air atterré.
« Oh Merlin… Tu ne sais pas ? demanda-t-il en reposant sa chope devant lui.
- Quoi ? lança Sirius, inquiet.
- Hermione et Ron… Ils se séparent » annonça George avec une grimace.
Sirius continua d'observer son interlocuteur. Une seconde passa. Il cligna des yeux.
« Pardon ? relança-t-il, sans comprendre.
- Ouais, ils ont invité Ginny et Harry ce soir pour le leur annoncer… Ça fait quelques semaines si j'ai bien compris, développa George.
- Mais… , commença Sirius avant de se taire de nouveau, cherchant ses mots.
George attendit qu'il reprenne.
- Tu l'as su quand ?
- Quand je suis rentré dans mon appart, figure-toi. Ça faisait trois mois que j'étais chez mes parents et… soyons honnêtes, il était temps que je retrouve mon chez-moi. La cohabitation commençait à devenir longue, pour eux comme pour moi. La semaine dernière, je débarque donc avec mon sac sur le dos pour me retrouver nez à nez avec Ron, en caleçon dans le salon, un bol de céréales à la main.
Le frère Weasley éclata d'un rire sans joie. Sirius continua de fixer son ami.
- Je lui ai demandé des explications. Il m'a dit tout honteux qu'il s'était installé là après la rupture. Apparemment, tous les deux ont eu une longue discussion sur l'avenir et n'ont pas réussi à tomber d'accord. Je crois qu'Hermione a réalisé qu'elle ne voulait pas du train de vie auquel se prédestinait le frangin. Ça m'a fait quelque chose… Mais je me suis dit qu'il valait mieux que ça arrive maintenant. Bref, Ron m'a demandé s'il pouvait rester et je me voyais mal lui dire non au vu de sa situation. » conclut George, embarrassé.
Sirius resta mutique. Son cœur tambourinait si fort qu'il craignait de voir exploser sa cage thoracique.
« Il va rester chez moi quelques semaines, le temps de retrouver un appart. Honnêtement, ça m'arrange d'avoir quelqu'un avec moi, même ce grand bêta, s'amusa le rouquin avec tendresse.
- Ça limite le risque de replonger, murmura l'animagus, le regard lointain.
- Complètement. »
Après quelques instants, George releva les yeux vers son ami.
« Ça va ? , demanda-t-il.
- Oui, ça va », s'empressa de répondre Sirius, faisant osciller sa chope sur la table basse.
Puis il se leva prestement.
« J'arrive »
George hocha la tête, interdit, et le laissa quitter le salon.
Sirius prit à grandes enjambées les escaliers le menant au second étage de la maison. Il ferma la porte de la salle de bain derrière lui, d'un geste fébrile. Le sorcier se pencha en avant, les mains crispées sur le lavabo. Un profond soupir s'échappa de ses poumons. Sirius releva la tête pour y voir son reflet. Deux iris tempétueuses lui firent face. Il balaya d' une main nerveuse son visage tourmenté.
« Bordel »
Il prit quelques secondes afin de calmer les battements frénétiques émanant de sa cage thoracique. Alors que sa main se refermait sur la poignée, son regard fut attiré par une tache rose. La pince à cheveux reposait sur le bord de la baignoire. Sirius la contempla un instant, le regard lourd. Puis il poussa un soupir et quitta la pièce.
o O o
C'était la dernière semaine avant les fêtes de fin d'année et le Ministère croulait sous les affaires urgentes. En d'autres occasions, Hermione aurait pesté contre ce raz de marée administratif de dernière minute qui s'offrait à elle. Mais en vérité, la sorcière était heureuse de pouvoir se plonger dans le travail qui lui permettait, pendant un temps, de ne pas se focaliser sur sa situation.
Elle fut ravie de recevoir une note de service signée de la main de Luna l'invitant à prendre le thé durant le week-end. Hermione finalisa ses derniers dossiers le vendredi soir et attendit avec impatience le lendemain pour retrouver son amie chez elle. Comme à son habitude, Luna avait préparé un lot de pâtisseries toutes plus incongrues les unes que les autres. Hermione la remercia et prit une bouchée prudente d'un muffin violacé.
« Comment vas-tu ? lui demanda la belle blonde tandis qu'elle leur servait une tasse de thé.
- Bien, malgré la folie administrative aux alentours, répondit Hermione après un instant.
- Je ne comprends pas cette cadence effrénée des derniers jours. Tout le monde est sens dessus-dessous, et ce, dans tous les services.
- Mmh, quelque chose à voir avec Noël sans doute ? proposa la jeune femme avec un sourire en coin.
Les yeux bleus de Luna papillonnèrent.
- C'est Noël qui les rend comme ça ? s'exclama-t-elle avec stupeur.
- Oui, crois-le ou non mais les gens ont tendance à prendre cette fête au sérieux, s'amusa son amie.
- C'est tout de même particulier… Que les enfants moldus croient en un gros bonhomme qui passe sa nuit à descendre dans les cheminées, pourquoi pas. Mais le monde sorcier est au courant de ce qui se fait et ne se fait pas en termes de magie !
Hermione éclata de rire.
- Tu ne fêtais pas Noël chez toi ?
- Si, quand j'étais plus petite et que maman était là.
La sorcière aux boucles brunes déglutit.
- Ne t'en fais pas, ça fait longtemps maintenant. Et puis toi aussi tu as perdu ta maman, murmura Luna en posant sa main sur celle d'Hermione.
Cette dernière sentit son cœur se serrer. Il lui était encore difficile d'évoquer le sujet.
« Où est-ce que tu vas le faire de ton côté ? demanda Luna en changeant d'axe.
- Harry et Ginny l'organisent à Grimmaurd… Je pense que je le ferai avec eux. Même si… grimaça Hermione en prenant une gorgée.
- Même si quoi ?
- Les Weasley seront aussi de la partie. Et je n'ai pas revu la famille depuis que Ron et moi nous sommes séparés.
- De quoi tu as peur ?
- J'ai peur que la situation ne soit que gêne et tension, soupira Hermione. Peur de la réaction de Molly. Peur d'être mal à l'aise en leur compagnie… De ne pas être à ma place.
Luna étudia longuement son amie. Puis elle prit la parole, accentuant la pression de ses doigts sur ceux de la jeune femme.
- Je pense que tu as pris la bonne décision, affirma-t-elle.
Hermione leva les yeux vers elle.
- Tu as fait preuve d'un grand courage d'avouer tout cela à Ron.
- Il le fallait… Je l'ai compris un peu tard mais c'était la seule chose à faire, murmura Hermione.
- Oui. Et de ce que tu m'en as dit, Ron a eu une bonne réaction, compte tenu des circonstances.
Hermione hocha vivement la tête.
- Je lui ai brisé le cœur mais il est resté très digne… Et même si les choses sont douloureuses pour tous les deux, j'espère qu'on réussira à dépasser ça, un jour. C'est mon souhait le plus cher, avoua la sorcière aux cheveux bruns.
Les lèvres de Luna s'étirèrent en un doux sourire.
- Laissez le temps agir. Je suis sûre que vous parviendrez à redevenir amis… Vous avez vécu tellement de moments importants ensemble, ça n'est pas la fin de votre histoire.
Hermione esquissa un sourire à son tour. Elle noua ses mains à celles de son amie.
- Merci Luna. D'être toujours là pour moi et d'avoir les mots justes.
- C'est toujours le plus grand des plaisirs, assura cette dernière.
- Et toi alors ?
- J'ai aussi reçu l'invitation de Harry mais je crois que je vais rester avec mon père. Depuis des années, c'est toujours lui et moi au coin du feu avec un bon repas et ça me convient, sourit la jeune femme.
- N'hésite pas à nous retrouver si jamais l'envie t'en prend.
- Sans fautes… »
Luna reposa la tasse de thé sur la petite table ronde. Ses grands yeux bleus scrutèrent son amie.
« Sirius sera de la partie lui aussi ? »
Hermione leva les yeux vers elle.
« J'imagine, oui. Je ne le vois pas manquer un Noël en compagnie de son filleul. Et il est devenu très ami avec Ginny.
- Tout va pour le mieux entre vous ?
La sorcière maintint un visage impassible.
- Tout va pour le mieux. On s'entend très bien. »
Luna hocha la tête et sourit poliment. Hermione en fit de même. Ses yeux se perdirent sur les dessins alambiqués de la théière tandis que le train de ses réflexions filait. Elle prit la parole sans même sans rendre compte.
« Je ne l'ai pas revu depuis ma séparation… Avec Ron.
- Mmh… Et à quoi ça te fait penser ? demanda Luna avec attention.
- Non, à rien, s'empressa de répondre Hermione avec un geste fugace de la main. C'est juste que, c'est étrange.
- Pourquoi ?
- Rien, c'est simplement qu'on ne s'est pas vus depuis longtemps, il n'est peut-être pas au courant et… Et ça fait une personne de plus à prévenir, en espérant que ça ne sera pas étrange de se retrouver comme ça… »
Les lèvres d'Hermione se refermèrent. Elle joua nerveusement avec l'anse de sa tasse. Luna décida de prendre les choses en main.
« Est-ce que ce qu'il s'est passé avec Sirius a eu une incidence sur ta décision finale ? »
Hermione releva violemment la tête.
« Non, bien sûr que non. » s'exclama-t-elle.
L'image du sorcier s'imposa à son esprit. Son visage euphorique lorsqu'il l'avait revue pour la première fois, dans sa chambre à Sainte-Mangouste. Les cris et les larmes qui avaient suivi leur mise au point. Sa longue descente aux Enfers. Puis le temps de la réconciliation. Les regards furtifs, les sourires timides. L'alchimie progressivement retrouvée.
Hermione sentit son cœur se serrer.
« C'est l'étincelle, avoua finalement la jeune femme.
Luna haussa un sourcil, l'invitant à poursuivre.
- La situation était un terrain miné. Je fonçais droit dans le mur avec Ron. Je sais que c'est horrible à dire mais c'est le cas. Quand Sirius est revenu… C'est comme si une part de moi m'était aussi retournée. J'ai retrouvé celle que j'étais avant la guerre, la refondation, l'après…, déclara Hermione avec émotion.
Son amie hocha la tête, montrant qu'elle comprenait.
- Et maintenant… Qu'est-ce que tu comptes faire ?
- Avec Sirius ? demanda Hermione en écarquillant les yeux. Rien, rien du tout ! Je lui ai dit qu'il n'y avait aucun avenir possible pour nous. J'ai scellé le peu de chances qu'on avait de reconstruire quelque chose.
Hermione passa une main frénétique dans sa chevelure imposante.
- Et je ne crois pas que ça soit judicieux… Je me suis mise avec lui dans une époque de guerre et de peur. Les choses ont changé depuis.
- Mais ça a été le cas aussi pour Ron, non ? objecta Luna.
- Comment ça ?
- C'est bien durant l'affrontement à Poudlard que vous vous êtes embrassés ? Donc en plein milieu du conflit. »
La sorcière brune resta muette. Luna avait raison. Et à mesure qu'elle avait évoqué les raisons qui devaient l'éloigner de Sirius, Hermione se rendait compte que ces dernières dissimulaient une vérité bien plus terrifiante encore.
La pression exercée par les mains de Luna sur les siennes la fit surgir de sa réflexion.
« Prends le temps. Tu as des plaies à soigner. Et tu as le choix, maintenant que tu as renoncé à cette vie qui ne te convenait pas. Fais-toi confiance et réfléchis à ce que tu désires réellement », affirma la sorcière aux yeux bleus, confiante.
Hermione hocha la tête et joignit ses bras autour de la jeune femme en une tendre étreinte. Luna fut surprise mais y répondit avec affection. Les deux amies restèrent toute l'après-midi ensemble et Hermione ne cessa d'interroger Luna sur son avenir à elle et ses perspectives.
o O o
Le soir de Noël, Grimmaurd étincelait de mille feux. Le salon était illuminé par d'imposants lustres en cristal suspendus. De délicieuses odeurs émanant de la cuisine flottaient dans le couloir, jusqu'à l'entrée de la maison. La table avait été rallongée par un charme d'agrandissement afin que tous les convives puissent s'asseoir. Une nape rouge la recouvrait totalement. Çà et là étaient disséminés des flocons de neige cristallisés, ainsi que des perles et des branches de houx. La porte du 12 square Grimmaurd était ornée d'une couronne florale blanche et immaculée.
Molly et Arthur Weasley furent les premiers à arriver, chargés de cadeaux enrubannés avec soin ainsi que d'une imposante dinde rôtie. Ginny leva les yeux au ciel face à leur chargement mais les accueillit en les serrant dans ses bras. Harry, vêtu d'une chemise noire à rayures blanches, s'occupa de la disposition des cadeaux sous le grand sapin posté dans le salon. George arriva peu après, en compagnie de Ron. Molly serra fort ses garçons contre elle. Tandis que l'assemblée se servait un premier verre, la porte de Grimmaurd s'ouvrit sur un Sirius empressé.
« On allait tout juste commencer, indiqua Harry qui le regardait dans l'encadrement du salon.
- Désolé, je n'ai pas vu l'heure passer. » s'excusa son parrain alors qu'il disposait deux paquets rectangulaires au coin du sapin.
Son filleul esquissa un sourire entendu et l'invita à les rejoindre. La compagnie salua chaleureusement Sirius. Ce dernier enleva son blouson en cuir et s'insinua dans le groupe.
Les époux Weasley étaient assortis à la fête : tous deux portaient un pull rouge agrémenté de pompons blancs. Sirius s'approcha bien vite de son compère qu'il salua chaleureusement. George avait opté pour un beau costume bleu nuit, surmontant une chemise d'un bleu plus clair. Ginny accueillit Sirius avec un baiser sur la joue. Elle était resplendissante dans sa robe vert amande, ses manches s'arrêtant au niveau de ses avant-bras qu'elle avait agrémentée de bracelets tintants et rutilants. Elle lui lança à son tour un regard évocateur que Sirius fit semblant de ne pas remarquer. Du coin de l'œil, il aperçut Ron qui portait son traditionnel costume marron des célébrations familiales. L'animagus s'approcha de lui pour lui serrer la main. Le voir sans Hermione rappela au beau brun leur récent changement et son esprit s'y attarda plus qu'il ne l'aurait souhaité.
Les invités levèrent leur verre d'un seul et même élan et trinquèrent. Sirius commença à discuter avec George et Ginny, un coin de son esprit se demandant où pouvait bien être la dernière invitée. Alors que les petits fours s'échangeaient entre les convives, un tintement retentit soudain. Ginny se précipita pour aller ouvrir et adressa un énorme sourire à la nouvelle venue.
« On ne t'attendait plus ! s'écria-t-elle, laissant passer une Hermione au visage rougi par le froid.
- Je suis désolée, j'ai fait toutes les boutiques des environs pour trouver deux mètres de papier-cadeau, expliqua la sorcière en enlevant son bonnet et son écharpe.
- Viens te réchauffer et boire une coupe, il ne manquait plus que toi ! »
La sorcière aux cheveux bouclés suivit timidement son amie et pénétra dans le salon. Tous les convives tournèrent le visage vers elle, sauf Sirius qui se tenait déjà face aux jeunes femmes. Le regard d'Hermione papillonna jusqu'à trouver les époux Weasley. Un air embarrassé teinta son visage joliment mis en valeur par son maquillage.
« Bonsoir tout le monde » murmura-t-elle avec un sourire timide.
Molly Weasley hocha vivement la tête, avec un sourire similaire. Elle fit quelques pas pour arriver à sa hauteur. Toutes deux se fixèrent, dans un silence maladroit. Puis les yeux de la matriarche se remplirent de larmes. Hermione, catastrophée, ouvrit la bouche mais elle fut coupée dans son élan par l'aînée qui l'attirait déjà à elle en une violente étreinte.
« Ma chérie, sanglota-t-elle. Je… Tout ceci est terrible… Mais enfin, je suis bien heureuse de te voir ce soir.
- Moi aussi Mrs Weasley », bredouilla Hermione qui lui tapotait le dos.
Derrière elle, Ron esquissa un sourire nostalgique.
Hermione vint ensuite saluer le restant du clan Weasley. Parvenue à son ancien compagnon, la jeune femme hésita sur la démarche à suivre. Mais Ron lui adressa un regard doux et tous les deux s'étreignirent affectueusement. En son for intérieur, Hermione poussa un soupir de soulagement, ses peurs s'envolant peu à peu. Elle hocha la tête face à son ancien amant, comme s'ils signaient un pacte secret et se retourna pour faire face aux autres invités. Harry la prit dans ses bras à la suite, lui murmurant qu'il était content qu'elle soit enfin là. Hermione hocha la tête et le remercia. Elle sembla déceler une lueur entendue dans le regard de son meilleur ami. Le papier-cadeau n'était qu'une excuse que la sorcière avait inventée pour se tirer d'affaire. En réalité, elle avait passé de longs moments seule chez elle, à rassembler le courage nécessaire pour venir ce soir à Grimmaurd. En fin de compte, Hermione n'était pas déçue d'avoir franchi le pas.
« Donne-moi ton manteau, je te débarrasse » indiqua Harry.
La jeune femme le remercia, dévoilant une robe bustier métallisée. Le haut était semblable à un corset et venait épouser ses courbes. Le bas de sa robe se terminait en de longues bandes de tulle piquées çà et là de perles scintillantes comme des étoiles. Les sourcils de Harry se haussèrent malgré lui et il adressa un sourire entendu à son amie. Hermione esquissa un sourire en coin, ses joues rosissant sous le compliment muet. Elle se retourna et aperçut Sirius dans son champ de vision. Son cœur frémit. Le regard de l'animagus se posa sur elle. La jeune femme fit un pas vers lui.
« Bonsoir Sirius, le salua-t-elle avec un sourire.
- Bonsoir Hermione. Tu es ravissante, affirma ce dernier, tout en retenue.
- Merci. »
La sorcière fit parcourir son regard sur l'animagus.
Sirius portait un t-shirt kaki à manches longues, quelques bracelets de cuir à son poignet et un jean sombre. Hermione haussa un sourcil, surprise de le découvrir ainsi. Sirius avait pour habitude de porter un costume trois pièces durant ce genre de festivités.
« Tu n'es pas mal non plus, j'aime le côté décontracté, ajouta-t-elle avec une pointe de malice.
Sirius jeta un regard embarrassé vers sa tenue.
- Effectivement, on m'a connu avec de meilleurs atours. Je n'ai pas eu le temps de me mettre sur mon 31, expliqua-t-il non sans un rire gêné.
- Ah oui ? Même en ayant ta chambre deux étages au-dessus ? le taquina Hermione.
- Je ne suis arrivé à la maison qu'il y a quelques instants seulement. »
Hermione lui jeta un regard curieux. Mais elle n'eut pas le temps de reprendre la parole car Ginny et Harry invitèrent la troupe à se mettre à table. Elle esquissa un petit sourire en direction de Sirius et commença à suivre ses hôtes. Toutefois, la voix de ce dernier l'arrêta.
« Hermione
- Oui ? dit-elle en se retournant pour lui faire face.
- Je suis désolé… Pour Ron et toi, déclara-t-il.
Le sourire poli d'Hermione fléchit. Sirius reconnut la lueur embarrassée et presque honteuse dans les prunelles de son ancienne compagne. Il se mordit la langue. Avant qu'il ne puisse rattraper le coup, le visage de la jeune femme revêtit son masque impassible.
- Merci Sirius. » répondit-elle.
Puis elle se retourna bien vite et se rendit en direction de la cuisine. Sirius, resté là, ferma les yeux une seconde, s'injuriant mentalement. Il aperçut George dans un coin de la pièce et tous deux suivirent le groupe dans le couloir.
o O o
Une fois les invités installés, Harry et Ginny s'occupèrent de leur servir à boire. Sirius et George se mirent d'accord pour déguster une seule coupe de champagne avec le dessert. Leur pacte fut scellé et ils accompagnèrent ainsi Ginny avec un jus de citrouille tandis que les autres levaient leur verre. Quelques mots furent prononcés et bien vite, les convives dégustèrent les victuailles disposées sur la table.
Alors que les coups de onze heures retentissaient et que l'assemblée s'apprêtait à passer au dessert, la porte du square Grimmaurd s'ouvrit sur une dernière invitée. Luna apparut dans l'encadrement de la salle à manger, les cheveux coincés sous un bonnet extravagant.
« Bonsoir tout le monde, murmura-t-elle avec un sourire poli.
- Luna ! Content que tu te joignes à nous, s'exclama avec ravissement Harry, se levant prestement pour la débarrasser des nombreux paquets qu'elle avait sous les bras.
- Le diner avec mon père s'est terminé assez tôt, je me suis dit que j'aurais le temps de passer vous voir et déposer les cadeaux, expliqua-t-elle, les joues roses.
- Tu as bien fait ! Installe-toi pendant que je prépare la suite. On va te servir une coupe ! » indiqua Harry tandis qu'il sortait de la pièce.
Hermione se leva à son tour pour serrer son amie dans ses bras.
« Ça me fait plaisir de te voir, murmura-t-elle à travers les boucles blondes de Luna.
- Moi aussi. Joyeux Noël Hermione. » répondit la sorcière avec un sourire.
Puis elle fit le tour de la table pour saluer les convives. George la regarda passer de bras en bras. Il lissa machinalement les plis de son costume. Lorsqu'elle parvint à son niveau, il se leva rapidement, manquant de peu de renverser l'assiette de son frère cadet.
« Bonsoir George » le salua-t-elle avec son éternel sourire.
Elle déposa un baiser sur la joue du jeune homme. Il fit de son mieux pour rester impassible et recula la chaise à sa gauche pour permettre à la sorcière de s'asseoir. Luna le remercia d'un signe de tête. Les yeux de Molly papillonnèrent de son fils vers la jeune femme, luisants de curiosité.
Harry revint parmi eux, les bras chargés des assiettes à dessert. Arthur s'occupa de servir la buche tandis que Ginny et Molly distribuaient les cadeaux aux invités. Une fois les assiettes et verres remplis, la famille porta un nouveau toast. Une fois la buche dévorée, l'heure fut venue de déballer les cadeaux. Ron poussa un sifflement d'admiration lorsqu'il découvrit un plastron en cuir de dragon flambant neuf, offert par les époux Weasley. Il se leva pour les embrasser. Arthur s'extasia devant le robot mixeur déniché par Luna. Cette dernière rosit de plaisir en déballant son cadeau. Il s'agissait d'un pendentif ravissant en pierre de lune. Elle leva les yeux vers Hermione.
« George m'a aidé à choisir » indiqua cette dernière, non sans un sourire en coin à destination du sorcier.
Luna tourna vivement la tête vers le concerné. George esquissa un sourire qui tirait davantage de la grimace.
« Il est magnifique. Tu m'aides ? » demanda la petite blonde, tendant le cou vers lui.
George eut quelques tentatives infructueuses avant de parvenir à accrocher le pendentif. Luna passa une main fébrile sur celui-ci, son sourire s'agrandissant.
Du coin de l'œil, Sirius s'amusait du comportement de son ami. Il se leva de sa chaise pour resservir les invités en champagne tandis que le reste de la compagnie continuait de déballer les cadeaux.
Ce fut au tour d'Hermione qui découvrit avec ravissement un encrier en cristal et deux nouvelles plumes de phœnix resplendissantes. Elle remercia chaleureusement Ginny et Harry. Elle passa au second paquet et son cœur s'accéléra lorsqu'elle vit le nom de Sirius. D'un mouvement lent, elle ôta le papier cadeau. Une édition reliée de « Sense and Sensibility » lui fit face. La couverture était en cuir et donnait à voir une gravure d'époque sur sa tranche. Hermione inspecta l'ouvrage, le cœur battant la chamade. Le livre qu'elle avait entre les mains était une des premières éditions de Jane Austen, avant que le manuscrit n'ait été révisé. Hermione releva bien vite les yeux vers Sirius, face à elle, occupé à servir les convives.
« Merci. » balbutia-t-elle, la voix saisie par l'émotion.
Sirius lui répondit par un sourire mêlant amusement et tendresse. Hermione n'arrivait pas à croire qu'il ait fait tant d'efforts pour lui dénicher une telle rareté. Elle se serait allée à quelques larmes si la pièce n'avait été remplie par tant d'invités. Luna inspecta l'ouvrage avec minutie.
« C'est incroyable que tu aies trouvé une merveille pareille, Sirius, le complimenta-t-elle tandis qu'il la resservait en champagne.
- Mon parrain a toujours eu du flair en matière de relations… Il sait s'entourer, affirma Harry avec un fier sourire.
Celui de Sirius se figea tandis que Luna et Hermione fronçaient un sourcil. Molly se tourna vers Harry.
- Qu'est-ce que tu veux dire par-là chéri ? demanda la matriarche Weasley.
Ginny se mordit la lèvre.
- Je veux dire que notre Sirius s'est récemment mis à fréquenter une jeune et jolie libraire, annonça-t-il avec bonhommie.
Molly écarquilla brusquement les yeux et darda son regard sur Sirius qui restait immobile.
- C'est vrai ça ?!
L'animagus sembla reprendre ses esprits et se saisit de la coupe suivante qu'il remplit. Puis ses yeux se posèrent sur l'assistance qui le contemplait, dans l'attente.
- Ça ne devait pas être une annonce tonitruante… Mais oui, c'est le cas.
Hermione sentit une lourde pierre s'abattre sur son estomac. Son regard se fixa sur son assiette tandis que Molly explosait de joie.
- Oh Merlin, Sirius, c'est formidable ! Mais pourquoi ne l'as-tu pas amenée ce soir avec nous ?! s'écria-t-elle, trépignant sur place.
Le sorcier aux cheveux longs esquissa un rictus las.
- Pour ne pas la sacrifier aux lions le soir de Noël. Et puis elle recevait ses parents ce soir.
- C'est donc pour ça que tu es arrivé en retard, remarqua Ron en hochant la tête, ravi de son observation.
Sirius leva les yeux au ciel et continua sa tournée.
- Vous avez votre lot de détails croustillants, maintenant, peut-on espérer passer à autre chose ?
- Je suis tellement contente pour toi Sirius, déclara Molly avec émotion, ne semblant pas avoir entendu ce dernier. Il était temps que tu retrouves quelqu'un et que tu puisses avancer. C'est une nouvelle merveilleuse. »
Le concerné haussa les épaules mais ne se départit pas complètement de son sourire. Il termina de servir les derniers verres et retourna s'asseoir. Son regard se porta vers George qui leva son verre de champagne dans sa direction avec un sourire pincé. Sirius hocha la tête et trinqua avec lui. Il but lentement la première gorgée. Son regard se fixa sur la partie gauche de la table, et ne cilla pas.
De l'autre côté, Hermione était restée immobile. Elle avait senti le regard de Ginny ainsi que celui de Luna sur elle lorsque Sirius avait prononcé les mots fatidiques. Son regard demeurait rivé sur son assiette. Ses doigts trituraient les épaisseurs de tulle de sa robe, les perles tombant une à une de celle-ci. Son esprit fourmillait tandis que son cœur s'épanchait en de lourds battements.
« Un toast ! À l'avenir et aux relations prometteuses ! » s'exclama Molly tandis que le reste du groupe levait son verre avec des sourires candides.
Hermione sortit de sa torpeur et rejoignit le mouvement. Elle se sentait terriblement idiote et ne rêvait plus que d'une chose : rentrer chez elle le plus vite possible.
La soirée ne s'éternisa pas, à son grand soulagement. Les invités terminèrent leur verre et se levèrent peu à peu pour se diriger vers la sortie. Ginny embrassa ses parents et les remercia pour le plat et les cadeaux. Harry serra dans ses bras Hermione puis Ron. Alors que Sirius redonnait leur manteau aux époux Weasley, son regard se porta sur la sorcière aux cheveux bouclés. Son visage exprimait une certaine lassitude. Sirius fit un pas vers elle. À ce moment, Ron apparut dans le champ de vision de la jeune femme. Hermione lui adressa un sourire triste et tous deux se prirent un instant dans les bras l'un de l'autre. L'animagus les regarda de loin, interdit. Luna en profita pour le remercier de la soirée. Elle se dirigea vers George qui enfilait son manteau, prêt à suivre son frère cadet.
« Tu rentres tout de suite ? , lui demanda-t-elle, posant ses grands yeux bleus vers lui.
- Je… Non, j'ai encore un peu de temps, bafouilla ce dernier.
Le duo se regarda un instant, sans rien dire. George finit par demander, embarrassé.
- Tu veux que je te raccompagne chez toi ?
Le sourire de Luna pétilla.
- Bonne idée, j'adore me balader le soir. »
George prit le manteau de la jeune femme et le déposa sur ses épaules. Elle le remercia d'un hochement de tête et s'approcha de son amie. Entourant Hermione de ses bras, elle murmura :
« Écris-moi. »
La sorcière resta immobile une seconde puis hocha la tête. George et Luna sortirent ainsi du square Grimmaurd, sous les œillades curieuses de l'assistance.
Restée seule, Hermione enfila son manteau et son bonnet, prête à braver le froid hivernal. Sirius la rejoignit dans le coin où elle s'était postée, dardant son regard d'acier sur elle. La jeune femme leva la tête, composant un visage amène.
« Merci pour ce livre, affirma-t-elle avec un hochement de tête. Tu n'aurais pas dû.
- Ça me faisait plaisir, assura ce dernier, interdit.
Hermione hocha une nouvelle fois la tête, tanguant d'un pied sur l'autre. Sirius lui adressa un regard lourd. Le malaise qu'il ressentait face à elle le força à prendre la parole.
- Hermione, si je t'ai embarrassé en début de soirée, sache que…
La sorcière releva vivement les yeux vers lui. Sans avoir le temps d'y réfléchir, elle posa une main sur le torse de son compagnon tandis que l'autre fouillait dans les plis de son manteau.
- Quelle idiote, j'ai failli oublier, balbutia-t-elle alors qu'elle sortait un petit paquet enrubanné avec soin.
Elle prit de force la main de Sirius et déposa le cadeau dans celle-ci. L'animagus la regarda sans comprendre.
- Joyeux Noël, lança Hermione avec un sourire désolé.
Le regard du sorcier alla de la jeune femme à l'objet qu'il avait entre les mains. Ses doigts se raffermirent autour du cadeau.
- Merci », murmura-t-il.
Le sourire de la brune s'étira et elle hocha vivement la tête. Elle sembla vouloir ajouter quelque chose. Tous deux restèrent dans l'encadrement de la pièce, incertains.
« Bonne nuit » conclut Hermione en jetant un dernier regard vers son interlocuteur. Elle hésita puis déposa un baiser furtif sur sa joue. Sirius n'eut pas le temps de réagir qu'elle sortait déjà de la maison familiale. Son regard se reporta à la petite boite qu'il avait entre les mains.
o O o
Le froid givrant vint étreindre le corps de la jeune femme. Hermione frissonna et murmura un sort de protection. Rassénée, elle entreprit de remonter l'avenue principale à pied. Ces derniers temps, la sorcière passait de longues heures à errer dans les rues londoniennes afin de rassembler ses esprits. Ce soir, plus que jamais, elle avait besoin de ce périple. Hermione passa une main rageuse sur son visage à mesure que son pas s'accélérait.
« Idiote… Espèce d'idiote. »
Deux émotions prédominantes tourmentaient son esprit. Une profonde jalousie tourbillonnait au sein de ses veines, doublée d'une honte non moins tenace. Hermione se détestait de ressentir l'une et l'autre. La partie rationnelle en elle lui scandait qu'elle devrait être heureuse pour Sirius. Qu'il méritait quelqu'un disponible et prêt à l'aimer entièrement. Qu'il lui fallait tourner la page comme elle se l'était répétée tant de fois maintenant depuis ces dernières semaines…
« Voire années. »
Son pas s'accéléra dans les rues désertes de la capitale. Des éclats de voix résonnaient aux fenêtres illuminées du voisinage. L'amer réalité, c'était qu'Hermione savait pertinemment ce qu'elle avait attendu de cette soirée, et sa honte ne faisait que redoubler en y pensant. Depuis tout ce temps, une part de son esprit avait souhaité que Sirius ne désire qu'elle. Qu'il n'attende qu'un signe de sa part pour tout recommencer.
« Espèce de sombre, sombre idiote. »
Hermione balaya une nouvelle fois les larmes de son visage engourdi. Elle s'enfonça davantage dans la pénombre, le bruit de ses pas saccadés résonnant sur les trottoirs vides de Londres.
o O o
Le quartier était désert, seuls quelques cris de badauds enthousiastes résonnaient loin derrière eux. George marchait lentement, Luna à son bras, aux prises avec ses réflexions. La jeune femme semblait de son côté parfaitement sereine. Ils arrivèrent bien vite devant la façade familière de sa maison et s'arrêtèrent devant le petit portillon de bois.
« Bon… , commença George sans avoir la moindre idée de ce qu'il dirait ensuite.
- Merci de m'avoir raccompagné, indiqua Luna avec un sourire, sans quitter son bras.
- Pas de problèmes… Les rues ne sont pas sûres ces temps-ci, assura le jeune homme.
Un silence complet dans le quartier lui répondit. Luna esquissa un sourire amusé tandis qu'il se frottait l'arrière du crâne.
- Et je ne te parle même pas des Woobledums, rajouta la jeune femme, se donnant un air de fine connaisseuse.
- Ah ceux-là, je ne peux pas les encadrer ! » s'exclama George en jouant l'offusqué.
Tous deux se regardèrent avec espièglerie tandis que la nuit les enveloppait de sa douceur.
« Bon… réitéra George, tanguant d'un pied à un autre.
- Tu veux entrer boire quelque chose ? proposa Luna, prenant ses clés dans sa poche.
- Bien sûr, du moment que tu as quelque chose de fort et de corsé, déclara le jumeau Weasley.
- J'ai de la tisane aux orties.
- Brillant. »
Ils entrèrent dans la maisonnée de la jeune femme. George s'installa sur l'une des chaises du salon tandis que Luna faisait chauffer de l'eau dans une bouilloire. Puis elle s'assit face à lui. George avait toutes les peines du monde à ne pas fixer la jeune femme. Il sentait son cœur battre la chamade et une gêne croissante s'emparait de lui.
« Tu regrettes ? »
Le sorcier osa enfin rencontrer le regard de son interlocutrice. Luna le contemplait tranquillement, le visage dans ses mains.
« De ? , balbutia-t-il.
- D'avoir accepté de me raccompagner, précisa la sorcière aux grands yeux bleus.
- Non, pas du tout.
- Alors pourquoi cherches-tu à tout prix à t'enfuir ?
- Qu'est-ce qui te fait dire ça ? demanda George, déstabilisé.
- Tu as la tête remplie de Nargols.
- Oh… Ça. C'est mon quotidien depuis que j'ai donné un Suçacide à Ron pour ces cinq ans. Je crois que mon crâne ne s'est jamais remis de la rouste que nous a flanquée Maman.
Luna lui adressa un sourire indulgent.
- Qu'est-ce qui te fait donc tant peur ?
- Honnêtement ? Toi.
Les sourcils de la jeune femme se haussèrent. Elle prit un air à la fois incrédule et amusée. Derrière eux, le sifflement de la bouilloire s'intensifia.
- Je ne vais pas te manger George.
- Quand tu me regardes avec ces yeux-là, c'est tout comme.
- Et c'est ça qui te fait peur ?
- Non. C'est le fait de vouloir m'y abandonner tout entier. »
Le sourire de Luna s'intensifia. George la regarda, interdit, se lever de sa chaise et arriver à sa hauteur. Elle posa délicatement ses mains sur son visage, caressant ses pommettes. Le jeune homme ferma les yeux, s'abandonnant à cette sensation d'un autre temps.
« Je ne te forcerai à rien. » murmura la sorcière aux longues boucles blondes.
George rouvrit les yeux pour la contempler. Il se releva alors, joignant ses lèvres aux siennes. Luna se mit sur la pointe des pieds pour continuer leur baiser. Les bras du jeune homme se nouèrent contre sa taille menue, la pressant tout contre lui. Les deux amants s'épanchèrent en un baiser fiévreux qui les laissa à bout de souffle. Le bruit nasillard de l'eau chaude força George à revenir sur terre.
« Je m'en occupe ? murmura-t-il d'une voix rauque, les lèvres rougies par leur baiser.
- Oh George… Là, maintenant, c'est le cadet de mes soucis », répondit Luna en éclatant d'un rire limpide.
Ce dernier l'imita bien vite et se saisit de la jeune femme pour l'attirer contre lui. Leurs lèvres se joignirent une nouvelle fois tandis qu'il la portait à bras le corps. Luna noua ses mains autour de son cou. D'un geste du bassin, elle l'invita à se diriger vers sa chambre. George s'avança à tâtons tandis qu'il continuait à porter la jeune femme, ses lèvres jointes aux siennes. Il finit par buter contre le bord du matelas et se laissa tomber dessus. Le corps de Luna ne semblait peser qu'une poignée de plumes sur lui. Ses longs cheveux blonds tombaient en cascade sur son visage, le caressant furtivement. La jeune femme déposa une série de baisers sur son visage. George noua ses mains aux siennes tandis que leurs lèvres se joignaient de nouveau.
Luna se redressa et entreprit d'enlever les bretelles de sa robe. Celle-ci laissa voir un soutien-gorge d'un jaune pâle, laissant peu de place à l'imagination. George sentit son cœur tambouriner plus vite contre sa cage thoracique. Il resta béat lorsque la sorcière se pencha à nouveau vers lui pour ouvrir les boutons de sa chemise. Ses mains douces vinrent explorer le torse imberbe du jeune homme, traçant des sillons sur ses côtes. Elle releva la tête en arrière et torsada ses cheveux en une longue natte qu'elle mit sur son épaule. George la regardait, hypnotisé. Elle était divine : sa peau diaphane semblait scintiller sous l'éclat de la lampe de chevet. Ses cheveux blonds, tirant sur le blanc, paraient son épaule d'une rivière éclatante. Les yeux bleus de la jeune femme pétillèrent d'amusement devant la posture du sorcier.
« Tu comptes me regarder encore longtemps ? » lança-t-elle espièglement alors qu'elle tentait de le débarrasser de sa boucle de ceinture.
La pression de ses mains à cet endroit précis fit ressurgir un élan de désir chez George. Il retrouva l'espace d'un instant son sang-froid pour lui répondre.
« Je suis désolé. Tu es juste… Superbe. »
Les joues de Luna rosirent de plaisir. Elle conserva son sourire mutin. La ceinture finit par céder et George se releva l'espace d'un instant afin qu'il puisse se dépêtrer de son pantalon. Une part de lui se sentit vulnérable à l'idée d'être ainsi exposé au regard de la sorcière. Mais Luna semblait tout à fait conquise. Elle enleva avec dextérité le fin morceau de lingerie qu'elle portait en bas et resta à califourchon sur son partenaire. La proximité de leurs deux corps électrisa le grand roux qui posa ses mains sur les cuisses de la jeune femme. Le sourire de Luna s'accentua. Elle s'apprêtait à joindre son corps au sien lorsqu'elle remarqua l'air incertain de son partenaire.
« Qu'est-ce que tu as ? demanda-t-elle d'une voix douce, retrouvant son calme habituel.
- C'est juste que…
George poussa un profond soupir, se morigénant. Il releva la tête, le regard sombre.
- Ça fait un moment que je n'ai pas… pratiqué, lâcha-t-il enfin.
Luna le regarda un instant. Puis elle haussa les épaules.
- Ça ne fait rien. Pour ma part, je suis assez assidue. Je devrais pouvoir assurer pour nous deux. »
Les yeux de George s'écarquillèrent jusqu'à ne plus former que deux billes opaques. Puis un rire aussi inattendu qu' éclatant vint franchir la barrière de ses lèvres. Sa cage thoracique se secoua violemment, les larmes lui venant aux yeux. Alors que son rire s'épanchait, le sorcier réalisa que cela faisait une éternité qu'il n'avait pas ri franchement, de tout son être. Luna s'immobilisa, les yeux écarquillés à son tour. George se releva, la jeune femme toujours à califourchon sur lui, prêt à s'excuser. Il ne s'attendait pas à une telle remarque venant de sa part. Il ne s'attendait à rien de ce qu'il venait de se passer durant cette dernière heure s'il était honnête. Cette sorcière renversait son monde. Alors que le sorcier ouvrait la bouche, Luna plaqua ses mains de chaque coin de son visage, les yeux étincelants.
« George… Ton rire est une vraie musique » murmura-t-elle, époustouflée.
George chercha l'inspiration pour une réplique sardonique. Mais devant l'air enchanteur de Luna, il ne trouva rien. La sorcière éclata de rire à son tour et l'amena à elle pour un baiser plus fiévreux encore. Il y répondit de tout son être. Son bras enserra son bassin, l'attirant contre lui tandis que son autre main se perdait dans sa chevelure. Luna se cambra légèrement afin de les unir en une poussée. Tous deux gémirent à l'unisson. Les deux amants échangèrent un regard et le ballet reprit. Leur nuit fut peuplée de nombreuses autres musiques envoûtantes.
o O o
La frénésie des fêtes de fin d'année laissa sa place au timide janvier. Le square Grimmaurd menait une existence bien tranquille après avoir reçu une famille nombreuse en son sein. Harry avait repris ses devoirs d'Auror en compagnie de Ron. Constatant que ce dernier n'allait pas bien, il lui proposa de venir chez lui un soir pour en discuter.
Ron apparut au beau milieu du salon tandis que Sirius et Ginny jouaient aux cartes. Ces derniers se relevèrent pour accueillir le nouveau venu. L'animagus lui tendit une main maladroite. En son for intérieur, Sirius ne savait toujours pas réellement comment agir auprès de Ron. Il avait ressenti une telle palette d'émotions contraires le concernant depuis son retour du Voile. Au final, voyant l'air piteux du jeune Weasley, Sirius comprit qu'il ressentait finalement de la sympathie pour le pauvre garçon. Ron n'avait jamais été un mauvais bougre. Maladroit, évidemment, idiot, par aspects, mais jamais méchant. Il décida d'un commun accord avec Ginny de le laisser en compagnie d'Harry.
Le jeune homme invita son meilleur ami à s'asseoir et lui servit un verre. Ron le remercia d'un hochement de tête. Tous deux s'installèrent dans les fauteuils. Harry ne savait pas bien par où commencer. Livrer ce qu'ils avaient sur le cœur n'avait jamais été leur faible à tous deux. Il tenta néanmoins d'aborder la chose du mieux qu'il put.
« Comment tu te sens ?
- C'est compliqué en ce moment, avoua le sorcier en faisant tourner son verre dans sa main.
- J'ai vu ça… Est-ce que c'est à cause de la rupture avec Hermione ? »
Ron s'enfonça plus profondément dans le canapé, les yeux fixés sur la cheminée frémissante.
« Non, ça n'est pas que ça. Bien sûr, ça a été un coup de massue. C'était la dernière chose que j'attendais… Je pensais mettre en route le plan bébé et puis une semaine plus tard, c'était la chute. » expliqua Ron en haussant les épaules.
Harry grimaça.
« Mais ça n'est pas Hermione… Elle a eu raison en fin de compte, déclara le rouquin. On voulait deux choses différentes, elle et moi. J'ai juste mis plus de temps à m'en apercevoir qu'elle.
- On ne peut pas te blâmer. Tu connais cette fille, répondit Harry avec un sourire indulgent.
- La sorcière la plus brillante de sa génération, oui, je crois me souvenir, confirma Ron avec mélancolie.
- Alors où est-ce que ça coince ?
- Depuis qu'elle m'a quitté, j'ai commencé à me poser des questions sur ma vie et ce qui m'entourait… Et c'est terrifiant. Je n'aurais jamais dû commencer.
- Qu'est-ce qui est si terrifiant ? »
Ron sembla à court de mots. Ses grands yeux fixaient inlassablement la cheminée. Il fit tourner son verre encore et encore.
« Je ne sais pas ce que je fais là.
- Hum, tu es Ron Weasley, mon meilleur ami, et tu travailles avec moi. Tu aimes venir ici parce que l'accueil y est chaleureux et les discussions passionnées, tenta Harry dans un élan désespéré pour atténuer la pesanteur de ses mots.
- Je me souviens des choix que j'ai fait mais je n'arrive pas à y trouver du sens. Plus maintenant.
Son regard se reporta enfin sur son meilleur ami.
- Je ne veux plus travailler au Ministère. Ça n'est pas pour moi, ça ne l'a jamais été. Je crois que j'ai choisi cette voie-là parce que je voulais suivre tes pas.
- Oh, ponctua Harry, déstabilisé.
- La vérité, c'est que la carrière d'Auror ne me procure aucune satisfaction… Ne te méprends pas, j'adore partir en mission à tes côtés… Mais je n'en peux plus de chasser du sorcier maléfique dans chaque recoin de l'île. Et toute cette paperasse… Ne me lance même pas sur la paperasse, s'exaspéra le jeune homme en roulant des yeux.
- Merlin… Ron, j'ignorais que tu en étais là, s'excusa son compère.
- Depuis qu'Hermione m'a parlé de ses remises en question…Je m'y suis mis aussi. Et je crois avoir suivi un modèle qui me paraissait aller de soi… Mais qui ne me parle plus maintenant. Et ça… Et ben, ça bouscule un petit peu mon quotidien, conclut Ron en écarquillant davantage les yeux.
- Qu'est-ce que tu vas faire ? lui demanda son meilleur ami.
- Donner ma démission au Département d'abord. Réfléchir à ce qui m'épanouirait ensuite.
- Et concernant le reste ? »
Ron plongea une nouvelle fois son regard dans celui de son interlocuteur. Harry fut agréablement surpris de revoir la moue enfantine de son meilleur ami.
« Rien n'a vraiment changé là-dessus. Je veux toujours des enfants, de préférence rapidement afin qu'ils soient en âge de jouer avec les vôtres dans cette grande baraque, assura Ron avec tendresse.
Harry éclata de rire et passa un bras chaleureux sur l'épaule de son camarade.
- Alors il ne nous reste plus qu'à te trouver une partenaire adéquate. Ça ne devrait pas être difficile.
- Ah oui ? hésita Ron, passant une main gênée dans sa chevelure ébouriffée.
- Ron Weasley, héros de guerre, pourfendeur d' Horcruxe de Voldemort, cherchant à se poser avec femme et enfants… Je pense que ton dossier sera vite étudié, assura Harry avec un grand sourire.
- Que quelqu'un t'entende », conclut Ron en esquissant à son tour un sourire.
Les deux hommes trinquèrent, et reprirent le cours de leur soirée. Lorsqu'il vint se coucher auprès de Ginny à une heure indécente, Harry se dit que finalement, ils n'étaient pas si mauvais pour livrer ce qu'ils avaient sur le cœur.
o O o
L'activité avait repris de plus belle au Ministère et Hermione mettait son nouveau plan à exécution. Il n'était plus question de rester bien sagement à son poste. La sorcière travaillait dorénavant d'arrache-pied afin d'accéder au rang tant convoité de directrice de service. De là, elle mènerait campagne pour devenir Ministre de la Magie une fois que le poste se libèrerait. Cette résolution semblait lui avoir rendu son panache d'adolescente. Son présent renouait enfin avec son passé. Elle n'était plus écorchée entre deux rivages comme elle avait pu le sentir ces dernières années. Les choses se remettaient enfin en place.
La sorcière s'accrochait férocement à cet aspect de sa vie afin d'enterrer en elle des problématiques plus amères. En quittant le square Grimmaurd le soir de Noël, Hermione s'était bien rendu compte que malgré ses efforts et ses prises de décision, le chapitre Sirius Black ne s'était jamais réellement fermé pour elle. Sirius l'avait accompagné durant de nombreuses années, comme un souvenir silencieux sur son épaule, veillant sur elle. Puis il était revenu pour de bon, et Hermione avait eu toutes les peines du monde à accepter son retour. Après des mois de travail sur elle-même, la jeune femme avait fait la paix avec cette situation. Ou du moins, c'est ce qu'elle avait pensé. Car plus les entrevues avec Sirius se multipliaient, et plus Hermione se sentait dangereusement revenir vers des sentiments troubles et complexes. L'annonce de sa mise en couple n'avait fait que redonner un coup sur l'édifice déjà chancelant qu'était son esprit.
Durant les jours suivants, Hermione essaya par tous les moyens de se débarrasser de ce resurgissement et de faire la paix avec ce nouveau départ. En passant du temps dans son appartement, elle comprit qu'elle devait avant tout se réapproprier l'endroit. Ce dernier était encore empreint de sa vie conjugale avec Ron. Et si tous les deux s'étaient quittés dans de relatifs bons termes, il lui fallait dorénavant passer à autre chose.
C'est ainsi qu'un samedi matin de bonne heure, Hermione attacha ses cheveux en une queue de cheval, revêtit un large t-shirt ainsi qu' un pantalon usé et récupéra divers outils à sa disposition pour refaire l'appartement. Elle s'attaqua d'abord à sa chambre. Les affaires de Ron furent soigneusement emballées dans des cartons. Puis elle changea la couleur des murs, enleva une des tables de chevet et installa quelques étagères de lecture à la place. La salle de bain et la cuisine échappèrent au grand bouleversement. L'après-midi suivait son cours tandis que la sorcière arrachait de larges bandes de papier-peint du salon, des gouttes de sueur perlant sur son front. Tandis que les morceaux jonchaient le parquet, tombant au fur et à mesure à ses pieds, Hermione ne put s'empêcher de se souvenir d'un temps lointain où elle avait fait la même chose dans un endroit bien familier.
Grimmaurd, l'été 1995. Rémus et Sirius étaient à ses côtés, arrachant le papier peint des murs de la maison à pleines mains, l'air jovial. Tout paraissait si simple, à l'époque. Et pourtant la guerre était déjà à leur porte à ce moment-là… Mais cet été avait été le théâtre de quelque chose de spécial. Hermione arracha une grande marge de papier peint d'un geste rageur, le visage rougi. Elle inspira longuement et s'éloigna du mur. Elle chassa ses pensées d'un autre temps. L'heure était à la réconciliation.
Une heure plus tard, des murs entièrement blancs lui faisaient face. La sorcière se servit alors de sa baguette et murmura quelques sorts pour revêtir la pièce d'une couleur ocre lumineuse. Une fois les finitions apportées, Hermione fit disparaître les restants de l'ancienne décoration. Elle transforma le canapé en une desserte en cuir qu'elle disposa dans un coin de la pièce. Les étagères noires garnies de livres et de photographies restèrent telles quelles. La sorcière se baissait pour pousser le large fauteuil en cuir rouge au fond de la pièce lorsqu'une gerbe d'étincelles vertes retentit derrière elle. Hermione se retourna vivement pour faire face à Harry, apparu dans le foyer de sa cheminée. Le sourire du jeune homme se transforma en un air ébahi lorsqu'il jeta un œil au salon. Hermione le regarda à son tour avec des yeux exorbités. Les deux amis se jaugèrent un instant sans prononcer un mot.
« Tu… redécores ? balbutia Harry, sortant enfin de son mutisme.
- Oui… Tu aimes ? demanda Hermione, le visage toujours rouge.
- C'est… C'est bien, oui, confirma le jeune homme, inspectant la pièce.
- Qu'est-ce que tu fais là Harry ? relança Hermione en se redressant, le souffle court.
Il l'inspectait à la manière d'un docteur évaluant les chances que son patient s'évade par la première fenêtre à sa portée.
- Tu nous avais invités… pour nous remercier de vous avoir reçu pour Noël… , répondit Harry, passant une main embarrassée dans ses cheveux.
Les yeux d'Hermione s'écarquillèrent davantage.
- Oui ! Oui, j'ai fait ça, s'écria-t-elle, se souvenant brusquement de son invitation.
Alors que la jeune femme réfléchissait à un plan de secours, une nouvelle gerbe d'étincelles explosa et Sirius apparut à son tour dans le salon. Il jeta des regards surpris tout autour de lui jusqu'à parvenir à la sorcière. Si Hermione se sentait embarrassée quelques secondes auparavant, ça n'était rien comparé à cet instant précis. Son visage piqua un fard tandis que Sirius continuait de la regarder, surpris.
« Tu redécores ? »
La sorcière chérissait à cet instant l'idée de transplaner loin de son appartement sans un regard en arrière. Avant qu'elle ne trouve quoi répondre, Sirius hocha la tête, un sourire naissant petit à petit sur son visage.
« J'aime bien. »
Hermione aurait aimé que son cœur ne tambourine pas autant pour une simple politesse d'usage. Elle hocha frénétiquement la tête pour le remercier, son regard se redirigeant vers Harry.
« Ginny n'est pas avec vous ?
- Elle ne se sentait vraiment pas bien aujourd'hui. Elle s'excuse et dit qu'elle se rattrapera une prochaine fois. » expliqua Harry avec une grimace.
« Bien. Formidable. » songea Hermione avec un élan de panique à l'idée de se retrouver seule avec son meilleur ami et son ancien amant.
Sirius fit un pas vers elle, quittant l'âtre de la cheminée.
« Qu'est-ce qu'on peut faire pour t'aider ? »
Hermione releva les yeux vers lui. Dans les yeux irisés de l'animagus, elle ne vit aucune trace de pitié ou d'inconfort, comme elle l'avait repéré chez Harry dès qu'il était entré chez elle. Et pour cela, la jeune femme l'aurait volontiers attiré dans ses bras. Elle reprit ses esprits en un éclair et répondit.
« Je vais enfiler quelque chose de plus décent. Pendant ce temps, vous pouvez mettre la table dans la cuisine. Rien n'a changé là-bas. »
Sirius hocha la tête et donna un coup d'épaule à son filleul pour l'entraîner à sa suite. Harry cligna plusieurs fois des yeux et quitta le regard préoccupé qu'il portait jusqu'alors. Hermione reprit une respiration normale et fila dans sa chambre pour se changer.
o O o
La cohabitation entre les deux frères Weasley se passait mieux que George n'aurait jamais pu l'imaginer. Il s'était attendu à ce que Ron et lui s'affrontent en duel dès le second jour de cohabitation, leur enfance au sein du Terrier pouvant être qualifiée, au mieux, de chaotique. Mais rien de tout cela ne s'était produit, bien au contraire. Les deux hommes semblaient avoir trouvé un équilibre serein et menaient leur train de vie sans orages.
Un soir, alors que George terminait de servir les derniers clients, la porte s'ouvrit sur son frère cadet.
« J'en ai pour une minute. » indiqua George tandis qu'il tendait un sachet rempli de disques à dents de serpents à deux Gryffondors enthousiastes.
Ron hocha la tête et en profita pour se balader dans les rayons du magasin. Cela faisait des années qu'il n'était pas retourné chez Weasley, Farces pour sorciers facétieux. Le jeune homme observa les articles trônant sur les étagères. Oreilles à rallonge, télescopes frappeurs, boites à flemmes et baguettes farceuses s'étalaient face à lui. Il fronça les sourcils, cherchant dans d'autres recoins des produits inédits.
George raccompagna les deux élèves de Poudlard vers la sortie et tourna le panneau indiquant que le magasin était dorénavant fermé. Ron réapparut à ce moment dans son champ de vision. Son grand frère le salua.
« Quoi de neuf ?
- Je cherchais un petit quelque chose pour l'anniversaire de Teddy.
- Tu cherches à me faire avoir des ennuis avec Andromeda ? lança George avec une œillade amusée.
- Jamais de la vie… s'amusa Ron avec un petit sourire.
Puis il redevint sérieux.
- Ça fait combien de temps que tu n'as pas ressorti de nouveaux articles ?
Le sourire de George s'effaça à son tour tandis que sa main venait frotter l'arrière de son crâne.
- Des années… Depuis Fred, répondit-il sombrement.
Ron hocha la tête, compréhensif. Son regard se reporta vers les étagères d'exposition.
- Il faudrait renouveler un peu le stock.
- Je sais… Pas étonnant que les clients se fassent rares ces temps-ci, ils se lassent de nos articles.
Le plus jeune haussa les épaules et prit en main une poudre d'obscurité instantanée qu'il fit jouer entre ses doigts.
- Tu n'es pas obligé de tout remplacer. Simplement diversifier la gamme… Par exemple, des patins à roulettes à gravité variable, proposa Ron à mesure qu'il réfléchissait.
George leva les yeux vers lui.
- Oui… Oui, ça pourrait le faire.
- Et puis tu te souviens du poste de radio que Papa essayait de réparer, en vain ? Tu pourrais en créer des miniatures avec des insultes enregistrées dedans.
- Voire même les phrases répétées à la longue par McGonagall, Rusard et compagnie ! compléta le grand frère alors qu'un sourire mordant naissait sur ses lèvres.
- Oh oui ! Je rêverais d'entendre encore une fois Dolores Ombrage vociférer ses insultes tandis qu'elle se faisait emmener par le troupeau de centaures », s'exclama Ron, les yeux brillants.
Les deux frères éclatèrent de rire au souvenir de la détestable professeure et du sale quart d'heure qu'elle avait passé au fin fond de la Forêt Interdite. Ron se stoppa net dans son fou rire, les yeux exorbités. Il se rapprocha brusquement de son frère, posant une main sur le comptoir.
« C'est ça ! C'est ça qu'il faut que je fasse ! s'exclama-t-il.
- Quoi ? Retrouver Dolores Ombrage ? le nargua son frangin avec un sourire effronté.
- Non ! répondit Ron avec précipitation, non sans esquisser une grimace de dégout. Non, il faut que je m'associe avec toi !
- De quoi donc ? demanda George, déconcerté.
- Je veux travailler ici ! affirma le plus jeune, avec un sourire ébahi.
George continua de le regarder, atterré.
- Pense à ça une seconde : tu sais indéniablement tenir un commerce et faire les comptes. Mais soyons francs, tu n'as rien proposé de nouveau depuis des lustres. Et moi, je peux t'aider à faire ça ! J'adore votre boutique, j'ai toujours voulu participer à vos créations, j'apporterai un regard nouveau sur tout ça ! »
L'aîné se frotta une nouvelle fois l'arrière du crâne, incertain. Ron faisait preuve d'une bonne volonté sans failles mais le jumeau hésitait encore. Le jeune homme sentit la réticence de son grand frère et reprit, moins exalté mais tout aussi sérieux.
« Ça vaut le coup d'essayer. Tu n'as rien à perdre dans l'affaire, si ce n'est un peu de temps. Si les choses ne marchent pas, on laisse tomber et tu pourras reprendre tes ventes comme avant… Mais laisse-moi une chance de faire mes preuves. La carrière d'Auror, c'était pas pour moi et j'aurais bien besoin d'un nouvel élan dans ma vie. »
George releva les yeux vers Ron. Ce dernier le fixait sans broncher. Il vit dans ses yeux une détermination qu'il n'avait pas eu souvent l'occasion de voir chez son jeune frère. Après quelques secondes de réflexion, le sorcier hocha la tête et se redressa.
Il tendit une main en direction de son petit frère. Ron le contempla, surpris. George fit un signe de tête pour l'encourager.
« Tu es à l'essai. Pour un mois. Et ensuite, on avisera. »
Le visage de Ron se fendit d'un grand sourire tandis qu'il acceptait la poignée de main.
