La Conjonction des Astres
Episode huitième
Pluie, larmes et alliances
Note de l'Auteur
Oui, bon, du co-auteur. D'abord, je vous conseille de ne pas me lyncher. C'est vrai, quoi : vous n'aurez pas le chapitre suivant (*rictus sardonique*) cependant, je veux bien vous présenter mes excuses les plus plates pour mon manque de heu… manifestations ces derniers temps. Bon, en gros, chuis désolée de pas vos avoir donné de nouvelles. Mais j'ai eu un travail énormissime, et ça m'a coupé l'arrivée d'électricité là-haut. Comprendre : je n'ai rien branlé depuis un bail, mais je vais réparer ça.
Enfin voilà. Je vous ai concocté un beau chapitre huit, j'espère qu'il vous plaira. C'est – enfin ! – la concrétisation de nos rêves les plus fous : tout le monde il fait la paix, youpi ! mais je vous préviens, ce n'est pas non plus tout rose…
Bon, je me tais. Je vous laisse lire. Mais après vous râlerez que je ne renseigne jamais les gens !
Bisous, et bonne lecture… (ah, et puis un dernier truc aussi : bientôt au programme, Quidditch, rigolades et petits bobos… sauce SeveRogue ! on l'applaudit bien fort)
Eh ! et puis envoyez-moi des reviews !
Et pensez à moi, j'ai une leçon de conduite dans une heure…
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« …il m'est en effet parvenu certaine rumeur, que j'ai tout lieu de croire fondée… »
Salaud. Salaud, salaud, salaud.
Bien besoin de ça. Réputation méritée, la vipère… chapeau. Enfin, Choixpeau. A croire que leur seule ambition est de cracher leur fiel !
« …me suis laissé entendre qu'un événement imprévu… »
Laissé entendre ? Lassé d'entendre, oui. Lassé de voir les petites couleuvres être bien sages, plutôt. Il faut de l'imprévu, du spectaculaire… Qu'attends-tu, pauvre fou ? Que la renommée t'écrase ?
« …que vous pourriez dissimuler. »
« Professeur ? »
« Fraülein Lönewenster, il est bien entendu que je puis tout entreprendre pour vous aider, à cette condition que vous ne cachiez rien. Monsieur Malefoy a eu a subir… »
« A quoi ?! Avez-vous seulement une idée de ce que représente une boule d'énergie comme celle-ci ? C'est douloureux, très douloureux. Et à l'évidence, Monsieur Malefoy ne souffre que d'une inflammation de l'ego ! »
« Mademoiselle Lönewenster ! il m'importe peu que vous fussiez victime de votre imprudence, mais veuillez je vous prie considérer la pondération comme une qualité requérable au sein de cette école ! »
« Au sein de cette école, Professeur, pas de cette Maison. Et vous le savez fort bien. Veuillez je vous prie considérer votre imprudence et m'exposer clairement la raison de votre insistance. Pourquoi m'avez-vous fait convoquer ? »
Severus Rogue, Maître ès Potions à l'école de Magie et Sorcellerie Poudlard, considéra d'abord son élève plutôt que la question.
L'après-midi tirait à sa fin, tandis que la fin de l'été se faisait à présent clairement sentir. Le ciel de septembre, exceptionnellement clément, avait fait place à celui d'octobre depuis déjà deux longues semaines, et de lourds nuages s'amoncelaient en prévisions de gros orages. Décidément, la saison de Quidditch s'annonçait mouvementée.
Dans l'obscure clarté d'un cachot désaffecté, le Professeur Rogue siégeait à son bureau. La pièce était confortable, pour quiconque n'étant ni claustrophobe, ni héliophile : la seule ouverture pratiquée était une porte massive faite de bois résistant, et engravée de formules inquiétantes. Les murs de pierre épaisse étaient garnis de bocaux et de fioles, emplis de liquides étranges et regorgeant de choses peu ragoûtantes. L'écume de breuvages aux vapeurs suspectes tâchait le verre de couleurs insolites, et quelques créatures bizarres nageaient dans du formol à l'aspect repoussant. Partout des chaudrons, des ustensiles, des appareils, et au milieu de ce chaos rebutant, un trône, celui du Maître des Potions.
Severus Rogue s'était maintes fois demandé si l'un ou l'autre de ses élèves avait jamais douté de son (répugnant) personnage. Il lui avait traversé l'esprit à plusieurs reprises que l'ou ou l'autre de ces têtes blondes aurait pu se demander la raison de tout cet étalage de fourberie et de mauvaise foi. Mais Severus Rogue était quelqu'un d'éminemment pessimiste : et la réponse restait non, cent fois non.
Il avait un esprit scientifique, à la rigueur méticuleuse bien qu'un piètre pédagogue, il se montrait remarquable spécialiste. Son cabinet de travail était certes sombre et inquiétant, mais l'ordre y régnait sans faille, comme sa logique rigoureuse lui ordonnait de l'y maintenir. Et s'il ne faisait pas grand cas d'aucun de ses élèves, une surprenante curiosité analytique le poussait à les étudier, comme il le faisait des monstres conservés à cet escient. Il était incapable de la moindre affection par le passé, sans doute, s'y fût-il laissé prendre. D'ailleurs, cela était arrivé. Mais à présent,… les affinités lui semblaient vaines.
Et pourtant… pourtant, cette créature aux boucles sombres, au visage pâle et comme absent, le faisait malgré lui s'incliner. Oh ! quoi qu'il se pût dire, il se montrait souvent indulgent – avec les personnes de son choix, voilà tout. Mais cette fille brune, dont les yeux sans fond recelaient tous les mystères du monde, et engloutissaient l'âme de quiconque s'en approchant, lui paraissait étrangement familière. Quelque chose en lui hurlait toujours à son approche, comme si elle avait été un mot qu'il aurait eu au bout de la langue et ne serait pas parvenu à trouver. Elle ne lui rappelait pas quelqu'un, elle le lui évoquait. Mais qui ?
Pourquoi ?
« Pourquoi ? »
« Mademoiselle Lönewenster ? »
« Vous m'avez fait venir. Pourquoi ? »
« J'étais, hum… intéressé, disons, par cette heu… manifestation. »
Une hésitation ? Non, deux. Cela ne lui était pas coutumier. Et quoi ?
« D'après le rapport de Malefoy… »
Malefoy ? tiens donc. Et pas de reproche… le Maître se serait-il incliné ? Qui l'eût cru ? Pauvre dragon…
« …une sorte d'énergie semblait sortir de vos doigts. »
« C'est exact. »
« De… l'énergie ? »
« Du feu. »
« Du… »
« Oui. De mes yeux. Et mes doigts. »
Cassie, en guise d'illustration, tendit deux longues mains blanches devant elle. Rogue frissonna elle avait l'air de quelque apparition fantomatique, amorphe et exsangue. Elle était surprenant de volonté, cependant, malgré sa voix atone et ses grands yeux vides. Elle paraissait une enveloppe transparente, un être éthéré, et pourtant sa force semblait indescriptible. Oui, un beau sujet d'étude.
Le jeune fille retira ses doigts, sans commentaire superflu. Elle avait un esprit mordant, mais ne semblait l'employer que pour parvenir à ses fins et encore, cela n'était point évident puisque ses fins ne semblaient pas parvenir jusqu'à elle. Une énigme. Un spectre, une âme à peine incarnée, déjà détachée des choses terrestres. Surprenante. Stupéfiante. Inquiétante. Envoûtante.
Il saisit une plume de faucon, qu'il fit tournoyer devant leurs yeux. elle ne se donnait même pas la peine de suivre le mouvement, elle…
Soudain, il prit conscience d'une chose. Il avait songé que, d'une manière évidente, et à la différence d'une personne ordinaire, elle ne suivait pas des yeux le va-et-vient incessant de la longue rémige mais en réalité, si elle ne le suivait pas, elle le précédait. Les yeux, ses yeux étranges suivaient la plume mais ce qu'il avait pris pour du retard était en réalité de l'avance. Comme un sorte d'instinct qui lui aurait soufflé la direction à prendre, la direction prise. Comme l'instinct du loup qui sait où la biche tournera – pour mieux l'attendre, pour mieux la piéger.
Severus Rogue frissonna. Il se trouva ridicule. Il reposa la plume avec un geste brusque, de la brusquerie qui lui était habituelle quand il donnait un cours ou déambulait dans les couloirs Cassandra Lönewenster releva la tête avec une tranquille ironie, trop indifférente pour être insolente, trop anodine pour être sournoise – et trop bizarre pour ne pas être effrayante.
« Mademoiselle Lönewenster, » se reprit-il, « j'apprécierais vivement que vous me fassiez part de vos découvertes la… si prochaine fois il y a. Pour le moment, j'ai quelques… » (il renifla dédaigneusement) « …copies à corriger. »
Il la congédiait, sans autre forme de procès. Cassie ne s'en formalisa pas, elle s'en fut avec un gracieux mouvement de tête, et le plus complet des silences. Malgré lui, Rogue se prit à sourire. ce n'était pas tous les jours que l'on lui tenait tête… et pas tous les jours que l'on s'en sortait sans dommage.
Exact, pas vrai. Quelle retenue, Miss Lönewenster, quelle morgue, quel professionnalisme ! Quel aplomb surtout… aussi, peut-être. Et quoi d'autre encore ? une insensée, une illuminée, un génie magique ? Qui êtes-vous, Miss Lönewenster ? et que pouvez-vous être ? Une erreur monstrueuse ou une merveille de la nature ? Quelle sorte d'élève peut-elle manier des boules d'énergie ? Quel genre de Serpentard peut-il se voir accorder l'indulgence ? Avec quoi jouez-vous, Miss Lönewenster ? Avec moi, avec d'autres, avec vous-même ?
Quelle beauté dans la folie… quelle laideur dans l'ignorance ! Savez-vous bien ce que vous êtes ?
Souhaiteriez-vous me le faire dire ?
Peut-être.
Peut-être le sais-je, après tout.
Peut-être en valez-vous la peine.
Il secoua la tête, puis défit le nœud liant les parchemins entre eux.
Alea jacta est.
La première goutte glissa sur un mur de pierre froide.
La pluie était arrivée.
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Le ciel s'écrasait contre la terre.
Le temps fraîchissait depuis quelques heures déjà, lorsque l'averse s'était déclarée. Des gouttes fines et froides comme de petits éclats de givre tombaient régulièrement en rangs serrés, obligeant les élèves de toutes les maisons à chercher refuge sous la toiture la plus proche. Le bleu, le vert, le jaune et le rouge fusaient partout comme de vifs feux follets, jetant des éclaboussures lumineuses le long des couloirs aux hauts murs de pierre. Des cris, des rires et des bousculades troublaient l'austérité des arches grises, et la gaieté colorait d'étrange manière un côté des murailles immenses, tandis que l'autre se noyait dans la lueur humide de l'orage approchant.
Puis les gouttes s'étaient épaissies, et des ruisseaux glacés avaient fondu du ciel sur la terre. Les nuages crevaient sous la masse des chars, conduits par d'ardentes Valkyries échappées du Walhalla, tandis que résonnaient les coups du marteau de Thor. La foudre déchira enfin le ciel devenu noir, mais plus un mortel ne pouvait être emporté : tous avaient couru se mettre à l'abri.
Dans les hauteurs du château immense, comme bâti à la mesure de ces dieux terribles, la fenêtre d'une haute tour était grande ouverte sur le tourbillon titanesque. Telle Mélisande aux cheveux d'or, une jeune fille rêvait en regardant le ciel. Elle avait encore la main sur le battant, et la vitre lui renvoyait l'image d'une créature aux boucles sombres, répandues comme du miel sur ses épaules, laissées nues par la chemise de nuit pâle dont elle était légèrement vêtue. Une apparition irréelle et fantomatique, qui semblait devoir s'évanouir dans un souffle.
Un souffle passa, qui fit voler quelques mèches brunes en arrière. Elanor avait des cheveux couleur chocolat, mais l'obscurité les faisaient plus noires que la nuit. Sa peau dorée n'en paraissait que plus opaline. Elanor soupira. La pluie la rendait mélancolique. Pourtant… ces gouttes lui rappelaient quelque chose, un vague souvenir surgi du passé. Chaque fois qu'il pleuvait, Elanor se sentait un peu triste. Oh ! tous les enfants se sentent tristes lorsqu'il pleut. La pluie interdit la lumière, empêche les jeux, fait fuir les criquets et ternit les fleurs. Jamais Elanor n'avait apprécié la pluie aux grosses gouttes. Elle aimait écouter cette bruine crépiter doucement sur les fenêtres, comme quelque génie ou quelque lutin eût frappé au carreau mais l'orage la rendait mal à l'aise.
Ce soir, cependant…
Elanor laissa son esprit vagabonder. Elle n'avait pas sommeil. Mais elle se sentait… bien. Reposée. Etrangement calme. Comme si un feu était en elle, une transe mais elle se sentait bien.
Elle ferma les yeux un instant.
Des images vinrent à elle. Elle crut sentir ses cheveux chatouiller son visage, mais n'entrait dans la chambre qu'une simple brise fraîche. Avec un soupir de lassitude bienheureuse, la jeune fille s'avança jusqu'au bord de la fenêtre. Elle avait toujours les yeux fermés, un sourire flottant sur son visage, ses cheveux flottant sur ses épaules.
L'image fugitive de pas sous la clameur d'orage.
Elanor ouvrit les yeux, porta les mains à sa bouche. Des pas ? Mais… Elle se pencha à la fenêtre, frissonnant sous le fin tissu satiné. La Tour était si haute que l'on voyait partout alentour, mais nulle trace de qui que ce fut nul écho de ses pas.
Vaguement effrayée, elle eut un mouvement de recul. Puis, la curiosité la poussant, elle s'approchant de nouveau. Elle tendit lentement, doucement, légèrement le bras à la pluie fine… elle ferma les yeux.
L'écho lointain d'une respiration haletante.
Le bruit d'une course rapide martelant l'asphalte.
Un cri d'enfant, deux cris, poussés à l'unisson.
Un éclair de lumière verte, un rire froid et deux points rouges.
Maman…Un vent frais, le son de l'eau en cascade.
La douceur soyeuse de vagues satinées, des boucles sombres, des cheveux de femme.
L'obscurité, l'océan, la douleur – puis la crainte et la lumière le premier matin du monde.
Naître.
Mourir.
Donner la vie.
Oter la mort.
Maman…« Maman ! »
La peur et l'obscurité, de nouveau.
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Hermione se retourna avec délices dans son lit aux grands draps rouges. Dormir, bonheur extrême. Un luxe, aussi, quand on songeait à toutes ces heures passées le dos courbé, à jouer les rats de bibliothèque… La jeune fille réprima un petit gloussement à l'idée de Ron, s'entendant dire par elle-même qu'elle devait trop travailler… mais il fallait bien le laisser râler, cela lui plaisait tellement… ! Hermione se demanda ce qu'elle pensait vraiment de Ron. D'après les filles, elle ressentait forcément quelque chose pour lui. Mais… ce n'était pas quelque chose qui se lisait ! Un savoir non livresque lui paraissait plutôt hasardeux. D'ailleurs, tomber amoureuse de faisait pas partie du devoir d'une étudiante modèle… Pourtant, elle aurait pu s'alléguer quelques heures de détente, infiniment méritées. Après tout, songea-t-elle avec satisfaction, elle était la meilleure élève de l'école. Enfin, elle s'y efforçait ! Et ce, depuis si longtemps… Tant d'obstination avait porté ses fruits. Hermione Granger était Préfète, et fière de l'être. Oui, elle pouvait se permettre quelques… distractions. Oui, c'était une bonne idée : désormais, elle s'astreindrait à la détente, aussi souvent que faire se pourrait. Un peu, pour commencer. Bah ! une matinée sans livres, c'était jouable. On pouvait toujours s'occuper… Tiens : à se faire belle, par exemple. Par quoi commencer ? Ses cheveux ? pourquoi pas mais passer deux heures chaque matin à s'oindre de Lissemplis… Non, mieux valait demander à quelqu'un, demander un conseil peut-être qu'Elanor… Hermione, les yeux toujours fermés, grimaça. Elle s'était disputée avec Elanor, gâchant se qui semblait le point de départ d'une solide amitié. Mais… bon sang ! c'était une fille tellement mystérieuse et secrète ! Elle avait l'air si… détachée… La fille-aux-cheveux-ébouriffés poussa un long soupir. Chaque fois qu'elle pensait à son amitié brisée, les larmes menaçaient. Non, penser à autre chose. Se rendormir.
Se…
Oh, zut.
Impossible de s'endormir.
Hermione eut un bâillement de frustration. Elle se retourna d'un mouvement brusque. Et étouffa un cri.
Encadrée sur fond de ciel nocturne, une silhouette fantomatique se découpait nettement. Et la silhouette paraissait si… réelle. Elle semblait pleurer ! Le drap blanc était agité de soubresauts.
Hermione ramena la couverture à elle d'un geste convulsif. Baguette… baguette ? baguette ! La mince tige de bois fermement agrippée, elle quitta sans bruit son lit chaud pour les dalles glacées. Pieds nus, furtive, les cheveux hérissés (plus que d'habitude, à ce qu'il lui semblait) Hermione s'avança avec prudence.
« Maman ! » cria soudain l'apparition.
De surprise autant que de soulagement, Hermione laissa tomber sa baguette. Elanor releva brusquement la tête, la fixant de deux gouffres obscurs creusés dans l'océan d'opale.
« Heu… » fit Hermione. Elle se sentait éminemment ridicule. Sa camarade laissa échapper un reniflement misérable. Hermione leva les yeux aux ciel, se préparant à jouer les bons samaritains.
« Je suis désolée » dit-elle. « Je t'avais prise pour un fantôme. »
Elanor parut cligner plusieurs fois des yeux.
« Oui… enfin, je me suis réveillée en sursaut, et… »
Soudain, Elanor se jeta au cou d'Hermione, qui avala un certain nombre de cheveux chocolat.
Se sentant, pour une fois, dépassée par les évènements, Hermione entreprit de tapoter l'épaule de sa larmoyante condisciple.
« Bon… on a fait la paix, je crois. »
La dernière fois, songea la jeune fille, qu'elle faisait de l'insomnie. A moins que… oh ! les Moldus avaient sûrement fait ça, des bouquins sur le mal-être…
Après la détente, décidé : elle irait à la bibliothèque.
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Il était adossé à la pierre, et ses yeux contemplaient l'infini. Il avait la tête légèrement penchée sur son épaule gauche, et une courte mèche blonde caressait son front, couronne étrange, laurier du vainqueur. Son visage était de marbre, ses yeux d'argent, et son corps fin la sculpture terrifiante et merveilleuse d'un archange déchu. Ses ailes tombées, il ne lui restait plus que son visage éthéré, et ses boucles dorées semblaient faites pour servir d'auréole.
Il paraissait rêveur, comme plongé dans quelque réflexion d'immortel, égaré sur Terre, figé dans la pierre froide pour l'Eternité. Sous le voile des longs cils, l'éclat du diamant transparaissait comme si quelque mystère divin l'eût choisi pour porteur, et brillait, lointain, tel le feu secret d'un désir inaccessible.
Un souffle léger s'échappa de ses lèvres entrouvertes en un sourire de songe, et la flamme sous la glace sembla se réduire à l'instant. La statue étrange, faite de cristal et d'argent, redevenait Homme. Mais le marbre de son visage restait le même.
Un battement de cils, et deux yeux de pierre. Le Mystère s'incarnait doucement, pour prendre forme humaine.
Mais serait-il la Foudre ou Prométhée ?
« Tu sors tôt. »
Sa voix laissait apparaître quelque contrariété mal dissimulée sous un sourire fat et faux. Il changea de position, et les mains toujours dans les poches de sa robe noire, se tint à la hauteur de son miroir dans l'énigme.
« Ce ne fut pas long. »
Elle sourit légèrement tout en inclinant la tête un sourire doux et humble, celui du martyr qui pardonne, car il entrevoit déjà la Lumière céleste. Il fronça les sourcils.
« Tu as tort de rire, il ne t'épargnera pas. » laissa-t-il échapper.
Elle souriait toujours, avec une sorte de douce mélancolie. « Ainsi c'était bien toi. Toi qui as jugé bon de t'en remettre à plus puissant – qui as jugé bon d'avoir peur. »
Les yeux gris devinrent le fer d'une lance. « Je n'ai pas eu peur. Je n'ai fait que te… »
«… dénoncer ? »
« … te punir. »
« Me punir ? »
Un léger doute à présent, une tendre ironie. Un vague intérêt caché sous l'indifférence. L'ange aux ailes coupées ne laissa pas intimider, quand bien même c'eût été le but de la réflexion il s'en trouva même quelque peu rasséréné : enfin, une trace de vie sous cette écorce grise.
« Tu ne peux pas ignorer les règles, parce que tu es à Serpentard. Il y a les règles de l'école, et il y a celle de Serpentard. Peu m'importe que tu joues les martyrs en combustion spontanée, mais tu dois obéir à certaines lois de la Maison. Et d'abord, tu dois m'obéir. »
Elle releva la tête. Son regard était clair et droit, et c'est sans ciller qu'elle soutint celui de l'arrogant chérubin. Un regard froid et sombre, autant que pouvait s'assombrir le cristal.
« Je n'ignore aucune règle, lorsqu'elles choisissent de m'ignorer. Question… hmm, d'éthique personnelle. »
« Ethique personnelle ?… » répéta-t-il avec une incrédulité stupéfaite. « L'éthique ici, c'est moi. »
Elle grimaça un sourire, ce qui en soi paraissait déjà exceptionnel. « Tu n'as pas compris exactement ce que tu dis toi-même ici, personne n'obéit à quiconque. En tant que héraut de Serpentard, tu devrais te déclarer heureux que tes disciples suivent les préceptes que tu prônes j'ai saisi l'essentiel, vois-tu : je contourne la difficulté, je plie le règlement. J'expérimente. Je m'adapte. Ce n'est pas ça, être à Serpentard ? »
Il la considéra un moment, l'œil plissé, mi-figue mi-raisin. « Je suppose que je peux prendre ça comme une acceptation des termes du contrat. »
Elle haussa épaules et bras en signe d'indifférence. « Considère-le comme un échange diplomatique de bon goût. »
Il eut un vrai sourire d'apprenti dictateur, ce qui provoqua un étrange contraste entre sa moue de petit garçon et ses manières de despote. Il se mordit les lèvres un instant, puis eut un petit rire, un peu rauque. Manque d'habitude, songea Cassie. Mais après tout, elle était mal placée pour ce genre de réflexion. Le garçon blond lui tendit la main. La deuxième fois, depuis leur première rencontre. Pour une raison assez nébuleuse, elle devait avoir fait bonne impression au Grand Chambellan de Serpentard.
« Bienvenue dans la Maison. » dit-il simplement, le visage à nouveau neutre mais plus détendu.
Et cette fois, la fille aux longues boucles brunes déposa, au creux de sa main blanche et forte, ses longs doigts pâles et froids. Draco resserra son étreinte en frissonnant. Elle semblait glacée. Trop immobile. Silencieuse. Translucide. Hypnotique. Il tendit l'autre main pour toucher son visage aux traits délicats mais le charme se rompit lorsqu'elle frissonna à son tour et releva la tête. La main de Draco retomba le long de son flanc. La main droite enlaçant toujours celle de Cassandra, il la tira vers lui. La jeune fille ne bougea pas. Il ouvrit la main et les doigts bleutés s'en échappèrent en frôlant sa chair douce et ferme. Il se détourna, avec peut-être un léger haussement d'épaules. Il prit le chemin du retour elle le dépassa, une mèche brune effleurant sa joue blonde. Puis l'ombre longue sur le long mur de pierre finit par s'estomper.
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« Tu sais, c'est le moment que je préfère. »
Elanor se carra plus confortablement dans son fauteuil aux couleurs un peu fanées, et pencha la tête pour observer sa compagne, à travers un voile de cheveux fous.
« Lequel ? »
Hermione était affalée dans le canapé (rouge) en vis-à-vis, plongée avec délices dans l'étoffe riche, à la fois rêche et douce, du velours. Elle goûtait pleinement cet instant de calme et de complicité féminine, unique et impossible avec ces sottes habituelles qu'elle côtoyait à Gryffondor.
Elanor s'étira comme un chat, et bâilla en exhibant de jolies dents régulières et blanches comme des perles. Elle se pelotonna contre un coussin rouge avec volupté, et se redressa sur un coude, un sourire félin au coin des lèvres.
« Oui, ce moment-là de la nuit. il pleut dehors, mais on s'en fiche ici il y a le feu, l'odeur du bois qui brûle, une lumière noire, or et rouge. Et nous avons la Salle tout entière pour nous toutes seules ! » Elle laissa échapper un petit rire, contagieux. Hermione sourit à son tour, et disposa quelques coussins rouges de manière à s'enterrer au milieu avec un soupir de béatitude.
« Comme je te comprends ! » s'exclama-t-elle. « Mais c'est plutôt rare d'être au calme ici. Et puis… » Elle s'apprêtait à rajouter quelque chose comme « et puis, avec les cours,… il faut dormir et non venir ici pour papoter » mais se ravisa à temps. De toute manière, elle n'avait aucune envie d'entamer une dispute, non seulement parce qu'elle était trop bien ou trop fatiguée pour ce faire, mais surtout parce qu'elle ne souhaitait pas gâcher à nouveau leur amitié, à Elanor et à elle, en réfutant les principes vitaux du bon dilettante établis par sa condisciple bien-aimée. Et une bonne résolution restait une bonne résolution, même si elle concernait l'adjonction à son emploi du temps d'un moment de détente, car prise par une Hermione elle en gagnait toute sa dimension d'exigence physique et spirituelle. Ainsi, elle se contenta d'ajouter :
« Je veux dire, ce n'est pas facile de s'accorder un moment avec toutes ces chipies. Dès qu'elles sont en troupeau, elles se mettent à bavasser sur les garçons, et les couples, et… »
« Tu sais, Hermignonne, » persifla Elanor, « ça peut représenter un sujet de conversation intéressant, le garçons… très valable, en fait. »
Hermione roula des yeux. « Quand même pas tout le temps ! Ne me dis pas que c'est un motif suffisant pour – »
« Pour quoi ? Les garçons parlent bien des filles tout le temps. »
Hermione se rencogna dans son fauteuil avec une moue boudeuse. A l'évidence, l'argument souffrait quelques lacunes et la jeune fille ne semblait prête à donner crédit à quiconque dont la raison sociale était de parler des filles. »
Elanor avait du mal à ne pas rire, cependant. Et un lent sourire traversa les lèvres de sa camarade, qui finit par éclater de rire, et lui dit enfin, les yeux pétillants :
« Moi, je trouve Seamus plutôt mignon. »
Elanor feignit d'être choquée. « Rhôôô… toi, une digne Britannique, tu fricotes avec un Irlandais ? » fit-elle, les yeux exagérément écarquillés.
Hermione répliqua, définitivement réjouie :
« C'est toujours mieux que de se compromettre à baver devant un… peuh ! Serpentard. »
Elanor se para de tous les aspects de la dignité offensée. « Personne ne m'a vue, d'abord. Et puis… il est vachement mignon ! »
« Beuuuh ! » s'écria Hermione en riant. « Elanor, tu as tiré la mauvaise pioche ! »
« C'est dingue, j'aurais jamais cru que t'intéresses aux cartes. Les secrets d'Hermione, ou les dessous cachés de Poudlard beach ? »
« Ferme-là, traîtresse ! Non, personne ne t'as parlé de Malefoy, l'extraordinaire fouine bondissante ? »
« Hein ?! » fit Elanor, s'étonnant et riant en même temps. Hermione avait un large sourire, et pleurait déjà presque de rire.
« Oh ! c'est une histoire très intéressante. » fit-elle, l'air faussement docte. « Et pour une fois, c'est une histoire que je n'ai pas lue. »
« Nooon ? » se moqua Elanor, les yeux exorbités. Elle reçut un coussin (rouge) en pleine figure.
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Lorsque Hermione eut achevé de relater son anecdote, les deux filles s'étranglaient de rire chacune dans leurs coussins. Elles se regardèrent elles étaient plus rouges encore que les tentures. Chacune essaya de garder son sérieux plus de trente secondes, et chacune repartit de plus belle. Elles émergèrent enfin de leur océan écarlate, yeux et joues brillantes, à bout de souffle. Elanor inspira longuement, puis entreprit de raconter à son amie différentes histoires qui avaient pu lui arriver en France, là-bas à Beauxbâtons. Cela dura un long moment, où deux jeunes filles insouciantes parlèrent de tout et de rien, d'elles, des autres, de la vie, comme peuvent parler celles qui vont devenir des femmes, et ne sont pour leur bonheur encore que des enfants.
Hermione et Elanor étaient définitivement réconciliées.
Oui, cette drôle de fille brune avait apporté le changement.
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La pluie martelait inlassablement les vitres, et la pâle luminescence de la lune effleurait à peine les lourdes draperies aux couleurs d'aiguilles de sapin. L'eau qui ruisselait au-dehors, qui s'insinuait dans le lisse chemin des carreaux, fragmentait la chiche lueur que Séléné offrait, et faisait des jeux d'ombres sur les draps aux reflets satinés, créant l'illusion d'un long serpent rampant sous l'orage à la lumière de la lune. Un écrin de choix pour les enfants d'une vipère qu'une lionne pouvait accueillir en son sein.
Draco soupira avec une lassitude un peu triste. La pluie le rendait toujours mélancolique – eût-il été un enfant ordinaire, cela se fût pu attribuer à l'absence d'une main aimante sur son front, à la caresse qui n'était pas là pour le rassurer à chaque grondement de l'orage mais il était un Malefoy, un vrai, élevé pour ne rien ressentir, pour tout juger, avec la même froideur, la même cruauté, la même indifférence. Cela ne l'empêchait pas, cependant, de concevoir des pensées si amères. Mais il ne regrattait rien, il ne se sentait pas en regret. Mais après tout, songea-t-il, comment pouvait-il savoir qu'il ne s'agissait pas de regret ?
Il soupira à nouveau, et sa main suivit le pli du drap aux couleurs argentées, sous le couvre-lit vert sombre. Les rideaux de son baldaquin étaient baissées, tendus sur l'obscurité et le silence. Il y avait, depuis sa première année, apposé un sort de discrétion rien ne filtrait de l'intérieur des draps verts. Parfois, lorsqu'un condisciple (il ne pouvait pas décemment les appeler camarades) se montrait trop bruyant, il jetait à cet écran commode quelque sort d'insonorisation, mais cela était rare il aimait à savoir ce qui pouvait arriver au-dehors, dans sa nature instable et inquiète. Il ne supportait pas les grognements de Goyle, qui parlait en dormant (à vrai dire, il lui arrivait souvent de penser qu'il pouvait faire montre d'indulgence, étant donné que son sommeil paraissait bien le seul moment où Goyle semblait savoir articuler la moindre phrase) et ces marmonnements confus perturbaient Draco, qui ne souffrait pas le moindre bruit pour dormir. Quant à Crabbe… il avait découvert les plaisirs solitaires assez récemment, et cela était devenu pour son « employeur » une véritable torture. Draco-aux-yeux-d'argent ne s'abaissait jamais à ce genre d'attitude, même sous le couvert de ses draps faiseurs de silence. Cela ne semblait pas digne d'un Malefoy.
A dire vrai, il lui arrivait de penser, de plus en plus souvent, qu'il pouvait être agréable d'effleurer la peau de quelque fille, mais sa conception en ce domaine s'arrêtait là les Serpentard lui paraissaient toutes d'hideuses succubes aux doigts crochus et aux lèvres gluantes, et tout contact de qui que ce fût répugnait au Prince des Serpents, comme l'avait surnommé Pansy Parkinson, la plus fidèle de ses groupies. Il la détestait. Il les haïssait toutes. Elles étaient viles et méprisables, elles ne le méritaient pas. Il n'en voulait aucune. Et pourtant, il savait fort bien qu'il n'avait qu'à faire un léger signe de tête pour que l'un de ses sbires lui en ramène une par les cheveux, voire qu'elle vienne toute seule, pour lui, pour qu'il se serve d'elle, qu'il en fasse ce que bon lui semble. Et cela n'était pas loin de lui évoquer quelque trouble intérieur mais d'un autre côté…
D'un autre côté, Draco Malefoy, comme tout capricieux dictateur, aimait qu'on lui résiste – non, il aimait que ses proies lui opposent une certaine résistance. La seule à apporter satisfaction, en l'occurrence, se montrait particulièrement difficile à dompter. En vérité, Draco sentait confusément qu'il lui serait impossible de jamais parvenir à ses fins, mais il était entêté, comme jamais aucun amoureux ne l'eût été. Probablement pour la simple et bonne raison qu'il était incapable lui-même de ressentir quoi que ce fût. Mais elle lui était si semblable… il devait l'avoir, parce qu'elle représentait tout ce qu'il était, ou pouvait être jamais encore Draco Malefoy n'avait pu s'observer dans un miroir, jamais il ne s'était vu comme il se voyait à travers elle. Il sentait qu'elle pouvait lui apporter des réponses sur lui-même, sur son devenir, ce qu'il pouvait en faire. Il était même disposé à faire preuve d'une certaine tolérance envers ses excentricités, disposé à l'aider, à la protéger, contre les autres, contre elle-même. Il avait besoin d'elle, parce qu'elle était lui, comme lui, à lui.
Etait-il à elle ?
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Hermione s'interrompit. Elle avait senti avant de le voir, qu'Elanor n'avait pas écouté, ne l'écoutait déjà plus. Son esprit embrumé de sommeil, mais ivre d'insouciance, était accaparé par la conversation elle mit un certain temps à réaliser ce qui se passait. Elle eut peur.
Les yeux d'Elanor regardaient dans le vide, plus qu'avant, plus qu'à l'habitude. Son corps légèrement penché n'était plus détendu comme il y avait seulement quelques instants, il semblait à la fois souple et raide, comme celui d'une poupée en chiffons. Le dos rond, les bras ballants, la jeune fille semblait prête à basculer, mais restait comme suspendue à un crochet invisible. Une mèche brune, échappée de sa lourde tresse, tombait devant ses yeux vides de toute expression. Comme si son âme s'était envolée, comme si… elle était ailleurs.
Le cerveau d'Hermione se remit en marche, et quelques lignes de nombreux livres lui passèrent par l'esprit il y était question de transes, d'envoûtements, de malédictions et autres potions néfastes, dont les noms compliqués évoquaient les pires auspices. Prenant conscience que sa langue était sèche, Hermione referma la bouche d'un coup sec, et déglutit laborieusement. Ses yeux étaient exorbités elle les cligna de nombreuses fois.
Puis elle se pencha à son tour.
« Elanor ? »
Hermione poussa un cri perçant.
Elanor avait simplement relevé la tête, mais d'un si brusque mouvement que sa tresse avait volé dans son dos et le cœur d'Hermione, bondi dans sa poitrine.
« Elanor ? » répéta-t-elle avec plus de confiance. « Ellie ? »
La brunette avait toujours les yeux vides comme deux puits sans fond.
Et soudain…
Elanor poussa un hurlement terrible.
Elle quitta le fauteuil comme si on l'en avait projetée, pour s'effondrer sur le tapis usé. Hermione, le souffle coupé, se précipita à son tour sur le sol aux motifs à dominante rouge. Elle saisit Elanor à bras-le-corps, pour la retourner sur le dos ce qu'elle vit alors l'épouvanta.
Elanor ne semblait pas consciente, et pourtant la douleur tordait chaque trait de son visage. Sa bouche était grande ouverte, comme si elle criait, mais seul une sorte de couinement en sortait la torture paraissait la parcourir tout entière, la posséder, se déplacer en elle. Elle semblait bouillonner de l'intérieur, cherchant à sortir en dévorant celle qu'elle parasitait.
Hermione, terrifiée, secoua sa condisciple avec autant de vigueur qu'elle pouvait encore en trouver. Elle pensa entendre Elanor crier, et commençait de se réjouir lorsqu'elle s'aperçut que les cris étaient les siens, depuis tout à l'heure qu'elle la remuait en tous sens.
Puis soudain, une main l'agrippa, lui pétrissant le bras de manière horrible. Hermione, hébétée, vit les doigts glacés d'Elanor enserrer son avant-bras avec une force insoutenable, comme de longs doigts de Strangulot.
Et un cri lui confirma sa première pensée : Elanor était revenue à elle.
Hermione se rua sur son amie, qu'elle étouffa sous une étreinte soulagée. Elle sentait le corps mince trembler contre son ventre et sous ses doigts, et plusieurs mèches brunes lui chatouillaient le visage, se collant à ses larmes. Elle pouvait sentir les pleurs d'Elanor à travers le fin tissu de sa chemise de nuit, et sa respiration saccadée et laborieuse faire voler ses propres cheveux, brossant le creux de son cou dénudé. Elle frissonna, sans trop comprendre.
« Et ben, qu'est-ce que vous faites ?! »
La voix juvénile d'un garçon, à la tonalité nettement éberluée. Ron se tenait sur le seuil de la Salle, dans une position plutôt comique : il avait un bras en avant, un pied en arrière, la bouche encore ouverte et les cheveux en bataille sans compter sa veste de pyjama, ou vendredi côtoyait dimanche… Il regardait d'un air stupéfait l'étrange spectacle à ses pieds.
Hermione lui rendit son regard, évitant soigneusement de remarquer le pantalon un peu large qui découvrait certaine pièce de sous-vêtement. Puis elle se rendit compte qu'elle enlaçait toujours Elanor. Elle relâcha un peu son étreinte. La jeune fille garda appui sur son épaule, et Hermione, alarmée, constata qu'elle avait perdu connaissance.
Ron eut une expression étrange, mêlant incompréhension, colère et souffrance. Elle eut un pincement au cœur, et un sentiment confus la traversa – mais comment pouvait-elle être jalouse dans un moment pareil ?!
« Je vais… » dit enfin Ron, non sans quelque réticence.
« Ce n'est pas ce que tu crois ! » dit précipitamment sa camarade, ayant retrouvé l'usage de la parole.
Ron eut un sourire crispé. « J'ai rien vu. »
« Hé ! » fit Hermione, qui se prenait d'agacement. « C'est pas le moment d'être jaloux ! Elanor vient d'avoir une espèce de… crise. »
Le rouquin ne pensa même pas à relever l'impertinence. Il parut interloqué. « Une crise ? »
« Oui ! » fit Hermione, impatientée à présent. « Elle a eu un regard fixe, et elle s'est roulée par terre… »
Ron la regarda longuement. Hermione eut un pressentiment.
« Ron ? qu'est-ce qu'il y a ? Qu'est-ce que tu faisais en bas ? »
Il parut s'éveiller d'un long sommeil.
« C'est Harry » dit-il enfin. « J'allais chercher de l'aide. Il… il s'est roulé par terre en criant, il ne va pas bien du tout. »
