Harry Potter et la Conjonction des Astres

Note :

Nous aimerions préciser, suite à une période de troubles embarrassants, que l'organisation des chapitres a été faite en fonction d'une ordination logique, et ce de manière définitive. En réalité, et comme vous le savez certainement, les options de publication de ce site ne comprennent pas la prise en compte de chapitres-prologue ce faisant, nous avons souhaité composer en conséquence, de manière à ne pas mélanger les évènements, les chapitres et autres lecteurs un tant soit peu perdus dans cet imbroglio littéraro-cosmo-psychanalytique. L'annonce d'un onzième chapitre n'est donc point fortuite, puisqu'elle inaugure la mise en page définitive de notre travail. Veuillez accepter nos plus humbles excuses quant au flou organisé de ces derniers temps. D'avance merci.

Les auteurs

Note de Mélusine (c'est un co-auteur – sans blague ?)

J'vous jure… vous ne pouvez vraiment pas vous rendre compte à quel point c'est dur d'écrire une fic à deux. C'est vrai, quoi ! On se retrouve avec des chapitres en trop, des lignes en moins, des bagarres par téléphone pour savoir qui, bon sang de bonsoir, va mettre dans le chapitre son idée de la veille (je vous rassure tout de suite, c'est moi qui crie le plus fort) et qui, nom d'un chien, va faire cette saleté de Disclaimer à la noix. Fgrzz. Dieu merci (bien que je croie que Papy bon Dieu n'a rien à voir là-dedans) ma poêle à frire est solide, autant que le crâne de SeveRogue (il a la tête dure, l'animal, faut pas croire) qui me concède toujours de bonne grâce quelques lignes (« – Donne ce chapitre! – Non ! *bônk* – Aïe ! – Donne ce chapitre ! – Non ! *bônk* – Aïe ! – Donne ce chapitre ! – Tiens, le voilà. – Merci de ta bienveillante coopération. – Ispice di…*biiiiip* ») aussi charmantes que superfétatoires (la fiction interactive – ami lecteur, cherche toi-même ce que ça veut dire) ce qui me remplit d'aise (toi, la ferme) et me chatouille délicatement la verve. La verve, j'ai dit ! Vous et vos sous-entendus graveleux… on dirait SeveRogue, tiens.

C'est incroyable… Nous venons d'atteindre le dixième chapitre (et je n'ai même pas cinquante reviews) c'est merveilleux ! SeveRogue et moi sommes des parents comblés ! Notre bébé se porte bien finalement… Bon, j'ai entrepris une grande stratégie marketing, ça devrait marcher. Ah ! et au fait : il est hors de question que je fasse un Disclaimer, j'ai décidé de faire payer la lecture de notre fic, à partir du onzième chapitre. Oh ! pas cher, pas cher. Une photo originale de Severus Rogue (avec ou sans sous-vêtements) ou de Draco Malefoy (je préfèrerais : sans sous-vêtements, mais je pense que c'est plutôt réglementé. Dommage. Les Anglais sont d'un coincé…) de mon Lucius tendrement détesté (et sa canne… kaï kaï kaï) voire de Gary Oldman. Celle-là, envoyez-là directement au QG : la communauté d'Hermichocos, ou chez Maraudeuse et sa secte d'adoratrice de Siriûûûs Black. Enfin, j'accepte également les portraits d'Olivier Dubois (et moi qui n'aimait pas les sportifs) de Seamus Finnigan (les Irlandais m'ont toujours faite craquer) ou d'Albus Dumbledore (avec sous-vêtements !!!) passkeu je l'aime bien, voilà.

Et je vous préviens… le premier que je chope en train de m'envoyer une photo de Rusard en tutu rose, je le prive de dessert, et na !

Mais je tiens à dire cependant que je ne tire aucun argent de l'écriture de mes fictions. Ben, c'est vrai, quoi ?!

Harry Potter et la Conjonction des Astres Onzième épisode

« Feu-follet et Vif-argent »

Elle était morte de peur.

En cette matinée froide et claire d'un samedi d'octobre, Poudlard se vidait de la foule bariolée de ses pensionnaires et le grand stade derrière l'école fourmillait déjà du flot des élèves, en dépit de l'heure matinale.

Elle écoutait depuis un bon moment le brouhaha des conversations, qui commençait à lui peser sérieusement. Depuis la première heure du lever, depuis le petit-déjeuner, tout le monde ne parlait que de Quidditch.

Hermione ne comprenait toujours pas (« Je ne comprendrai jamais ! ») qu'autant de monde pût à ce point se passionner pour un sport aussi dangereux et… futile. Point d'exclamation ! Cela l'avait toujours rendue positivement furieuse. En plus, son meilleur ami avait maintes fois risqué se rompre le cou, sans compter le reste. Et tous ces cris… elle n'osait même pas penser à ce que hurlait Seamus au plus fort de l'action, surtout lorsque les Serpentard venaient à marquer un but. Seigneur tout puissant… ce maudit irlandais aurait pu être meneur de mules ! Et puis… c'était quand même violent, le Quidditch ! Hermione soupçonnait par ailleurs fortement Fred et George de sauter sur la moindre occasion de démolir du Serpentard…

Dommage, comme aurait dit Elanor. A la réflexion, le vert et argent se portait plutôt bien cette année. Mmh… oui, il lui fallait vraiment quelque chose de vert… n'importe quoi, Draco Malefoy par exemple.

Oh mon Dieu ! Mais qu'est-ce que je raconte… Hermione, ma pauvre fille, tu divagues.

Elle avait beau prendre des airs bravaches (et, comme le lui avait fait remarquer Seamus – grrr ! Seamus… - elle avait beau détester le Quidditch, elle s'était fait une beauté pour l'occasion) la brunette n'en menait pas large. Il fallait avouer, aussi, que même d'habitude cela son angoisse n'avait rien à avoir… Maintenant, elle devait se ronger les sangs pour trois personnes !

La jeune fille jeta un coup d'œil impatient aux gradins environnants. Et zut au Quidditch ! Elle avait vraiment trop peur.

Si elle faisait un petit tour en coulisses, ils ne seraient pas fâchés ?

« Hé ! Pas la peine de piquer une crise, Capitaine… on a bien tout compris. »

Un duo de ténors bien modulé, joliment travaillé – Fred et George Weasley, les jumeaux diaboliques, assurément…

« Je sais. Mais j'ai la trooouille ! »

Une voix plus juvénile, agréablement profonde cependant : Harry, s'il te plaît… dis-lui d'arrêter…

« Pas de problèmes Harry ! On a tous la trouille. Mais cette fois… oui, cette fois… Oooh ! Je sens qu'on va s'en faire quelques-uns ! »

Et dire que ça, c'est le mien.

« Hermione ! »

Une tornade rouge, or et chocolat se précipita sur l'intéressée, laquelle étouffa bientôt sous l'étreinte affectionnée de sa meilleure amie, vêtue comme le reste de l'équipe de sa robe aux couleurs de leur Maison.

« Hum ! » fit une voix derrière eux. Ron se tenait debout, les bras croisés, une expression toute feinte d'intense indignation majestueusement affichée de sous une nuée de taches de rousseur. Elanor lâcha Hermione, qui rendit au plus dégingandé des rouquins présents un regard hautain empreint d'une digne sévérité. Elle croisa les bras elle aussi, et leva le nez.

« Ben qu'est-ce que tu as, Hermignonne ? » interrogea Ron, sous les gloussements surexcités d'au moins deux des Poursuiveuses, la troisième se rengorgeant comme un pigeon en parade.

« Elle a qu'elle fait la tête de te voir exposé à un danger si grand. » révéla Elanor.

Ron leva les bras en un geste théâtral. « Mais ma mignonne ! (Katie et Alicia avaient pris une belle teinte écrevisse, et s'étouffaient à présent dans le giron des deux Batteurs ravis) Je ne peux pas faire autrement ! C'est ma vie, le Quidditch, c'est ma… » Il s'interrompit, Hermione menaçant d'exploser d'une minute à l'autre. Katie émergea de la manche de George, et considéra la scène d'un œil plutôt trouble. Ron reprit, plus calmement. « Mais enfin, Hermione… tu as toujours assisté aux matchs… tu nous as encouragés… depuis qu'on se connaît, tu sais que c'est mon rêve… et puis, je… enfin tu… heu, nous… oui, je… » Hermione pencha la tête de côté le sommet du crâne d'Alicia dépassa enfin de l'épaule de Fred. Ron jeta un regard circulaire, et prit une grande inspiration. « Et puis, Hermione, je t'aime tu sais. » Alicia jeta un petit cri, Katie porta la main à sa poitrine, les yeux humides et la bouche en cœur, tandis qu'Elanor enflait à vue d'œil sous le coup de l'autosatisfaction. Harry lui donna un coup de coude.

Toujours pendue au cou de Ron, Hermione lui fit promettre un certain nombre de fois, et plus encore, de ne pas se mettre en danger, ou Harry, ou Elanor, « bien que certains le méritent » et surtout, de ne laisser passer aucun but. Après tout, on n'était pas Gryffondor pour rien.

« Et je te préviens, » fit-elle en agitant l'index, la voix menaçante. « Si je dois te retrouver à l'infirmerie après ce match, ce qui restera de toi aura affaire à moi ! »

Ron parut tout à fait convaincu par ce dernier argument.

« Ah ! les filles… » fit Harry alors que l'équipe écarlate se dirigeait vers la tour d'envol. « Rien de plus sensible, fragile, et… » Il dut avorter le reste de sa phrase, cependant, sous le regard lourd de sous-entendus que lui lançait Elanor, et qui lui promettait le pire s'il lui venait la sotte idée de poursuivre ses élucubrations saugrenues. Il se le tint pour dit.

L'entrée aux vestiaires se fit dans la plus grande discrétion, soucieux qu'ils étaient d'éviter d'ébruiter quelque propos que ce soit. Les Serpentard étaient bien assez vicieux, inutile de leur fournir des techniques utiles par-dessus le marché.

Les Gryffondors, quant à eux, étaient plutôt en forme, bien qu'assez préoccupés. Aucun d'entre eux n'avaient joué de match « officiel » depuis la troisième année – et pour l'un d'eux au moins, ce match serait un baptême…

Avoir Harry Potter dans l'équipe constituait toutefois un avantage non négligeable, en particulier au niveau du moral des troupes : au-delà d'un Attrapeur hors-pair, le jeune garçon représentait un soutien remarquable par sa réputation, méritée, méritante et méritoire. Après tout… c'était quand même Harry Potter.

Une autre chance était la continuité de l'équipe : mis à part Olivier Dubois, qui avait quitté Poudlard deux ans plus tôt, et signé depuis un contrat avec le club de Flaquemare, et que remplaçait Ron, et Angelina Johnson, qui avait laissé libre le poste de Poursuiveuse, occupé désormais par la vive Elanor, les membres restaient sensiblement les mêmes, identiques et soudés. D'ailleurs, l'intégration de nouveaux éléments s'étaient faite sans heurts, aussi aisément qu'il se pouvait espérer. Et le nouveau capitaine en espérait beaucoup.

Elanor se força à respirer calmement. Elle n'était pas nerveuse à proprement parler, enfin pas trop, mais un match en rouge et or à Poudlard demeurait bien différent d'une petite compétition à Beauxbâtons. D'ailleurs, dans l'école française, le sport ne tenait pas du tout la même place qu'ici en Angleterre les rencontres étaient moins fréquentes et ne faisait certes pas partie du parcours scolaire. Elle avait cependant un bon entraînement, la volonté et la ruse nécessaires à sa qualité de Poursuiveuse et elle ne craignait ni les blessures, ni les mesquineries de l'adversaire…

« Je vous remets aujourd'hui l'équipement de vos prédécesseurs ils l'ont portée avec fierté et talent, et je suis sûr que vous ferez de même, afin de défendre les couleurs prestigieuses de Gryffondor. » avait dit Harry d'un ton vibrant et solennel en remettant, avec une déférence presque religieuse, la robe rouge et or, les protections en cuir et la poignée de main réglementaires aux deux nouveaux membres de l'équipe. Ron avait l'air grave, Elanor paraissait plutôt amusée. Fred faisait de grands gestes et roulait des yeux, tandis que George imitait le Capitaine avec des attitudes théâtrales. « Vos prédécesseurs ont été renversés, blessés, ont sué beaucoup dans ces robes vous avez le devoir de respecter leur mémoire en vous battant, et mourir s'il le faut, pour l'honneur et la victoire ! »

Harry lui jeta un regard noir. « Sans vouloir vous mettre la pression. » ajouta Fred avec un clin d'œil.

« Je veux, » reprit Harry après avoir avalé beaucoup d'air, « je veux que vous ne ratiez aucune passe, que vous renvoyiez tous les Cognards, que vous n'hésitiez devant aucune feinte je veux que vous mettiez la pâtée à ces imbéciles de Serpentard ! » finit-il en criant presque. Fred demanda : « On peut faire tomber les imbéciles de leur balai ? »

« Bien sûr ! » rétorqua le nouveau Gardien. « Ils vont essayer, eux. »

« De toute façon, nous n'aurons pas à le faire ils sont tellement mauvais sur un manche qu'ils finiront par se casse la figure tout seuls. » fit remarquer George en haussant les épaules.

Katie objecta. « Il faut quand même se méfier. Ils sont malins, dans leur genre. Et ils ne vont pas hésiter à employer des moyens détournés… »

« Oui. » concéda Alicia. « Il faudra faire attention. Et c'est valable aussi pour toi. » lança-t-elle en direction d'Elanor, qui considérait l'équipe adverse avec désinvolture. « Parce que personne ne sait comment ils vont réagir face à notre nouvelle Poursuiveuse. »

« Et moi ! » s'exclama Ron. « Ils ne savent pas à qui ils ont affaire ! »

« Toi non plus apparemment. » riposta son meilleur ami. « Parce qu'autrement, tu ne prendrais pas le risque de faire peur à Hermignonne. »

« Glups ! » fit Ron.

« Parkinson, dégage de là tu veux ? »

Montague repoussa avec mauvaise humeur la fille qui lui faisait face. Il n'avait déjà pas envie de se trouver une morveuse dans les pattes, mais encore moins de se coltiner Pansy Parkinson, oh ! non… surtout pas Pansy « la-chienne-à-Malefoy » Parkinson…

La petite brune aux cheveux plats fit la moue. « Je peux voir Draco quand j'en ai envie. » répliqua-t-elle avec une obstination de fillette capricieuse. Montague leva les yeux au ciel avec accablement. Bon Dieu, j'ai fait pas mal de conneries dans ma vie, mais je ne pensais pas en avoir fait autant pour mériter ça.

« J'ai dit : dégage. Draco n'a vraiment pas besoin de toi, pas plus ici qu'ailleurs. »

La fille croisa les bras sur la poitrine, et s'avança vers lui en se déhanchant d'une façon outrageusement provocante. Elle s'approchait d'un peu trop près pour une conversation polie sa main effleura l'entrejambe du gigantesque Poursuiveur de Serpentard. « Tu me le laisserais voir ? » susurra-t-elle d'une voix plus caressante encore que ses petits doigts agiles. Le mot siffla d'une manière délicieusement obscène aux oreilles de Montague. Quant à ses mains…

Il lui saisit le poignet avec une expression menaçante. Elle avait des attaches fines. Il la repoussa brusquement, assez vexé de s'être laissé prendre. Tant mieux, après tout comme disait Marcus Flint, on jouait mieux lorsqu'on était frustré.

Jouer mieux… quand on voyait ce qu'ils récoltaient comme Capitaine…

« Dégage, Pansy. »

Une voix froide, un peu traînante, comme le fil d'un couteau bien aiguisé. Bien que le ton de la phrase fût proche de l'insulte, il put nettement voir frissonner la Serpentard. Bah ! après tout… que Parkinson soit du genre masochiste ne l'étonnait qu'à moitié. Elle était suffisamment fêlée pour ça. Et de toute façon…

Merde, il pouvait voir d'ici le bout des seins pointer de sous son chemisier… Elle n'avait probablement mis aucun sous-vêtement, pour mieux aguicher son Draco. Il n'empêchait… il faudrait faire un tour au dortoir des filles, un de ces soirs.

L'allumeuse en chef disparut au détour d'un couloir, en s'éloignant d'une démarche lascive, le nez fièrement levé – ce qui la faisait ressembler dangereusement à un sharpeï premier prix d'un concours canin. Montague se promit une petite virée il en parlerait bien assez tôt à Warrington.

Draco revêtit la longue robe vert et argent, avec un sentiment qui rappelait dangereusement l'angoisse. Le problème, à la vérité, était surtout qu'il pût exprimer le moindre sentiment mais en son for intérieur, c'était aisément pardonnable. Après tout, il allait jouer son premier match en tant que Capitaine, d'une équipe composée d'armoires à glace et de fiers-à-bras. Maman, au secours. Enfin, comme si Narcissa pouvait lui être d'une quelconque utilité en matière de sentiments… mais de toute façon, l'option « Papa, au secours » n'était absolument pas abordable. Sauf si on tenait à finir ses jours attaché à la queue d'un Scroutt à Pétard, bien sûr. Et ce n'était pas son cas.

Enfin, presque.

Il aurait bien fait une remarque particulièrement cinglante (ou particulièrement stupide, c'était selon) à propos de cette idiote arriviste de Pansy Parkinson (« merde, cette fille est plus collante que Weasley colle Potter » ou encore « putain, elle est aussi douée en allumage que Neville Londubat » bien que « bordel, cette chienne cherche vraiment à se faire ramoner » fût assez envisageable) ce qui aurait eu le double avantage de détendre l'atmosphère et de paraître un peu moins… crispé.

Je suis un Capitaine. C'est moi qui donne les ordres. Eux doivent obéir. Je n'ai pas peur, je regarde droit devant, je tiens fermement mon balai et tout ira bien. Je ne vais pas me laisser impressionner par sept Minotaure en robes vertes. Au secours. Au secours. Au secours. Heu, non… Je suis le Maître. Ils m'obéissent au doigt et à l'œil. Ils me craignent. Oh ! Maman… ce sont des crétins et je suis leur chef.

Il se résigna à enfiler le vêtement aux couleurs de Serpentard. Décidément, cette robe était plus lourde à porter que les années précédentes. Il était, c'était officiel, mort de trouille et dire que cet imbécile heureux de Potter affichait un sourire ahuri et béat… crétin. Draco n'avait pratiqué le Quidditch que pour une raison essentielle : il devait en faire. Après tout, il était le fils d'un homme important, il allait dans une école prestigieuse, il avait de bonnes notes et torturait scrupuleusement plus faible que lui. Conclusion : il se devait d'être un joueur exemplaire. Enfin, exemplaire – du moins, remarquable. Et ça marchait, en plus. Surtout avec un père riche. Mais… enfin bon, Draco savait reconnaître (parfois) le talent des autres, et il s'était depuis longtemps rendu compte que « cet-imbécile-de-Potter » en fait de talent, en était, précisément, bourré. Draco volait remarquablement bien, mais… il en était conscient, il lui manquait quelque chose. A ce stade-là, la motivation tenait du miracle, et la mise en pratique, de la superstition. Dante eût-il joué au Quidditch, le terrain en eût réservé sa place en Enfer.

Au secours.

Le stade était bondé. Les joueurs en formation passaient et repassaient au-dessus d'innombrables bannières multicolores (dont le vert n'était certes pas la couleur dominante) qui flottaient au vent avec des convulsions agressives. Le vacarme était assourdissant la tension, à son comble. Il était évident qu'après les évènements dramatiques de l'année dernière (voire tragiques, selon soixante-quinze pour cent des avis) les rivalités étaient plus que jamais présentes. Tout le monde, hormis les quatorze joueurs en formation, portait une écharpe bien chaude, et était au moins vêtu d'une chaude cape d'hiver. Beaucoup d'entre les élèves arboraient des bonnets ou des cache-nez, dont l'écrasante majorité se révélait d'un rouge abominable.

« Regardez-moi tous ces bœufs, qui se croient les plus malins ! » lança l'énorme Henrik Bole à la cantonade. En guise de bœuf, il aurait pu en être un lui-même : ses épaules étaient larges, son torse puissant, et ses bras auraient soulevé une charrue. Quant aux cuisses musculeuses qui enserraient le pauvre Nimbus 2001 gracieusement offert par Lucius Malefoy, elles trahissait une certaine vigueur – Draco se souvenait avoir entendu quelque part qu'un homme avec des cuisses solides…

« Ils ont trop peur du Maître pour ne pas se ranger dans le camp de Potter. » fit observer Terrence Higgs, le deuxième Poursuiveur de Serpentard. Lui avait des cheveux couleur foin, coupés en une courte brosse. Il était laconique, mais efficace. Surtout lorsqu'il s'agissait de frapper quelqu'un par derrière.

Draco serra les dents. Il détestait que l'on parle d'On-Savait-Qui ainsi, et devant lui. Cela lui donnait de fort mauvaises pensées.

« Alors on va leur montrer qui est le Maître, sur le terrain. »

Draco frissonna.

Roderick Tobias Warrington, dit parfois « le beau Todd » était un être froid et calculateur, dépourvu du moindre scrupule comme de la moindre sensibilité. Draco l'avait toujours soupçonné d'avoir du sang de vampire dans les veines il était d'une beauté insolente, avec ses longs cils noirs et ses belles mains d'artiste. Car Warrington était beau, de la beauté du diable. Lorsqu'il n'était pas à Poudlard, il se laissait pousser un petit bouc en pointe, et ses cheveux étaient toujours soigneusement tirés en arrière, ce qui lui conférait un aspect vaguement satanique. Il avait une certaine ressemblance avec Draco lui-même, qui mettait ce dernier mal à l'aise. Roderick avait des origines transylvaniennes, et le cœur assorti. Il aurait dépecé un bébé avec la même imperturbabilité qu'il arrachait sûrement les ailes aux mouches, étant enfant, ou qu'il séduisait les jolies filles (vierges, de préférence) puis les abandonnait. Il était brutal, mais suave, et son sourire en lame de couteau rappelait dangereusement à l'héritier de Lucius Malefoy son propre père.

Que Todd Warrington évoquât le Maître des Ténèbres n'était pas pour étonner Draco.

« J'ai vu leurs Poursuiveuses à l'œuvre. » La voix cassée de Phil Bletchley, Gardien de son état, rompit le silence mortel qui s'était abattu tandis que se toisaient les deux anges déchus du groupe. Bletchley avait toujours eu ce timbre un peu fêlé, qui se brisait parfois comme un éclat de glace, en partant dans les aigus. Dans les moments de crise, incroyablement insupportable.

Draco tourna brusquement la tête vers son Gardien, tandis que Warrington se redressait avec un quart de sourire. « Et alors ? Tu ne te crois pas capable d'arrêter leurs buts ? » interrogea-t-il sèchement.

Le grand Bletchley haussa ses épaules osseuses. « Tout comme tu n'attraperas jamais le Vif d'or. »

Draco blêmit, tandis que Warrington rentrait la tête dans les épaules, un demi sourire aux lèvres. Montague saisit le manche du balai de Bole, qui allait se jeter sur Bletchley, et Higgs crois les bras sur sa poitrine. L'énorme Batteur garda un poing en l'air le Gardien maladif n'en menait pas large. Draco leva la main pour arrêter son garde du corps occasionnel. Sans quitter le Gardien des yeux, il commença à descendre au centre du terrain. Il put voir distinctement Bletchley avaler sa salive et Warrington lui fit un clin d'œil. Montague se détacha du groupe et fit face au Capitaine.

« Comme à l'entraînement, Malefoy. On s'occupe des Poursuiveuses, on les colle, et Bole se charge des Batteurs. »

« Tu te souviens… »

« Je me souviens, Capitaine. On extermine les joueurs, et on gagne le gros lot. »

L'équipe aux couleurs d'or et d'écarlate se lança sur l'immense piste aérienne. Les Serpentard avaient déjà quitté leur tour d'envol – jailli du nid de vipères, songea Elanor – et décrivaient des arcs de cercle au-dessus du terrain, et de la foule en délire. Ils affichaient, malgré leurs précédentes défaites (successives, de surcroît) des airs conquérants de durs à cuire. Harry se fût volontiers rassuré de leur trouver Malefoy en lieu et place de Capitaine, mais l'allure belliqueuse de ses condisciples l'en dissuada plus que rapidement. Aucun des colosses en vert, qui ressemblaient à autant d'énormes rocs couverts de mousse, n'arborait en effet une mine exemplaire par sa jovialité. Ron fut pris d'une envie pressante de partir en courant – idée toute métaphorique, étant donné qu'il évoluait à quinze mètres au-dessus du sol sablonneux.

Maman, au secours.

Appel purement rhétorique de toute manière, Madame Weasley ayant suggéré à son fils cadet d'y réfléchir par deux fois avant de monter sur son balai, ce que le rejeton en question n'était d'ailleurs pas loin d'agréer. Il jeta un coup d'œil furtif à son Capitaine, et le trouva bien trop pâle à son goût. Est-ce qu'Harry avait seulement moitié aussi peur que lui ? Ron songea que si les Serpentard éprouvaient le tiers de la sienne, les Lions remporteraient sans problème…

Madame Bibine, le Professeur de Vol sur Balai aux yeux jaunes comme ceux d'un faucon, et aux cheveux gris ébouriffés, serra ses lèvres minces avant de lancer :

« Les Capitaines, au sol ! »

Harry se vit rejoindre par Malefoy, qui affichait un air supérieur quelque peu crispé. Les poings sur les hanches, l'arbitre du match considéra les deux chefs d'équipe l'un après l'autre, d'un œil acéré où ne brillait pas la plus petite lueur d'aménité.

« J'attends un peu plus de fair-play durant ce match ! » aboya-t-elle à leur intention. « Je ne tolèrerai pas la moindre incartade au règlement ! Vous êtes dans une école, nom d'un Cognard ! Ici, on joue au Quidditch, pas au Creaothceann ! Alors, pour l'amour du Souafle, dominez-vous ! » hurla-t-elle presque aux oreilles de Harry.

Madame Bibine mit un moment à retrouver son souffle. Une fois cette délicate opération accomplie, elle jeta des regards meurtriers aux deux capitaines et prononça la sentence de mort qui devait avoir lieu désormais.

« Les Capitaines… serrez-vous la main ! »

Harry fit la grimace. Il n'avait rencontré ce cas de figure qu'une fois dans sa vie, lorsqu'en première année l'avorton à la tête gélatinée lui avait proposé son amitié. Déjà convaincu de son manque de discernement, Harry avait refusé il ne s'en était jamais plaint. Et voilà que Bibine lui demandait de serrer la main à ce… cette chose gluante d'autosatisfaction, futur lèche-botte en chef de Sa Majesté des Serpents, le Vilain Numéro Un du siècle ! Oh ! non… Tout, mais pas ça

D'un autre côté, Malefoy avait l'air aussi dégoûté que lui. Sans compter que Madame Bibine affichait un air légèrement impatient – non… il aurait mis son balai à brûler qu'elle prenait plaisir à les voir se dévisager ainsi – et tripotait son sifflet avec quelque nuance d'agacement. Derrière elle, Harry pouvait apercevoir la tête rousse de Ron faire d'horribles grimaces destinées de moitié à son réconfort. A Dieu va…

Harry tendit une main un peu raide dans la direction de Malefoy, qui leva la sienne, assez lentement, mais avec fermeté. Il fut surpris de la trouver aussi dure, bien que fine elle était plutôt chaude, pas froide comme celle d'un serpent, comme le gant de son père qui, dans cette librairie, touchait sa cicatrice. Malefoy eut un rictus sarcastique.

« Alors, Potter… on fait le premier pas ? »

Ghmfrrgh… Je vais le trucider. C'est ça. Je lui passe son balai en travers du corps, et je le mets à rôtir. Je m'en vais te faire du méchoui de Malefoy.

« Ne t'en fais pas, je sais toujours qui sont les gens douteux. Mais pas toi, apparemment au fait, ton père t'a enfin vendu à son copain Voldie ? »

Malefoy retira brusquement sa main, livide comme un cadavre de noyé. Harry aurait juré apercevoir dans ses yeux une lueur de terreur pure, un soupçon de tristesse. Mais cela n'était sans doute que la colère de voir manquer de respect à son Maître.

Les narines pincées, le blond attrapa son balai et s'éleva dans les airs d'un coup de talon rageur. Décidément, la partie allait être serrée.

« Bienvenue à tous pour ce premier match de la saison, rencontre des Titans, choc entre les verts et les rouges, en tête du classement cette année ! » annonça la voix magiquement amplifiée de Lee Jordan, Gryffondor de septième année et commentateur assermenté des matchs de Quidditch à Poudlard.

« Côté Gryffondor, les Lions intègrent deux nouveaux éléments après le départ d'Angelina Johnson et de l'ancien Capitaine, Olivier Dubois ils sont remplacés par le Gardien Ron Weasley, encore un rouquin dans l'équipe, et une superbe Poursuiveuse axiale, Elanor Aréthuse, la plus jolie et la plus rouge des grenouilles que ayez jamais vue ! »

« Jordan, vous n'allez pas commencer ! »

« Mais non, Professeur McGonagall. Pour ce premier match de la saison, l'équipe de Gryffondor, avec Fred et George Weasley pour repousser les Cognards, Katie Bell, Alicia Spinnet et Elanor Aréthuse pour passer le Vif d'or, Ron Weasley pour arrêter les buts… et le nouveau Capitaine… Harry… Potter ! » vociférait Jordan, diligemment surveillé par une McGonagall suspicieuse.

Les vivats de la foule s'amplifièrent : trois Maisons sur quatre soutenaient les Gryffondor, qui partaient favoris. Pourtant, les cris et les quolibets des supporters vêtus de vert en arrivaient parfois à couvrir ceux des rouges.

En faisant le tour du terrain sous une bonne part d'acclamation et de nombreux sifflets, Harry put constater qu'Hermione avait mis la main à la baguette, et composé une immense banderole cramoisie, au centre de laquelle un lion chamarré bondissait sur un Vif aux petites ailes, pour disparaître hors de la toile et retomber en une pluie d'étincelles. « Wow, Hermione… » siffla Harry entre ses dents, avec admiration. Il fit un signe à Dean Thomas qui gesticulait tant et plus, pendant que Seamus lançait quantité de jurons irlandais, censés porter chance à son équipe – du moins, Harry le supposait. Neville était chargé d'envoyer des nuées de confettis rouges et jaunes un peu partout sur les spectateurs.

Un peu plus loin, Lee avait repris ses annonces. « A Serpentard cette année, la mode est au vert et ils ont raison d'être verts de peur, car… »

« Jordan… »

« Oui, Professeur. On peut donc présumer que leur tactique, bien qu'ils aient un nouveau Capitaine eux aussi, restera sensiblement la même : et on ne peut que conseiller aux Lions de garder leurs arrières, puisque leurs adversaires useront des mêmes techniques lâches et veules, et… »

« Jordan ! Soyez impartial dans vos jugements ! »

« Oui, Professeur. Je ne faisais que vanter les… hem, qualités de Serpentard. Donc, dans l'équipe verte cette année : Bole, Derrick, Warrington, Montague, Higgs, et après le départ du regretté Marcus Flint, Malefoy en guise de Capitaine ! »

« Hem… »

« Heu… Et Madame Bibine s'avance, elle va donner le coup d'envoi… »

Les trois-quarts des spectateurs avaient à peine applaudi à l'annonce de l'équipe de Serpentard, qui parcourait maintenant le ciel avec des airs féroces et les supporters aux écharpes vertes eux-mêmes se turent à l'annonce du coup d'envoi. Tous étaient en attente du coup de sifflet fatidique…

Draco serra les mains sur le manche de son balai à s'en faire blanchir les jointures. Warrington étouffa un bâillement de nonchalance.

« Et elle siffle ! Le Souafle est lancé… ET C'EST PARTIII ! » beugla Lee Jordan, tandis que la foule, après avoir retenu son souffle, poussait un long hurlement d'enthousiasme.

La mêlée pour le Souafle fut terrible sur le coup. Montague s'était littéralement rué sur Alicia, qui manqua tomber de son balai et ne réussit à se redresser qu'in extremis, avant de se saisir du Souafle et de s'enfuir à toute vitesse. Les Cognards ayant choisi dans l'instant les frères Weasley, ils ne purent arrêter Warrington qui se plaça sur la trajectoire d'Alicia, et reçut gracieusement le Souafle. Le face-à-face entre Montague et Ron Weasley tourna à l'avantage de ce dernier, lorsqu'il captura la balle rouge avec beaucoup de sang-froid, sous couvert de hurlements joyeux, avant de la relancer en direction de Katie Bell, qui visa adroitement Elanor. Bole et Derrick se jetèrent immédiatement sur elles, mais un coup d'accélération de la part de la jeune Poursuiveuse, accompagné d'une agilité féline, les fit s'écraser l'un contre l'autre en un enchevêtrement lamentable de bras, de jambes et de battes.

« Imbéciles ! Je vous avais dit de vous intéresser aux Cognards, pas aux filles ! » apostropha Draco qui suivait les mouvements depuis les cercles qu'il décrivait au-dessus du jeu.

« Oooh ! Très adroite feinte, une Tremblante de Wollongong, de la part d'Aréthuse ! » admira Lee du haut de son promontoire. « Aréthuse qui file tout droit vers les buts de Serpentard… elle va frapper… non, feinte de frappe et Passe arrière très précise et ingénieuse pour Spinnet qui ajuste Bletchley… et marque ! DIX A ZERO POUR GRYFFONDOR ! »

Une ovation gigantesque jaillit du stade tout entier. Dans les airs, Alicia se jetait au cou d'Elanor tandis que les Batteurs manquaient lâcher leur batte en applaudissant à tout rompre.

« Quel magnifique but ! » approuvait Lee d'une voix retentissante et jubilatoire. « Gryffondor ouvre le score et compte bien le clôturer ! Il na manquerait plus qu'un bon gros Cognard dans le nez de Malefoy pour que la victoire soit parfaite… »

« JORDAN ! »

« Je dis les choses telles qu'elles sont, Professeur. Serpentard tente de repartir à l'attaque, Higgs a le Souafle, mais Bell revient, et… oh ! magnifique interception dans les bras de Higgs par la Poursuiveuse de Gryffondor qui remonte tout le flanc droit ! Passe pour Aréthuse qui se défait du marquage de Montague et Warrington… et qui marque ! Premier but d'Aréthuse, et vingt à zéros en faveur de Gryffondor ! »

Harry n'aurait raté ce spectacle pour rien au monde. Il suivait l'évolution de son équipe, en spectateur, depuis un bon moment il ne se donnait pas la peine d'intervenir, soupçonnant que l'osmose était si parfaite entre les trois Poursuiveuses qu'une aide extérieure eût été superflue. Il pouvait admirer la grâce et l'aisance du jeu d'Elanor, deviner ses jolies jambes enserrant le manche à balai, et surtout, bien sûr, sa dextérité à filer entre les buts adverses pour marquer avec habileté et précision. Par ailleurs, le spectacle de la désillusion de Malefoy était un luxe qu'il n'aurait pour rien au monde abandonné…

Et puis, il le vit.

Le petit éclair si délicat, au coin de son œil le frou-frou des ailes minuscules, qu'il pouvait deviner pour l'avoir guetté si longtemps le chatoiement de la toute, toute petite balle d'or, qui voletait comme pour le narguer, et l'attendre comme une jolie femme qui se donne et se reprend. Et il put sentir monter en lui ce désir si particulier, qui le faisait prendre les risques pour cette jouissance : serrer la bille d'or, la tenir entravée, et gagner, gagner, gagner son match.

Draco vit l'Eclair de Feu braquer rapidement il comprit immédiatement ce qui était en train d'arriver : il allait encore perdre… Il se précipita à la suite de l'Attrapeur rouge, de toute la puissance de son Nimbus. Il était prêt à prendre tous les risques, cette fois-ci il fallait qu'il gagne ! Il tendit la main, dans un vain espoir de saisir le Vif d'or mais Potter le devançait, et il tendit la main lui aussi, la main droite, la gauche crispée sur son balai. Draco pouvait voir le bonheur envahir son visage, tandis qu'il se redressait, qu'il lâchait presque le manche, son corps tout entier offert au jeu avec une certaine stupeur, il réalisa que le garçon brun devant lui s'apprêtait à jouir, littéralement, de sa victoire. Un amant et son amour : Potter et le Vif d'or. Draco sentit les larmes d'impuissance, de frustration et de colère lui brûler les yeux. il observa, avec cette lenteur douloureuse des rêves, la main gantée se tendre vers la boule étincelante…

SBLAF !

L'Attrapeur des Gryffondor heurta de plein fouet une tornade verte lancée à pleine vitesse : Warrington, dans un effort désespéré pour empêcher l'adversaire de marquer, avait coupé la course de l'Attrapeur en rouge et brisé brutalement son élan : les deux joueurs s'encastrèrent l'un dans l'autre, puis furent percutés de plein fouet par le Capitaine des Serpentard, qui n'avait rien vu encore un enchevêtrement rouge et vert de bras et de jambes chuta durement sur le terrain sablonneux.

Lee Jordan agonissait on ne savait trop qui d'injures colorées ; McGonagall, trop occupée à s'époumoner, ne le reprenait même pas les spectateurs au grand complet hurlaient à s'en arracher la gorge et Madame Bibine ne put que s'essouffler dans son sifflet.

« PENALTY POUR GRYFFONDOR !!! » hurla-t-elle par-dessus le vacarme. « Warrington, qu'est-ce qui vous a pris ? Vous êtes Poursuiveur, pas Attrapeur que je sache ! »

« Désolé, Madame. » fit le Serpentard d'un air sombre. « Il arrivait trop vite, je ne l'avais pas vu. »

Les grommellement de l'arbitre n'y changèrent rien Warrington conserva son air buté et les Serpentard purent pousser un énorme soupir. Draco n'émit pas le moindre il avait vu Harry s'effondrer de sa désillusion, et saisit le regard méprisant de Todd mais il en fut presque heureux, car le Poursuiveur leur avait évité à tous – lui avait évité – une cuisante (et très embarrassante) défaite. Il pouvait voir Pansy Parkinson glousser depuis les tribunes. Peut-être qu'en cas de défaite elle l'aurait laissé tranquille… Mieux valait ne pas penser aux aspects positifs de l'échec : un Malefoy…

L'initiative de Warrington eut ses mauvais côtés : le désordre offrit aux Gryffondor un score intéressant de trente à zéro, lorsque Bletchley se troua complètement sous le penalty de Spinnet, ce qui sembla réjouir leurs supporters, qui sous le coup se rassirent et décidèrent de regarder sagement la suite. Draco ne put rien faire d'autre que d'invectiver son Gardien, incapable de saisir un Souafle sans le rendre à l'adversaire. Bletchley en prit les couleurs de Gryffondor, surtout le rouge – pivoine – ce qui occasionna à Draco plus d'étonnement intérieur (comment pouvait-on être timide et bégayant à Serpentard ?) qu'un courroux intense – « tu laisses des merdeuses t'aplatir, alors que tu devrais les renvoyer pleurer chez leur mère ! » – ce fut sans doute pour cette raison qu'il ne vit pas Katie Bell mettre la balle rouge dans l'anneau droit avec une certaine désinvolture (en vérité, elle le regardait en sifflotant) et marquer quarante à zéro.

« TEMPS MORT ! » brailla Draco en direction de Madame Bibine, qui siffla la pause demandée. Le Capitaine se tourna vers son équipe de bras cassés. Bletchley paraissait au bord des larmes, Higgs paraissait sur le point de tomber en syncope, Derrick arborait une ecchymose titanesque sur la joue gauche, là où Fred Weasley l'avait frappé (« Désolé Madame, je l'avais pris pour un Cognard ») Montague avait un œil au beurre noir pour avoir bousculé Alicia, et avoir rencontré un mystérieux Cognard – qui, il le soupçonnait, n'était pas sans rapport avec la mine vengeresse de George « l'autre-rouquin-qui-tient-la-batte » Weasley. Warrington, lui, portait une profonde coupure sur la joue gauche, et quelques contusions qui lui donnaient l'allure d'un Cid fort peu catholique. Draco souffrait de deux ou trois estafilades, mais son moral était plus gravement atteint.

« Ecoutez-moi bien » gronda-t-il. « Vous deux, vous vous occupez des Batteurs – des Batteurs, c'est clair ? Les deux rouquins, ces gouttes identiques de stupidité, ont trop tendance à viser juste je veux que vous me les expédiiez à l'autre bout du terrain, compris ? » Bole et Derrick hochèrent la tête, le premier en caressant sa batte, le second en effleurant sa joue bleuie. « Vous trois, » cracha-il à l'adresse des Poursuiveurs, « vous vous jetez sur les trois salopes. Il ne faut pas qu'elles approchent de la surface de but ! C'est pourtant clair : ce sont des filles, utilisez des arguments convaincants pour des putains de leur genre… Toi, Bletchley, tu te conduis comme un Gardien : c'est assez simple, quand même on te lance le Souafle sur la droite, tu plonges vers la droite – tu saisis ?. »

Et tandis que le cri strident du sifflet annonçait la reprise, l'équipe aux couleurs vertes, grises et à présent bleues, regagna les airs avec force grommellements.

La suite du match mérita les annales du Quidditch, dans la section déloyauté, fautes et autres accidents malheureux. Bole confondit la tête de Bell avec un Cognard, que Fred Weasley lui renvoya dans la tête pour se venger Madame Bibine siffla (ou brama) un penalty pour chacun, et si Alicia marqua le sien sans mal, Ron dut faire un bond extraordinaire pour arrêter la balle au bond, le Souafle à effet qu'avait propulsé avec rage Montague.

« Et bien ! » appréciait le commentateur derrière son porte-voix. « Le moins qu'on puisse dire, c'est que Ron Weasley a mérité sa place de Gardien ! Quel talent, chez ces joueurs de Gryffondor… Oui, quel Gardien ! ce n'est vraiment pas le cas de Bletchley, qui en plus d'avoir en classe un poil dans la main, y aurait aussi des trous… »

« Jordan ! » avertit le Professeur McGonagall, qui avec les évènements avait retrouvé mordant et présence d'esprit. « Si vous continuez, je serai dans l'obligation de vous retirer cet instrument… »

« Non, non, non, Professeur ! » entendit-on sur un ton précipité. A l'évidence, Lee ne tenait guère à se voir arracher son seul moyen de dire officiellement tout le mal qu'il pensait des Serpentard. « Le… le Souafle est dans les mains d'Aréthuse, qui tente de se défaire du marquage des cinq joueurs de champ, qui ne la lâchent pas… »

Harry regardait ce qui se passait avec beaucoup d'appréhension. Bien entendu, le score actuel avait de quoi le rassurer, mais la situation d'Elanor, surtout vue d'en haut, l'inquiétait outre mesure. Si les Batteurs étaient davantage occupés à repousser les Cognards de Fred et George, les trois sinistres Poursuiveurs, aux mines patibulaires, étaient tous concentrés sur le tiercé gagnant de Gryffondor, en particulier sur la jolie Elanor, qui fonçait en tête, Souafle en main. Jette ce Souafle, Ellie. Passe-le à Katie. Par pitié… Il tremblait malgré lui à l'idée qu'il pût lui arriver quelque chose. Allait-il l'aider ? Mais si Malefoy, qui lui suivait comme son ombre, en profitait pour attraper le Vif d'or… Sa réflexion fut prise de court lorsqu'Elanor, ayant trouvé une brèche, transmit le Souafle à Katie qui marqua, soixante à zéro. Harry s'autorisa un léger soupir.

Les Serpentard ne lâchaient plus Elanor. Elle prenait autant de virages et braquait autant que possible, mais les trois cerbères la poursuivaient toujours, de plus en plus près et ils semblaient même y prendre un certain plaisir. Et si à raison d'une contre un, elle était imbattable, le trois contre une paraissait lui causer des difficultés grandissantes. Elle éprouvait de plus en plus de mal à échapper aux trois acolytes, qui se rapprochaient, prêts à la coincer. Elle parvint néanmoins à marquer deux nouveaux buts, ainsi qu'à en offrir deux autres, un à Katie et l'autre à Alicia. Le Vif d'or était à nouveau apparu au regard des Attrapeurs, mais l'un avait attrapé le manche de l'autre, qui avait de nouveau laissé passer cette chance de remporter la victoire. Durant ce court instant, des yeux gris et des yeux verts s'étaient affrontés, et Harry avait lu dans ceux de l'adversaire comme une sorte de supplication, de panique comme si l'issue du match allait préluder à l'existence du blond Capitaine. Il avait vu ses yeux lorsque le garçon au nez pointu avait agrippé le manche de l'Eclair de Feu, et ce qu'il y avait vu le surprit profondément : un instant, il y avait eu comme une lueur d'enthousiasme… mais son hésitation le perdit, autant que la tricherie du Serpentard et le Vif fut à nouveau perdu. Puis le penalty offrit définitivement l'avance à Gryffondor…

« Non, vous ne rêvez pas mes amis ! Du jamais-vu… un score de CENT-DIX POINTS A ZERO en faveur de Gryffondor ! Et à l'instant où je vous parle, la plus grosse défaite de Serpentard, qu'est-ce que je raconte moi ? La plus grosse défaite de tous les temps pour Serpentard, se profile à l'horizon ! Et il ne manque plus que le nouveau et talentueux Capitaine des Gryffondor attrape le Vif d'or, car on connaît tous les capacités de Potter, il suffirait, il suffirait oui, qu'il attrape le Vif d'or pour que nous… oups ! mais non Professeur, je voulais dire : que nous assistions au match le plus extraordinaire, le plus surprenant, le plus… génial de toute l'histoire de l'école ! » Lee Jordan trépignait sur son estrade, tandis que la clameur montait comme une vague déferlant sur le terrain les spectateurs étaient en majorité debout, les verts pour s'étrangler  de rage (Hermione crut bien voir Blaise Zabini vomir) et les autres pour hurler leur joie : Seamus serrait Dean dans ses bras, tandis que Parvati manquait s'évanouir et lorsque Lavande se jeta au coup du premier venu pour l'embrasser, qui se trouva être Neville, le concerné s'évanouit pour de bon. Hermione pleurait presque de joie, illuminée d'éclairs causés par Colin Crivey, qui flashait à qui mieux-mieux en sautillant comme un haricot mexicain. Quelqu'un donna un coup de baguette, et le lion sur la bannière se cabra en poussant un rugissement triomphal.

Draco Malefoy contemplait cette agitation d'un œil morne. Dans une autre vie, il aurait considéré ce désordre comme inconvenant et parfaitement ridicule, mais en ce jour il ne pouvait s'empêcher de se sentir particulièrement malheureux. Non seulement parce que l'échec le plus cuisant de sa vie approchait à grands pas, et qu'il lui fallait s'attendre à être humilié, puis torturé, au sens figuré et au sens propre, mais aussi parce qu'il n'était pas parvenu à se prouver, lui-même, quoi que ce fût. Et il y avait autre chose… Cassie n'était pas là. Il avait pourtant fouillé du regard la cohue des spectateurs, dans les gradins, près des bannières, partout où il pouvait y avoir un endroit où voir ce qui se passait il avait cherché des yeux dans les coins, là où seule une fille mystérieuse et tranquille pouvait avoir envie de se dissimuler mais en son for intérieur, il savait qu'elle n'était, tout simplement, pas venue. Cela l'effrayait presque, parce qu'il avait le sentiment étrange de se nourrir de sa présence, parfois et cette habitude lui était devenue familière, comme rassurante. Depuis ce soir pluvieux où ils avaient fait le pacte, silencieux et tacite, ils étaient souvent ensemble, muets, à chercher dans la bibliothèque quelque ouvrage poussiéreux, parlant de gémellité et de magie noire. Cela l'avait d'abord étonné, qu'elle puisse chercher des choses tout en prétendant ne rien savoir et puis il avait compris, un peu plus difficilement admis, qu'elle ne savait rien d'elle-même, mais qu'elle sentait les choses, sur les gens, ceux qui existaient, ceux qui étaient morts, et ceux, comme il l'avait appris avec quelque malaise, qui n'avaient pas encore existé. Elle pressentait les choses, et elle se dirigeait toujours au bon endroit, pour trouver un indice, même tout petit, qui la conduisait vers d'autres livres compliqués et d'autres théories abracadabrantes. Et bizarrement, il ne se sentait en sécurité qu'avec cette fille étrange, que certains pensaient folle, et qui n'était même pas sûre d'exister. Il avait juste besoin d'elle. Et elle n'était pas venue.

Montague et Warrington continuaient seuls la poursuite, Higgs ayant décroché pour gêner les deux autres Poursuiveuses. Ils y prenaient tous deux un malin plaisir, Montague par concupiscence et Todd parce qu'il aimait les sentir paniquer. En l'occurrence, Elanor ne paniquait pas, pas encore mais elle se montrait prodigieusement agacée des délicates attentions de son escorte. A chaque fois qu'elle tentait d'échapper à l'un de ses suiveurs, l'autre se collait contre elle et si Montague effleurait ses cuisses, la main soignée de Warrington remontait immanquablement le long du balai. Elle ne pouvait échapper à leurs assauts, coincées entre les deux comme dans un étau, qui se resserrait toujours juste assez pour leur permettre d'atteindre son pantalon en tirant la robe rouge. Et Elanor commença à paniquer.

« Et alors, ma jolie ? » grinça Montague avec l'intention évidente de profiter de la promiscuité. « Où tu vas comme ça ? Tu ne vas pas déjà partir… allons, gentil petit chaperon rouge, laisse-nous te mettre un but… »

Elanor prit la couleur de sa robe, suffoquant sous le coup de la colère, et fit un bond pour éviter Montague qui la précipita dans les bras de Warrington. Elle eut peur, tout d'un coup, et commença à se débattre il la saisit par les cheveux et de sa main libre, commença à fouiller ses vêtements sous la robe rouge. Elanor lâchait convulsivement son balai, pour tenter de s'échapper, mais n'y parvenait pas et si certains des spectateurs commençaient à s'alarmer, Madame Bibine n'avait rien vu : Bole et Derrick, selon leurs instructions, s'attaquaient aux deux autres Poursuiveuses, tandis que Higgs provoquait les jumeaux. Une bouffée de terreur envahit Elanor lorsqu'elle réalisa, en premier lieu que la main du Serpentard avait trouvé le chemin de son soutien-gorge, ensuite que personne ne l'avait remarqué. Son cœur battait à lui rompre les côtes, et lorsque la main du Poursuiveur fouilla sa peau fragile, glissant jusqu'à son bas-ventre dans une odieuse violation de son intimité, la pensée angoissante qu'elle allait s'évanouir lui traversa l'esprit.

Draco volait rapidement autour du terrain, avec un soupçon d'agacement. Où était… ah ! il venait de repérer ses Batteurs. Parfait ! Ils faisaient leur travail. Pour une fois. Potter essayait de les attirer à lui, mais les jumeaux étaient déjà occupés avec Higgs. Quant à Montague et Warrington, ils étaient…

Oh mon Dieu.

Draco aperçut la crainte sur le visage d'Elanor, et cela ne le mit que plus mal à l'aide le jour précédent, il aurait donné beaucoup pour lui voir une telle expression dans les yeux mais là… Quelque chose, il y avait quelque chose d'horrible dans cette scène, qui lui rappelait…

Non ! Oh, non… Warrington, je t'en prie… arrête ça. Laisse-la ! Lâche-la… bon sang, Aréthuse… frappe-le ! Mais remue-toi ! Essaie…

Il dévia de sa trajectoire et s'apprêta à disperser ses Poursuiveurs, lorsque…

« AAAAAH ! »

Le cri inhumain de Warrington retentit dans ses oreilles, à la seconde même où la Poursuiveuse échevelée atterrit, plutôt brutalement, dans ses bras. Un peu hébété, il regarda sans comprendre le corps de Warrington tournoyer, plonger plus vite que son balai vers le sol éloigné. La conscience lui revint lorsqu'il s'aperçut qu'une masse de boucles brunes obscurcissait sa vue (les cheveux d'Elanor s'étaient détachés pendant la bataille) et qu'il était juché sur un balai, en équilibre instable, un poids conséquent contre le côté gauche. Il stabilisa tant bien que mal leurs deux montures, et releva le menton tremblant de la jeune fille, rencontrant son regard.

« Qu'est-ce qui s'est passé ? »

Elanor ne songea même pas à le repousser, pas plus qu'à lui faire remarquer que l'affaire était en grande partie de son fait. Elle eut un reniflement misérable.

« J'avais peur… j'ai lâché mon balai, et j'ai attrapé ses mains… »

Elle mit la main devant la bouche, comme si ce simple souvenir lui donnait la nausée.

« Et… ? » l'encouragea Draco à continuer.

« Il… il a pris feu. »

Le blond Capitaine, son adversaire théorique, se contenta de la serrer plus fort contre lui, dans le creux de son corps à la solidité rassurante et il ne pouvait s'empêcher de songer à ce jour effrayant où les mains de la Princesse des Glaces avaient brûlé le dessus du fauteuil de cuir noir.

« Donne-moi tes mains. » fit-il dans un murmure. Elanor releva un visage barbouillé de larmes, et ses yeux se voilèrent d'incompréhension.

« Donne-moi tes mains, » répéta-t-il. Elle lui tendit deux longues mains fines et blanches, mais point diaphanes comme celle de Cassie les siennes étaient plus chaudes et souples au toucher, plus dorées aussi. Draco les considéra un moment d'un œil pensif, sous le regard inquisiteur d'Elanor, qui recouvrait peu à peu ses esprits. Elle trouva à Malefoy une allure étrange, comme s'il venait de se réveiller d'un cauchemar et qu'il ne parvenait pas encore à séparer le faux du vrai. Il la repoussa doucement, ses mains emprisonnant toujours les siennes, et dit avec un sourire un peu triste :

« C'est pour ça qu'elle n'est pas venue. »

« Quoi ? » s'entendit répondre Elanor, incrédule. Mais Draco ne fit qu'effleurer sa joue, et murmura quelque chose qui ressemblait à « Gagné ce match. » Puis il fit demi-tour et la jeune Poursuiveuse se retrouva seule, une main sur la joue et un poids sur le cœur. Puis Katie qui passait près d'elle la héla, lui désignant Higgs qui portait la balle et le match reprit.

Draco errait sans but précis dans les airs, pour autant que l'on pût errer perché sur une bout de bois emmanchant un fagot mais enfin, l'esprit y était. Il prenait des courbes larges, peu soucieux de faire étalage de son talent le Nimbus 2001 qui le rendait si fier n'était, après tout, qu'un balai, d'ailleurs sans comparaison possible avec l'Eclair de Feu. Et ce qu'il avait dit à Aréthuse n'était pas loin de ce qu'il pensait.

Pour une fois que je dis ce que je pense…

Le vent sifflait aux oreilles d'Elanor, mais elle s'en moquait. Elle pouvait entendre la clameur sourde de la foule, mêlée au froissement de ses vêtements, au bourdonnement continu dans sa tête. Elle n'entendit bientôt plus rien, concentrée sur son seul but : la vengeance.

Elle gagnait en force et en vitesse, et ses sens s'aiguisèrent rapidement, tandis que le balai suivait les mouvements de son corps, et la faisaient se sentir légère, légère, comme une plume rouge et or. Elle fonçait vers les buts de Serpentard, elle fonçait vers Katie, et Alicia tendit le doigt vers elle.

Elle revenait.

Quatorze joueurs volaient à tire d'ailes au-dessus d'un stade hurlant. Sept bouquets de flammes se mesuraient à sept bourrasques marines et la foule debout dans les gradins criait à en perdre haleine.

Ils ne comptèrent bientôt plus le nombre de fois où Madame Bibine, éreintée, s'époumona dans son sifflet et les quatre Batteurs étaient fourbus, les bras engourdis à force de rendre coup pour coup. Le Gardien aux cheveux flamboyant était épuisé, lui aussi, mais heureux, et surtout rassuré : Harry, qui venait de passer près de lui, lui avait confié qu'Hermione, gesticulant quelque part dans les tribunes de Gryffondor, semblait très fière de ses succès et prête à lui pardonner l'absence crasse de prudence dont il avait fait preuve. Et ceci représentait aux yeux de Ron Weasley l'assurance que, si du moins il parvenait à sortir vivant de ce match, il pourrait négocier quelque plaisante récompense au vu de ses droits seigneuriaux – il avait entendu quelque chose au sujet d'un repos pour le guerrier… De plus, cela lui offrait une certain garantie quant à son avenir : à présent, il s'autorisait à espérer une petite chance de survie, après le match. Il était un héros. Il n'y avait d'écrit nulle part dans les contes de fées que les dulcinées étripaient leur héros, si ?

« NON ! Vous ne rêvez pas, vous les chanceux qui assistez à ce match merveilleux ! Et oui, vous avez bien entendu : Gryffondor mène, par le bout du balai, avec cent-trente points… Cent-trente à zéro pour les Serpentard, ma foi très déconfits… On devrait espérer l'apoplexie d'ici quelques minutes, il n'y en a plus pour très longtemps ! Hein ? Mais-non-Professeur. Et heu… LES SALES PETITS… Tricheurs ! Sales tricheurs ! Lâchez-moi Professeur ! Je ne fais que mon devoir ! OOOH ! Et ça recommence… arbitre, faites quelque chose ! Potter aurait pu gagner, et voilà que cette larve gluante, ce crétin baveux de Derrick qui lui lance un Cognard en pleine… C'EST PAS LA PEINE, EMPAFFÉ ! ON VA GAGNER, DE TOUTE… »

Personne n'entendit la suite : Lee se battait avec le Professeur McGonagall pour conserver le porte-voix magique qu'elle s'était affairée à lui retirer des mains.

« Est-ce que ça va ? » lança Elanor à Harry qui la croisait.

« Je crois que oui ! » répondit-il en criant pour couvrir le vacarme, et le vent qui leur sifflait aux oreilles.

« C'était quand même envoyé fort ! » cria à nouveau Elanor.

« Y a rien, je te dis ! »

« Tes lunettes sont de travers ! » cria Elanor en retour.

Ils survolaient à toute vitesse le champ de bataille, théâtre des affrontements. Harry se maudissait intérieurement de n'avoir pas pu être là pour porter secours à sa Poursuiveuse, bien qu'il fût soulagé cependant de n'avoir pas eu à le faire : Hermione, depuis trois jours qu'elle sortait avec Ron, était devenue bien enhardie et Harry la soupçonnait fortement de vouloir à tout prix le caser. Seigneur ! Voilà qu'Hermione jouait les entremetteuses… mais que resterait-il donc à Lavande et Parvati ?

« Je crois que tu es un bon Capitaine ! » hurla Elanor, qui s'était éloignée un peu, de manière à surveiller les mouvements des Poursuiveurs en vert.

« Tu te débrouilles aussi, Lee a beaucoup apprécié ta jolie feinte de Porskoff ! » Il fit un clin d'œil, et put voir Elanor esquisser un sourire. Vraisemblablement, la jolie Gryffondor ne se privait pas de faire admirer ses talents.

« Et toi, » cria-t-elle à son encontre, « quand est-ce que tu m'impressionne avec ta pente de Gros-Ski ? » fit-elle avec une lueur perfide dans le regard. Harry fit une pause, le temps de vouer Hermione aux gémonies, et se rapprocha pour bousculer Elanor, vacillant avec elle sous le choc.

« Il faudrait d'abord qu'on m'en laisse le temps ! Tu devrais aller voir Bole et Derrick tu n'aurais qu'à ouvrir la bouche pour qu'ils n'aient plus qu'une envie, celle de te tuer. »

« Oh, » fit Elanor d'un air faussement outré, « il semblerait que tu aies tout combiné ! Bien, je suppose que je n'ai plus qu'à me rendre, et avouer que le grand Harry Potter a encore gagné le match, et que les buts marqués par moi ne font que l'éclabousser de gloire… » déclama-t-elle sur un ton mélodramatique.

« C'est ça ! » persifla Harry, « Et tu dois ta promotion à mes faveurs, etcetera, etcetera… »

« Ne me mets pas au défi. » répliqua Elanor d'un air suave, et elle disparut dans un tourbillon de tissu rouge, après avoir effleuré sa cuisse.

Harry manqua lâcher son balai.

Jolie feinte de Porskoff, Aréthuse… observa le blond Capitaine des Serpentard. Draco décrivait des cercles au-dessus du terrain, avec un air parfaitement détaché. Cela faisait bien vingt minutes qu'il n'avait pas joué, mais qui s'en souciait ? Il avait une place merveilleuse, la meilleure en vérité, pour contempler le spectacle passionnant de la déchéance de son équipe. Et curieusement, perdre n'était plus si dur. Il était parvenu, tant bien que mal, au bout d'un long moment, à faire abstraction d'une frustration certaine pour se concentrer sur le jeu remarquable de l'équipe adverse, et s'en trouvait très bien. Quitte à perdre, autant y prendre plaisir ! persifla-t-il en lui-même avec quelque amertume. Quelques pieds à peine en-dessous de lui, le vaillant Capitaine tout de rouge vêtu (comprendre : le Chevalier de Gryffondor) faisait des simagrées autour de la piste, surveillant ses joueurs comme un pasteur ses ouailles. Saint Potter, priez pour nous… A la réflexion, ce n'était pas une si mauvais idée : Draco était bel et bien mort. A bas le favoritisme ! Il se serait bien contenté d'être un élève lambda, juste pour un moment… surtout qu'en plus, Rogue allait lui tirer la gueule. Bah ! pas plus que Lönewenster. Bien qu'à un certain moment…

Draco leva les yeux au ciel, clair et dégagé. Une belle journée pour perdre. Il soupira, avec ce qu'il fallait de résignation pour admirer une passe de Spinnet, qui avait adroitement évité une dure collision avec Higgs qui lui fonçait dessus l'air ahuri de Terrence, à l'envers sur son balai, offrait par ailleurs un spectacle intéressant.

Draco prit de l'allure, et recommença à suivre le pourtour du cercle en sable ocre. Il avait un sourire aux lèvres, en notant les figures et les passes plus ou moins heureuses organisées par les deux camps. Il passa sous le nez des deux Weasley, qui ouvrirent la bouche et baissèrent leur batte avec stupéfaction, puis le suivirent du regard pendant quelques minutes encore, jusqu'à ce qu'il leur faille se tordre le cou, et manquer être fauchés par un Cognard de Derrick. Bole jeta un coup d'œil suspicieux, dans la mesure tout au moins selon laquelle il était capable de tenir un raisonnement argumenté, à son Capitaine qui le survolait, en observant d'un air réjoui Katie Bell marquer un nouveau but. L'énorme Batteur fronça un instant les sourcils, mais devant l'effort de réflexion requis, ne put que déclarer forfait. Bien lui en prit, car le Cognard de Fred le désarçonna de moitié.

Draco remarqua évidemment la méfiance accrue des Gryffondor, mais il n'en prit pas vraiment compte. Il se sentait revivre, tout au-dessus de ce jeu magnifique, complètement insouciant de ce qui pouvait arriver à son équipe. Merveilleusement irresponsable. Pour une fois, il pouvait réellement profiter du spectacle.

Lors de sa première année, ici à Poudlard, Draco Malefoy avait été horriblement déçu de n'avoir pu introduire son balai en fraude au château puis cela s'était mué en rage lorsque Potter, dont il croyait avoir organisé le renvoi, avait été scandaleusement promu au rang d'Attrapeur : lui, un Malefoy, devait passer après un misérable moins que rien, dont la mère avait été une Sang-de-bourbe. A dire vrai, que le misérable en question fût Harry Potter n'avait sur le moment pas beaucoup dérangé Draco en y réfléchissant bien, quelques années après, l'idée devenait amusante : à ce seul moment, Draco ne s'était pas montré jaloux.

Pour ses douze ans, Lucius lui avait offert la charge d'Attrapeur dans son équipe de Quidditch. Draco avait toujours adoré voler, la sensation du sol si loin sous lui et cette impression de perdre complètement pied, sans pour autant en avoir peur C'était donc avec la plus grande joie qu'il avait reçu le cadeau de son père. Pourtant, il avait dû déchanter peu après, en prenant la pleine mesure de la situation : en premier lieu, il avait accédé à cette place sans mérite, sans faire ses preuves ensuite, les sept Nimbus 2001 ne rendait la tâche que plus ardue, puisqu'ils étalaient aux yeux des Maisons cette vérité gênante que l'habit devait faire le mage. Enfin, Potter était toujours le meilleur. A l'aide.

Ainsi Draco, qui auparavant avait aimé le Quidditch comme un simple jeu, comme un simple sport (mais pouvait-on penser qu'un Malefoy pût apprécier quelque chose pour sa valeur intrinsèque ?) s'était retrouvé bien trop occupé à le détourner à des fins politiques qu'il en avait perdu, et le but, et le goût du jeu. Et en cette après-midi ensoleillée, exceptionnellement clémente pour une fin d'octobre, Draco retrouvait cette sensation oubliée qu'offrait le plaisir pur, le plus simple quelque chose qu'il n'avait goûté depuis fort longtemps – depuis que son père avait décidé de faire de lui un adulte. Un Malefoy. Draco se souvenait très bien de la colère paternelle lorsqu'il avait trouvé le petit garçon, aux grands yeux d'un gris encore candide, en train de patauger dans du sable près d'une clairière, édifiant un petit barrage en branches à placer sur un cours d'eau et l'adolescent ne se rappelait plus avoir jamais souri de la même manière après cela, après que son père l'eut ramené au Manoir et dûment corrigé, et que l'enfant eut pleuré longtemps son barrage détruit, les branchettes brisées et Draco revoyait souvent les yeux de sa mère, voilés comme jamais, qui lui caressait la joue pour qu'il s'apaise et s'endorme, et son sourire à elle, las et triste, lorsqu'il évoquait pour la dernière fois l'incident de la rivière. Il n'en avait plus jamais reparlé, ni repensé, jusqu'à cet instant honteux où il s'était écrasé dans le sable, lors d'un match, et où son père là-haut sur les gradins lui avait jeté un regard méprisant. Puis il avait eu quinze ans, un jour funeste, et Lucius lui avait annoncé solennellement qu'il devait suivre ses traces et puisqu'Il ne voulait pas de richesses, Lucius lui avait donné son fils. Draco ne portait pas encore cette affreuse Marque, mais il savait bien qu'il ne voulait pas la porter et il s'était promis de devenir un homme, pas un esclave, dût-il pour cela se voir déshérité. Car c'était cela que désirait Lucius : un héritier, pas de fils. Tout ce qu'il avait voulu, était un animal de compagnie à offrir à son Maître, un autre serpent une vipère qu'il aurait élevée en son sein, docile quoiqu'un peu sauvage, tendre et appétissante comme l'innocence. Lucius l'avait vendu et si lui n'avait pas les moyens de financer son rachat, il allait forcer la cage, avant que les barreaux ne se referment. C'était aussi pour cela qu'il se dépêchait d'éprouver quelque bonheur, avant d'en être privé à tout jamais : il ne se laisserait pas enfermer avant d'avoir connu un semblant de pureté. Avant de devenir un Malefoy, il voulait être Draco.

« … Et Potter part se placer derrière Aréthuse, il tente de distraire les Poursuiveurs de Serpentard – oh ! très joli – et Aréthuse a le Souafle sous le bras, elle va pour marquer un but… Hé ! encore une fois, ces grosses limaces gluantes ne la lâchent pas – mais c'est qu'ils ont l'air de la menacer, les cochons ! Vas-y, Elanor ! HEY ! Fichez-lui la paix, bande d'abominables petits Véracrasses enrhumés ! Hey ! Rendez-moi ç… Lâchez ce porte-v… Mais vous allez lâcher ?! » entendit-on entre deux sifflements désagréables. Il ne faisait plus aucun doute que l'entêtement du Professeur McGonagall à exiger une impartialité totale avait eu raison de Lee Jordan, quitte à employer la manière forte, venait de toucher à son apogée. La sévère directrice de Gryffondor semblait considérer l'impartialité exemplaire du commentateur comme un facteur essentiel de la bonne marche des évènements, ce que son élève était loin d'agréer – allez savoir pourquoi. Dans l'espoir de survivre au sevrage, Lee obtint de récupérer l'amplificateur vocal, à quelques menues conditions inaudibles, mais qui occasionnèrent deux ou trois borborygmes formant étrangement les mots « tu peux rêver » quoi que cela pût vouloir dire.

« Dis donc, la grenouille… » Higgs venait d'accoster Elanor, occupée à slalomer habilement entre les Cognards, et peu disposée à la patience. « Tu devrais lâcher cette balle, ça cache quelque chose de toujours avoir un truc entre les mains… c'est de la frustration sexuelle, tu vois ce que je veux dire ? »

« Laisse tomber, Higgs, » rétorqua sèchement Elanor, « avec ta face qui me fait penser au fond du chaudron de Neville Londubat, je crois que tout ce qui te reste c'est Millicent Bullstrode. »

Higgs grinça des dents. « Tu as tort de jouer à la plus maligne, quand on sait ce que tu es : une misérable Sang-de-bourbe… »

« Je serais tentée de t'envoyer te faire foutre, tu vois ? »

« Non, chérie… c'est toi qui va te faire foutre. Mais pas par moi : Warrington se fera un plaisir de te retourner sur son balai, dès qu'il en aura fini avec tes copines et là, ça m'étonnerait que tu la ramènes. Tu sais ce qu'on dit… la première fois, ça fait mal. »

Elanor eut un haut-le-corps, tandis que le Poursuiveur décrochait. Mais toute angoisse disparut rapidement, et seule la colère demeura. Elle n'avait pas besoin, après tout, de s'inquiéter : avec cent-quarante à zéro (Harry avait semé la zizanie chez les Poursuiveurs adverses, et l'avait galamment invitée à placer un but en ajustant un Bletchley très surpris) Gryffondor menait par une (très) confortable avance. D'autant plus que l'harmonie des trois filles était parfaite : leurs mouvements étaient coordonnés, leurs intentions imprévisibles, leur motivation renouvelée. Elanor avait été heureuse de trouver en Katie et Alicia deux partenaires aussi bien accordées mais elle-même avait beaucoup étonné ses consœurs… En effet, Elanor paraissait anticiper le moindre des mouvements de l'adversaire, la plus petite de ses feintes les deux « anciennes » se sentaient menées jusqu'à la passe, conduites à la victoire, comme poussées par une force invisible qui aurait influer le cours de leurs pensées et actions. La nouvelle Poursuiveuse était une petite perle dans son genre. Surtout qu'elle s'était montrée particulièrement remontée après l'échauffourée entre Montague, Warrington et elle, puis assez agacée par le protectionnisme inquiétant dont faisait montre Harry, qui la couvait littéralement du regard. Elanor avait visiblement entrepris de prouver qu'elle n'avait nul besoin d'être surveillée, et encore moins guidée. Depuis une demi-heure environ, elle n'était plus directrice mais tyrannique, et prenait toutes les initiatives, y compris les plus dangereuses, qui conduiraient Gryffondor à la victoire. Et pourtant… le Vif d'or était encore en jeu.

Lorsque Higgs, Montague et Warrington se placèrent stratégiquement au-dessus d'elle et à ses côtés pour l'obliger à descendre, elle parvint néanmoins à se faufiler entre eux et à passer le Souafle à Alicia qui alourdit alors la marque une nouvelle fois : le score était à présent de… En allant félicité les filles sous les vivats de la foule, Ron perçut les cris de Lee Jordan, qui tonitruait dans son porte-voix, l'euphorie à son comble.

« C'EST ABSOLUMENT INCROYABLE ! CENT-CINQUANTE A ZERO POUR GRYFFONDOR ! »

A ses côtés, McGonagall avait le visage marbré de rouge, sous le coup de l'étouffement elle enserrait avec fébrilité un grand mouchoir à carreaux, et tentait d'étancher ses larmes plus loin dans les gradins, Severus Rogue ne paraissait plus cadavérique, mais déterré, et contemplait d'un œil morne la honte de sa vie avoir lieu sous son long nez. Sur la place d'honneur, carré dans son fauteuil, Albus Dumbledore avait le plus joyeux (et en vérité peu discret) des sourires.

« C'EST HISTORIQUE ! » continuait de s'époumoner Lee, dont le visage ruisselait de larmes. « Cent-cinquante à zéro : du jamais-vu ! Cette fois, c'est sûr Gryffondor a gagné la coupe ! Je savais bien que les Serpentard ne pourraient... enfin… ne seraient... oui, hum, que les pauvres Serpentard doivent être épuisés par... euh... les... conditions climatiques, car ils jouent... face au vent, » tenta de dévier Lee, mais McGonagall n'y prêtait même pas attention. Si les supporters de Serpentard donnaient l'impression de vouloir enjamber la rambarde et se jeter dans le vide d'une minute à l'autre, ceux de Gryffondor, dans un chatoiement brûlant de rouge, d'indigo et d'or, s'étreignaient les uns-les autres dans un incommensurable tumulte. Chacun vociférait à qui mieux-mieux, la plupart pleurant, certains sur le point de défaillir. Hermione était debout, ruisselante de larmes et de confettis, songeant qu'en cet instant précis, elle comprenait comment on pouvait se passionner pour le Quidditch.

Sur l'engagement, Katie récupéra le Souafle et tenta de combiner avec Elanor en lui passant la balle rouge. Mais immédiatement, les Poursuiveurs et les Batteurs de Serpentard la cernèrent : elle ne put rien faire. Dès qu'elle essayait de se faufiler dans un trou, elle y trouvait toujours une robe verte et argentée sur le chemin. Et visiblement, ils n'étaient pas contents du tout de leur déroute.

« Alors les fillettes, on fait moins les malignes maintenant ? » s'enquit poliment Montague, en donnant un coup de pied à Katie.

« Nous aussi on peut s'amuser… » ajouta Higgs, dont le nez ressemblait de plus en plus à une pomme trop mûre, habitée par un ver qui plus était.

« … et il faut bien nous accorder une petite compensation… » glissa Warrington d'une voix doucereuse, en chatouillant la joue d'Alicia. Il jeta un regard acéré à Elanor, qui avait parfaitement saisi le propos salace, et le regardait d'un air dégoûté se couler lascivement contre elle. Elle avait remarqué qu'il ne portait nulle trace de brûlure, malgré le traitement subi mais cela ne la préoccupait guère. Il repoussa une mèche brune derrière son oreille, la faisant frissonner douloureusement. « Aréthuse… » fredonna-t-il d'un air approbateur. « On dirait le bourdonnement d'un abeille satisfaite… Tu sais comment s'accouplent les abeilles ? » fit-il avec un sourire carnassier. « En plein vol… » Il dut pourtant s'écarter, car Katie lui avait octroyé un coup de pied magistral.

« Dégagez ! » fit Alicia, les dents serrées.

« Ou alors quoi ? » repartit Higgs d'un air mauvais. « Elle va appeler son chevalier servant à la rescousse ? J'espère pour elle qu'il baise mieux qu'il ne la défend, parce que sinon… »

« Ce n'est pas mon… foutez le camp ! » cria Elanor avec fougue.

« Sûrement pas… » répliqua Montague. « Vu les buts que tu marques, ce serait dommage de te laisser t'en aller… » Et il caressa langoureusement le manche de son balai.

« Fichez-leur la paix ! »

Elanor émit un juron inaudible de derrière ses dents serrées. Harry n'avait pas pu s'empêcher de venir au secours des Poursuiveuses (de venir à ton secours disait une petite voix dans sa tête) tombant par la même occasion dans le piège qu'avait tendu – grossièrement – les Serpentard.

« Mais avec plaisir, » susurra alors Warrington. Et Bole, qui s'était approché sans faire de bruit, brandit sa batte au-dessus d'Harry.

« NON ! » cria Elanor, et l'Attrapeur eut un sursaut, qui le sauva. Warrington, furieux, gifla la jeune fille avec violence, l'assommant à moitié et Elanor ne put rien faire d'autre, la tête bourdonnante, le sang lui coulant du nez, la main du Serpentard lui agrippant les cheveux, que de regarder Derrick prendre la place de Bole, et frapper brutalement Harry, qui chuta depuis l'Eclair de Feu jusqu'au sol, une vingtaine de mètres plus bas.

Elanor sentit les larmes inonder son visage, et ne vit plus qu'à travers un brouillard confus elle crut voir Katie et Alicia se précipiter pour rattraper Harry, inconscient, et de nombreux spectateurs se lever, le poing brandi, la colère déformant leurs traits autant que le voile humide qui l'ensevelissait sous l'abattement. Elle entendit, comme un écho très lointain, le sifflement de Madame Bibine qui réclamait penalties et explications et puis cette rumeur, qui devint clameur confuse, pour éclater brusquement à ses oreilles, lui déchirant les tympans et lui rendant l'ampleur de la scène, et le goût métallique du sang.

Une onde verte venait de s'ébranler là-bas, à l'autre bout du stade. Peu de monde l'avait vu tout d'abord, la plupart étant concentrée sur la faute des Poursuiveurs mais bientôt la rumeur se répandit, et la marée s'enfla, grondant comme un tremblement de terre. Et le reste de la foule tourna la tête, pour voir ce qui se disait, pour prendre la mesure du drame :

Draco Malefoy avait attrapé le Vif d'or.

A suivre

Note :

A l'évidence, il s'agit de l'un des chapitres les plus longs que nous ayons écrits pour cette histoire… c'est pas si mal, une fois terminé !

En vérité, ce chapitre est, dans l'absolu, incomplet : il devait comporter deux parties, j'entends bien sûr deux parties séquentielles – le match de Quidditch (tant attendu) et puis… enfin, ce qui est depuis devenu le chapitre 12. Comme pour « la Révélation » qui se compose de deux parties, formant les chapitres 5 et 6 ou quelque chose comme ça – c'est navrant je sais, mais j'ai perdu le compte. Il faudrait que je reprenne mon organisation, moi… Enfin bon, SeveRogue va râler que je lui ai tripoté son chapitre et que j'ai fait du n'importe quoi avec le mien. Mais comme je suis irrésistible (et comme il m'a trompée avec Crystal, et qu'il sait qu'il a intérêt à se tenir à carreau) il ne va sûrement rien me dire. Youpi !

Toujours est-il, que ce match de Quidditch grandiose, nous le devons au talent incommensurable et inexpugnable de notre cher SeveRogue. Nul autre que lui n'aurait su décortiquer ainsi, avec tant de drôlerie et de justesse, un jeu aussi ardu et brillant : il faut bien l'avouer, SeveRogue a jadis été un fanatique du football, reconverti dans des sports plus… nobles à défaut de ballon rond, il s'est passionné pour la balle rouge, pour notre plus grand bonheur.

Je dois avouer pour ma part, que je n'ai jamais pris autant de plaisir à travailler avec personne de plus, ce qu'il fait m'étonne toujours autant, et sa capacité à me surprendre m'émerveille. J'espère qu'il ne me tiendra rigueur, ni de cet accès de sentimentalisme, ni des libertés que j'ai prises avec ce qui m'avait été confié. Et j'espère que vous aimerez autant que moi ce petit bijou de la littérature fictive…

Allez, quoi… Avouez que c'est le meilleur match que vous ayez lu depuis longtemps ?

En tous les cas…

Je lève ma chope de Bièraubeurre à SeveRogue !

Mélusine.