S02E06

« Cesse de bouger, mia cara.

Sulpicia me coinçait le menton avec sa main, elle bougea mon visage vers le haut et m'appliqua le rouge à lèvres rose glacé avec son autre main. Une fois appliqué, elle tint le tube en l'air et laissa le bout de ses doigts sous mon menton pour admirer le résultat. Elle sourit, satisfaite.

Comme la veille et l'avant-veille, Corin était venue me chercher parce que Sulpicia voulait passer un peu de temps avec moi. J'avais mis l'une des robes que Chelsea nous avait prêtées. Elle faisait 1m60 comme moi et Bella ne faisait que cinq centimètres de plus alors ses robes nous allaient bien. Sulpicia était maquillée de la même façon que lors de notre première rencontre mais portait une robe de princesse violette, cette fois. Elle m'avait demandé si elle pouvait coiffer mes longs cheveux et je lui avais demandé si elle pouvait me maquiller comme elle. Elle m'avait fait un chignon avec ma demi-queue et avait bouclé le reste de ma chevelure restée libre.

« C'est fini. Sei molto carina, dit-elle en refermant le rouge à lèvres.

Je fronçai les sourcils.

« Tu es très jolie, traduisit-elle.

Je lui souris.

« Viens voir par toi-même, me proposa-t-elle souriante.

Elle me fit signe vers la porte derrière nous. Je me levai et la suivis dans le petit couloir, il y avait deux portes ici, une en face et une à gauche qui menait à la salle de bain. Elle ouvrit la porte en face et je découvris cette pièce pour la première fois. C'était une chambre de princesse, il y avait un grand lit à baldaquin parfaitement fait, je ne pouvais voir aucun pli sur la housse de couette. Je laissai toujours ma couette en boule quand je me réveillai mais je soupçonnai quelqu'un de me faire une farce parce qu'au bout d'un moment, mon lit était fait correctement. Ça faisait deux fois déjà et je n'arrivais pas à prendre le petit malin sur le fait. Il n'y avait pas d'armoire ni de commode mais il y avait une porte qui devait mener à un dressing. Un bureau était contre le mur et une coiffeuse à l'opposé. À droite de la tête du lit, il y avait un grand miroir entouré d'un cadre en or dans lequel je pus m'admirer de la tête aux pieds. Mes yeux bleus étaient entourés d'eye-liner et le fard noir s'estompait en approchant le pli intérieur de mes paupières. Mon smoky eyes était plus doux que le sien mais j'aimais bien, ça m'allait bien.

« Merci, Sulpicia, la remerciai-je.

Je lui fis un câlin parce qu'elle avait pris du temps pour me rendre aussi jolie.

« Veux-tu te promener avec moi dans le jardin ? S'enquit-elle. Ensuite, je pourrais te lire une histoire, j'ai demandé à Corin de me choisir quelques ouvrages pour toi, elle les a apportés ce matin.

Corin était un mix de dame de compagnie et de servante, elle veillait à ce que Sulpicia et Athénadora – la femme de Caïus – soient heureuses et aient tout ce qu'elles voulaient car elles ne quittaient que rarement le quatrième étage de cette partie du château.

« D'accord, acceptai-je.

Sulpicia sortit du château la première et, je le jure, sa peau s'était mise à briller comme un diamant. J'écarquillai les yeux et admirai les scintillements de sa peau avec fascination.

« Le soleil a cet effet sur nous, m'expliqua-t-elle.

« Tu es comme un bijou, fis-je époustouflée.

« Et bien, merci, rit-elle.

Le château disposait d'un grand jardin, il y avait un étang, une partie du jardin était joliment aménagé avec des bancs et des parterres de fleurs et une autre partie, dans le fond, ressemblait à une petite forêt. Sulpicia et moi nous arrêtâmes devant l'étang pour regarder les poissons nager, il y avait des carpes, des poissons rouges et des petits poissons argentés, puis nous continuâmes en nous dirigeant vers le bosquet. J'avais du mal à détourner mon regard d'elle, c'était la première fois que je voyais un vampire briller, c'était magnifique.

« Pourquoi tu ne quittes jamais le quatrième étage ? La questionnai-je.

Elle avait cessé de briller à cause des arbres qui empêchaient les rayons solaires de parvenir jusqu'à elle mais parfois, quelques-uns arrivaient à se faufiler.

« Tu sais, j'ai beaucoup vécu, plus de 3000 ans. J'ai déjà tout vu et je n'aime pas tant ces jeux de pouvoirs qu'Aro affectionne alors ça me convient de rester dans mes appartements. La compagnie d'Athénadora et de Corin m'est suffisante. J'apprécie beaucoup passer du temps avec toi, aussi.

« Moi aussi, me confiai-je.

Nous discutâmes un moment en nous baladant puis nous rentrâmes dans ses appartements.

« Veux-tu que je te lise une histoire ? S'enquit-elle.

Je hochai la tête.

« On peut lire dans le lit ? Demandai-je.

Je rêvais de m'allonger dessus depuis que je l'avais vu, il avait l'air si confortable et en plus, je pouvais faire semblant d'être une princesse. Elle accepta avec plaisir et m'indiqua de m'y installer pendant qu'elle allait chercher le livre. Elle n'utilisait plus sa vitesse vampirique quand j'étais là parce que ça me faisait sursauter à chaque fois. je me dirigeai vers la chambre et sautai sur le lit, je rebondis une fois et m'installai plus confortablement. Sulpicia revint avec son livre et s'installa à demi-assise à côté de moi. Sa voix était douce avec de jolies intonations, son accent était à peine perceptible quand elle parlait anglais.

J'aimais beaucoup Sulpicia. Je ne savais pas comment l'expliquer mais elle était devenue une figure maternelle pour moi. Renée et elle étaient tellement différentes que je me demandais pourquoi Renée avait eu des enfants et pas Sulpicia. Je pense que j'aurais bien aimé que Sulpicia soit ma maman. Pendant notre conversation, tout à l'heure, elle m'avait parlé de ce dont elle se rappelait de sa vie humaine, elle aimait déjà s'occuper d'enfants et d'adolescents, elle travaillait dans un orphelinat. C'était peut-être pour ça qu'elle m'aimait bien puisque j'étais encore une ado. Je me sentais proche d'elle, ainsi que d'Aro et Marcus, aussi j'aimerais bien que Bella soit moins méfiante parce qu'ils étaient vraiment gentils avec moi.

Sulpicia n'avait pas lu un tiers du livre quand elle le referma, je lui lançai un regard curieux.

« Aro est là, m'indiqua-t-elle. Allons le voir.

Elle sortit la première, je la suivis. Aro sourit en me voyant, je me rappelai que Sulpicia m'avait coiffée et maquillée.

« Je vois que vous avez été bien occupées. Tu ressembles à un ange, mia figlia.

« Merci, souris-je.

C'était probablement le moment idéal pour demander ce que voulait dire ''mia figlia''. Probablement pas mon nouveau nom puisqu'il avait le même début que ''mia cara'' qui était la traduction de ''ma chérie'' (j'avais demandé).

« Ça veut dire quoi ''mia figlia'' ?

« ''Mon enfant'', me répondit Aro. Ça peut aussi vouloir dire ''ma fille''.

« Un surnom comme mia cara ?

« C'est ça, acquiesça-t-il. Puisqu'on en parle, j'aimerai avoir une petite conversation à ce sujet.

Il me présenta le canapé, je m'assis à ses côtés et demandai :

« À propos des surnoms ?

Sulpicia s'installa sur le fauteuil perpendiculaire au canapé, près de son mari.

« Non, s'amusa-t-il. À propos d'enfant, de toi, plus précisément.

Je fronçai les sourcils et attendis qu'il m'en dise plus.

« Sulpicia et moi, nous t'apprécions énormément, tu es... un ange tombé du ciel. Nous te considérons déjà comme notre fille et nous aimerions t'adopter, m'apprit-il. Qu'est-ce que tu en penses ?

Je jetai un regard à Sulpicia qui me sourit doucement, dans l'attente de ma réponse puis regardai à nouveau Aro quand il me prit la main pour la tenir entre les deux siennes.

« Prends le temps d'y réfléchir.

« Mais... je ne suis pas orpheline.

Je voudrais bien que Sulpicia soit ma maman... et bien, je n'avais rien contre l'idée qu'Aro devienne mon père mais j'aimais déjà le mien, je ne voulais pas changer.

« Tes parents vivent aux Etats-Unis, si je ne me trompe pas ?

Je hochai la tête.

« Et bien, ils sont tes parents d'Amérique et nous pourrions être tes parents d'Italie.

J'y réfléchis. Je pensais que je devrais changer de famille mais l'idée d'avoir deux familles me plaisait bien. Et celle d'Edward serait ma belle-famille si on se marie et, alors, j'aurais trois familles. Seulement, il y avait un détail dont il fallait parler avant de donner mon accord ou non.

« Je suis humaine moi et je veux pas devenir un vampire.

Il me sourit et tapota le dos de ma main.

« Il n'est pas question de te transformer, mon ange. Nous voulons te laisser la possibilité de grandir et ne voulons pas te priver de ces choses humaines qui nous manquent, à nous, comme manger et dormir. Et si plus tard, tu changes d'avis à ce sujet, que ce soit pour rester auprès d'Edward ou une autre raison, alors nous en reparlerons.

J'aimais beaucoup manger et dormir.

« Alors, preziosa figlia, qu'en penses-tu ? [précieuse enfant]

« J'aimerai bien, acceptai-je.

« Vraiment ?

Je hochai la tête.

« Tu nous rends très heureux.

Je souris, heureuse moi aussi et fis un câlin à Aro puis me levai pour en faire un à Sulpicia, elle se leva avant que je ne l'atteigne et me prit dans ses bras. Peut-être qu'avoir une famille dans chaque pays où je voyagerai serait une bonne idée ? Ça ferait beaucoup de gens à aimer et beaucoup de gens qui m'aimeront en retour.

« Je pense que nous pourrions organiser une fête, s'enjoua Sulpicia qui était aux anges. Nous pourrions ainsi annoncer cette merveilleuse nouvelle à tout le monde.

« Bonne idée, acquiesça Aro.

« Est-ce que Marcus est mon oncle, du coup ?

« Bien sûr, répondit Aro.

« J'espère que ça le rendra heureux, murmurai-je.

« Il le sera, m'affirma Aro.

Mon ventre se mit à gargouiller me rappelant que j'avais faim et qu'il était midi.

« Il me semble qu'il est l'heure de manger, rit Aro.

Je pris congé auprès de mes seconds parents pour rejoindre la cuisine de mon étage, dans l'aile ouest. Aile qui était réservée aux non-vampires parce qu'à part quand Corin venait m'y chercher, je n'y croisais que des humains. Il y en avait une dizaine, la plupart faisait le ménage, Gianna et Paula étaient les hôtesses d'accueil. Quand j'arrivai dans la cuisine, je fus surprise de n'y trouver que Bella assise en bout de table en train de lire un livre. Un regard vers le micro-onde m'indiqua qu'il était plus tard que je ne le pensais, 13h17. Bella releva la tête et après un petit temps de surprise me sourit.

« Tu es magnifique, sœurette.

« Merci, c'est Sulpicia qui m'a relookée.

Bella referma son livre et se leva.

« C'est gentil à elle, en convint-elle. Je t'attendais pour faire à manger, je ne savais pas quand tu arriverais.

« Désolée, je n'avais pas vu l'heure passée.

« Ne t'inquiète pas, sourit-elle.

Je m'installai près de la place de Bella et regardai son livre ''Les hauts de Hurlevent''. Je jouais avec la tranche, faisant glisser les feuilles sur mes doigts pendant que Bella nous préparait des pâtes et des steak hachés. Une fois les deux assiettes prêtes, Bella apporta et refit un voyage pour prendre deux verres et une bouteille d'eau.

« Alors, qu'as-tu fait ce matin, à part te faire pomponner ? Demanda Bella en s'asseyant.

« J'ai essayé d'apprendre à faire l'équilibre et je me suis cognée la cheville contre ma chaise.

« Jamie, rouspéta Bella. Fais attention.

Je lui souris d'un air espiègle.

« Ensuite je suis allée voir Sulpicia, elle voulait me coiffer et je lui ai demandé de me maquiller puis on a fait une balade dans le jardin et elle m'a lu une partie d'un livre.

« Tu es heureuse ici ? S'enquit-elle ensuite.

Elle me regarda avaler une bouchée, je mâchais et hochai la tête avec un sourire équivoque.

«Tout le monde est gentil ici, plus qu'au lycée en tout cas. Personne ne me traite comme si j'étais folle ou quelque-chose. Ils me traitent... comme Charlie et toi.

«Je vois.

Je me penchai vers elle.

« J'ai un secret à te dire, lui chuchotai-je.

Elle se pencha vers moi elle aussi.

« Aro et Sulpicia m'ont adoptée.

Elle écarquilla les yeux en se redressant puis fronça les sourcils comme si elle n'était pas contente. Je pense qu'elle ne l'était pas.

« Mais Charlie et Renée, contesta-t-elle.

« Je suis toujours leur fille et maintenant, je suis la fille d'Aro et Sulpicia en même temps, expliquai-je. Mes parents d'Amérique et d'Italie. Je suis contente.

« Tu l'es ? S'assura-t-elle.

« Mh mh, dis-je en hochant la tête avant d'avaler ma nouvelle bouchée. Aro sera un bon père, je pense, il est gentil mais je préfère Charlie quand même. Sulpicia est une meilleure maman, elle aurait dû être notre maman depuis le début.

Je réfléchis à ce que je venais de dire et fronçai les sourcils.

« Est-ce que c'est mal ?

J'attendis la réponse de Bella à ce sujet.

« De quoi ?

« De préférer ma nouvelle maman que celle que j'ai depuis longtemps ?

« Je ne sais pas. Normalement oui mais... vu notre mère, je peux comprendre. De la façon dont tu m'en parles, Sulpicia se soucie vraiment de toi, ce que Renée ne faisait pas vraiment. Et Aro, et bien, je ne le porte pas dans mon cœur mais tant qu'il ne te fait pas de mal.

Je souris et finis mon assiette sous l'œil attentif de Bella. Elle me regardait mais je pense qu'elle réfléchissait en même temps parce qu'elle mit du temps à finir son assiette.


Que... quoi ?
Non, vous n'avez pas rêvé cet épisode... vous vous attendiez à quelque-chose comme ça ?