Titre : Sangs, chapitre IV.
Auteur : Lychee.
Source : HP I, II, III, IV.
Genre : Yaoi. Très long.
Disclaimer : Y'en a plein à moi, làlàlàààà…
Sangs.
Premier trimestre.
Chapitre IV :
Retrouvailles.
Voldemort :
''Les Détraqueurs se joindront à nous… Ce sont nos alliés naturels… nous ferons revenir les géants exilés… Tous mes serviteurs dévoués retourneront vers moi, ainsi qu'une armée de créatures redoutées de tous…''
§§§§§
- Dépêche-toi, Sirius.
L'énorme chien noir cessa de musarder et suivit son ami dans les couloirs de Poudlard. Remus avait raison. Il ne fallait pas faire attendre Dumbledore.
Cela faisait trois ans qu'ils travaillaient pour le vieux sorcier. Qu'ils parcouraient la Grande-Bretagne, voire l'Europe, à réunir des sorciers à leur cause. Le fait que Remy soit un loup-garou et lui-même un évadé d'Azkaban ne facilitait pas les choses, mais bizarrement, les correspondants de Dumbledore leur faisaient entière confiance. Si on se met à nous fréquenter, avait un jour cyniquement fait remarquer Rem', c'est signe que rien ne va plus.
Ce qui était fort probable. Vu que Dumbledore les avait fait revenir de toute urgence, à peine trois semaines après le début de l'année scolaire. Pour quelque chose d'important, avait-il dit…
De toutes façons, ils le sauraient dans quelques minutes.
Remus poussa la porte secrète qui menait à leur habituelle salle de réunion, aujourd'hui peu occupée. Sept personnes avec eux-même, compta Sirius avant de se retransformer.
- Ah ! Vous voilà enfin.
Dumbledore, bien sûr. Le vieux sorcier semblait fatigué. Le travail qu'il accomplissait depuis deux années était époustouflant. Dans le plus grand secret, il avait contacté des centaines de sorciers et d'alliés d'autres espèces, à présent espionnant, travaillent pour lui, prêt à contrer Voldemort dès qu'il se manifesterait.
Minerva MacGonagall l'assistait avec efficacité. C'est elle qui tenait les comptes et enregistrait tous les renseignements qui leur parvenaient. Sirius la soupçonnait d'avoir un petit béguin pour son cher directeur, mais ce n'étaient pas ses affaires, après tout…
Les deux hommes les saluèrent chaleureusement, puis se tournèrent vers les trois autres présents.
- Remus, Sirius, vous connaissez déjà Alastor Maugrey…
Sirius et l'Auror échangèrent une grimace, pendant que Remus pouffait. En tant qu'évadé d'Azkaban, l'Animagus n'était pas en très bons termes avec le sorcier, même si Dumbledore leur avait intimé d'arrêter de faire leur bourrique et de se serrer les coudes.
- … Severus, bien sûr…
Encore pire. Sirius soupira et détourna ostensiblement la tête, pendant que Remus serrait la main du Maître des Potions en haussant les épaules d'un air d'excuse.
- … et voici Plume Percevent, notre actuel professeur de DCFM, qui représente le Cercle Ecarlate.
Sirius regarda, un peu interloqué, le tout jeune homme aux magnifiques yeux pétillants qui se tenait devant lui, et chercha vainement sur le visage serein la présence de cette sauvagerie qui faisait la sinistre réputation des êtres les plus craints du monde sorcier. Il ne trouva pas. Sans mot dire, il lui serra la main, sentant à côté de lui Remus tout aussi surpris.
Puis Dumbledore leur fit signe de s'asseoir, et ainsi débuta la première réunion d'action contre le Lord Noir.
Sirius se laissa tomber sur sa chaise avec un soupir. Décidément, la forme prolongée d'Animagus ne lui valait rien. Il avait un de ces foutus maux de crâne…
La présence de ce *tuuuut* de Snape n'arrangeait rien. Mais pourquoi avait-il accepté d'assister à cette réunion ? Ah oui, pour sauver le monde…
Dumbledore prit la parole.
- Bien, nous pouvons commencer.
Il y eut un silence pendant qu'il rassemblait ses idées.
- Jusqu'ici nous n'exercions contre Voldemort qu'une défense plutôt… passive. Malheureusement les nouvelles ne sont pas bonnes. Pas bonnes du tout, et c'est pourquoi j'ai organisé ce petit rassemblement.
Tous se taisaient, attentifs.
- Voldemort a attaqué Chaudron-aux-Sources, visiblement pour s'emparer du stock de Totinutriment qui y était entreposé…
Sirius fouilla dans sa mémoire : d'après ce qu'il se rappelait, le Totinutriment était une substance aux propriétés exceptionnelles, dont les moindres était d'assurer l'équivalent de six repas par goutte bue et d'atténuer sensiblement la douleur, sans agir sur les autres sensations.
- Heureusement il a échoué. Les biomages et leurs collègues Moldus ont réussi à prévenir les Aurors à temps.
- Pour une fois qu'ils servent à quelque chose…
- Une réflexion a nous faire partager, Black ? aboya Maugrey.
- Nan, nan, rien…
Les autres poussèrent des soupirs plus ou moins amusés ou exaspérés.
- Cette réserve, d'après ce que m'a écrit le Pr Zachary, lui aurait permis de nourrir près de 3000 hommes pendant à peu près six mois.
- Trois mille hommes ? intervint Remus. Mais Voldemort ne dispose pas de trois mille hommes !
- C'est ce que nous indiquent les dernières estimations, qui datent de deux mois.
Sirius étouffa un juron. Remus semblait atterré, et le jeune Mercenaire ouvrait de grands yeux. Les autres avaient l'air déjà au courant.
- Pour l'instant ses troupes sont plus ou moins dispersées, mais s'il se mettait à les rassembler…
- Qu'attend-il ? demanda Sirius.
- Il a proposé un accord aux nains de Galles, déclara froidement Snape, et attend la réponse. Mais ils sont avec nous.
L'Animagus hocha pensivement la tête. Dans ce cas… tout allait rapidement se déclarer. Trop rapidement.
- Que comptez-vous faire, Albus ? demanda doucement le Mercenaire.
Sirius le détailla, à nouveau surpris par son air gentil. Ce môme, un membre du Cercle Ecarlate ? Il semblait si jeune… Les Mercenaires avaient une réputation de fous sanguinaires, totalement incontrôlables. Ce type était la sympathie-même.
Enfin Remus était aussi la sympathie-même, ce qui ne l'empêchait pas de courir la campagne en égorgeant tout ce qui lui tombait sous la patte, une fois par mois. Oui… Les deux hommes avaient un peu la même étincelle lasse au fond du regard. Lasse mais presque sereine…
- Il faut nous aussi nous préparer.
Ils dévisagèrent poliment le vieux sorcier, attendant qu'il précise sa pensée.
- C'est-à-dire réunir nos troupes.
Un silence éberlué accueillit ses paroles.
- Mais… C'est la guerre ouverte que vous proposez ! s'écria Remus.
- Il n'est que temps.
Dans le silence de mort qui plana pendant quelques secondes, le ''Nom de Dieu !'' de MacGonagall résonna de façon comique. Maugrey, souriant légèrement, prit la parole.
- Moi je veux bien, mais où comptez-vous accueillir une armée entière ? Sans compter le ravitaillement, le stockage des armes… Et il faudra cacher tout ça, de Voldemort mais aussi des Moldus. Ou comptez-vous affronter le Lord Noir ? Comment allez-vous déplacer vos troupes ? Enfin c'est juste histoire de parler, hein…
Et le vieil Auror parlait juste. Mais Dumbledore ne sembla pas démonté.
- En ce qui concerne le lieu de réunion, ce sera Poudlard. Plus exactement la Forêt Interdite.
Il stoppa les protestations de ses alliés d'un geste impatient.
- Poudlard est bien placé : pas de grandes villes alentours une protection déjà établie la Forêt est assez grande pour tous les accueillir, assez fournie pour tous les nourrir – et nous avons le Totinutriment – sans compter Pré-au-Lard à côté, et assez touffue pour les cacher. Et… hum… je les aurai sous la main.
Il patienta le temps que l'idée fasse son bonhomme de chemin dans leur petite tête.
- Mais M. Maugrey a raison, intervint le Mercenaire, Percevent. L'armée devra se déplacer pour affronter Voldemort.
- Et bien nous utiliserons un Charme de Croisade, voilà tout.
Nouveau silence.
Trèèèès sceptique.
- Insensé ! s'exclama Snape.
Les autres ne répondirent même plus, les yeux exorbités.
- Ce sort n'a pas été utilisé depuis des siècles ! Et il faut un groupe puissamment soudé pour l'exécuter ! Comment pouvez-vous imaginer… ?
Sirius aurait bien rigolé de l'air furieux du Maître des Potions, mais il était trop entièrement d'accord avec lui pour même y penser.
- Sans compter la source d'énergie, ajouta Remus retrouvant enfin sa voix. Où comptez-vous… ?
- J'aurai plusieurs centaines, voire milliers, de soldats sous la main, donc pas de problème de ce côté-là. En ce qui concerne le groupe…
Dumbledore leur jeta un coup d'œil amusé.
- Et bien nous sommes sept, n'est-ce pas ?
Sirius ouvrit la bouche. La referma. Regarda Remus qui le regarda. Puis regarda MacGonagall qui regardait Dumbledore d'un air effaré. Puis regarda Maugrey qui levait les yeux au ciel. Puis regarda Snape qui échangeait un coup d'œil avec Percevent. Puis regarda Dumbledore qui les regardait se dévisager un par un… En bref tout le monde se regarda pendant au moins trente bonnes secondes.
Puis le Mercenaire, à leur grande surprise et légère inquiétude, éclata de rire.
- Albus… pardonnez-moi mais… vous êtes tellement givré ! hoqueta-t-il, les larmes aux yeux. Ca marche pour moi !
Sirius remarqua un peu surpris que Snape se cachait le visage dans les mains, murmurant un vague truc commençant par quelque chose comme ''Mais qu'est-ce que j'ai fait au Ciel…'', mais n'eut pas le temps de se poser de questions, son attention détournée par ce que Maugrey venait de dire.
- Ca pourrait être sympa…
- Vous êtes tous fous ! s'exclama l'Animagus. ON PARLE D'UN CHARME DE CROISADE, LA !!!!
- Ben oui, répondit gentiment Dumbledore.
Sirius cligna des yeux.
Le Sort – ou Charme – de Croisade était autrefois utilisé pour déplacer des armées entières d'un endroit à l'autre. Enfin utilisé était un grand mot… L'évènement ne s'était en tout produit que quatre fois. En effet, outre le fait qu'il nécessitait sept sorciers assez puissants pour servir de catalyseur à l'énergie magique produite par l'armée en question, il lui arrivait de manquer de précision, notamment la quatrième fois où une dizaine de régiment avait terminé au beau milieu de la Manche…
- Remus ! Dis-leur qu'ils sont fous !
- C'est vrai que si ça marchait…
Sirius fixa son vieil ami d'un air désespéré.
- Noooon… Pas toi !
- Voldemort ne dispose pas de cette possibilité, ajouta MacGonagall.
- Qu'est-ce que vous en savez ? lança Sirius avec emportement.
- Il est trop indépendant, déclarèrent Snape et Percevent d'une même voix.
Ils échangèrent un regard, puis Snape expliqua.
- Voldemort refuse de partager le pouvoir. Il n'aura pas assez de MangeMorts assez puissants et liés à lui pour un sortilège comme celui-ci – peut-être moi, Malefoy et Nott…
L'homme haussa les épaules, puis déclara doucereusement, les yeux brillants :
- Ne t'inquiètes pas, Sirius. Si tu as si peur que ça, nous nous débrouillerons pour trouver quelqu'un d'autre pour te remplacer…
Sirius ouvrit la bouche pour protester, puis s'interrompit et regarda les autres : Dumbledore tapotait légèrement son bureau en regardant une mouche voleter Maugrey le fixait d'un ait narquois MacGonagall souriait innocemment Percevent jouait negligemment avec une mèche de ses cheveux et même Remy se mordait les lèvres pour ne pas rire. Le traître.
- BANDE DE… !!!
- Alors c'est d'accord ? demanda Dumbledore.
Sirius eut un gémissement pitoyable.
- Ouiiiiiiii !
Tous applaudirent, sauf Remus qui lui tapota le dos, et Snape qui s'autorisa un sourire satisfait.
* Toi, je te tuerai !*
- Bon, nous n'en sommes pas encore là, déclara Dumbledore en reprenant son sérieux. Il va falloir prévenir tout le monde et s'organiser.
Les autres se calmèrent aussitôt.
- Qui est avec nous, en somme ? demanda Remus.
Dumbledore lança un regard à Maugrey.
- Cent-vingt-et-un Aurors sont prêts, déclara celui-ci. Mais pas les têtes… Ces imbéciles sont fidèles au Ministère, ajouta-t-il amèrement.
- Cent-vingt-et-un Aurors, ce n'est déjà pas mal, tempera le Directeur. Ce sont des sorciers entraînés au combat.
Snape eut un reniflement qui montrait bien la haute estime qu'ils portaient aux combattants en question, et Percevent lui balança un coup de coude. Ils avaient l'air de bien se connaître, pensa Sirius. Après tout, un Snape fréquentant des Mercenaires du Cercle Ecarlate ne l'étonnait pas outre mesure…
- Je vais essayer d'en racoler d'autres, conclut le vieux sorcier.
- Bien. Minerva ?
- Les Elfes sont bien sûr prêts à nous soutenir, notamment les clans de Percevent et MillTharivil. Mais un message de rassemblement les étonnera sûrement… Idem pour les géants des Montagnes contactés par Hagrid. Les nains de Galles aussi.
- Ces deux derniers disposent de leurs propres moyens pour nous rejoindre lorsqu'il sera temps, coupa Dumbledore. J'ai déjà prévenu les Elfes.
- Excusez-moi, intervint Remus. Je crois que les Elfes sont assez… susceptibles. Ne risquent-ils pas d'être légèrement vexés de ne pas assister à la réunion, et de ne pas participer au Charme en temps venus ?
- Plume a du sang elfique, du clan Percevent, répondit Dumbledore pendant que le Mercenaire adressait un sourire au loup-garou. Il représente Griffe en même temps que le Cercle.
* Qui est ce type ?* s'étonna Sirius.
- Quant au Charme de Croisade, je crois qu'il n'entre pas dans les possibilités magiques des Elfes…
Percevent confirma, et Dumbledore pria sa directrice-adjointe de poursuivre.
- En ce qui concerne les sorciers civils, une bonne partie de ceux de Grande-Bretagne travaille pour nous. L'Europe est plus ou moins prête à nous aider, selon les pays, mais d'ici à leur sonner le rassemblement… Il va falloir que Vous-Savez-Qui se manifeste un peu plus pour qu'ils acceptent de se déplacer. Je ne parlerai même pas du reste du monde.
- Comment cela se fait-il ? interrogea Sirius. Il y a vingt ans, la Terre entière était préoccupée par Voldemort.
- Il a changé de plan d'attaque, expliqua Dumbledore. Au lieu de s'éparpiller partout, comme avant sa chute, il lui faut une ''base''. En l'occurrence, l'Angleterre. Et de là, il compte ensuite s'occuper du reste.
- Angleterre, île imprenable, commenta rêveusement Percevent. Son idée marcherait sûrement…
- Imprenable avant les armes nucléaires Moldues, contrecarra Remus.
- Il y a pensé, répondit l'Elfe. Il y pensait déjà il y a vingt ans, en fait. Il s'est même intéressé de près aux travaux Moldus dans ce domaine.
Tous ouvrirent de grands yeux, sauf Dumbledore et Snape.
- Et… et alors ? demanda Sirius.
- Alors il a mis ses MangeMorts sur le coup. Et la solution a bien sûr été trouvée, par notre cher Pr Snape ici présent.
Tous les visages se tournèrent vers l'espion, qui restait impassible.
- C'est malin, grommela Sirius.
- C'était ça ou crever, le coupa Snape. Et pas la peine de dire que la terre n'aurait rien perdu.
Sirius referma la bouche, coupé dans son élan : comment avait-il deviné ?
- Mouais… ça marche comment ton truc ?
- Trop compliqué pour ta petite caboche. De toutes façons, il n'aura pas l'occasion de l'utiliser, voilà tout.
- Parfaitement parlé, Severus, approuva Dumbledore. Bien, bien, nous nous retrouvons donc avec trois ou quatre cents sorciers sur les bras, malheureusement peu entraînés… Avant d'aborder ce problème, où en est Killian, Severus ?
- Les labos de potions avancent bien. Deux centaines de chercheurs travaillent en ce moment, sorciers et moldus. Killian Zachary est en bonne voie en ce qui concerne le Totinutriment.
- Bien. Plume ?
- Mes compagnons sont prêts à vous soutenir. Malheureusement, si une partie veut juste se venger de Voldemort, l'autre réclame de l'argent. Mais je suis en train d'arranger ça.
Snape lui chuchota quelque chose qui le fit lui lancer un regard noir.
- Ta gueule… Comme je disais donc, reprit-il sans tenir compte de l'air éberlué de Sirius et Remus, ce sera arrangé dans une semaine.
Sirius était un peu sceptique.
- Je m'excuse, mais on m'a toujours dit que le Cercle Ecarlate était uniquement préoccupé par l'argent. Comment savoir si on pourra leur faire confiance ?
- Sirius ! dit Remus, mécontent.
- Ce n'est rien, sourit Percevent, il a parfaitement raison. Comme le dit M. Black, nous sommes des mercenaires. Mais cette fois-ci, mon clan a un petit compte à régler avec Voldemort, alors croyez-moi, vous pouvez nous faire confiance.
Sirius enregistra l'éclat de son regard et décida qu'il le croyait volontiers.
- D'accord.
- Combien serez-vous ? demanda Maugrey.
Percevent plissa les yeux.
- Mmh… Quarante-sept.
- C'est tout ! s'exclama Sirius.
- Non, non ! Quarante-sept chevaliers-dragons ! Avec ça je dois pouvoir vous ramener environ deux cent cinquante fantassins… peut-être encore une petite centaine s'ils sont dans un bon jour.
- Quatre-cent Mercenaires du Cercle Ecarlate ?!
- Oui, c'est joli hein, ça fait un compte rond !
- Plume…
MacGonagall semblait inquiète.
- … vous pourrez les contrôler ?
- Moi ? Bien sûr que non ! s'exclama gaiement le demi-elfe ou quoi qu'il soit d'autre.
* Complètement jeté…* songea Sirius avec accablement. * Un Dumbledore bis.*
- Vous avez parlé de chevaliers-dragons, demanda Remus, est-ce que… ?
Percevent hocha la tête.
- Ce sont bien des démons-dragons. Mais ils sont très sympas, vous verrez !
Les autres semblèrent peu convaincus. Les démons-dragons, une espèce rare surpuissante, avaient pratiquement disparu de la planète – au grand soulagement du monde sorciers, les demons-dragons étant davantage préoccupés par la variété de leur menu, qui consistait bien entendu en chair humaine, que par les rapports sociaux. D'ailleurs on ne savait pas trop à quoi ils avaient vraiment pu ressembler, les humains les ayant rencontrés mourant trop vite pour faire part de leur aventure. Il n'existait que des démons-dragons mâles, les obligeant à se reproduire avec des femmes d'autres espèces. Les enfants mâles – de plus en plus rares – qui naissaient de ces unions présentaient toutes les caractéristiques de leur géniteur et en suivaient la trace. Les filles ressemblaient à leur mère, excepté les yeux typiques de la race de leur père, présentant souvent un iris strié ou tacheté de deux couleurs différentes leur comportement était en général normal, excepté lors d'horribles crises de démence meurtrière qui, heureusement ne duraient pas longtemps – quoique sans doute trop au goût de leur entourage. Leurs enfants héritaient de ce trait de caractère, ainsi que leurs petits enfants, ce phénomène ne s'atténuant notablement qu'à partir de trois ou quatre générations. Par extension, on appelait ''démons-dragons'' tous les héritiers présentant encore ce trait génétique.
Se remémorant tout cela et jetant un coup d'œil aux superbes yeux du Mercenaire, Sirius se fit la réflexion qu'il était fort possible que le jeune homme ait lui-même un ancêtre de ce côté.
- Et bien ce n'est pas si mal, conclut Dumbledore. Et puis il y a les élèves, bien sûr.
- QUOI ?! VOUS VOULEZ MELER LES ELEVES A CE MASSACRE !!! s'exclama MacGonagall.
* Très optimiste* se dit Sirius.
-Minerva… Ils devront être au courant, et les 6ème et 7ème années pourront nous aider. Ne serait-ce que pour assister Mme Pomfresh à donner des soins.
La femme soupira.
- Bien…
- D'ailleurs… Severus, Draco Malefoy est toujours décidé.
- Je maintiens que cette idée est mauvaise. Cela ne nous servira à rien.
- Si. Si Voldemort découvre que vous le trahissez.
La voix était nette. Sirius eut de plaisir de voir Snape rester le bec clos – enfin, le plaisir… C'était un peu mesquin. Snape risquait sa vie après tout.
- Pourriez-vous nous mettre au courant ? demanda Percevent.
- Draco devrait subir son initiation de MangeMort dans le mois qui arrive, et il est venu se proposer comme espion.
Sirius fronça les sourcils.
- Il est très jeune, non ?
- Oh, il en est parfaitement capable ! dit Dumbledore avec un petit sourire triste.
- Non, ce n'est pas ça… C'est juste que… C'est dommage de devenir MangeMort à 17 ans… Je le plains un peu…
Il y eut un silence où tous le dévisagèrent, les yeux écarquillés, puis Snape se leva brusquement de sa chaise et s'appuya contre une fenêtre, leur tournant le dos.
- Sirius, dans le genre con, il y a des fois où tu m'épates encore, souffla Remus.
* Merde…*
- Désolé, Snape, fit l'Animagus d'une toute petite voix.
L'homme soupira d'un air excédé, puis se rassit.
- On continue ?
Sirius le regarda se rasseoir, mal à l'aise. Il avait oublié qu'il avait espionné Voldemort à partir de quinze ans. Pour la première fois de sa vie, il ressentit quelques remords d'avoir toujours été si désagréable avec lui. Enfin, l'autre ne lui avait jamais sauté dans les bras non plus…
Il ne remarqua pas Percevent effleurer doucement le bras de Snape, qui se détendit un peu.
- Mettons d'abord les choses au point, exposa Dumbledore, puis nous nous occuperons de Draco Malefoy.
Pendant deux bonnes heures, ils planifièrent les semaines à venir : les personnes à contacter, l'approvisionnement à organiser, le camp à installer, le système de renseignements à restructurer… Chacun se vit allouer une ou plusieurs tâches, un rôle bien particulier ou un objectif à remplir. Sirius commençait à en avoir ras la choucroute, quand enfin Dumbledore s'estima satisfait. Dire qu'il détestait les réunions…
- Et bien, il ne reste plus que le problème du jeune Malefoy. Plume, vous voulez bien aller le chercher, s'il vous plaît ? je crois qu'il a cours de Botanique…
- Bien sûr.
- Et ramenez aussi Harry avec vous.
Le jeune homme s'immobilisa sur le pas de la porte, le regard curieux.
- Qu'est-ce que Harry vient faire ici ? s'étonna Sirius.
- J'estime que Harry a quand même le droit d'être un minimum au courant en ce qui concerne nos plans contre Voldemort. De toutes manières, il faudra informer les élèves, donc que l'un d'entre eux l'apprenne deux semaines avant les autres n'a pas beaucoup d'importance. De plus, je veux qu'il soit au courant pour Draco.
- Ils ne se supportent pas ! protesta MacGonagall. Pour être honnête, je ne compte plus les fois où ils se sont mutuellement defigurés, que ce soit par magie ou à main nue.
- Elle n'a pas tord, confirmèrent en même temps Remus et Percevent, avant de se regarder d'un air amusé.
- Je sais, je sais, mais justement. L'état d'espion de Draco Malefoy va beaucoup l'occuper, il va même parfois devoir manquer certains cours, ce qui ne sera déjà pas facilement explicable. Je ne veux pas qu'il soit en plus chahuté par les élèves de Gryffondor, aussi charmants qu'ils soient. (Snape se racla la gorge d'un air sceptique, et évita un coup de pied de Sirius) Si Harry est au courant, je compte sur lui pour tempérer les choses.
Les autres durent reconnaître que le raisonnement tenait debout.
- Néanmoins, la probabilité pour que Malefoy et Potter deviennent raisonnables en présence l'un de l'autre me semble se rapprocher du néant absolu, remarqua sarcastiquement le Maître des Potions.
- J'en connais deux autres dans le même genre, répondit Dumbledore avec l'œil pétillant.
Les deux vieux ennemis échangèrent un regard furieux, pendant que MacGonagall pouffait de rire.
- Je reviens de suite, sourit Percevent en ouvrant la porte.
- Nous revoilà…
Il y avait une nuance de lassitude dans la voix de Percevent, qui franchissait la porte suivit de deux adolescents en train de se lancer des regards dignes de ceux que Snape et lui s'échangeaient dans leur jeunesse, pensa Sirius. Il détailla le jeune Malefoy qui venait le premier, et dont il ne gardait que le souvenir d'un sale morveux arrogant…
Le jeune homme qui se tenait devant lui était de taille un peu supérieure à la moyenne, mince et solide. Son visage pâle et fin n'était plus dédaigneux, mais net et froid, et sous ses cheveux blonds cendrés, ses yeux de granit brillaient avec détermination.
* C'est bien le fils de Malefoy… En moins répugnant, tout de même…*
Et derrière Draco, l'air renfrogné, venait… son filleul. Sirius sentit ses yeux s'écarquiller d'étonnement : depuis un an et demi qu'il ne l'avait pas vu, l'adolescent s'était complètement transformé. Il avait un peu grandi, et sa silhouette toujours aussi mince s'était musclée – le Quidditch, sans doutes. Mais à la différence de Malefoy, clair et droit, son pas était silencieux et souple, mesuré, contrôlé, un peu comme un jeune chat… Sur ce point il différait complètement de James, incroyablement maladroit. Ses cheveux noirs, un peu plus longs, étaient toujours ébouriffés, et ses lunettes rondes glissaient sur le bout de son nez. Tout à coup son regard vert rencontre le sien, et un large sourire éclaira son visage, avant qu'il ne se jette dans ses bras en riant.
- Sirius ! Mais qu'est-ce que tu fais là ?!
- Hey, laisse-moi respirer !
Pour toute réponse, Harry fit semblant de l'étrangler, puis le relâcha, toujours souriant.
- Ca faisait longtemps…
- Ouaip.
Les deux sorciers se sourirent, heureux de se retrouver. Pendant ce temps Draco avait salué Maugrey et Lupin, sans aucune moquerie dans le regard cette fois. Le loup-garou s'étonna des changements intervenus chez le jeune homme, puis fut distrait par Harry qui lui souhaitait bonjour. Celui-là aussi avait changé… Ca ne le rajeunissait pas, tout ça…
- Bien, fit Dumbledore quand tout le monde se fut rassis. Vous allez être les premiers au courant, messieurs.
Les deux ''messieurs'' se regardèrent hargneusement. Il y a des choses qui ne changent pas…
- Nous allons rassembler nos troupes contre Voldemort dans la Forêt Interdite.
Les sept adultes étudièrent avec intérêt la réaction des deux adolescents.
Qui ne tarda pas.
- KekoitroupesheinkiForêtInterdite ?
- Refaites-le-me-le-là ?
Dumbledore inspira profondément.
- Voldemort va bientôt passer à l'attaque. Nous devons nous tenir prêts, donc nous allons réunir tous nos alliés. Ici.
- Ah.
- Bien.
Silence.
- KOUAAAAAAAA ???!!!!!
- Oui.
Les deux élèves semblèrent réfléchir quelques instants.
- D'accord, d'accord, fit enfin Harry. Vous avez sans doutes vos raisons. Mais pourquoi nous le dire à nous ?
- M. Malefoy à cause du rôle qu'il va jouer, et toi parce qu'il faudra l'annoncer aux élèves, et que tu me paraissais assez indiqué pour commencer.
Harry n'écoutait plus, jetant un regard étonné à Draco.
- A ce propos… fit le blond.
- M. le Directeur, l'interrompit Snape, avant de prendre une décision, pourrais-je parler à Malefoy en privé ?
- Bien sûr. Vous pouvez aller dans mon bureau, à côté.
Professeur et élève sortirent.
- Qu'est-ce que c'est que cette histoire avec Draco ? demanda Harry.
- Tu verras bientôt, répondit calmement Dumbledore.
Ils patientèrent, silencieux, pendant cinq bonnes minutes puis la porte se rouvrit sur un Draco un peu pâlichon, et un Snape qui le suivait d'un air sombre.
- Et bien ? demanda le vieux sorcier.
- Je suis toujours d'accord, déclara fermement le Serpentard, ou plutôt décidé.
- Très bien. Harry, Draco va tout comme le Pr. Snape espionner Voldemort. Je veux que tu le soutiennes autant que tu le pourras.
Les deux adolescents se dévisagèrent, Harry stupéfait et Draco l'air mécontent d'être pris pour un gosse. Sirius n'eut aucun mal à comprendre ce qu'ils ressentaient : pour Harry, un étonnement sans borne, puis de l'incrédulité, de la méfiance, et finalement une impuissance rageuse de constater que son pire ennemi faisait quelque chose pour se battre alors que lui-même allait tranquillement rester au Château. Pour Draco, une profonde vexation, de l'énervement, mais peut-être aussi un peu de soulagement à l'idée d'être un peu en paix.
- Je ferai ce que je pourrai, laissa enfin tomber son filleul à contrecœur.
- Dans ce cas nous avons tout réglé…Les premières troupes devraient arriver mi-novembre, le temps de tout mettre au clair. Je l'annoncerai aux élèves fin octobre. Je vous remercie.
Tous se séparèrent. Draco quitta immédiatement la salle. Sirius et Remus allèrent discuter avec MacGonagall de leur installation provisoire au Château. Maugrey et Percevent parlaient rapidement, l'air sérieux Snape restait songeur dans un coin.
Harry se dirigea vers lui.
- Monsieur ?
L'homme lui lança un regard énervé.
- Quoi, Potter ?
- Draco… il va vraiment espionner Voldemort ?
- Que croyez-vous ? Qu'il part à la pêche aux moules ?
Harry sourit légèrement. Il avait fini par comprendre que Snape ne lui en voulait pas personnellement –enfin si, un peu quand même…- , qu'il était juste comme ça. Du coup les remarques sarcastiques passaient beaucoup mieux.
- Nan… c'est juste que… il va avoir du mal, hein ?
Le Maître des Potions se détendit un peu et soupira d'un air fatigué.
- C'est pire que ça… Potter… Réellement, essayer de l'aider.
Les miracles existaient bien sur Terre : Snape était de lui parler comme à un être vivant, et non pas quelque vague méduse atrophiée du cerveau.
- C'est promis.
- Merci.
Harry eut un petit signe de tête et partit rejoindre son parrain.
- Tu bavardais avec Snape ?!
- Ouais. Il est presque normal, en fait, tu sais.
- Justement non, je ne sais pas et je ne veux pas le savoir ! déclara Sirius d'un air buté.
MacGonagall échangea un regard trèèèèèès las avec Remus, et Harry éclata de rire.
- Je suis content de t'avoir retrouvé !
- Moi aussi…
* Même si ça me fait royalement chier de te voir t'entendre avec ce bâtard !*
- De quoi parlais-tu, avec Maugrey ?
Severus et Plume regagnaient leurs appartements. Situés dans le même couloir, bien sûr.
- De l'hiver. Il faudra organiser le camp en conséquence. Mais la Forêt Interdite ne devrait pas être trop inconfortable…
- Mmh…
- Qu'est-ce que tu as raconté à Malefoy ?
- Ce qui l'attendait.
/ - Qu'y a-t-il, professeur ?
- M. Malefoy, avez-vous vraiment une idée de ce dans quoi vous vous engagez ?
Draco pâlit un peu.
- Je… je pense… je ne sais pas…
- J'avais quatorze ans quand j'ai commencé à servir Voldemort, dit Severus impassiblement.
- …
- J'ai tué mon premier homme à quinze ans, à peine. Il est mort sans rien comprendre, en se tordant de douleur.
Les mains du jeune homme tremblaient. Severus continua.
- Voldemort utilise ses sujets de la façon la plus utile qu'il puisse trouver. Et peu importe cette façon. Que ce soit tuer, torturer, mentir, tromper, espionner ou séduire, il ne se fait certainement pas d'états d'âme. Il n'a également aucun remord à punir un MangeMort récalcitrant, cela va sans dire. Vous serez plus bas que le plus bas, Malefoy c'est cette idée qu'il faut retenir.
Son élève ne répondit pas, la tête baissée.
- Voilà. Je ne dis pas cela pour que vous changiez d'avis, de toute façon il est trop tard. Juste pour que vous sachiez.
- Merci…
Draco resta quelques instants silencieux, se tordant nerveusement les doigts. Puis il sourit légèrement, un peu amèrement.
- Ca a du être pire pour vous, non ? Moi au moins je suis prévenu, et on va m'aider à tenir le coup, vous et…
Il fit une grimace.
- … Potter. Mais vous… vous étiez tout seul…
- Ca a été…
Draco leva les yeux et ce qu'il aperçut le fit presque tomber sur le cul : Snape qui… souriait ?
- Il y a souvent quelqu'un, même si on ne s'y attend pas…
Non. Non, Snape ne pouvait tout simplement pas dire cela. Impossible.
- Et puis… avec un peu – beaucoup – de chance, Voldemort n'en a plus pour longtemps.
Le maître des Potions reprit son air sévère et tout redevint à peu près normal.
- Surtout, ne lui montrez jamais que vous le haïssez. C'est tout.
Le jeune homme hocha la tête, la gorge à nouveau serrée.
- D'accord.
- Bien. Voilà. /
- Il ne s'y attendait pas ?
- Si… Plus ou moins…
- Sev'…
- C'est dégueulasse. Personne ne devrait avoir à faire ça.
- Mais, tu l'as fais, toi.
- …
- Jaloux qu'on te pique le rôle de jeune premier ?
Severus sourit tristement et lui passa un bras autour du cou.
- C'était pas drôle.
- On fait ce qu'on peut…
- Merci d'être là, lui souffla l'homme à l'oreille.
Plume se figea et ouvrit de grands yeux.
- C'est un jour à noter dans les annales… Tu ne vas vraiment pas bien, hein ?
- J'en ai marre…
- Ca va aller. Enfin espérons.
Ils demeurèrent un moment enlacés, puis le jeune homme sourit.
- C'est rare que ce soit moi qui te console, remarqua-t-il rêveusement, le nez sur la poitrine de son amant.
- Mmh ? répondit celui-ci, les lèvres perdues dans ses cheveux.
- D'habitude c'est toi mon gros nounours…
Severus leva les yeux au plafond.
- Je ne suis pas un gros nounours.
- Si.
- Non.
- Gros nounours.
- Plume, tu cherche les ennuis…
- Gros nounours.
- NON !
- Gros nounours-euh !
- CA SUFFIT !
L'elfe s'enfuit dans le couloir en criant à tue-tête.
- GROS NOUNOURS-EUH ! GROS NOUNOURS-EUH !
- PLUME !
- GROS NOUNOURS-EUH ! GROS… Tiens, salut Harry. M. Black, M. Lupin... GROS NOUNOURS-EUH! GROS NOUNOURS-EUH !
- PLUUUUUME !!!!
Sirius et Remus tentèrent de se reconnecter avec la réalité tandis que Harry se tapait la tête contre le mur tellement il riait. Remus retrouva le premier l'usage de la parole.
- J'ai cru voir un Mercenaire Ecarlate passer en sautillant, en parlant de je ne sais quel nounours… Et un Severus furibond qui l'appelait par son prénom, articula-t-il machinalement.
- Toi aussi ? Ouf ! Je commençais à me faire peur…
Harry tenta de reprendre son souffle et se retourna vers les deux sorciers… pour s'écrouler par terre en voyant leur tête.
- Une petite explication ? quémanda Sirius.
- Vous n'en parlerez pas, hein ?
- Croix de bois, croix de fer…
- Et bien…
Harry fit une pose.
- … ils vivent ensemble.
Et devant leur air d'incompréhension totale :
- Ou pour parler plus clairement, puisque ça a l'air nécessaire, Plume Percevent est son amant.
Les deux hommes le regardèrent en clignant des yeux.
- Xzzrllkgglrwxx ?
- KikekoiSnapeetetetetPERCEVENT ?!
- Ben oui. Vous comprenez pourquoi je ne me suis pas ennuyé en vacances, hein…
- GROS NOUNOURS-EUH !
- Plume ça suffit.
Severus l'attrapa par les épaules et le plaqua contre le mur.
- Rôôôôhhh ouiii… ronronna l'elfe en passant ses bras autour de son cou. Des projets ?
L'homme sentit son irritation s'envoler devant l'air mutin de son compagnon ses lèvres s'incurvèrent légèrement.
- Je trouve que vous trichez honteusement, M. Percevent.
- Vouaip. Fais-moi ton sourire carnassier, là, celui que j'aime bien… Ouais, comme ça.
Severus abandonna et l'embrassa. Ils se séparèrent une longue minute plus tard.
- Mmh… fit Plume en se rajustant. Ca va être très bien, cette année… Tiens, au fait, je vais revoir tous mes potes ! Charlie, Raven, Killian…
- ...
- Et ma famille, Grand-père, Loulou – je te les présenterai, tiens-, les autres crétins d'Elfes...
- …
- Et mes potes du Cercle, Grand Chef, Melilot, Luke…
- …
- Tu t'en vas où ?
- Très loin. Très.
§§§§§§§§
Neuf années plus tôt :
Les cours avaient commencé depuis quatre semaines et Plume, lui, commençait à mortellement s'ennuyer.
Rien de ce qui était enseigné qu'il ne sache déjà – ou alors, d'une facilité telle qu'il n'avait même pas à prendre de notes. Il avait dû admettre que ces deux années à Poudlard ne lui serviraient strictement à rien, du moins sur le plan des connaissances. Après d'autres aspects entraient en jeu, mais qui n'avaient rien à voir…
Il s'ennuyait en Botanique il s'ennuyait en Sortilèges il s'ennuyait à un point impossible en Défense contre les Forces du Mal : il s'ennuyait en Astronomie il s'ennuyait en Arithmancie les Metamorphoses étaient finalement atrocement faciles inutile de parler de l'Histoire de la Magie l'Etude des Moldus était plutôt sympathique, bien qu'il eut du mal à ne pas rire à certaines reflexions de son professeur, qui semblait avoir du mal à comprendre l'utilité de la foule d'appareil electroménagers que recensait toute digne cuisine de Moldu, et se mélangeait régulièrement les pinceaux entre le lave-vaisselle et le lave-linge restaient les Potions – pas de commentaires – et son pire cauchemar : les cours de Balais.
Cela lui avait semblé très sympathique, au départ. Avant qu'il ne monte dessus. Les Elfes étaient des êtres essentiellement terrestres et naturels l'acte de voler sur un bout de bois mort se révéla totalement inadapté pour le jeune demi-sang. Après une heure à se ramasser gadin sur gadin, il abandonna et se retira, avec l'accord d'un Pr Bibine à la fois désespérée et admirative devant la capacité de son nouvel/ancien élève à tomber de telles hauteurs et à s'en sortir indemne. Depuis, il attendait les heures de vol avec appréhension, et ne tentait de décoller que lorsque cela se révélait vraiment nécessaire – c'est-à-dire lors des exercices notés. C'était à peu près la seule matière où il se montra incroyablement nul, se contentant de roupiller pendant les autres cours, s'excusant d'un charmant sourire lorsque les professeurs lui en faisaient la réflexion
Il avait laissé de côté les Soins aux Créatures Magiques –déjà parfaitement au point- et la Divination –beaucoup trop nébuleux- pour choisir l'Arithmancie et l'Etude des Moldus. Si Killian partageait sa table au premier cours, il se retrouvait seul au second et s'attristait un peu que si peu d'élèves s'intéressent à des gens qui, après tout, formaient la grande majorité de la population de cette planète.
Et puis, en 6ème année, il y avait bien sûr le choix de la spécialité… C'est-à-dire quatre heures de cours en plus dans l'une des quatre matières principales : Métamorphoses, Sortilèges, Botanique et… Potions. C'était bizarrement cette dernière que Plume avait choisi, se retrouvant à passer son jeudi après-midi dans les cachots, élaborant dans la bonne humeur des potions de plus en plus complexes en compagnie d'un Killian aux anges et sous les yeux d'un Snape un peu désespéré
Plume soupira. Joua quelques minutes à construire une jolie pyramide avec les écailles de salamandre restantes. Abandonna. Re-soupira. Envoya quelques boulettes de papiers sur le dos de l'élève devant lui, veillant à ne pas se faire choper par Snape qui surveillait son cachot avec le regard désabusé que le grand Jupiter Olympien devait porter du haut de son trône sur le pauvre petit monde de ces choses ridicules que l'on appelait hommes… Quoique Jupin était lui-même un bon vivant, ce qui ne s'appliquait guère à son remplaçant ici-présent. Il soupira une troisième fois.
- Killy… je m'ennuie, dit-il en tirant sur la manche de son compagnon de Potions.
Le stoïcisme de son nouvel ami était admirable : non content de devoir le supporter à tous les cours de Potions – ce qui se révélait finalement assez supportable, Plume poussant rarement le bouchon trop loin – c'était à présent à lui que revenait la charge de contrôler Raven hors des cours, Charlie lui ayant avec soulagement passer le relais. Les quatre élèves traînaient dorénavant toujours ensemble, ignorant les quelques regards méprisants que leur lançaient certains condisciples d'esprit plutôt étroit qui ne supportaient pas le mélange des Maisons – surtout Serpentard et Gryffondor. Tous les quatre différents mais appréciant pleinement les trois autres.
Charlie était très bon élève : appliqué, intelligent, attentif. Mais parfois un peu fantasque. Son amour des bébêtes – il cartonnait en Soins – désespérait ses parents, qui auraient apprécié de le voir mener une carrière tranquille.
Plume avait été proprement stupéfié des capacités de Raven en DCFM et en Sortilèges : le blond était proprement un génie dès qu'il s'agissait de choisir une formule et de l'appliquer à un cas précis et urgent. Cependant, c'était également les Soins qui gardaient sa préférence.
Leurs qualités contrebalançaient en partie leur profonde nullité en Potions. Il fallait dire que Snape n'était pas très encourageant. Mais grâce à Killian et Plume, ils s'en sortaient.
Le Serpentard avait nonchalamment accepté l'amitié du jeune demi-elfe, et par la suite celle de Charlie et Raven, qui avaient fini par admettre que l'adolescent pouvait être intéressant, surtout de par son don pour inventer de merveilleuses excuses pour les sortir des merdiers dans lesquels ils se fourraient régulièrement.
Avec Plume, souriant et gentil, ils formaient donc un petit groupe sympathique et profondément redouté de leurs professeurs : c'est bien connu, s'il existe encore pire que les élèves chahuteurs, ce sont les élèves intelligents et chahuteurs. Car Raven n'était jamais à cours d'idées, Plume le suivait avec enthousiasme, Charlie avec une joyeuse résignation et Killian rattrapait tout.
Enfin bref. Pour l'instant, les deux autres Gryffondors n'étaient pas présents.
- Et bien occupe-toi, répondit sèchement le Serpentard, le nez dans un bouquin.
* Ressemble de plus en plus à Snape, lui…*
- Ch'ais pas quoi faire…
- Prend un livre et regarde les jolies images.
- Ah ouais. Bonne idée.
C'était ça le problème de finir ses potions en avance… Plume se leva et s'approcha de la grande étagère qui couvrait le fond de la classe, supportant entre quelques tonnes d'ingrédients toute une rangée de livres à l'aspect plus rébarbatifs les uns que les autres. L'adolescent prit le plus gros d'entre eux, retourna à sa place et commença à le feuilleter, la tête ailleurs.
Snape était encore indifférent. Snape était toujours indifférent, son regard, quand il rencontrait le sien, n'exprimant rien d'autre qu'un vide abyssal de toute émotion. Peu encourageant… Merde, quoi. Je veux juste qu'il admette un peu que j'existe et qu'il me connaît…
- Hé, Percevent ! souffla le garçon devant lui. Désolé, mais qu'est-ce que je suis sensé mettre après la salive d'écrevisses ? Si tu me le dis, je t'excuse pour les boulettes de papiers, ajouta-t-il en souriant.
Plume rougit un peu.
- Excuse-moi…
- Pas grave. Alors, dépêche-toi !
Le jeune homme lui souffla rapidement les réponses, puis l'autre hocha la tête avec un rapide ''Merci !'' avant de se remettre au travail. Plume retourna à son livre.
Tiens, ça avait l'air intéressant, ça…
''Le Golem est un être inconscient, obéissant à la volonté propre de son créateur. Il y eut pourtant pendant quelques temps un débat sur le fait de savoir si les Golems ressentaient ou non la douleur, voir les émotions. La discussion se termina au cours d'une grande conférence, où l'on s'aperçut tardivement que l'un des Golems présents s'était assis sur l'un des principaux défenseurs de sa cause…
Les ingrédients sont plutôt simples et peu nombreux. La taille, la puissance et l'aspect physique du Golem dépendent de son créateur (il est très difficile voire impossible de créer un Golem à plusieurs), et de l'ingrédient final qui sert de base à la matière dont il sera constitué…''
Plume termina rapidement le chapitre. Ca avait l'air amusant…
- Les Golems ? Vous vous croyez peut-être capable d'en réaliser un, M. Percevent ? ironisa une voix par-dessus son épaule.
Le jeune homme ferma les yeux, le cœur battant. Pour un peu il pourrait sentir son souffle sur son cou et…
- Je ne sais pas, je n'ai jamais essayé. Vous l'êtes, vous ?
Il avait répondu d'un ton innocent, plantant son regard dans le sien. Snape resta impassible devant les grands yeux palpitants et… provocants.
- Les Golems demande une grande volonté pour les diriger, dit-il posément. Ce n'est pas un jeu.
- J'en suis capable, répondit Plume.
- Très bien, conclut l'homme en se détournant. Nous ferons des Golems la semaine prochaine.
Plume re-vérifia une dernière fois la liste de ses ingrédients. Bon. Il n'avait rien oublié. Son chaudron bouillonnait quand même de façon inquiétante…
Ceux des autres aussi, à la réflexion et même celui de Snape.
Ils se trouvaient dans un cachot différent de celui des autres semaines : celui-ci donnait directement sur l'extérieur, Snape souhaitant qu'ils invoquent leurs Golems dehors.
* Parfait.*
- Est-ce que tout le monde a enfin terminé ? demanda la voix basse et cinglante.
Les élèves bredouillèrent et hochèrent la tête. Sans rien ajouter, le Maître des Potions saisit son chaudron et sortit. Plume quitta la salle en dernier, tentant de ne rien éclabousser.
Ils s'installèrent en rond sur la pelouse du parc. Quelques élèves, curieux, vinrent observer le groupe de masochistes qui décidaient librement de passer quatre heures en plus par semaines avec Snape.
- Bien. Vous mettez votre dernier ingrédient en prononçant la formule. Et vous n'oubliez surtout pas de lui inscrire son nom sur le front dès qu'il sort du chaudron – si jamais il sort.
C'était par cette marque que son créateur imposait sa volonté au Golem. Un peu comme la Marque de son père, pensait Plume, qui ornait son propre bras et celui de Snape…
- Commencez, Zachary.
Le Serpentard s'avança et jeta une poignée de terre dans son chaudron en prononçant la formule.
- Mentis animique vir.
BOUF !
Un petit bonhomme marronnâtre jaillit du récipient et se carapata vers la Forêt Snape étendit vivement la main et la créature se ramassa par terre.
- Le nom ! dit sèchement le professeur.
Killian se précipita et grava quelque chose sur le front du bonhomme qui se tortillait. On aurait dit de la boue sèche. Snape baissa la main le bonhomme resta immobile.
- Bien. Maintenant, imaginez-le en train de marcher.
Killian plissa les yeux. Le Golem frémit, vacilla et tomba à genoux.
- Concentrez-vous !
La poupée se redressa, tituba un peu, fit trois pas, puis tomba de nouveau. De même que Killian qui se laissa tomber par terre en soufflant.
- Ca suffit.
Snape fit un autre geste et le bonhomme se désagrégea.
- Pas mal.
- Je… C'est épuisant.
- C'est normal : votre volonté se retrouve partagée en deux pour ceux qui en ont peu… C'était déjà bien. Je vous mets quatorze.
Killian en resta la bouche ouverte : les compliments de Snape étaient extrêmement rares, pour ne pas dire inexistants. Et pour cette raison, ils avaient beaucoup de valeur.
- Bravo ! lui sourit Plume. Un jour à marquer d'une pierre blanche… C'est si difficile que ça ?
- C'est exactement ce qu'il dit : tu es deux personnes à la fois. Ce qui est dur c'est de… comment… de te coordonner. D'arriver à distinguer tes deux toi.
Plume commença à légèrement s'inquiéter.
Les élèves enchaînèrent les uns après les autres, obtenant des Golems qui variaient d'une sorte de petite poupée à une masse informe ne parvenant même pas à sortir du chaudron. Aucun n'égala celui de Killian. La plupart utilisèrent de la terre ou de la glaise, un Serdaigle tenta même de la pâte à modeler, sans résultat probant.
- Il ne reste plus que vous, M. Percevent.
Snape l'observait attentivement. Pas de rictus ironique cette fois. Plume en fut frappé. On aurait qu'il était intéressé. Impatient. Confiant ? Son angoisse s'envola. Snape acceptait tacitement qu'il lui montre de quoi il était capable. Et pour ça, Plume aurait fait le tour du monde – en transplanant ça pouvait aller très vite.
Le cœur léger, prêt à n'importe quoi, il fouilla dans la poche de sa blouse blanche Moldue – ça faisait classe…- et en sortit son Dernier Ingrédient : chewing-gum goût fraise. Il préférait la menthe, mais rose c'était plus joli. Il le mit dans sa bouche et commença à mastiquer énergiquement.
- Eskchgugez-moi, Profecheur, je fous promet gue gest exgepzionnel…
Les lèvres de Snape s'étirèrent. Cela ressemblait plus ou moins à un sourire amusé.
Plume récupéra proprement le chewing-gum et le laissa tomber dans la marmite. Plouf.
- Et pour le nom ?
Le jeune homme adressa un sourire à son professeur, et ajouta négligemment l'étiquette. Snape hocha la tête.
Plume fit face au chaudron : c'était bien beau cette petite mise en scène, mais fallait que ça marche. Bon.
Ca allait marcher.
Il ferma les yeux et inspira.
Et laissa l'/autre/ émerger.
Oh, juste un peu ! Rien que le bout du nez. De quoi pouvoir affronter trois loups-garous à mains nues, mais pas plus, car si l'/autre/ prenait le contrôle…
C'est parti.
Concentrer énergie, cette énergie qui lui faisait tourner la tête, la placer dans sa voix.
- Mentis animique vir !
Il avait crié sans s'en apercevoir.
Il y eut un bouillonnement rosâtre dans le chaudron. Répugnant. Et une tête émergea. Une énorme tête.
Plume s'avança, étrangement détaché. Il saisit sa plume et griffonna le nom du Golem sur l'envers de l'étiquette Hollywood qui ornait son front. Puis il recula de quelques pas.
Le Golem se déplia et s'étira lentement il enjamba le rebord du chaudron et se planta fermement sur le gazon. Il mesurait bien trois mètres de haut à la surface de son corps, des bulles de chewing-gum explosaient régulièrement, et de longues traînées collantes dégoulinaient à ses pieds.
Plume cligna des yeux.
Puis sourit.
- MWAAAAHAAAAAHAAAAAAAAAAAAH !!!!!!! Il est super ! Je vous présente Fifi !! claironna-t-il en sautillant sur place.
Il se retourna : plus personne. Ils étaient tous partis se planquer dans les cachots.
- Maiheu…
- C'est assez… spécial.
Snape regardait la chose d'un air intéressé.
- Faites-le marcher.
Plume se concentra.
Marche.
Le Golem fit un pas.
Marche.
Un autre pas.
Ben c'est facile ! Cours !
Le Golem fit quelques foulées sur la pelouse.
Marrant. Demi-tour. Saute !
BOUM !
Danse la macarena !
Le gigantesque bonhomme commença à se trémousser, envoyant des giclées de chewing-gum à travers la pelouse. Plume, concentré, entendis vaguement des hurlements de rire derrière lui.
Fais la roue ! La galipette !
C'était du délire. Des élèves apparaissaient aux fenêtres du Château et se montraient le… le chose en train de se rouler dans l'herbe.
- Il va rester scotché…
Plume se retourna : Snape, les yeux pétillants, se frottait pensivement le menton.
- A vous Monsieur !
Ils échangèrent un regard, puis Snape balança quelque chose dans son chaudron et prononça la formule.
Le Golem qui se dressa dépassait facilement les quatre mètres de haut. Son corps était formé d'une masse grouillante, entre l'orange et le marron, luisant humidement. Plume s'approcha, fasciné.
- Des limaces ?
- La matière elle-même peut être vivante, déclara le Maître des Potions.
Le Golem se mit en marche d'un pas assuré.
* Comme Snape quand il marche.*
Il était vraiment impressionnant. Fifi faisait pâle figure, à côté. Plume se mordit les lèvres : ça n'allait pas se passer comme ça…
FJLOCK !
Une grosse giclée de chewing-gum s'écrasa sur l'épaule du Golem n° 2. Snape se tourna vers son élève, qui lui fit un sourire aussi dégoulinant que son monstre à lui.
- Excusez-moi, je ne maîtrise pas encore très bien…
Sans prévenir, Golem n°2 bondit brusquement en direction de son arroseur. Plume eut un réflexe et Fifi se baissa pour éviter le coup de pied.
* Ouais, un combat ! *
Elève et professeur se regardèrent à nouveau, puis, sans une parole, s'assirent côte à côte sur l'herbe et fixèrent leurs créatures respectives qui patientaient, face à face.
Et ils commencèrent à se battre.
Plume se laissa totalement absorber dans son Golem. Les sensations étaient étranges : pas de douleur, pas de sensations de toucher, juste les vibrations des chocs que lui assenait son adversaire. Il prit petit à petit le contrôle du corps caoutchouteux, l'assimilant aux sien. Les gestes lui venaient assez facilement : depuis son enfance, il s'était battu, entraîné par les MangeMorts – dont Snape – puis par les Elfes. La violence était une façon de dominer la sauvagerie de l'/autre/. Une sorte de compromis. Et puis, il aimait se battre.
Fifi était plus petit, mais plus rapide. Golem n°2 était gêné par sa grande taille, mais ses gestes étaient précis et nets.
* Comme Snape. Ca donnerait probablement la même chose, si nous nous battions vraiment.*
Quoique… Non. Cela ne ferait pas le même effet.
Il n'était pas étonné par la maîtrise du combat de l'homme, autrefois entraîné comme tous les MangeMorts à se battre aussi bien magiquement que physiquement. Il avait gardé quelques bons restes… Si ça se trouvait, il continuait même à s'entraîner ?
Plume, arrête de penser à ton prof torse-nu et concentre-toi.
Coup de pied, esquive…
- QU'EST-CE QUI SE PASSE ICI ?!!
Les deux Golems s'immobilisèrent en une pose grotesque.
Dumbledore arrivait au pas de course vers les deux combattants qui se relevèrent vivement il semblait stupéfait et surtout hors de lui.
- Non mais qu'est-ce que vous êtes en train de faire ?!
Snape prit un air innocent peu crédible – n'ayant pas vraiment le physique du petit Gryffondor pur et naïf.
- Des travaux pratiques, bien sûr. Il y a un problème ?
Plume se mordit les lèvres.
Dumbledore secoua la tête d'un air incrédule, puis, après un coup d'œil aux deux Golems figés au milieu de la pelouse, se tourna vers Plume.
- M. Percevent.
Ledit Percevent se recomposa un visage sérieux
- Monsieur ?
- C'est vous l'auteur de ce Golem ?
- Ah, non, celui-ci appartient au Pr Snape le mien est celui qui dégouline un peu plus loin, répondit l'adolescent avec gravité.
Il vit du coin de l'œil Snape porter sa main à sa bouche, cachant un sourire.
Quelle journée magnifique…
Le ton furieux du Directeur le ramena sur terre.
- C'est du pareil au même. Où avez-vous la tête, tous les deux ? Vous pensez qu'il est prudent d'attirer l'attention des élèves sur Plume ? Certains professeurs n'auraient même pas la puissance de générer un Golem comme celui-ci !
Il n'avait vraiment pas l'air content. Plume regarda avec surprise le gentil et bon directeur s'énerver sérieusement. Même Snape semblait étonné.
- L'existence de Plume n'est pas un secret, continuait Dumbledore d'une voix froide. En s'interrogeant un peu, il n'est pas difficile de déduire qui il est et d'où il vient. Je ne veux pas à cause de vos imbécillités devoir rendre compte de sa présence ici à deux centaines de parents en colère !
Ils avaient peut-être poussé le bouchon un peu loin, reconnu l'adolescent en lui-même. Mais pas au point de s'énerver comme cela. Il s'aperçut qu'il avait instinctivement fait un pas vers Snape.
- M. Percevent, ramassez vos affaires et retournez au Château si l'on vous interroge, répondez que vous avez apprit ce sortilège chez les Elfes ! Severus, débarrassez-moi le plancher de ces deux trucs. Et je veux que, en aucun cas, l'on puisse se douter que vous vous connaissiez déjà ! C'est déjà assez difficile comme cela ! Vous m'avez compris ?
Les deux fautifs acquiescèrent sans un mot, et Dumbledore attendit qu'ils lui obéissent avant de s'en retourner au Château, renvoyant les élèves en cours.
- Je n'avais jamais vu Dumbledore si en colère.
Raven avait précisément mis le doigt là où ça démangeait horriblement, se dit Plume.
D'après ses amis, tout de même élèves à Poudlard depuis cinq bonnes années, le Directeur avait toujours présenté un visage tranquille et souriant, un peu farfelu certes, mais incapable de critiquer ou de mettre mal à l'aise. Du moins ce qu'ils en avaient vu.
Après tout, peut-être Dumbledore était-il plus sévère en privé, mais la veille c'était tout de même devant l'Ecole entière qu'il s'était montré furieux.
- Qu'est-ce qu'il vous a dit ?
- Il était pas content pour ses pelouses. Non, sérieusement, on a un peu perturbé les cours…
- Oui, mais pas à ce point…
C'était vrai. La colère du vieux sorcier laissait plume dubitatif. Dumbledore avait eut la… non, pas la pitié, la bonté d'âme de lui laisser sa chance en l'accueillant ici, et lui avait même proposé de l'aider. Toujours disponible, toujours serviable. Jusqu'à hier. Qu'est-ce qui avait pu l'irriter à ce point ?
Le fait que Plume se soit un peu donné en spectacle ? Mmh… Il suffisait de dire que c'était un truc elfique – ce qu'il avait fait et qui était très bien passé. Alors quoi ? C'était dommage… Le mécontentement du Directeur lui avait un peu gâché ses ''retrouvailles'' avec Snape… Car il s'agissait bien de retrouvailles : ils avaient rigolé ensemble, comme auparavant… ( dans la mesure où Snape savait rigoler).
C'était peut-être ça. Dumbledore ne souhaitait pas que cela redevienne comme avant. Mais si c'était bien là la raison, Plume ne la comprenaient pas.
En tous les cas… leur petite chorégraphie avait remporté un franc succès. Les élèves de Gryffondor avaient supplié Plume de leur apprendre le truc (''Mais y'a pas de truc, je vous dis ! C'est elfique !''), les filles se mettaient maintenant à papoter furieusement sur son passage (ce qui le mettait très mal à l'aise, peu habitué à l'admiration), et les rumeurs les plus folles couraient sur la santé mentale de leur prof de Potions, brusquement remonté dans l'estime des élèves. La raison n'en était pas seulement son magnifique Golem/limace, mais surtout le fait d'avoir balancé Fifi dans le Lac : les bulles de chewing-gum à présent produites par le Calamar Géant offraient une agréable distraction aux cancres laissant leur regard vagabonder par les fenêtres.
- Finalement, c'est vrai que Snape peut être amusant, convint rêveusement Killian un peu plus tard en cours d'Arithmancie, sans prêter attention au Pr Vector qui s'escrimait à démontrer l'inégalité de Bienaymé-Tchebichev.
- Ah ! Tu vois ?
- Où est-ce que t'as appris à te battre comme ça ?
- …mmh… chez les Elfes…
Heureusement le Serpentard ne prêta pas attention à la réponse évasive de son nouvel ami, détaillant d'un regard froid la démonstration de son professeur.
- Et Snape ? Il se bat bien… remarqua-t-il distraitement.
- Ch'ais pô…
* Chez les MangeMorts…*
- C'était spectaculaire, votre truc.
- Ah ouais ? Killy, je comprends pas le passage de la ligne trois à la ligne quatre.
- Normal, il y a une erreur.
- Ah. On lui dit pas ?
- Non. C'est plus marrant comme ça.
Ils observèrent un moment Vector se dépatouiller avec ses probabilités de valeurs absolues, puis sourirent quand il retrouva son erreur.
- On est méchant.
- Moi j'ai le droit, je suis à Serpentard. Mais ça va ternir ta réputation… commenta tranquillement l'adolescent, repoussant les cheveux lunaires qui lui chatouillaient le nez.
- Tant mieux. Au fait, j'aime bien ta coupe de cheveux, ça me fait penser aux Porcs-épicristals des forêts elfiques…
- Je dois prendre ça comment ?
- C'est un compliment, bien sûr.
- Bien sûr.
DRIIIIIINNNNG !
- Vous me ferez pour la semaine prochaine les feuilles d'exercices d'application que je vous ai distribuées au début du cours. Ce sera tout, bonne semaine !
- Il se débrouille bien, pour une première année comme prof titulaire, commenta Killian. Je suis sûr que…
- PLUUUUUUME !!! KIKKKKKKIIIII !!!!
- Raven. Je hais positivement ce surnom.
- Nini alors ?
- Killian.
- Bon, ok. Va pour Killian. C'était bien, vous ?
- Pas mal, sourit Plume. Dites donc, vous avez l'air de vous être bien amusés ?
Raven et Charlie (revenants de Soins aux créatures Magiques) semblaient extenués et leurs vêtements en lambeaux laissaient deviner de magnifiques écorchures leurs visages abordaient un air bêtement radieux.
- Bon, on y va, soupira Killian.
Ils descendirent en bavardant jusqu'aux cachots, Raven taquinant Plume sur le troupeau de filles qui le suivait à présent des yeux d'un air intéressé.
- … pas marrant.
- Ca ne te plaît pas ? s'étonna franchement Charlie.
- Ca me met mal à l'aise, déclara le jeune homme d'un air gêné.
L'apparition de la porte du labo de Potions et surtout la silhouette de Snape qui s'y encadrait l'abstint de s'expliquer.
- Whitewinter, Weasley, Percevent et même Zachary : 10 minutes de retard, 10 points en moins. Chacun.
Puis l'homme fronça les sourcils.
- Que vous est-il arrivé, Weasley ?
- Soins aux Créatures magiques.
- Oh. Zachary, emmenez-le à l'infirmerie… et M. Whitewinter, par la même occasion. Mais la punition tient toujours.
Puis il rentra dans le cachot sans ajouter un mot. Plume le suivit, referma soigneusement la porte derrière lui et alla s'asseoir à une table au fond de la classe.
Snape avait gagné son bureau et toisait maintenant ses élèves d'un œil froid.
- NON, il n'entre pas au programme général de Potions de sixième année l'étude et la réalisation des Golems. Si vous vouliez participer à la séance d'hier, il vous suffisait de vous inscrire au cours de Potions appliquées en début d'année. Maintenant prenez vos affaires et notez cette formule.
Les élèves poussèrent des soupirs déçus et se mirent au travail sans enthousiasme.
Plume prit rapidement note de sa belle écriture illisible de la liste des ingrédients.
* Mmh… je m'ennuie tout seul…*
Les cachots étaient à dix bonnes minutes de l'infirmerie. Les autres ne reviendraient pas tout de suite… Plume transféra la potion terminée en quatre minutes vingt-trois secondes dans une bouteille, rinça ses ustensiles et se rassit, nichant son visage dans ses bras croisés et bien décidé à piquet un petit somme. La sieste était son péché mignon.
SCHPLAT ! Un paquet de feuilles venait d'atterrir devant son nez. Avec la main de Snape dessus. Et le bras qui allait avec. Et l'épaule. Et le torse. Et la gorge. Et…
- Percevent. Vous m'écoutez quand je vous parle ?
- Excusez-moi.
- Certainement pas. Puisque vous n'avez rien à faire, résolvez-moi ce problème.
Puis le MangeMort se détourna vivement et retourna à ses occupations - en l'occurrence un Serpentard et sa potion verte - , semblant presque s'enfuir… Plume sourit bêtement, puis saisit les trois bons kilos de feuilles qui l'attendaient.
Ouhlàlà…
''De l'influence des plumes de Sphinx sur les mutations embryonnaires des Yokhos d'Honshu.''
Certes.
Quelle idée tordue… Il feuilleta le dossier, s'attardant sur les schémas des embryons – segmentation, gastrulation, neurulation, organogenèse… - et les comptes-rendus des 37 ½ expériences réalisées.
* Comment ça ½ ?*
Rassemblant ses souvenirs sur les Sphinx et les Yokhos, il se saisit d'un crayon et mit son cerveau en marche.
DRIIINNNG !
- C'est bon.
Les élèves s'éclipsèrent rapidement avec ravissement, avides de mettre le plus de distance possible entre leur professeur de Potions et eux.
- Tu viens, Plume ?
- Je finis ça et je vous rejoins, répondit distraitement le demi-elfe.
* L'action inhibitrice des barbules des plumes sur l'induction du mésoblaste par l'endoblaste serait démontrée par…*
- T'en as pour combien de temps ?
- Euuuh… chais pas… une demi-heure, peut-être plus…
Raven soupira.
- On t'attend pas pour manger, alors.
- Ouais, ouais, c'est ça… bon appétit…
Les trois amis haussèrent les épaules et quittèrent le cachot.
* L'inhibition du centre de Nieuwkoop entraînerait alors…*
Snape ressortit de la Réserve et lui jeta un coup d'œil surpris.
- Qu'est-ce que vous faites encore là, Percevent ?
- Mmh ? Oh, je termine votre problème, répondit Plume sans lever les yeux.
- Vous continuerez ça au prochain cours, soupira l'homme. Allez manger.
- Non, non, j'ai presque fini… A moins que je ne vous dérange ? demanda-t-il tout-à-coup, plantant ses yeux interrogateurs dans les siens.
Severus s'entendit bêtement répondre que non, et le jeune homme, satisfait, replongea dans ses feuilles. Le jeune professeur l'observa un instant se mordiller les lèvres d'un air concentré, puis secoua la tête et s'assit à son bureau, empoignant un paquet de copies.
Ils travaillèrent un bon moment en silence.
Au bout d'une demi-heure, l'homme entendit son élève pousser un soupir satisfait et reposer son crayon.
- Qu'est-ce que vous faites ? demanda une voix curieuse.
/ - Qu'est-ce que vous faites ?
- Une pommade pour les tiques.
- C'est pour Chostakovitch ?
- Oui.
- Chouette ! Merci beaucoup !
- Surveille un peu plus ton chat, au lieu de traîner dans mes jambes.
- Bien M'sieur ! /
Severus revint sur terre et écrivit un magnifique zéro.
- Je corrige les résidus de fosse septique que m'ont rendu vos collègues tout à l'heure.
Un éclat de rire joyeux lui parvint, et il sentit lui-même ses lèvres s'incurver. Il leva les yeux, essayant de se ressaisir.
- Vous avez terminé ?
- Oui, M'sieur… professeur !
Severus ne releva pas et s'approcha de la table derrière laquelle Plume l'observait attentivement. Il s'empara de la dernière feuille de raisonnement de son élève, et alla directement à la conclusion.
Le résultat était parfait. Plume avait réussi en trois heures ce que les étudiants de Médico-magie de seconde année mettaient deux fois plus de temps à résoudre.
- Le résultat est juste. Vous aviez déjà étudié l'embryologie ?
L'adolescent hésita.
- Je piquais des livres dans votre bibliothèque, quand j'étais petit.
Severus ne répondit pas, faisant semblant de parcourir les autres feuilles de notes, qui son cerveau se refusait catégoriquement à déchiffrer. La question était un perche, une sonde, une main tendue, tout ce que vous vouliez – et elle le dérangeait terriblement. Depuis un mois qu'il tentait de considérer le demi-elfe comme un simple élève, il en était venu à concevoir une tension croissante atrocement irritante. C'était comme… comme un chien qui gratte derrière la porte et que, pour le principe, vous refusez de laisser entrer, tout en sachant que le voir s'ébrouer dans la maison et vous sauter au cou vous rendra stupidement heureux.
Mais Severus n'avait jamais eut de chien, et ne savait trop que faire.
Alors il ouvrit la porte.
- Je sais. Je n'ai d'ailleurs jamais retrouvé la page 297 de mon manuel de dissection.
Il n'aurait jamais pensé pouvoir rendre quelqu'un aussi heureux par une simple phrase qui n'était même pas un compliment.
- Je me rappelle ! s'exclama Plume. C'était le schéma en couleur d'une grenouille cavité viscérale ouverte. J'aimais beaucoup les petits intestins marron clairs, c'était joli… Je l'ai même peut-être encore… Excusez-moi pour votre livre !
Severus se sentit sourire, puis, avisant les yeux brillants et confiants, se dit que le chien allait bientôt envahir toute la maison, et qu'il ferait bien de fermer quelques portes.
- J'en ai racheté un autre. Maintenant, je pense que vous devez avoir autre chose à faire ? demanda-t-il plus sèchement.
- Oh… Oui, excusez-moi.
Plume, plus calme, rassembla ses affaires, lui rendit son dossier, et se dirigea vers la porte, sans le regarder. Il se retourna cependant, la main sur la poignée, et hésita avant de lui adresser un :
- Bonsoir, professeur.
Ce à quoi Severus répondit :
- Bonsoir, Plume Percevent.
L'homme se maudit quand le visage fin de son élève s'illumina d'un immense sourire, juste avant qu'il ne sorte.
A suivre.
