Titre : Sangs, premier trimestre, chapitre VIII.

Auteur : Lychee.

Source : les quatre premiers tomes de HP. Les QUATRE premiers en ce qui concerne la mort de Sirius (dont nous ne tiendrons par conséquent pas compte), un peu du cinq pour le reste, mais sans plus…

Disclaimer : Pas à moi, sauf : Plume, Killian, Raven, tous les démons-dragons, Luke, le Grand Chef, Melilot, et les dragons, Fougère, Ebène, Améthyste, et pis les Elfes, Griffe, Louve, et pis je crois que c'est tout…

Genre : oui ben si vous en êtes au chapitre VIII vous devez commencer à connaître… On arrive vers la fin du trimestre : le chapitre suivant sera LE lemon, hephephep ! pas de protestations indignées, ceux que ça n'intéresse pas ne lisent pas et n'embêtent pas les autres un point c'est tout. Les autres… dans mes bras mes frères (sœurs, plutôt… ^__^). Déjà que, vous allez le voir, la relation entre nos deux z'héros n'est pas des plus romantiques (Du SM ! Du SM ! Ah ben nan désolée… une autre fois peut-être ?).

Bon pendant que j'y suis papotons un peu : M-E-R-C-I à mes chers reviewers, qui sont souvent les mêmes ce qui me fait très plaisir (Prosternez-vous, fidèles ! Non-non je plaisantais… hé hé…).

On m'a dit que Plume avait une très bonne définition de Sev (c'est normal, c'est la mienne… *se reçoit une enclume sur la tête de la part des lecteurs/trices excédé(e)s*… d'accord, je me tais !), et… ben voilà… merci quoi.

Sangs, premier trimestre.

Chapitre VIII

Réveillons.

§§§§§§§

Après quelques semaines, les habitudes s'installèrent. Les élèves cessèrent de chercher à lier connaissance avec les membres de ce qu'on appelait désormais la Grande Armée (quelques Mercenaires complètement bourrés avaient entrepris un soir de composer une chanson sur le thème, et le nom était resté), demeurant cependant dévorés de curiosité Les Mercenaires, sorciers et Elfes cessèrent de se dévisager méchamment et de se taper dessus et Grand Chef et Griffe, après avoir empêché deux-trois massacres, parvinrent même à se supporter. Bientôt, les allers-retours entre le Château et la Forêt se firent moins importants, et les combattants commencèrent à sérieusement s'entraîner et les élèves à étudier avec le peu d'entrain qui les caractérisait.

Chez les apprentis-sorciers, l'atmosphère était étrange, ou plutôt perplexe. Le fait qu'une armée campe à exactement deux kilomètres de leurs dortoirs les rendait étrangement distraits. Le plus troublant restait sans doute que cette proximité n'avait absolument aucune influence sur leurs journées de cours : ils continuaient à travailler presque normalement, dressant de temps en temps l'oreille quand un cri rauque jaillissait de la fondation des arbres, ignorant s'il s'agissait d'un dragon ou d'un soldat qui avait déplu à son instructeur (les deux cas semblaient tout autant probables). Cette quasi-absence de liens entraînait d'ailleurs une certaine frustration chez les quelques adolescents bourrés d'hormones, prêts à en découdre, qui devenait de plus en plus songeurs durant les cours.

Dumbledore commençait à se faire des soucis concernant cette inattention chronique et l'atmosphère de plus en plus échauffée qui régnait dans l'Ecole mais l'enthousiasme des élèves fut considérablement refroidi au cours du dîner de réveillon qui aurait lieu quelques jours plus tard…

Au début de décembre, une assemblée regroupant la quinzaine de personne qui dirigeaient les opérations fut organisée. Les trois respectables meneurs des trois partis concernaient présidaient dignement.

- Ils ont fondé un club du troisième âge ?

Une jolie statuette de chat égyptien, qui trônait une seconde auparavant sur la table, s'envola de la main du vieux chef elfe en direction de la tête de Raven.

- Whitewinter, grommela Griffe, le fait que la Guilde des Assassins vous ait choisi pour la représenter ne vous autorise pas à manquer de respect à vos vénérables dirigeants !

- Où ça ?

On calma Griffe avec grand mal et Plume jeta un coup d'œil menaçant à son ami, qui haussa les épaules. Remus regardait tout cela d'un air intéressé : d'après ce qu'il savait, une vieille rancune opposait les Assassins et les Elfes.

Les Assassins, en vérité composés d'une grande famille comportant plusieurs branches dans le monde entier, avaient, de mémoire de sorcier, toujours existé, bien que férocement niés par les gouvernements qui s'étaient succédés tout au long de l'Histoire dans le monde entier. A l'origine de ce léger point de controverse entre la population sorcière et leurs dirigeants, se trouvait un sorcier du nom de Nefrit Amidès, né en Egypte quelques 2600 ans plus tôt. De père grec et mère égyptienne, Amidès, incroyablement doué et instruit des deux magies respectives de ses parents, avait développé et cultivé des facultés impressionnantes dans l'art de se débarrasser des usuriers perpétuellement à ses trousses. Ce par quoi il s'était fait rapidement repérer par le ministre de l'époque, qui lui avait aimablement proposé de travailler pour son divin pharaon. L'offre était plutôt catégorique et il ne refusa pas, se maria quelques années plus tard, et ainsi débuta une longue lignée d'assassins et de chasseurs de primes, au métier et aux références tout à fait honorables, qui acquit rapidement un important pouvoir et s'étendit au travers du monde, avec discrétion mais aussi solidité.

Leur rivalité avec les Elfes qui, tant que cette famille ''sombre'' demeurait cachée et ne venait pas leur faire d'ombre, n'y portaient pas attention, datait d'une mémorable bavure au cours du XVIème siècle, de laquelle résulta la mort d'une dizaine d'Elfes et d'autant d'Assassins, sans qu'on ait jamais découvert la cause de l'accident. Depuis lors, un Assassin rencontrant quelque Elfe au court d'une mission se laissait souvent emporter par son enthousiasme, et il arrivait qu'un héritier de famille sombre, parti dans les régions forestières, ne revienne jamais.

Dumbledore attendit que tous se soient calmés, puis inspira profondément.

- J'ai de bonnes et de mauvaises nouvelles à vous annoncer : par lesquelles dois-je commencer ?

- Les bonnes, c'est plus sympa, grogna Grand Chef.

- Très bien. Les Trolls ont laissé tomber Voldemort…

Des sourires authentiquement ravis apparurent sur le visage des présents (sauf les Elfes, bien entendu).

- Son armée se retrouva diminuée de 200 Trolls, compléta le vieux sorcier.

Il y eut des sifflements appréciatifs.

- Pôv Voldy, ricana Raven, déclenchant quelques grimaces ou quelques sourires amusés, au choix.

- Les mauvaises, maintenant, continua Dumbledore. On a aperçu Dimus Daelmanis en Angleterre, à Pré-au-Lard pour être exact.

Ils furent cinq à froncer les sourcils (Minerva, Griffe, Louve, Severus et Plume), trois à écarquiller les yeux (Remus, Maugrey et Grand Chef), et cinq à le dévisager poliment (Sirius, Raven, Killian, Luke et Charlie).

- Daelmanis est une légende ! protesta le Chef des Mercenaires.

- Pas vraiment, non. Nous sommes plusieurs à l'avoir… hem… connu, répondit Dumbledore.

C'était bien la première fois que Remus voyait rougir Dumbledore Plume aussi rougissait, remarqua-t-il… et Severus aussi…

Non…

Il gloussa.

- Quoi ? demanda Sirius en se tournant vers lui. C'est qui Daelmachin ?

Remus ne répondit pas, hoquetant hystériquement, pendant que les quelques autres au courant de la légende et surtout de la réputation du personnage principal commençaient à sourire largement, leurs yeux incrédules passant de l'un à l'autre des trois sorciers (enfin surtout Dumbledore et Severus) écarlates qui détournaient le regard.

- Pourquoi y'en a qui sont tout rouges ? demanda innocemment Raven. C'est qui Daelmanis ?

- Ta gueule, débile, marmonna Plume, pas trop à son aise non plus.

- Daelmanis, commença Maugrey avec un sourire torve, est un puissant démon immortel fouteur de merde, dont la spécialité est de débarquer quand tout commence à aller mal. Il repère alors les principaux personnages-clefs du moment, s'empare d'eux, et les manipule à sa guise pour provoquer des catastrophes. Il faut savoir qu'il est trèèèèèès séduisant… C'est assez bien résumé, Albus ?

Le vénérable Directeur essaya de se cacher dans sa barbe.

- Il les manipule comment ? continua Raven en ouvrant de grands yeux d'une pureté absolue, pendant que les autres s'étouffaient en quintes de toue insurmontables.

- RAVEN T'ES CHIANT !!! s'exclama Plume tandis que tous laissaient tomber et éclataient de rire.

- Non… murmura Sirius en dévisageant les trois sorciers qui lui faisaient face. Professeur… quand même…

- Arrête, Siry, sourit Remus. Après tout…

Luke s'écroulant de rire sur lui l'empêcha de continuer. L'assemblée était assez joyeuse, remarqua-t-il : Raven et Griffe se soutenaient mutuellement, Killian en était même à pouffer, et un sourire apparaissait sur les lèvres de la jolie cousine de Plume. Louve…

- Bon, je peux continuer ? se renseigna sèchement Dumbledore.

Minerva MacGonagall lui tendit un dossier en pouffant.

- Merci, dit-il en lui jetant un regard furieux. C'est fini, oui ?!

Les autres se turent avec un dernier hoquet.

- Comme je disais donc, Plume a aperçu Daelmanis, et il vient pour Harry.

Houlàlà… Sirius ne rigolait plus, pensa le loup-garou en jetant un coup d'œil à son ami.

- Excusez-moi, intervint Maugrey à l'adresse du jeune professeur. Comment connaissiez-vous Daelmanis ?

Plume hésita.

- Parce qu'il est ce qu'on pourrait appeler un personnage-clef, répondit Dumbledore à sa place. Plume… ?

Le jeune homme hocha la tête.

- Je suis le fils de Lord Voldemort, dit-il simplement à l'adresse de Remus, Sirius et le vieil Auror qui le regardèrent comme s'il était fou.

- Ca fait un choc, hein ? demanda complaisamment Charlie.

- A ce rythme-là, toute la planète sera bientôt au courant, marmonna Griffe. Bon, on continue ?

- Hep là, minute ! balbutia Sirius. Comment ça ''Je suis le fils de Lord Voldemort'' ?

- Il faut te refaire le schéma des petites abeilles et des petites fleurs, Black ? demanda suavement Severus.

Griffe rigola.

- Je t'aime bien, mon gendre !

- Merci, beau-papa, répondit le gendre imperturbable.

Remus commençait sérieusement à se demander s'il n'avait pas par hasard inhalé quelque vapeur de champignons hallucinogènes.

- Je n'approuve pas mon père, dit doucement Plume. En fait, je ne l'ai pas vu depuis mes neuf ans.

- Ce que je ne comprends pas, intervint Raven, c'est que… enfin bon, c'est plus un secret, tu es avec Snape… mais Snape est un MangeMort. Est-ce que Voldemort sais… ?

- Bien sûr qu'il le sait, intervint Severus d'un air excédé. Pensez-vous réellement qu'il aurait été possible de le lui cacher ?

- Excusez-moi, mais je ne suis plus vraiment, là, intervint poliment Remus. Pourrait-on avoir une explication ?

On raconta donc de bon cœur au loup-garou, au fugitif et à l'Auror éberlués les mésaventures du couple atrocement gêné. Les commentaires qu'ajoutait Raven ne semblaient pas améliorer l'humeur du Maître des Potions.

- Bon, ok, dit enfin Sirius. Je comprends le qualificatif de personnage-clef…

* Moi je comprends où ils se sont dégotés l'un l'autre* pensa Remus avec amusement.

- … tu disais, Sevy-chou, que Vous-Savez-Qui le savait ? continua son ami.

Une main élégante mais également trop musclée à son goût le saisit à la gorge et deux yeux noirs s'approchèrent dangereusement des siens.

- Ne pense même pas à recommencer, souffla doucement le Sevy-chou.

- Erk…

- C'est d'accord ?

- ... gnnnnnnh!

Les douze autres regardèrent sans piper mot le MangeMort le relâcher lentement. Un léger très long silence plana. Puis…

- Il est classe ton mec, Plume.

- Ben oui, qu'est-ce que tu crois ?

- C'est un bon gendre.

- LA FEEEEEEEEEEERME !!!!!

Tout le monde se tut et ne la rouvrit pas.

- Je disais donc, reprit plus calmement Severus sous l'œil amusé de Dumbledore, que mon… Maître est au courant (il eut un sourire sardonique en les voyant grimacer au mot ''Maître''). C'est la première chose que je lui aie annoncée après son retour.

- … histoire de sauver ta peau, en déduisit Remus.

- Exactement. Il n'était pas très heureux de me voir arriver en retard, et la seule bonne nouvelle que j'avais à lui annoncer était que je savais où était son fils. C'est-à-dire… hum… chez moi. Je lui ai parlé de son entrée dans le Cercle Ecarlate, lui faisant valoir les avantages qu'il y aurait à en tirer. En fait, j'ai fait passer Plume pour un espion.

Remus, un peu remué, nota la façon dont le nom du jeune homme semblait rouler sur les lèvres de son amant même en sachant que l'homme valait bien mieux qu'il ne le paraissait, il était réellement surpris de découvrir la profondeur de ce qui semblait les lier. Envieux, aussi. Enfin, si les MangeMorts parvenaient à trouver l'âme sœur, pourquoi pas les loups-garous, mmh ?

- Et Vous-Savez-Qui a gobé tout ça ? s'étonna Maugrey.

Severus jeta un coup d'œil à son compagnon.

- Voldemort… et bien, s'il était capable d'aimer quelque chose, je pourrais dire qu'il aime vraiment son fils.

- Qu'est-ce qu'il a dit lorsqu'il  appris vos liens ? demanda Raven avec curiosité.

L'homme hésita.

- Il a ri.

Les autres le fixèrent, surpris.

- Il a ri comme un dément. Je n'ai jamais compris… dit-il pensivement. Mais bon : il pense que Plume est de son côté, et d'ailleurs ne va pas tarder à chercher à le revoir.

Tous restèrent songeurs.

- En fait, dit enfin Killian en souriant légèrement, si cela se trouve, vous êtes deux agents triples.

Les deux hommes se regardèrent, puis le même sourire carnassier apparut sur leurs lèvres.

- Pourquoi pas ?

- Ils plaisantent, hein, Pr Dumbledore ?

- Allez savoir, Raven… Bon ! Tout ceci pour dire que la présence de Plume n'est plus un problème, et qu'il faudra se méfier de Daelmanis. A vous ! Comment progresse l'entraînement ?

Luke prit la parole sur un geste de Grand Chef.

- Ca marche. Les Mercenaires s'ennuient même un peu. Ils demandent la permission de chasser le loup-garou dans la Forêt…

Remus fit la grimace.

- Si c'était possible d'éviter… Je suis un loup-garou.

- Oh…

Les autres eurent l'air confus.

- Désolé, dit Luke. On se rabattra sur les vampires. Personne n'est vampire ? Bon.

- A vous, Louve, l'invita poliment Dumbledore.

L'Elfe détourna son regard surpris de Remus et parla de sa voix mélodieuse.

- Aucun problème du côté des Elfes. Il faudra juste veiller aux réserves de flèches. C'est tout.

- Bien… Raven ?

Le jeune homme eut un regard désespéré.

- En étant très optimiste, je peux vous annoncer que les sorciers ont appris à tenir leur baguette du bon bout.

- Comme quoi rien n'est perdu d'avance ! commenta joyeusement le chef Elfe.

- Papy !

- Oui, oui…

- Les sorciers ne savent pas se battre, continua Raven, à part les Aurors qui ne s'en sortent plutôt pas mal.

Maugrey hocha la tête d'un air satisfait.

- Ne pourrait-on pas mélanger les entraînements ? proposa Minerva. Mêler les sorciers, les Elfes et les Mercenaires…

Un flot de protestations lui répondit.

- Un peu de calme, s'il vous plaît ! réclama Dumbledore. Développez, Minerva.

- Et bien… je suis bien consciente des quelques frictions qui auraient sans doute lieu au départ…

- Magnifique euphémisme, railla Griffe.

- … mais cet entraînement commun ne pourrait-il pas générer un esprit de compétition assez propice, ensuite, à une certaine entente ? Je ne doute pas que ma suggestion puisse paraître assez utopique mais…

- Pas du tout, répondit Plume d'un air rêveur. Ca pourrait marcher… Chaque groupe possède des connaissances qu'il pourrait enseigner aux autres…

- Ca a peu de chances de fonctionner, objecta Grand Chef.

- Ca coûte quoi d'essayer ?

- Oh, quelques dizaines de victimes…

- Ben, c'est bon, alors.

Elfes, humains et Mercenaires se dévisagèrent un moment, puis soupirèrent.

- Qui ne tente rien n'a rien ! s'exclama joyeusement Dumbledore. Votre idée est approuvée, Minerva. Et vous, Charlie, comment vont vos dragons ?

- On les bichonne. Nous avons trouvé un moyen de leur faire cracher des flammes multicolores, c'est assez spectaculaire !

- Sgnirf… pôv Ebène…

- Fougère est très douée, d'ailleurs, lança le rouquin à son ami : ses flammes atteignent près de dix mètres de longueur !

- Oui, elle est très joueuse…

- Killian, vos potions ? les interrompit Dumbledore (tout le monde savait que quand Charlie partait sur son sujet préféré, il était intarissable).

- Nous progressons, fut le commentaire laconique. Les installations des cachots sont parfaites. Malheureusement, nous avons perdu de la main-d'œuvre à Chaudron-aux-Sources pas grand-chose, mais de quoi ralentir considérablement la production.

- Puis-je émettre une proposition ? demanda Severus de sa voix basse.

- Je vous en prie.

- Zachary pourrait employer quelques élèves parmi les plus doués.

Dumbledore réfléchit un moment, observé par les autres.

- Pourquoi pas ? déclara-t-il enfin. Vous pensez à quelqu'un de précis ?

- Vinclair, en 5ème année. Et Granger.

- Deux aides ne seraient pas de refus, admit tranquillement Killian.

- Très bien, conclut le vieux sorcier. Severus, pourrez-vous vous charger de les prévenir ? Bien. Je crois que nous avons fait le tour… Ah, si ! (Il ouvrit son dossier et en sortit six feuilles qu'il distribua à Sirius, Remus, Minerva, Maugrey, Severus et Plume) Voici le protocole du Charme de Croisade. Je vous demanderais de l'étudier en vue de la prochaine réunion.

- Me voilà retourné à l'école, grommela l'Auror en parcourant sa feuille. Il y aura une interro écrite ?

- Il en est bien capable, le prévint Sirius.

- Mon père tient tant que ça à me revoir? demandait sérieusement Plume quelques minutes plus tard, longeant un couloir avec Severus.

- Oui. Je pense qu'il compte sur toi pour lui servir de bras droit – ou plutôt de bras armé. Je… Malefoy! Il est strictement interdit –

- On s'en fout! (Le blond s'arrêta de courir en soufflant.) Mon père est ici, je voulais juste vous prévenir… surtout vous, ajouta-t-il en regardant Plume.

- Ah. Vous êtes au courant, M. Malefoy.

- Voldemort devient un peu dur d'oreille, acquiesça gravement le blond, et le Pr Snape doit lui parler fort pour qu'il comprenne… Alors forcement, on entend des choses…

- Je vois, sourit Plume. Merci. Bon, je vais me planquer et –

Trop tard.

- Ah, Severus, tu es là, intervint une voix froide.

Draco n'eut que le temps de s'éclipser, laissant face à face les trois hommes.

Severus fut oublié pendant quelques bonnes secondes. Dire que Lucius Malefoy fut stupéfait serait rester en dessous de la vérité: il en tomba pratiquement sur les rotules. Plume dévisagea un moment l'homme au visage arrogant qui se tenait devant lui, la taille haute, les yeux d'acier, les cheveux de lin et les vêtements superbes – puis sourit gracieusement.

- Bonjour Lucius.

L'homme prit une grande inspiration, puis s'inclina.

- Maî… Maître. Je ne m'attendais pas à vous trouver ici…

- Hé! Mon père ne te l'a pas dis? demanda légèrement le demi-elfe.

L'homme serra les lèvres.

- Non.

- Il ne l'a sans doutes pas jugé nécessaire… fit distraitement Plume. (Severus étouffa un sourire.) Ca faisait longtemps, hein?! reprit-il plus joyeusement. Quinze ans, au moins? Quinze petites années tranquilles… ajouta-t-il avec un léger rictus.

L'homme pâlit légèrement, mais Plume continua gaiement.

- Au fait, félicitations en retard pour l'initiation de ton fils. Il est très bien.

- Merci, Maître.

- Je t'en prie…

- Que voulais-tu, Lucius? intervint enfin Severus.

L'héritier se reprit.

- Le Maître vous fait dire que nous nous réunirons mi-février. Il souhaite ta présence, et celle de son fils. Il voulait que tu le préviennes… En attendant, pas de contacts. Tu es sensé continuer à jouer ton rôle…

- Et moi aussi, je suppose… ajouta Plume. D'accord. Fais-lui la bise de ma part, d'accord? demanda-t-il.

L'homme s'inclina froidement et s'éloigna. Plume se tourna vers son amant d'un air inquiet.

- Tu crois qu'il va lui faire la commission?

- Arrête de dire des conneries et viens manger.

- Yep.

Quand les trois hommes se furent éloignés, Harry laissa retomber la cape qui les couvrait, Hermione, Ginny, Ron et lui, et se tourna vers les trois autres avec un visage livide.

- Qui est ce type?

Hermione se passa une main nerveuse dans les cheveux.

- Et bien… on dirait… que c'est… le fils de… de Tu-sais-qui.

Ils se regardèrent tous les quatre.

- Bon, dit fermement Ron. Cette fois, pas d'hésitations. Direction le bureau de Dumbledore.

- Bande de débiles.

Les quatre Gryffondors sursautèrent de concert et se tournèrent vers Draco Malefoy qui les observait d'un air goguenard.

- Qu'est-ce que tu veux?! siffla Ron.

- Vous croyez vraiment que Dumbledore ne sait pas qui il est? répliqua l'autre.

- Et comment le sais-tu, ça, toi! riposta Ron.

Harry l'arrêta d'un geste.

- Attends, Ron, dit-il doucement.

Son ami se tourna vers lui avec incrédulité.

- Tu prends son parti?!

- Ron… (Harry hésita et jeta un coup d'œil au blond qui haussa les épaules.) Draco est de notre côté. Il fait le même boulot que Snape.

- QUOI?!

- Comment tu le sais? intervint Ginny avec curiosité.

Elle ne semblait pas choquée, juste surprise.

- Parce qu'ils me l'ont dis.

Hermione s'était tournée vers le Serpentard.

- Alors… tu es un Mangemort? demanda-t-elle lentement.

Draco eut un rictus ironique et releva sa manche. Sur son avant-bras s'étalait la Marque noire, grimaçante. Les quatre autres se figèrent dans un silence horrifié. Et ils restèrent immobiles, le Serpentard, un sourire amer aux lèvres, face aux Gryffondors contemplant la brûlure avec répulsion. Au bout d'un moment, Draco, un peu pâle, remit son pull en place.

- Bon, murmura-t-il en se détournant. Si vous ne me croyez pas, allez voir le vieux. Bonne soirée.

- Attend!

Tous regardèrent avec surprise Harry qui venait de crier.

- Je te crois, déclara simplement celui-ci. Pour les précisions, on demandera à Percevent lui-même…

Il hésita, puis ajouta tout à trac:

- Il fait la fête ce soir avec ses copains… Tu savais?

Le blond, interloqué, hocha juste la tête.

- Tu viens?

- Ce soir?

Harry poussa un soupir exaspéré.

- On dit que les Gryffondors sont cons, mais les Serpentards… Bien sûr, ce soir!

Draco ouvrit et referma trois fois la bouche, puis hocha la tête.

- Ok, conclut Harry. On part à onze heures. On t'attendra devant la porte.

Et il s'éloigna, poursuivi par les trois autres Gryffondors exigeant des explications.

Draco resta un moment immobile, puis haussa les épaules.

Et pour la première fois, ils furent tous réunis.

Plume et Severus.

Raven, Killian et Charlie.

Luke et Melilot.

Louve.

Remus et Sirius.

Et Harry, Ron, Hermione et Ginny.

Et Draco.

- CE SOIR C'EST LA MEGA-FÊÊÊÊTE!!!!!

Draco jeta un regard un peu apeuré à la chose blonde qui sautillait partout et que son professeur de DCFM stoppa d'un croche-pied.

- Raven tu te tiens bien! On a un invité, ce soir. M. Draco daigne descendre parmi nous, alors essaye de ne pas le désespérer!

Le jeune homme – vingt-cinq ans, estima Draco – se remit aussitôt d'aplomb et s'inclina devant lui.

- Cher monsieur…

Puis il l'agrippa par le col et l'entraîna en direction des autres.

- Alors! Les présentations… entama-t-il.

Harry fit de loin un signe d'encouragement à son vieil ennemi K.O., puis se tourna vers son parrain.

Le lendemain, Draco se souviendrait juste que la soirée avait été très animée.

Des images surnageraient dans sa petite bouillie de cerveau – très animée et très arrosée –, Tamalo'th entamant un strip-tease sous les hurlements de rire des filles, Black lançant un concours de boisson gagné haut la main par un Snape même pas éméché, Whitewinter mimant la parade nuptiale du troll nain du Pacifique, lui-même rigolant comme une baleine sur l'épaule de Weasley cadet…

Une seule explication.

Il avait rêvé.

Sacré rêve, quand même.

Il se rendormirait en souriant.

Les vacances de Noël arrivèrent rapidement, dans un calme relatif. La quasi-totalité des élèves retournèrent dans leurs familles, ne sachant s'ils pourraient vraiment les revoir après. Seule une cinquantaine d'élèves étaient restés, dans l'impossibilité de rentrer chez eux, ou possédant des membres proches au sein de l'armée qui était restée stationnée dans la Forêt, en compagnie des Elfes et des Mercenaires. Hermione, Ginny et Ron avaient laissé Harry, qui partageait son temps entre son parrain, les amis de Plume, et même Draco Malefoy avec qui, après quelques petites mises au point énergiques (un œil poché pour le Survivant, un nez cassé pour son ancien-pire-ennemi), il avait noué ce qu'on pourrait appeler un début d'amitié.

La neige se mit à tomber le matin de la veille de Noël, à la grande joie de la plupart des résidents de l'Ecole.

- Une-bataille-de-boules-de-neiges! Une-bataille-de-boules-de-neiges! Une-bataille-de-boules-de-neiges! Une-bataille-de-boules-de-neiges! Une-bataille-de…

- Mais arrêtez-le, quelqu'un! gémit Plume. Où est Killian?

- Dans son labo, répondit Luke en soufflant sur ses mains engourdies.

Harry, avec un sourire, contempla le terrain de Quidditch immaculé où les sorciers se promenaient tranquillement par petits groupes, croisant ici et là quelques Elfes marchant avec légèreté et autres Mercenaires s'y vautrant en riant.

- Veuxfairebatailledeboulesdeneiges… bredouilla Raven avec un regard implorant.

- Oh, ça suffit! pesta Plume. On dirait un gosse de maternelle… GYAAAAAAAAAAAAAAAAHHHHHH PUTAIN RAVEEEEEEEEEEEN!!!

Le blond s'éloigna en gambadant pendant que son ami, sautant frénétiquement sur place, tentait de retirer la neige qu'il venait de lui coller dans le cou.

SCHPLAF!

Une superbe boule cueillit l'Assassin en plein vol. Draco regarda sa main d'un air surpris, comme s'il n'y croyait pas lui-même. Un Raven ravi lui enfonçant fermement le visage dans une grosse congère le tira de ses pensées. Les autres observèrent un moment le Serpentard recracher une bouchée de neige avant d'être de nouveau plongé dans les délicats flocons blancs par l'Héritier de la Famille Sombre qui s'amusait bien.

- Ils s'entendent bien tous les deux, hein? remarqua Plume tandis que Draco implorait pitié.

- Ca doit être le fait d'être fils uniques… Surtout dans des familles pareilles… Manque affectif et bla-bla-bla, répondit Charlie sur le ton de la conversation, alors que Raven tapotait d'un air inquiet les joue d'un Draco écarlate.

Harry se roulait par terre de rire. Il cessa brusquement quand Plume, Charlie et Luke, remarquant sa présence, échangèrent un regard et s'avancèrent vers lui avec un regard inquiétant.

- Hé… non, vous êtes trois… vous m'écoutez?… PLUUUUUUUME NOOOOOOON!!!! OSKOUUUUUR!!!

En l'absence de la plupart des élèves, Dumbledore avait invité les dirigeants des trois groupes à passer Noël au Château. C'est donc d'un air méfiant que Griffe, Louve et une quinzaine d'Elfes, Grand Chef, Luke, Melilot et quelques Mercenaires, Sirius, Remus, Killian, Raven, Charlie et un petit groupe de sorciers, avaient rejoint le corps enseignant de Poudlard autour de l'une des deux grandes tables centrales de la Grande Salle, l'autre étant réservée aux élèves.

Il y avait un froid dans la conversation, Dumbledore s'étant débrouillé pour trafiquer le plan de table et les mélanger tous: chaque sorcier se retrouvait encadré d'un Elfe sur sa gauche, et d'un Mercenaire sur sa droite, etc. Bref.

- Mais quelle folle ambiance! commenta Raven en se resservant du potage aux marrons.

Plume, à sa droite, eut un petit ricanement inquiétant.

- Quoi?

- Tu connais le Flammichou?

Killian jeta un coup d'œil dégoûté à sa soupe – pourquoi de la soupe? – et leva un sourcil en direction de son ami.

- Tu parles de cet alcool sans couleur ni odeur?

Severus ajouta pensivement:

- Les effets en sont assez… homériques, si mes souvenirs sont bons.

- C'est tout à fait cela, mes chers spécialistes des Potions.

- Et alors? demanda Charlie avec curiosité.

- Alors Dumbledore en a versé une bonne vingtaine de bouteilles dans la soupe.

Une heure plus tard, l'ambiance était légèrement plus sympathique. Elfes, Mercenaires et sorciers s'entendaient comme copains comme cochons, et Griffe et Grand Chef se balançaient de grandes claques dans le dos; Minerva MacGonagall, Melilot et Louve pouffaient de rire ensemble; Luke flirtait avec une Elfe qui gloussait; Plume et Raven faisaient les cons; Remus écoutait en soupirant Sirius lui raconter la même blague pour la septième fois…

Etc, etc, etc.

Sous l'œil halluciné de cinquante élèves.

La petite centaine de personnes qui réveillonnait joyeusement semblait donc unanimement soudée. Pourtant, les événements qui s'enchaînèrent alors à toute allure les divisèrent bien plus vite que ne les avait unis un mois de cohabitation forcée et vingt bouteilles de Flammichou. C'était bien simple: il y eut ceux qui demeurèrent figés sur place, et ceux qui réagirent.

La plupart des humains et des Elfes imbibés d'alcool d'une part; les Mercenaires et quelques exceptions de l'autre.

Ce fut Luke qui donna l'alarme, à l'apparition des quarante Mangemorts de l'autre côté de la table. Pointant rapidement la main, il cria un sort qui dévia le sortilège qui filait sur Flitwick, assis en face de lui. Il n'en fallut pas plus pour que les Mercenaires ne bondissent de leurs chaises, précipitent leurs voisins éberlués sous la table et passent à la contre-attaque.

Par chance, les Mangemorts étaient apparus non pas entre les deux tables, mais à l'extérieur de celle des adultes, se retrouvant ainsi séparés des élèves par une rangée de combattants acharnés. Poufsouffles, Serdaigles, Serpentards et Gryffondors n'oublièrent jamais ce à quoi ils assistèrent et qui constituait sans doute la première véritable bataille rangée opposant les forces de Voldemort à celles de Dumbledore. La rapidité des Mercenaires à dresser des boucliers magiques était stupéfiante, encore plus impressionnante par leur absence de baguette. Raven et Snape étaient aussi de la partie, enchaînant sort sur sort. Les sortilèges pleuvaient dans tous les sens – sortilèges d'immobilisation, de désarmement, de feu, de douleur, de mort…

- Hum…

Killian souleva un coin de la nappe et jeta un coup d'œil à l'extérieur.

- … nous pourrions peut-être participer, qu'en dites-vous? demanda-t-il aimablement aux sorciers et Elfes qui tentaient de recouvrer leurs esprits après s'être fait balancer sous la large table.

Remus cligna des yeux.

- Hum… oh… oui! Sortez de l'autre côté!

- Pourquoi faire, demanda Sirius qui avait l'air d'avoir du mal à se reconnecter totalement avec la réalité.

- Pour faire basculer la table, répondit une voix mélodieuse.

Remus sourit à Louve et s'extirpa dehors.

Aussitôt dit, aussitôt fait. Elfes et humains firent basculer l'énorme meuble de chêne en criant aux combattants de repasser de l'autre côté.

- Melilot! souffla Plume.

Raven l'aida à soutenir l'adolescente pendant que Luke les couvrait. Ils la firent basculer par-dessus la table et la suivirent.

- Ca va? s'inquiéta Charlie.

Killian palpa le pouls de la Palefrenière et hocha la tête.

- C'est OK. Rien de grave.

Ils soupirèrent et retournèrent au travail.

On n'apercevait pas les visages des Mangemorts, dissimulés par les masques argentés, mais leurs mouvements brusques montraient assez leur énervement et leur crainte naissante d'être gênés par la table, et de plus en plus exposés eux-même.

- Ca me rappelle un épisode de l'histoire moldue… dit distraitement Raven en balançant un Stupefix. La guerre des tranchées, ou un truc comme ça…

- Whitewinter, l'instruction est une belle chose, mais en temps choisis voulez-vous? demanda sèchement Severus.

- Pardon profecheur…

Les Elfes avaient fini par retrouver leurs moyens et les sorciers faisaient du mieux qu'ils pouvaient. Les élèves se taisaient et se terraient, terrifiés.

- Il faut arrêter ça, murmura Dumbledore en désarmant posément une des silhouettes noires.

- Pas de problème, rétorqua Griffe en enfonçant une de ses dagues dans le ventre d'un ennemi qui s'était approché d'un peu trop près. Appuyez sur le bouton "stop".

Les Mangemorts disparurent d'un coup, emportant leurs morts et leurs blessés.

Les défenseurs s'immobilisèrent, méfiants. Ce ne fut qu'au bout d'une longue minute que Grand chef lâcha un "Allez-y!" prudent et passa de l'autre côté de la table, suivi par ses hommes qui entreprirent d'inspecter soigneusement les lieux. Les sorciers partirent réconforter les élèves, les elfes soigner les blessés, et les professeurs prévenir les elfes de maison.

- Aucune trace, conclut Luke au bout d'un moment.

- C'est le principe de la guerre-éclair. En 1939, les Allemands ont envahi la Belgique et une partie de la France comme ça et…

- Raven, ta gueule.

- Comment ont-ils pu passer outre le bouclier de Transplanage? demanda Minerva MacGonagall d'un ton inquiet.

- C'est la grande question, répondit Dumbledore. Severus…?

L'homme haussa les épaules.

- Je ne suis au courant de rien, répondit-il calmement. Voldemort ne me dit pas tout.

- Bon. Minerva, prévenez Maugrey et le Ministère. Griffe, pourriez-vous envoyer quelques-uns uns de vos hommes vérifier le camp dans la Forêt? Merci. Severus, allez-vous transplaner jusqu'à Voldemort?

- Non. Il ne m'a pas appelé. Mais je vais m'occuper de ça. Dans une petite heure, quand je serai sensé pouvoir me retirer sans attirer votre attention.

Dumbledore hocha la tête et s'éloigna pour discuter avec Madame Pomfresh. L'agitation se calmait petit à petit parmi les convives. Plume se rapprocha de son compagnon qui inspectait son bras avec une grimace.

- Tu vas aller voir ce cher Lucius?

- Oui. C'était lui à leur tête, tout à l'heure.

- Oh, je sais. L'histoire se répète, hein? murmura-t-il doucement en lui saisissant l'avant-bras et en observant la coupure assez vilaine qui l'ornait.

- Plutôt, oui. Ca manque d'imagination, répondit sarcastiquement le professeur. Qu'es-tu diable en train de… Aïe!

- Oh, mais c'est qu'il est douillet! sourit légèrement son cadet.

- Plume… le prévint l'homme d'un ton menaçant.

Le demi-elfe lui saisit le visage entre les mains et lui roula le patin du siècle.

- Bon, je vais voir si je peux aider. Dis coucou à Lucius et ne te bagarre pas.

Severus lança un regard noir à son beau-père qui ricanait quelques pas plus loin, puis s'éloigna, abandonnait un Griffe frissonnant.

Car Severus Snape demeurait le maître incontestable du regard meurtrier.

- Nott est parvenu à établir un dispositif qui court-circuite le bouclier, expliquait-il calmement quelques heures plus tard. Voldemort a décidé de le tester immédiatement en nous faisant une petite frayeur. Son objectif était surtout de nous miner le moral – ce qu'il a plutôt bien réussi – et peut-être, par chance, de s'emparer de Potter. Il ne s'attendait pas à tomber face à des adversaires valables, même ivres morts…

Il évita un coup de pied de Griffe.

- … et commence à se préoccuper de ce que nous fabriquons de notre côté. Je ne pense pas qu'il se doute encore de l'importance de notre entreprise, mais il va falloir se méfier et éviter toute fuite. Le fait qu'il pense M. Malefoy –Junior, s'entend – entièrement dévoué à sa cause et que ce dernier ne lui ait rien rapporté le rassure un peu. Mais c'est Voldemort, après tout. Sinon, il y a deux morts chez les Mangemorts, et une dizaine de blessés graves.

- Et pour vous? Et Plume?

- Il s'attendait à ce que nous conservions nos rôles de dévoués professeurs. Il n'est donc pas surpris et même plutôt satisfait que nous ayons participé de ce côté…

Il y eut un long silence pensif, pendant que tout le monde digérait les informations. Puis Dumbledore soupira.

- Plus de bouclier… Et bien…

- Il faut instaurer une garde ici, Albus, intervint Grand Chef. Voldemort peut revenir dès qu'il le désire.

- Par exemple pour enfin se débarrasser de Harry, ajouta Sirius d'une voix légèrement tremblante.

Le Directeur se frotta les yeux.

- D'accord. Des Mercenaires en permanence dans les bâtiments. Il y a des chambres supplémentaires dans chaque Maison. Je crois que le Château dispose d'un vieux système de détection de Transplanage… M. Rusard, si vous vouliez bien me chercher ça…

Le concierge hocha la tête.

- Les Elfes se chargeront de l'extérieur. Oh, Poppy, alors?

L'infirmière soupira. Elle avait de larges cernes.

- Personne n'est en réel danger, Merlin soit loué. Pas d'élèves blessés non plus. La seule à vraiment m'inquiéter est la petite Melilot… Elle ne se réveille pas.

Ses amis la regardèrent d'un air alarmé.

- Elle n'est pas en danger… Simplement…

- Peut-être… Peut-être de l'épuisement? balbutia Luke.

- Non. Une sorte de coma.

- Professeur, ou Killian, vous allez lui trouver quelque chose, hein? s'enquit précipitamment Charlie.

Severus haussa les épaules d'un air fatigué.

- Il faudrait d'abord savoir par quoi elle a été frappée…

- Sortilège de Catacumbus, intervint le biomagicien. Je vais m'occuper de ça, ajouta-t-il simplement.

Charlie et Luke lui sourirent, un peu soulagés. Puis tous échangèrent un regard épuisé.

- On a quand même mis la raclée aux Mangemorts, conclut Raven d'un ton peu convaincu.

- Ouais… grogna Sirius. Joyeux Noël et vivement le Nouvel An.

§§§§§§§§§

Neuf ans plus tôt:

- Salut les gars.

Charlie, Killian et Raven relevèrent le nez de leur partie d'échecs.

- Tiens, un revenant! sourit le blondinet.

- Ne te force pas trop, ajouta tranquillement Killian.

- Non, ça va… (Plume fronça les sourcils.) qu'est-ce que tu fais chez les Gryffondors?

- Ce sont les vacances, je te rappelle.

- Ah oui, c'est vrai…

Le convalescent s'assit prudemment à la table de la Salle Commune.

- Vous jouez à deux contre un? Qui gagne?

- Charlie, répondirent les deux blonds d'une seule voix.

L'aîné des Weasley déplaça son fou noir avec un petit sourire, puis reporta son attention sur son ami.

- Tu es resté quatre semaines au lit, quand même. Heureux de revenir parmi les vivants?

Plume hocha la tête. Pâle et amaigri, de grandes cernes sous les yeux, il ne payait pas de mine.

- C'était la première fois de ma vie que j'étais malade, dit-il pensivement.

Les trois autres le regardèrent sans rien dire.

- C'était bizarre, comme sensation… (Il sourit légèrement, les yeux dans le vague.) Assez… effrayant.

* Il faisait froid… et j'étais seul. Mourir… ç'aurait été bien…*

- Tu nous as fait une sacrée peur, au départ, intervint Raven en déplaçant sa tour. Tout le monde s'inquiétait pour toi. Mme Pomfresh ne te quittait pas, Dumbledore passait tous les jours, MacGonagall aux interclasses…

- Pourquoi ne m'a-t-on pas mis à l'infirmerie?

- Epidémie de grippe, répondit laconiquement Killian. Ils ne tenaient pas à ce que tu attrapes ça en plus.

- Oui… logique…

* C'est pour ça que Severus n'est pas venu…*

- Même Snape était inquiet, ajouta Charlie comme s'il avait lu dans ses pensées.

Plume les dévisagea tous trois: ils évitaient de le regarder, faisant semblant de se concentrer sur le jeu.

- Killian, le cheval ne peut pas se déplacer en diagonale, dit-il sèchement. Alors? Il faut que je vous supplie?

Ils prirent un air penaud. Puis Raven sourit.

- Tu sais, je l'ai vu pour la première fois planter sa propre potion. C'était assez comique.

Plume essaya de s'imaginer l'homme fixant son chaudron d'un air incompréhensif, réalisant qu'il s'était trompé.

- Et puis?

- Oh… Il était tout le temps dans la lune; il a même attribué des points à Gryffondor; il nous a fait faire la même potion deux fois de suite; il a oublié de corriger nos copies; il est arrivé en retard plusieurs fois; il…

L'adolescent n'écoutait plus. Un ras-le-bol général l'envahissait sournoisement.

- Je retourne me coucher, annonça-t-il, coupant Raven dans son élan.

Les autres, surpris, le regardèrent se diriger vers la chambre.

- Tu… tu comptes te relever quand?

- Je ne sais pas. Demain, je pense. Et puis après-demain, pour le réveillon.

- Repose-toi, alors…

- Ouais.

Une fois dans sa chambre, il se glissa dans son lit encore tiède et enfouit son visage dans l'oreiller, souhaitant mourir.

Mais on ne meut pas qu'en le souhaitant. Sinon la terre serait largement dépeuplée.

Il soupira et ferma les yeux.

- Brrrrrr! fit Raven en ôtant son écharpe. Vivement un bon bain chaud!

Plume rit. Il se sentait mieux, maintenant qu'il était moins fatigué. La veille, ils avaient tous les quatre exploré de fond en comble les greniers de l'Ecole, dont Charlie avait découvert l'accès, puis avaient passé la soirée à se raconter des histoires d'horreur, Killian ayant déménagé dans leur chambre. Cet après-midi-là, ils avaient fait une courte balade dehors, marchant à grands pas dans la neige, puis étaient rentrés se préparer pour la soirée.

- Tu viens, hein, Plume? demanda Raven pour la 46ème fois.

- Mais oui… Je veux te voir danser sur la table!

Ils se précipitèrent en hurlant vers les bains (excepté Killian, toujours flegmatique), à moitié déshabillés. Ils trempèrent pendant une bonne demi-heure dans les baignoires, chaque salle de bain séparée des autres par une cloison de vitraux opaques, papotant de tout et de rien.

- Qui est resté pour les vacances?

- Pas mal de monde. Trois 2ème année de Poufsouffle, plusieurs 4éme année, toute la famille MacArthus, plusieurs Serpentards de 7éme année…

- Dont Raoul Roy, ajouta innocemment Killian.

On entendit un gargouillement inquiétant.

- Raven? Tu te noies?

- Je fais mumuse avec l'eau, répondit la voix béate du jeune homme. Heu… Je vais peut-être pas dormir ici ce soir…

Les autres pouffèrent.

- Au fait, ajouta Charlie, comme nous sommes exceptionnellement nombreux, Dumbledore nous a fait la demande de bien nous habiller.

- Qu'est-ce qu'il entend par bien?

- Et bien, autre chose que notre uniforme ou qu'une paire de jeans, je suppose.

Plume resta pensif.

- Je ne sais pas si j'ai ça.

- On va se débrouiller…

Il y a pire qu'un groupe de filles papotant chiffons: c'est un groupe de garçons papotant chiffons. Si les filles ont, en général, une inclination et un goût certain en ce qui concerne l'art vestimentaire, les garçons ont eux une sainte horreur de faire un effort pour s'habiller – au grand désespoir de ces demoiselles – et enfilent le plus souvent ce qui leur tombe sous la main. Il arrive cependant, le fait est prouvé, qu'ils soient pris pour une raison ou une autre d'une frénésie de se faire beau, phénomène où la puberté joue souvent un rôle important, et, dans ces cas précis, leur durée de préparation surpasse incontestablement celle de la gente féminine.

- J'veux m'mettre en noir.

- Non, répondit catégoriquement Raven. Le noir, c'est pour moi. Trouve-toi autre chose.

- Charlie a déjà pris le vert!

- Mets-toi en rose.

- Oh que c'est spirituel…

Killian avait, à leur grande surprise, sorti un élégant costume de velours bordeaux; avec sa chemise immaculée, son nœud de soie noire et sa cape assortie, son élégante silhouette était plus que classe.

- Wahou! Les filles vont te sauter dans les bras! On te donnerait bien 20 ans!

Killian marmonna quelque chose en passant la main dans ses cheveux de cristal, son teint pâle se colorant légèrement.

Raven était en noir et gris perle: sa tenue était d'une sobriété un peu effrayante, imposante, rehaussée d'un torque en argent en forme de… serpent. Plume se dit que, malgré son affectation à la maison des Gryffondors, son ami gardait un côté Serpentard sans doute très familial…

Charlie avait tiré de sa malle une chemise d'un vert très sombre. Sans être habillé de façon aussi prestigieuse que ses deux amis, la couleur de la chemise, associé à un pantalon noir et de grosses chaussures de cuir sombre, mettait en valeur sa silhouette musclée et solide. Plus simple que les deux autres, mais plus accessible et tout aussi séduisant.

- Et maintenant… (Raven eut un sourire inquiétant.)… on s'occupe de notre petit Plume…

- Beuh… Je sais pas si je vais venir finalement…

- Ne discute pas! Qu'est-ce que tu as amené?

Le blond prit les choses en main et passa rapidement en revue le contenu de la malle de son ami.

- Des jeans… des T-shirts… des gros pantalons… des pulls… Tu n'as rien d'élégant?

- Ben…

- Ah! (Raven extirpa un mince pantalon d'un noir absolu.) Mais c'est très bien, ça!

- Je ne sais même pas si je rentre dedans… oumph! (Le blondinet venait de lui jeter le pantalon dans les bras.)

- Bon, fit Raven en revenant à ses propres affaires, je vais voir si j'ai quelque chose pour toi. Pas ça… non… trop vieux… pas cette couleur… trop léger… à moins que… Essaie ça! Avec tes grosses chaussures noires.

Le demi-elfe disparut dans la salle de bain et en ressortit quelques minutes plus tard, tirant sur l'encolure du vêtement que lui avait passé son ami. Il portait, outre son étroit pantalon noir, assez épais pour mouler ses jambes sans laisser tout deviner, une mince tunique chinoise, d'une lumineuse soie ardoise chamarrée, qui coulait sur son corps comme de l'eau solide, le moulant agréablement, soulignant la finesse de sa taille et ses traits délicats; l'air sage donné par le col mao, les manches longues et la stricte rangée de boutons, offrait un contraste plus qu'agréable avec ses cheveux en bataille, ses grands yeux interrogateurs, et ses grosses chaussures qui apportaient une touche de solidité à cette incarnation de la légèreté. Cependant, les mouvements souples et fermes de Plume annulaient tout effet de féminité et au contraire, lui donnaient un côté assuré assez fascinant.

- Alors? demanda-t-il.

Les autres ne répondirent pas, les yeux écarquillés.

- Ca ne va pas?

Raven secoua la tête.

- Ecoute, au moins si tu loupes ton diplôme l'an prochain, tu pourras toujours faire mannequin chez les Moldus. Je te l'offre. Et arrête de tirer sur le col.

Killian sourit, et à la grande surprise de tous, eut un léger ricanement, évènement pour le moins remarquable.

- Qu'est-ce qu'il y a? demanda Raven.

Le Serpentard se pencha vers le blond et le rouquin et leur chuchota à l'oreille. Les deux autres gloussèrent et acquiescèrent.

- Quoi? demanda Plume, légèrement inquiet.

Raven s'approcha de son ami qui le regardait d'un air suspicieux, et le détailla attentivement.

- Plume, dit-il d'un ton grave.

- Quoi?

- Tu me fais confiance?

- Pas du tout. Qu'est-ce qu'il y a?

Le futur assassin ne répondit pas et disparut dans la salle de bain, pour revenir presque aussitôt, une main derrière le dos.

- Tu veux bien fermer les yeux? demanda-t-il d'un ton enjôleur.

- En aucun cas. Qu'est-ce que tu vas me faire?

- Plume, au nom de notre amitié indéfectible qui traversera les années et les mauvais coups, nous liant à jamais dans la confiance absolue de deux êtres qui se comprennent et qui savent qu'ils peuvent compter l'un sur l'autre et…

- C'est bon, c'est bon. Je ferme les yeux.

L'adolescent s'exécuta, sa demandant vaguement ce que son ami allait lui faire. Oh, rien de méchant. Mais Raven avait parfois des idées bizarres.

Une douleur aiguë à l'oreille le fit jurer.

- Qu'est-ce que tu FOUS?! s'exclama-t-il furieusement en ouvrant les yeux.

- Mais rien, mais rien, répondit légèrement le blond en lui tapotant l'oreille de sa baguette. Voilà. Ca te fait plus mal maintenant?

Plume se tâta l'oreille d'un air incrédule.

- Tu m'as mis une BOUCLE D'OREILLE?!

- Ca lui va bien, hein? s'adressa son ami aux deux autres qui hochèrent la tête avec un bel ensemble.

- RAVEN WHITEWINTER!

- Oui, oui, va t'admirer dans la glace, répondit-il en le poussant vers la salle de bain.

- JE NE SUIS PAS UNE FILLE!

- Depuis le temps, je m'en suis rendu compte, tu sais… Alors, t'en dis quoi?

Plume pinça les lèvres et se regarda dans le miroir. Il dût admettre que la boucle d'oreille ne sautait pas aux yeux, à moitié cachée par ses cheveux.

* C'est déjà ça…*

Il écarta les mèches châtaines et s'inspecta: c'était une minuscule perle d'un blanc de lait, sans rien d'ostentatoire. Elle aurait pu paraître dénudée et trop simple sans une délicate incrustation d'argent filigranée, imperceptible de loin, mais dont l'éclat illuminait le scintillement trop doux de la nacre. C'était beau.

- Alors, ça te plaît? De toutes façons, elle est fixée par un sort, alors tu la gardes que tu le veuilles ou non, conclut Raven d'un ton léger.

- ENLEVE-MOI CA! gesticula Plume, revenu sur terre.

- Non. Du moins pas ce soir. Regarde-moi dans les yeux et ose me dire que c'est laid, reprit le blond.

Plume jeta un coup d'œil à son reflet: honnêtement, c'était même plutôt flatteur.

- Mmh. Ce soir, alors, ronchonna-t-il. Le trou… il disparaît?

- C'est un sort aussi. Je te l'apprendrai. C'EST BON LES GARS, IL LA GARDE!

Une salve d'applaudissements leur parvint de la chambre.

- Bon, on y va? On va être en retard avec tout ça.

Plume fut soulagé de voir que tous les élèves s'étaient mis sur leur trente et un, et que pas conséquent ses amis et lui ne détonaient pas trop sur l'assemblée. Les filles avaient revêtu leurs plus jolies robes, les garçons des vêtements plus sobres mais tout aussi élégants. Ce soir, c'était réveillon.

En raison des maigres effectifs, le service avait été réduit à deux tables placées côte à côte au centre de la Grande Salle, l'une pour les élèves, l'autre pour les professeurs. Les décorations étaient splendides: de grands sapins magnifiquement décorés trônaient tout autour de la pièce, et la table des professeurs, inoccupée, avait été remplacée par un gigantesque aquarium d'une pureté de cristal, où ondulaient et clignotait paresseusement des Poissons-Lucioles. Les vitraux scintillaient, luminescents, dardant les convives de tâches multicolores. De minuscules fées voletaient ici et là, achevant de rendre l'atmosphère enchanteresse. Une ambiance magique pour une école magique.

- Wahou! s'extasiait Raven en se désarticulant le cou pour admirer le Plafond Magique qui crépitait d'étoiles.

- Comme tu dis, reconnut Charlie.

Les deux autres ne dirent rien, perdus dans leur contemplation.

- Et bien, messieurs, allez donc vous asseoir!

La voix joyeuse de Dumbledore, debout avec quelques professeurs à côté de leur table et vêtu de sa magnifique robe violette ornée d'étoiles et de lunes, les tira de leur rêverie.

- Désolé pour le retard! s'excusa Raven avec un grand sourire.

- Voyons, M. Whitewinter, c'est Noël! répliqua le vieux sorcier avec bonne humeur. De nouveau sur pied, M. Percevent? Comment allez-vous?

- Beaucoup mieux, je vous remercie. Je… On m'a dis ce que vous aviez fait pour moi, Mme Pomfresh, le Pr MacGonagall et vous, Monsieur. J'aimerais vous remercier, dit-il en s'inclinant légèrement à la mode elfique.

Les deux sorcières rougirent légèrement.

- Le meilleur moyen de nous remercier, c'est encore de rester en bonne santé! déclara l'infirmière. Allez manger!

Plume sourit largement, et partit rejoindre la table où Raven s'était déjà installé à côté de Raoul Roy, un séduisant auburn vêtu d'une robe bleu-roi, Charlie et Killian à son côté.

Il se sentait un appétit de démon-dragon – justement.

Holàlà-làlà.

Severus Snape regretta immédiatement d'être venu. D'abord, constata-t-il en débouchant dans la Grande Salle, parce que tous les professeurs semblaient particulièrement de bonne humeur, et qu'il lui faudrait sûrement rester plusieurs heures avant que la politesse lui permît de quitter la table. Non pas que la politesse l'étouffât, mais après tout il avait de l'estime pour ses collègues – du moins lorsqu'il était d'humeur clémente – et c'était la moindre des choses, même pour lui.

La deuxième raison, et non la moindre, était que Plume était là. Qu'il ne l'avait pas vu depuis un mois. Et qu'il était tout simplement affolant. Paniqué, Severus faillit tourner les talons, puis se reprit: allons, en tant que Mangemort, il avait déjà dû affronter des situations terribles, il devait bien être capable de faire face à celle-ci…

Il se força à regarder l'adolescent: il avait minci, cela se devinait sous les vêtements mille fois trop seyants qu'il portait… Un mois de maladie. Combien de fois Severus avait-il pensé à aller le voir? Visite qui aurait pour le moins semblé extraordinaire aux autres Gryffondors. Et qui ne lui aurait rien apporté, sauf de nouvelles nuits à se tourmenter l'esprit. Il serra les poings en observant le demi-elfe s'incliner avec grâce, ses cheveux effleurant ses lèvres; il entrevit malgré lui combien devait être sensuel le contact de la tunique de soie sur la peau fine, et combien serait excitant de la faire glisser, cette tunique, glisser jusqu'à ce qu'elle tombe à terre et qu'il la remplace par ses mains… Déjà à moitié agonisant, il crut être maudit lorsqu'il se rendit compte qu'en plus Plume avait à présent l'oreille percée, ce qui lui conférait sans conteste un charme trouble qui… que…

* Elle va être trèèèèèèès difficile, cette soirée…*

Ce ne fut qu'en s'asseyant près de Killian que Plume aperçu son professeur de Potions s'avancer vers Dumbledore, de l'autre côté de la Salle. Il avait abandonné ses sempiternelles robes de travail pour une autre, tout aussi noire, mais qui n'avait strictement rien à voir avec ce à quoi l'Ecole était habituée à le voir: autant les habituelles étaient sobres et pratiques, autant celle-ci était somptueuse et de très bon goût. Le tissu était splendide, rebrodé de noir; la coupe excellente et flatteuse; et l'homme, qu'il n'avait jamais eu l'occasion de contempler aussi bien habillé, dégageait une prestance et une confiance en soi qui le laissa sur les rotules.

* Le Seigneur des Enfers… Gnyahahaaaaah, oskour j'ai pété les plombs…*

Il jeta un coup d'œil désespéré autour de lui et nota qu'il n'était assurément pas le seul à avoir remarqué la différence: les filles écarquillaient les yeux et le montraient du doigt, visiblement surprises, mais pas désagréablement. Il réprima son envie de leur enfoncer la tête dans les plats qui venaient d'apparaître sur les tables et respira à fond.

Comble de malheur, Dumbledore invita Severus à s'asseoir près de lui, c'est-à-dire pile dans l'axe du regard de Plume.

Plume semblait affamé et dévorait avec appétit. Severus le contemplait, dents serrées, mordre avec enthousiasme dans la chair tendre des magrets de canard qui leur étaient servis, essuyer sa bouche pleine du jus des poires sucrées qui les accompagnaient, poursuivre du doigt quelques gouttes de confiture qui se mêlaient au jus de la viande…

Severus se força à entamer sa propre assiette. Bien qu'habituellement il adorât lui-même ce plat – le mélange délicat du salé et du sucré était délicieux – il se sentait pris d'un trop profond ennui à l'idée même d'en porter une bouchée à ses lèvres. Il n'avait tout simplement pas faim. Du moins…

Ses yeux revinrent inexorablement sur le visage joyeux qui lui faisait face.

Il le regardait. Il le regardait encore.

Et il ne mangeait même pas. Tellement il le regardait?

Plume au contraire cachait son trouble en avalant comme un moulin. Et puis bon, il avait très faim, aussi. La conversation bourdonnait à ses oreilles, indistincte.

Il releva les yeux et rencontra de nouveau le regard noir comme deux puits d'ombre. Il s'engloutit une nouvelle bouchée de viande juteuse en détournant la tête, le cœur battant la chamade. Bien. Il commençait un peu à entrapercevoir la signification de ce qu'était un regard brûlant.

Plume rougit en détournant la tête. Severus de demanda un moment s'il le gênait, puis convint que cela n'avait somme toute aucune importance. Plume l'avait cherché. Il l'avait cherché depuis qu'il était revenu, en fait.

Il l'avait cherché et voulu. Et peut-être qui si lui-même ne l'avait pas envoyé balader, ce soir-là, il n'aurait pas été malade… Severus se fit la réflexion que dans son état normal, il aurait tout de suite repoussé une idée aussi absurdement ridicule. Le vin, sans doute.

Le regard de Plume rencontra à nouveau le sien, mais cette fois ne le fuit pas, au contraire, s'y attarda, s'y noya, s'y offrit, encore un peu hésitant et troublé… Severus lâcha sa fourchette par terre, et se pencha souplement pour la ramasser, la cervelle en fusion. D'accord. Il allait lui dire. Tout à l'heure, demain, après-demain s'il le fallait, il le coincerait dans un couloir et il lui dirait. Advienne ce qui pourra.

Il attaqua enfin son assiette.

Mais comme il est écrit que rien ne peut fonctionner convenablement, ce fut cette nuit que Plume perdit toute chance de vivre une vie normale au sein du monde sorcier, que ce soit avec ou sans Severus Snape.

Il fallut bien trois ou quatre secondes pour que tous aient aperçu la trentaine de Mangemorts qui venait d'apparaître à l'entrée de la Salle, immobiles, silencieuses silhouettes noires masquées d'argent inhumain. Un silence horrifié plana alors; mais les Mangemorts ne bougèrent pas. Quand il fut compris qu'ils ne venaient pas pour attaquer, Dumbledore se leva lentement et s'adressa à eux d'une voix ferme.

- Que voulez-vous?

La silhouette la plus proche se tourna vers lui, et parla d'une voix déformée par son masque.

- Juste le récupérer.

Dumbledore se raidit un peu.

- Qui souhaitez-vous récupérer?

Le masque le fixa presque narquoisement, puis tendit le doigt.

- Lui. Le fils du Lord Noir, notre nouveau Maître.

Toutes les têtes se tournèrent vers Plume, qui s'était dressé, légèrement tremblant.

Il les connaissait très bien, ces robes et ces masques. Petit, il avait vu les hommes de son père – et même Severus – s'en couvrir, avant de transplaner, ne réapparaissant que de longues heures plus tard, couverts de sang, de poussière, parfois blessés, parfois morts, parfois riant, parfois terrifiés. Puis, vers sept ans, il avait commencé à s'en vêtir lui-même, participant à de petites opérations, simple observateur au départ, puis lui-même acteur. Minuscule silhouette parmi ces immenses et sinistres créatures, il avait stupefixé, parfois même infligé l'Imperium et l'Endoloris. Mais jamais le sortilège de Mort.

Puis son père était mort. Il n'avait ressenti aucune tristesse, une vague peine peut-être, plutôt un regret. Regret submergé par la souffrance de perdre l'Autre. Quand cette vague s'était calmée, quand il avait compris qu'il vivrait à présent dans une autre famille – Griffe, Louve – il avait saisi tout ce que cette mort impliquait: plus de Mangemorts – enfant, le nom l'amusait – plus de masques et de capes pour terrifier les Moldus et le terrifier lui.

Mais ils étaient là. Après sept années, ils étaient là. Et dans quel but? Pour qu'il vienne, lui, à leur tête.

- Ce n'est pas mon souhait, répliqua-t-il sans hausser le ton – il n'aurait jamais eu la force de crier – mais sans trembler. Ne vous faites pas d'illusions.

Les Mangemorts se tournèrent vers lui comme un seul homme, et s'inclinèrent. Impressionnant.

Celui qui semblait diriger – sans doute Malefoy – reprit la parole.

- Vous êtes son héritier, Maître. Vous portez en vous son sang, fortifié, bien plus puissant. Guidez-nous et vous réussirez là où il a échoué.

Plume serra les dents. Si l'autre commençait à lui parler de sang, il n'allait plus avoir les idées très claires.

- Votre père était sur le point de réussir! Davantage que sa puissance, vous portez en vous le sang d'une des plus grandes lignées elfiques, et l'héritage des pouvoirs des démons-dragons! Rejoignez-nous! Guidez-nous! Imaginez, le monde à vos pieds, vous offrant ce que vous désirez à la moindre de vos envies!

La voix était entêtante, cajoleuse, hypnotique; c'était un délice de s'y rouler, de se laisser emporter par ses promesses. Pourquoi pas? Se venger de ces imbéciles de sorciers et d'Elfes, qui le repoussaient, lui crachaient dessus, se moquaient de lui… Plume ferma les yeux. Avec Severus à ses côtés, comme il avait été à ceux de son père… Il pourrait enfin se laisser aller… Ce serait bon… Etriper ces idiots… Les déchirer… Y mordre avec rage et…

Justement non, percuta sa raison vacillante. Severus ne serait pas là. Severus serait de l'autre côté.

Il ouvrit les yeux et regarda, perdu, tous ces visages tournés vers lui. Il y lut la surprise, la stupéfaction… Pas tant de dégoût que ça. pas de pitié, non plus. De la confiance, même. Des encouragements. De l'admiration? Et Severus, là-bas, calme. Attendant.

- Non.

Il y eut quelques murmures, puis un silence de mort.

- D'ailleurs, il est bien temps! se moqua Plume en reprenant un peu d'assurance. Cela fait sept ans que mon père – il insista sur le mot – est mort. Et vous venez seulement me trouver?

Le Mangemort frémit.

- Nous venons juste de retrouver votre trace. Mais tous les Mangemorts sont prêts, Maître. Prêts à vous obéir aveuglement.

- Et bien allez vous faire foutre.

Plume affichait une confiance en lui qu'il était loin de ressentir. Les Mangemorts pourraient tuer la moitié des élèves en trente secondes. Pour être honnête, sa seule envie était de s'éloigner en courant et de se jeter dans le Lac – avec Severus, pour faire plus romantique.

Le Mangemort soupira.

- Pour la dernière fois, Maître, venez avec nous.

- Non.

Le jeune fils de Voldemort aperçut alors du coin de l'œil une des silhouettes noires saisir sa baguette et la pointer vers l'élève le plus proche; tous ses réflexes acquis depuis son enfance lui revinrent instantanément, et sans réfléchir il bondit par-dessus la table en tendant la main pour dévier le sort.

- NON!

Le sortilège vert ricocha sur un mur invisible et revint frapper son expéditeur, qui s'écroula. Plume, toute raison envolée, éclata de rire et se jeta sur le suivant.

Severus était demeuré figé de surprise.

Personne ne l'avait mis au courant. Aucun des Mangemorts, même ceux autrefois sous ses ordres – c'est-à-dire un bon quart de l'ensemble – ne l'avait prévenu. Il y avait du Lucius là-dessous. Aucun doute.

Plume restait calme. Mais ce bâtard de Malefoy savait utiliser les mots qu'il fallait. Sang, désir…

Il croisa le regard de glace et de bois. Merlin qu'il était beau. Il ferait un chef sublime, digne d'adoration. Il les mènerait à la baguette, mêlant sa gentillesse et sa séduction à la terreur qu'inspirait déjà son père. Lui-même se sentait près à lâcher Dumbledore à la seconde et à lui servir de bras droit s'il le lui demandait.

Plume avait légèrement souri.

- Non.

Le Maître des Potions remercia intérieurement tous les démons majeurs de l'Enfer. Plume était terrifié – il le sentait – mais ne se laisserait pas avoir.

Il restait juste à espérer que les Mangemorts repartent bien sagement. Ce qui était hautement improbable.

Il jura quand Plume bondit.

Lors de son altercation avec le Pr Deloignon, Severus était arrivé assez vite pour l'empêcher de vraiment se laisser aller. Mais à présent, outre le fait que c'était la pleine lune ce soir-là, qu'il avait bu, qu'il sortait de maladie, qu'il était préoccupé par le grand amour de sa vie et qu'il avait la tête légèrement bousculée par ce que Lucius – il reconnaissait son odeur, à présent que tous ses sens étaient amplifiés – lui avait dit, Plume ressentait en même temps un besoin de protéger. Protéger ce lieu qui l'avait accueilli, ces gens qui lui avaient souri et qui l'avaient considéré comme normal – même si cela ne risquait plus de se reproduire à présent.

Ce ne fut que quelques années plus tard qu'il comprit cela; sur le coup, il ne pensa qu'à tuer. Mais ne s'attaqua qu'aux Mangemorts.

Le premier qu'il atteignit fut proprement décapité, sans que personne ne comprît réellement la façon dont cela s'était fait (à savoir le renforcement et l'amplification de la force et de la souplesse de l'adolescent, la matérialisation de griffes et crocs invisibles hérités de son grand-père). Ils virent simplement la tête s'envoler et rouler au sol, son masque impassible fixant le plafond.

L'adolescent ne s'attarda pas et perfora l'abdomen de la deuxième silhouette noire qui s'approchait de lui, sa main crispée couverte de sang jaillissant au creux des reins de l'homme qui poussa un hurlement. Plume se contenta de sourire joyeusement, retirant son bras et laissant l'agresseur s'affaler à terre. Puis il se baissa nonchalamment pour éviter un éclair vert qui le frôla avant d'aller frapper un autre de ses adversaires. Levant la main, il hurla un…

- EXPELLIARMUS!!!

… retentissant d'une voix rauque; les baguettes d'une bonne moitié des Mangemorts s'envolèrent et atterrirent dans sa main et, souriant toujours, il les broya entre ses doigts et laissa les miettes de bois se répandre sue le pavé.

Avec un cri de rage, un autre Mangemort se précipita sur lui. L'adolescent lui saisit violemment le poignet et le lui brisa froidement, faisant crisser les os brisés sous ses doigts. Puis il y eut un éclair de crocs blancs et il lui mordit la gorge, arrachant tendons, trachée, veines et œsophage avant d'en cracher l'amas sanglant par terre. Il abandonna négligemment l'homme, qui s'affaissa tel un pantin désarticulé, et se redressa lentement, toisant les Mangemorts qui l'entouraient.

La scène avait duré, au grand maximum, quinze secondes. Plume avait les mains et la bouche couvertes de sang; ses yeux étincelaient comme il guettait les gestes de ses adversaires.

L'un d'entre eux, peut-être plus intelligent que ses collègues, sembla deviner sa faiblesse: il bondit en direction de l'élève le plus proche. Il n'eut même pas le temps de l'atteindre: avec un véritable rugissement de fureur, Plume tendit la main dans sa direction. La tête de l'homme explosa comme une pastèque trop mûre, et son masque maculé de sang rebondit sur le sol.

Plume restait impassible, aussi calme que s'il assistait à un cours de Binns. Il jeta un coup d'œil à ses mains, puis avec un petit soupir lécha lentement le sang qui en recouvrait l'une, fermant les yeux. C'est presque en extase qu'il fit lentement glisser sa langue le long de ses doigts, sous les yeux horrifiés des professeurs et des élèves. Il s'interrompit pour lancer un regard vicieux aux Mangemorts restants qui, sur un signe de leur meneur, touchèrent un médaillon qu'ils portaient au cou et disparurent.

Le démon eut un sifflement rageur, puis, désœuvré, laissa son regard vagabonder sur la scène. Ses yeux étrécis se fixèrent sur le corps d'une de ses victimes. Ses lèvres s'incurvèrent délicatement.

Severus savait ce qui allait suivre. Il le savait parce qu'il en avait déjà été – plusieurs fois – le spectateur, et que cette scène était du genre de celles qu'on n'oublie pas. Il avait d'ailleurs, la première fois, rendu tout son repas.

Il s'approcha doucement.

- Plume.

Sa voix résonna comme un tambour dans le silence de la Salle, et l'adolescent, qui se penchait déjà vers son futur apéritif, se raidit et se tourna à moitié vers lui.

- Non. Allez, laisse-le.

Il nota avec mécontentement que sa voix chevrotait un peu. Son élève lui montra les dents et il sentit son cœur se contracter. D'appréhension et de tristesse.

- S'il te plaît… chuchota-t-il.

Le garçon hésita. Ses yeux scintillaient d'indécision. Severus n'avait jamais su par quel mécanisme il passait… et bien… d'une "forme" à l'autre.

- Ne fais pas ça… acheva doucement Severus en s'arrêtant à trois pas de lui.

* Si tu le fais, tu t'en voudras à en mourir. Tu te dégoûteras, tu pleureras, tu te meurtriras.*

C'était une des crises les plus violentes qu'il lui avait été donné de voir. Le retour ferait forcément très mal.

Plume se saisit brusquement la tête entre les mains, et tituba avec un gémissement rauque. Severus, réprimant son envie de s'approcher de lui, l'observa prudemment. Il se rappelais trop bien la fois où Plume – l'autre Plume – les avait tous eux en faisant semblant de se calmer…

- Severus… hoqueta le garçon.

L'homme s'avança et lui passa doucement un bras autour des épaules.

- Ca va, souffla-t-il. Ca va aller.

- Qu'est-ce que j'ai fait, cette fois?… qu'est-ce que j'ai encore fait… bredouilla Plume. Je… je me hais. Severus…

- Ca suffit. Reprend-toi, fit sèchement l'homme.

Plume se raidit, puis baissa la tête.

- Oui, murmura-t-il.

Puis son regard fit timidement le tour de la Salle.

Il poussa un nouveau gémissement sourd en avisant leurs visages. Le dégoût. Encore le dégoût. La haine. La peur. Et le mépris… Ses yeux dérivèrent sur les restes des visiteurs, et il eut un ricanement désabusé. Bien sûr. A quoi s'attendait-il? De l'adoration? Après le spectacle qu'il venait de leur donner? Même eux, ses "amis", le regardaient fixement, pâles comme la Mort. Verdâtres, plutôt, rectifia-t-il quand une Serpentard de 3ème année se pencha pour vomir. Il fallait dire que l'odeur du sang se mêlant à celle de la nourriture soulevait légèrement le cœur, se dit-il machinalement.

Une onde de désespoir lui coupa la respiration, se jetant sur lui sans prévenir. Puis une autre. Encore une autre. Il se mit à trembler, se maudissant, lui et encore lui, mourant d'envie de justement mourir, de quitter cette farce absurde, sans fin. De laisser Severus tranquille. Avant que ses jambes ne l'abandonnent ou qu'un cri de souffrance ne lui échappe, il tourna les talons et quitta précipitamment la Salle.

Le silence.

Les gens ont tendance à confondre silence et vide. Or il n'y a rien de plus plein, de plus rempli, de plus pesant, de plus expressif qu'un silence.

Et une fois que le bruit des pas de Plume se fut estompé, il fut là. Choqué. A la limite du traumatisme. Et Severus, même s'il était depuis longtemps habitué à des scènes de ce genre, ou peut-être à cause de cela, ne pouvait blâmer ses élèves et ses collègues de la peur qu'il lisait dans leurs yeux. Ni de la haine. Ni du dégoût.

Mais du mépris, oui. Plume n'était aucunement méprisable. Eux, parfois, avec leurs airs de Ste-Nitouche, l'étaient bien plus.

Notamment Deloignon qui s'était subitement dressé en piaillant "Je vous l'avais dit! Je vous l'avais dit!". Severus sentit une envie soudaine de tuer – faible avatar de ce que devait ressentir Plume – s'emparer de lui, et aurait sans doute ouvert le ventre de son estimé collègue si Dumbledore n'était intervenu en prenant la parole d'une voix forte.

- Bien. Je prierais toutes les personnes présentes, élèves, professeur ou personnel, de ne pas quitter la Salle, ni de prononcer un mot. Ce qui est arrivé est arrivé, et il ne servira à rien de s'y appesantir.

Il fit une pause et reprit calmement.

- Celui que vous connaissez sous le nom de Plume Percevent est en réalité le fils de Lord Voldemort. Ce qui fait de lui un être potentiellement dévastateur. Cependant, outre que cette information devait rester secrète, il a vécu parmi vous pendant quatre mois sans qu'aucun d'entre vous n'ait jamais été en danger – du moins sans en être responsable.

Il jeta un coup d'œil au professeur de Sortilèges qui se ratatina, et continua.

- C'est pourquoi j'ai un grand service à vous demander. Le souvenir de cette soirée n'apportera rien de bon à aucun d'entre nous. Je vous prierais donc de me laisser vous soumettre à l'Oubliette. Elèves comme professeurs.

Il n'y eut même pas un murmure, et Severus admira une fois de plus le génie de Dumbledore. Battre le fer tant qu'il est chaud. Ne pas leur laisser le temps de se remettre. A cet instant, lequel d'entre eux pouvait même désirer conserver de tels souvenirs? Ca allait marcher. Le Maître des Potions se détendit imperceptiblement.

- Je vois que personne ne semble protester, reprit doucement Dumbledore, et le prend comme un signe d'acquiescement. Je vous remercie. Veuillez approcher et former une file sur le côté…

Les élèves s'exécutèrent, encore tremblants, et le vieux sorcier, après un geste à sa sous-directrice qui partit s'occuper des cadavres et un regard à Severus, saisit sa baguette et entreprit d'effacer l'incident de la mémoire des témoins.

Severus s'empressa de sortir, saisissant un pichet d'eau au passage.

Sa souffrance formait comme un fil d'Ariane au travers des ténèbres du Château, et Severus, engloutissant les couloirs obscurs par longues foulées, ne tarda pas à le retrouver. Recroquevillé dans un angle empli d'ombres, la respiration sifflante, les ongles enfoncés dans le tissu de son pantalon, et levant des yeux haineux et plus animaux qu'humains sur lui, Plume semblait encore en pleine crise. Pourtant il avait toute sa raison. Tous ses esprits. Mais en même temps il était fou. D'une folie de douleur.

Ce qui ne le rendait pas plus abordable pour autant.

- Fous-moi la paix! siffla-t-il hostilement. Je ne veux pas te voir, tu entends?!

Il était barbouillé de larmes et dégageait une odeur poisseuse de sang. Mais ses yeux flamboyaient. Plume, Plume était en colère, mais trop épuisé et malheureux pour que son sang prenne le dessus. Il était dans une colère humaine. Une colère qui ne chercherait pas à détruire au sens physique du terme, mais qui désirait de toutes ses forces faire mal, encore plus mal, à n'importe qui… Severus ne sourit pas, ne le regarda même pas avec douceur. Plume l'aurait haï. Au lieu de ça, il lui balança le pichet sans un mot.

L'adolescent l'attrapa souplement, resta un moment dans l'ombre, immobile, puis brusquement bu à longues rasades, avant de saisir l'eau à pleines mains et de tenter d'ôter le sang qui collait à son visage, frottant frénétiquement, puis terminant par jeter le broc à terre avec un cri de rage. Severus se contentait de le contempler. Ce Plume-là, froid comme une lame de glace, haineux, méprisant, il ne le connaissait pas. C'était dérangeant et… attirant.

- Tu as terminé? demanda-t-il sèchement.

Il ne reçut qu'un regard glacé en réponse.

- Dumbledore est en train d'effacer leurs mémoires, reprit-il plus calmement en s'accroupissant pour être à sa hauteur. Il n'y aura pas de problèmes.

- PAS DE PROBLEMES?!

Plume éclata de rire, un rire dément, effrayant, désespéré, chargé de fiel et de mépris.

- Mais regarde-moi! Comment peux-tu dire qu'il n'y aura PAS DE PROBLEMES?!

Il balaya le pot d'un geste et s'approcha d'un Severus à genoux qui ne bougeait pas.

- Sans vouloir me vanter, je suis un monstre, Severus. Et pas au sens de la gentille bébête un peu bizarre qui ferait une chouette peluche pour les enfants. Une immondice, Severus. (Il se rapprocha encore, ses yeux plantés dans les siens, très calme et froid.) Qui aime se rouler dans le sang au sens propre du terme. Et même toi, (Il cracha presque le mot.) tu ne pourras rien y faire.

Il se remit brusquement debout, et passa une main dans ses cheveux, avant d'y jeter un regard dégoûté.

- Quand je pense, reprit-il narquoisement, que pendant seize ans je me suis dit que j'y arriverais, qu'un jour je saurais m'arrêter… Lucius a raison, au fond. Ce serait tellement plus facile…

- Bien sûr. Vas-y. Fait comme ton père, dit froidement Severus, envahi par la panique – panique que Plume abandonne réellement. Deviens comme lui. Et ça t'apportera quoi, dis-moi?

- Parce que ça m'a apporté quelque chose, jusqu'ici? siffla Plume en se laissant retomber en face de lui. QU'EST-CE QUE CA M'A APPORTE, A PART DE LA PEUR, DU DEGOUT DE MOI-MÊME, ET DE LA HAINE DANS LES YEUX DE TOUS CEUX QUE JE CROISE?!

- C'est bon, tu as fini ton petit cirque?

- TA GUEULE! POUR QUI TU TE PRENDS?! TU M'AS LÂCHE QUAND J'AVAIS NEUF ANS, ET DEPUIS QUATRE MOIS TU ES UN PARFAIT CONNARD!!! JE TE DETESTE! T'AS COMPRIS, CA?! JE TE DETESTE!

Et puis après, il y eut le plus grand silence de toute la pauvre vie de Severus Snape. Plume le regardait, le visage figé, sans qu'il puisse deviner si c'était de colère ou enfin de confusion. Lui-même était abasourdi, et saisit tour à tour par l'envie de protester pitoyablement, de le frapper, ou d'éclater de rire. Un rire de dérision, bien entendu. Ce n'était pas la fin de soirée qu'il imaginait…

- Tu me détestes, répéta-t-il seulement.

Plume ne bougea pas, tête détournée, et Severus se dit qu'au point où il en était, autant continuer. Et puis… et puis tout bête, là, au fond, à moitié écrasé par sa conscience sarcastique et méprisante qui se moquait de lui, il restait un peu de cette ridicule petite chose qu'on nomme l'espoir. Et qu'après ce que Plume venait de lui sortir, c'était à peu près tout ce qu'il lui restait.

- Ecoute…

Merde. Il n'avait jamais eu autant de mal à s'exprimer. Où étaient passées ses belles tournures de phrases?

- Plume…

L'adolescent leva les yeux sur lui. Il tremblait. Et Severus, en rencontrant son regard brun et gris, trouva brusquement horriblement facile de parler.

- J'ai peur de toi, avoua-t-il tout de go, mais… pas de haine, pas de dégoût, pas de mépris… pas de pitié, non plus, continua-t-il rapidement sans le regarder. Tu le sais très bien.

Plume ne dit toujours rien.

- Tu me fais peur, enchaîna-t-il, pas seulement pour ce que tu es, ou qui tu es mais… et bien… parce que tu es beau, Plume… (Il hésita, s'approcha un peu de lui.)… comparé à nous autres, tu es tellement beau… de l'extérieur… comme de l'intérieur, surtout… Tous ces autres, là, ils ne savent pas… ils ne connaissent pas tout ça… (Plume le regardait fixement, le regard vide.)… s'ils savaient, s'ils comprenaient, ils ne te mépriseraient pas non plus… ils ne seraient pas comme ça… Tu sais… (Il leva une main hésitante vers son visage, effleura sa joue, ses lèvres, repoussa ses cheveux de ses longs doigts élégants.)… tu es bien trop élevé pour moi et je ne suis même pas digne de baiser tes chaussures, mais… moi… je ne t'ai jamais regardé comme ça. Jamais. Et… pour ça… (Plume était à présent contre lui, immobile, et il chuchota.)… pour ça tu pourrais encore essayer un peu – est-ce que tu me déteste vraiment?

La bouche de Plume heurta violemment la sienne et Severus, empoignant les cheveux fins et souples à pleines mains, lui retourna son baiser sans douceur, cherchant brutalement sa langue, le repoussant contre le mur, le faisant glisser à terre, l'écrasant au sol de tout son poids, fou de cette bouche au goût de larmes, de sang, de poires sucrées, et de ce corps qui se frottait frénétiquement au sien, qui le suppliait, gémissait, sanglotait de désir et de reconnaissance, s'abandonnait, déjà soumis, déjà repentant, et si heureux ô mon Dieu si douloureusement heureux… Le jeune professeur l'aurait sans doute pris sur le carrelage, si des bruits de pas n'avaient résonné un peu plus loin, se dirigeant distinctement dans leur direction. Severus n'eut que le temps de se redresser et d'aider Plume, un peu sonné, à se remettre debout, avant que le Pr MacGonagall ne débouche au coin du couloir. La femme ne fit aucune remarque sur leurs tenues en désordre et leur expression un peu perdue, ne les remarquant pas, les attribuant à la situation, ou ne désirant pas en parler, et les informa simplement.

- Le Pr Dumbledore souhaiterait vous voir. Tous les deux.

Ils échangèrent un regard – égaré pour l'adolescent, brûlant pour l'homme – et lui emboîtèrent le pas.

Severus l'avait embrassé. Severus croyait en lui. Severus l'avait embrassé. Severus voulait rester avec lui. Severus l'avait embrassé. Severus lui faisait confiance. Nom de Dieu, Severus l'avait embrassé – enfin il avait commencé mais bon…

Plume trébucha et tressaillit quand l'homme le rattrapa par le coude avant de le relâcher immédiatement. Son cerveau devait avoir la consistance de jus de Golem. Il n'était plus en colère, ah ça non. Non. En fait il était envahi par la plus grande peur de sa vie. On n' a pas peur quand on n'a rien a perdre. Or il venait de se voir offrir mieux que la planète entière. Severus.

Il en était malade de peur.

La Grande Salle était pratiquement déserte. Il ne restait que Dumbledore, et face à lui, trois écoliers qui semblaient en profond désaccord avec leur vénérable directeur.

- Avec tout le respect que je vous dois, Monsieur, allez vous faire voir, déclarait le plus petit à l'instant où Plume, suivant les deux autres professeurs, pénétrait dans la pièce.

La voix de Raven résonna un bon moment dans le silence embarrassé qui suivit. Puis les quatre occupants avisèrent les nouveaux venus, et Plume se retrouva face à face à ses amis confus.

Dumbledore se racla la gorge.

- Ces messieurs refusent de se soumettre à l'Oubliette, dit-il simplement, ses yeux plongeant dans ceux du jeune démon-dragon.

Ce dernier sentit le désespoir le balayer, oubliant momentanément Severus. Il ne pourrait pas. Il ne pourrait pas supporter qu'ils sachent, qu'ils sachent et le regardent avec leurs regards qui sauraient… Il leur adressa un regard suppliant.

- Je vous en prie, murmura-t-il.

Les trois autres échangèrent un regard hésitant. Ce fut Killian qui secoua la tête.

- Cesse d'être stupide, dit-il tranquillement. Ou alors orgueilleux. Tu n'es pas un tel monstre que nous allons nous empresser de t'oublier…

Il y eut un court silence tandis que tous pesaient les conséquences de la déclaration. Puis Charlie hocha la tête.

- Exactement. Arrête de te monter le bourrichon avec tout ça. Fils de Tu-Sais-Qui ou pas, tu m'as promis de m'aider pour mon devoir de Potions… Et ça ne sera pas facile si tu n'oses même plus me parler. Qu'est-ce que tu en dis, Raven?

- Boh, moi, j'étais déjà au courant, fit le blond en piochant dans un plat sans sembler plus concerné que ça.

- QUOI?! Et tu nous as rien dit, espèce d'enfoiré?!

- Mais j'avais promis, geignit l'Assassin.

- C'est pas une raison! Je…

Le Pr MacGonagall laissa échapper un rire légèrement hystérique, Severus se laissa tomber sur une chaise en tremblant, et Dumbledore se passa une main lasse sur le front tandis que les trois adolescents commençaient à se chamailler à qui mieux mieux. Ce ne fut que quand Plume, moitié riant, moitié pleurant, se laissa tomber par terre, qu'ils se jetèrent sur lui en s'excusant et jurèrent à Dumbledore que s'il essayait de leur ôter ne serait-ce qu'une seconde de la soirée de leur mémoire, ils mettraient le feu au Château.

Et Dumbledore céda.

Ils étaient partis. Dumbledore et MacGonagall renforcer les protections du Château, et les quatre adolescents se coucher, échangeant des serments d'amitié éternelle. Et Severus resta seul.

Plus exactement, sans Plume.

Il aurait pu transplaner immédiatement auprès de Lucius pour lui réclamer quelques explications – il aurait dû. Mais non. Le blond devait être de sale humeur – bien fait pour lui – et il n'avait vraiment pas envie de subie une fois de plus ses délires de gloire et ses reproches d'inactivité. Il voulait Plume.

Mais Plume était reparti avec ses trois oh-si-fidèles amis. Et Severus était sidéré de constater à quel point il se sentait… merde… trahi.

Il accéléra le pas en direction de ses appartements. Trahi. Elle était bien bonne. Pour pouvoir être trahi, il faut déjà qu'il y ait quelque chose à trahir. Or dans ce cas précis, il n'y avait rien. Rien d'autre qu'un baiser dont le souvenir le saisissait à l'estomac et le faisait trembler de délice – et d'angoisse. Qu'est-ce que tu crois? Que Plume est à toi? Qu'il suffisait de lui dire… de lui dire quoi, d'abord? Que tu ne le détestais pas? Que tu ne le méprisais pas? Et après? Qu'il allait te sauter des les bras? – ce qu'il a fait, d'ailleurs, mais il n'est plus là. Tu es stupide, Severus Snape, d'autant plus stupide que tu sais parfaitement que ça ne rime à rien. Un démon-dragon et un Mangemort de quinze ans son aîné. Ben voyons. Et les Elfes de maison vont s'emparer du pouvoir, aussi.

Plume te l'a bien fait comprendre, même si c'était inconsciemment. Il. N'est. Pas. Là. Il est avec ses amis. Pas avec toi.

Demain, tu mettras les choses au clair. Tu recommenceras comme d'habitude. Tu essaieras de ne pas le regarder durant tes cours. De ne pas guetter sa voix. Tu essaieras même de l'oublier – tu réalise à quel point tu as pu être stupide pour en arriver là? Pour avoir pu penser que…?

Il revint sur terre en sentant quelque chose tirer timidement sur sa manche. Se retourna. Et rencontra les yeux brun-glace de Plume.

Son cœur effectua un impeccable salto arrière. Plume. Plume, l'air hésitant, encore vêtu de ses vêtements de fête souillés de sang. Plume qui ne semblait plus désespéré, ni en colère, ni perdu, mais à la fois résolu et terriblement inquiet. Comme Severus ne disait rien, l'adolescent eut un sourire tremblant.

- Je ne te déteste pas, débita-t-il à toute vitesse. Je peux dormir avec toi?

Severus fut d'abord frappé par le tutoiement – Plume, hormis durant certaines crises, ne l'avait jamais tutoyé depuis environ l'âge de cinq ans. Puis le sens de la première phrase lui apparu à peu près clairement. Malheureusement la deuxième lui ôta toute capacité de réfléchir.

- Dormir, répéta-t-il lentement.

L'adolescent hésita, puis hocha vigoureusement la tête.

D'accord. Plume squattait parfois son lit quand il était petit. Mais là, ce n'était pas franchement pareil. Il inspira profondément, cherchant à retrouver un chemin de pensée à peu près rationnel.

- Ecoute…

Un éclair de douleur passa dans le regard de son élève, qui baissa la tête.

- Non… non, bégaya-t-il. Pardon. Excusez-moi de vous avoir dérangé avec ça. Pardon. Je… pardon, bredouilla-t-il en tournant les talons.

Plume avait peur. Peur de le perdre. Severus en resta tout bête et faillit le laisser partir.

- Reviens ici, lança-t-il sèchement.

Il crut que Plume n'allait pas lui répondre, mais l'adolescent s'arrêta et revint vers lui en traînant les pieds, le visage incertain. Combattant douloureusement l'espoir qui s'y lisait.

- Viens, dit-il simplement en ouvrant la porte de ses appartements.

Il l'entendit le suivre à l'intérieur et refermer soigneusement la porte tandis qu'il allumait quelques bougies. Quand il se retourna, Plume se tenait là, indécis. Il s'approcha de lui, le prit dans ses bras et l'embrassa doucement.

Le goût de ses lèvres défiait toute imagination.

Puis il s'écarta, observa la bouge rougie entrouverte, les yeux brillants, les joues envahies par le sang, et décida qu'il ferait bien de s'écarter un peu plus.

- Juste dormir, murmura-t-il tandis que Plume tentait de l'embrasser à nouveau.

L'adolescent hocha de nouveau la tête – mais cette fois ses yeux étincelaient.

- Je serai sage, promit-il. Tu n'auras jamais eu d'élève aussi sage, ajouta-t-il en enfouissant son nez contre son torse.

Severus retint un gémissement frustré.

- Très bien, reprit-il d'une voix qu'il tenta de rendre ferme. Et ce, jusqu'à la fin de ta scolarité… Nom de Dieu, Plume!

Le garçon l'avait brusquement encerclé de ses bras et le serrait de toutes ses forces de démon-dragon contre lui, avec presque brutalité, les yeux clos. Il ne dit pas un mot, mais Severus n'eut aucun mal à comprendre et sentit sa gorge se serrer. Il lui ébouriffa doucement les cheveux.

- Tu ne gagnes pas au change, tu sais, murmura-t-il.

Plume eut un reniflement amusé.

- C'est plutôt toi le perdant, si tu veux mon avis… Merci, ajouta-t-il à voix basse. Merci…

Severus lui effleura légèrement les lèvres pour le faire taire, et l'adolescent eut un soupir. Ils demeurèrent un moment enlacés, puis Severus s'écarta.

- Tu étais venu dormir, rappela-t-il sèchement.

Plume sourit.

- Je t'adore, tu sais. Et tu sais quoi? On dirait que tu as peur…

- Je n'ai pas peur.

- Menteur… murmura Plume en lui tendant ses lèvres.

Severus avait un jour lu que les démons-dragons étaient naturellement doués pour n'importe quelle discipline corporelle, qu'il s'agît de combat ou de plaisir. La deuxième affirmation était vérifiée. Autant leur premier baiser avait été violent et le deuxième tendre, autant celui-ci fut passionné et sensuel. Si Severus n'avait connu la situation de Plume et son absence quasi-totale de relations avec d'autres individus, l'idée que l'adolescent fût totalement inexpérimenté ne l'aurait jamais effleuré. Mais non. Il était à lui. Sa bouche était à lui. Ses yeux. Peut-être pas sa voix et son rire, mais ses soupirs. Ses caresses. Son corps.

Il le repoussa un peu plus brusquement qu'il ne l'aurait souhaité.

- Il est tant de dormir, répéta-t-il d'une voix rauque.

- Encore… soupira Plume.

Il contempla le visage alangui de son… de son quoi, d'ailleurs? Amant? Plume et amant dans la même phrase…

- C'est moi qui commande. Au lit.

- Mais je n'y vois aucun inconvénient…

- Ne joue pas à ça avec moi, le coupa-t-il froidement.

Plume eut un rire joyeux.

- Je te mènerai par le bout du nez!

- Je te mettrai au pas, rétorqua Severus en l'abandonnant pour passer dans la chambre.

- Attends!

Il allait vraiment devoir faire attention, pensa-t-il quand Plume le fit tomber d'un coup d'épaule sur le lit. Mais l'adolescent ne repassa pas à l'attaque, et se contenta de se blottir contre lui.

Il leur fallut longtemps pour se déshabiller mutuellement, chacun frémissant sous les mains de l'autre. Severus essaya de n'y mettre aucun sentiment, de s'occuper de lui comme il s'en était occupé lorsqu'il n'était qu'un gosse. Mais Plume le regardait comme il ne l'avait jamais regardé auparavant, Plume l'effleurait doucement au passage, Plume lui offrait sa bouche bien plus qu'il ne l'aurait souhaité pour son pauvre sang-froid, Plume lui offrait ses yeux avec encore plus d'abandon qu'il avait jamais pu les lui offrir…

Mais quand les bougies eurent été soufflées et que Plume se glissa simplement dans ses bras au milieu du grand lit, il n'y eut plus que du soulagement et de l'épuisement. Une heureuse et confortable fatigue après la nuit de cauchemar et de rêve qui venait de s'écouler. Severus, un paquet de tendresse soigneusement serré contre son cœur, avait à peine conscience de l'adolescent qui lui parlait d'une voix endormie.

- … et tu sais, Raven m'a dit de te dire qu'il te casserait la gueule si tu me faisais du mal. Sachant qu'il peut rameuter toute la Guilde des Assassins du pays s'il en a envie, je crois que tu passerais un mauvais quart d'heure…

- Je ne lui ferais pas ce plaisir… marmonna Severus en le resserrant contre lui.

- Tu sais ce qui est bien?

- Non…

- C'est que demain, tu seras encore là. Et moi aussi.

C'était vrai que c'était bien.

A suivre…