Titre: Risques personnels version remaniée 10/2003 Chapitre 2 : Mon vrai récit (2/7) Auteur: R. J. Anderson Email: rebeccaj@pobox.com Traduit de l'anglais par dark_rogue@caramail.com Categorie: Drama/Angst Mots clefs: Rogue, Maugrey, cinquième année, après la coupe de feu (Accord parental souhaitable)

"Salut, espèce de Serpentard sans-c?ur prétentieuse et dévergondée ," dit George Weasley gaiement, se glissant sur une chaise en face d'elle à la bibliothèque. "J'ai une question pour toi."

Maud ne leva pas la tête, et ne fit aucun signe indiquant qu'elle avait remarqué sa présence : elle tourna simplement une page avec une expression soignée d'indifférence et dit d'une voix à peine audible, "Va-t-en, George."

La dernière fois qu'on l'avait vu parler aux jumeaux Weasley, les résultats n'avaient pas été plaisants. Sa compagne de chambre Muriel avait provoqué un combat désagréable avec elle à propos de cette discussion et toute cette affaire avait presque démoli ses rapports avec Rogue. Après cela, Maud s'était dictée une nouvelle règle : ne parler à aucun Gryffondor, et en particulier pas à Fred et George Weasley.

Cela n'avait pas été facile, parce que les Weasleys étaient des fripons sympathiques qui non seulement avaient leurs cours de potions en commun avec Maud, mais aussi son intérêt pour les expériences pratiques en dehors des heures de classe et ils semblaient savoir instinctivement que sa froideur vers eux était hésitante. Même maintenant, malgré le fait qu'elle ne leur ait pas dit un mot depuis cinq semaines, ils continuaient à plaisanter avec elle, demandant son conseil au sujet d'ingrédients de potions.

Une partie d'elle avait très envie accepter leur offre d'amitié, même en secret. Mais combien de double vies pouvait-elle mener ? C'était une chose que de réussir à tromper ses camarades d'étude, mais c'en était une autre que de réussir à tromper Rogue . Et il serait injuste de trahir la confiance que Rogue avait placé en elle, alors qu'il lui avait déjà donné une chance d'avoir une vie normale et des amis comme les Weasleys au lieu de s'allier avec lui - et qu'elle l'avait choisi lui.

"Ouais, je sais," dit George, "tu as peur de ton amour pour moi. Mais sérieusement, pourquoi tu ne viens jamais à aucun match de Quidditch ? Serpentard a joué contre Serdaigle hier et pratiquement toute ta Maison y était, agitant des petits drapeaux verts et sifflant. Mais pas toi. Maintenant c'est ce que j'appelle un manque d'esprit sportif."

Les mots étaient dits sur un ton désinvolte, mais Maud entendit le message derrière eux : je m'inquiète pour toi. Tu devrais sortir plus.

"George," dit-elle, ne le regardant toujours pas et déplaçant ses lèvres le moins possible, "je ne peux pas te parler. Je suis désolée, c'est juste que je ne peux pas. Va t'en s'il te plaît avant que tu ne me crée des ennuis."

Il y eut un moment de silence tendu. Alors, brusquement, George repoussa sa chaise et partit. Maud se mordit la lèvre durement, refrénant des larmes menaçantes, avant de ramasser son livre et de continuer à lire comme si rien n'était arrivé.

Elle était venue à la bibliothèque à la recherche d'un coin calme pour travailler et d'une chance d'échapper à l'?il sinistre de Muriel. Mais si réfléchir à la remarque oblique de Rogue de cet après-midi avait perturbé sa concentration, la visite de George l'avait brisée. Pendant plusieurs minutes encore Maud regarda fixement la page devant elle, mais le livre aurait pu être écrit en Charabia que c'aurait été pareil. Enfin, avec un soupir, elle ferma le volume avec un claquement.

Athéna dut avoir senti le trouble de sa maîtresse, car elle hulula doucement et grignota l'oreille de Maud, lui arrachant un sourire réticent. "Tout ira bien," murmura-t-elle, caressant la tête du petit hibou. Satisfaite, Athéna ébouriffa ses plumes et se blottit contre elle et ce fut avec un c?ur un peu plus léger que Maud quitta la bibliothèque pour se diriger vers son dortoir.

Elle avait seulement fait quelques pas quand une main sortie de nulle part, se referma sur son bras et la tira hors du couloir, directement à travers ce qui avait semblé être un mur solide. Trop effrayée pour crier, elle regarda fixement le visage rougi de George Weasley, qui brandissait une baguette magique éclairée et lui souriait presque timidement.

"Maintenant," dit-il, "où en étions nous ?"

***

"Il n'a aucun droit de t'utiliser de cette manière, Maudie."

Alastor Maugrey avait pris une mâchoire carrée, son expression plus sinistre que jamais. "Quand je pense aux dégâts qu'il a déjà fait-"

Maud laissa retomber ses mains. "Quoi ? Quel mal a-t-il fait ? Oui, il m'a aveuglée, mais je le lui ai pardonné. Et si je n'ai pas le droit de pardonner à Rogue, qui en a le droit?"

"Ce n'est pas cela." La voix de son oncle était épaisse. "Tu n'as aucune idée du nombre de choses ...de combien il est devenu une partie de toi, sans même que tu le remarques. Sais-tu que le cours de potion était la plus mauvaise matière de ton père à l'école ? Ta mère n'y était pas non plus très bonne. Mais tu as toujours été inhabituellement douée avec un chaudron et je n'ai jamais su pourquoi ... jusqu'à présent."

Elle se rassit, secouée. "Je ne le crois pas. C'est du non-sens, c'est de la folie. Pourquoi ne serais-je pas bonne en cours de potion, même si mes parents ne l'étaient pas ? J'avais de bons professeurs à Durmstrang et Rogue est l'un des meilleurs. Tu es juste-" Elle s'arrêta juste à temps. Trop de monde avait déjà traité Maugrey Fol ?il de paranoïaque : elle s'était juré qu'elle ne le ferait jamais. "- trop inquiet," finit-elle sans conviction.

Maugrey la regarda fixement un instant, comme s'il était incapable de croire ce qu'il entendait. Puis il grinça, "Je le tuerai," et se mit sur ses pieds.

"Non!" Maud s'était levée de sa chaise en un instant, saisissant le bras de son oncle. "Écoute toi," plaida-t-elle. "As-tu vraiment si peu confiance en moi, après toutes ces années ? Tu m'as élevée, tu m'as tout appris, tu m'as entraînée, tu m'as fait devenir ce que je suis. Tu devrais savoir plus que tous - que je fais mes propres choix et que je n'accepte aucun compromis. Je ne renonce pas au combat contre l'obscurité. Je le continue , du mieux que je peux."

Elle respira à fond. "C'est vrai, le Professeur Rogue était un Mangemort. Il a blessé des gens, en a peut-être même tué, pour Voldemort. Et maintenant qu'il a changé de camp, bien que je croie que son repentir est véritable, je n'apprécie pas toujours ses méthodes et je ne suis pas toujours d'accord avec ses actions. Il le sait aussi : je ne le lui ai pas caché . Mais il n'a pas essayé de me faire changer d'avis. Je te le jure, mon oncle : je peux peut-être jouer au même jeu que Rogue, mais je ne suis pas - PAS - son pion."

***

"Désolé d'avoir eu à te traîner jusqu'ici comme cela," dit George, la lâchant . "Bien que ton expression quand je t'ai saisie ait juste été superbe. Ecoute, as-tu des problèmes ? Je veux dire, de la sorte qui n'est pas amusante."

Maud l'entendit à peine : elle inspectait la pièce. C'était un petit espace, sans fenêtre, avec une série de planches sur un côté et une rangée de crochets l'autre. Plusieurs sacs de toile - des ingrédients pour faire des potions très probablement - accrochés à ces derniers, tandis que les planches supportaient des livres, des liasses de parchemin et d'autres fournitures scolaires. "Où sommes nous ?"

"C'est un cabinet de voyage. Fred et moi l'avons découvert l'année dernière quand nous nous exercions à crocheter les serrures. Il n'avait pas été ouvert pendant des années et il devait se sentir seul ou quelque chose comme ça, parce qu'une fois que nous l'avons nettoyé et y avons mis nos affaires, il a commencé à nous suivre tout autour de l'école." Il haussa les épaules. "Donc nous avons collé un Charme Caméléon sur la porte et maintenant personne d'autre ne peut le trouver."

"Je suis impressionnée," dit Maud et elle le pensait.

"En fait, personne ne sait que nous sommes ici et personne ne peut nous entendre, donc-" George lui donna une claque sur l'épaule. "Vas-tu répondre à ma question, oui ou non ?"

Maud soupira. "Je n'ai aucun problème. Vraiment." Comme George semblait sceptique elle continua rapidement, "c'est juste que je ne peux pas me permettre d'être attrapée à te parler, pour des raisons que je n'ai pas le droit exprimer."

Son visage s'assombrit. « C'est Umbridge, n'est-ce pas? »

« Non, ce n'est pas Umbridge. » Ce qui était, heureusement, vrai. Jusqu'ici, Maud avait réussi à éviter d'attirer l'attention de cette femme, et elle était déterminée à laisser les choses de cette façon. « Ecoute, j'apprécie le souci que tu te fais pour moi, mais... »

"Muriel Groggins, alors ? J'ai entendu dire qu'elle est devenue folle quand elle découvert que tu nous avais parlé." Il fit une grimace. "Cette stupide vache n'arrive même pas à décider lequel d'entre nous elle préfère."

Cela, au moins, répondait à une question que Maud s'était posée pendant quelque temps. Mais l'honnêteté la contraint à admettre, "Non, ce n'est pas à cause de Muriel, bien qu'elle ne rende pas exactement ma vie facile ces derniers temps . Je - je regrette de ne pas pouvoir te le dire, mais je ne peux pas."

"Tu travailles pour ton oncle, n'est-ce pas ?"

C'était un terrain dangereux. "Pourquoi penserais-tu cela ?"

"Parce qu'il est vraiment cool et quelque chose en toi me le rappelle. Pas ton apparence," ajouta George à la hâte. "Juste ... je sais pas ... quelque chose."

Subitement Maud vit le moyen de s'en sortir. "Tu as raison," dit-elle, baissant la voix. "Il m'a envoyé ici pour espionner Rogue. Il ne lui fait pas confiance, tu vois. Mais je dois être une élève modèle de Serpentard, comprends-tu ? Et je ne peux pas être amie avec quelqu'un qui n'est pas à Serpentard - mon oncle y compris. Ou bien je ne réussirai pas à m'approcher assez de Rogue pour apprendre quoi que ce soit." Dans les faits, c'était la vérité : ce que George pouvait en penser était une autre question.

"Je le savais!" Il était triomphant. "Fred et moi avions un pari là dessus, il sera ennuyé quand je le lui dirais."

Maud fut étonnée. "Il pensait que j'étais vraiment une Serpentard sans- c?ur prétentieuse et dévergondée ?"

"Nanh. Nous savions tous les deux que tu ne l'étais pas. Il pensait que tu avais un petit faible pour Rogue et que tu ne voulais pas le vexer. Je lui ai dit qu'il était ravagé, que c'était juste une des rumeurs idiotes de Muriel et nous t'avons tous les deux entendu le nier, mais-" Il haussa de nouveau les épaules. "Parfois Fred a de ces idées."

Maud choisit de laisser passer cela. "George", dit-elle, avec une urgence seulement en partie simulée, "tu dois comprendre. Ne dis à personne ce que je viens de dire. A Fred, si tu le dois, mais à personne d'autre. Ce n'est pas un jeu auquel je joue ici. Si la vérité était connue, il pourrait vraiment y avoir des problèmes."

Les jumeaux Weasley savaient évidemment tenir leurs langues, s'ils pensaient que la chose était suffisamment importante : après tout, ils avaient déjà de nombreux secrets à leur propre compte. Mais même dans le pire des cas, si l'histoire de Maud transparaissait, ce ne serait pas la vérité entière, ou même sa partie la plus destructrice . Indépendamment de ce qui pourrait lui arriver après cela, au moins elle n'entraînerait pas Rogue dans sa chute.

La lueur espiègle brillant dans les yeux de George disparut et son expression devint brusquement sérieuse. "Fred et moi étions déjà d'accord sur ce point," dit-il. "Si tu nous disais à l'un ou à l'autre ce qui se passait, nous t'aiderions si nous le pouvions, mais nous ne dirions rien à quiconque d'autre à moins que tu ne veuilles que nous le fassions." Il lui tendit sa main. "Ca te va ?"

Maud se força à sourire et serra la main qu'il offrait. "Ca me va."

Une alliance avec les Weasleys n'était pas une chose prévue, mais maintenant que c'était arrivé, elle devait admettre que cela ne pouvait pas être une si mauvaise idée. Elle devrait être prudente, bien sûr et garder ses réunions et conversations avec eux à un minimum. Mais il serait bon de savoir qu'elle pourrait s'adresser à eux si elle avait besoin d'aide et ils seraient heureux d'avoir son avis si une de leurs expériences ne tournait pas tout à fait comme ils l'avaient prévu.

Le sourire de George revint. "Super! Fred me doit dix Galions."

Seulement ce qui était dommage avec ce pari, pensa Maud, d'une manière un peu extravagante. C'est que Fred ne saurait jamais qu'il avait eu raison.

***

"Tu es trop jeune, Maudie." Les mots étaient un gémissement, arraché des profondeurs de la large poitrine de son oncle. "Tu penses que tu sais ce que tu fais, mais tu n'as aucune idée du danger."

"Alors tu es celui qu'il faut blâmer. Qui m'a envoyé à Durmstrang pour espionner Karkaroff ? Et à Poudlard pour espionner Rogue ? Tu ne pensais pas que j'étais trop jeune pour mener à bien ces missions. Pourquoi les choses sont-elles si différentes maintenant ? Est-ce que tu es jaloux parce que c'est moi qui travaille avec Rogue et non pas toi ? "

Elle était allé trop loin. Avant même que le dernier mot n'ait même quitté sa bouche, elle le savait, mais il était trop tard pour retirer son accusation . Alastor Maugrey tressaillit visiblement et s'effondra sur sa chaise comme si elle l'avait frappé.

"C'était une chose dure à dire, gamine. Une chose très dure à dire."

Maud ne répondit pas , sachant que tout ce qu'elle pourrait ajouter rendrait seulement pire la situation. Elle resta simplement debout là à le regarder, une boule douloureuse se formant dans sa gorge.

"Je suppose que je suis coupable," dit-il lourdement après un moment. "Ton père était un homme doux, Maudie, et un savant. Quand les Mangemorts sont venus, il ne s'est pas battu contre eux. Ta mère a essayé - elle avait du caractère, Margo. Mais elle ne savait pas comment faire et cela l'a seulement fait tuer."

Il baissa les yeux vers ses grandes mains. "Quand tu es devenue ma pupille, je me suis juré que je ne te laisserai pas grandir sans t'apprendre à te battre, que je m'occuperai de toi. Parce que je savais que je ne pourrais pas toujours être là pour toi. Mais peut être ...que je suis allé trop loin, que je t'ai rendue indépendante avant que tu ne sois prête à l'être. Par crainte que tu ne sois trop comme ton père, je t'ai trop fait me ressembler."

"Pas trop," dit Maud doucement, mais son oncle ne sembla pas entendre. Il continua :

"J'aurai dû savoir que tu serais attirée par Rogue. Tu as grandi en étant habituée au danger, habituée à courir des risques." Il émit un soupir lourd. "Et vivant avec un combattant dur, laid pour la plus grande part de ta vie, il t'aurait été dur de résister à un homme qui semble être fait d'une même matière."

Si Maud avait encore été en train de manger, elle se serait étranglée. Alastor Maugrey, se comparant à Rogue ? Mais quand elle y repensait...

Elle décida de ne pas y penser. "Mon oncle, je travaille avec le professeur Rogue. C'est mon professeur. Et oui, je ressens une certaine .affinité avec lui. Je crois que c'est un homme intègre et que je peux avoir confiance en lui. Mais c'est tout. Il ne m'a jamais donné aucune raison de-"

Non, elle allait définitivement dans une mauvaise direction. Elle se racla la gorge et réessaya : "Je sais que tu as peur pour moi, que tu veux m'éviter de prendre de mauvaises décisions. Mais tu oublies -que je ne suis pas toute seule . Professeur Dumbledore sait exactement ce qui se passe et je sais qu'il n'hésiterait pas à intervenir s'il pensait que j'agis imprudemment. Même s'il ne se souciait pas pour moi en particulier - et je sais qu'il se soucie de tous ses élèves - il se sentirait obligé s'occuper de moi à cause de toi." Elle fit une pause. "À moins que tu n'ais décidé qu'il ne soit pas digne de confiance non plus ?"

"Ne dis pas des bêtises, Maudie," gronda Maugrey. "J'ai peut-être la réputation de sursauter devant chaque ombre, mais je ne suis pas assez fou pour penser que je n'ai aucun ami."

"Est-ce que Dumbledore est assez fou pour croire qu'il n'a aucun ennemi ?"

"Bien sûr que non."

"Alors pourquoi tu ne lui demandes pas pourquoi il fait confiance à Rogue ?"

Fol Oeil frotta le côté de son nez déchiré. "Maudie, j'ai eu cette conversation avec Albus il y a longtemps. Nous ne sommes simplement pas d'accord en ce qui concerne Rogue, c'est un fait."

Maud laissa retomber ses mains à ses côtés, vaincue. "Alors je suppose ... qu'il n'y a plus rien à dire."

***

"Vous avez l'air exceptionnellement calme ce soir, Mlle Maugrey."

Le ton de Rogue était plus civil qu'elle ne l'avait jamais entendu - peut- être sentait-il quelque remords pour l'avoir humiliée cet après-midi, bien qu'elle sache qu'il ne fallait pas s'attendre à ce qu'il le dise.

"Il y a beaucoup de choses auxquelles je dois penser," dit-elle, retroussant les manches de ses robes et enfilant les gants en peau de dragon dont elle aurait besoin pour protéger ses mains de la Potion de Dissolution qu'ils faisaient. Une goutte de cette substance, pouvait fondre à peu près tout, si on lui donnait une minute ou deux. Voilà pourquoi elle devait être préparée avec un soin méticuleux, ajoutant les ingrédients dans le bon ordre et ensuite versée à la hâte dans des flasques d'adamantine avant qu'elle ne puisse ronger le fond du chaudron dans lequel elle était préparée. Maud pouvait juste imaginer le chaos qu'un tel projet pourrait créer si Rogue essayait jamais de l'apprendre à sa classe - ce qui était, bien sûr, la raison pour laquelle il ne le faisait pas .

"Permettez-moi alors de vous donner une autre pensée à considérer." Son sourire était faiblement sardonique. "Il semblerait que j'ai ... une obligation ... qui nécessitera mon éloignement de Poudlard demain. J'ai pris des dispositions pour me faire remplacer et je pense revenir dans la soirée, mais je prépare une potion dans mon bureau qui doit être remuée en sens inverse des aiguilles d'une montre toutes les cinq heures et elle aura besoin d'attention en mon absence. Je crois que je peux compter sur vous ?"

Elle fut étonnée. "Bien sûr."

"Bien." Il lui remit une fiole de venin de Basilic. "Deux gouttes seulement, Mlle Maugrey : et comptez jusqu'à dix avant d'ajoutez la deuxième."

Maud inclina la tête. Soigneusement elle déboucha le bêcher et laissa tomber une goutte dans les profondeurs du chaudron. Une ... et deux. La solution fuma, glouglouta et tourna d'une brillante couleur verte. "Bien. Quoi d'autre ?"

Silence. Elle se retourna pour voir Rogue la regarder, ses yeux sombres stables et presque moqueurs, comme s'il envisageait une question à laquelle elle pourrait être la réponse. "Que dois-je ajouter ensuite ?" répéta-t- elle et il se secoua pour revenir à la réalité avec un effort évident.

"Une plume de griffon. Vous devriez en trouver une dans le tiroir de l'établi à votre droite."

"Bien, sinon, je peux toujours y jeter ma baguette," dit Maud. C'était une tentative d'humour boiteuse, mais les sourcils noirs de Rogue se soulevèrent légèrement, comme s'il était intrigué.

"Plume de Griffon ? Peu commun. Une baguette d'Ollivander ?"

" De Gregorovich." Elle la tira de sa manche et la lui montra. "Bois de Pommier et plume de griffon, de vingt-neuf centimètres vingt . Je l'ai achetée pour ma première année à Durmstrang."

"Intéressant,"dit-il, mais ne donna pas de détails.

Maud ouvrit le tiroir et chercha parmi plusieurs sortes de plumes différentes avant de trouver celle qu'elle voulait : gris ardoise avec un éclat bleuâtre, presque métallique. "Est-ce que je la jette juste dedans, ou ... ?"

"Non. Plongez d'abord le bout de la plume dans le mélange et dessinez la lettre hébraïque daleth."

"Je ne la connais pas," dit Maud, embarrassée d'avoir à admettre son ignorance. "Pourriez-vous me montrer ?"

Rogue émit un son exaspéré. "Voilà", lui dit-il, venant vers elle à grands pas et saisissant la plume de sa main. "Enlevez vos gants : la potion n'est pas encore si corrosive que ça et ils ne feraient que gêner ."

Maud obéit, posant les gants de protection sur l'établi. Rogue posa ses mains sur ses épaules et la fit se déplacer pour qu'elle soit debout entre lui et le chaudron, à moitié courbée vers le liquide bouillonnant à l'intérieur . Elle put sentir une vague de chaleur la submerger lorsqu'il fit glisser sa main de son bras à son poignet, entrelaça ses doigts avec les siens afin qu'ils tiennent ensemble la plume de griffon. "Maintenant ... faites attention," dit-il, sa voix descendant d'un octave et elle frissonna.

"Une ligne horizontale ... comme ceci ..." murmura-t-il , guidant sa main dans le chaudron pendant qu'il parlait. La plume caressa la surface de la solution, laissant une faible trace argentée sur le vert miroitant. "Puis une ligne verticale ... ainsi."

Athéna se pressa furtivement tout près du cou de Maud, trouvant sans aucun doute la proximité de Rogue inconfortable. Elle n'était pas la seule, pensa Maud. Elle sentait son propre pouls dans sa gorge. Ses cheveux se mélangeaient avec ceux de Rogue là où ils s'étaient posés sur son épaule, des fils noirs peu familiers tranchant contre l'or-blanc. Il sentait toujours les herbes, un parfum sec et légèrement moisi, mais non désagréable. Son bras gauche l'encercla, la tenant autour de la taille de peur qu'elle ne tombe dans le chaudron et même à travers deux couches de robes et de peau elle pouvait sentir le tendon dur au-dessous. Les doigts qui se mêlaient aux siens étaient frais, leur contact doux et presque tendre, malgré la fermeté de ses gestes. Ce ne fut que lorsque les bords de sa liaison visuelle avec Athéna s'obscurcirent et que la pièce fit une embardée déconcertante que Maud comprit qu'elle retenait son souffle.

"Voilà," dit Rogue, se redressant et la lâchant brusquement. Sa voix sonnait tendue, comme s'il était aussi un peu à bout de souffle. "Je suggère que vous étudiiez et pratiquiez l'écriture de l'alphabet hébreu à la première occasion , Mlle Maugrey. Il y a plusieurs potions qui en retirent quelques propriétés."

Les joues de Maud étaient pourpres. Elle laissa glisser la plume de griffon dans le chaudron et recula, loin de lui. "Je le ferai," dit-elle. "Merci."

"Vous avez besoin de repos," observa Rogue, ses yeux rétrécissant d'une façon critique en la toisant. "Si vous le souhaitez, vous pouvez retourner à votre dortoir. Les dernières étapes sont tout à fait simples; vous ne manquerez rien d'important."

"Je ... oui. Je pense que cela pourrait être une bonne idée." Maud lui sourit faiblement. "Bonne nuit, alors."

"Bonne nuit," dit-il et il lui tourna le dos .

Elle quitta le cachot souterrain et se dirigea le long du couloir froid, sentant l'humidité, en respirant profondément dans un effort de clarifier ses esprits. Cela aida, mais pas complètement.

... jusqu'à ce que les rumeurs, disait la voix acide de Rogue dans son esprit, ne soient plus des rumeurs...

Pendant les trois derniers jours elle avait pensé à plusieurs interprétations possibles à ses mots et s'était presque convaincue qu'au pis aller il avait seulement voulu l'embarrasser pour qu'elle le laisse seul avec son travail, ou au mieux pour lui rappeler le danger de donner une nouvelle occasion d'exercer sa méchanceté à Muriel . Pas du tout la lecture directe, évidente, parce que dans son expérience Rogue était rarement direct ou évident.

Maintenant elle le connaissait mieux et cela la terrifiait.

Mon oncle vous tuera, elle avait taquiné Rogue dans le bureau de Dumbledore, après qu'ils se soient serrés la main pour sceller leur alliance. Et il avait pris la menace sérieusement, plus sérieusement qu'elle ne pouvait le comprendre à l'époque. Après tout, elle avait seulement voulu dire que l'Oncle Alastor n'approuverait pas son apprentissage avec Rogue et que cela prendrait quelque effort pour le convaincre.

N'est-ce pas ?

"Tu es trop jeune, Maudie. Tu penses que tu sais ce que tu fais, mais tu n'as aucune idée du danger."

Que le ciel me vienne en aide, pensa-t-elle désespérément. Son oncle avait eu raison.