AN : Oui, je sais, ça fait looooongtemps que je n'ai pas mis à jour celle-ci. Ben voilà, ça a changé.
Fred et George persistent à dire que, bien « qu'excellente, [cette histoire] est très étrange. » Mais je les aime quand même ! ^-^ 'Vous aime, les jums !
Et je continuerais mon histoire quand même aussi ! )
Tout ce que j'avais à dire…
Amusez-vous bien, et merci à tous les revieweurs !
2 – Qui sont-ils ?
Le nuage de poussière se dissipait lentement sur le champ de bataille. Remus pouvait deviner, du coin de l'œil, les formes des combattants qui se relevaient du choc de l'explosion, mais il ne leur prêta pas attention.
Il ne regardait que les deux enfants qui continuaient à pleurer devant lui, les bras levés aveuglément vers un réconfort qui ne venait pas.
Une partie de son esprit, encore lucide, lui criait d'aller consoler les enfants, mais il était encore trop frappé de stupeur pour pouvoir bouger.
Ils avaient transformé Harry et Voldemort en enfants.
De tout ce qui aurait pu arriver…
Inimaginable.
Il finit pourtant par se secouer, et alla prendre dans ses bras l'enfant le plus proche de lui. Le pauvre garçon s'accrocha à sa robe de toute la force de ses petits poings, et continua à pleurer sur son épaule.
Remus se mit automatiquement à murmurer des paroles de réconfort en berçant l'enfant contre sa poitrine, et se dirigea vers l'autre garçonnet, mais une silhouette le devança.
Sirius avait apparemment repris ses sens. Le second enfant plaqué sur sa poitrine, la baguette à la main, il rejoignit Remus sans lâcher des yeux les environs.
Heureusement, les Mange-Morts, désorientés, prenaient la fuite un à un. La plupart conjuraient balais ou portoloins, mais d'autres – sans doute plus jeunes – fuyaient à toutes jambes.
McGonagall et Dumbledore rejoignirent alors les deux Maraudeurs.
- Dieu du ciel ! s'écria le professeur de Métamorphoses lorsqu'elle vit les enfants.
Elle se couvrit la bouche d'une main, tituba et dut saisir le bras du directeur pour ne pas tomber.
Le garçon dans les bras de Sirius leva brièvement la tête… assez pour que son regard vert émeraude croise celui de Remus.
Lupin dut combattre une vague de nausée qui menaçait de le submerger. Sirius tentait de consoler le petit Harry… ce qui signifiait que l'enfant qu'il tenait n'était autre que Voldemort lui-même.
Il fallut à Remus tout le contrôle qu'il put conjurer pour ne pas arracher les petits doigts qui s'agrippaient désespérément à sa robe et jeter l'enfant le plus loin de lui possible. Il s'immobilisa cependant, très pâle et malade au plus profond de son estomac.
Quelques personnes commençaient à s'approcher, curieuses, et Albus Dumbledore jeta un regard las autour de lui.
- Allons dans mon bureau, décida-t-il.
Ils allaient se mettre en route tous les quatre, mais McGonagall retint le directeur par la manche.
- Albus… les étudiants… il faut s'assurer que tout va bien…
Les deux professeurs se tournèrent automatiquement vers Sirius, qui avait acquis une certaine popularité dans le château quand il fut lavé de tout soupçon.
Mais Sirius resserra un peu son étreinte sur son filleul, apparemment peu désireux d'être tenu à l'écart.
- Je m'en occupe, dit précipitamment Remus.
- Remus, intervint Sirius, je…
- Il n'y a pas de problèmes, assura Lupin. Je vous rejoindrais plus tard…
Remus tendit le petit garçon au directeur en essayant de ne pas se hâter, de ne pas sembler vouloir se débarrasser de l'enfant, mais il ne put s'empêcher de se détourner très vite pour aller s'occuper des étudiants en difficulté.
Il se détestait cordialement, à ce moment, et d'autant plus pour les regards de compréhension que lui avaient jetés les autres. Ce n'était qu'un enfant… Aucun enfant ne devrait être rejeté.
Mais si ce n'était que Voldemort ?
Le professeur Lupin secoua la tête et marcha plus vite. Il y avait des adolescents qui avaient besoin de lui, ce n'était pas le moment de se poser des questions.
Ron se releva lentement, le cœur battant. Il avait dû être sonné par le choc de l'explosion. Désorienté, il saisit sa baguette qui, par chance, était tombée tout près de lui. Mais il n'y avait plus autant d'agitation autour de lui. Les Mange-Morts semblaient même être partis.
Il se mit à errer un peu au hasard, confus, sans voir les gens qui s'affairaient déjà sur les ruines du champ de bataille.
Soudain, il se retrouva à suivre un groupe qui s'éloignait en direction du château. Il reconnut Sirius, Dumbledore et McGonagall.
Mais par-dessus tout, il remarqua les deux petits garçons que Albus et Sirius tenaient, et qu'il ne connaissait pas.
- Sirius ! appela-t-il, rejoignant en quelques foulées le petit groupe, qui s'arrêta.
- Ron…
- Que s'est-il passé ? Qui sont… ?
Il s'interrompit brusquement en voyant deux grands yeux vert émeraude se lever vers les siens.
- Venez avec nous, proposa gentiment Sirius, en regardant quelqu'un derrière Ron.
Le jeune homme se retourna violemment pour se retrouver nez à nez avec sa sœur. Il ne l'avait pas entendue arriver.
Ginny était pâle comme un linge mais elle ne dit pas un mot, et ils reprirent leur marche silencieuse vers le château.
Le Grand Hall était encore à peu près calme, juste quelques minutes après l'issue de la bataille.
- Laissez-moi sortir ! gronda Hermione, qui commençait à enrager, en secouant le bras pour s'arracher de l'étau solide de l'infirmière.
C'était peine perdue. Pomfresh tenait bon.
- Restez sagement assise, Mlle Granger. Ce n'est pas dans cet état que vous pourrez faire quoique ce soit pour les aider.
- Vous n'avez pas entendu ? explosa finalement Hermione. Il y a eu une détonation ! Ils ont sûrement besoin d'aide, ils…
Elle fut interrompue par le grincement des grandes portes de chêne – plutôt malmenées durant la bataille – qui s'ouvraient, et les deux femmes se tournèrent d'un même mouvement.
Albus, Minerva, Sirius, Ron et Ginny apparurent et refermèrent soigneusement la porte derrière eux.
- Oh, vous allez bien ! s'écria Hermione, s'arrachant finalement de l'étreinte de l'infirmière. Que s'est-il passé ? Il y a eu un bruit ! Où est Harry ? Qui sont ces enfants ? Je…
- La bataille est finie, interrompit Ron en prenant la jeune fille dans ses bras.
- Mais… où est Harry ? et Remus ? Comment ça, la bataille est finie ? Où est… où est.. Tu-Sais-Qui ? Qu'est-il arrivé ?
- Nous essayerons de trouver des réponses à toutes ces questions, Mlle Granger, dit finalement Dumbledore avec un léger sourire. Mais dans mon bureau, s'il vous plaît.
Remus s'accroupit devant la vieille dame et poussa un soupir d'exaspération.
- Voyons, Arabella… Vous ne pouvez même pas tenir debout… Soyez raisonnable.
- Très bien, céda enfin Mme Figg. Mais j'aurais pu me débrouiller sans.
Lupin fit un vague sourire et tapota la jambe de la sorcière de sa baguette, y faisant apparaître une solide attelle. Arabella tressaillit, mais fit des efforts pour ne rien laisser paraître de sa douleur. Prudemment, elle se redressa et mit un peu de poids sur sa jambe brisée.
- C'est mieux, admit-elle avec un sourire reconnaissant.
Remus passa son bras sous les aisselles de la vieille femme pour la ramener en sûreté, à l'infirmerie de fortune dans le hall. Tout au long du chemin, il évaluait le travail qui restait à faire.
Une fois tous les blessés remis aux bons soins de Mme Pomfresh et des étudiants qui l'aidaient, les professeurs auraient sans doute mis à l'écart tous ceux qui avaient été moins chanceux, et il faudrait encore faire des réparations d'urgence. Le château avait perdu certaines de ces défenses, et les Mange-Morts pouvaient encore réitérer l'attaque à n'importe quel moment.
Arabella Figg avait beau être une redoutable sorcière, elle trouva en Mme Pomfresh une puissance plus terrible encore, contre laquelle elle n'osait hausser le ton, et s'installa docilement, avec l'aide de Remus, sur le lit que Pompom avait indiqué.
- Maintenant prenez cette potion, et interdiction formelle de bouger jusqu'à prochain ordre.
Arabella ouvrit de grands yeux terrifiés, but d'un trait le gobelet qu'on lui tendit, et regarda Remus partir sans une protestation supplémentaire.
Un râle se fit entendre, et Remus se tourna, surpris. Un des Mange-Morts qui avaient été écrasés par la gargouille de pierre remuait encore, par un quelconque miracle. Lupin fit une grimace de désespoir, et retourna bien vite à l'élève de sixième année inconscient qu'il était en train de soigner.
- Vous voulez que je l'emmène à l'infirmerie, Professeur ?
Seamus venait d'arriver, transportant déjà un Auror blessé par un sort de Lévitation.
- S'il te plait, Seamus… Merci. Oh, et dit à Mme Pomfresh de préparer une infirmerie dans un endroit sécurisé, ajouta-t-il en montrant du doigt le Mange-Mort qui remuait non loin.
- QUOI ? Mais… professeur…
- Pas de discussion, Seamus.
Le jeune homme grommela un « Qu'ils crèvent » assez rageur pour être audible, mais conjura tout ce qu'il lui restait de contrôle sur lui-même pour faire léviter sans cahots le sixième année à côté de l'Auror.
Lupin ne pouvait pas vraiment en vouloir au jeune homme, et, pour être honnête, il n'en souhaitait pas moins à tous les Mange-Morts qui avaient osé lever la main sur les étudiants, qu'il considérait encore sous sa responsabilité, même ceux à qui il n'avait jamais enseigné.
Cependant, si ses actes n'étaient pas dictés par la pitié, ils étaient prudents et réfléchis.
Severus gardait toujours un stock conséquent de Véritasérum, ces derniers temps, et sûrement un Mange-Mort pourrait avoir quelques informations intéressantes.
Le petit groupe était arrivé dans le bureau de Dumbledore, et les enfants furent installés sur deux fauteuils en face du bureau. Le directeur lui-même s'était assis à sa place habituelle.
Le silence s'installa. Personne ne pouvait lâcher des yeux les deux petits garçons qui, s'ils avaient arrêté de pleurer, n'en étaient pas moins pitoyables. Ne comprenant pas la situation, ils se tordaient les doigts, les yeux baissés, n'osant regarder personne dans les yeux.
Ils avaient presque l'air d'attendre une punition.
- Que s'est-il passé ? demanda finalement Hermione d'un ton timide.
Personne ne lui répondit jusqu'à ce que Ron prenne prudemment la parole.
- Je n'ai pas bien vu, dit-il avec lenteur. Mais ils avaient recommencé le Priori Incantatem. Il y a eu une sorte d'explosion. Après, j'ai vu ces deux garçons.
- Par un mystère que je ne puis expliquer, admit Dumbledore, Harry et Lord Voldemort ont été transformés en enfants.
Un nouveau silence, chargé de tensions, se fit alors que chacun contemplait les petits garçons, qui, pour leur part, ne semblaient rien comprendre à la conversation.
- Au moins, ça a arrêté la bataille, et il était temps, dit Sirius. Encore un peu, et les Mange-morts envahissaient Poudlard.
- Oui, reprit le vieux directeur. La bataille est finie. Et maintenant que… Lord Voldemort est… avec nous, nous pouvons arrêter la guerre.
Dumbledore avait prononcé ces mots prudemment, mais aussitôt, tout le monde leva la tête avec des expressions différentes, et les tensions, presque palpables, changèrent du tout au tout. Ron affichait une expression pleine d'espoir, tandis qu'Hermione et Ginny semblaient proprement horrifiées.
Sirius avait une expression partagée et hésitante, passant son regard d'une personne à l'autre dans la pièce. Seuls Dumbledore et McGonagall avaient des visages immobiles et indéchiffrables.
- Je n'y avais pas pensé ! s'exclama Ron. C'est une merveilleuse occasion !
- Ron ! s'écrièrent Ginny et Hermione en même temps.
- Quoi ? J'ai raison, vous savez que j'ai raison ! Il suffirait d'un sort pour mettre fin à nos pires cauchemars !
- Ce n'est qu'un enfant, objecta Hermione dans un murmure.
Ron ne répondit pas immédiatement. L'atmosphère devenait lourde et chargée.
- Ce n'est pas un enfant, dit-il en fin de compte. C'est juste Tu-Sais-Qui changé en enfant.
- Tu n'en sais rien !
Hermione tremblait de tous ses membres dans sa rage. Il était courant qu'elle se dispute avec Ron, mais jamais ils n'avaient pris aussi sérieusement un de leur sujet de dispute.
Elle jeta un coup d'œil en direction des adultes, mais ils ne parlaient pas, les observant attentivement.
Résolument, elle s'avança vers le petit garçon aux yeux noirs et s'agenouilla devant le fauteuil pour être à sa hauteur, ignorant le sursaut de Ron.
- Hermione, siffla-t-il d'un ton excédé. Ne fais pas l'idiote.
Elle ne fit pas plus attention à cette mise en garde. Après tout, Sirius, Minerva McGonagall et Albus Dumbledore tenaient encore leurs baguettes à la main. Elle ne risquait rien.
- Lord Voldemort ? demanda-t-elle en observant le petit garçon.
C'était la première fois qu'elle prononçait ce nom. Le mot résonna ignominieusement dans le silence, et elle se mordit la lèvre, frissonnant un peu. Elle s'attendait presque à être foudroyée sur place.
Rien de ce genre n'arriva. Le petit garçon la regardait d'un air un peu effrayé, et curieux.
- C'est pas comme ça que je m'appelle, zozota-t-il au bout d'un moment.
- Oh… désolée, répondit la jeune fille d'une voix tremblante. C'est quoi, ton nom, alors ?
- Tom ! déclara-t-il fièrement.
Hermione se redressa avec un sourire triomphant, soulagée. Il semblait évident que ni Vous-Sav… Voldemort, ni Harry n'avaient de souvenirs de leurs vies dépassant leur âge actuel… Donc ils n'étaient réellement que des enfants.
- Cela ne change rien au problème, explosa Ron. On ne sait rien de ce qui est arrivé ! Que se passe-t-il si le sort ne dure qu'un temps ? On sera bien avancé de se retrouver avec Tu-Sais-Qui dans le château demain matin… Il peut arriver n'importe quoi…
- En attendant, je ne vois pas d'autres alternatives que de s'occuper des enfants, interrompit Dumbledore sévèrement. Nous ne devons rien faire sans être certains de ce qui est arrivé.
- Qu'allons-nous faire, alors ? demanda Sirius.
- Diriger nos efforts ailleurs, répondit le vieux directeur sur un ton qui indiquait clairement que la réunion était finie. Et il n'y a pas de temps à perdre.
Il se leva, sans quitter de son regard perçant les enfants assis.
- Quelqu'un doit être assigné à la garde des enfants…
Il y eut un moment de silence pendant lequel des regards gênés furent échangés, avant que Sirius ne s'avance.
- Moi, je veux bien…
- Non, j'ai besoin de tous les adultes disponibles, dit Dumbledore, en tournant son regard vers les trois étudiants. Je ne veux forcer personne, bien sûr, mais si vous vouliez bien vous en occuper…
Ron ne dit rien, les bras croisés et les yeux obstinément fixés au plancher. Ginny et Hermione échangèrent juste un regard, hochèrent la tête, et prirent chacune un des enfants.
- Il est important que personne ne voit ces enfants, prévint Dumbledore. Je vous fais confiance pour esquiver les questions, si on vous interroge sur Harry ou Voldemort. Ils ont besoin d'être nourris, changés, et de se reposer.
Les jeunes filles hochèrent la tête et s'apprêtèrent à sortir, mais il les retint.
- Gardez surtout vos baguettes à portée de main…
Elles firent signe qu'elles avaient compris et partirent définitivement.
- Ron, cela m'aiderait que vous alliez retrouver Neville, et qu'ensemble, vous réunissiez les étudiants et commenciez à reconstruire ce qui peut l'être.
Le jeune Weasley leva un regard dur sur le vieux sorcier, inclina brièvement la tête et sortit à son tour, sans un mot.
Dumbledore, après un bref regard désolé à la porte qui venait de claquer violemment, se tourna vers Sirius et Minerva avec une nouvelle lueur dans les yeux.
- Comme je l'ai dit, nous n'avons que peu de temps. Il faut rassembler tous les sorciers adultes valides d'ici une demi-heure dans la Grande Salle, et se préparer à contre attaquer tant que les Mangemorts sont désorganisés.
- Mais il doit rester seulement quelques dizaines d'entre nous ! protesta Sirius. Alors, pour ce qui est des personnes valides…
- Il faut profiter de l'avantage que nous avons maintenant, coupa Dumbledore sur un ton incisif. Allez, réunissez tout le monde.
Sirius s'aperçut vite, en sortant du bureau du directeur, que la tache qu'il lui avait assignée serait sans doute plus difficile qu'il n'avait imaginé. Un désordre innommable régnait dans le château. Des étudiants couraient partout, assignés à des missions diverses, de même que les professeurs, les Aurors et les résistants. L'ancien détenu réussit à en interpeller quelques uns pour leur transmettre la nécessité d'une réunion immédiate, mais il lui semblait ne pas progresser.
Il progressa encore moins quand il se retrouva bloqué devant un escalier qui n'était pas là. Il grogna un peu et jeta un coup d'œil dans la cage d'escalier : plus aucun ne bougeait.
- Mais qu'est-ce qu'il se passe, ici ?
- Les sorts du château semblent être tombés, dit une voix aiguë et essoufflée juste derrière lui.
Il se retourna violemment pour se trouver nez à nez avec le tout petit professeur Flitwick.
- Oh, professeur, je vous cherchais…
- Allons, Sirius, répondit le petit sorcier avec un mouvement impatient de la main. Cela fait bien longtemps que je ne suis plus votre professeur.
Black secoua la tête, bien conscient du temps que coûtaient toutes ces politesses inutiles.
- C'est urgent ! Albus réclame une réunion de toute urgence. Tous les sorciers qualifiés et disponibles doivent être présents au plus vite dans la grande Salle.
Flitwick hocha la tête, et partit dans l'autre sens.
Sirius repartit remplir son rôle de messager.
Ron, après un bon moment de recherches dans les couloirs bondés du château en ruines, descendit dans les cachots et y trouva enfin Neville, qui discutait avec des préfets de cinquième année. L'adolescent au visage encore poupin donnait des ordres et attribuait des taches sur un ton qui n'amenait aucune discussion.
- … jusqu'aux quatrième année dans leurs salles communes. Surveillez qu'ils travaillent et rassurez-les.
- Evitez le Grand Hall si vous pouvez, acheva Ron en arrivant. Il y a encore des blessés, là-bas.
Les préfets partirent et Neville leva un regard interrogatif sur Ron.
- Qu'est-ce qu'il y a ? demanda celui-ci assez durement, regrettant aussitôt le ton de sa voix.
Neville rougit un peu, mais cela faisait un moment qu'il ne se laissait plus impressionner. Le changement chez lui avait été radical, ces dernières années. Comme la plupart les étudiants, il avait grandi trop vite.
- Qu'est-ce qu'il y a ? répondit-il sans se démonter. Il y a que j'espérais savoir ce qui s'était passé ! C'est toi qui as suivi Dumbledore après cette… explosion !
Ron baissa les yeux. Neville avait tous les droits de lui poser des questions, effectivement. Ce qui s'était passé dans le bureau du directeur lui laissait cependant une rage incontrôlable. Il ne comprenait pas ce qui arrivait, il se méfiait des enfants, et par-dessus tout, il avait honte. Il avait clairement proposé de se débarrasser d'un enfant de quatre ans qui ne savait même pas ce qu'il représentait.
- Je n'en ai aucune idée, répondit-il finalement à Neville, qui continuait à attendre, les poings sur les hanches, une réponse. Dumbledore nous a… claqué la porte au nez, il n'a rien voulu nous dire. Il est juste revenu pour dire que je devais te retrouver pour qu'on réunisse les élèves et qu'on commence à reconstruire ce qui peut l'être…
Neville le scruta en silence pendant un moment, mettant son compagnon de dortoir très mal à l'aise.
- Et Harry ?
- Neville, je…
- Qu'est-ce qu'il t'a dit à propos de Harry ?
- Juste… juste de ne pas m'inquiéter. Qu'il allait… qu'il allait bien. Mais je n'ai même pas pu le voir, ajouta-t-il précipitamment pour éviter d'autres questions à propos de la santé de Harry.
Contre toute attente, Neville posa la main sur l'épaule de Ron et lui fit un sourire.
- Il faut faire confiance à Dumbledore ! S'il dit que Harry va bien, c'est qu'il va bien !
Mais alors qu'ils se dirigeaient vers l'étage supérieur, Ron ne pouvait s'empêcher de penser que, pour une fois, il en doutait fortement.
Ginny et Hermione trouvèrent bien difficile la tache de trouver non seulement un coin tranquille pour s'occuper des petits garçons sans que personne ne vienne les déranger, mais aussi un chemin pour y arriver sans rencontrer personne.
Professeurs, Résistants, Aurors, étudiants couraient partout, dans tous les couloirs, occupés à tel ou tel travail, chargés de telle ou telle mission.
Au bout d'un long trajet à travers de petits couloirs poussiéreux et mal éclairés, de passage secret taillés, semblait-il, dans le rocher même, de raccourcis et de détours glauques, elles parvinrent enfin, sans incident, à une partie du château plus très fréquentée. C'était heureux, d'ailleurs, car les enfants, ayant séché leurs larmes, commençaient à gazouiller sur les hanches des deux jeunes filles, émerveillés par les tableaux qui leur adressaient des bonjours, les grands couloirs éclairés aux flambeaux, les armures rouillées qui grinçaient sur leur passage. Si elles avaient rencontré quelqu'un à ce moment, elles auraient eu bien de la peine à faire passer inaperçus deux petits garçons qui poussaient des grands cris en montrant du doigt un peu tout et n'importe quoi.
Hermione fit pivoter le petit Tom sur sa hanche pour libérer un de ses bras, ouvrit une porte, et, après un rapide coup d'œil à l'intérieur, entra en faisant signe à Ginny de la suivre.
Elles venaient de trouver une salle de classe très poussiéreuse, et apparemment, désaffectée depuis longtemps.
Hermione déposa le petit garçon sur le bureau du professeur, bientôt imitée par Ginny, et, en quelques sorts bien choisis, rendit à la salle un petit air de propreté et de luminosité.
- A… alors, qu'est-ce qu'on fait ? demanda la jeune Weasley en regardant craintivement les deux enfants gazouiller dans la langue que seuls les petits enfants et les mamans peuvent déchiffrer.
- Eh bien… on fait ce que Dumbledore a dit. On s'occupe d'eux.
- Oui, mais… comment on fait ça ?
Hermione fit un sourire un peu effrayé et haussa les épaules.
- Je crois que ça devrait aller tout seul… l'instinct maternel, non ? Euh… peut-être qu'on devrait commencer par leur trouver des habits corrects ?
Tom gesticulait comme il pouvait en expliquant quelque chose à Harry et s'emmêlait les bras dans les pans d'une robe littéralement dix fois trop grande pour lui, compliquée et tape à l'œil.
- C'était le père Noël ? demanda soudain le petit garçon aux yeux verts à Ginny, qui s'avançait vers lui.
- Euh… qui ça ?
- Le vieux monsieur avec une grande barb'blanche !
- Elle allait au moins jusque par terre ! ajouta le petit Tom en écartant les bras emprisonnés sous la grande robe.
- Tant'Pétunia et Onc'Vernon, ils ont dit que j'aurais pas le droit de voir le père Noël, pas comme Dudley ! Alors c'était pas le père Noël, hein ?
Les deux jeunes filles se regardèrent, un peu perdue, mais s'approchèrent des garçons et commencèrent à les débarrasser des énormes robes dont ils étaient habillés.
- Euh… en fait, c'était pas le père Noël, finit par dire Ginny. C'est le professeur Dumbledore, mais il est très gentil aussi. Et tu sais, Harry, tu verras le père Noël, toi aussi ! C'est promis !
Le petit garçon restait bouche bée devant elle.
- Comment tu connais mon nom ?
- C'est un ange ! s'exclama Tom, qui commençait à pouvoir gesticuler librement. Les anges, ils connaissent toujours ton nom !
Ginny sentit le sang monter à ses joues, ignora le fou rire qu'Hermione essayait d'étouffer et conjura des vêtements typiques de petits garçons moldus.
- Whoa ! C'est vraiment un ange ! Elle fait de la magie !
Cette fois, c'était presque certain, des étoiles brillaient dans les yeux de Harry.
Dans la Grande Salle, qui rassemblait tous les sorciers survivants et en état de se battre, régnait un brouhaha assez désorganisé, qui ne prit fin que quand le directeur entra. Ils le regardèrent s'approcher en silence, mais, lorsqu'il s'arrêta devant eux, les questions se remirent à fuser.
- Que s'est-il passé ?
- Est-ce vrai que Vous-Savez-Qui a disparu ?
- Et qu'en est-il de Harry Potter ?
- Qu'allons-nous faire maintenant ?
Sirius, qui regardait la scène les bras croisés, sentit une main presser son épaule au moment où Albus levait les bras pour imposer le silence. Il se retourna pour se trouver face à face avec Remus.
- Alors, qu'est-ce qu'il se passe ? murmura celui-ci.
Le vieux directeur annonçait à l'assemblée qu'il ne pouvait rien dire encore sur ce qu'il s'était passé plus tôt dans la journée, mais qu'il assurait que Lord Voldemort n'était plus un danger…
- Je te raconterais tout, mais plus tard, chuchota Sirius en retour.
… c'était pour cela qu'il fallait agir au plus vite, tant que les Mange-Morts étaient désorganisés…
- Mais… protesta Remus, que veux-t-il faire exactement ?
- Je crois qu'il veut…
… s'ils s'y prenaient assez vite, ils pourraient attaquer des points stratégiques.
- …reconquérir ce que Voldemort nous a pris.
Comprenant l'importance de la situation, les sorciers cessèrent de poser des questions sur ce qu'il s'était passé, et commencèrent à poser des questions sur ce qu'il y avait à faire. Les projets de Dumbledore étaient simples, et ne pouvaient que l'être, compte tenu du petit nombre qu'ils étaient. Il s'agissait de reconquérir une place forte qui était tombée sous l'emprise de Voldemort, et d'aviser de là.
Plusieurs s'exclamèrent que c'était du pur suicide, en considérant leur nombre, mais la majorité s'accordaient à dire qu'il s'agissait de leur seule chance, mais aussi d'une chance complètement inespérée. Qui aurait cru, le matin même, que la situation aurait pu être ainsi retournée ?
- Mais c'est de la folie, s'exclama soudain le petit professeur Flitwick, au plus haut de sa voix. Le château ne répond plus à rien, il n'a plus de moyens de défense, nous laisserons les étudiants à la merci d'une nouvelle attaque, si nous faisons ça !
- Remus et Sirius resteront ici, dit Dumbledore calmement. Les étudiants savent aussi se défendre, et il est hautement improbable que les Mange-Morts soient assez rapide à se reprendre pour organiser une attaque de masse.
Lupin et Black se redressèrent pour protester, ne désirant pas particulièrement rester au château alors que tout allait se jouer ailleurs, mais un regard bleu glacial du directeur leur imposa le silence.
Ce ne fut que lorsque les sorciers se dispersèrent pour se préparer qu'ils purent aller voir Albus.
- Pourquoi nous ? Pourquoi devrions-nous rester là ? tempêta Sirius. Vous allez avoir besoin de nous !
- J'ai besoin que restent au château des gens que les étudiants connaissent bien et apprécient, s'ils doivent à nouveau, le cas échéant, se battre. Il doivent donc être également de bons duellistes. De plus, j'ai besoin de quelqu'un qui soit au courant de la tache de Ginny et Hermione au cas où elles auraient besoin d'aide.
Que répondre à tout cela ? C'était plutôt flatteur, et Dumbledore avait entièrement raison.
Ils ne protestèrent donc pas d'avantage, et regardèrent, non sans un pincement au cœur, les sorciers se réunirent dans le Grand Hall, et transplaner tous ensemble directement de là, puisque même les protections contre le transplanage semblaient abolies.
Les deux hommes restèrent là un instant, à fixer le grand vide que laissaient les derniers combattants derrière eux.
- Je me sens misérable, avoua Sirius au bout d'un moment. Rester ici, inactif, au château…
- On ne va pas rester inactifs, protesta Remus. Il y a plein de choses à faire ! A commencer par ceci : tu dois me dire ce qui s'est passé après la bataille, et ce qu'est cette mystérieuse tâche de Ginny et Hermione.
- Oh, c'est vrai…
Il tira le bras de Remus pour l'entraîner hors de la grande salle, et commença à lui expliquer ce qui s'était passé le matin, dans le bureau du directeur.
- … et il s'avère, conclut-il alors qu'ils débouchaient sur le parvis de l'école, devant les grandes portes de chêne, que ni Harry, ni Vol… ni Tom ne savent rien de ce qui s'est passé après… après leur âge.
Sirius fronça les sourcils, se demandant s'il avait été clair. A en croire l'expression médusée de Remus, ce n'était pas le cas.
- Vol… enfin, Tom ne savait rien du nom de Voldemort, et ils avaient l'air un peu perdus, alors… ils n'ont sûrement aucun souvenirs de ce qui s'est passé après leurs quatre ans. Comme un retour dans le temps, sans en être un…
- D'accord, d'accord, j'ai bien compris ça, mais… comment est-ce possible ?
Black haussa les épaules et regarda autour d'eux. Des étudiants s'affairaient autour du château. Tout un groupe reconstituait les fenêtres brisées, et des éclats de verre volaient de tous les côtés pour rejoindre leur place initiale sur les vitres, reflétant le soleil par éclats, comme de petites étincelles d'un feu d'artifice. C'était joli. Tout près d'eux, des septième année conjuguaient leurs efforts pour remettre les immenses portes de chêne dans leurs gonds, non sans mains grincements du vieux bois.
Ron et Neville relevaient une vieille gargouille grimaçante et de mauvaise humeur, à en croire tous ses grognements, un peu plus loin. Sirius reconnut la gargouille qui avait fauché les Mange-Morts.
- Mon aile, grogna-t-elle sourdement. Où est mon aile ?
Neville fit gentiment léviter un morceau de roche, dont la gargouille se saisit brusquement et remit à sa place de sa grosse patte griffue. Elle battit des ailes deux fois, tourna sa figure grimaçante vers le château, et, de deux bonds puissants et agiles, retourna sur son promontoire, un petit surplomb à la hauteur du deuxième étage. Elle s'y arrêta, redevenant soudainement aussi immobile qu'une statue, une affreuse grimace sur son visage à la gueule largement ouverte.
- Je croyais que les sorts du château ne fonctionnaient plus, remarqua Sirius en regardant la gargouille.
- Les tableaux aussi sont encore animés, dit Remus. C'est possible qu'ils ne soient que des pièces rapportées, indépendants du bâtiment.
- En tout cas, elle n'est pas commode, dit Ron. Alors, qu'a décidé Dumbledore ?
Remus et Sirius racontèrent rapidement la réunion de la Grande Salle et le départ de la majeure partie des combattants, en omettant bien sûr certains détails.
- On aimerait voir Ginny et Hermione, dit Sirius après un moment.
- Je ne sais pas du tout où elles peuvent bien être, répondit Ron en s'assombrissant.
Les deux anciens Maraudeurs échangèrent un regard.
- On pourrait peut-être les trouver, hasarda Remus, si on avait… une bonne carte ?
Neville fronça les sourcils, l'air un peu perdu, mais Ron comprit tout de suite l'allusion.
- Harry en a peut-être une dans sa malle.
Effectivement, les tableaux ne s'étaient pas immobilisés, et leurs personnages étaient plus bavards que jamais alors que Remus et Sirius parcouraient les couloirs à grandes enjambées.
- Alors, que va-t-on faire pour Harry et… Tom ? demanda Remus en ignorant un vieux sorcier défiguré qui hurlait que les dragons attaquaient l'Angleterre, dans un cadre tout proche.
- Je ne sais pas si Dumbledore en a la moindre petite idée. Je pense qu'il faut trouver un moyen de faire revenir Harry à son âge réel, et sa mémoire, mais pour Tom…
- On ne peut pas exactement lui faire un contre-sort et s'excuser pour le désagrément, si ?
Ils continuèrent à marcher en silence et prirent un détour quand ils se trouvèrent bloqués par un mur qui aurait dû changer de place de temps à autre pour laisser passer les gens.
- Alors on va garder Tom à l'âge qu'il a maintenant, et… quoi ? L'élever ? Le faire grandir ? Le faire étudier à Poudlard comme si rien ne s'était jamais passé ?
Sirius haussa les épaules, n'ayant pas plus de solutions que Remus pour ce problème.
- Que se passera-t-il s'il s'avère que Tom a… mauvais caractère, et qu'il redevienne tout à fait comme Lord Voldemort ?
- Je ne sais pas ! s'exclama Sirius, un peu exaspéré. Il est également possible qu'il ne grandisse pas du tout si on ne trouve pas de contre-sort.
- Il resterait un enfant toute sa vie ? s'étonna Remus, clairement désarçonné par cette hypothèse.
- Au moins, il aurait enfin réussi le but de sa vie toute entière, ironisa Sirius. Il aurait découvert le secret de l'immortalité…
