Note de l'auteur : Ce chapitre est entièrement axé sur Xao/Yu/Ming (ne vous inquiétez pas, elle n'a pas de quatrième prénom) et Sark. Contrairement aux précédents, il y a quelques réponses aux questions que vous vous posez !
*
" Je t'écoute, Xao. "
Sark était attentif. Elle savait qu'il analyserait chaque détail de son ton, chaque choix de mot.
" D'abord,
soignons cette vilaine blessure, " dit-elle.
" Nous pouvons parler en même temps, " déclara-t-il,
n'aimant pas être dans l'ombre.
Elle refusa d'un simple hochement de tête, une seule chose à la foix. Elle lui ordonna de retirer sa veste et sa chemise. Armée d'une pince, elle retira la balle et Sark bougea légèrement. Heureusement, elle n'avait rien touché, il devrait simplement faire attention durant les prochaines semaines. Après avoir bien désinfecté et recousu, Xao posa un bandage qu'elle serra fort pour lui éviter une nouvelle perte de sang.
Sark continuait de la fixer ce qui la rendait mal à l'aise. Elle tentait de camoufler sa gêne, peine perdue. Il n'était pas espion pour rien.
" Tu as changé,
" remarqua-t-il méfiant. " Avant tu aimais que je te fixe,
à présent ton regard n'est plus le même. "
" Avant, c'était le passé, le manoir. Beaucoup de choses
ont changé en huit ans. "
" Tu t'es d'ailleurs faite plutôt discrète depuis, on n'entend
que très rarement parler de toi, " nota-t-il avec une pointe de
malice.
" Désolé si je n'aime pas me montrer en spectacle comme toi
et tes chers amis avec votre quête de Rambaldi. "
" Leur quête, " nuança aussitôt Sark dont les cils
tressaillirent.
" Mexico City, " murmura-t-elle d'un ton chargé de reproches.
" Brillant exploit. "
Son ton était cynique mais Sark préféra ignorer sa dernière remarque. Mexico City et tous les morts de l'église n'était pas un sujet qu'il aimait aborder. Il ignorait si c'était par remord ou autre, mais une étrange et désagréable sensation s'emparait de lui dès que l'on y faisait mention.
" Parlons affaires, " reprit Xao qui avait noté son changement d'attitude. " Je suppose qu'à présent Stella fait partie de ta petite liste noire. "
Sark sourit froidement. La prochaine qu'il la croiserait, il serait sa faucheuse. Il avait hâte.
" Bien sûr,
elle vient tout de même de tirer dessus juste pour avoir refuser une offre.
"
" Je connais la nature de cette offre. Tu as eu raison de refuser. "
Xao n'avait pas précisé ce qu'était mais Sark savait qu'elle ne mentait pas. Il conserva le silence pour l'inviter à continuer.
" Figure-toi
que mes employeurs ont eux aussi cette chère Stella sur leur liste noire.
Elle a volé des données qui pourraient faire des ravages, plus
particulièrement pour nous. "
" Nous ? "
" Tous ceux du manoir. "
Elle perçut une lueur d'intérêt s'allumer derrière son regard glacé. Xao avait l'attention la plus dévouée de Sark.
" Stella va
sûrement vouloir finir ce qu'elle a commencé, c'est-à-dire
te tuer, " reprit-elle. " A présent que tu sais, tu es dangereux
pour elle. Et elle n'enverra pas ses hommes, elle s'occupera personnellement
de toi parce qu'elle te connaît, elle sait comment tu agis. "
" Mais ? "
Xao ne put réprimer en sourire en remarquant qu'il la devançait toujours d'un mot.
" Mais nous
pouvons retourner la situation à notre avantage. Tu as les moyens de
la contacter contrairement à nous. Tu pourrais fixer un rendez-vous avec
Stella pour finalement dire que tu acceptes son offre. Bien sûr, elle
sera méfiante et ce sera notre unique chance. A l'endroit prévu,
tu l'y attendras et nous la cueillerons. Nous l'aurons et toi tu seras aussi
débarrassé d'elle. C'est un marché honnête, n'est-ce
pas ? "
" Je me méfis des marchés ces derniers temps, " rétorqua-t-il
en faisant référence à son épaule meurtrie. "
Qu'est-ce qui me dit que tu n'as pas l'intention de me doubler, de me tuer moi
aussi ? Et qui sont tes employeurs ? Et qu'est-ce que tout cela à avoir
avec le manoir ? "
" Tu poses beaucoup de questions pour un espion de haut rang, " le
taquina Xao avant de reprendre son sérieux. " Tout ce que tu as
à savoir sur mes employeurs, est qu'ils tiennent à rester discret.
Ils ne t'ont pas dans leur ligne de mire, sois-en soulagé, nous ne sommes
pas dans les mêmes domaines. "
" Je veux des garanties, " déclara Sark d'un ton sans espoir
de négociation. " Ce que tu me proposes est un marché à
l'aveugle. "
" Tu dois accepter, " rétorqua Xao. " Réfléchis,
si mes employés t'avaient voulu quelque chose, je ne t'aurais pas attendu
près du hangar pour te prévenir à temps que la CIA était
aussi là. Je ne t'aurais pas aidé à t'en sortir. "
" Sauf si tu veux gagner ma confiance pour ensuite mieux me poignarder
dans le dos, " répliqua-t-il sèchement.
" Tu ne te fies même pas à toi-même, comment pourrais-je
alors tenter de gagner ta confiance ? "
Sark ne répondit rien. Lui : 0. Elle : 1. Un sourire de victoire se glissa sur les lèvres de Xao.
" Je t'ai
toujours battu dans les joutes oratoires, " lui rappela-t-elle malicieuse.
" Et comment tes employeurs ont su pour la CIA ? " Enchaîna-t-il,
faisant mine d'ignorer son sourire.
" Nous avons une taupe tout simplement. "
" Qui ? Où ? "
" Pourquoi est-ce que je te répondrais ? "
" Je ne sais rien à propos de cette histoire apparemment complexe
dans laquelle Stella m'a plongé. Me répondre serait un signe de
bonne foi qui lors de notre prochain rendez-vous, pourrait faciliter mon inclinaison
vers une réponse positive. "
Elle réprima un soupir face à sa longue phrase châtiée. Il avait toujours aimé se donner en spectacle.
" La taupe c'est moi. Je suis en quelque sorte devenue une seconde Allison Doren, sauf que cette fois-ci la victime n'est pas Will Tippin mais Eric Weiss. "
Sark détourna le regard à l'évocation de son ex petite amie. Xao se sentit soudainement coupable de sa maladresse. Elle se pencha vers lui et posa un chaste baiser sur sa joue. Il se retourna et posa son front contre le sien, les yeux clos. Un long silence suivit.
" Tu te rappelles
quand on jouait 123 Soleil dans le jardin du manoir ? " Demanda-t-il alors
qu'un sourire absent éclaira les traits de son visage.
" Je me rappelle que Creat perdait tout le temps et que Stella trichait,
" répondit-t-elle amusée par ces souvenirs communs.
" Certaines choses n'ont pas changé "
Une brusque vague de nostalgie immergea Xao. Ils n'étaient déjà plus innocents à cette époque. Sark avait ouvert les yeux et remarqué son étrange regard. Il savait qu'elle ne lui disait pas tout mais préférait ne pas s'en soucier pour le moment. Doucement, il approcha ses lèvres des siennes et l'embrassa. Elle se laissa faire au début, puis le repoussa brutalement.
Surpris, il l'interrogea du regard. Elle se leva du sofa pour s'éloigner de lui.
" Tu ne sais
pas ce que tu fais Sark, " déclara la femme avec tristesse.
" Pourquoi tu réagis ainsi ? Je savais ce que je faisais. "
" Non, " le contredit-elle aussitôt. " Tu imites les sentiments,
tu le fais si bien que tu crois même les ressentir. Mais c'est faux, tu
ignores la vraie force d'une émotion. Moi oui. "
" Et pourrais-je savoir pourquoi ? "
" Parce que toi tu es le produit d'un conditionnement, tu n'es qu'un objet,
un robot à qui l'on a appris à faire ceci ou cela en le dénuant
volontairement d'émotions et d'éthiques pour qu'il soit le plus
efficace possible. "
" Cette définition s'applique autant qu'à toi qu'à
moi, " nota Sark avec dédain.
" Non, cette définition s'applique autant qu'à toi qu'à
Xao. "
Il fronça les sourcils et se leva pour la rejoindre près de la cheminée. Il avait parfaitement compris les subtilités de la dernière phrase.
" Qui es-tu
? " Demanda-t-il les yeux plissés par la méfiance.
" Je suis Ming Hang-Wong, fille d'espions chinois, enlevée à
l'âge de sept ans pour devenir Xao durant dix ans. "
" Tu te rappelles ton passé, n'est-ce pas ? " La question était
rhétorique. " Et tu crois que c'est ça qui fait la différence
entre ressentir ou non des émotions ? "
" Oui, car Xao croyait ressentir mais ce n'était rien à côté
de ce que je peux ressentir à présent. Je suis Ming, je ne redeviens
Xao qu'en mission. "
" Et là ? Tu es Ming ou Xao ? "
Elle hésita et Sark le perçut aussitôt.
" Je savais
bien que quelque chose en toi était différent, je l'ai vu tout
de suite "
" Il y a une autre voiture dans le garage adjacent au chalet. Je vais la
prendre. "
" Tu ne peux pas rester un peu plus longtemps ? "
" J'ai un avion à prendre. J'attends de tes nouvelles, je reconnaîtrais
tes signaux. "
" Tu ne peux pas ou tu ne veux pas rester ici ? " La questionna-t-il
insistant.
Elle voulut partir mais il la bloqua en enserrant sa taille. Il l'amena contre lui jusqu'à que leurs visages ne soient séparés que par un souffle d'air.
" Xao veut
rester mais Ming veut partir, " admit-elle confuse.
" Tu as dit que tu étais Xao en mission. Là tu es en mission,
" fit remarquer Sark avec sérieux.
Elle sentit ses joues s'empourprer en sentant son torse nu contre ses mains. Elle devait admettre que Ming aussi en pinçait pour cet homme. Il sentait qu'elle faiblissait et en profita pour sceller sa défaillance par un langoureux baiser. Cette fois-ci, elle ne le repoussa pas et glissa ses bras autour de ses épaules.
Les doigts glacés de Sark se glissèrent sous ses vêtements, glissant avec douceur sur sa peau satinée. Ils rompirent le baiser et il entreprit de suivre de ses lèvres la ligne de sa mâchoire. Il se faisait déjà enfiévré, il la fit reculer jusqu'au mur et Ming croisa brièvement son regard.
Elle remarqua aussitôt la différence entre le sien et celui de Weiss. Ce dernier était teinté d'admiration, d'amour naissant et de tendresse. Celui de Sark ne reflétait rien hormis cette inquiétante froideur qui le caractérisait.
Elle le repoussa une seconde fois et il tenta de ne pas s'en offusquer. Il n'avait pas l'habitude qu'on lui dise non. Elle sortit du chalet et il ne la rattrapa même pas. C'était une preuve de plus que Sark ne ressentait rien pour elle, qu'il ne ressentait rien pour personne.
Il était définitivement un recalé.
*
A suivre
