POUDLARD EXPRESS

 Le lendemain, Harry passa une agréable journée: le matin, il termina ses devoirs, aidé par Gramine qui malheureusement ne savait pas grand-chose sur la seconde révolte des gobelins au XVIIe siècle, puis l'après-midi ils restèrent sur le Chemin de Traverse où ils rencontrèrent plusieurs amis de Poudlard. Durant toute la journée, Gramine garda sur elle sa cape noire et se tint sur ses deux pattes arrières, ainsi elle paraissait bien plus imposante et était plus respectée par les sorciers qui la connaissaient tous. Le soir, ils rentrèrent au Chaudron Baveur. Les 3 jours qui suivirent ne furent pas différents, les boutiques ne désemplissaient pas et il devenait de plus en plus difficile d'accéder à ce qu'on voulait voir, que ce soit un balai, un livre ou un objet de farces et attrapes. Le soir du 31 août, alors que Harry était couché dans son lit, celui-ci demanda:

"Au fait, Gramine, tu comptes m'emmener comment à la gare demain?

_ En volant, sur mon dos, bien sûr. Ca ira plus vite que n'importe quel autre transport, sois en sûr. On n'aura pas besoin de se presser demain.

_ On pourrait rejoindre directement le château...

_ Ah non, il en est hors de question! Le professeur Dumbledore l'a bien précisé, pas d'extravagance dès le début de l'année!... Dors maintenant, je te réveillerai demain à 9h30, ça suffira largement.

_ Bonne nuit, Gramine.

_ Bonne nuit, Harry.

Puis Gramine posa sa patte sur le cœur de Harry et le plongea dans un profond sommeil.

Mais la tigresse ne s'endormit pas tout de suite. Elle se dirigea vers la fenêtre et regarda au dehors. Tout était calme; mais elle avait tout de même un mauvais pressentiment. Quand soudain, une explosion retentit à une centaine de mètres de là sur le Chemin de Traverse. Des cris de terreur lui firent hérisser ses poils. Puis la Marque des Ténèbres apparut dans le ciel. Gramine ne bougeait pas, on lui avait dit de ne rien faire pour ne pas attirer l'attention sur elle et donc sur Harry. Elle brûlait d'envie d'arrêter le massacre qui se livrait, mais la sécurité de son protégé passait avant tout pendant les vacances, le professeur Dumbledore lui avait fait confiance sur ce point. Des sorciers du Ministère transplanèrent quelques minutes plus tard sur les lieux du drame mais il était trop tard, il n'y avait plus qu'une maison écroulée et des sorciers morts sur la place. Gramine tira le rideau et rejoignit Harry, espérant seulement que ce n'était pas une de leur connaissance qui avait perdu la vie ce soir. Elle n'avait pas vu grand-chose de l'attentat, mais elle aurait préféré ne rien avoir vu.

1er septembre: le jour qu'attendait impatiemment Harry, même s'il savait qu'il devrait affronter un certain temps les regards inquiets des élèves, et même ceux des professeurs. Mais il avait tout de même hâte de retrouver sa chambre, ses amis, de pouvoir à nouveau voler sur son Eclair de Feu et arpenter les couloirs la nuit, et aussi de rencontrer le nouveau professeur de défense contre les forces du Mal.

Harry fut donc réveillé à 9h30, comme convenu. Sous l'effet de l'excitation, il mit en fait plus de temps à s'habiller et à préparer sa valise que d'habitude, ce qui fit bien rire Gramine. La tigresse se garda de lui raconter ce qu'elle avait vu, surtout qu'elle était certaine qu'il le saurait bien assez tôt. Après le petit-déjeuner, elle montra à Harry sa propre baguette magique:

_ J'ai complètement oublié de te dire que j'ai fait faire cette baguette pendant l'été. Elle est en chêne et a une plume de chocobo à l'intérieur.

_ C'est super! s'exclama Harry. Tu vas prendre des cours pour connaître des sorts?

_ Oui, c'est certain; j'en connais déjà quelques uns après toutes les années que j'ai passé avec toi et je les maîtrise parfaitement mais je pense suivre de près les cours d'enchantement et de défense contre les forces du Mal.

_ Tu iras en quelle année?

_ En 5eme, sans aucun doute. Ca me permettra d'être à tes côtés, sauf si ça te dérange, bien sûr.

_ Non, pas du tout, ça ne me dérange pas, ta présence est toujours la bienvenue, répondit Harry d'un trait; puis il baissa la tête car il s'était mis à rougir.

_ On y va? demanda Gramine pour changer de sujet.

A l'aide d'un sortilège de lévitation, Gramine descendit les affaires de Harry et les déplaça jusqu'à un vaste espace sur le Chemin de Traverse vidé de toute l'agitation des derniers jours. Seuls quelques retardataires achetaient encore leurs dernières fournitures. C'est là qu'ils rencontrèrent Neville Londubat, qui était en train de courir dans l'allée avec tout un stock de feuilles de parchemin. En les voyant, il eut juste le temps de dire un "Salut Harry, bonjour Gramine, excusez-moi je suis en retard!!" avant de disparaître au coin de la rue. Gramine s'esclaffa:

_ Ah ce Neville! Un jour c'est sa valise qu'il oubliera de prendre pour aller à Poudlard!

_ Mais, Gramine, s'il est en retard, c'est que nous le sommes aussi !

_ Ne t'inquiète pas, on y sera en quelques minutes! Bon, je vais me transformer ici, dit-elle en déposant les affaires de Harry au centre d'une grande place vide. Elle s'écarta de quelques pas puis commença à se transformer: une intense lumière blanche se dégagea de son corps, la tigresse se mit à grandir, des pics sortirent de son dos, puis la lumière s'éteignit. Harry put alors contempler l'armure de métal qu'avait revêtue Gramine. Chaque transformation le fascinait: il avait maintenant devant lui un énorme tigre de 1m70 de haut au garrot, vêtu d'une splendide armure de métal gris foncé constitué de plaques, sous laquelle on ne pouvait apercevoir les poils blancs et noires qu'à la base du cou et entre les plaques. Du haut de son dos pointait vers le ciel une dizaine de piques pointues comme d'immenses aiguilles, qui bougeaient lentement à chaque mouvement de l'armure.

Puis Gramine fit apparaître sur son côté droit un grand sac accroché en bandoulière dans lequel elle mettait tous les objets dont elle avait besoin lors de ses quêtes. Elle lui avait déjà montré une partie du contenu: on pouvait y trouver une carte de la galaxie pour se diriger entre les étoiles, la cape noire lui servant à se dissimuler, un énorme grenat qui contenait une puissante chimère-dragon, son bijou familiale en jade et encore pleins d'autres objets dont Harry ne connaissait pas le nom. Gramine en sortit une sorte de grand filet dont la matière était proche de celle de lianes pouvant s'étendre et se raccourcir selon l'usage que l'on voulait en faire. Puis la tigresse se dressa sur ses deux pattes arrière de toute sa masse_ elle devait bien faire 4 m de haut!_ puis enfila le filet en faisant attention de ne pas l'abîmer dans ses piques. Elle retomba ensuite lourdement sur le sol, puis elle prit les valises de Harry et les introduisit entre les mailles du filet afin qu'elles soient totalement emmêlées dans les lianes. Après avoir équilibré les masses des valises, Gramine assura Harry que les mailles ne redeviendraient comme avant que lorsqu'elles ne sentiront plus de forces s'exercer sur elles. Enfin, elle plia ses pattes jusqu'au ras du sol et demanda au sorcier de grimper sur son dos:

_ Allez, viens Harry, assieds-toi juste derrière les piques, tu pourras t'y accrocher. Et si tu as peur de tomber, tu peux coincer tes pieds sous les mailles pour ne pas glisser sur l'armure.

_ Tu ne vas pas faire des figures dans les airs, quand même! questionna Harry avec une pointe de peur dans la voix.

_ Non, non, ne t'inquiètes pas, ça va peut-être secouer un peu, c'est tout... C'est bon, tu es installé?

_Oui, répondit Harry. Il avait du mal à cacher son inquiétude, c'était la première fois qu'il montait sur son dos. Les plaques glissaient et les mailles semblaient se détendre quand il s'agrippait à elles. Il s'accrocha aux piques devant lui et eut juste le temps de se caler entre les plaques quand deux puissantes ailes noires et épaisses sortirent des flancs de l'animal. Elles se mirent à battre de plus en plus vite puis doucement, elles soulevèrent Gramine et son élève du sol.

Arrivé à 5 m au-dessus de la place, Gramine les rendit invisible avant de passer la limite entre le monde des Sorciers et celui des Moldus. Et le voyage commença. Bien qu'il ne fut que de quelques minutes, Harry sentit toutes les émotions que Gramine devait ressentir en volant ainsi : le vent lui fouettait agréablement le visage et lui sifflait dans les oreilles, la ville filait sous eux comme une immense maquette et les ailes battaient l'air, élevant toute leur masse à chaque mouvement. Enfin, Harry aperçut la gare de King's Kross. Il était en train de se demander comment ils allaient retrouver le Poudlard Express sans attirer l'attention quand sa vision commença à se modifier: le quai gris et noir de monde ainsi que son train de couleur foncé et terne se transforma peu à peu en un quai où des dizaines de jeunes sorciers accompagnés de leurs parents se hâtaient vers un train rouge vif bien connu. Un grand vacarme régnait dans la gare, que ce soit les hululements incessants des hiboux dans leurs cages ou les miaulements de chats qui jetaient des regards malicieux vers les étranges oiseaux. Gramine partit directement vers la fin du quai où il n'y avait personne; elle leva son voile d'invisibilité, prit un virage serré pour se retourner et atterrit sur le quai sans ménager son passager. Si Gramine avait eu l'intention de faire une arrivée sans attirer l'attention, c'était raté pour cette fois : tous les sorciers avaient les yeux rivés vers eux, enfin surtout vers elle, puisque Harry était caché par les piques. Gramine se baissa et laissa Harry descendre de son dos puis elle fit disparaître son armure de métal dans un éblouissement de lumière. Les valises, n'étant plus coincées contre ses plaques tombèrent de quelques centimètres de haut sur le sol, au milieu du filet qui reprit sa forme initiale. Tandis que Harry redressait ses valises qui pour la plupart étaient couchées sur le côté, Gramine s'ébroua puis rangea son filet dans son sac, sous les yeux ébahis de la plupart des sorciers.

Il était 10h50.

La foule devenait plus dense au fur et à mesure du temps qui passait, et le Poudlard Express commençait à cracher sa fumée noirâtre. Harry alla chercher un chariot et y mit ses valises. Gramine disparut un instant. Pendant qu'elle se frayait un chemin parmi les sorciers, elle remarqua que beaucoup la reconnaissait et lui faisait un signe de tête en guise de salut. Elle leur répondait par un sourire puis continuait sa route. Enfin, elle trouva la famille Weasley :

" Ah, vous êtes là! Il y a tellement de monde ici qu'on ne peut plus se retrouver!

_ Bonjour Gramine, on vous a vu passer au-dessus de la gare. Vous allez bien? La route s'est bien passée? demanda Mme Weasley.

_ Oui, on va très bien. Harry est là-bas avec ses valises, vous pouvez aller le voir", dit-elle en s'adressant à Ron et Hermione.

Les deux jeunes sorciers prirent leurs chariots et se dépêchèrent de rejoindre leur ami.

" Vous avez l'air inquiet, continua Gramine, il s'est passé quelque chose?

_ Vous n'êtes pas au courant? Il y a eu un attentat sur le Chemin de Traverse hier soir, ils en parlent dans La Gazette du Sorcier.

_ Ah, ça... Je sais, j'ai vu ce qu'il s'est passé mais les ordres sont les ordres, je n'ai pas pu intervenir, dit-elle en baissant la tête. J'achèterai le journal pour voir ce qu'ils en disent... Bon, il faudrait peut-être que les enfants montent dans le train, il va bientôt partir! Je vais les prévenir. Au revoir!

_ Au revoir, Gramine, et faites attention à vous tous cette année! ajouta Mme Weasley.

_ Ne vous inquiétez pas!" et Gramine disparut dans la foule.

Elle retrouva les trois sorciers à l'entrée d'un wagon. Ils étaient en train de monter leurs valises quand elle entendit une voix traînante et désagréable à quelques mètres:

"...et tous ces sorciers qui croient encore en lui..."

La tigresse tourna brusquement la tête en direction de la voix et ne fut pas surprise de voir Drago Malefoy en grande discussion avec ses deux pots de colle, Crabbe et Goyle. Elle se dirigea vers eux et demanda:

"En qui est-ce que tous les sorciers croient?

_ Ce n'est pas tes affaires, le monstre! répondit-il en affichant un regard méprisant.

_ Sache que le monstre peut te faire renvoyer de Poudlard si tu continues à lui manquer de respect, gronda-t-elle. Et je t'ai posé une question qui attend une réponse.

_ En qui d'autre que ton petit protégé les sorciers peuvent-ils encore croire? Tout ça parce que Monsieur-je-suis-le-centre-du-monde-et-je-le-fais-savoir a eu un coup de chance un jour. Il doit être bien embêté maintenant que tous ses efforts pour sauver le monde sont réduits à néant. Tout le monde serait sûrement étonné de connaître la vérité: c'est lui qui a fait revivre le Maître en plus d'être un meurtrier." Il avait dit tout cela sans quitter des yeux Gramine, dans une attitude de défi. La tigresse, elle, lui aurait volontiers jeté un sort de mutisme s'il n'y avait pas eu autant de monde pour les regarder. Heureusement, personne n'avait semblé réagir à ces dernières paroles.

"Tu ferais mieux de faire bien attention à toi, Malefoy. Je n'ai peut-être pas le droit de t'attaquer physiquement, mais personne ne m'a interdit d'utiliser une baguette magique..." puis elle se détourna du groupe et rejoignit ses amis devant la fenêtre de leur compartiment.

"Vous êtes installés ?

_ Oui, tout va bien. Tu montes ? demanda Harry.

_ Pas tout de suite, je vais acheter le journal puis j'irai voler un peu pour me dégourdir les ailes, je vous rejoindrai plus tard dans le train.

_ D'accord, à tout à l'heure !

Gramine s'écarta un peu du train et vit toute une cohue d'élèves s'empresser vers les portes des wagons. Puis le train s'ébranla et avança le long du quai, de plus en plus vite.

La tigresse se détourna du quai et accosta un sorcier qui vendait les journaux du jour. En première page, Gramine put y apercevoir une image en noir et blanc représentant un quartier du Chemin de Traverse en ruine, surmonté d'un titre en gras: Attaque sur le Chemin de Traverse! Elle en demanda un exemplaire et le feuilleta rapidement pour voir les autres sujets; elle remarqua que la plupart traitaient d'un même thème: les attaques se multipliaient dans tout le pays, dans toute l'Europe, jusqu'en Russie. Voyant que le vendeur hésitait à lui réclamer de l'argent, la tigresse lui donna les pièces désirées puis repartit vers le bord du quai. Et devant des sorciers mi-étonnés, mi-apeurés, elle s'élança sur la voie ferrée, fit apparaître ses ailes dans un jaillissement de lumière, puis fila vers le train dont on n'apercevait plus qu'un mince filet de fumée. En chemin, elle prit un grand plaisir à enchaîner pirouettes, plongés, roulades et autres figures aériennes. Après une bonne demi-heure de vol au côté du train, elle se mit en quête de retrouver le compartiment de ses amis. Elle mit peu de temps, se laissant guider par le lien d'amitié profond qui l'unissait à Harry et leur fit un signe à travers la vitre pour qu'ils lui ouvrent. Elle rentra dans le compartiment où il y avait tout juste assez de place pour eux. Ron s'exclama:

"On t'a regardé voler, Gramine. C'est fantastique tout ce que tu peux faire avec tes ailes!

_ Merci, Ron", sourit-elle. Si la tigresse en avait été capable, elle aurait rougit à cette remarque.

Harry, qui n'avait pas dit un mot, s'était contenté de sourire. Il se sentait bien depuis que Gramine était là. Il ne savait pas ce qu'il ferait sans elle. En voyant La Gazette du Sorcier dans sa patte, il s'écria:

"Tiens, tu as acheté le journal, ils disent quoi dedans?"

Gramine hésita un instant avant de le lui montrer, mais elle le lui passa quand même. Il lut la première page et se mit à pâlir. Au bout d'un moment, il leva la tête vers Gramine et la dévisagea. La tigresse baissa la tête et ne dit rien. Hermione s'empressa de couper le silence qui s'était installé:

"Qu'est-ce qu'il se passe? Montre-moi le journal, Harry."

Harry le donna d'une main tremblante. Hermione lut la première page:

Attaque sur Chemin de Traverse!

Hier soir, à 10h30, le café "Au dragon flambé" a été attaqué par une dizaine de Mangemorts, explique notre envoyé spécial Annia Trofumé. Après avoir tué tous les Sorciers et Moldus qui se reposaient dans cet hôtel, et avoir fouillé chaque chambre, les mages noirs ont fait s'effondrer le café puis ont transplané sans demander leur reste. Lorsque les Aurors sont arrivés sur le lieu du drame, il n'y avait aucun survivant. Nous pensons qu'ils étaient à la recherche de quelque chose ou de quelqu'un...

Hermione arrêta sa lecture et regarda Harry. Ses mains étaient accrochées à la banquette et la serraient si fort qu'il en avait les jointures blanches. Hermione intervint:

"C'est bien sur le Chemin de Traverse que vous étiez, hein Gramine?

_ Oui, et j'ai assisté l'attaque. Je suis désolé Harry, j'aurai du te le dire, mais je ne voulais pas t'inquiéter...

_Ce n'est pas ta faute, Gramine, je ne t'en veux pas.

_ Il est évident que les Mangemorts étaient à ta recherche, Harry", fit Ron. "C'est une chance que vous ne séjourniez pas dans ce café."

_ Il ne se serait rien passé, Ron. J'avais ordre de ne pas quitter Harry, et de le protéger en cas d'attaque." répliqua Gramine.

Elle se rapprocha de Harry et l'entoura de ses pattes. Une douce chaleur l'envahit aussitôt. Il se sentit beaucoup mieux tandis que sa tristesse mêlée de colère le quittait. Ils restèrent ainsi quelques minutes, Ron et Hermione étant silencieux, en état de deuil. Ils avaient tous connus le patron du bar, un sorcier bien-vivant et très bavard. Il avait toujours une anecdote ou une aventure palpitante à raconter, pour la plupart inventées bien entendu. Son café attirait beaucoup de monde, sa réputation était pour ainsi dire très bonne. Et voilà qu'il était parti. Avec quelques-uns de ses clients; et tous des innocents.

Harry laissa couler quelques larmes sur la fourrure de son amie. Il entoura son cou de ses bras et la serra très fort. Quand il relâcha son étreinte, il s'endormit.

Il était dans une pièce sombre. Seul un feu mourant faisait encore danser quelque ombre sur les murs. Un grand fauteuil s'élevait au centre de la pièce, face à une fenêtre donnant sur un jardin en friche. Un homme vêtu d'une cape et d'une cagoule noires entra. Il se prosterna et dit:

"Nous avons attaqué le café "Au Dragon Flambé", Maître. Il n'y avait aucune trace de ce que nous cherchions. On nous a...

_ ...donné de fausses informations, je sais." La voix s'était élevée du fauteuil. Harry la connaissait bien. Elle appartenait à Voldemort. "Ce sorcier du Ministère nous a menti délibérément, ou bien c'est l'Aupengyar qui nous a trahis...

_ Les Aupengyars ne mentent jamais quand on leur demande quelque chose, Maître.

_ Ils sont bien plus fidèles que n'importent qui, là est leur qualité", reprit la voix.

Le Mangemort déglutit difficilement. Il allait sûrement payer son erreur.

"Je ne vais pas te punir, Avery, pas cette fois. J'ai déjà prévu autre chose pour sa capture..." murmura Voldemort.

Soudain, Harry entendit un sifflement. Il se retourna et poussa un cri: un énorme serpent venait de rentrer dans la pièce.

"Tiens, Nagini, tu as fait une bonne chasse?"

Le serpent répondit par un autre sifflement.

"Tu auras bientôt de meilleurs proies, je peux te l'assurer."

Puis Harry se sentit aspirer dans le sol, tout se mit à tourner, et l'obscurité se fit totale.

Il se réveilla dans son compartiment, sa cicatrice émettait un faible picotement, comme un avertissement. Il avait le souffle court, et son cœur battait la chamade. Ron et Hermione lui demandèrent s'il avait bien dormi. Il hocha la tête en signe d'affirmation et dit:

"J'ai rêvé de Voldemort,... encore." Ron tressaillit à l'annonce de Son nom, mais ne prononça pas un mot. "J'ai dormi longtemps?"

_ Une bonne heure; le chariot à friandises vient de passer, on t'a acheté plein de bonnes choses, dit Ron la bouche pleine.

_Je vois que je ne suis pas le seul à dormir ici ! s'exclama Harry.

En effet, Gramine était couchée sur la banquette d'en face, sa tête posée sur les genoux d'Hermione.

Harry ne parla pas de son rêve, d'autant plus que ses amis ne s'en étaient pas inquiété. Durant tout le reste du voyage, ils ne reçurent que très peu de visites, justes celles de Neville, Seamus, Dean, Ginny et les jumeaux Weasleys ( effectivement, c'est très peu de visite, lol ). Même Malefoy n'était pas venu leur faire entendre ses sarcasmes. Apparemment, il n'avait pas envie de se confronter de nouveau à Gramine. Ils passèrent donc l'après-midi à discuter tranquillement, et réveillèrent Gramine un peu avant que le soleil ne se soit couché. Ils revêtirent leurs robes de sorcier. C'est à ce moment-là que Harry remarqua les deux animaux de ses compagnons: Coquecigrue était comme toujours dans sa cage, recouverte d'un tissu noir et opaque, et Pattenrond dormait dans un filet à bagages. On peut dire qu'ils avaient été très silencieux cet après-midi! pensa Harry.

Puis quand le dernier rayon de soleil eut entièrement disparu, le train freina enfin sa course. Tous les élèves se pressèrent vers la sortie, apparemment impatient de retrouver un peu d'air frais. Comme toujours, Hagrid accueillit les élèves de première année et les emmena vers les barques. Et les autres années prirent les diligences conduites par des chevaux invisibles. Au château, tous les élèves_ moins les premières années_ attendirent à l'entrée de la Grande Salle que les professeurs soient prêts, gardés par Gramine. Harry sentit que les élèves le regardaient avec une mine sombre. Ils devaient s'attendre à le voir s'évanouir d'un instant à l'autre, pensa Harry. D'autres élèves le regardaient comme s'il allait bientôt disparaître, et de la compassion se lisait dans leurs yeux. D'autres encore semblaient ne pas vouloir s'approcher de lui, comme s'il était porteur de malheurs.

Enfin, la porte s'ouvrit et Gramine rentra au pas de course dans la Grande Salle. Les élèves la suivirent et rejoignirent leur table respective. Harry vit la tigresse se diriger vers un homme d'aspect fatigué qu'il connaissait bien:

"Professeur Lupin, s'écria Gramine, quelle joie de vous revoir!" Elle courut à sa rencontre et le serra dans ses puissantes pattes, ce qui avait un aspect comique, car voir un si grand animal enlacer un homme ainsi comme un vieil ami était un fait plutôt rare. Tandis que Gramine s'empressait de serrer la main des professeurs, Harry sentit que ceux-ci le regardait intensément, cherchant à déceler la moindre tristesse ou la moindre douleur en sa personne. Et c'était assez gênant de se sentir fouillé ainsi. A cet instant, Harry n'aurait pas été étonné de voir débarquer Mme Pomfresh, lui demandant si tout allait bien et s'il n'avait pas besoin d'un morceau de chocolat. Et comme pour rassurer ses observateurs, Harry se mit à sourire, il pensa au Quidditch et au retour du professeur Lupin, ce qui eut pour effet de faire envoler tous ses soucis pendant un court moment. Puis il s'installa à la table des Gryffondors et ne tarda pas à voir arriver Hagrid, vêtu d'une grande cape de voyage.

Quelques minutes plus tard, les premières années firent leur entrée. Timides, rassurés, curieux, Harry pouvait voir sur leurs visages toutes sortes de sentiments. Malgré la faim qui le tenaillait, il prit plaisir à réentendre la chanson du choixpeau magique et à voir défiler les nouveaux élèves. Puis le professeur Dumbledore demanda le silence et prit la parole:

" Je ne doute pas que vous ayez tous aussi faim que moi, si ce n'est plus, mais je voudrais tout d'abord vous rappeler certaines règles toujours en vigueur: La forêt est bien entendue interdite à TOUS les élèves, ainsi qu'il est interdit de se promener dans les couloirs de l'école durant la nuit." Il avait dit cela en jetant un regard amusé à Harry. "Je vous prierai aussi d'accueillir le retour du professeur Lupin, qui enseignera le cours de Défense contre les Forces du Mal..." Des applaudissements nourris jaillirent de la table des Gryffondor, tandis que celle des Serpentards restait muette." Pour ceux qui ne le savent pas encore, je n'ai aucune crainte à vous dire que le professeur Lupin est un loup-garou, et qu'il sera donc absent les jours de pleine lune. Son absence sera compensée par le professeur Rogue, qui a bien voulu prendre en charge les deux matières. Sachez que nous avons pris les mesures nécessaires afin que la transformation en loup-garou ne soit pas dangereuse pour l'école."

Un silence gêné s'abattit sur la salle, beaucoup d'élèves ne pensaient pas au bien fondé d'avoir un loup-garou comme professeur. Puis Dumbledore reprit :

"Bien que le ministre de la Magie Mr Fudge le nie encore, je peux vous assurer que Lord Voldemort est revenu (les élèves frissonnèrent à Son nom). Les mesures de sécurité du château ont été renforcées, même s'il est possible que vous ne vous en rendiez pas compte. Les visites à Pré-au-Lard seront moins nombreuses..."-une déception générale de la part des élèves de 3e année et plus se fit entendre-"...mais les matchs de Quidditch reprendront comme les autres années, avec toutefois une surveillance constante des entraînements."

Cette fois une explosion de joie retentit et fit vibrer les murs du château. Tous les élèves accueillirent cette nouvelle avec le plus grand enthousiasme, même Gramine poussa un formidable rugissement, ce qui eut pour effet de calmer l'euphorie générale.

"Je compte sur chaque équipe pour sélectionner leurs éléments manquants et leurs nouveaux capitaines (en effet, tous les capitaines des équipes avaient quitté l'école). Et en raison des évènement récents, j'ai pris la responsabilité de donner plus de pouvoir à Gramine." Gramine redressa la tête et la tourna vers le directeur. Elle ne semblait pas au courant. "Elle aura maintenant la capacité de donner des retenues et des punitions aux élèves qui ne respecteront pas le règlement du château et elle  surveillera les entraînements de Quidditch. Enfin, sa protection s'élargira à toute l'école."

Gramine acquiesça d'un signe de tête et prit la parole:

"Pour ceux qui ne sont pas encore au courant, j'effectue la plupart de mes surveillances pendant la nuit, que ce soit dans le château ou le parc. Je voudrais aussi vous annoncer que je suivrai certains cours des élèves de 5e année à Gryffondor, je compte approfondir mon pouvoir en me servant d'une baguette magique. C'est tout ce que j'ai à dire, professeur."

Un murmure enthousiaste parcourut l'assemblée d'élèves. Au cours des années, la plupart des élèves avaient appris à l'apprécier et à bénéficier de son aide, même si elle n'était pas aussi importante que celle pour Harry. Ils étaient toujours admiratifs devant sa puissance magique, surtout ses transformations. Les Serpentards, eux, faisaient la moue. Ils prenaient encore Gramine comme un simple animal de compagnie et s'amusaient à exercer les limites de sa colère. Plusieurs fois la tigresse les avaient menacées d'expulsion et de retenues, mais elle ne pouvait rien faire contre eux. Cette année, ça allait changer... Les Serpentards avaient intérêt à se tenir à carreau.

"Bien, je crois que j'en ai fini avec toutes mes recommandations", reprit Dumbledore," je n'ai plus qu'une chose à vous dire: Bon appétit!"

Aussitôt, les plats dorés se remplirent de victuailles, de friandises, de jus de citrouille, au grand bonheur de tous les élèves et professeurs. Harry vit Gramine se lécher les babines puis remplir son assiette de toute sorte de viandes et de légumes. Il s'intéressa à sa propre assiette et remarqua qu'il n'avait pas si faim que ça. Les évènements de la journée l'avait bien trop marqué. Gramine le vit et lui envoya un message télépathique. Harry entendit alors une voix douce et grave dans sa tête qui lui disait:

"Mange, Harry."

Ce message eut tout de site un effet réconfortant et il s'empressa de remplir son assiette et de la vider. Le dîner passa ainsi agréablement, jusqu'au dessert, qui se présentait sous forme de tartes à la mangue recouvertes de chocolat. Lorsque tous les desserts eurent disparus, le professeur Dumbledore se leva une dernière fois et dit:

"Maintenant que vous avez tous l'estomac plein, il est temps de regagner vos chambres pour un sommeil bien mérité. Et n'oubliez pas que les cours commencent dès demain!"

Plusieurs élèves sourirent à cette remarque puis chacun quitta sa table. Hermione s'écarta du groupe et emmena les première année jusqu'à leur dortoir. Gramine accompagna un moment les Gryffondors puis s'en sépara au détour d'un couloir pour regagner sa chambre.

Arrivé à sa salle commune, Harry eut une idée concernant l'équipe de Quidditch. Il attendit que tous le monde soit là puis il monta sur une table et dit :

"Bon, tout le monde est là?"

"Ouais, nous sommes là, tu peux parler Harry" dirent en chœur les jumeaux Weasley.

"Ca concerne le Quidditch: comme notre cher capitaine nous a quitté il y a deux ans, il serait temps d'en choisir un nouveau. Quelqu'un est-il volontaire dans l'équipe ? ... ... Non?"

Grand silence. Angelina prit la parole:

"Oui, moi je sais qui est volontaire."

"Ah oui?"demanda Harry.

"Toi."

"Hé, non, pas moi!... Bon, je vais afficher une feuille et vous y inscrirez le nom de votre futur capitaine pour mercredi. Seuls les membres de l'équipe votent bien sûr.

Et il nous faut aussi un gardien, si possible pas de première année. Les sélections se feront samedi. Je vais accrocher une autre feuille à droite de la première et vous mettrez votre nom si vous voulez devenir gardien. Et vous trompez pas de feuille, ça serait sympa" ajouta-t-il avec un sourire gêné.

Fred applaudit en sifflant et criant: "Bravo Harry, ça c'est ce que j'appelle un discours."

Harry devint tout rouge et disparut dans l'escalier qui menait à sa chambre. Il fut vite retrouvé par Ron, Neville, Seamus et Dean puis ils se couchèrent et s'endormirent très vite.