Titre : Créatures oubliées

Auteur : Epayss

Adresse : epayss@caramail.com

Avertissements : On va dire plutôt G pour ce chapitre.

Note de l'auteur: C'est reparti pour un nouveau chapitre, avec de l'action, des larmes et des morts… non je rigole, pas de morts. Vous allez en apprendre un peu sur Gramine dans ce chapitre, et encore plus dans le prochain.

Au fait merci aux reviewveurs pour leurs messages, ça m'encourage à écrire plus vite.

                                                    L'APPEL DES ETOILES

Harry se réveilla en sursaut. Il faisait encore nuit dans la chambre, tous dormaient. Le sorcier se redressa dans son lit et replia ses genoux contre sa poitrine. Sa tête le brûlait, encore cette foutue cicatrice. Il tourna les yeux vers le réveil. Il était 4h00 du matin. Harry étira ses membres engourdis et se leva. Il n'avait plus sommeil, son organisme s'étant habitué depuis toutes les nuits où il se réveillait brutalement à ne plus être fatigué. Malgré les sommeils forcés de Gramine, ses nuits n'avaient pas réussies à redevenir « normales ». Mais cette fois, aucun cauchemar n'avait hanté ses rêves.

 Harry s'habilla, et s'apprêta à descendre dans la Salle Commune. Il passa devant la table de la chambre, sur laquelle il y avait toujours le morceau de parchemin. Grâce à la lumière de la lune, il put lire ce qu'il y avait d'écrit sur la feuille.

« Qui a écrit ça ? Ca doit être un délire des garçons. » Il haussa les épaules et passa la porte. La cheminée de la Salle Commune était froide, les bûches maintenant noires s'étaient consumées depuis quelques heures déjà.

Il toucha du bout des doigts sa fine cicatrice la douleur s'était calmée, ça n'était plus qu'un léger picotement.

Il passa le portrait endormi de la Grosse Dame à pas de loup. La fraîcheur du couloir acheva de le réveiller. Le sorcier n'avait pas pris sa cape d'invisibilité, car il avait pensé qu'à cette heure-ci, il n'y aurait personne dans les couloirs. Il avait juste pris sa cape d'hiver et sa baguette magique, au cas où. Il se mit en route, sans chemin précis. Juste une envie de se dégourdir les jambes, de redécouvrir le château, ses salles cachées, ses passages secrets. Au bout de quelques minutes d'errance, il arriva à la Cour Intérieure. Il traversa l'herbe, craquante sous le pied tellement elle était gelée. Il s'assit sur un des bancs de pierre qui ornait la cour, et regarda le ciel. Les étoiles brillaient, masquées par un seul nuage pâle qui semblait courir sur la Voie Lactée.

Harry s'emmitoufla dans sa cape et s'allongea.

Des pas crissèrent derrière lui. Le Gryffondor sortit sa baguette sous sa cape, et attendit de voir le nouvel arrivant, caché par le dossier du banc. Une silhouette de la même taille que lui apparut, traversa l'étendue d'herbe et s'assit sur le banc opposé à celui de Harry. Là, tous deux se reconnurent, ce qui leur valurent un sursaut de surprise. Face à Harry, se tenait Drago Malefoy. Ils étaient à une vingtaine de mètres l'un de l'autre, et ils se dévisagèrent sans dire un mot, se posant certainement les mêmes questions. Au bout de quelques minutes, Harry coupa court au silence :

« Qu'est-ce que tu fais là, Malefoy ? »

« Je pourrai te retourner la question, Potter. Ce n'est pas moi qui risque de me faire enlever par un monstre. »

« Tu as l'air bien au courant. »

« Evidemment que je suis au courant. Tu crois que je ne fais que suivre des cours ici ? »

Harry fronça les sourcils.

« Pourquoi tu me dis tout ça ? » reprit-il.

« Parce que je n'ai rien à perdre à te le dire, et  parce que je pensais que Gramine te l'avais déjà dit… Mais tu n'as toujours pas répondu à ma question. »

Harry regarda attentivement Malefoy, guettant ses expressions, mais il ne vit sur son visage aucun air satisfait, aucun sourire sardonique. Il jugea donc qu'il avait simplement envie de parler.

« Je n'avais pas sommeil, alors je me suis baladé un peu dans les couloirs. » dit-il à voix basse. « Et toi ? »

« Je cherche de l'inspiration pour mon devoir de Métamorphose. »

« Pendant la nuit ? »

« Il n'y a pas de mal à ça ! Je fais aussi des insomnies de temps en temps, alors autant travailler pendant ce temps là. »

La réponse sembla convenir à Harry, car il se mit à regarder ailleurs… mais il continua à discuter :

« Tu sais, je risque peut-être de me faire enlever, mais si tu te fais attraper par quelqu'un, et je pense surtout à Gramine, tu risques gros. »

« Je sais » répondit Malefoy. « Mais il n'y a pas que Gramine à rôder dans les couloirs. Il y a aussi… Rusard… et même des professeurs. »

« Pas à cette heure de la nuit, tout de même ! » rétorqua Harry.

Un miaulement les interrompit. Leurs têtes se tournèrent vers la provenance de ce bruit. Un chat se tenait sur le muret à côté d'eux, et les regardaient étrangement.

« La chatte de Rusard !! » souffla Malefoy.

Après s'être lancé un bref regard, les deux sorciers se levèrent précipitamment et partirent dans deux directions différentes, sans courir pour que leurs pas ne soient pas entendus. Harry gravit plusieurs escaliers, sans réfléchir où ils menaient, il voulait seulement s'éloigner le plus possible de cette chatte diabolique. Le sorcier, traversa encore un couloir, une tapisserie, un escalier, et arriva dans un long corridor qui débouchait à gauche sur la Cour Intérieure, mais deux étages plus hauts. Il partit donc vers la gauche pour repérer sa position dans le château, car il n'avait pas vraiment regardé où il allait exactement.

Mais quand il arriva à l'embouchure du couloir, il se figea. Sur la droite, appuyée contre le muret, il y avait Gramine. Harry savait bien qu'il n'avait rien à craindre d'elle, mais il se ferait sérieusement gronder si elle le trouvait là. Bien qu'il soit persuadé qu'elle avait déjà ressenti sa présence, il recula, prit la première tapisserie venue et s'engouffra dans le raccourci caché derrière. Il se retrouva dans un espace très étroit et, à en croire le vide qu'il avait sous les pieds quand il les écartait du bord de la tapisserie, cela devait être un escalier descendant. Harry se cala contre un mur et écouta, plongé dans le noir le plus complet.

Rien… Aucun bruit. La tigresse ne semblait pas s'être rendue compte de la présence du sorcier. Peut-être même qu'elle était endormie. Mais Harry n'avait pas le courage d'aller vérifier. Il se tourna vers l'escalier dont il ne voyait même pas la deuxième marche.

« Lumos » murmura-t-il.

La baguette émit une vive lumière, éclairant tout le passage sur à peu près 2 mètres. Harry ne se rappela pas l'avoir emprunté un jour. Il avança prudemment, la baguette en avant. Certaines pierres étaient branlantes, d'autres humides, d'autres encore plus étranges se mettaient à trembler dès que l'on posait le pied dessus. La descente dura longtemps. Au bout d'un moment, Harry ne faisait plus trop attention aux effets magiques des marches et marchait dessus librement. C'est à ce moment là qu'il fut pris au piège. Alors qu'il venait de poser le pied sur une marche, les pierres se dérobèrent sous son poids, il glissa, se rattrapa à la marche suivante par les bras, ouf ! Mais celles-ci se penchèrent en arrière et le sorcier tomba.

Pas une seconde Harry ne lâcha sa baguette. Même lorsqu'il tomba dans l'eau.

Grâce à la bonne épaisseur de vêtements qu'il avait sur le dos, la chute ne fut pas trop brutale, mais il ne manqua pas de boire la tasse malgré tout. Dès qu'il s'aperçut qu'il était dans de l'eau et que, par conséquent, il ne pouvait plus respirer –on s'en aperçoit vite, si si je vous jure !-, Harry se mit à battre des pieds et des mains pour regagner la surface. Il faillit vomir tant il avait avalé d'eau, aussi bien dans l'estomac que dans les poumons, mais réussi à s'en remettre après une bonne quinte de toux. L'eau était tout à fait normale, ce n'était pas une mare nauséabonde, mais plutôt une grande piscine (sans chlore évidemment, et sans chauffage non plus). Le sorcier murmura un second « Lumos » et l'amplifia du mieux qu'il put.

Harry se trouvait dans une immense pièce au plafond en forme de dôme, d'une hauteur d'au moins 50 mètres. Tout en haut, les pierres traîtresses se remettaient en place, bouchant une éventuelle sortie. Le sorcier se trouvait exactement au centre d'un grand bassin parfaitement rond, lui-même au centre d'une gigantesque salle ronde. Harry nagea vers le bord difficilement, les vêtements ralentissant sa progression. Il se hissa sur le bord, et s'aperçut qu'il ne faisait pas du tout froid ici. Le sol était légèrement tiède. En le touchant du plat de la main, Harry sentit qu'il était uniformément plat comme s'il avait été poli et il était d'une couleur bleu foncé. Mais en regardant de plus près, on pouvait voir à l'intérieur du sol des roches, des cristaux, des petites stalactites, comme si on marchait sur du verre qui recouvrait des trésors intouchables. Et à en voir les murs de la salle, c'était pareil la même matière.

Harry se dévêtit en partie et voulut étaler ses vêtements sur le sol. Mais pour le faire, il dut lâcher sa baguette et se retrouver dans le noir.

Sitôt que la lumière fut éteinte, un étrange phénomène survint. Les cristaux incrustés dans le sol et les murs se mirent à briller, répandant une douce lumière bleutée. Il y en avait partout, comme des centaines de petites étoiles. Harry tendit instinctivement les mains vers une de ces lueurs, mais il ne put la toucher. Le lieu était apaisant, il se sentait en sécurité, mais ne savait pas pourquoi.

Harry étala ses habits par terre et laissa la chaleur ambiante le réchauffer. Puis il s'étendit sur le sol. Le silence se fit, et il commença à entendre un léger bruit. C'était une douce musique cristalline, sans mélodie, juste le bruit des cristaux qui se craquellent, qui se cassent doucement, ou émergent des roches, poussent, grandissent, resplendissent. Certains cristaux s'éteignent, d'autres s'allument, et chantent.

Pas une fois Harry n'avait pensé à sortir d'ici, il voulait y rester, pour toujours. Il ferma les yeux, bercé par le chant des cristaux.

Un certain temps passa. ¼ d'heure, ½ heure, 1 heure, il ne savait pas. Aucun son ne lui venait de l'extérieur, le soleil pouvait tout aussi bien s'être déjà levé, il s'en fichait.

Soudain, l'eau du bassin commença à se soulever doucement, éclairée par les lumière des cristaux. L'eau déborda sur les pieds de Harry, le sorcier se redressa et s'écarta du bord, la baguette en main.

C'est alors qu'un immense animal sorti de l'eau. Pour l'instant, Harry n'en voyait que le cou et la tête, mais ils s'élevaient déjà sur peut-être une dizaine de mètres. Comme son environnement, l'animal était de couleur bleu foncé, et sa peau lisse et trempée reflétait les lueurs. Sa tête suivait le prolongement du cou, elle était très carrée et comportait une puissante mâchoire, mais Harry put constater qu'elle n'était bordée que d'incisives et de molaires. L'animal resta ainsi dressé vers la voûte plusieurs secondes, reprenant son souffle. Harry retenait sa respiration le plus possible, mais il dut quand même respirer lui aussi et laissa échapper une inspiration qui couvrit la musique cristalline des oreilles de l'animal. Son cou se courba et il planta son regard dans celui du visiteur. Harry s'accrocha à sa baguette mais n'attaqua pas. Quelque chose dans sa tête lui disait de ne pas manifester d'agressivité. Il soutint le regard du monstre, jusqu'à ce que celui-ci bouge et sorte entièrement de l'eau. Deux pattes avant de la taille du sorcier s'appuyèrent au bord et entreprirent de hisser le corps sur la rive. A l'image du cou, le corps semblait sans fin, long, lisse, et souple comme un serpent. Deux autres courtes pattes le terminaient, puis s'ensuivait une queue très fine et tout aussi longue. L'animal devait bien faire en tout 50 mètres de long. Il coucha sa masse contre les murs et garda sa tête à quelques mètres de Harry. Ses splendides yeux noirs se radoucirent, sa bouche s'ouvrit, et il se mit à parler :

« Qui es-tu ? Tu n'es pas le même que la dernière fois. »

Harry resta bouche bée. L'animal qui se tenait devant lui parlait couramment sa langue! Et en plus, il n'avait pas une once de méchanceté !

« Heu… Je suis… Harry Potter… »

« Harry… Potter… Cela me dit quelque chose… Mais qu'importe… Comment es-tu entré ici, je reçois bien rarement des visiteurs. »

« Je… Je suis tombé, d'un escalier… » répondit Harry. « Excusez-moi si la question est un peu étrange, mais qu'êtes vous ? »

« Moi ? » Un rire rauque sortit de sa gorge. « Je suis un dragon aquatique. Je fréquente souvent le lac de Poudlard, et j'aime particulièrement cette salle, il y fait sombre et c'est très calme. Mais tu dois bien me connaître sous un autre nom… Ne serait-ce pas Calamar Géant ? »

« Vous êtes le calamar géant ? Je pensais que ce n'était qu'une légende, qu'il y ait réellement un grand animal dans ces eaux. »

« Je sais, on me l'a déjà dit. Mais je ne suis pas toujours dans le lac. Notre espèce creuse des tunnels entre les lacs, les nappes d'eau, et toute source d'eau douce comme celles-là. Nous ne supportons pas l'eau salée, alors nous restons à l'intérieur du pays. »

« Pourquoi ne vous montrez-vous pas plus ? Vous pourriez avoir une place dans le Ministère de la Magie. »

« A quoi bon ? Nous vivons très bien, et préférons la solitude d'endroits pareils. »

« Je comprends parfaitement, c'est magnifique ici. »

« Harry Potter, il ne faut que tu parles de moi à personne. Il n'y a qu'une seule autre personne dans ce collège qui connaît mon existence, c'était il y a un mois… Ne dis rien, je préférerai entretenir la légende du calamar géant. » dit-il en adressant un clin d'œil à Harry.

« D'accord. »

« Et n'essaye pas de retrouver cette salle, car l'escalier que tu as emprunté se déplace continuellement. »

Harry soupira et regarda la salle.

« D'accord. » répéta-t-il. Il ressentait la même impression que lorsque Dumbledore lui avait dit de ne plus s'approcher du miroir du Riséd, mais il fallait s'y résoudre : si il arrivait à quitter cette salle, il ne pourrait jamais y retourner, si effectivement l'escalier se déplace. Avec les 142 escaliers de l'école, il y avait de quoi faire.

« Tu devrais partir maintenant, il fait encore nuit et un élève comme toi doit dormir pour récupérer la fatigue de la journée. »

« J'ai déjà dormi. » marmonna Harry. Mais il remarqua qu'il n'était pas contre une seconde sieste. « Par où je peux sortir ? » se demanda-t-il à haute voix, tout en regardant les alentours de la salle pour détecter un quelconque passage.

Le dragon répondit :

« Il n'y a qu'un seul moyen de sortir, c'est par l'eau. » Sa tête dévisagea Harry de haut en bas.

« Mais tu n'as pas l'air d'être taillé pour l'eau » reprit-il, « surtout qu'il y a une bonne centaine de mètres à parcourir avant d'atteindre le lac. »

« Vous êtes sorti comment avec l'autre, celui qui est venu ici avant moi ? » demanda Harry. Il n'avait aucune envie de retourner dans l'eau glacée, d'autant plus que cela lui rappelait trop la seconde tâche de l'année dernière.

« Hmm… On a utilisé un bout de bois… »

« Une baguette magique ? J'ai la mienne ! »

« Et je crois qu'on a utilisé un sortilège de bouclier, ça a fait une bulle autour de lui, et je l'ai emmené comme ça jusqu'au rivage… Tu connais un sortilège de ce genre, Harry Potter ? »

« On a bien appris un sort de protection, mais jamais en bulle. Par contre, au Quidditch, Angelina m'a appris un sort qui protège de la pluie. Peut-être que si je le renforce, il pourra supporter mon poids dans l'eau. »

« Bonne idée, essaye. »

Harry sortit sa baguette de sa poche et la pointa sur lui : « Souffelé » tenta-t-il. Aussitôt, une sphère d'un vert très pâle l'entoura, telle un liquide glissant  sur une bulle invisible de 2 m de diamètre. Harry se dirigea vers le bassin. A chaque pas, il devait marcher sur la bulle fragile pour la faire rouler, ce qui était assez déstabilisant au début, car la seule fois qu'il avait essayé ce sort, c'était son balai qui déplaçait la bulle d'énergie. Le sorcier avança jusqu'à l'eau, et se laissa tomber. Comme un ballon gonflé, la bulle resta à la surface, sautant légèrement sur les vagues, et Harry se retrouva vite par terre, au fond de la bulle, car ça secouait pas mal à l'intérieur. Au moins, il était protégé de l'eau. Il leva les pouces en souriant au dragon, qui se leva et marcha jusqu'au bord. Ainsi debout, Harry s'aperçut que son dos restait bien droit malgré la très longue distance qui séparait les pattes avant des pattes arrière. Il devait donc avoir des muscles très puissants dans le dos, comme un serpent. Puis le dragon attrapa la bulle entre ses doigts, et s'appuyant nonchalamment dessus, il plongea doucement dans le bassin avec la bulle.

Le dragon prit de la vitesse une fois dans l'eau. Son corps ondulait avec grâce, propulsé par de puissantes pattes palmées. Devant lui, Harry pouvait voir le long cou du dragon se profiler, mais bientôt il fit totalement noir, et le sorcier ne vit plus rien. Il ne fit pas de lumière de peur que le dragon ne le supporte pas, et se laissa porter, réitérant de temps en temps le sort de bouclier pour qu'il ne faiblisse pas. Après une descente assez longue, le dragon prit une direction horizontale. Au bout de quelques minutes, il remonta légèrement, fit un demi tour, continua à monter, et émergea enfin à la surface du lac. Ils se trouvaient tout proche de la falaise, en haut de laquelle se tenait le château. Il faisait encore nuit, mais la lune s'était déjà couchée, et le soleil n'allait pas tarder à répandre sa lumière sur toute la région. Le dragon ne lâcha pas encore la bulle, il longea les rochers, et s'arrêta sur la plage de gravier.

« Finite Incantatem. » souffla Harry. La bulle disparut, laissant la place au froid mordant. Soudain Harry eut l'impression d'avoir oublié quelque chose :

« Mes habits ! » s'écria-t-il en remarquant ses bras nus. ( Il n'est qu'en T-Shirt et pantalon.) « J'ai oublié mes affaires dans la salle ! »

« Je peux aller te les chercher » proposa le dragon.

Harry acquiesça. Le dragon replongea sous l'eau. Harry fit un feu magique sur les cailloux pour ne pas attraper la crève, et attendit. Quelques minutes plus tard, l'animal revint. Il déposa les vêtements trempés sur le sol, et Harry les étendit devant le feu pour qu'il sèche une nouvelle fois.

« Merci beaucoup. » dit Harry.

« Tu n'as plus besoin de moi ? »

« Non, c'est bon. »

« J'ai été ravi de te rencontrer, Harry Potter. Mais n'essaye jamais de me retrouver, souviens-t-en. Cela ne ferait que te plonger dans la déception. »

Le sorcier hocha la tête, et le dragon se retourna vers le lac pour y plonger une dernière fois.

« Attends !" fit Harry. « J'ai une dernière question! »

L'animal s'arrêta.

« Qui était le dernier visiteur, celui avec qui tu as parlé la dernière fois ? »

« Hum… C'était Drago Malefoy Leplusintelligentdessorciers. Un nom trop long d'après moi, mais bon. » Et le dragon disparut sous les eaux noires.

« Malefoy ? Leplusintelligentdessorciers ? » se moqua Harry. « Il n'y a vraiment que lui pour dire des trucs pareils… c'est étrange qu'il ait trouvé la salle… Je ne pensais pas qu'il se baladait souvent dans le château comme ça. Et puis il est moins arrogant ces derniers temps, c'est peut-être grâce à ce dragon. Je vais essayer de lui en parler… Attends, qu'est-ce que je raconte. Moi ? Discuter avec Malefoy ? Cela relèverait du miracle ! … Mais pas impossible… »

Harry frissonna. Le vent se leva, faisant trembler le feu. Harry l'éteignit, endossa son pull et sa cape encore mouillés mais réchauffés par le feu et se dirigea vers le château.

Il ouvrit une fenêtre, et se faufila dans le château endormi. Il monta silencieusement jusqu'à sa Salle Commune, réveilla de force la Dame du tableau, lui donna le mot de passe en ignorant ses injures, et put enfin rentrer, au chaud.

Mais il n'était pas seul. Quelques élèves étaient déjà descendus. Ils le virent entrer, emmitouflé dans une cape détrempée, les cheveux mouillés, et une tête profondément fatiguée. Harry fut nettement surpris par la présence d'élèves, alors qu'il faisait encore nuit.

« Il est quelle heure ? » demanda-t-il à l'assemblée. Un élève de seconde année s'empressa de  répondre :

« 7h¼ . »

« 7h¼ ? » s'exclama Harry. « Mais il fait encore nuit! »

Le sorcier se dirigea vers une fenêtre. Une pâle lumière rose apparaissait à l'horizon. Harry passa une main dans ses cheveux trempés et se précipita dans sa chambre. Il se jeta sur son lit et s'endormit aussitôt.

A 8h30, le réveil sonna (on est dimanche au fait, le réveil sonne plus tard). Seamus se réveilla en sursaut, empoigna son oreiller et le jeta sur l'objet de malheur. Le réveil tomba, cessant le bruit strident qui en sortait. Ron ouvrit les yeux et écarta les rideaux rouges de son lit.

« Salut les gars ! » dit-il d'une voix pâteuse. Les garçons lui répondirent en marmonnant.

Dean se leva, et allait partir dans la salle de bain quand il vit Harry, allongé sur son lit, tout habillé.

« Harry ? »

L'intéressé grogna et plaqua son oreiller sur sa tête.

« Qu'est-ce que tu fous avec une cape mouillée sur le dos ? » demanda le Gryffondor.

Les autres garçons se levèrent pour voir Harry. Ron balança son propre oreiller sur Harry qui acheva de se réveiller et regarda son ami en fronçant les sourcils, mais il se prit au jeu et lui renvoya son oreiller à la figure. Alors ils se jetèrent tous sur Harry, lançant des cris de guerre, lui attrapèrent chacun un membre et le maintinrent plaqué sur son lit.

« Je me rends ! » avoua Harry, tout en tentant de se libérer.

« Tu es parti te promener cette nuit ? » interrogea Ron en souriant.

« Oui, je n'avais pas sommeil. » répondit vaguement Harry.

« Mais pourquoi t'es trempé ? »

« Je suis passé à travers un escalier, et plouf, dans l'eau ! Il y avait une vraie piscine dessous. Mais je suis rentré il y a seulement 1h¼ , c'est pour ça que je suis encore mouillé… Je prendrais bien une douche, à propos. »

« La place est prise ! » s'écria Dean. Et il se précipita dans la salle de bain avant que Harry ait pu faire un geste.

Toute la journée, Harry la passa à moitié endormi. Alors qu'il jouait une partie d'échec avec Ron, il finit même par fermer les yeux et tomba sur la table, épuisé. Sous le choc, certaines pièces tombèrent elles-aussi et se ruèrent sur le sorcier qui les avait ainsi fait chuter. Ron dut vite les récupérer avant qu'elles ne se mettent à le frapper de leurs épées, massues, et autres instruments guerriers qu'elles utilisaient normalement entre elles. Hermione, qui avait observé la scène, pouffa de rire devant la tête embêtée de son ami, et replongea dans son livre.

Au soir, quand ils remontèrent tous dans leurs chambres, Harry vit que le bout de parchemin n'avait toujours pas bougé de sa table.

« Qu'est-ce que c'est ? » demanda-t-il à Ron.

« Ca ? C'est toi qui l'as écrit ! Tu ne t'en souviens pas ? »

« Non. Tu n'en veux pas ? »

« Heu, non j'ai pas besoin de parchemin, merci. »

Harry prit la feuille, effaça d'un coup de baguette ce qui y était écrit, et la rangea dans ses affaires.

Les cours reprirent dès le lendemain. Au déjeuner, Harry demanda à Gramine une permission nocturne :

« Est-ce que je pourrai sortir un peu ce soir, dans les couloirs ? »

« Pour faire quoi ? »

« J'aimerai parler de quelque chose avec Malefoy. Alors je peux ? » Harry lui fit son air de chien battu auquel Gramine ne pouvait pas résister. La tigresse le jaugea du regard, de telle sorte que Harry se sente mal à l'aise. Il bougea nerveusement sur son banc.

« D'accord. Mais je devrai te suivre. Je veux bien vous ouvrir une salle et en écarter les professeurs, mais ne compte pas te débarrasser de moi. »

« Pas de problème. Je te dirai l'heure et le lieu ce soir. Merci. »

« Ce n'est rien. Il faut bien que je te laisse un peu de liberté de temps en temps. »

Pendant le cours de Potions, Harry s'était mis comme d'habitude aux côtés de Ron et Hermione, tout au fond de la salle. Pendant que leur cher professeur avait dérivé d'un cours sur un champignon vénéneux à la maladresse de Neville Londubat, Harry prit un parchemin et, prenant soin de modifier son écriture, y inscrivit :

« Rendez-vous dans la Cour Intérieur à 22h. Je veux te parler, sois seul. »

D'un coup de baguette magique, il envoya la feuille sur la table de Malefoy. Après avoir vraisemblablement lu le mot, il regarda autour de lui, cherchant l'auteur du rendez-vous. Puis il écrivit quelque chose et renvoya le message.

« Je n'ai pas que ça à faire, alors tu as intérêt à ce que tu as à me dire vaille le coup de risquer de perdre des points à notre maison. » lut Harry.

Harry répondit à Malefoy :

« Je me suis arrangé pour que nous soyons seuls, d'ailleurs quand on se promène dans les couloirs à 4h30 du matin, on peut se la fermer. »

Quand la correspondance arriva devant Malefoy, il se précipita sur la feuille, puis la renvoya.

« Je t'ai découvert, Potter ! Tu peux toujours rêver, je ne viendrai pas à ton rendez-vous. Je ne suis pas aussi nul que toi pour me jeter dans la gueule du loup, et celle du tigre en même temps. »

« Ca ne t'intéresse pas si ça concerne un certain « calamar géant » ? »

« Si. »

« Alors à ce soir. »

A ce moment, la cloche sonna. Harry se dépêcha de sortir, et adressa en passant un coup d'œil à Malefoy qui le lui rendit avec un air interrogateur. Il aurait payé cher pour savoir ce qui trottait dans la tête vide de Potter.

Le soir arriva trop vite au goût du Serpentard. Il répugnait de devoir se rendre à un rendez-vous aussi tard, sans savoir ce qui l'attendait, et qui plus est avec Potter. Mais à 10h du soir, il se résigna à y aller, comme poussé par une soudaine envie de savoir de quoi le héros de service avait à lui raconter. Il prit sa cape, et quitta sa salle commune, sous l'œil réprobateur des autres Serpentards qui travaillaient encore.

Malefoy se rendit dans la Cour Intérieur, et vit Potter, assis sur un muret. Il ne bougeait pas, il semblait presque endormi. L'idiot ! Malefoy longea le mur en restant à couvert sous les arches qui entouraient la Cour. Quand il arriva devant le Gryffondor, celui-ci ouvrit les yeux et fit un bond, visiblement surpris.

« Je ne savais pas que je te faisais aussi peur, Potter. » se moqua Malefoy.

« Je t'attendais, Malefoy. J'ai bien cru que tu ne viendrais pas. » dit calmement Harry.

« J'ai failli. Je voulais savoir pourquoi tu prenais tous ces risques pour me voir. »

« Ne t'en fais pas pour moi, je me suis occupé de ça. »

« Je ne m'en fais pas, Potter. Si tu crois que ta vie importe à mes yeux… »

« Je m'en doute bien, et crois moi c'est réciproque. »

« Bon, on va pas passer la nuit là, tu voulais me dire quoi ? » s'énerva Malefoy.

« Viens avec moi, on va aller dans une autre salle. »

Harry sauta du muret et emprunta un couloir. Lorsque Malefoy l'avait surpris, il était en train de discuter par télépathie avec Gramine qui se tenait de l'autre côté de la Cour.

Après un second couloir, il pénétra dans une salle vide, suivi de Malefoy. Il alluma un feu magique dans la cheminée, et ferma la porte. Gramine se tint derrière celle-ci, à surveiller le couloir.

La pièce était une salle de classe, avec ses tables, ses chaises, son bureau réservé aux professeurs, tout ce qu'il y a dans une salle de cours, quoi.

Les deux élèves s'assirent sur une table chacun, face à face. Ils s'observèrent en chiens de faïence quelques instants, puis Harry se décida à parler :

« Après qu'on se soit rencontré l'autre soir, je suis passé à travers un escalier, et je suis tombé dans la salle étoilée. Toi aussi tu y es allé, n'est-ce pas ? »

« Comment tu le sais ? »

« C'est le dragon qui me l'a dit. Vous avez discuté ensemble ? »

« Oui. Il était sympa ce dragon. » soupira Malefoy.

Harry observa attentivement Malefoy. Il ne l'avait jamais entendu dire des choses pareils.

« Pourquoi tu me regardes comme ça ? » réagit le Serpentard.

« Je me disais que tu es totalement différent pendant la nuit, ou alors c'est parce que tu es seul. »

« Et alors ? Si tu savais ce que ça soulage de ne plus avoir les autres autour de soi, tu me comprendrais ! Si c'est juste pour me dire ça, ce n'était pas la peine que je vienne. »

« Pourquoi te balades-tu la nuit dans les couloirs, réellement ? »

Malefoy regarda devant lui, dans le vide.

« Pour sortir de l'influence des autres, et… revoir le dragon. J'espère retomber sur cet escalier. »

« Il ne t'a pas prévenu ? Il ne t'a pas dit que tu ne pourrais pas le retrouver ? » demanda Harry.

« Si. »

Soudainement, Malefoy sembla reprendre conscience de la personne avec qui il parlait.

« Pourquoi je te dis tout ça, à toi ? »

« Parce que tu en avais envie. » répliqua Harry.

« Qu'est-ce que tu veux de moi ? Je ne me rallierai jamais de Son côté, si c'est ça que tu veux savoir ! » cracha-t-il. « Ni du Sien, ni du tien d'ailleurs ! »

Il avait hurlé ces paroles sans s'en rendre compte. Les mains crispées, il se leva de sa table et se dirigea vers la porte.

« Attends ! » fit Harry. Malefoy se retourna et fixa le Gryffondor dans les yeux.

« Ne continue pas à chercher la salle, ça ne sert à rien. »

« Hmm. Merci, Potter. » souffla-t-il non sans dégoût dans la voix.

« C'est la première fois que tu me dis merci. » sourit Harry.

« Et je n'en ferai pas une habitude. »

Malefoy ouvrit la porte et sortit dans le couloir.

Harry soupira. Il avait réussi à le lui arracher. Même si Malefoy restait toujours une menace pour lui, au moins il était maintenant certain qu'il ne deviendrait pas un Mangemort, en tout cas pas de son plein gré. Et même s'il ne devait pas s'attendre à ce que Malefoy soit plus agréable qu'avant, il avait réussi à le changer un petit peu, avec l'aide du dragon. Au moins une bonne chose de faite.

Harry se leva et sortit. Gramine le rejoignit :

« Ca s'est bien passé ? J'ai vu Malefoy partir plutôt énervé. »

« Oui, on peut dire qu'il s'est défoulé. J'ai réussi à lui faire dire ce que je voulais : il ne veut pas… »

« …devenir Mangemort, je sais. » coupa Gramine. « Je l'ai senti dans son attitude. Mais ça ne veut pas dire qu'il ne faut pas te méfier de lui. »

Harry hocha la tête. Ils remontèrent au dortoir, où il ne restait que quelques personnes debout, dont Hermione. Elle leva la tête vers eux quand ils passèrent le tableau, et leur dit :

« Vous êtes allés faire quoi dehors à cette heure-ci ? »

« Chut, ne le dis à personne, on s'est juste baladé un peu. On a rencontré quelqu'un, mais je t'en dirai plus demain. Je vais me coucher. Bonne nuit. »

« Bonne nuit vous deux. » Et elle replongea dans son livre, qui traitait de l'histoire des elfes de maison au cours des siècles ( ça s'arrange pas !).

La semaine passa tout à fait normalement. Harry raconta à Ron et Hermione son aventure nocturne- que les obsédés se gardent leurs commentaires douteux- et leur demanda de ne rien dire à personne, sinon cela risquerait de mal tourner avec les Serpentards.

Milieu décembre : Le froid avait atteint un paroxysme. Même la Grande Salle n'était plus assez chauffée, et les élèves gardaient maintenant leurs capes sur eux, du matin au soir, et même pendant la nuit pour certains.

Un matin, les hiboux arrivèrent comme d'habitude par les fenêtres, des lettres et des paquets givrés aux pattes. Un grand duc majestueux se posa à côté des jumeaux Weasleys, et se rengorgea en tendant la patte vers eux. Ne cachant pas leur surprise et leur curiosité, les jumeaux détachèrent la lettre. Un sceau y avait été apposé, avec le nom de Zonko inscrit dessus. Impatients, ils ouvrirent la lettre devant tous les Gryffondors qui les regardaient pour savoir ce qu'il se passait. Ils lurent la lettre en ouvrant des yeux ronds, se regardèrent, et poussèrent un cri de joie qui se répandit dans toute la salle. Les conversations s'éteignirent et élèves et professeurs se tournèrent vers les jumeaux.

« On a été accepté pour travailler pour Zonko l'année prochaine ! » crièrent-ils à l'unisson.

Ils tendirent la lettre à ceux qui voulaient la lire :

« Chers Messieurs Weasleys,

Suite aux précédentes inventions dont vous nous avez fait part, nous acceptons votre collaboration dès la fin de vos études. Veuillez renvoyer votre réponse.

Nos salutations distinguées,

Mr Zonko et Cie. »

« Mais c'est super ça ! » s'exclama Ginny.

« Félicitations ! » se contenta de dire Harry.

« C'est aussi un peu grâce à toi, Harry. » dit Fred.

Ron, qui ne comprenait pas, prit un air déconcerté. Mais il était quand même content que ses frères aient réussi à trouver du boulot pour l'année prochaine aussi tôt.

« Pour l'occasion, on va ramener quelque chose pour le dîner de ce soir. » clamèrent les jumeaux autour d'eux, mais en faisant attention que les professeurs ne les entendent pas.

Gramine les regarda avec insistance, et du regard les jumeaux lui promirent de faire attention. Même s'ils ne maîtrisaient pas la télépathie comme Harry, ils avaient tous deux réussi à communiquer silencieusement avec Gramine par le regard et les expressions du visage.

A la fin du petit déjeuner, tous les élèves rejoignirent leurs salles de cours, tandis que Gramine allait prendre un peu de repos dans la Salle Commune. Elle se coucha sur le tapis, près du feu, et posa sa tête sur le sol. Il n'y avait personne. Harry et les autres étaient en plein cours de Défense contre les Forces du Mal. Elle avait envie d'être un peu seule. Elle ressentit le vide autour d'elle, et en elle. Ses rapports avec Harry n'étaient plus aussi proches qu'avant, elle avait l'impression de n'être plus pour lui qu'un garde du corps. Elle le réveillait le matin, le suivait partout, travaillait avec lui, mangeait à côté de lui, et l'endormait le soir. Ca n'était pas bon, pas bon du tout. Ils ne discutaient plus beaucoup ensemble, ne dormaient même plus l'un à côté de l'autre, et de toute façon Harry ne s'en rendrait pas compte. Et surtout, Gramine était obligée de lui interdire certaines choses, elle détestait ça, comme le fait qu'elle doive l'endormir chaque soir pour qu'il ne fasse pas de cauchemar ou ne se réveille pas avec un mal de crâne pas possible au matin. Evidemment maintenant il n'avait plus mal à sa cicatrice, mais elle ne pourrait pas le faire éternellement, car chaque nuit qui passait le faisait plonger un peu plus dans un sommeil sans fin. Non, pas la mort, mais le coma, assurément. Chaque jour il avait plus de mal à se réveiller, et viendrait un jour où il ne se réveillerait pas. Elle espérait retarder ce jour le plus possible, mais dans quelques temps, il faudra bien arrêter. Et le laisser vivre avec ses cauchemars et ses douleurs.

La tigresse grogna à cette idée. Ce n'était déjà pas facile de porter le poids du destin sur les épaules, mais s'il devait en plus en souffrir…

La cloche sonna. Des élèves rentrèrent dans la Salle Commune, disparurent quelques minutes dans leurs chambres, puis sortirent rapidement. D'autres s'affalèrent dans les fauteuils, échangèrent quelques mots avec Gramine, se firent gronder par leurs amis qui leur rappelaient que ce n'était pas le moment de discuter, puis sortirent à leur tour.

Enfin, il vint les retardataires, puis les 7ème année. Gramine releva la tête quand elle les vit rentrer aussi tard.

« Vous n'avez pas cours ? » demanda-t-elle.

« Non, » répondit Angelina. « On n'a jamais de cours à cette heure. »

« On va en profiter pour préparer le dîner de ce soir. » continua Georges. « Tu viens, Fred ? »

« Vous allez où ? » questionna Gramine.

« Heu… » Georges regarda Fred pour savoir ce qu'il fallait dire. Son jumeau hocha la tête en signe d'acquiescement. « On va à Pré-au-Lard. » dit Georges d'une petite voix.

« Et vous comptez y aller comment ? »

« Par le passage secret qui y va directement. » reprit Fred. « Pourquoi tu nous demandes ça, c'est dangereux ? »

« Plutôt, oui. Je veux bien que vous y alliez, mais ce sera par la voie normale et en ma compagnie, alors. »

Les jumeaux se regardèrent, et sourirent.

« D'accord. » accepta Fred. 

Après avoir posé leurs affaires dans leur chambre, les jumeaux rejoignirent Gramine dans le couloir, puis la tigresse les recouvrit d'un bouclier magique d'invisibilité et ils sortirent dans le parc. Sur la gauche, Hagrid donnait un cours à des 3ème année, enveloppé dans son gros manteau de fourrure. Face au froid, le trio pressa le pas et ils arrivèrent en ¼ d'heure à Pré-au-Lard.

Le village était totalement vide, à l'inverse du bar qui semblait bondé. Ses vitres étaient toutes embuées, si bien qu'on ne voyait à travers que quelques formes colorées.

« Si tu veux, Gramine, attends-nous à une table du bar, on ne sera pas long. » proposa Fred.

« Ok. » La tigresse ouvrit la porte et entra. Bien que les gens la connaissent un peu, ils semblaient toujours un peu apeurés quand elle se tenait à leur côté. Gramine s'installa à une table un peu à l'écart et patienta. Mme Rosmerta, la jolie serveuse, s'approcha d'elle :

« Vous désirez quelque chose ? »

« Non merci. » répondit poliment Gramine. « J'attends juste des amis. »

La serveuse repartit, légèrement contrariée. Depuis le temps que Gramine venait ici, elle n'avait jamais pris un petit quelque chose à boire.

Au bout d'une petite demi-heure, Fred et Georges arrivèrent dans le bar, serrant un grand sac de toile presque vide devant eux. Sans faire attention à Gramine, ils se rendirent au comptoir et discutèrent avec la serveuse. Celle-ci s'étonna, puis descendit dans la cave. Elle en revint quelques minutes plus tard avec deux petits tonneaux apparemment très lourds. Les jumeaux les payèrent et les rangèrent dans le sac. Puis ils les portèrent à deux jusqu'à la table de la tigresse.

« Ouf ! C'est sacrément lourd, dis donc ! » s'exclama Georges.

« Qu'est-ce que vous avez acheté ? » s'interrogea Gramine avec curiosité.

« Deux tonneaux de Bièraubeurre, on en servira sous la table au dîner, comme ça personne ne le remarquera. »

« Mais ça a dû vous coûter toutes vos économies ! »

« Non, Mme Rosmerta nous a fait un prix, vu qu'on vient souvent ici. »

« Vous avez fini vos courses ? »

« Oui, on n'a plus besoin de rien, Fred ? »

« Non, ça ira. On a pris aussi quelques sucreries, et on rajoutera des produits de notre fabrication sur la table. » énuméra Fred.

« Ouh là, je crois que je ne vais pas beaucoup manger ce soir. » rigola la tigresse. « Nous partons ? »

Gramine se leva sur ses deux pattes arrières, prit dans ses bras le sac, et marcha vers la sortie. Les jumeaux la suivirent en disant un au revoir à la jolie serveuse, puis il passèrent eux aussi la porte.

Sur le chemin du retour, alors qu'ils étaient tous sous invisibilité, Georges demanda :

« Gramine, tu as découvert ce que cachait la clé qu'on t'a passé ? »

« Non, pas encore. J'ai bien cherché plusieurs fois, mais je n'ai encore rien trouvé. Mais ne vous en faites pas, je vous préviendrai quand elle sera découverte. »

Ils ne parlèrent plus jusqu'à ce qu'ils arrivent dans la Salle Commune. La plupart des 7ème année était encore là, à travailler. Les jumeaux se dépêchèrent d'aller planquer leurs tonneaux dans leur chambre, puis ils vinrent remercier la tigresse, qui s'envola ensuite par la fenêtre faire un petit tour au-dessus du parc. Elle survola la cabane de Hagrid, déclenchant des « Ohhh ! » de surprise, exécuta quelques pirouettes dans les airs, se faufila entre les anneaux du terrain de Quidditch, et se stabilisa dans les airs. Elle jeta un œil sur le ciel, légèrement voilé par la brume. Déjà quatre mois qu'elle n'avait pas quitté cette planète ! Les étoiles lui manquaient un peu, mais même si elle pouvait ralentir le temps une fois dans l'espace, elle ne voulait pas manquer à son devoir en prenant quelques vacances.

Le soir arriva, aussi rapidement qu'un tout autre soir qui suit une toute autre journée, même si elle avait semblé durer deux fois plus de temps en raison des cours de Potions et d'Histoire de la Magie qui la finissaient. Les Gryffondors sortirent de ce dernier cours, complètement endormis. Quand Harry revint dans la Salle Commune de Gryffondor pour poser ses affaires, il fut intercepté brutalement par les jumeaux :

« Harry ! »

« Oui ? » répondit machinalement l'intéressé.

« On peut te demander un truc ? »

« Allez-y. »

« Hé bien… » murmura Fred, « est-ce que tu peux nous prêter ta cape d'invisibilité juste pour ce soir ? »

« Pour quoi faire ? » demanda curieusement Harry.

« On a été à Pré-au-Lard ce matin, et on a rapporté deux tonneaux de Bièraubeurre. Alors on aimerait bien les camoufler avec la cape et les cacher sous la table pendant le dîner. »

« Cool ! » fit observer Harry. "Y'a pas de problème, je vous la prête ! »

Et il emmena les deux rouquins dans sa chambre. Il ouvrit sa malle, et… - Ouf ! Elle y est !- y prit sa cape d'invisibilité.

« Tenez ! »

« Merci beaucoup Harry ! » remercièrent en chœur les deux jumeaux. « On se reverra au dîner ! »

« Vous y allez déjà ? »

« Non, on passe d'abord aux cuisines, on a quelque chose à demander aux elfes de maison ! » Ils firent un clin d'œil à Harry et partirent en courant. Le dîner promettait d'être un délicieux festin.

Le sorcier maintenant seul dans sa chambre se laissa tomber sur son lit. Cela faisait une semaine qu'il n'avait plus entendu parler de l'Aupengyar. Que préparait-il encore ? Harry était étonné que Voldemort n'envoie pas à Poudlard une créature plus « capable » de le capturer. Mais c'est sûr qu'avec un garde du corps tel que Gramine il était pratiquement intouchable.

Intouchable. Harry se demanda ce qu'elle ferait face à Voldemort. Ils n'en avaient jamais parlé, c'était un sujet qu'il n'avait jamais eu envie d'aborder, peut-être parce qu'il était certain qu'il serait déçu de la réponse.

Les élèves commencèrent à affluer dans la Grande Salle. Les jumeaux étaient arrivés les premiers, et on pouvait voir sur la table des Gryffondors des coupes supplémentaires, contenant tout un tas de petits bonbons multicolores de diverses tailles. L'air ravi, Fred et Georges invitèrent tout le monde à goûter leurs inventions, mais il n'y avait que les premières années pour se laisser tomber dans le piège, et ils plongèrent naïvement la main dans les coupes dorées. Quelques secondes plus tard, dans des « pop » concluants, ils se retrouvèrent affublés d'oreilles de lapin beiges, de museaux de fouine, ou de yeux de chat. Au début, chacun se dévisagea, tâtant et observant les transformations qui s'étaient opérées sur des élèves qui ne savaient pas s'ils devaient rire ou pleurer. Puis soudain, le froid fit place à une hilarité générale, et après que les jumeaux aient assuré qu'il n'y avait que des effets de métamorphose animale dans les bonbons, d'autres élèves tentèrent l'expérience. Bientôt, des cornes de taureaux apparurent, ainsi que des trompes d'éléphant et des becs de rapaces. Evidemment, certains avaient un peu de mal à manger, mais la transformation ne durait qu'une dizaine de minutes, au grand soulagement de ceux qui se retrouvaient avec des pattes d'antilope en guise de bras.

Les professeurs laissèrent faire ces petites frivolités, et ils regardaient même les métamorphoses avec amusement. Le professeur Dumbledore s'avança vers les jumeaux :

« Puis-je aussi goûter l'une de vos inventions, je les trouve très réussi. »

« Oui, bien sûr professeur. » répondit Fred en plongeant la main dans la coupe la plus proche. Il choisit un bonbon vert fluo et le tendit au directeur. Georges se pencha à l'oreille de son complice et chuchota :

« Tu lui as donné quoi ? »

« Tu vas voir. »

Aussitôt une longue corne torsadée et d'une blancheur éclatante sortit du front du professeur Dumbledore. Elle devait bien mesurer 50 cm. Les élèves de toutes les maisons regardèrent avec étonnement cette superbe corne de licorne. Mais au bout de quelques secondes seulement, elle disparut.

« C'est la seule transformation qu'on n'arrive pas à faire durer plus longtemps. » commenta Fred.

Le professeur les remercia tout de même et retourna vers sa place.

Après l'effervescence des métamorphoses, le dîner continua normalement. Enfin, presque normalement. Car sous la table des Gryffondors, à l'abri des regards, des verres vides et d'autres remplis de Bièraubeurre  se déplaçaient entre les jambes des sorciers, sans jamais s'entrechoquer, ce qui relevait du miracle. Et c'était aussi un miracle que les professeurs ne remarquent le changement de comportement de Gramine.

La tigresse s'était assise en face de Harry. Elle n'avait pas touché aux bonbons de peur que l'effet escompté ne soit pas le même sur elle, mais les jumeaux insistaient tout de même pour qu'elle boive un peu de Bièraubeurre. Au bout d'un certain temps, elle finit par céder, prit un verre rempli et en but une gorgée. Le liquide la réchauffa agréablement de l'intérieur, c'était doux et délicieux. Gramine se lécha les babines, et but le verre en entier.

« On dirait que tu aimes ça ! » fit Harry.

« Oui. Ca fait du bien quand il fait aussi froid dehors. »

La tigresse demanda encore un verre, et le but d'un trait. Et encore un autre.

« Eh, force pas trop sur la dose, Gramine. On va plus en avoir. » intervint Georges.

Mais la tigresse n'écoutait déjà plus. La Bièraubeurre semblait avoir un effet assez fort sur elle, car très vite elle se mit à parler de choses complètement absurdes et irréfléchies, et elle riait, d'un rire incontrôlé qui déclenchait des fous rire chez les autres élèves, eux aussi rendus assez joyeux par la Bièraubeurre. Harry ne l'avait jamais vu dans un état pareil, mais cela l'amusait. Surtout qu'elle racontait quelques déboires de sa vie passée assez intéressants :

« Un jour, j'ai eu l'envie de me faire construire un vaisseau spatial pour me rapprocher d'un chasseur de prime et lui faire de la concurrence. Je suis allée m'adresser à un constructeur, un certain Kuat, et il m'a construit mon vaisseau. Ce qui était bien, c'est que c'était un prototype, c'est pour ça que ça ne m'a pas coûté cher. Et ensuite, j'ai donc exercé le métier de chasseur de prime, et j'ai acquis une renommée dans toute leur galaxie, et même sur la Bordure Extérieure !

Un jour, j'ai rencontré quelqu'un, sur une planète je-sais-plus-laquelle et, je-sais-plus-comment, il m'a refilé deux furets super intelligents. Et c'est vrai qu'ils sont super intelligents, vu que maintenant c'est eux qui commandent mon vaisseau quand je ne suis pas là et comme ça ils m'aident dans mes missions… »

Les Gryffondors la regardaient débiter son monologue avec épatement, certains de la véracité de ses dires. D'un autre côté, vu qu'elle était à moitié soûle, elle pouvait très bien dire n'importe quoi.

« Sur un autre monde, j'ai rencontré une Invokeuse, très jolie, et elle était accompagnée par toute une horde de gardes du corps. Et dans ces gardes du corps, il y en avait un, très mignon, blond aux yeux bleus, mais en fait il n'existait pas, et il a dû se séparer de l'Invokeuse après avoir tué un esprit ou un truc dans le genre, et je ne l'ai plus jamais revu. »

« Et la fille, tu l'as revue ? »

« Yuna ? Oui, bien sûr.* Gramine secoua la tête *. Ouh la la, pourquoi je vous raconte tout ça ? Je ne devrais pas le faire normalement, mais bon, puisque j'ai commencé… »

Et la tigresse continua à dériver, de sujets en sujets, jusqu'à ce qu'elle en aborde un, Le sujet dont elle n'aurait jamais dû parler à ce moment-là, elle dit une phrase que personne n'aurait voulu l'entendre dire, le genre de phrase qui casse une ambiance :

« De toute façon, si je vous dis que je peux tuer Voldemort, vous ne me croiriez pas ! » fit-elle en rigolant.

« Ouais, c'est fou ça ! » commenta Seamus d'un ton joyeux.

« QUOI ?!! » s'exclama Harry, qui n'avait pas l'air de trouver ça drôle. « QU'EST-CE QUE TU AS DIT ??!!! » Il avait crié sans s'en rendre compte. Toute la salle se tu, Gramine sursauta et reprit ses esprits, de même que les autres Gryffondors.

« Tu… Tu rigolais j'espère. » reprit calmement Harry.

« … … Non. » répondit la tigresse d'une voix timide. Elle baissa un peu la tête, promena ses yeux sur la table, cherchant à fuir le regard noir de Harry.

« … Mais pourquoi tu ne le tues pas, alors !! » cria-t-il.

« Tu ne comprends pas… » gémit Gramine.

« Si, je comprends très bien ! Toujours les mêmes excuses, ce n'est pas à toi de le faire, c'est ça ? Et bien, fais-le, pour une fois ! Tu n'es pas là pour nous sauver, sinon Il serait déjà mort ! »

La tigresse baissait la tête un peu plus à chaque parole crachée par son protégé. Elle n'aurait jamais penser qu'il puisse lui dire cela, elle n'aurait jamais dû révéler sa puissance, elle n'aurait jamais dû boire autant. Maintenant, ce qu'elle avait caché depuis trop longtemps s'était retourné contre elle.

Harry se leva, et sortit à grands pas de la Grande Salle. Gramine gardait la tête baissée.

« Je n'ai plus rien à faire ici. » pensa-t-elle. Elle déploya ses immenses ailes, les fit battre, et lentement, s'éleva du sol. Elle regarda une dernière fois les élèves, puis les professeurs, eux qui avaient été mis dans le secret depuis le début. Elle vit Hermione la retenir d'un murmure, mais c'était fini, plus rien ne comptait. Elle se rendit invisible, et quitta la salle par une haute fenêtre, celles qui servent habituellement aux hiboux. Son battement d'ailes ne se fit bientôt plus entendre dans la Grande Salle.

Après avoir passé les portes, Harry se retrouva dans le Hall, seul. Seul, pas parce qu'il n'y avait personne à ses côtés, mais parce qu'il sentait au fond de son cœur que Gramine le quittait. En une fraction de secondes, il ressentit un mélange confus de sensations : de la peur, de la honte, de la colère.

Et soudainement, il fondit en larmes, sans se contrôler. Des soubresauts soulevèrent ses épaules, il marcha à travers les couloirs, des larmes coulèrent sur ses joues, il passa une porte, une tapisserie, se mit à courir. Le tableau de la Grosse Dame, la Salle Commune, l'escalier, le dortoir, son lit il se laissa tomber sur le matelas, empoigna les couvertures, les serra du plus fort qu'il put. Il laissa toute sa colère se défouler sur son pauvre lit. Il avait honte de lui-même, et il était en colère contre elle. Pourquoi ne lui avait-elle rien dit ? Mais y avait-il seulement quelque chose à dire ?

« Elle ne veut pas risquer sa vie face à Voldemort. » se dit Harry. « Elle a peur, elle nous raconte qu'elle l'espionne, qu'elle reçoit quantité de sortilèges dangereux pendant son espionnage, … elle ment. Elle nous ment depuis le début. »

La haine aveuglait Harry et l'empêchait de voir la réalité, c'est-à-dire toutes les fois où Gramine lui avait sauvé la vie, sans qu'il ne s'en rende forcément compte.

Le dîner n'était pas terminé. Un brouhaha incessant parcourait les tables des élèves. Chacun cherchait à savoir ce qu'il s'était dit, et peu à peu la nouvelle se répandit. Ron et Hermione se levèrent en même temps avec la même idée en tête. Mais au moment où ils allaient partir, une main se posa sur leurs épaules. Ils se retournèrent et firent face au professeur Dumbledore :

« Laissez-le tranquille. Il faut lui laisser du temps. »

« Mais… » insista Ron. « Vous avez entendu ce que Gramine a dit, professeur ? »

« Oui. Les professeurs et moi-même sommes au courant. Elle nous l'a dit au début de l'année, pour que nous ne soyons pas surpris par ses actes. Elle cachait ce secret depuis longtemps et ne voulait pas que ça se sache. Elle voulait attendre que Harry soit prêt à entendre la vérité. Mais apparemment il ne l'est pas. » continua Dumbledore, une pointe de déception dans la voix.

« Mais nous, nous sommes prêts à savoir. » supplia Hermione.

« Je pense que maintenant que le mal est fait, il le faut bien. Et vous devez tous le savoir, mais demain, pas ce soir. Retournez dans vos dortoirs, je vais voir dehors si elle est encore là.» Dumbledore les contourna et fit un pas.

« Professeur ? » interpella Hermione.

L'intéressé se retourna.

« Est-ce que… Gramine va revenir ? »

« Je ne sais pas. Je n'en ai aucune idée. »

Et tandis que les préfets et les professeurs remettaient un peu d'ordre dans la salle, le directeur sortit dans le parc de Poudlard. Les étoiles brillaient anormalement, comme si elles appelaient à elles un être qui leur appartenait. Dumbledore s'écarta un peu du château, et examina les plus hautes tours, l'endroit où la tigresse se serait à coup sûr réfugié, au plus proche du ciel nocturne. Mais il ne vit rien, n'entendit rien. Il l'appela mentalement, la pria de revenir, mais l'esprit de Gramine semblait s'être fermé à toute connexion.

Un oiseau siffla une mélodie. La lune se cachait derrière un nuage, éclairant tout juste ses bords d'une splendide blancheur.

Dumbledore attendit un peu, puis n'eut d'autres choix que de retourner au château.

Du haut de la plus haute tour – la tour d'astronomie – Gramine observait le parc, assise sur un créneau. Elle avait été profondément blessée, et en vint à se demander ce qu'elle faisait encore là, sur une tour.

Une forme apparut dans son champ de vision. Dumbledore. Il regarda en l'air, elle le regarda, fut tentée de descendre, mais le poids de sa tristesse la bloquait sur la tour. Une larme perla de ses yeux émeraude, glissa sur ses poils, et chuta dans le vide. Le froid la glaça totalement, la recouvrit d'une pellicule de glace, qui durcit. Quand elle toucha le sol, elle rebondit légèrement, comme une bille en forme de larme. La tigresse frotta ses yeux contre sa patte pour les sécher. La vue brouillée, elle regarda à nouveau en bas, et n'y aperçut plus personne. Un frisson lui parcourut le dos. Elle tourna nerveusement la tête, scruta l'ombre derrière elle. Personne non plus. Plus personne pour la retenir, pour l'empêcher de partir.

Elle déploya une fois de plus ses ailes d'énergie, se dressa sur ses pattes arrière, leva la tête à la verticale. Elle se propulsa dans les airs, montant comme une flèche. Elle perça un nuage. Déjà le château était minuscule. Elle détourna la tête, monta encore. En quelques minutes, il n'y eut plus de vent, plus de nuage, plus d'air, plus de ciel, mais une profonde mer noire comme l'encre, scintillante de milliards de petites flammes.

Les étoiles semblaient s'être multipliées par cent, par mille, et pulsaient comme un cœur.

Enfin l'espace retrouvé. Un soupir de soulagement sortit de la bouche de la tigresse. Le calme des étoiles l'apaisait. Elle aimait leurs douces luminosités, leurs chants galactiques, leurs couleurs enchanteresses. Parmi elles se trouvait sa propre planète. Gramine n'y était allée qu'une seule et unique fois. Par endroit, elle aperçut les nébuleuses qu'elle aimait tant, les grosses géantes rouges et les naines blanches, et les trous noirs. Elle se demanda ce qu'il y avait au-delà de ces trous d'aspirateurs. Elle avait toujours exprimé un profond respect envers ces étranges phénomènes, qu'il ne fallait jamais approcher sous peine de … de quoi au fait ? Peut-être la mort, peut-être la vie, comment savoir ?

Au loin, un dragon rouge et flamboyant passa dans l'espace. Gramine avança, s'aidant de ses ailes pour brasser et de ses pattes pour repousser derrière elle la matière spatiale. Chose facile pour un être qui n'existe que par l'amitié qu'on lui porte. Amitié dont elle en a perdu une bonne partie, diminuant ainsi son espérance de vie.

Le dragon passa en se rapprochant un peu, c'était Tiamat, la reine de tous les dragons. Une dragonne à long cou, longue d'une trentaine de mètres. La deuxième créature la plus importante dans la hiérarchie de la galaxie, si toutefois il y a une hiérarchie. Mais quel que soit son rang, elle ne pourrait sûrement pas l'aider.

Gramine se détourna du dragon, et prit la direction d'un puissant amas d'étoiles, attirée par leur lumière dorée.