Titre : Créatures oubliées

Auteur : Epayss

E-Mail : epayss@caramail.com

Avertissement : G – mais ça va pas rester longtemps comme ça –

Note de l'auteur : Les scènes en italiques sont des flash-back de ce qu'il s'est passé entre le chapitre précédent et celui-ci.

                        Promenade interdite

« Laisse-moi tranquille, Ron. » grogna Harry.

« Allez, lève-toi ! Il faut bien que tu viennes en cours. Je te rappelle qu'on est mardi et qu'on a Métamorphose dans 1h ½ ! » insista le rouquin. Dean et Seamus avaient déjà abandonné le défi de sortir Harry de son lit et ils occupaient maintenant la salle de bain, d'où s'échappaient des nuages de vapeur.

« Fous-moi la paix ! » fit Harry en se retournant sur le côté. « Je ne veux pas la voir ! »

« Qui t'a dit qu'elle serait encore là ? » répliqua Ron en élevant la voix. « Tu ne sais pas ce qu'il s'est passé quand tu es parti, hier ? Hé bien elle a quitté la salle. Le professeur Dumbledore a essayé de la retrouver, mais elle n'était plus là ! » Harry ne bougea pas.

Agacé, Ron abandonna la partie et s'habilla. 

Quand les garçons s'apprêtèrent à rejoindre la Grande Salle, Seamus demanda à un rideau tiré :

« Tu ne veux toujours pas venir, Harry ? »

« Non ! »

Devant une réponse aussi brutale, tout le monde s'éclipsa avant que Harry ne se mette à leur jeter des sorts.

« Ca s'arrange pas. » soupira Dean.

« Il a vraiment l'air de lui en vouloir. » continua Neville.

« J'aimerai quand même bien savoir ce que Gramine entend par « tuer Voldemort. » » ajouta Ron. « C'est vrai qu'elle n'arrêtait pas de nous répéter avant que ce n'était pas à elle de réaliser certaines choses, mais de là à laisser une guerre renaître, il y a quelque chose de louche.

A leur arrivée dans la Grande Salle, certains élèves tournèrent la tête dans leur direction et, n'apercevant pas Harry, l'étonnement se fit sur leurs visages. Lui qui d'habitude était toujours en compagnie de Ron manquait à l'appel, les professeurs le remarquèrent aussi. Mais il n'était pas le seul à manquer, autant par sa silhouette imposante que par sa voix bien caractéristique. Gramine n'était toujours pas revenue. La salle était bien silencieuse, et certains professeurs avaient des têtes d'enterrements. Et il y avait de quoi : Gramine partie, l'école avait perdu une partie non négligeable de sa protection, et tous s'attendaient à ce que les attaques de l'Aupengyar se fassent plus nombreuses. Il y avait toujours des chances que Gramine revienne, mais quand ? ( Et à quoi bon s'attacher à l'inespérable ? ^__– )

Les garçons prirent leur déjeuner tranquillement. L'arrivée des hiboux  troubla un peu l'ambiance, mais les nouvelles n'étaient pas assez importantes pour sortir les élèves de leur torpeur.

Après le petit-déjeuner, les Gryffondors de 5ème année se regroupèrent devant leur salle de Métamorphose. Hermione paraissait très énervée :

« Qu'est-ce qu'il y a, 'Mione ? » questionna Ron.

« Il y a que si Harry ne se pointe pas au cours, il va avoir de mes nouvelles ! »

« Tu t'inquiètes de sa scolarisation maintenant ? »

« Non, c'est le fait qu'il ne veuille plus sortir par crainte de voir quelqu'un qui n'est plus là qui me dérange ! »

« Je ne pense pas que ce soit de la crainte, c'est plutôt de la colère. » objecta Ron.

« Colère ou crainte, ce n'est pas le problème. Son problème c'est qu'il a agit comme un imbécile et que maintenant Gramine est partie. D'autant plus qu'elle était à moitié soûle quand elle l'a dit ! »

Le professeur Mac Gonagall arriva d'un pas rapide.

« Entrez, entrez, j'ai pas mal de choses à vous dire. » dit-elle en s'adressant aux élèves.

Les Gryffondors s'assirent à leur table habituelle, laissant un trou au premier rang de la classe, entre Ron et Seamus.

« Mr Potter ne vient pas en cours aujourd'hui ? »

« A priori non. » répondit Dean.

« Tant pis pour lui, on ne va attendre qu'il daigne se rendre compte de sa bêtise. »

« Vous allez nous parler de quoi ? » demanda Lavande Brown.

« Le professeur Dumbledore a demandé à ce que tous les professeurs – et jusqu'à nouvel ordre, j'en fait partie – expliquent aux élèves présents ce qu'il s'est passé hier soir. Je pense que vous avez tous entendus ce que Gramine a dit hier, n'est-ce pas ? »

* hochements de tête*

« Le fait qu'elle ait la puissance nécessaire pour tuer Vous-Savez-Qui, » reprit Mac Gonagall, « nous le savons depuis le début de cette année. Elle nous avait prévenu, au cas où. Elle vous a sûrement dit que ce n'était pas à elle de réaliser cette lourde tâche, même si elle le peut, car elle veut éviter notre mort à tous et la sienne par la même occasion. Je m'explique :

D'après elle, c'est tout à fait par hasard qu'elle est venue sur cette planète. Cela veut dire qu'elle aurait très bien pu ne jamais venir ici, ce n'est donc pas à elle de régler nos problèmes, quel qu'en soit le type. »

« Mais elle ne peut pas faire d'exception ? » s'insurgea Hermione.

« Non, Miss Granger. Elle sait bien qu'à cause de Vous-Savez-Qui, nous sommes tous en danger de mort imminente, mais elle nous a dit qu'elle causerait bien plus de dégâts que Lui si elle Le tuait. C'est une conséquence assez embarrassante, c'est pour cela qu'elle se contente de nous protéger et de nous aider. C'est tout ce qu'elle a dit. Pour plus de détails, il faudrait pouvoir lui demander… »

« Pourquoi n'avait-elle  rien dit à Harry ? » demanda Parvati.

« Elle ne le pensait pas assez « mature » pour comprendre, et elle avait raison. Je vous demanderai de ne pas lui répéter ce qui s'est dit ici. La nouvelle a sans doute été un choc pour lui, il faut lui laisser un peu de temps pour comprendre la bêtise qu'il a faite. Et alors, si Gramine peut encore ressentir ses remords, elle reviendra peut-être. »

« Et si elle ne revient pas ? »

« On ne peut pas s'arrêter de vivre parce qu'elle a juste quitté ce monde, ce serait idiot. Il nous faudra juste redoubler de prudence dans et hors de l'école. Mais ne nous attardons pas sur des suppositions, car il est grand temps de commencer à travailler ! »

Les élèves grommelèrent en sortant leurs affaires.

Le cours passa normalement, c'est-à-dire en compagnie de métamorphoses ratées pour la plupart. Même Hermione ne réussit pas du premier coup, mais c'était essentiellement parce qu'elle était très énervée que Harry ne se soit pas encore montré.

Juste avant d'aller manger, Ron et Hermione retournèrent dans la Salle Commune afin d'intercepter Harry. Mais ils ne le trouvèrent nulle part.

« Où est-ce qu'il est parti encore ? » maugréa Hermione.

« Peut-être aux cuisines, avec les elfes. Comme il est l'heure de manger, c'est ce que j'aurai fait si j'avais été à sa place. » Ron jeta un œil dans la malle de Harry. « Sa cape d'invisibilité n'est plus là non plus. On ne le retrouvera jamais. »

Hermione soupira puis ils quittèrent la chambre.

De tout l'après-midi ils ne virent aucune trace de Harry, et comme absolument personne ne l'avait croisé dans les couloirs, les professeurs commencèrent à s'inquiéter vraiment.

Ce n'est que le soir, après le dîner qu'il fut retrouvé, dans la Salle Commune des Gryffondors, en train de caresser machinalement Hedwige. Les élèves se gardèrent d'aller lui parler, car il ne semblait pas d'humeur à entamer une conversation calme. Mais Hermione l'étant encore moins, elle marcha à grands pas vers lui et se planta en face du canapé sur lequel il était assis. Prise entre deux feux, la chouette s'envola comme si elle avait senti que l'orage allait éclater. Harry leva lentement ses yeux verts sur son amie, une expression coléreuse sur le visage.

« Ca y est ! Tu te montres enfin ! On t'a cherché partout je te signale ! » s'emporta Hermione.

Harry l'ignora.

« Tu crois que tu n'as pas assez fait des tiennes, il faut maintenant que tu manques les cours ? »

Harry lança un regard noir à Hermione. Ron se tenait à côté d'elle. Les conversations qui animaient la salle se firent moins présentes.

« Est-ce que tu as réfléchi au moins une fois à ta réaction d'hier ? » reprit Hermione.

« Oui. » se contenta de dire Harry.

« Et bien tu devrais en avoir honte. Tu ne te rends pas compte du mal que tu as fait à Gramine, tu n'as même pas essayé de comprendre ce qu'elle voulait te dire ! »

« Tu es dans son camp maintenant ? » rétorqua le sorcier avec un regard méprisant.

« Je l'ai toujours été. D'autant plus que si tu étais venu en cours aujourd'hui, les professeurs auraient pu te dire ce que tu voulais savoir. »

« Je ne veux rien savoir. Je ne veux plus la voir, compris ? »

« De toute façon tu ne la verras plus, jamais ! Elle est partie, tu l'as fait fuir. Tu es aveuglé par le fait qu'elle t'ait caché deux trois petites choses parce qu'elle savait que tu n'avais pas besoin de le savoir tout de suite. Tu as pensé au nombre de fois où elle t'a sauvé la vie, ne serait-ce que cette année ? »

Harry ne dit rien. Les paroles d'Hermione, même si elles le blessaient profondément, ne le laissaient pas impassible.

« J'espère que tu vas repenser à ce que je t'ai dit. » ajouta Hermione. « Et ne compte plus m'adresser la parole avant que tu ne t'excuses devant Gramine ! »

Ron approuva Hermione, et ils le laissèrent seul. Harry venait de perdre ses deux meilleurs soutiens. Il allait devoir sortir de ses problèmes seul, sans personne pour le soutenir. Mais qu'avaient-ils tous à être du côté de Gramine ? Harry ne comprenait pas. Il essaya de se souvenir de la soirée d'hier. Il avait réagi sans réfléchir, ses paroles lui avaient paru évidentes, mais maintenant il se rendit compte que Gramine avait tout fait  pour qu'il ne se fâche pas. Ses oreilles baissées, ses grands yeux verts au bord des larmes, sa tête baissée le fixant intensément, elle avait tout fait pour qu'il ne parte pas, pour qu'il reste et l'écoute.

 Et puis il y avait la Bièraubeurre, trop forte pour elle, qui avait baissé la garde de la tigresse et lui avait fait révéler des secrets trop importants. Elle ne savait pas ce qu'elle faisait.

Mais, bon sang, elle pouvait tuer Voldemort ! Elle laissait des centaines de gens mourir, pourquoi donc les élèves la soutenaient ? Il y avait quelque chose qui ne collait pas.

Rageusement, Harry quitta le fauteuil sur lequel il était assis et sortit de la Salle Commune. Un creux se manifesta dans son estomac il n'avait pas mangé depuis midi. Prudemment, il descendit les escaliers, traversa plusieurs couloirs, et arriva dans les cuisines sans encombres. Depuis que Gramine était partie, il y avait bien plus de professeurs qui gardaient les couloirs du château, le retour vers la Salle Commune serait encore moins facile.

Harry fut accueilli joyeusement par les elfes de maison, et ceux-ci lui offrirent spontanément les restes du dîner, comme ils l'avaient déjà fait le matin et le midi. Curieusement, son elfe de maison « préféré » n'était pas là.

« Où est Dobby ? » demanda Harry pour se changer les idées.

« Il est parti en vacances, Monsieur. » répondit poliment un elfe, non sans une pointe de mépris dans la voix.

« Vous n'avez jamais de vacances, vous ? »

« Non, jamais ! » s'énerva l'elfe, comme si on venait de l'insulter. « Un elfe de maison ne doit pas prendre de vacances, un elfe de maison doit servir son maître tous les jours. »

« Mais vous ne voudriez pas être un peu plus libre ? »

« Libre ? Pour quoi faire ? Les elfes de maison n'ont pas besoin de vacances, Dobby est un mauvais elfe de maison, il déshonore notre race. Les sorciers ne voudront plus de nous si nous prenons de la liberté. »

Mac Gonagall observait le parc avec attention depuis une fenêtre. Une ombre se mouvait lentement dans les bois sombres.

Il était 10h du soir. La nuit avait totalement envahi le ciel clair. L'ombre se rapprochait de la lisière de la forêt, prudemment. Puis elle en sortit. Sa forte carrure faisait paraître l'Aupengyar comme une énorme boule de poils. Sauf que ce n'était pas un ours en peluche. L'animal pénétra dans le parc, prenant plus d'assurance à chaque pas. Après plusieurs arrêts, le monstre arriva près des murs du château et disparut du champ de vision du professeur Mac Gonagall. Aussitôt, le professeur fila dans le couloir et descendit le plus vite possible au rez-de-chaussée, ne manquant pas d'alerter quelques professeurs pour tenir tête à l'Aupengyar. Avec l'aide des professeurs Rogue, Flitwick et Chourave, ils se dispersèrent dans le Hall d'entrée, et sortirent leur baguette, prêt à affronter à tout moment l'énorme animal. Quelques minutes plus tard, ils entendirent des pas feutrés dans l'herbe gelée. Les pas s'éloignèrent, puis revinrent à grande vitesse. Un grattement s'ensuivit le long d'un mur, vertical. Une énorme masse apparut presque immédiatement devant une haute fenêtre, en cassa le verre, et effectua un grand saut pour se retrouver sur le sol du grand Hall. Mais même si l'Aupengyar arrivait sans peine à « sentir » Gramine, les sorciers avaient une présence bien moins forte, donc moins facile à détecter et son erreur fit qu'il se retrouva entouré de quatre sorciers, qui tenaient leur baguette pointée sur lui. L'animal s'immobilisa, regarda un instant autour de lui, et s'assit. Les professeurs, décontenancés, se regardèrent, et hésitèrent trop longtemps à jeter un sort. L'Aupengyar se replia sur lui-même un peu, et dans une formidable détente, sauta par-dessus le cercle de professeurs, et atterrit sur l'escalier principal. Tandis qu'il gravissait les marches, il entendit prononcer derrière lui un « Stupéfix ! ». Le sort fondit sur lui, il sentit un brusque engourdissement le saisir, et il trébucha sur une marche, s'effondrant de tout son long. Mais le sort lancé n'avait pas assez de puissance, et l'animal se redressa en titubant un peu. Un autre sort lui frôla l'épaule, mais ne le toucha pas. L'Aupengyar arriva en haut de l'escalier et se précipita dans le premier couloir. Il entendait des pas qui le coursaient. Il accéléra, mais une fulgurante lumière pourpre l'aveugla et stoppa momentanément sa course.

Avant de pouvoir retrouver la vue, l'animal sentit les effets du sortilège bloquer ses membres, comme si la paralysie le prenait d'un coup. Un impedimenta. Le sort avait été lancé par le professeur d'astronomie Sinistra elle se tenait devant lui, un air satisfait sur le visage. Les autres professeurs encerclèrent le monstre. Il était prisonnier. Le couloir était étroit, mais sur le côté il y avait une fenêtre. L'unique issue indispensable à sa survie. L'Aupengyar banda comme il le put ses muscles, et dans un dernier et puissant effort, il obligea ses pattes à lui obéir, et il sauta encore une fois à travers la fenêtre. Le saut avait été maladroit, et il avait bien failli se prendre le mur à la place, mais la peur d'être pris avait fait le reste du boulot, et il était maintenant à l'air libre. La chute ne dura pas longtemps, mais cette fois, c'est son flanc droit qui encaissa le choc. Le sort d'entrave se relâcha un peu. L'animal fit quelques pas et contourna une tour, se mettant ainsi hors de portée des sorciers. Il patienta quelques minutes que le sortilège s'annule totalement. Il avait du mal à respirer, des côtes avaient dû se casser et compresser ses poumons. A part ça, les dégâts avaient été minimes. Après s'être assuré qu'il n'y avait personne dans les parages, l'Aupengyar sortit de l'ombre et revint vers la forêt le plus rapidement possible, malgré ses côtes qui le faisaient souffrir.

Harry se réveilla vers 6h du matin. Une heure raisonnable. Au moins il n'aurait pas à attendre trop longtemps les loirs qu'il avait pour camarades de classe. Il profita de son temps libre pour travailler, car Ron lui avait laissé ses cours de la veille sur sa table de chevet. Après s'être habillé, le sorcier descendit dans la Salle Commune et entreprit de recopier les cours. Cela lui prit une bonne heure, à gratter sur des feuilles de parchemins sans toujours comprendre ce qu'il écrivait. Surtout qu'en même temps, d'autres pensées occupaient son esprit : Hé oui, toujours le problème avec Gramine.

Tandis que la grisaille du matin envahissait la pièce, les élèves descendirent petit à petit, endormis et traînants les pieds.

Harry remonta alors dans sa chambre, prépara son sac, et se planta devant le miroir de la salle de bain  pour tenter une ultime fois de coiffer ses cheveux récalcitrants. Pendant qu'il s'efforçait de les aplatir, son reflet croisa les bras avec un sourire narquois sur le visage, histoire de décourager un peu plus Harry. Finalement, il abandonna le combat et retourna dans le dortoir.

« Tu viens manger avec nous, Harry ? » risqua Ron.

L'intéressé fut étonné que le rouquin lui adresse la parole – après tout c'est son meilleur ami- mais il accepta quand même.

Ron fut soulagé de voir que Harry avait un peu décoléré, même si on pouvait voir sur son visage qu'il était toujours d'une humeur massacrante. Les garçons descendirent dans la Grande Salle, Harry quelques mètres derrière eux. Il n'avait pas envie de retrouver cette salle, que ce soit pour se retrouver en face de Gramine ou en face d'une place vide. Il ne lui avait toujours pas pardonné, bien que sa rancune se soit nettement amoindrie. Il était en pleine réflexion, tentait de relier les différents éléments entre eux, de trouver ceux qui manquaient, pour comprendre la tigresse. Il ne voulait demander à personne de lui expliquer, il voulait se débrouiller seul. Mais évidemment, sa réflexion aboutissait toujours à la même question : Pourquoi Gramine ne veut-elle pas tuer Voldemort ? ( là est la problématique !)

Il était encore dans ses pensées quand il commença à manger. Personne ne le dérangeait, de toute façon il n'avait pas envie de parler.

Au bout de quelques minutes, il ne manqua pas de remarquer que la Grande Salle était étrangement calme. Celle qui mettait un peu d'animation dès le matin étant partie, les élèves redevenaient taciturnes et se contentaient de regarder leur assiette – contrairement à avant quand ils regardaient les efforts de Gramine pour égayer l'assemblée, avec ses blagues pas drôles ou ses pitreries d'acrobates –.

Harry soupira. Elle était bel et bien partie. Elle avait quitté la planète. Et ne reviendrait peut-être plus. Harry sentit le vide s'accroître dans son cœur. Il ne voulait pas l'admettre, mais Gramine lui manquait. Même si sa raison lui disait de ne pas pardonner si facilement à un être traître, une autre partie de lui-même réclamait un peu de chaleur.

Harry secoua la tête et prit sa tête entre ses mains. Pourquoi elle lui manquait tellement ? Cela faisait à peine deux jours qu'elle avait fuie…

Cette fois, Harry suivit les cours de la journée, même si suivre était un bien grand mot : il se contentait de prendre des notes et d'effectuer distraitement les divers travaux pratiques.

Juste avant le cours de Soins aux Créatures Magiques, alors qu'il marchait vers la cabane de Hagrid dans le froid mordant, il fut abordé par Malefoy et compagnie.

« Toujours pas revenue ? Que c'est triste… » ironisa le blond.

Harry lui jeta un regard indifférent et tenta de contourner la bande des Serpentards qui lui barrait la route. Il était seul Ron était resté un peu plus longtemps dans la Grande Salle avec les autres.

« Comment va faire le gnome Potter sans son garde du corps ? »

« Gnome ? Je suis aussi grand que toi, Malefoy. »

Malefoy, surpris par la tranquillité de Harry, se redressa pour paraître un peu plus grand.

« En plus, » reprit Harry avec lassitude, « tu m'as déjà tenu ce discours sur le Chemin de Traverse, tu pourrais te renouveler de temps en temps… »

Décontenancé, Drago ferma les poings, réfléchissant à toute vitesse à une réplique cinglante. Mais apparemment, il n'en trouva pas et partit avec ses lèches-bottes, laissant le Gryffondor seul. Celui-ci se frictionna les mains et les bras et se dirigea en grelottant vers Hagrid qui venait de sortir de sa cabane.

« Tu vas bien, Harry ? » s'inquiéta le demi-géant.

Le sorcier toussa un peu.

« Il fait très froid, on peut pas faire cours ici. » répondit Harry.

« On va aller dans une salle et faire du cours théorique, c'est tout ce qu'on peut faire par ce temps. »

Une bourrasque de vent se leva, faisant mugir la Forêt Interdite. Le lac avait tous ses bords gelés sur deux mètres de large. Toute la prairie était blanche de givre et l'herbe craquait sous le pied comme des branches mortes. Tout semblait figé.

A part ça, les cours se passèrent normalement.

A chaque heure qui passait, Harry se sentait plus seul, plus coupable, plus triste, et moins en colère. Quand le soir vint, sa rancune était presque entièrement passé, il ne désirait plus que s'excuser, et écouter son amie. Mais pour cela, il fallait qu'elle soit là. Combien de temps pourrait-il tenir en la sachant aussi loin de lui sans faire de bêtises ?

Le dernier jour de la semaine arriva comme les autres jours, et toujours sans Gramine. Harry était complètement déprimé, d'autant plus que sa cicatrice reprenait son picotement incessant et inexpliqué.

Alors que le sorcier descendait dans la Grande Salle pour prendre son petit-déjeuner, il rencontra Cho dans un couloir.

« Salut ! » lui adressa-t-elle en souriant.

Harry eut un sourire forcé en l'apercevant.

« Ca va pas ? » demanda-t-elle gentiment.

Harry soupira. « Elle me manque terriblement. » expliqua-t-il.

« Oh, excuse-moi. Je pensais que tu l'aurais un peu oubliée depuis le temps. Elle ne reviendra pas, Harry. Il faut l'accepter. »

« Jamais je ne pourrai l'oublier. Tu ne sais pas ce qu'elle était pour moi. »

Un nœud se forma dans sa gorge. Cho s'approcha de lui et lui prit la main.

« Allez, viens. Après tout elle reviendra peut-être pour le Bal de Noël. Comme la dernière fois avec Halloween. Tu te souviens toujours que je suis ta cavalière pour le Bal, n'est-ce pas ? »

« Oui, bien sûr. » répondit Harry en souriant. « Ne t'inquiètes pas, il y a des choses qui ne s'oublient pas. »

Cho et lui était très proches. Ils se regardèrent dans les yeux. Cho semblait fascinée par ceux de Harry. Si verts… Elle se mordit imperceptiblement la lèvre inférieure, et se mit aussitôt à rougir. Quand elle s'en rendit compte, elle s'écarta vivement de Harry, qui la regardait étrangement. Et elle partit à grands pas après avoir adressé un « à plus tard ! » au sorcier.

Harry prit sa cape d'invisibilité et la revêtit au-dessus de deux pulls et de sa cape d'hiver. Près à combattre le froid de dehors, il adressa un dernier regard à la chambre endormie et se dirigea vers la Salle Commune. Il avait envie de faire un petit tour dehors, dans le parc. L'atmosphère de la semaine pesait lourd sur ses épaules, et il s'était dit qu'une ballade nocturne lui ferait le plus grand bien.

Il quitta la tour de Gryffondor. Il faisait nuit noire dehors. Harry avait attendu le milieu de la nuit dans son lit avant de se lever. Il était maintenant libre de faire ce qu'il désirait, et il pensait qu'un tour dans le parc serait une bonne idée. Il était bien conscient du danger que cela représentait pour lui, mais pour une fois… Et puis il avait sa cape d'invisibilité et sa baguette magique, alors…

Harry descendit l'escalier principal du Hall d'entrée. La porte était fermée, comme d'habitude. Le sorcier se faufila dans un couloir situé au rez-de-chaussée, dénicha une fenêtre, l'ouvrit et se retrouva à l'air libre, et glacé.

Malgré le froid, les épaisseurs de vêtements protégeaient bien Harry, et il en vint même à avoir trop chaud. Il s'enfonça dans le parc, arriva près du bord gelé du lac, et s'assit sur les galets, à l'abri d'éventuels regards en provenance du château. Au-dessus de lui, les étoiles scintillaient comme de multiples diamants.

Harry enleva sa cape et la tint sur ses genoux. Il avait vraiment trop chaud là-dessous. Le lac était très calme, le vent ridait à peine sa surface. Harry prit un galet et le lança sur la glace. La pierre roula quelques secondes, puis plongea dans l'eau noire dans un léger « plouf ! ».

Le sorcier resta assis plusieurs minutes face au lac, sans bouger, triturant sa cape d'invisibilité entre ses doigts. A sa droite, la Forêt Interdite s'était tue, elle qui semblait constamment animée d'une vie propre. Pas un oiseau ne chantait – remarque à cette heure de la nuit c'est normal -.

Derrière lui, des pas crissèrent sur l'herbe gelée. Même s'ils semblaient très lointains, le silence pesant les rendait bien plus proche qu'ils n'étaient en réalité. Un souffle rauque se fit entendre. Harry se retourna brusquement. Une fraction de secondes il avait cru que Gramine était revenue, mais ses yeux lui firent voir autre chose : une vingtaine d'Aupengyars se dressaient, terrifiants et imposants, tout autour de lui. Ils l'encerclaient, derrière il y avait le lac, et devant une barrière de monstres qui refermaient inexorablement le cercle à chaque secondes qui passaient.

Harry ne pouvait plus bouger. Il était paralysé par la peur. Cette fois il ne serait pas sauvé. Il se leva quand même, prêt à combattre, sa baguette magique dans une main tremblante. Il vit sa cape d'invisibilité glisser le long de la rive, emportée par un sortilège de lévitation.

« Ils arrivent… »

Soudain, un éclair de lumière blanche surgit du ciel, et vint se fracasser contre le sol, quelques mètres devant Harry. Une poussière de glace s'éleva face au choc et retomba sur les Aupengyars. Au centre de ce nuage de glace se tenait un monstre de métal. Il poussa un rugissement terrifiant, ce qui fit stopper la troupe de créatures. Celui qui semblait en être le chef souffla bruyamment une fumée blanche par ses naseaux. Les cristaux de glace finirent par retomber totalement. Harry pouvait entendre le crissement des plaques de métal il pouvait voir les splendides pics qui s'élevaient bien droits sur l'échine de l'animal. Ils réfléchissaient parfaitement la lumière des étoiles.

« Gramine… » murmura Harry.

La queue de la tigresse battait violemment l'air elle n'adressa pas un regard au sorcier. Le chef des Aupengyars s'avança, suivit immédiatement par ses congénères. La tigresse courba la tête en avant, et enfonça ses griffes dans le sol.

Harry vit ses muscles se contracter, tant sa concentration devait être intense. De minuscules éclairs de lumière bleue parcoururent son armure, effet de l'immense quantité d'énergie qui était en train d'être générée.

Au bout de quelques secondes, elle releva la tête. Un Aupengyar sauta sur elle. Mais il n'eut pas même le temps de la toucher qu'il fut repoussé par un puissant champ d'énergie bleu formant un dôme autour d'elle dont la cime ne dépassait pas le haut des pics de l'armure. Le dôme s'agrandit encore et engloba Harry sans le repousser.

Aussitôt qu'il eut passé la barrière d'énergie, les sons s'atténuèrent, comme s'il était soudainement devenu sourd.

Les Aupengyars, effrayés, s'arrêtèrent encore une fois. Ils se regardèrent, conscient de la puissance qui s'était déployée devant leurs yeux. Leur compagnon qui avait testé cette barrière avait été sonné pendant une bonne dizaine de secondes.

Pendant ce temps-là, la barrière avait disparue. Gramine la réabsorba en elle et la concentra dans une de ses pattes avant. Puis elle referma sa patte en un poing et la plongea dans le sol avec un maximum de puissance. Un grondement orageux mêlé à celui d'un tremblement de terre prévint la catastrophe qui allait venir.

Autour du poing une fontaine d'énergie surgit, de plus en plus importante au fur et à mesure que Gramine se vidait de sa force vitale. Puis brusquement, la mare d'énergie se fit océan de vagues, et elle déferla sur tout le parc, épargnant seulement un cercle englobant Gramine et Harry. L'épouvante prit les Aupengyars, et ils s'enfuirent sans demander leur reste. Certains furent rattrapés par la vague qui se propageait, et ils furent emportés avec elle jusqu'au mur d'enceinte du château. L'océan se fracassa contre ce mur et ceux du château dans un bruit de bourrasque qui aurait pu réveiller tous ses habitants.

Quand il ne resta plus un seul Aupengyar dans les environs, la mer déchaînée se calma et rentra dans le sol. L'herbe scintilla encore quelques instants, délivrée de sa gangue de glace, puis elle retrouva son vert hivernal.

Le silence revint comme s'il ne s'était rien passé. Le château ne s'était pas réveillé, la forêt non plus. La glace qui s'était accumulée sur les bords du lac s'était brisée, formant de multiples îlots qui commençaient déjà à se détacher du bord.

L'armure de Gramine disparut. La tigresse fit quelques pas en avant, titubante, faisant attention à ne pas tomber d'évanouissement. Elle était très fatiguée. Ses os ressortaient plus que jamais sur sa fourrure blanche et noire.

« On dirait qu'elle n'a pas mangé depuis plusieurs jours. » pensa Harry.

Gramine continua de marcher, s'éloignant toujours de Harry, comme s'il n'existait plus.

« Gramine… Reste… » murmura le sorcier.

La tigresse ne s'arrêta pas. Elle avait parfaitement entendu, mais attendait les excuses. Elle voulait entendre une raison, une seule bonne raison de revenir à Harry.

« Reviens… » supplia Harry.

« Pourquoi reviendrai-je, tu ne veux plus de moi. » fit-elle d'un ton cassant en cessant sa marche. Elle ne se retourna toutefois pas.

« J'ai besoin de toi… »

« Tu n'as pas voulu me comprendre. »

« Pardonne-moi, Gramine. »

« Pourquoi te pardonnerai-je? »

« … »

Le cœur de Harry se serra. Il savait ce qu'il fallait dire, ce qu'il voulait dire, mais les mots n'arrivait pas à dépasser ses lèvres. Il avait peur de le dire.

« Pourquoi ? » répéta-t-elle plus fort.

« Parce que… je t'aime… » avoua-t-il. Il baissa la tête. Après ça, si elle ne revenait pas, il ne pourrait plus rien faire.

Gramine se retourna. Elle regarda avec des yeux verts embués de larmes le sorcier qui venait de lui offrir son amitié. Elle resta comme ça plusieurs secondes Harry croisait les doigts dans son dos et la suppliait mentalement de revenir, de ne pas le laisser encore une fois.

Finalement, la tigresse fit un pas… dans sa direction. Malgré la fatigue qui la terrassait et l'affaiblissait à chaque foulée, elle continua à avancer vers le sorcier. Harry s'accroupit pour l'accueillir. Elle se précipita dans ses bras, enfouissant son énorme tête contre son ventre. Harry tomba en arrière quand Gramine l'atteignit. Il caressait chaleureusement la tigresse quand il sentit tout son poids s'affaisser sur le sol. Elle venait de s'évanouir, la fatigue ayant eu raison d'elle.

« Je suis prêt à t'écouter… » murmura Harry.

Harry caressa encore quelques instants Gramine quand il se rendit compte qu'elle avait réellement besoin de soins d'urgence, d'autant plus que le parc n'était pas le lieu idéal pour passer la nuit. Il détacha sa cape et en recouvrit la tigresse. Le froid le surprit et pénétra ses vêtements, le faisant frissonner. A l'aide d'un sortilège de lévitation, il ramena Gramine au château et s'arrêta devant l'infirmerie.

Il frappa à la porte et attendit. Rien ne se passa. Il frappa plus fort. Une minute passa. Finalement, de la lumière apparut sous la porte, et Mme Pomfresh ouvrit la porte. Elle paraissait de mauvaise humeur ( c'est normal quand on se fait réveiller en plein milieu de la nuit) et portait une robe de chambre bien chaude en raison de la fraîcheur du couloir.

« Qu'est-ce que vous faîtes debout à cette heure de la nuit Mr Potter ? » demanda-t-elle d'une voix endormie.

« Ce n'est pas pour moi, madame, c'est pour Gramine. » Et le sorcier se poussa sur le côté pour que l'infirmière puisse voir la tigresse en lévitation.

« Gramine ? Mais que fait-elle ici ? »

« Heu… »

« Bon, assez discuter, installez la sur un lit, je vais prévenir le professeur Mac Gonagall. »

Et l'infirmière quitta la pièce rapidement.

« Oh, non. » pensa Harry. « Je vais me faire passer un savon. »

Il installa Gramine sur un lit, prit une chaise et s'assit à côté d'elle en attendant l'arrivée de Mac Gonagall. Gramine dormait paisiblement. Harry se rendit compte combien il était heureux de la trouver là, à nouveau à ses côtés. Il se demanda ce qu'elle avait fait pendant tout ce temps. En tout cas, elle n'avait pas l'air d'avoir pris de vacances. Elle semblait avoir rapetissé tant elle avait maigri.

Des pas retentirent dans le couloir. Harry se leva brusquement, en proie à la panique. Les deux sorcières entrèrent dans l'infirmerie. Mac Gonagall se posta devant Harry, les mains sur les hanches, tandis que Mme Pomfresh allait s'occuper de Gramine.

« Mr Potter ! » s'emporta le professeur de Métamorphose, « qu'est-ce que vous faites dans les couloirs à cette heure de la nuit ? »

« Heu… » Il hésitait à révéler toute la vérité, mais il savait que la peine serait plus lourde si elle parvenait à découvrir ce qu'il s'était réellement passé. « J'avais envie de prendre l'air… » commença Harry sur le ton le plus innocent possible.

« Je suis sorti dans le parc et je me suis fait attaquer par une vingtaine d'Aupengyars. A ce moment-là, Gramine est arrivée et les a repoussés aux limites de Poudlard. Voilà, c'est à peu près ce qu'il s'est passé. Mais le principal, c'est qu'elle soit revenue ! » termina Harry en souriant légèrement.

Mac Gonagall ne semblait pas de cet avis.

« Vous oubliez peut-être que vous avez failli mourir ou vous faire enlever. » dit-elle calmement. « Vous oubliez aussi que vous avez violé plusieurs règles de Poudlard, et que par conséquent, vous allez être sérieusement puni. »

Harry baissa la tête. Le professeur se mit en colère :

« Mais vous vous rendez compte de ce que vous avez fait ? Toute l'école se met en quatre pour vous protéger, et monsieur va faire des petites promenades dans le parc au beau milieu de la nuit ! Vous êtes complètement irresponsable, ma parole ! Qui plus est, vous saviez très bien qu'il y avait au moins un Aupengyar qui rôdait autour du château depuis plusieurs mois déjà ! »

Harry regarda ses pieds avec un intérêt tout particulier. Mac Gonagall continua son monologue sans fin, jusqu'à ce qu'elle n'ait plus rien à dire. Elle finit juste par :

« Et en plus, vous avez vu dans quel état elle s'est mis pour vous sauver la vie ? » Elle regardait Gramine en disant cela.

« Elle était déjà comme ça avant, professeur. » répondit Harry. « Alors, c'est quoi mes sanctions ? » soupira-t-il avec un air ennuyé.

« Hé bien, je suppose que ce sera 60 points en moins pour Gryffondor, et une retenue. Voyons… Demain, c'est la première sortie à Pré-au-Lard… -Harry afficha une mine déconfite- vous avez l'interdiction d'y aller. »

« Mais professeur, il n'y en aura que trois cette année ! »

« Ne discutez pas ! De toute façon, je doute que je vous aurait laissé y aller, vous y êtes bien trop exposé, et si le nombre d'Aupengyars a augmenté, c'est qu'ils n'ont plus l'intention de faire dans le dentelle. »

Une voix faible et rauque s'éleva en réponse à ces paroles :

« Ils ne reviendront plus… » murmura Gramine.

Tous les yeux se tournèrent vers elle.

« C'était leur dernière attaque, ils me l'ont dit. Ils ont dit que s'ils échouaient encore une fois, ils partiraient… »

« Sont-ils de paroles ? »

« Ils n'ont jamais trahi personne. Je leur fais confiance. Ils seront partis dès demain. »

Harry leva des yeux pleins d'espoir vers son professeur.

« Non, c'est non. Vous n'irez pas à la sortie. » acheva-t-elle implacablement. « Et maintenant, retournez vous coucher ! »

Harry fit mine d'ignorer l'ordre et demanda à Mme Pomfresh :

« Elle va s'en sortir ? »

« Oui, elle est juste profondément fatigué, elle doit recouvrer ses forces. Je vais lui donner une Potion de Sommeil. Vous pouvez dormir sans crainte. »

Décidément, ils voulaient tous le renvoyer dans son lit ! Harry s'y résigna et après avoir récupéré sa cape d'hiver, il sortit de l'infirmerie et regagna son dortoir, accompagné tout le long du chemin du professeur Mac Gonagall – on ne sait jamais, s'il retournait dehors-.

Harry n'arrivait pas à trouver le sommeil. Ce n'était pas qu'il soit perturbé par les évènements, mais l'envie de savoir ce qu'avait fait Gramine pendant la semaine le tenaillait. Il se leva de son lit et se dirigea vers la fenêtre d'où émanait une douce lueur.

La lune était levée et éclairait les environs d'une blanche lumière. Mais elle n'était pas la seule éclairer l'espace. Quelques nuages s'étaient amoncelés en divers endroits du ciel, et une fine neige en tombait, légère et douce comme une plume. Le sol glacé l'accueillait sans la faire fondre, et déjà les feuilles du Saule Cogneur semblaient recouvertes d'un voile d'une blancheur étincelante.

Harry regarda le réveil : 3h1/2.

Il regarda encore par la fenêtre, pour passer le temps. Il vit une ombre se faufiler entre les arbres. Elle lui fit penser à Sirius. Pas de nouvelles depuis près de 4 mois.

4 mois… C'était beaucoup trop. Il avait dû se passer quelque chose. Mais Harry ne pouvait absolument rien faire, il n'avait aucune idée de l'endroit où pouvait se trouver son parrain. Il pensa à lui envoyer une lettre. Mais si Sirius était emprisonné, la lettre serait interceptée. C'était trop dangereux.

Harry ouvrit la fenêtre. Il tendit la main à l'extérieur et recueillit quelques flocons de neige dans sa paume qui fondirent aussitôt. Ca chatouillait. Il se surprit à rire doucement, mais de peur de réveiller ses camarades de classe, il cessa de rire et referma la fenêtre. Il étira ses muscles et s'allongea sur son lit. Le sommeil le prit quelques minutes plus tard.

Au début de l'après-midi qui suivit, Harry se retrouva, seul, dans un couloir du deuxième étage, près d'une statue de sorcière bossue et borgne. La plupart des élèves autorisés étaient partis à Pré-au-Lard il y a quelques minutes. Et Harry n'avait pas l'intention de manquer cette sortie, malgré l'interdiction de son professeur. Heureusement, il n'y avait personne dans le couloir, d'autant plus que le sorcier n'avait plus sa carte des Maraudeurs. Il regarda à droite, à gauche, puis se faufila dans le passage secret. Il descendit le toboggan et se retrouva en bas sans encombres. Il murmura un « Lumos » et le long tunnel fut éclairé. Aussitôt, un courant d'air glacé fit frissonner le sorcier.

Bizarre… Il n'y avait habituellement pas de vent dans ce souterrain. Par précaution, Harry revêtit sa cape d'invisibilité qu'il avait emportée avec lui. Il marcha quelques minutes. L'air devenait de plus en plus froid à mesure qu'il avançait.

Au bout d'un moment, il se retrouva face à un mur de racines entrelacées. Au-dessus de lui, un énorme trou d'environ deux mètres de diamètre s'ouvrait sur l'extérieur. Intrigué, Harry s'avança un peu au travers des racines. Mais il dut s'arrêter bien vite car il se trouva confronté à la base d'un énorme tronc couché. Apparemment, un arbre qui poussait au-dessus du tunnel était tombé sur ce dernier, avait tout fait s'effondrer et bloquait à présent l'accès à Pré-au-Lard. Harry pesta et frappa l'arbre du pied ( comportement uniquement masochiste ).

Par curiosité, et parce qu'il n'avait rien à faire d'autre, Harry se hissa à l'extérieur en s'aidant des racines comme appui. Il se retrouva à l'intérieur de la Forêt Interdite, et il pouvait voir au loin le mur d'enceinte de Poudlard. Vu d'en haut, l'arbre donnait l'impression d'être tombé directement dans sa propre tombe, car seul son feuillage l'empêchait de s'étaler de tout son long dans le tunnel.

Contrarié, Harry retourna dans le tunnel et rebroussa chemin, n'ayant pas dépassé le mur d'enceinte.

Gramine se réveilla à la fin de l'après-midi. Elle était entourée d'un paravent pour empêcher tous les curieux de venir la voir sans raison, comme disait Mme Pomfresh. Evidemment, Harry était passé plusieurs fois au cours de la journée, ainsi que Ron et Hermione, et plein d'autres Gryffondors, Serdaigles et Poufsouffles. Alors maintenant, tout le monde devait savoir qu'elle était revenue. L'infirmière lui rapporta que même quelques professeurs étaient venus s'enquérir de sa santé.

La dragonne s'approcha d'elle. Des reflets pourpres et carmins se mouvaient sur sa peau écailleuse.

« Bonjour ! »

« Bonjour Tiamat » répondit Gramine en baissant la tête.

Jusqu'à la fin de la journée, Pomfresh s'occupa d'elle, lui apportant quantité de nourritures en tout genre, de quoi lui faire rapidement retrouver ses forces. Mais il faudrait plusieurs nuits passées à la belle étoile pour que sa réserve magique soit à nouveau pleine.

Dans la soirée, Harry passa une dernière fois. Au son de sa voix, Gramine tenta de se lever, mais l'infirmière lui fit signe de se tenir tranquille. Pomfresh alla voir Harry et lui répéta d'un air exaspéré que Gramine ne recevait toujours pas de visites ( ça devait faire la vingtième fois qu'elle le disait aux élèves ), mais Harry opposa de la résistance :

« Mais on m'a dit qu'elle était réveillée ! »

« Elle s'est rendormie. » répondit l'infirmière un peu hâtivement.

Harry la regarda suspicieusement, et sut qu'elle mentait.

« Je pourrai la voir quand ? »

« Demain matin, Mr Potter. Vous pourrez lui parler demain matin. »

« D'accord. » Et Harry partit.

Gramine fit connaître son désaccord avec l'infirmière par un long soupir.

« Pourquoi ne voulez-vous pas que je vois mes amis ? »

« Vous n'êtes pas en état, c'est évident. »

« Pas en état ? Vous ne me connaissez pas suffisamment pour dire ça. Un humain ne serait pas en état, certes, mais moi vous ne savez absolument pas comment je me régénère. Chaque membre de notre espèce se régénère plus ou moins vite, selon ses propres méthodes et sa propre puissance. Il n'y a que moi qui puis savoir dans quel état je me trouve. »

« Et dans quel état vous trouvez-vous ? » demanda Pomfresh.

« Trop fatiguée. » avoua-t-elle. Et elle se rendormit, la tête profondément enfoncée dans l'oreiller.

« Tu ne vas pas bien ? » interrogea Tiamat.

« Je ne veux plus retourner sur cette planète. Je ne peux plus continuer ma mission. » répondit amèrement Gramine.

« Pourquoi ? » continua la dragonne en prenant une voix douce afin d'apaiser la tigresse.

Gramine raconta ce qu'il s'était passé, quand les larmes lui revinrent aux yeux.

Le lendemain matin, Harry se réveilla en sursaut. Il se redressa brusquement sur son lit. Sa cicatrice le lançait. Il avait fait un rêve, dont il se rappelait très bien. Le chef des Aupengyars était revenu auprès de Voldemort. En quelques mots il avait expliqué qu'il arrêtait la mission. Il a subi le sortilège Doloris juste après. Puis il est parti, a rejoint son groupe, et ils ont quitté le pays.

Le sorcier mit ses lunettes, et se leva, s'en prendre la peine de regarder le réveil. De toute façon il faisait nuit noire. Il s'habilla et sortit se promener dans le couloir. Il avait la vague, mais très vague intention d'aller à l'infirmerie, juste pour avoir la joie unique de découvrir une porte fermée. Mais quand il arriva devant la pièce, il entendit une voix rauque parler. Une très faible lueur se voyait sous la porte la voix appartenant à Gramine semblait se parler à elle-même. Harry colla son oreille à la porte. La tigresse parlait doucement mais elle articulait suffisamment pour qu'il puisse comprendre ce qu'elle disait.

« Voyons, si je fais ça, qu'est-ce que ça donne ? »

Quelques secondes passèrent. Un petit sifflement perça le silence.

« Rejeté ? Ca ne doit pas être le bon geste. Pourtant la formule a l'air exact. ( bruit d'une page qui tourne). Ah ! Ca doit être ça. Ca va peut-être marcher maintenant. »

Gramine prononça une incantation incompréhensible, attendit un peu, puis soudain, Harry vit la lueur sous la porte augmenter fortement d'un coup, puis revenir à son état initial tout aussi rapidement. Gramine poussa un long soupir.

« Ouf, ça y est ! Je me demande si ça me servira un jour ce que je lui ai fait, mais bon. Ils disent dans ce bouquin qu'elle sera nettement plus sauvage et caractérielle. Tant que le sort marche, c'est le principal. »

Harry se demanda de quoi donc pouvait-elle parler. Il frappa la porte. Il entendit les draps bouger, le matelas grincer légèrement, puis l'approbation de Gramine. Il entra prudemment avec l'air de celui qui vient tout juste d'arriver.

« Pourquoi es-tu sûr qu'il ne te pardonnera pas ? » continua Tiamat.

« Je ne sais pas. »

« Salut Gramine, tu es déjà réveillée ? » demanda Harry.

« Oui, comme toi. J'ai dormi presque toute la journée hier. Mais qu'est-ce que tu fais ici, tu n'as pas le droit d'être dans les couloirs à cette heure. »

« Je voulais te parler. »

« Je vois. » fit Gramine en baissant un peu les yeux. « Que veux-tu savoir ? »

« Pourquoi ne peux-tu pas tuer Voldemort ? »

« Il est sûrement déjà en train de le regretter à l'heure qu'il est. » affirma la dragonne rouge.

« Vous croyez ? »

« Bien sûr que oui. Tu devrais y retourner, et t'expliquer. Il s'excusera. Il a besoin de toi, mais peut-être ne le sait-il pas encore. »

« Assieds-toi sur le lit, ça risque d'être assez long. » commença Gramine. « Imagine que je ne sois jamais venue ici, que le hasard ait fait que personne ne m'ait prévenu qu'il se passait quelque chose sur cette planète, je n'aurais jamais pu tuer Voldemort. Ce n'est donc pas à moi de le tuer.

« Mais puisque tu es là… » murmura Harry.

« Même si je suis là, je n'ai pas le droit de détruire la source actuelle de souffrance de ce monde. Car si je le faisais, je tomberai dans la folie, j'en viendrai à tout détruire, à te tuer, à réduire Poudlard à néant. C'est sûrement ce qu'il se passerait, car dans l'histoire de ce monde, je suis un élément qui n'existe pas. C'est un fait, que je ne puis expliquer. Je peux aller et venir sur cette planète où bon me semble, distordre le temps quand je ne suis pas là, mais je ne suis pas censée changer le destin. Je t'aide, et si je n'étais pas là, ce serait quelqu'un d'autre qui t'aiderait.

Ecoute, ma mère m'a transmise une partie de ses connaissances alors que j'étais encore dans son ventre. Mais il y a une chose qu'elle tenait vraiment à me montrer en pensée, c'est un événement que tout le monde connaît, et qui s'est passé il y a bien longtemps, aux premiers âges de notre espèce. C'est l'histoire d'un tigre comme moi qui est allé sur une planète très petite, où la population vivait sous terre, et creusait des tunnels qui se rapprochaient dangereusement du centre de la planète. Une mission lui avait été confiée, celle d'accompagner un groupe de personne qui partait en exploration dans le monde extérieur, à la surface de la planète. Ils ont été confrontés à une personne responsable d'un complot, terriblement puissante et dangereuse. Le tigre l'a tuée. Ce faisant, il a réalisé le destin d'autres personnes. Il n'avait pas le droit. Cela a été son unique erreur. Car il est devenu fou, a plongé au plus profond des tunnels, a creusé jusqu'au centre de la planète, et l'a fait imploser en se déchargeant de toute la puissance qu'il avait accumulé pendant sa vie. »

Le regard confiant de Tiamat fit ravaler sa colère à la tigresse. Elle acquiesça lentement, regarda avec tristesse la planète qu'elle venait de quitter, et s'apprêta à y retourner. Tiamat sourit, déploya ses ailes et partit. Gramine eut à peine le temps de la remercier avant qu'elle ne disparaisse dans l'espace. Sur la planète, l'Angleterre allait bientôt s'illuminer des rayons du soleil. Une nuit était passée.

Gramine fit une pause. Harry était captivé par son récit,  et dans ses yeux agrandis par la surprise on pouvait lire maintenant un peu de peur vis-à-vis de Gramine. Quand il se remit de sa surprise, son regard s'adoucit en éprouvant de la compassion pour la tigresse.

« Je comprends. » dit-il simplement. « Je ne savais pas que vous étiez aussi complexes. Déjà que le fait que vous ne puissiez vivre que par l'amitié des autres était assez surprenant, mais je ne pensais pas que votre vie était si… compliquée… Mais j'ai une autre question. »

« Vas-y » encouragea la tigresse.

Gramine passa le reste de la semaine en haut des hautes montagnes froides et sombres, d'où elle pouvait voir le château de Poudlard, et quatre jours durant elle observa le collège, ne s'alimentant que de l'énergie des astres.

« Qu'est-ce qui t'a décidé à revenir ? »

Gramine sembla réfléchir quelques secondes, mettant Harry mal à l'aise.

« On m'a dit… que tu aurais besoin de moi. »

Note de l'auteur : Voilà, la première partie de ma fic est terminée. On va maintenant passer à des affaires plus graves et plus dans le contexte de cette « merveilleuse » année. Adieu les Aupengyars, et bon retour Voldie, je vais enfin m'occuper de ses travaux.