OMG.
2018, 2019, 2020, 2021, 2022.. 4 ans...
Le temps passe et l'histoire est toujours sur le carnet. Pas le carnet noir de Swan, non, mais sur le mien. J'aime toujours écrire mais entre deux, j'ai écrit des chansons car je suis musicienne, comme mon compagnon.
Cela fait un mois que j'ai remis la machine en marche parce que ça me fait du bien, j'espère être de nouveau régulière et pouvoir vous satisfaire.
Sur ce, je vous souhaite un bon moment et vous invite à boire un verre, pour nos retrouvailles :)
Santé ! (A ceux qui n'en n'ont pas...)
P.S. : Je sais que c'est un peu court, mais il faut bien relancer la machine...
Chapitre 6
"- ALICE ! ALICE !"
Tel était le bruit sourd qu'elle entendait.
Une silhouette élancée courait vers elle. La jeune femme voulait au moins déterminer si celle-ci appartenait à un homme ou une femme, mais le flou qui apparaissait dans sa vision l'en empêchait. D'un coup, la rousse s'évanouit et s'étalait de tout son long sur le sol, inanimée, le visage blême.
"- Appelez les secours Marlène ! On arrête de jouer."
Laurence, totalement paniqué, se mit à genou entre les deux corps. Il prit le pouls de Jourdeuil et se rendit compte qu'il n'était pas mort.
"-Je suis médecin, je vais vous aider Monsieur."
Le Commissaire se retourna et il se mit à observer la femme qui venait en aide à Jourdeuil. Elle commençait à effectuer les premiers soins et à faire un point de compression sur la blessure par balle. Pour laisser le champ libre, il se leva et s'installa à côté d'Avril, encore inanimé. Il prit sa tête, l'installa sur ses genoux et commençait à caresser lentement ses cheveux comme pour la rassurer. Tous les sentiments passaient en lui : la peur, la tristesse, l'amour qu'il éprouvait pour elle, la jalousie qui le dévorait quand quelqu'un la touchait devant lui, cette même jalousie qu'il éprouvait envers Tim quand il le voyait attentionné envers sa secrétaire. Mais dans tout ce vacarme, une seule chose sortait du lot : le fou à la moto.
Après l'arrivée des pompiers et de celle de la gendarmerie, Laurence laissa les professionnels s'occuper des deux employés de la Voix du Nord. Marlène décida de partir avec Alice dans le fourgon des pompiers, mais suggérait au Commissaire de superviser les recherches.
"- On ne va pas y aller par quatre chemins, vous mettez des barrages ici, ici et ici. ET QU'ÇA SAUTE !"
Laurence était hors de lui et criait sur l'équipe de gendarmerie locale tout en montrant avec force les points de frontière importants. Après le recueil des témoignages, le modèle de la moto et l'allure physique de la personne avaient pu être déterminés. Il s'agissait d'une Gnome et Rhône R3. L'homme portait une casquette, une moustache et une imposante paire de lunettes avec une tenue de motard assez simple.
Après quelques heures de recherche, le motard restait introuvable. L'enquête piétinait et les barrages n'avaient donné aucun résultat. Le grand homme, lassé de cette débâcle, monta dans un taxi et fila dans la campagne flamande vers l'hôpital.
Derrière la vitre qui faisait office de garde-fou pour le fonctionnaire de police, la rousse restait inerte.
Il l'observait.
Elle, la pétillante, l'exubérante, qui passait ses journées à le suivre pour avoir ne serait-ce qu'une petite information sur l'enquête était étalée là, dans ce lit, comme une enfant endormie.
Sachant qu'il prenait son relais en tant que garde-malade, Marlène décida de rejoindre Tourcoing. Deux heures après son arrivée, Laurence avait enfin l'autorisation d'entrer dans la chambre de son amie. Il prit un fauteuil et s'installa à côté d'elle.
Une partie de lui en avait marre qu'elle se met toujours en danger sans jamais penser aux conséquences pour ses amis. Une autre partie aimait l'aventurière, la femme libre et la tête brûlée qu'elle était. En l'observant, l'amas de sentiments était tellement fort qu'il se décida à sortir son carnet.
Il tomba sur une photo d'eux trois qu'il avait ressortie.
"Le Trio infernal…"
Il se mit à sourire en repensant à cette soirée chez Shaitana. Même si on avait découvert le cadavre de l'hôte, la soirée avait été très divertissante pour Laurence. Il avait pris du plaisir à observer les deux jeunes femmes en train de mimer je ne sais quels film ou pièce de théâtre.
Il cherchait une page vide pour la noircir des sentiments qui étaient en train de le submerger.
Après avoir fini de coucher le dernier mot sur la page, il referma le carnet, le mit dans la poche intérieure de sa veste. Sans s'en rendre compte, il ferma petit à petit les yeux et s'assoupit.
Tricard toqua délicatement à la porte de la chambre, quand il ouvrit la porte, il n'en a pas cru pas ses yeux.
La scène qui s'imposait devant lui était surprenante : Alice, encore endormie, ressemblait à un ange, celui d'une de ces iconographies bibliques dont le visage était enfantin et dont la culotte de linge blanc était semblable au drap qui recouvrait son corps. Le plus surprenant restait Laurence, avachi dans le fauteuil qui était collé au lit, celui-ci avait sa tête qui écrasait un bras de la rouquine.
Il fixait longuement la scène et essayait de trouver une solution pour ne pas les réveiller trop brusquement. Il commença à toussoter de plus en plus fort et après une longue minute, la journaliste ouvrit légèrement les yeux. Elle avait du mal à s'habituer à la lumière du jour. Elle essaya de bouger son bras gauche afin de mettre sa main comme protection, mais un poids lourd l'en empêchait. Agité par le mouvement, le Commissaire se réveilla soudainement comme sortant d'un cauchemar et se défit précipitamment de sa position. Ils échangèrent un regard rempli de gêne autant d'un côté que de l'autre, en notant chacun mentalement d'oublier ce qui venait de se passer.
Le meilleur flic de France toussota à son tour pour éloigner sa gêne et demanda à Tricard s'il y avait du nouveau sur l'enquête. Celui-ci fit un signe négatif de la tête.
"- Comment va Jourdeuil ?" s'inquiéta Alice
"- Son état a été stabilisé durant la nuit. Il a été placé dans un coma artificiel pour réduire sa souffrance".
La journaliste abaissa la tête et la déposa entre ses mains, désemparée, elle avait envie de pleurer afin de relâcher la pression, car, elle le savait, en ne prévenant pas Laurence, elle s'était mise dans de beaux draps.
"- QU'EST CE QUI VOUS PRIS BON DIEU AVRIL ! VOUS VOUS RENDEZ COMPTE DES RISQUES QUE VOUS AVEZ PRIS ?"
Le commissaire divisionnaire sursauta et prit la décision de quitter rapidement la chambre.
Une fois la porte close, Avril senti en elle le signal pour déverser un flot de larmes continu.
Elle percevait le Commissaire envoyer des reproches à qui voulait bien l' entendre, mais ses oreilles ne l'entendaient plus.
Le fait que le patron de la Voix du Nord avait risqué sa vie pour elle n'était que la goutte d'eau qui a fait déborder le vase. Un sentiment plus profond l'animait : elle en avait assez.
Assez que ce bougre d'andouille ne fasse jamais d'elle son égal dans les enquêtes, assez de son faux air supérieur et cassant, qu'il dresse comme un rideau de fer lorsqu'il se sent redevable ou qu'une émotion émerge et qu'il souhaite l'insérer au plus profond de son esprit. Assez qu'il cache les sentiments réciproques qu'ils partagent tous les trois avec Marlène. "Pourquoi faire compliqué quand on peut faire simple", un dicton qui définissait assez bien le personnage strict et faux sévère que représente Swan Laurence. Elle se dit que la secrétaire blonde et sublime avait compris : en effaçant cet homme charismatique de sa liste de prétendants, elle s'était enfin libérée de l'emprise émotionnelle qu'il représentait et cela lui avait permis d'avoir quelqu'un de bien dans sa vie. "Je dois faire pareil qu'elle" pensa-t-elle, mais elle savait qu'elle n'en avait pas la force. Elle a besoin de lui et elle est consciente, même s'il ne le reconnaîtra jamais, qu'il a besoin d'elle.
Quand elle remonta à la surface de ses pensées, un silence pesant s'installa.
Après avoir craché tout son venin à la face de la rousse, Laurence s'était tu. Faire ressurgir toute la panique qu'il avait pu ressentir hier soir l'avait soulagé, même si cela la faisait s'effondrer. Cependant, il s'en voulut immédiatement. Il l'appréciait et la voir dans un état de tristesse si avancée était en train de le bouleverser.
D'un coup, il se leva de son siège et vint s'asseoir sur le lit de la journaliste. Il lui prit la main et murmura :
"- Pardonnez-moi Alice… Je vais tout faire pour retrouver le fumier qui a fait ça".
Il la regarda dans les yeux pendant deux longues minutes et lui lâcha subitement la main, comme s'il avait reçu une décharge électrique.
"- JELMER" dit Alice d'un ton monotone
"- JELMER ?"
"- C'est le dernier mot que m'a dit Jourdeuil avant de… enfin hier soir quoi."
"- Je ne connais pas du tout"
"- Pourtant ce sont des célébrités de la région Laurence"
Le binôme regarda vers la porte, Tricard était revenu, en comprenant que la situation s'était apaisée
"- JELMER est une organisation criminelle dont on connaît les actions, mais aucun des membres qui les composent. Dans le coin, elle est principalement connue pour la contrebande et des échanges de tirs avec les douanes. Leur plus beau coup reste le casse de la plus grande bijouterie du Vieux Lille. Ils sont repartis avec 500 000 francs de bijoux et de diamants. Nous n'avons jamais réussi à les coincer."
"- Ah oui, je m'en souviens !" cria la journaliste
"- Très bien, merci, Monsieur le Commissaire Divisionnaire. Vous pouvez nous laisser seuls s'il vous plaît ?"
"- Euuuhh oui, à plus tard"
"Il est culotté lui, c'est quand même moi le chef" bougonna Tricard en fermant la porte.
"- Bon, maintenant que je vais mieux, je vais consulter les archives du journal. Vous pouvez me laisser seule pour que je puisse me changer s'il vous plait ?"
"- Il est hors de question que vous sortiez de cette chambre Avril, je me suis bien fait comprendre ?"
Alice souffla de mécontentement tout en regardant Laurence avec le regard d'une enfant qui s'est fait confisquer ses osselets.
"- N'essayez même pas de sortir quand je serai parti, sinon je vous colle quelqu'un en faction devant votre chambre. C'est clair ?"
Elle s'avoue vaincue et accepte la volonté du flic pour ne pas le fâcher.
Au volant de sa Facel Vega, Swan reprit la direction du Commissariat pour aller consulter l'ensemble des dossiers concernant JELMER.
Il était pensif, car les sentiments qu'il a eu cette nuit-là ne sont pas anodins.
Il s'était déjà inquiété plus d'une fois pour la journaliste, plus d'une fois elle a failli mourir lors d'une enquête. Mais là, il avait vraiment cru qu'elle allait y passer. Il s'en voulut de se dire qu'il préférait que ce soit ce macho de Jourdeuil qui ait pris la balle plutôt qu'Alice.
En entrant dans son bureau, il trouva Marlène. Elle dormait paisiblement, les bras croisés sur son torse. Sa bouche entrouverte laissait passer un léger ronflement régulier. "Même dans son sommeil, elle garde une grande prestance", pensa Laurence, un sourire en coin affiché sur son visage. Tout en souriant, il ouvrit délicatement les dossiers présents sur son bureau et commença sa lecture…
