Tout bien considéré…
Par Maria Ferrari
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Les personnages et l'univers de Harry Potter appartiennent à J..
Base : Tomes 1 à 4 de Harry Potter
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—Chapitre 17 – Confession—
Lucius claqua la porte derrière lui et se plaqua contre le panneau, le cœur battant et les idées en désordre. Il resta ainsi quelques secondes avant de se diriger d'un pas mal assuré vers un sofa. Il s'y laissa tomber et fut pris d'une crise de sanglots telle qu'il n'en avait plus eue depuis sa petite enfance.
Il finit par se reprendre en se répétant qu'il devait avoir l'air parfaitement ridicule à pleurer comme un môme, que c'était une attitude indigne. Néanmoins, cet argument perdait de sa force du fait que personne ne le voyait et n'en saurait jamais rien. Mis à part peut-être Dumbledore qui avait l'air de toujours tout savoir du moment que ça se passait à Poudlard.
Ce qui était horripilant.
Lucius se leva et alla dans la salle de bains se passer de l'eau sur le visage. Il s'essuya ensuite et se regarda dans la glace. Parfait. Cela ne se voyait pas qu'il avait pleuré.
Cela étant, ça ne changeait rien à ce qui s'était passé avec Geena Johnson.
Il avait failli la frapper. C'était une première chose. Heureusement, il ne l'avait pas fait. Cela n'aurait pas arrangé ses relations avec son fils et avec Dumbledore… et de toute façon, même sans ça, il s'en serait voulu. Il y a des choses qui ne se font pas.
La deuxième chose, c'était… mais il avait dû avoir une hallucination auditive. Cela ne pouvait être que ça. C'était tout bonnement impossible qu'il ait entendu la voix de… non, cela ne se pouvait pas.
~oOo~
Geena resta un moment dans le couloir. Que faisait Lucius Malefoy ici ? Il faudrait qu'elle le demande à Albus. D'ailleurs, il fallait qu'elle aille le voir pour lui demander une chambre. Et il fallait aussi qu'elle sache dans quelles circonstances était morte Narcissa… afin de ne pas commettre de nouveaux impairs, vu dans quel état elle avait mis Lucius à cause de son ignorance, mieux valait y pallier au plus vite. Le mieux était qu'elle s'informe sur tout ce qui s'était passé dans le monde sorcier depuis son départ quelques mois auparavant. Albus saurait la renseigner.
Elle n'aurait pas dû couper tous les ponts. Elle aurait dû garder l'abonnement à la gazette.
Idiote, va.
Elle avait été incapable de parler à Severus. Peur de sa réaction. Peur qu'il ne la croit pas.
Lâche en plus, ah, tu peux être fière.
« Lucius ne va pas bien, je sais comment faire pour qu'il aille mieux. Va d'abord parler à Severus. Ensuite seulement, tu iras voir Lucius, je te soufflerai les mots à lui dire.
— Tu parles toi aujourd'hui ? demanda Geena au vide. Et en plus, tu donnes des ordres ! De toute façon, très chère, je vais d'abord aller voir Albus et lui demander des nouvelles. Ensuite, je mangerai et j'irai dormir. Et demain, je puiserai tout mon courage – si j'en trouve – pour aller parler à Severus. Quant à Lucius, j'ignore pour quelle raison précise tu veux le voir, mais je te rappelle qu'il a failli me frapper.
— Il ne l'a pas fait.
— Non, je n'ai d'ailleurs pas bien compris cet épisode. Il me tenait par le col et une seconde après, plus de Lucius, disparu le Lucius. » Geena fit une pause, pensive. « Cela dit, il s'est peut-être écoulé plus d'une seconde entre les deux, ajouta-t-elle, soudainement suspicieuse. J'ai eu comme un étourdissement… Tu y es pour quelque chose ? »
La voix n'intervint pas.
« C'est ça, retourne à ton mutisme ! J'y suis habituée. »
~oOo~
Luciano quitta Francesco et Drago pour aller rejoindre Hermione qui était accompagnée de ses deux amis, Ron parut voir cette arrivée d'un mauvais œil. Le rouquin avait pensé que l'idylle entre le nouveau venu et son amie ne ferait pas long feu, comme cela avait été le cas avec Viktor Krum. Cela semblait cependant devoir durer, du coup, sa jalousie s'était considérablement accrue.
Parmi les amis d'Hermione, il n'y avait pas que Ron qui jalousait un italien. Drago intercepta un regard d'Harry qui lui déplut. Il avait cru que ce dernier avait compris depuis la scène sur le toit. D'ailleurs, il n'avait plus cherché à lui adresser la parole ou quoi que ce soit. Néanmoins, manifestement, Harry était toujours jaloux de Francesco. Comment avait-il pu créer ce genre de sentiments chez lui ? ça le dépassait. Il n'avait rien fait pour. Il avait toujours été désagréable ou au mieux indifférent avec lui. Il avait insulté à plusieurs reprises ses amis, quelquefois méchamment. Il avait même cherché à profiter de sa terreur inspirée par les détraqueurs pour le faire perdre au Quidditch. Et malgré tout ça, Harry semblait attiré par lui.
C'était stupide… mais bon, tant qu'il ne faisait rien pour inciter Francesco à se séparer de lui.
Séparé de lui…
Qu'est-ce qu'il allait devenir après le départ de Francesco ?
« Tu m'emmènerais avec toi en Italie ? demanda-t-il.
— Oui… mais il faut d'abord que tu termines tes études. Déjà que ton père a fait semblant de m'accepter, si en plus tu arrêtes tes études à cause de moi, il va me détester définitivement. »
Drago baissa les yeux et ne répondit rien. Francesco avait raison. Son père n'aimerait pas ça du tout. Et là, il ne pourrait pas lui donner tort.
~oOo~
Geena descendit l'escalier en colimaçon, Albus sur les talons.
« Vraiment, vous ne voulez pas dîner à ma table ? Vous m'en voyez navré ; les élèves auraient été tellement contents de vous voir.
— Raison de plus pour que je dîne tranquillement dans ma chambre, j'aimerais éviter que les élèves me voient pour le moment. Disons que si demain soir je suis encore ici, ça signifiera peut-être que je resterai un bon moment… alors, je dînerais à votre table.
— Et vous reprendriez l'enseignement de votre matière ?
— Pourquoi pas ? » s'exclama Geena avec un haussement d'épaules.
Ils arrivèrent devant la gargouille.
« Albus, je compte sur votre discrétion. Ne répétez à personne ce dont je vous ai parlé, je ne l'ai pas encore dit à Severus et…
— Je comprends. De toute manière, on ne me croirait pas si je racontais ça, déjà que beaucoup de gens me prennent pour un vieux fou ! Vous lui en parlez demain ?
— Oui… oui, c'est décidé, je lui dis. D'ailleurs, c'est aussi pour ça que je vous en ai parlé, vous êtes la première personne à qui j'ose le dire, ça m'a fait un entraînement pour Severus.
— J'espère que cela vous aura mise en confiance.
— J'ignore comment il va le prendre, ça m'angoisse.
— Ne sous-estimez pas, Severus. »
Geena hocha la tête.
« Puisque je ne vous reverrai pas ce soir, je vous souhaite bon appétit et bonne nuit, ma chère Geena.
— A vous aussi. »
Elle s'éloigna en direction de la chambre qui lui avait été allouée. Lucius apparut au détour d'un couloir. Il se rendait dans la grande salle pour le dîner. Il détourna le regard et accéléra le pas. Il semblait effrayé par sa présence et Geena ne comprenait pas pourquoi, cela serait plutôt à elle d'être terrifiée après ce qu'il s'était passé entre eux dans l'après midi… à moins justement qu'il ne soit pas effrayé mais gêné d'avoir failli la frapper ?
Elle repensa à tout ce que lui avait appris Albus et sa curiosité prit le pas.
« Monsieur Malefoy ! l'interpella-t-elle avant qu'ils ne se croisent. Je peux vous poser une question ?
— Vous me la poserez même si je vous réponds non, alors allez-y », répondit Lucius sans s'arrêter et le regard fuyant. Elle lui emboîta le pas.
« Avez-vous souhaité un jour que votre fils devienne mangemort ?
— Non, je ne l'ai jamais souhaité.
— Vous ne vouliez pas qu'il suive vos traces ?
— Je ne voulais pas qu'il se salisse les mains » répondit Lucius, le regard fixé droit devant lui, il préférait ne pas la voir.
Geena eut un sourire.
« Merci, c'est tout ce que je voulais savoir. On aurait peut-être dû commencer par là il y a quelques mois. »
Elle fit demi-tour et partit dans la direction opposée. Lucius s'arrêta et se mordit la lèvre inférieure. Bien sûr qu'il ne voulait pas de cet avenir pour son fils : être sous les ordres de quelqu'un, être soumis, avoir du sang sur les mains, n'avoir jamais la conscience en paix, entretenir sa haine contre les moldus même si on n'a rien d'autre contre eux que des souvenirs.
Des souvenirs…
Cette voix qu'il avait entendue – qu'il avait cru entendre – ce n'était qu'un souvenir.
~oOo~
Drago jouait avec sa purée au lieu de la manger. Luciano le regardait faire, amusé.
« Tu retombes en enfance ? », demanda-t-il.
Drago sursauta et le regarda comme s'il venait d'une autre planète avant de réaliser de quoi Luciano parlait.
« J'ai pas très faim… et je réfléchissais.
— Ah, d'accord. »
Un silence s'écoula. Drago se replongea dans la confection de son édifice en purée. Il releva la tête une minute plus tard.
« Avant d'aller à Poudlard, vous étiez dans une école de sorcellerie en Italie ? demanda-t-il à l'adresse de Luciano.
— Oui, bien sûr.
— Et… elle était bien ?
— Comment ça ?
— C'était une bonne école ?
— Oui… enfin, en tout cas, moi, je l'aimais bien. Moins d'élèves qu'ici… et une meilleure ambiance, je trouve. Mais c'est sans doute dû au fait qu'on n'est pas séparé en maisons et qu'on est moins nombreux.
— Mais… pour l'enseignement, le niveau est bon ?
— Oui… de toute façon, un élève qui a décidé d'avoir un bon niveau l'acquiert de la même façon dans n'importe quelle école, non ? C'est important que les professeurs soient bons, mais l'essentiel, c'est que l'élève ait envie d'être bon. C'est sûr que Santa Circea n'est pas l'école de sorcellerie la plus renommée. On est loin des Poudlard, Durmstrang et Beauxbâtons, mais c'est une école très sympathique. Pourquoi me demandes-tu ça ?
— Je me disais… si Francesco repart en Italie à la fin de cette année, je pourrais peut-être venir avec lui sans abandonner mes études et faire hurler mon père. Et puis, ça me permettrait d'améliorer mon italien en même temps. Il y a plein de gens qui partent étudier à l'étranger, ça leur permet d'améliorer leur niveau linguistique tout en continuant leurs études normalement.
— Tu sais parler l'italien ?
— Oui.
— Tu me l'avais jamais dit.
— Non.
— ça donne quoi ton italien ?
— Heu, écoute, il faudrait que je révise avant, cela fait longtemps que j'ai appris et…
— Et tu as tout oublié, termina Luciano.
— Voilà, en quelque sorte. Cela dit, je suis capable de comprendre un texte en italien, en prenant mon temps… et s'il n'y a pas de mots trop compliqués.
— Je te crois. Par contre, je ne suis pas sûr que ton père soit ravi de ton idée.
— Moi non plus, cependant, j'ai des arguments pour… et puis, je crois que je l'ai bien ébranlé aujourd'hui, il aura sans doute à cœur d'être plus coulant avec moi.
— Ouais, c'est dommage cette histoire, j'étais persuadé que ton père avait changé d'avis sur les moldus. Enfin ! ça finira par venir. Il a quand même changé un peu d'avis. Et comme tu dis : tu l'as ébranlé. Alors, c'est quoi les arguments pour ? Je veux dire : vis-à-vis de ton père, pas vis-à-vis de toi – ceux-là, on les connait.
— Parler parfaitement l'italien, découvrir de nouveaux horizons, voir des gens différents, une manière de vivre différente peut-être aussi et ainsi, je reste avec Francesco, ce qui me permet d'avoir une vie équilibrée, stable, et c'est important pour les études. Hé oui, car si je reste à Poudlard sans Francesco, je risque d'être tout le temps distrait car je penserai tout le temps à lui : "Quand est-ce que je vais le revoir ? Que vais-je lui écrire aujourd'hui ?" Et puis, il va me manquer à mourir, ce qui va me rendre malheureux, peut-être même dépressif, ça fichera ma dernière année d'étude en l'air et j'aurai des notes minables aux examens, sans compter que je vais passer mon temps à me ronger l'esprit avec des questions du type : "ne risque-t-il pas de rencontrer quelqu'un d'autre ?"
— Mon frangin ne te ferait jamais ce coup-là ! » Luciano n'appréciait pas l'idée qu'on puisse ne pas faire confiance à son frère. Ne pas lui faire confiance à lui, c'était normal, mais Francesco était quelqu'un de loyal et fidèle, il en répondait !
« Je prépare mon argumentation pour mon père, lui rétorqua Drago.
— C'est un argument à double tranchant, ton père risque de le retourner contre toi.
— Pas faux… Passons : si je reste avec lui, ça me permettra d'avoir l'esprit plus léger… et de pouvoir me consacrer tout entier à mes études.
— Dis donc, t'as bien réfléchi à tout ça pendant que tu jouais avec ta purée, plaisanta Luciano.
— Ouais, qu'en penses-tu ? Je peux le convaincre ?
— ça pourrait marcher… sauf une chose qui doit être super importante aux yeux de ton père : je suis sûr qu'il considère qu'avoir ses diplômes à Poudlard est plus valorisant que dans une autre école.
— Faux : si ça n'avait tenu qu'à lui, il m'aurait mis à Durmstrang.
— Ah ? » Luciano parut réfléchir avant de conclure. « ça ne change rien au problème : c'est une école d'égale renommée. »
Drago fit la grimace, Luciano avait raison.
« Remarque, je ne crois pas que ton père soit très à l'aise dans ses baskets en ce moment – bien que je ne pense pas qu'il porte des baskets…
— C'est quoi des baskets ?
— Des chaussures de sport, ton père est plutôt le genre à porter des chaussures de ville sur mesure à cinq mille galions la paire/
— Cinq mille galions, n'exagère pas non plus, fit Drago en secouant mollement la tête.
— Bon, quoi qu'il en soit, je pense que ton père doit être embêté de t'avoir déçu, peut-être qu'il serait plus enclin à te céder tes caprices.
— Mon père a toujours cédé à mes caprices, mais je ne lui avais jamais fait un coup pareil.
— Tu trouveras les mots justes. »
Luciano fit un sourire éclatant à l'adresse d'Hermione qui avait croisé son regard.
« Tu sais que tu me donnes des idées, Dray.
— Comment ça ?
— Ben, moi aussi, j'ai envie de retourner en Italie, mais j'ai pas envie de partir sans Hermione. Tu crois qu'elle parle l'italien ?
— Elle aura un mal fou à le parler aussi bien que moi » répliqua Drago avec un air faussement supérieur, se moquant de lui-même.
-
Rusard passa dans la grande salle et vint murmurer quelque chose à l'oreille du directeur.
« Laissez-le entrer », répondit ce dernier.
Rusard repartit. Dumbledore eut l'air soucieux quelques secondes, puis se leva et sortit pour trouver un Igor Karkaroff appuyé misérablement contre un mur, amaigri et à bout de force.
« Ils veulent ma peau », murmura-t-il dans un souffle. La moindre parole paraissait nécessiter un effort colossal. « Ils m'ont poursuivi jusqu'aux portes de Poudlard, c'est un vrai miracle si je m'en suis sorti vivant. »
Karkaroff fut pris d'une crise de sanglots convulsifs et irréfrénables. Ses nerfs, qui l'avaient porté jusque-là, le lâchaient à présent qu'il se trouvait en sécurité.
« Igor, vous avez besoin de vous reposer, fit Albus d'une voix douce en lui posant une main amicale sur l'épaule. Je vais vous offrir un lit. Profitez-en, c'est ma tournée ! Je propose des chambres à tout ceux qui débarquent sans prévenir ! Vous me raconterez toute votre histoire demain, quand vous vous sentirez mieux, vous n'aurez qu'à vous rendre directement à mon bureau, le mot de passe est "Barbe à papa", vous vous en souviendrez ? C'est une friandise moldue – vous vous en fichez sans doute de savoir ce que c'est. Pendant que j'y pense : vous n'avez sans doute pas mangé ? Vous devez être affamé ? Je vais vous mener à la cuisine où vous prendrez un encas. » Albus s'interrompit, Karkaroff tremblait toujours et il semblait à peine comprendre ce qu'il lui disait, il faisait vraiment pitié. « Calmez-vous Igor, tout va bien, vous êtes en sécurité ici.
— Vous n'imaginez pas l'enfer que ça a été », répondit Karkaroff.
~oOo~
Igor se présenta le lendemain matin devant la gargouille, il resta deux minutes devant elle en tentant de se rappeler du mot de passe. Dumbledore avait parlé de barbe et de père. Ah oui !
« Barbe à papa. »
Drôle de nom pour une friandise.
« Bonjour Dumbledore, salua-t-il une fois entré dans le bureau de Dumbledore.
— Bonjour Igor.
— Bonjour Igor », fit une voix féminine en écho. Karkaroff blanchit en voyant la femme qui avait prononcé ces deux mots.
Goldine Savary.
Une mangemort, redoutable qui plus est, il s'était jeté dans la gueule du loup. Ses jambes lui manquèrent, il s'appuya contre le mur du fond qui l'empêcha de s'écrouler.
« Igor, quelque chose ne va pas ?
— Ne vous inquiétez pas, Dumbledore, c'est ma présence qui le met dans cet état. Tu peux respirer Igor, je ne suis plus mangemort… et tu m'as toujours été sympathique.
— Je t'ai toujours été sympathique ? demanda Karkaroff, sincèrement étonné qu'on puisse lui témoigner de la sympathie.
— Oui… inexplicablement oui. Ne cherche pas pourquoi, c'est comme ça. Et puis, en tant que mangemort repentie, je sais que je peux te faire confiance. Après tout, tu es devenu mangemort principalement par lâcheté, et maintenant, tu es totalement grillé chez eux. Donc, je sais qu'il n'y a plus aucune trahison à craindre de ta part, tu n'es pas et tu ne seras jamais un espion aux ordres du Seigneur des Ténèbres. »
Karkaroff opina du chef.
« Et moi, comment vais-je être sûr que je peux te faire confiance ? demanda-t-il d'une voix mal assurée.
— Tu n'auras que ma parole… à toi de décider si ça te suffit.
— Goldine est le nouveau professeur de défense contre les forces du mal depuis la rentrée. Que pensez-vous d'elle ? intervint Dumbledore.
— C'est une sorcière redoutable et très intelligente, répondit Karkaroff sans quitter Savary des yeux.
— Si vous nous racontiez ce qui vous est arrivé ? proposa Dumbledore.
— Oui. » Karkaroff s'installa sur une chaise. « Je m'étais réfugié en Afrique dernièrement. Tout s'est bien passé pendant des semaines. J'avais toujours la peur au ventre et pas beaucoup d'appétit, et je dormais toujours aussi mal, mais je n'ai pas été inquiété pendant mon séjour là-bas, mis à part à la fin… J'ai rencontré un marabout douteux, j'aurais dû me méfier à la façon dont il m'a regardé, c'était pourtant évident qu'il m'avait reconnu. Il m'a dénoncé et le lendemain – c'est-à-dire hier – il était devant chez moi avec quatre autres mangemorts, dont Macnair. »
Karkaroff frissonna en prononçant ce nom qui ne lui inspirait que de l'effroi.
« Ils auraient pu me tuer tout de suite, mais ils préféraient jouer… sauf le marabout qui s'est éclipsé dès le début – apparemment, il ne voulait pas être mêlé à une mise à mort –, ils ont commencé par me jeter par terre et me donner des coups plutôt légers, pas bien méchants, juste pour m'humilier, puis, les coups sont devenus plus violents. Ils riaient à me voir par terre en train de gémir et de les supplier d'arrêter, mais ils n'en ont pas profité longtemps, ils croyaient tellement m'avoir pour de bon et pouvoir me supplicier tranquillement jusqu'à ce que mort s'ensuive qu'ils en oubliaient toute vigilance. J'ai feint de tourner de l'œil, ils m'ont donné d'autres coups de pied, mais je me suis efforcé de ne pas y réagir – ça n'a pas été facile ! –, les coups se sont alors arrêtés, je les ai entendus qui discutaient entre eux pour savoir s'ils me tuaient tout de suite ou s'ils attendaient que je sois réveillé pour pouvoir rire encore un peu, ils ne faisaient pas attention à moi, je me suis concentré et j'ai transplané à leurs nez et à leurs barbes. Quelle bande d'abrutis ! »
Karkaroff fit une pause dans son récit. Goldine et Albus attendirent patiemment qu'il en reprenne le cours.
« Malheureusement pas autant que je le pensais, ils ont compris où j'avais transplané, ils ont compris que je n'avais qu'un seul endroit où je pouvais me sentir en sécurité, ils ont donc transplané à Pré-au-lard comme je l'avais fait quelques instants avant eux. J'avais un peu d'avance, sans doute qu'ils ne s'étaient pas aperçus tout de suite de ma disparition, et puis, ils avaient dû se concerter sur l'endroit où j'étais parti avant de se lancer sur mes traces. Néanmoins, entre les coups qu'ils m'avaient donné et le peu de force me restant après tous ces mois de fuite, j'étais très mal en point… et j'ai vraiment atteint Poudlard in extremis car ils étaient sur le point de me rattraper et de me faire la peau – un Avada Kedavra m'a frôlé ! –, une fois passés les murs du domaine, j'ai été sauvé, ils n'ont pas osé aller plus loin.
— Le Seigneur des Ténèbres leur a interdit d'approcher du château pour l'instant », compléta Goldine.
Karkaroff hocha la tête.
« Je n'ai pas cessé de courir pour autant. Je ne me suis arrêté qu'une fois dans le château lui-même – quel soulagement ça a été ! Dumbledore, je tenais à vous remercier de votre hospitalité.
— Ce n'est rien, je n'ai pas pour habitude de laisser quelqu'un sur le bord de la route.
— Cela vous honore », acquiesça Karkaroff en songeant qu'il ne pouvait se vanter d'avoir la même philosophie que Dumbledore.
Mais il faut de tout pour faire un monde.
~oOo~
« Demain, tu avais dit hier que tu le ferais demain, et ce demain est devenu aujourd'hui, et depuis pas mal d'heures à présent. Il faut que tu te bouges Geena… sinon demain finira par ne plus être aujourd'hui mais hier », disait Geena à voix haute en tournant en rond dans sa chambre.
Il était seize heures. Elle expira un bon coup, puis inspira et sortit de sa chambre, soudainement décidée. Elle se dirigea tout droit vers les appartements de Severus.
Rogue était prêt à sortir lorsqu'elle arriva.
« ça y est, je suis prête », l'informa-t-elle.
Severus resta quelques secondes interloqué avant de se souvenir qu'elle avait quelque chose à lui dire et qu'apparemment leur relation future dépendait de ce quelque chose. Il ferma la porte derrière elle et repoussa à plus tard sa lutte contre la migraine – il avait révisé sa formule, mettant à profit ses échecs de la veille et de la matinée.
« Qu'as-tu à me confier ? demanda-t-il, vaguement angoissé par la réponse qu'elle apporterait à cette question.
— Voilà, c'est quelque chose de très important. » Geena fit une pause et déglutit avant de commencer son récit. « Quand j'avais sept ans, je me suis réveillée un beau matin et je suis sortie de chez moi, en chemise de nuit, dès mon réveil. Il y avait quelque chose en moi qui me poussait à sortir, j'ignorais quoi mais il fallait que je le fasse. Je me suis rendue dans l'impasse à côté de mon immeuble – on habitait au rez-de-chaussée et ma chambre donnait sur cette impasse. Arrivée là, j'ai vu des traces de sang sur le sol et… et… » Nouvelle pause, Geena ferma les yeux et inspira par le nez. « Il y avait aussi une odeur affreuse et des traces noires sur le sol, c'était… c'était comme si on avait brûlé quelque chose et c'est au moment où je pensais ça que j'ai entendu pour la première fois une voix dans ma tête qui m'a dit que ce n'était pas quelque chose, quelqu'un qui avait brûlé. C'est là que j'ai fait la connaissance de Cypria. »
Ce fut au tour de Severus de déglutir.
Cypria Malefoy ?
Sa Cypria
« C'est impossible ! s'écria-t-il.
— Elle est venue dans mon corps, Severus. Elle ne m'a pas expliquée comment, mais elle m'a dit pourquoi, elle m'a dit qu'elle voulait garder une existence physique, même par procuration. »
Severus ne parvenait pas à croire ce qu'elle lui racontait. Pourtant, cela expliquerait bien des choses : son attachement pour les Serpentard, le fait qu'elle appartienne elle-même à cette maison, son obsession à vouloir changer Drago et Lucius plus que n'importe qui d'autre, son attirance pour lui, Severus, et l'attirance qu'il avait pour elle.
« Le hasard a voulu qu'elle tombe sur une des rares moldues à avoir de la famille chez les sorciers, poursuivait Geena, le hasard a voulu aussi qu'Albus me choisisse pour faire ce cours. »
Le hasard… avait-il fait vraiment sa part dans tout ça ? Avec Albus Dumbledore, il fallait toujours se méfier.
« Cypria ne m'a jamais parlé de son frère. Je n'ai appris son existence qu'en te parlant, Severus. En fait, je ne savais rien de Cypria à part qu'elle était sorcière… et je ne connaissais que son prénom, pas même son nom de famille. Elle n'a jamais été très bavarde – en tout cas, dans ma tête. J'ignore la raison qui m'a poussée à m'intéresser à Drago, précisément le neveu de celle qui m'habite alors que j'ignorais que c'était son neveu. Le hasard sans doute encore… ou alors, elle m'a influencée sans que je m'en rende compte. Ça m'a amenée à te parler et tu m'as avoué de ce qui s'était passé dans cette rue – sans savoir qu'elle jouxtait mon immeuble –, ça m'a fait un choc quand tu m'as raconté ça et que tu as mentionné son prénom. A partir de là, j'ai eu encore plus envie de connaître Drago… et de connaître Lucius… de voir qui ils étaient. Severus, comme je te l'ai déjà dit hier, je t'ai menti. Je n'ai pas quitté mon poste parce que j'estimais avoir fait ce que j'avais à faire, mais bien à cause de notre relation. J'avais besoin de faire le point, de savoir si je t'aimais vraiment… ou si c'était juste les sentiments de Cypria qui parlait à travers moi. Quelquefois, bien qu'elle ne parle quasiment jamais, j'ai l'impression qu'elle prend le pas dans mon esprit. C'est toujours moi qui contrôle bien sûr, cependant, parfois, je me demande jusqu'à quel point. Malgré tout, en y réfléchissant bien, j'en suis venue à la conclusion qu'on t'aimait autant toutes les deux.
— Pourquoi me racontes-tu cette histoire à dormir debout ? Pourquoi remues-tu tout ça en moi ? C'est cruel ! » reprocha Severus, tremblant.
Les yeux de Geena se détournèrent et elle parut soudainement attentive, elle hocha finalement la tête.
« Il faut que je te montre quelque chose. »
Elle le prit par la main et l'emmena devant le miroir de la salle de bains.
« Regarde. »
Les visages de Severus et Geena se reflétaient dans le miroir, puis le reflet de Geena se modifia pour devenir celui de la fille de la photo, celle qui avait été si longtemps sur le haut de la pile dans la boîte de Severus.
