Tout bien considéré…

Par Maria Ferrari

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Les personnages et l'univers de Harry Potter appartiennent à J..

Base : Tomes 1 à 4 de Harry Potter

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—Chapitre 20 – Immortalité—

Severus avait été bien inspiré de suivre Dumbledore. Macnair surgit devant eux alors qu'Albus était affairé à prononcer des formules complexes en répandant une poudre sur la surface qu'il souhaitait protéger. Severus poussa le directeur que Macnair s'apprêtait à tuer. Le bourreau envoya alors un autre sortilège qu'il destina à Rogue. Ce sortilège mortel avait la particularité de suivre sa cible. Severus l'esquiva une première fois, le sort – matérialisé par un rayon violet – décrivit un cercle et revint à une vitesse fulgurante le frapper au moment où Severus se mettait de profil afin de ne pas recevoir le sort en plein cœur.

Pendant ce temps, Macnair s'était tourné vers Albus mais celui-ci fut plus prompt et commit le premier Avada de sa vie. La situation était trop grave pour qu'il hésite à se servir de ce sortilège. Macnair s'écroula. Albus regarda Severus, celui-ci regardait son bras gauche d'un air terrorisé. Le sort qui l'avait frappé se répandait et gangrenait le membre entier. Il atteignait l'épaule quand Dumbledore stoppa la progression du maléfice. Rogue était sauvé mais n'avait plus qu'un bras valide, l'autre était dorénavant un poids mort qui pendait mollement contre son corps.

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Un mangemort apparut devant le nez de Lucius. Son cas fut vite réglé. Lucius l'abattit sans autre forme de procès. C'est alors qu'une explosion venue de nulle part dispersa le cercle qu'ils avaient formé. Lucius, Sirius, Arabella et Maugrey n'avaient pas trop souffert de l'explosion mais en restaient étourdis et étaient pour l'instant hors d'état de se défendre. Des éclats de pierre s'étaient figés dans le dos de Goldine qui se mordit la lèvre inférieure avant de s'évanouir. Remus était dans un piteux état, il gisait sur le sol, gémissant. Un troisième mangemort apparut alors, pointant sa baguette magique sur lui. Lupin avait les deux jambes brisées, la douleur l'empêchait de réfléchir convenablement, toutefois, il connaissait d'avance les mots fatidiques que son adversaire allait prononcer.

« Avada Kedavra. »

Une lumière verte, puis, un corps sans vie : celui du Mangemort. Igor Karkaroff se tenait à deux pas de lui. C'était lui qui venait de lancer le sortilège interdit. Karkaroff, ancien Mangemort, était venu dans un sursaut d'orgueil sur le champ de bataille. Il venait de sauver la vie de Remus Lupin.

« On dirait bien que mon intervention a été providentielle. » Il n'était pas peu fier de lui, mais cette boutade était plus un remède contre le stress qui l'envahissait à se trouver à découvert sur un champ de bataille qu'un signe d'humour ou d'arrogance.

« Qui voilà ? Mon vieil ami Igor », dit la voix faussement aimable de Voldemort. C'était lui qui avait provoqué l'explosion précédente, il venait de se représenter à eux avec à ses côtés quelques mangemorts. « Je n'ai pas de chance : la première fois de ta vie où tu te décides de faire acte de courage, c'est contre moi.

Avada Kedavra », répéta Karkaroff en se retournant soudainement, la peur dans les yeux et au ventre. Une lumière éblouissante éclaira une nouvelle fois la clairière. Voldemort ne fit absolument rien pour contrer cette attaque, il l'a pris en plein corps et s'en sortit totalement indemne.

« Mon pauvre Igor, comment as-tu pu penser une seule seconde que je puisse succomber si facilement. Sache que je suis immunisé contre cette attaque depuis l'affaire Potter. Tu es toujours aussi amusant mon cher Igor. »

Karkaroff était pétrifié. Sa baguette lui échappa des mains et chut sur le sol alors qu'il fixait le sourire cruel de son ancien maître.

« Endoloris. »

Karkaroff grimaça de douleur, se tordit, tomba sur le sol et roula sur lui-même en hurlant comme un damné. Maugrey releva alors la tête.

« Tu vas mourir Jedusor », souffla-t-il en se levant péniblement.

Voldemort lui adressa un coup d'œil dédaigneux et ne prit même pas la peine de le faire souffrir avant de le tuer.

« Qui veux être le prochain ? »

Mis à part Remus et Goldine, les survivants étaient tous conscients et faisaient les morts, ne souhaitant pas attirer l'attention du Seigneur des Ténèbres sur leurs personnes. Du fait de leur position, ils ne pouvaient rien tenter contre lui. Ils n'allaient tout de même pas attendre bêtement la mort.

« Vous êtes des médiocres, des médiocres qui se sont crus capables de rivaliser avec moi et de me tuer. Goldine, tu étais si prometteuse : intelligente, forte… tu avais l'âme d'une meneuse d'hommes. Tu as préféré rejoindre Dumbledore, le choix d'une… comment disent les jeunes de nos jours ? Ah oui : petite joueuse », conclut Voldemort. Il n'avait pas remarqué que Goldine avait réellement perdu connaissance. « Parlons de Lucius à présent. J'avais fait de toi mon lieutenant. Comment m'as-tu remercié ? En ne faisant rien pour me rechercher et m'aider après "l'incident" Potter et en me reniant pour sauver ta misérable peau. Puis, après mon retour, après mon pardon, tu as eu l'audace de me trahir. Pourquoi ? Parce que j'ai tué ta femme ? Ne prétends pas ça, la seule chose qui compte à tes yeux est ta petite personne. Les gens dont l'ambition se borne à se faire une place au soleil ne vont jamais très loin. Je pensais que tu étais un vrai Serpentard, Lucius. Malheureusement, les Serpentard ne sont plus ce qu'ils étaient, c'est bien triste, je n'ose pas imaginer ce que va donner la prochaine génération. Enfin, je serai là pour les reprendre en main.

— Pourquoi les Serpentard devraient tous vous ressembler ? » murmura Lucius. Il n'avait pu s'empêcher d'intervenir en l'entendant le dénigrer lui, les Serpentard et l'amour qu'il ressentait pour sa défunte épouse. « Pour arriver à ses fins, il n'est pas forcément utile d'écraser les autres, de tuer. On peut utiliser des moyens légaux. C'est sûr que c'est plus facile de faire comme vous faites. Finalement, vous êtes juste… feignant. »

Qu'est-ce qu'il lui prenait de parler ainsi ? Le Seigneur des Ténèbres avait déjà l'intention de le tuer, pas la peine d'en rajouter ! Et il n'était pas en position pour faire le défier : face contre terre comme le reste de ses alliés, sauf Maugrey dont les yeux morts fixaient le soleil.

Sauf aussi… Severus et Dumbledore.

Où restaient-ils ces deux-là ?

Il ne leur était certainement pas arriver malheur sinon le Seigneur des Ténèbres s'en serait déjà vanté, trop content de s'être débarrassé d'un traître et de cet empêcheur de prendre le pouvoir en rond qu'était le directeur de Poudlard.

« J'ai l'intuition qu'ils se sont cachés, ils vont revenir », lui murmura Cypria.

Narcissa terrassée par un rayon vert.

Cypria se faisant battre à mort.

« Lucius, tu me fais quoi comme trip là ? C'est quoi ces images qui défilent ?

— Les détraqueurs, souffla Lucius.

— Oui, ils sont revenus. Tu supportes mal leur présence ? Trop de mauvais souvenirs ? » demanda Voldemort, l'ébauche d'un sourire grimaçant aux lèvres. Les coins de sa bouche retombèrent.

« Bonjour, nous ne nous sommes pas beaucoup vus tout à l'heure, vous vous êtes sauvé comme un voleur, je n'ai pas eu le temps de vous saluer », déclara Dumbledore en arrivant. Il se pencha sur Maugrey, lui ferma les yeux. Ses lèvres s'agitèrent silencieusement, prononçant des paroles destinées seulement à son vieil ami défunt.

« Je vous trouve bien imprudent, Dumbledore.

— Lequel de nous deux est le plus imprudent ? J'ai pris certaines précautions avant de venir. Actuellement, Severus et tous les partisans de la paix vous encerclent. Je vous signale par ailleurs qu'il vous est désormais impossible de transplaner, j'ai envoûté le lieu où nous nous trouvons.

— Vous bluffez ! La preuve en est que Fol'œil est mort. Vos partisans ne l'auraient tout de même pas laissé mourir ?

— Il faut toujours un minimum de temps pour mettre en place quelque chose. Je suis désolé que mon ami ait péri. Il sera content de savoir que ce n'était pas vain.

— Vous pensez avoir gagné ?

— Oui.

— Vous ne m'avez pas habitué à être aussi présomptueux. Vous devriez arrêter de fréquenter Lucius, cela ne vous convient guère. »

Une explosion retentit alors derrière lui, obligeant Severus à sortir de sa cachette. Les mangemorts se retournèrent brusquement, puis, réalisèrent que c'était le Seigneur des Ténèbres qui avait provoqué cette explosion et se mirent à ricaner.

« Etonné ? demanda Volemort à l'adresse de Dumbledore.

— Vous avez acquis là un nouveau pouvoir, dirait-on, répondit Albus. Mais seul contre tous, cela sera insuffisant. »

Les Avada jaillirent de toutes parts de nouveau. Dumbledore n'avait pas bluffé. Il avait décidé depuis les dernières minutes que pour vaincre définitivement Voldemort, il fallait être encore plus impitoyable que lui. Il aurait existé d'autres moyens pour le vaincre, mais ils avaient été mis en place trop tard. A présent, il fallait assumer ses erreurs du passé… même si cela signifiait renier certains de ses idéaux.

Le seigneur des Ténèbres resta de marbre pendant que ses "soldats" tombaient. Il dirigea la pointe de sa baguette vers Lucius, Albus l'arrêta, s'en suivit alors une longue bataille de regards puissants, l'un essayant d'envoûter l'autre. Les deux protagonistes finirent par lâcher en même temps.

Lucius, Arabella et Sirius se relevèrent. Malefoy alla en chancelant vers Goldine et prit le couteau qui était noué à sa cuisse. Voldemort fit une grimace écoeurante en voyant cette lame qui lui avait déjà percé la peau aujourd'hui. La plaie n'était déjà plus là, contrairement au souvenir humiliant de la douleur qu'il avait ressentie.

La mort n'était plus un problème, mais il ressentait toujours… la douleur !

Albus remarqua que quelque chose changeait dans le regard de Voldemort. Il avait maintenant les yeux d'un dément.

« Les Avada ne te font rien, mais un bon vieil objet tranchant, si ! » lui fit remarquer Lucius qui l'avait compris lui aussi. Une rage sourde l'avait envahi depuis la première explosion. Elle avait été décuplée par les images provoquées par les détraqueurs. Il avait repris de la porte – ou peut-être ses nerfs le portaient-ils – et se précipita sur Voldemort – Albus se recula instinctivement. Lucius lança son bras droit vers l'être qu'il détestait le plus au monde. Voldemort ne fit rien pour arrêter la course du couteau, sa gorge fut tranchée net et le sang jaillit.

« Vous ne pouvez pas me tuer ! JE SUIS IMMORTEL ! » hurla-t-il à la façon d'un damné. De fait, malgré le sang qui s'écoulait, il était toujours en vie et la plaie se résorbait déjà.

« Vous êtes fou à lier ! » souffla Lucius, s'en rendant compte pour la première fois. Voldemort était fou, sans doute depuis très longtemps, peut-être depuis sa prime jeunesse. Il était fou à cause de ce père qui l'avait abandonné, à cause de ce sang moldu détesté qui coulait dans ses veines. Il était fou mais disait la vérité : il était immortel, il avait trouvé le moyen de devenir immortel !

Tous les mangemorts étaient réduits à l'état de cadavres, y compris Queudver, Crabbe et Goyle. Seul restait debout de ce côté-ci de la barrière leur chef incontesté maintenu de chaque côté par une personne musclée venue des renforts.

« Il est immortel et on ne peut pas se permettre de le laisser en vie ! » constata Severus, horrifié par le paradoxe qu'il venait d'énoncer.

Une autre explosion retentit, arrachant un cri à Goldine qui venait de reprendre conscience.

« Tout est fichu », souffla Dumbledore qui comprenait que la mort était la seule délivrance possible dans le cas de Voldemort, que l'enfermer ne pourrait pas être une solution, que d'ailleurs, ils n'y arriveraient sans doute pas. Cependant, comment tuer quelqu'un d'immortel ? Avait-il le temps de réfléchir à cette question ? Voldemort avait apparemment totalement sombré dans sa folie meurtrière, une explosion arracha la jambe droite d'un des renforts.

« Bandez-lui les yeux ! Retirez-lui sa baguette ! Bâillonnez-le ! », hurla Severus.

Goldine n'avait pas trop souffert de la dernière explosion, elle était juste choquée et elle le fut d'autant plus quand elle s'aperçut de la situation inextricable dans laquelle ils étaient plongés.

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Il fallait faire quelque chose.

Lucius s'éloignait à reculons, effrayé et incapable de penser de façon cohérente, mais son autre "moi" réfléchissait pour lui.

« Tu te souviens des livres que nous avions "empruntés" à père ?

— Je me souviens surtout de la correction magistrale qui a suivi cet "emprunt". C'étaient des livres de magie noire très coûteux et très rares. Père n'a pas aimé que ses enfants âgés d'à peine dix ans y touchent. »

Comment arrivait-il à avoir une pensée aussi claire d'un seul coup ?

« Nous avons eu le temps de lire certains passages avant. C'est de la magie très ancienne et très peu connue, pour ne pas dire totalement oubliée. Il est possible que même Voldemort ne connaisse pas certaines des magies que nous avons apprises dans ce livre.

— Apprises, c'est beaucoup dire.

Je me souviens de ce que j'ai lu. Nous sommes capables de reproduire ce que nous avons lu.

— Nous ne nous sommes pas entraînés, tu es en train de me dire d'improviser quelque chose.

L'improvisation n'est pas un art méconnu des Serpentard que nous sommes, non ? De toute façon, ce que je veux que nous réalisions n'est pas une magie pour laquelle l'on peut s'entraîner. C'est un sort qu'on ne peut réaliser qu'une fois.

— Tu ne penses tout de même pas à…

Tu vois une autre solution ? Si tu ne le fais pas, la fin sera de toute façon la même pour toi. Voldemort a perdu la raison ces dernières minutes, mais sa mémoire reste intacte, de même que ses pouvoirs. Si ne nous réussissons pas à le tuer, c'est lui qui nous tuera car aucune prison ne pourra le retenir. Il nous retrouvera où que nous soyons. D'ailleurs, s'il est capable de détruire la planète, il le fera sans doute.

— Certes, mais ce genre d'actions est tout de même plus digne d'un idiot de Gryffondor que de moi.

Arrête de discuter Lucius, tu perds du temps. Cela devient urgent ! »

Lucius sortit de sa pensée et vit Rogue à côté de lui, ce dernier s'était lui aussi éloigné de ce qui se passait, terrorisé de sauter sur une explosion et ne sachant pas comment arrêter ça. Le seul point positif était que Voldemort ne paraissait plus contrôler son pouvoir comme auparavant et ne paraissait plus réussir à viser, ce qui permettait de limiter les dégâts. Il n'en restait pas moins qu'à défaut de morts, les blessés s'accumulaient, que certaines personnes avaient préféré s'enfuir – sans doute n'avaient-elles pas eu tort, en quoi cela améliorerait quoi que ce soit à la situation si elles mourraient ? –, que les deux hommes qui tenaient Voldemort arboraient des faciès terrorisés et que Dumbledore se tenait à quelques mètres de là, les bras ballants, impuissant à arrêter son vieil ennemi.

« Severus, fais attention à Drago, du moins, tant qu'il est encore ici, et dis-lui que je l'aime », dit Lucius.

Cette réplique avait quelque chose de franchement mélodramatique et il en était conscient, ce n'était pas vraiment son style, mais peu lui importait. De toute façon, ce qu'il s'apprêtait à faire ne lui ressemblait pas non plus. Rogue le regarda sans comprendre, ou du moins, il avait peur de comprendre, il n'arrivait pas à assimiler ce que signifiait ce qu'il lui avait dit.

« Que vas-tu faire ? demanda-t-il.

— Quelque chose que j'aurais dû faire il y a longtemps. Dis à Francesco de ma part que mon fils l'aime et qu'il n'a pas intérêt à le faire souffrir. Surtout qu'il prenne bien soin de lui quand ils seront rendus en Italie. Et qu'il ne fasse pas comme moi : qu'il ne le déçoive jamais.

— Lucius, il y a certainement une autre solution », assura Severus, comprenant que son ami avait décidé de se sacrifier d'une manière ou d'une autre. Et il n'en voyait pas l'intérêt si Voldemort était immortel.

« Laquelle ? Il est surpuissant et invulnérable. Il y a un certain nombre de choses dont je n'ai pas lieu d'être fier, Cypria a eu une idée qui a toutes les chances de marcher tout immortel qu'il est à présent, voilà peut-être l'occasion de me racheter de toutes mes… erreurs. Si tant est que je puisse me racheter… Ciao Severus, je t'aimais bien. »

Lucius embrassa la taille de Rogue à la surprise de ce dernier et déposa ses lèvres contre les siennes.

« Adieu Severus, prend soin de toi », lui dit la voix de Cypria. « Eloignez-vous tous », ajouta Lucius à l'adresse de l'assistance et surtout à l'attention de ceux qui maintenaient Voldemort.

Tous regardèrent Malefoy s'avancer courageusement au devant de Voldemort. Celui-ci fut lâché par ses "geôliers", à sa grande joie. Il arborait maintenant un sourire et un regard d'illuminé. Entre son apparence physique et l'air qu'il avait à présent, il ne restait plus rien du Voldemort que Lucius avait connu dans sa jeunesse. La beauté physique, l'apparence soignée et le visage impassible et lucide l'avaient totalement déserté.

« Que va-t-il faire ? demanda Sirius à Dumbledore.

— Nous n'allons pas tarder à le savoir.

— On devrait s'éloigner, proposa Rogue.

— Pas encore, je veux savoir », répliqua Dumbledore. Il sortit sa baguette magique, prononça une formule que Sirius ne comprit pas, trop concentré sur le drame qui se jouait. Une sorte de voile bleuté et transparent se tendit autour d'eux, Sirius eut un mouvement de recul, il tendit la main pour effleurer la matière étrange qui venait d'apparaître devant ses yeux.

« C'est un bouclier, l'informa Dumbledore. A la distance où nous nous situons, cela sera suffisant pour nous protéger. »

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Karkaroff s'éloignait à grands pas, tenant une Goldine très souffrante dans ses bras.

Des sorciers s'étaient précipités pour prendre les corps de Maugrey et de Lupin.

« Il est encore en vie ! s'exclama l'un de ceux qui s'occupaient de Remus.

— J'espère bien qu'il est encore en vie, rétorqua Sirius en allant les aider. Albus, j'y vais, ajouta-t-il à l'adresse du directeur.

— Oui, allez-y, éloignez-vous. Severus, vous a-t-il confié ses projets ? demanda Dumbledore à son subordonné qui s'était réfugié à côté de lui.

— Pas vraiment non. Vous croyez qu'il va réussir à le tuer ?

— Je sens que oui. »

Malefoy était maintenant devant son ancien maître. Pour la première fois de sa vie, il le toisait sans peur. C'était surprenant, s'il y avait bien un moment dans sa vie où Voldemort aurait dû lui faire peur, c'était à présent, mais Lucius ne craignait plus rien maintenant : il était décidé à mourir, par conséquent, plus rien ne pouvait l'effrayer.

« Lucius, tu reviens vers moi, tu viens implorer mon pardon, lui dit Voldemort inondé par sa folie, un sourire tordant son visage cauchemardesque.

— Non, je viens vous tuer.

— Me tuer… que tu es drôle ! C'est moi qui vais te tuer, Lucius. Tu n'aurais jamais dû te détourner de moi. »

Malefoy sortit sa baguette magique, la pointa sur sa propre gorge, Voldemort fronça les sourcils en l'entendant énoncer une formule.

« Tu es complètement fou », dit la créature, tétanisée, semblant reprendre un peu ses esprits devant l'absurdité du geste de son ancien adepte.

Une aura noire enveloppa Lucius. Il fit deux pas en avant vers Voldemort. Ce dernier fit lui-même un pas en avant vers lui. Il paraissait attiré malgré lui par ce qui se dégageait de son ancien adepte.

« Qu'a donc fait Lucius ?

— Vous connaissez les kamikazes, Severus ? demanda la voix de Dumbledore dans un murmure.

— Kamikaze ? Qu'a-t-il fait ?

— C'est une formule de magie noire aussi puissante que méconnue. D'ailleurs, bien que vous vous soyez beaucoup intéressé à cette magie, vous ne la connaissez apparemment pas. Ce sortilège vous transforme en – comment disent les Moldus ? – en bombe humaine – en fait, ce n'est pas exactement ça, c'est plutôt comme… la création d'un trou noir –, qui plus est, il attire votre adversaire vers vous sans qu'il puisse agir. Il est plus que rarement utilisée, très peu de gens le connaissent, il requiert une puissance énorme, un grand pouvoir de sorcier, et surtout… il faut avoir le courage de l'utiliser… ou être suicidaire ou inconscient

— Il vaut mieux fuir ! cria Rogue d'une voix impérieuse.

— Vous avez raison Severus, nous risquons d'être aspirés nous aussi en restant si près. »

Ils prirent tous les deux la poudre d'escampette. Severus vit le ciel s'obscurcir tandis qu'il courait, il s'aperçut que c'était le halo noir toujours grandissant autour de Malefoy qui engloutissait tout ce qui l'entourait dans les ténèbres.

Voldemort ne pouvait se détacher de Malefoy et ne pouvait plus faire un geste. Le pic de sa folie était passé et il avait recouvré sa lucidité, il se rendait pleinement compte de ce qui se passait. Il tremblait de rage. Ce que voulait faire Lucius pouvait le tuer. Il le savait, il le sentait. Ce que voulait faire Lucius allait le tuer. C'était trop stupide, il n'allait pas mourir ainsi, tué par un de ses anciens adeptes. Il ne pouvait pas mourir, c'était impossible, pas comme ça, pas aussi facilement, il était immortel !

… du moins l'avait-il cru jusqu'à ce que Lucius lui rappelle cette vieille formule.

Il fallait qu'il s'éloigne de Malefoy. Il le devait. Il était intolérable qu'il finisse ainsi.

C'était trop bête, il lui aurait suffit d'un simple Avada kedavra lorsque Malefoy était à terre. Mais non, il avait voulu discourir, démontrer sa supériorité, quelle attitude enfantine, quel désaveu pour le seigneur ténébreux.

Lucius l'agrippait. Voldemort ne distinguait plus son visage. Tout se mit à fondre autour d'eux. Il sentit le sol se liquéfier sous lui. Ils s'enfoncèrent tous les deux tout doucement. Le sol se mit à trembler et les engloutit. La plaine était à présent entourée d'un voile opaque, une énorme boule noire de dix mètres de diamètre entourait maintenant les deux protagonistes. Cette boule disparut d'un seul coup, laissant place au vide qui fut vite comblé par l'air, émettant un bruit incongru en revenant occuper le terrain.

La clarté revint.

~oOo~

Les anti-Voldemort entrèrent peu à peu dans le château, Arabella, Igor – portant Goldine – et Sirius – chargé de Remus – entrèrent les derniers avant que n'arrivent Dumbledore et Rogue. Une fois tous réunis, ils pénétrèrent dans la grande salle. Tous les regards se tournèrent vers eux. Le soulagement se peignit sur les visages tourmentés. Les élèves et professeurs accoururent vers eux pour leur demander ce qui s'était passé, si Voldemort était toujours en vie ou si on s'en était enfin débarrassé.

Un élève ne bougea pas : Drago Malefoy.

Quelques personnes dans le lot ne répondaient pas aux questions. Igor et Arabella se préoccupaient de l'état de Goldine. Pomfresh se pencha sur le cas de Remus devant un Sirius inquiet. Les derniers, Dumbledore et Rogue regardaient le garçon blond dont l'interrogation muette se lisait sur le visage : "Où est mon père ?"

Dumbledore se pencha à l'oreille de Rogue.

« Severus, je suis désolé d'avoir à vous confier cette tâche, mais j'ai cru comprendre que Lucius vous a confié son fils, c'est donc à vous de lui annoncer ce qui s'est passé », murmura-t-il.

Rogue poussa un soupir douloureux. Il partit en direction de la table des Serpentard. A mesure qu'il avançait, il voyait la détresse se peindre sur le visage de Drago, celui-ci avait déjà compris à l'air grave que son professeur arborait qu'il était arrivé quelque chose de mauvais à son père, de très mauvais, d'irrémédiable. Il n'allait que lui confirmer ses pires craintes.

Il s'arrêta et s'accroupit devant lui. Drago étant assis, il se fit ainsi plus petit que lui. Son professeur prit une profonde inspiration et commença son récit.

Dumbledore, tout en jetant des coups d'œil à Severus et à Drago, répondaient maintenant aux questions des pensionnaires de Poudlard. Des exclamations de surprise et de joie retentissaient, contrastant avec la scène qui se déroulait à quelques mètres. Drago avait maintenant le visage entre ses mains, Rogue lui avait posé sa main valide sur un bras. A mi-chemin entre le groupe, joyeux d'avoir appris la disparition de Voldemort, et Drago, effondré d'avoir appris celle de son père, se trouvait Francesco qui avait lui aussi appris la triste nouvelle à l'instant. Il progressait doucement vers son ami, cherchant des mots pour le réconforter, des paroles qui répareraient le vide que ressentait sûrement Drago et n'en trouvait pas.

Drago avait laissé tomber sa tête sur l'épaule de Rogue. Instinctivement, cela déplut à Francesco. C'était de la jalousie, il se sermonna intérieurement : c'était stupide, c'était égoïste, Drago venait de perdre son père, il avait perdu sa mère il y a quelques mois, il avait besoin de se sentir entouré, ce n'était vraiment pas le moment de jouer les possessifs. Il se sentit honteux.

Il était maintenant à côté de l'être qu'il chérissait. Il posa une main sur son dos.

« ça va aller, Drago », murmura-t-il d'une voix douce.

Drago releva la tête, Rogue regarda Francesco : la relève.

« Je te laisse à ses soins, dit-il au Serpentard avant de se redresser.

— Non, restez ! » s'écria Drago en saisissant la robe de Rogue.

Francesco se sentit blessé. Il crut un instant que Drago ne voulait pas être avec lui.

« Il ne faut pas me laisser. Il ne faut plus qu'on me laisse. Je ne veux plus qu'on me laisse. »

Il passa son bras autour de la taille de Francesco et colla sa joue contre son ventre.

« Faut pas me laisser.

— Personne ne va te laisser Drago, dit la voix d'Hermione derrière eux. Rassure-toi. »

Harry était là aussi, ainsi que Dumbledore… et surtout Gregory, Vincent, Pansy et Luciano : sa petite bande d'amis. Son père lui avait confié les craintes de Dumbledore de voir une génération aigrie par la mort de leurs parents dans la lutte contre Voldemort. Ce n'était apparemment pas le cas pour Crabbe et Goyle, peut-être même se sentaient-ils mieux maintenant que le poids de leurs pères s'était ôté de leur poitrine.

Tant mieux.

« Ton père était quelqu'un de bien, Drago », lui assura Harry. Il avait toujours cette lueur particulière dans les yeux quand il les posait sur lui. En ces circonstances, Drago s'en fichait pas mal, il était juste content de se sentir entouré et aimé. Sans doute n'avait-il jamais été autant aimé qu'en ces instants. Sans doute parce que son père les avait tous débarrassés de Voldemort et qu'il n'était plus là pour recevoir leurs remerciements. Ça devait faire partie de son héritage. Cette pensée fit couler de nouvelles larmes sur ses joues.

~oOo~

Drago déposa une rose sur la pierre. Ce n'était pas n'importe quelle pierre. C'était la pierre tombale de Lucius et Narcissa Malefoy. Drago avait fait faire cette pierre dans les plus beaux matériaux et les lettres étaient peintes à l'or. Il l'avait fait poser à Poudlard, là où s'étaient connus ses parents. La pierre ne s'élevait pas vers les cieux, elle était couchée sur le sol, Drago préférait ça ainsi. Il s'étendit sur la pierre. Une main lui effleura le dos et il entendit la voix de Francesco.

« Viens Drago, Hermione et Luciano nous attendent. Nous n'allons pas tarder à partir. Nous reviendrons régulièrement, je te le promets. D'ailleurs, je l'ai aussi promis à Rogue. »

Sa voix était rassurante. Tout allait bien dès l'instant où il parlait. Francesco l'embrassa tendrement derrière l'oreille, il sentit son souffle chaud sur son cou. Il se redressa et prit la main de son amant. Ils rejoignirent Hermione et Luciano qui les attendaient près d'un portoloin avec les deux chats – Pattenrond et Filou – et les deux oiseaux – son Grand-Duc et le Faucon de son père –, Francesco et Luciano n'avaient pas de familiers à eux, c'était heureux dans un sens, il y en avait déjà assez comme ça.

Quelques élèves attendaient à proximité pour leur dire au-revoir, ainsi que Dumbledore, Pomfresh, Black, Lupin, Geena et Sinistra. Il y avait également Harry, Ron et Pansy. En s'approchant, Drago s'aperçut que Ron avait pleuré. Sentimental, va ! Pansy se tenait près de lui. Ron avait eu très mal lorsqu'Hermione s'était mise avec Luciano, Pansy se chargerait de le consoler. Drago doutait que ce couple inattendu fasse long feu, mais sait-on jamais ? La vie est pleine de surprise. D'ailleurs, rien que le fait que ces deux-là se soient mis ensemble en était une… et de taille !

Harry avait toujours le même regard, Drago n'était plus le seul à le remarquer, Hermione l'avait vu, Ron aussi… et surtout Francesco. Ainsi, Drago avait pu constater que son petit ami avait un penchant certain pour la jalousie. A un regard amoureux d'Harry pour Drago répondait systématiquement un regard noir de Francesco pour Harry.

Harry n'était pas le seul à jeter des regards louches à une personne qu'on n'attendait pas. Sirius n'était pas en reste de ce côté-là. Luciano avait confié à Drago que son œil gauche – le rescapé – regardait Rogue de façon… étrange, pour ne pas dire suspecte. Comme Drago, Severus était pris. Qu'importe, avait conclu Luciano avec un clin d'œil, peut-être que Remus Lupin n'aurait rien contre le consoler si Black lui demandait gentiment.

Drago laissa un sourire amusé fleurir sur ses lèvres à l'évocation de ce souvenir récent.

-

Ils se postèrent près du portoloin et dirent au-revoir aux autres élèves. Les professeurs Rogue, McGonagall et Flitwick arrivèrent en courant – du moins, en marchant d'un pas vif. Ils étaient tous trois en train de discuter dans la salle des professeurs quand ils avaient remarqué l'heure qu'il était, que le départ de quatre de leurs élèves – et non des moindres – était proche. Rogue prit Drago à part et lui fit promettre de lui donner souvent des nouvelles.

« T'inquiète pas, Tonton Severus, j't'écrirai tous les jours ! » rétorqua Drago, moqueur.

Le "Tonton Severus" fit la grimace en entendant cette façon de l'appeler, il fut néanmoins heureux de voir Drago enclin à la plaisanterie et au sourire. La mort de son père était encore récente et les plaies seraient longues à panser, mais Drago repartait d'un bon pied.

« Fais attention à toi », murmura Rogue en lui posant la seule main valide qui lui restait sur l'épaule. Il avait perdu l'usage de son autre bras à jamais, Pomfresh n'avait rien pu faire. « Je n'ai pas le don de ressusciter les morts », avait-elle proclamé. Son bras n'avait plus la moindre parcelle de vie, elle ne pouvait rien y faire.

Goldine et Igor, qui avaient observé la scène de loin, se rapprochèrent. Un autre couple en devenir sans doute.

Une main caressa les cheveux de Drago, c'était celle de Madame Geena Johnson-Rogue. Le mariage avec le maître des potions avait eu lieu il y a à peine une semaine au beau milieu de l'école afin que tous les élèves puissent y assister – ceux-ci soupçonnaient que ce mariage rapide et public était dû à la personnalité de Johnson, ça n'aurait tenu qu'à lui, Rogue aurait opté pour une cérémonie très discrète, sans doute aussi qu'il ne se serait pas marié du tout… ou plus tard. Geena reprendrait le cours de culture Moldue dès la rentrée prochaine à la grande joie des élèves. Elle fit un sourire chaleureux à Drago, ils se serrèrent l'un contre l'autre. L'adolescent s'écarta, Geena vint près de Severus et lui passa un bras autour de la taille.

« Tu as intérêt à revenir nous voir souvent, dit-elle.

— Je sais. Je n'y manquerai pas. »

Drago revint près du portoloin, il adressa des signes de tête à tout le monde en guise d'au revoir et, juste avant de poser une main sur le portoloin et de prendre celle de Francesco de l'autre, il porta un regard mélancolique dans la direction de la tombe de ses parents.

Des vies s'achevaient et la sienne ne faisait que commencer.

—Fin—