BEYOND MY CONTROL

stage two

( par Dark Angel )

Tu n'as plus vraiment le choix

Nos deux corps étendus, là

Qu'à l'aube ils se mélangent

Là tu as les yeux d'un ange, mon amour

       Cid Highwind sentit un frisson lui parcourir l'échine lorsqu'il se retrouva dans l'obscurité de la chambre avec Valentine pour seul compagnon.

       - Vincent? chuchota le pilote.

       - Tu ferais mieux d'éteindre ton cigare, ordonna le vampire juste derrière lui, d'un ton sans appel. Je ne veux pas que l'on fume dans la pièce où je vais dormir.

       Le pilote grommela mais obtempéra.

       Au même moment, une bougie s'alluma. Elle était posée sur la table basse, près de la fenêtre, éclairant les murs d'une pénombre qui bizarrement, n'avait rien de chaleureuse. Mais ce qui était plus étrange, c'était que Vincent se trouvait à côté de cette bougie alors que deux secondes plus tôt, il était tout près de lui.

       Avait-il rêvé?

       Je dois être très fatigué, songea Cid en se frottant la nuque.

       Il posa sa lance près du fusil de son compagnon de route, appuyé contre un fauteuil. Puis, il scanna la petite chambre d'un oeil scrutateur. Rien d'extraordinaire. A part le fait qu'il n'y ait qu'un lit. Un énorme lit où l'on pouvait facilement y dormir à quatre.

        Le pilote déglutit et ôta ses lunettes d'aviateur perchées sur son crâne ainsi que son foulard et ses gants d'un air nonchalant.

        Il  jeta un coup d'oeil furtif à Valentine. Celui-ci était posté près de la fenêtre, admirant d'un oeil absent le quartier de lune suspendu dans les airs. Il n'avait enlevé ni sa cape, ni le large ruban qui lui enserrait une partie de ses cheveux.

        Il s'asseya au bord de lit, sautant légèrement dessus pour tester la qualité du matelas.

        - Tu dors de quel côté? Moi j'ai aucune préférence. A droite, à gauche, au milieu, c'est du pareil au même. Faut dire que je bouge pas mal, alors si j'te gêne, faut pas hésiter à me bousculer un peu hein! Ah oui! Je ronfle aussi parfois. T'as le sommeil lourd j'espère parce que si...

        - Assez...

        - ...non t'arriveras pas à te reposer. Remarque, p'têtre que t'en as pas besoin vu que t'avais l'air d'être dans ton cercueil depuis un petit moment. Bah! J'me fais de la bile pour rien, si ça s'trouve, j'ronflerai pas du tout! Mais bon, j'sais pas pou...

        - Stop!

        Le vampire n'avait pas crié mais le ton donné à ce simple mot forçait le respect... et le silence immédiat. Du moins durant presque une minute.

        - Vincent...? murmura-t-il, téméraire.

        Les yeux carmine se détournèrent de la lueur blafarde de la lune pour se poser sur lui. Il frissonna malgré lui. Ces yeux... durant une seconde, ils lui parurent inhumains.

        - Tu parles trop, Cid, déclara-t-il tout en s'avançant vers le pilote. Peut-être que... je devrais... te...

         Il posa sa main mécanique sur le torse de l'homme et colla presque son visage contre le sien, les mèches de ses cheveux noirs lui chatouillant le front et ses joues mal rasées.

         - ...trancher la gorge...

         Cid sentit la pointe métallique de ses doigts lui griffer légèrement son cou.

         - ... pour te faire taire... enfin!

         Sur ce dernier mot, il le repoussa complètement et se redressa avant de retourner près de la fenêtre, attrapant une chaise au passage, pour se caler contre la rambarde.

         Le blond se retrouva dos contre le matelas, son coeur battant à un rythme effréné, la respiration légèrement haletante. Il resta ainsi quelques secondes, les yeux clos, le temps de reprendre ses esprits.

         Il avait été si près de Vincent!

         Et il s'était gorgé de cette vision sublime.

         Il n'était pas dans ses habitudes de mâter comme ça les mecs qu'il rencontrait. A vrai dire, cela ne lui est arrivé qu'une seule fois. Mais c'était il y a longtemps.

         Cette fois-ci, il était complètement fasciné par le jeune homme.

         La peau pâle, crémeuse invitait ses doigts à la caresser sans jamais se lasser. Il savait qu'elle serait aussi douce qu' une pétale de fleur...

         Les yeux légèrement en amande, bordés de long cils noirs, comme une femme, rendaient son regard plus hypnotique et plus profond.

         Les longues mèches noires frôlant ce visage parfait à chaque mouvement de cette tête ravissante, l'incitait à plonger ses mains dans cette chevelure soyeuse et parfumée.

         Mais surtout, ce sont les lèvres pleines et sensuelles de Vincent qui lui échauffaient le sang. Elles étaient délicatement rosées, humides et les voir bouger ainsi, si près de lui , si près des siennes avaient été un supplice infernal. Durant une fraction de seconde, il avait eu l'idée insensée de lécher cette bouche si mobile et si tentante pour en apprécier leur texture, pour en goûter leur saveur unique.

         Elle fut vite bannie par le fait que Vincent l'aurait certainement égorgé avant même qu'il put les effleurer. Il ne valait mieux pas tenter le diable.

         Bref.

         Il bénissait le ciel d'être vêtu d'un treillis. Cet habit ayant la particularité d'être large, il lui dissimulait habilement son début d'érection. Il aurait eu trop honte si le jeune homme l'avait remarqué.

         Il se redressa, mal à l'aise, passant une main tremblante dans ses cheveux courts, les ébouriffants encore plus. Il se racla la gorge.

         - Bon... euh, j'vais... j'vais prendre une douche.

         Le vampire ne répondit pas. Il ne tourna même pas la tête.

         Le pilote se leva, fouilla dans son paquetage et en sortit ce qu'il lui  fallait pour sa toilette et des affaires pour la nuit. Puis, il se dirigea vers la pièce d'eau avant de fermer doucement la porte derrière lui.

*

          Vincent tourna la tête vers la salle de bain, une fois qu'il entendit l'eau de la douche couler. Ce Cid était vraiment trop bavard pour son équilibre mental. Pendant trente ans, personne ne lui a parlé, ne l'a touché, ne l'avait rendu chèvre comme cet homme l'avait fait en si peu de temps.

           Mais ce n'était pas le pire. Non. Le pire était le fait que lorsqu'il avait touché le pilote, sa soif était revenue avec encore plus de force. Le parfum de sa peau légèrement en sueur, cette chair irradiant une chaleur qui avait transpercé son corps glacé de part en part, l'odeur métallique de ce sang rouge qui pulsait dans chaque veine l'avait rendu presque fou.

            Lorsqu'il était dans la salle du bas avec les autres, il s'était forcé à manger pour ne pas éveiller les soupçons. Il digérait mieux les liquides et savait qu'ainsi il ne serait pas tombé malade. Manquerait plus que ça! Mais il avait ressenti le début d'un tiraillement à l'estomac peu voulu face à cet environnement paisible et face à tout ce liquide rouge qui le narguait. Pour résister à la tentation, il s'était isolé dans un recoin de la pièce, tentant désespérément par là même d'occuper ses mains et son esprit torturé par tous ces battements de coeur qui lui emplissaient les oreilles, en graissant le canon de Death Penality.

            Cela avait réussi. Du moins pour un temps. Il savait qu'il devait absolument sortir cette nuit pour chasser afin d'apaiser sa soif et redonner de la force à tous ses muscles endormis. Il n'avait pas besoin de se nourrir toutes les nuits. Mais le fait de boire le sang d'une victime l'apaiserait pour une semaine au moins.

             Perdu dans ses pensées, il ne se rendit pas tout de suite compte que Cid était sorti de la douche, portant pour seul vêtement le pantalon d'un survêtement. Il se frottait ses mèches blondes énergiquement avec une serviette. Ayant l'air satisfait du degré d'humidité de ses cheveux courts, il la posa contre le dossier du fauteuil. Il vit alors que Vincent le fixait, les traits figés, et il sentit ses pommettes le brûler petit à petit.

             Il se racla la gorge, ce qui fit sortir le vampire de sa transe.

             - Je, heu... j' vais me coucher. Si tu veux prendre une douche, n'hésite pas à t' servir dans mes affaires de toilette, suggéra-t-il, aimable.

             Ne recevant aucune réponse, ni aucun geste de la part de son compagnon de chambre, Cid alla vers le lit, tira sur les couvertures et se glissa du côté du mur, laissant largement de la place pour le jeune homme à l'opposé du matelas.

             Il se mit sur le flanc droit et passa un bras sous l'oreiller et donc sous sa tête pour se caler avant d'examiner les fissures qu'il y avait sur le mur.

             Il soupira.

             Cette nuit promettait d'être longue!

*

             Contrairement à ce qu'il avait crû, Cid Highwind s'endormit dans la demi-heure qui suivit. Valentine, aussi immobile qu'une statue, avait attendu patiemment qu'il tombe dans les bras de Morphée avant de se déplacer.

             Il ne fit aucun bruit lorsqu'il passa près du lit et lorsqu'il ouvrit la porte avant de la refermer derrière lui.

             Une pensée incongrue lui traversa l'esprit au moment où il se retrouva à l'extérieur de l'auberge.

             Cid n'avait ni ronflé, ni bougé.

*

              Lorsqu'il revint deux heures plus tard, le vampire s'était gorgé de sang.

              Au lieu de prendre une proie, il en avait chassé deux. Pour son plus grand bien.

              Le sang chaud roulant sur sa langue râpeuse avait été le grand des frissons. Il ne se souvenait pas d'avoir ressenti un si grand plaisir, même lorsqu'il avait été humain. Il avait crût sentir du velours couler le long de sa gorge, se diffuser le long de sa poitrine, jusqu'à l'extrémité de ses membres, le réchauffant à la limite du supportable. Il en tremblait encore.

              Il se sentait revivre!

              La partie la moins plaisante de cette aventure avait été d'enterrer leurs cadavres pour ne pas alerter la population. Qui sait quelle chasse au sorcière cela pourrait engendrer?

              Une fois dans la sécurité et l'obscurité de la chambre, ses yeux nyctalopes aperçurent Cid. Celui-ci ne ronflait toujours pas, mais il était couché sur le dos, jambes écartés, un bras en travers du lit tandis que l'autre formait un arc de cercle au-dessus de sa tête. Les couvertures avaient été refoulés à ses pieds, presque roulés en boule.

              Il s'approcha comme attiré par la forme endormie.

              Il devait admettre que le pilote était en bonne condition physique. A côté de lui, il se sentait un peu chétif. Il devait bien se l'avouer, le blond était athlétique et bien proportionné. Les habits larges qu'il revêtait ne le flattaient pas du tout.

              Il nota qu'où il portait son regard, sa peau sans défaut était bien tannée par le soleil. Il devina qu'il appréciait la vie au grand air et qu'il devait souvent travailler ou se déplacer en tenue un peu plus légère.

              Ses sourcils se froncèrent et une ombre de tristesse voila ses yeux rougeoyants. Il ne pourrait jamais plus être ainsi. Faire comme lui. Son corps devait être caché des autres. A tout jamais. Il ne pourrait supporter de voir la pitié, le dégoût et la peur dans le regard des personnes qu'il côtoierait ou qu'il aimerait.

              Il ôta le bandeau qui retenait partiellement ses cheveux longs ainsi que sa cape rouge et son gant de cuir noir avant de les poser sur le fauteuil racorni, suivi de ses bottes métalliques.

              C'était tout ce qu'il enlèverait.

              Précautionneusement, il poussa légèrement le bras qui traversait le drap de part en part, avant de s'installer à son tour sur le lit.

              Cid remua légèrement et son visage vint se positionner juste en face de Vincent. Ce dernier remarqua tout de suite la ligne pure du cou, complètement dégagée, invitant à la morsure. A la luxure.

              Pris d'une envie irrésistible, il se souleva sur un bras et courba son visage vers le sien, notant au passage, les fines ridules qui se trouvaient au coin de ces yeux aussi bleus que le ciel polaire s'ils les ouvraient, les mèches blondes qui ceignaient son front, la mâchoire forte, carrée et rasée de près, une bouche où la lèvre inférieure, un peu plus épaisse que sa conjointe, avait une courbe des plus sensuelles. Quand elles n'étaient pas en train de retenir un cigare entre elles!

               Il descendit plus bas, atteignant enfin sa cible. La jugulaire qui parcourait sa gorge mate et qui passait son temps engoncée dans un foulard blanchâtre. Il n'était plus qu'à deux centimètres de l'objet tant convoité. Il avait une folle envie de mordre mais il ne le ferait pas. Il avait bien mangé peu de temps auparavant. Il voulait juste... le goûter lui.

               Il darda le bout de sa langue et il le fit glisser de la base du cou jusqu'à creux de l'oreille, très très lentement, laissant à peine apercevoir un sillon humide de salive. Le goût salé de sa peau et du gel douche qu'il avait utilisé explosèrent sur sa langue. Un peu étourdi par le choc de cette chair mortelle si savoureuse, il retourna vers son coin du lit et s'allongea sur le dos, le bon bras en travers du front.

               Il colla sa langue contre son palais pour faire durer le plaisir, avant de la passer sur ses lèvres devenues sèches et de déglutir. Il sentit de petites décharges électriques lui traverser les muscles de sa mâchoire avant de se propager jusqu'à sa poitrine où elles disparurent.

               Il resta ainsi durant de longues minutes avant de jeter un coup furtif sur le pilote qui n'avait pas bougé. Puis, il se mit sur le côté, lui tournant le dos avant de sombrer à son tour dans un sommeil sans rêves.

*

               Cid se colla encore plus contre la source de chaleur qui provenait du lit. Il aimait beaucoup se pelotonner contre sa petite amie du moment le matin. En fait, il était un vrai nounours et il adorait qu'on lui caresse la tête tandis qu'il se frottait comme un chat contre elle.

               A moitié endormi, il se pressa un peu plus fort contre le dos qui lui faisait face, son bras droit entourant une taille mince et souple. Sous sa joue, il sentait une douce chevelure lui chatouiller le visage. Il fit une rotation du bassin et son érection matinale vint se frotter contre un fessier assez rebondi et musculeux.

               Il émit un gémissement étouffé et il passa une de ses cuisses au-dessus du genou de sa compagne, tout en ondulant lentement des hanches. Sa main droite glissa vers le haut, effleurant au passage les flancs avant de se poser sur un sein qu'il lui sembla pas très gros. Il grogna lorsqu'il sentit un vêtement qui lui barrait le passage mais ne se démoralisa pas pour autant. Du bout des doigts, il avait touché un bourgeon de chair bien dur et il sourit contre la nuque inconnue.

               Peut-être que la belle ne bougeait pas mais elle réagissait à ses caresses!

               Alors qu'il allait déboutonner le premier bouton d'une longue série, quelque chose de glacial et de grinçant emprisonna sa main baladeuse en une étreinte de fer.

               Ses paupières se soulevèrent d'un coup, comprenant enfin la situation périlleuse dans laquelle il se trouvait.

               Il serra les dents alors que la douleur dans ses doigts ne diminuait pas.

               Son coeur faillit s'arrêter de battre tant la honte et la peur le submergeait.

               Qu'est-ce qu'il allait lui dire, bon sang?

               Difficile de se justifier ou de trouver une excuse quand on vous surprenait dans ce genre de position.

               - Qu'est-ce que tu pensais faire exactement, Cid? interrogea la voix grave du vampire.

               Le pilote frissonna. Ce ton d'outre-tombe ne jouait pas du tout, mais alors pas du tout en sa faveur!

               Mortifié, il recula aussi loin qu'il le pouvait de Vincent, évitant par cela même tout contact insidieux. Seule sa main restait prisonnière de ce carcan métallique.

               N'arrivant pas à répondre, sa voix semblant être bloquée dans sa gorge aussi sèche que le Sahara, son compagnon de chambrée continua sur le même ton:

               - Tu as eu de la chance que ce ne soit pas tes bijoux de famille que j'ai attrapé dans cette main, mon cher Cid.

               Il ne s'était toujours pas retourné et le pilote ne voyait pas l'expression de son visage contrairement à tout son corps qui paraissait complètement crispé.

               - Tu aurais pu terminer... eunuque, susurra-t-il, ironique. Et ne pas avoir de descendants. Les Highwind se seraient éteints avec toi... Quelle perte pour l'humanité!

               Tentant de retrouver un ton bon enfant malgré l'aspect peu conventionnel de cette conversation où il risquait la vie de ses hypothétiques futurs héritiers, il répondit:

- Voyons ! Tu n'aimerais pas faire sauter sur tes genoux mes futurs beaux enfants ?

               C'est plutôt toi que j'ai envie de faire sauter sur mes genoux… songea le vampire brusquement.

- Sûrement pas ! rétorqua Vincent d'un air dédaigneux tout en lâchant le bras de son

compagnon.

               Cid se frotta la main en grommelant tout en s'écartant prudemment du brun. Malgré les manières plutôt brutales de ce dernier, il avait senti une chaleur insidieuse se répandre dans ses veines pour se concentrer sournoisement dans son bas-ventre. Cette proximité et ce simple contact, qui n'avait rien de sexuel, l'avait mis en émoi. Il tenta tant bien que mal de le cacher.

                Valentine quand à lui, tournait le dos au blond et s'affairait avec ses habits et ses armes. La voix froide et vide d'émotion à l'autre bout de la pièce le fit sursauter :

                - Dépêche-toi de te préparer . J'entends les autres en bas. Ils nous attendent pour partir.

                Une fois habillé de pied en cap, il se dirigea vers la porte, une main sur la poignée.

                - Séphiroth, lui, ne nous attendra pas.

                   Il sortit de la chambre avant que Cid n'ait pu lui répondre.

A SUIVRE