Entre Lune et Étoile

Diclaimer : Rien de nouveau…

Merci à Alana et Nana pour leur soutien inconditionnel – ou presque.
Merci Dina d'avoir été là pour finaliser la version que vous lisez.

32- Haut les masques !

« Comment t'en sors-tu, Harry ? »

La question taraudait Rogue au-delà de ce qu'il aurait voulu admettre. Il regardait le jeune garçon assit entre ses deux nouveaux amis – un autre Weasley et une moldue qui croyait tout savoir de la magie parce qu'elle avait lu tous ses livres de classe ! Il recopiait avec application les définitions – « il les connaît pourtant par cœur ! » - que Severus avait fait apparaître au tableau. Un élève parmi les autres…

Trois semaines maintenant que la rentrée était passée… Autant qu'il le sache, Harry avait réussi à éviter de se battre avec Malefoy jusqu'ici – et il aurait été bien placé pour le savoir. Il avait aussi su marquer la distance avec son père et Minerva – Severus aimait bien se dire que c'était grâce à lui, au jeu qu'il lui avait appris à jouer l'année dernière… qu'aucune des grandes angoisses de Remus ne s'était donc encore vérifiée.

Harry s'était facilement intégré aux Gryffondors, selon Minerva – il faut reconnaître qu'il en connaissait déjà beaucoup avant d'y être réparti et que le jeune Weasley y était entré avec lui. Il avait passé haut la main son test de maîtrise de balai et intégrér aussi directement l'équipe de Quidditch de Gryffondor. Comme Tiberius Wind avait préféré arrêter de jouer, Isaliacca Row avait pris le poste d'attrapeur, et Harry était son remplaçant. Quand Minerva était entrée en trombe dans la salle des professeurs pour annoncer la nouvelle, Remus avait sobrement commenté que ça aurait été un des plus beaux jours de la vie de James. Severus et le professeur de Métamorphoses avaient échangé un regard surpris, mais ils n'avaient pas réussi ni l'un, ni l'autre à savoir ce que voulait dire Lupin. N'est-il pas fier de lui ? , s'interrogeait Severus, incapable de croire le contraire.

Bref, Harry présentait TOUS les traits du parfait Gryffondor… sauf peut-être pendant les cours de potions. Rogue s'interrogea pour la millième fois sur ce qu'avait pu lui dire le Choixpeau le soir de la répartition. Car le Choixpeau avait hésité, il le savait. Il avait pris trop de temps…Il se rappelait aussi avoir vu Harry secouer la tête. Qu'avait-il refusé ? Pourquoi ne pouvait-il s'empêcher de penser qu'il avait refusé d'entrer à Serpentard ?

« Je ne suis qu'un vieil oncle émotif », se gronda-t-il.

Pour passer son agacement, il retira cinq point à Neville Longdubat qui venait de renverser sa bouteille d'encre. Les Gryffondors lui lancèrent un regard noir collectif. Celui d'Harry avait une qualité particulière. Il semblait dire : « Tu peux pas arrêter de faire le méchant ? » - c'est-à-dire la question même que lui avait posée Cyrus la veille au soir après un cours de potion particulièrement tendu avec les Serdaigles. Il haussa les épaules et lissa ses robes.
«Il y a bien assez de gentils professeurs ici ! Vous croyez donc que le monde sera gentil avec vous ?», avait-il répliqué au gamin – il avait décidé une fois pour toute de considéré Cyrus comme un gamin. Et c'était exactement le fond de sa pensée !

« Bien, vous devez avoir fini ! »

Sa voix les fit sursauter. Il vit les mains accélérer sur le parchemin et sourit doucement, satisfait de son pouvoir sur eux.

«Nous allons donc maintenant nous intéresser aux différents ingrédients utilisés pour les potions» - reprit-il sans attendre.

Les têtes replongèrent pour prendre en note ses paroles. La masse indisciplinée des cheveux noirs d'Harry tranchait avec les cheveux carotte de Weasley et les tresses châtain de Granger.

«Ces ingrédients vont se présenter sous des formes diverses qui peuvent être regroupées en grandes catégories que nous allons appeler des « états »… L'un d'entre vous peut-il me citer les différents états que nous devrons prendre en compte ? » Le ton de sa voix indiquait qu'il ne s'y attendait pas.

De fait, le silence le plus total s'installa. Granger – évidemment ! - leva la main après un instant. Il l'ignora et interrogea Parvati Patil qui n'en trouva péniblement que trois : liquide, solide, gazeux.

« Vous vous croyez chez les moldus, Mademoiselle Patil ? Rien de plus intéressant ? Non ? Monsieur Thomas, peut-être ? », commenta-t-il en désignant un autre élève.

« Non, Monsieur », regretta le jeune garçon en baissant la tête.

Granger leva de nouveau la main. Les autres la regardèrent avec beaucoup d'espoir. Harry laissa percer un léger sourire au manège de ses camarades, mais ne leva pas la main. Et de ce que savait le maître de potions, c'était à peu près la même chose dans tous les cours. Harry gardait une prudente réserve, attendant d'y être contraint pour participer activement aux cours. Ce comportement modeste lui avait déjà attiré les louanges de Minerva et de Flitwick. Mais Severus ne partageait pas leur avis. C'était du gâchis ! Un manque d'ambition absolument horripilant ! Pour tout dire, il trouvait ça plutôt snob !

« M. Potter-Lupin ! », aboya-t-il soudain.

L'enfant sursauta et darda sur lui des yeux verts qui entrèrent jusqu'à son âme. Severus était le seul avec Quirrell a lui donné en permanence son nom complet. « Je vous appellerai Lupin », avait dit Flitwick la première heure du premier cours. Les autres n'avaient même pas précisé, ils le faisaient, c'est tout. Interrogé la veille de la rentrée, Remus avait refusé de choisir : « C'est à vous de voir… avec lui. Mais pour moi, son nom est Potter-Lupin ». Severus était plutôt d'accord avec ça, mais il se demandait ce que Harry, lui, en pensait vraiment… Ils n'avaient plus beaucoup l'occasion de discuter… Cela aurait été différent s'il était à Serpentard, pensa-t-il sombrement.

«Oui, professeur », répondit Harry précipitamment et en rougissant légèrement. Son embarras exaspéra encore plus Severus contre lui. Il ne va pas se poser en victime en plus !

«Auriez-vous par hasard une idée ? », questionna-t–il à haute voix en donnant à sa question une onctuosité particulièrement menaçante pour ceux qui le connaissait. Harry lui jeta un regard inquiet, il avait compris qu'il se l'était mis à dos !

«Oui professeur. Il… », commença-t-il nerveusement.

«Donc vous savez mais vous vous taisez ! On ne vous a peut-être pas bien informé des règles de cette école, M. Potter-Lupin. On ne gagne des points que SI on répond aux questions», l'interrompit sèchement le maître de potions. Il vit certains sourirent, et Harry pâlir davantage. Ça lui apprendrait à prendre ses airs distants avec lui !

« Oui professeur », admit le garçon de sa voix la plus calme. Mais Severus le connaissait assez pour le savoir vexé.

« A moins que vous pensiez que c'est plus 'Gryffondor' d'avoir l'air de ne rien avoir appris avec moi les deux dernières années ? », ajouta-t-il.

Harry leva les yeux, et Severus lut une étincelle qui semblait dire « c'est donc ça ! », et il se sentit de nouveau bouillir de rage. Il détestait quand Harry – quand toute la smala Lupin en fait ! – croyait lire en lui comme un livre ouvert. Présomptueux Gryffondors, tous autant qu'ils étaient !

«Non, monsieur », répondit cependant prudemment Harry.

«Alors ? » Le maître de potions avait croisé les bras sur sa poitrine et ses yeux noirs ne le lâchaient pas. Un frisson de sympathie pour le fils du directeur traversa la classe.

«Les principaux ingrédients utilisés dans les potions peuvent prendre seize états : quatre états solides, quatre états liquides, quatre états gazeux, quatre états magnétiques », récita doucement Harry. Il perçut la considération d'Hermione – ce n'était pas dans le livre - et la surprise intéressée des autres.

«Au tableau», l'interrompit de nouveau Severus.

«Pardon, Professeur ?», balbutia le jeune garçon, remontant inconsciemment ses lunettes sur son nez et ranimant, sans le savoir, les plus mauvais souvenirs du maître de potions. James Potter avait eu cette « maudite » habitude….

« J'ai dit : au tableau… - à moins que vous ne vous sentiez pas capable de dessiner le classement des seize états ? », expliqua le maître des potions toujours à la limite de l'emportement.

«Heu, si, monsieur, bien sûr. »

Harry se leva en hésitant. Il n'aimait pas que Severus le mette ainsi en scène, mais avait-il bien le choix ? Il s'avança et commença à tracer d'une main un peu tremblante les quatre colonnes et les quatre lignes du tableau.

«Plus fort ! », clama Severus du coin de bureau sur lequel il était assis.

«Professeur ? », sursauta Harry.

«Nous n'entendons pas vos explications, Monsieur Potter-Lupin. »

Harry lui lança un regard noir – sans même sembler avoir conscience que peu d'élèves auraient osé faire cela - mais s'exécuta. Il expliqua les quinze premiers états d'une voix de plus en plus régulière, donnant même des exemples d'ingrédients qui changeaient d'état. Severus ne l'interrompit pas une fois, se contentant de le fixer de ses yeux d'obsidienne. Ni encouragement, ni critique. Harry arriva au seizième état et hésita.

«L'état gazeux magnétique est le plus rare…. » Ça au moins, c'était vrai. « On le trouve généralement dans les formes spectrales des ingrédients… » Il jeta un regard de détresse à Severus - Que voulait-il qu'il dise exactement ? Il savait qu'ils passeraient une partie du troisième trimestre à donner une définition correcte de cet état qui était le plus discuté par les spécialistes. Comme Rogue ne disait rien, il décida de conclure un peu abruptement : « Cet état est plus difficile que les autres à obtenir et à conserver. Beaucoup de maîtres de potion vont jusqu'à dire que ce n'est pas un état mais une transition…mais c'est la seizième case du tableau. »

Il se tourna résolument vers la classe et affronta bravement leurs regards.

« Vous avez fini, Potter-Lupin ? », questionna Severus de sa voix la plus neutre.

« Oui, Professeur ». Ni inquiète, ni triomphante, sa voix était résignée.

« Merci. Allez à votre place...Cinq points pour Gryffondor», commenta le maître des potions comme si la prestation d'Harry avait été tout à fait habituelle. «Et les autres, qu'attendez-vous pour copier ce tableau !», aboya-t-il ensuite, provoquant une nouvelle vague de plongée sur les parchemins. « Vous n'avez pas besoin de retenir pourquoi le seizième état est discuté puisque vous ne savez pas encore ce qu'est une 'transition'… Votre camarade aime à faire étalage de ses connaissances… finalement », ajouta-t-il à l'intention des têtes penchées devant lui.

Harry sentit la colère monter en lui et il vit sa plume trembler dans sa main. Ron lui glissa :
« Mais quel salaud, quand même… tout juste cinq points ! Tu fais le cours à sa place et… »

« M. Weasley, vous pouvez ME poser vos questions, vous savez ? A moins que ça ne soit pas une question ? Je vous retire deux points pour bavardage intempestif ! »

Harry vit Ron pâlir et il se retint de soupirer. Il savait qu'il n'y avait qu'une seule manière de calmer Severus Rogue : accepter ses remontrances en silence. Il y avait toujours une chance qu'il cherche en fin de cours à rendre les points qu'il avait injustement pris. Et c'est exactement ce qui se passa. Quand ils eurent fini de recopier tous les éléments écrits au tableau et de prendre en notes les commentaires de Rogue, celui-ci commença à faire le lien entre ces définitions théoriques et les quelques potions qu'ils avaient déjà fabriquées. Cette fois, Harry leva la main à chaque fois qu'il posa une question, et Severus lui donna la parole plusieurs fois. Quand ils sortirent du cachot, leur compte de point était redevenu largement positif !

« Vraiment… c'est incroyable comment il te traite ! Tu devrais le dire à ton père », protesta Dean Thomas une fois qu'ils furent remonter au rez-de-chaussée.

« C'est vrai, tu savais tout ! », renchérit Neville – une note d'admiration dans la voix.

Harry haussa les épaules.
« Oh, il les a rendu, ces points… et puis c'est de ma faute, j'aurais du comprendre plus tôt qu'il voulait montrer qu'il m'a appris des choses… Moi, qui avais peur qu'il me reproche de frimer !… On sait jamais vraiment avec lui… »

Hermione lui lança un regard perçant.
« Tu n'as pas l'air de lui en vouloir ! »

« Non », admit Harry. « Il est comme ça en cours, je le sais. C'est tout ».

« A t'entendre, en dehors il te ferait des cadeaux et t'appellerait Harry ! », lança Parvati avec dérision.

Harry sourit sans répondre. Se faire l'avocat du maître de potion était quand même une entreprise perdue d'avance ! L'attention de tous fut heureusement détournée par une flèche en robes bleues aux cheveux noirs qui se rua sur lui

« Harry, Harry ! Je mange avec vous ! Papa a dit oui ! C'est trop classe, non ! Salut Ron ! Salut les autres ! Tu me présentes ? »

Harry sourit avec indulgence - un sourire de grand frère.
« Bon, pour ceux qui l'ignore encore, voici Cyrus, mon petit frère… »

« Pas si 'petit' que ça Harry, quand même ! »

L'interpelé leva les yeux au ciel, les autres rirent franchement.
«Donc, Cyrus, mon pas-si-petit-frère, Parvati, Neville, Dean, Hermione… et Ron, que tu connais déjà ! » - dit-il en désignant chacun des camarades qui l'entouraient. « Tu manges vraiment avec nous ? »

« Hé Harry, je vais pas mentir ! Tu crois que j'ai envie qu'IL vienne me chercher devant TOUT le monde ? J'suis pas cinglé ! Il est là-bas, regarde ! »

Harry tourna la tête et vit leur père et Rogue qui se tenaient devant la grande cheminée de Poudlard. Ils devaient attendre du monde. Remus, de loin, lui fit un grand signe affirmatif de la tête. Harry lui sourit. Il était content que Cyrus vienne avec eux ! Son bavardage permanent, ses idées dangereuses et ses blagues lui manquaient ! Lupin avait essayé depuis la rentrée de contenir Cyrus, en partie pour laisser Harry développer des relations dans son groupe qui n'impliquent pas automatiquement son 'petit frère' – et aussi pour pousser Cyrus à faire d'autres rencontres. On avait ainsi vu le plus jeune fils Lupin fréquenter assidûment la table des Serdaigles et des Poufsouffles – puisque celle des Gryffondors lui restait interdite.
« C'est pas juste » avait-il essayé un soir. « Peut-être » avait répondu Remus olympien « mais tu peux aussi choisir de rester avec moi. » « Tu parles d'un choix ! » - avait-il boudé. « Oh ? » - s'était moqué son père adoptif, « et moi qui croyais que Severus était le SEUL à te comprendre!»

« Tu sais qui vient ? » - demanda Harry en se tournant vers son frère.

« Ombrage et Diggory », répondit Cyrus, ouvertement content de détenir des informations confidentielles.

« Ombrage ! Cette vieille bique ! » - s'exclama Ron.

« Avec Diggory ? » - s'étonna Harry. Depuis quand la sécurité et les services scolaires du Ministère venaient-ils ensemble à Poudlard ? Hum… la seule idée qui lui venait en tête ne pouvait pas être exprimé à haute voix. « Enfin, tant mieux, puisque te voilà avec nous ! » conclut-il pour changer de sujet.

oo

« Mme Ombrage, nous étions d'accord pour garder cette conversation pour plus tard », essaie –presque timidement !- Diggory.

Eh bien, elle doit en avoir du monde derrière elle pour qu'il prenne autant de gants ! - songea Remus, ne laissant à son habitude rien paraître de son inquiétude. Il avala posément sa bouchée de ragoût, but un peu de jus de citrouille avant de répondre de sa voix la plus tranquille.

« Au point on nous en sommes, mon cher Amos, il semble que ma vie privée soit devenue une affaire publique. Vous êtes donc venu uniquement pour en savoir plus sur ma femme, Madame Ombrage ? »

« Hum… eh bien… hum… je ne voudrais pas… »

Remus continua de la dévisager tranquillement. Minerva eut un petit sourire de contentement. Lupin était maintenant tout à fait capable de tenir tête à tous ces gens du Ministère. Dans un flash, elle revit le petit Gryffondor maladif de première année qui essayait de cacher sa différence. Quel chemin parcouru !

« Hum… mais… hum… je pense que certaines… hum…personnes de votre équipe se posent certainement… hum… les mêmes questions que nous… »

Lupin attendit encore avant de répondre.
« Vous croyez Mme Ombrage ? »

Il laissa son regard circuler sur les professeurs réunis autour de la table. Ils étaient presque tous là, Minerva, Severus, Flitwick, Chourave, Brulopot… même Quirrell - avec le ridicule turban qu'il avait adopté pendant les vacances ! Hagrid avait pris prétexte de traces bizarres dans la forêt pour échapper au dîner officiel et Sybil Trelawney était, comme toujours, cloîtrée dans sa tour dans l'attente d'une révélation. Il lisait plus de sympathie que de curiosité dans leurs yeux, mais la partie ne se jouait pas seulement à Poudlard.

La secrétaire à l'Education de Fudge eut un petit sourire crispé : « Vous pouvez…hum… bien sûr… choisir… de vous taire… »

« Pour l'instant, n'est-ce pas ? Mais si je ne suis pas un gentil garçon… » - ajoute mentalement Remus. Il vit Amos blêmir. Elle allait visiblement trop loin pour le consensuel Diggory ! Lupin fit semblant de réfléchir un instant puis murmura une incantation et fit apparaître d'un coup de baguette négligeant un album relié de cuir beige. Tous les regards étaient sur lui.

« Tenez Madame Ombrage… voici, ce que vous voulez savoir… mon mariage, mes vacances… mes fils… les dix dernières années de ma vie… »

Il lui tendit l'album d'un geste un peu raide. Elle le prit avec une surprise visible mais l'ouvrit rapidement avec une curiosité non dissimulée. La première page montrait un jeune couple – costume moldu blanc, robe en crochet, fleurs rouges - devant une église en terre rouge. Mariage. Ipanema. Octobre 1980. Ombrage leva un regard suspicieux vers lui avant de tourner la page. La même jeune femme, très brune, les yeux noirs et un nez aristocratique, y souriait dans un portrait qui s'arrêtait sur de belles épaules dénudées. La légende est encore plus laconique. Laelia, octobre 1980. Sur la page suivante une photo abîmée comme si elle était restée longtemps dans un portefeuille avant d'être collée dans l'album. La même femme, à peine plus mince peut-être, les cheveux plus courts, tient dans ces bras un bébé minuscule. Laelia et Cyrus, Juin 1981.

Ombrage toussote et fait passer l'album à Diggory qui hoche la tête un peu nerveusement.
Sur la page suivante, un tout petit garçon nu sur une plage…Cyrus, Bahia, Août 1983. Diverses pages, diverses photos de Laelia ou de Cyrus dans différentes poses. Soudain un portrait posé des trois, vêtus de pulls irlandais. Dublin, Août 1985.

« Elle… elle était ethnomage – ça doit bien figurer quelque part dans votre dossier… Elle venait souvent en Europe pour son travail, des conférences scientifiques… Nous nous retrouvions à chaque fois… je m'occupais de Cyrus ». Remus a commenté sobrement, sans la regarder, comme si l'émotion était trop forte, et tous les professeurs ont lancé des regards indignés vers les deux envoyés du ministère.

Nouvelle page. Un autre petit garçon. Tout aussi brun mais avec des lunettes et des yeux verts. Il tient la main de Remus qui porte des robes professorales. Harry à Poudlard, Décembre 1985. Les pages suivantes sont pleines d'Harry – dans sa chambre, avec Minerva, avec Albus, ouvrant des cadeaux, riant dans les bras d'Hagrid… Ombrage les tourna plus rapidement. Nouveau portrait de groupe : Laelia, Harry et Cyrus, Pise, Juillet 1986. Ils sourient tous les trois, la tour derrière eux penche… Les pages se succèdent et montrent Harry, Cyrus, Lupin et Laelia, ensemble ou séparés… le premier jour d'école de Cyrus, décembre 1988 - la robe de l'uniforme est blanche et porte un écusson où l'on peut lire Brasilia… Le premier match de Quidditch où Remus aurait emmené les deux garçons, Glasgow, mai 1989… Harry à Trafalgar Square, octobre 1989…Cyrus et Harry, Stonehenge, avril 1990… Les cheveux de Laelia poussent ou raccourcissent… elle porte des robes très ajustées ou des tenues de travail poussiéreuses… Elle sourie toujours… La dernière photo où elle figure, elle pose devant une maison à colonnade, un bras autour du cou de Cyrus. Manaus, octobre 1990.

« La dernière photo qu'elle m'a envoyée… un mois avant sa mort », murmura Remus, livide.
Ombrage ferma l'album. « Vous connaissez les restrictions auxquelles sont astreints les loups-garous… nous n'avons jamais pu vivre ensemble… c'était trop de contraintes pour eux…» La voix est plus ferme mais d'autant plus glaciale.

Diggory hocha la tête. Minerva écrasa furtivement une larme. Fltiwick fit remarquer que le repas est presque terminé et que les cours allaient reprendre. Severus se leva précipitamment en annonçant qu'iil s'en occupe. Ombage fit une grimace, toussota, mais contre-attaqua quand même. Il fallait lui reconnaître cette pugnacité, songea Remus.

« Ces photos montrent bien sûr que…hum… Cyrus ressemble… hum… beaucoup à sa…hum…mère… mais vous savez quelles sont les rumeurs… »

Remus s'autorisa un regard ironique.
« Vous me proposez de jeter mon album de famille en pâture à la presse ? »

« Non… enfin…hum…pas pour l'instant… hum…simplement… les gens se demandent… »

« Les gens ? »

«Sérieusement…hum… professeur, Sirius Black connaît-il …hum…l'existence de cet enfant ? »

« Il était déjà en prison quand il est né. » Voilà qui est presque vrai… quand nous avons eu cette idée, il était encore en prison…

« Mais il connaissait … hum….Laelia ? »

« Oui… il était là à notre mariage… Je n'ai pas conservé la photo.. »

« Bien sûr, bien sûr », interrompt Diggory.

Ombrage eut un regard entendu.
« Vous êtes sûr de… hum… «

« …d'être le père ? » coupe sèchement Remus.

« Je veux dire le père naturel. »

« …naturel ? » Eh bien, ce n'est pas très gentil pour Severus ça ! Je suis certainement le père le moins naturel que cette terre ait porté récemment, gloussa intérieurement Lupin pour faire retomber la pression qui l'écrasait.

« Enfin…vous… »

« Écoutez, Madame Ombrage, je SUIS le père de cet enfant, je n'ai aucune raison de penser le contraire… Si Cyrus ressemble au souvenir que certain ont de… Black », il a volontairement trébuché sur le nom, « jeune, ce n'est pas ma faute, ni celle de Laelia… Voulez-vous que je vous dise que tout le monde les pensait frère et sœur ? C'est d'ailleurs comme ça que nous l'avions rencontrée. »

- Qu'est-ce que tu mens bien sous tes airs de sainte-Nitouche ! - avait l'habitude se moquer Patmol. Remus sourit mentalement : « J'ai même plutôt fait encore des progrès… je finis par me croire moi même ! »

« Professeur, professeur, ce n'est pas un tribunal… Personne ne vous accuse ou vous demande… - Madame Ombrage, je crois que le professeur Lupin a été plus ouvert que nous ne l'espérions…nous nous sommes un peu monté la tête » Digorry essayait passionnément d'en rester là. Ombrage grimaça de nouveau.

« Professeur Lupin, vous semblez minimiser le danger que…hum… que représente Black pour votre … hum… famille, toute votre famille, et….hum… par répercussion pour cette école. Le Ministère est en droit d'attendre votre coopération.. »

« C'est-à-dire ? »

« Si vous saviez des choses que… hum… nous ne savions pas sur.. »

« Méfiez-vous, Madame Ombrage", l'interrompit brutalement Remus. "Je connais ma réputation, mais sachez que la croyance populaire qui veut que ma patience soit sans limite est complètement infondée ! Croyez-vous que je cacherais celui… » Sa voix s'étrangla, et il reprit un ton plus bas, et c'était presque un grondement – le loup n'était pas très loin : « Croyez-vous que j'aurais la moindre pitié ? »

Ombrage a blêmi devant la menace à peine voilée. Diggory prit la parole pour essayer encore une fois de revenir à une conversation plus normale : « Nous étions venus pour…nous pouvons vous proposer de renforcer la sécurité de Poudlard en envoyant des Détraqueurs…. »

« Des Détraqueurs dans une école ! », s'étrangla Minerva. Lupin leva une main pour lui demander de se taire – et aussi pour montrer qu'il restait celui qui dirigeit cette école.

« Mme Ombrage, Amos, je prends bonne note de la proposition du Ministère… je vais la transmettre au Conseil d'administration de l'école… mais je pense connaître leur position… qui est aussi la mienne… Rien ne prouve que l'école ne soit menacée et, pour l'instant, la sécurité des enfants demande au contraire de refuser votre proposition. »

Il s'est levé. La conversation était finie. Tous les professeurs le suivirent.

« Bien, bien, vous êtes meilleur juge », s'inclina Diggory, en les imitant lui , encore assise, avait l'air furieuse. Les élèves, qui ont déjà commencé à quitter la salle, jettaient des regards curieux vers la table professorale.

« Réfléchissez professeur ! » - lança encore Ombrage quelques minutes plus tard avant de la première s'engouffrer dans la cheminée.

« Je ne fais que ça », répondit Remus d'un ton glacial aux flammes qui l'ont remplacée dans l'âtre. Amos lui fit un petit geste d'excuse avant de disparaître lui aussi dans la cheminée.

« Eh bien ! », murmura derrière lui Severus. « On peut dire que les rumeurs sont des choses puissantes ! »

« Les Malefoy sont 'des choses' maintenant, Severus ? »

Le maître de potions haussa les épaules.
« Joli album ! »

« N'est-ce pas… »

« Quand ? »

« Chez Albus…. Dernière semaine de vacances… les garçons ont adoré ! »

« Métamorphose ? »

« Ça reste sa spécialité ! »

« Ne me dis pas que 'Laelia' est Mi… »

« Non ! » Remus étouffe son éclat de rire. « Tonks ! »

« Je me disais aussi… Pas étonnant qu'elle soit si crédible en presque Black »

« Chut ! »

« Allons M. le directeur…. 'Ils sont tous partis'… » - répondit Rogue contrefaisant Lupin.

Celui-ci se retourna doucement vers lui pour lui murmurer d'un ton las.
« Sommes-nous bien sûr d'où sont nos pires ennemis, Severus ? »

ooo

« Serpens sorta ! »
Un grand fracas. Un cri d'effroi…

« Non, Potter, non ! »

« Bouge pas… et il ne te fera rien… »

Quirrell s'arrêta brusquement au milieu du corridor
« Eh bien Quirrell, qu'attends-tu ? »

« Maître… que… »

« Tu ne vas tout de même pas attendre que d'autres professeurs s'en mêlent ! C'est l'occasion que j'attendais ! »

« Mais Maître, il n'est pas seul ! »

« Malefoy ne sera pas un problème…allez ! Je te soufflerai, va ! »

« Maître…je »

« Quirrell… tu ne voudrais pas que je me mette en colère ! »

« Non… comme vous voudrez, Maître », souffla le professeur de défense contre les forces du mal en allongeant instantanément le pas.

Il déboucha dans une ancienne salle de classe désaffectée. Ni Potter, ni Malefoy n'auraient dû se trouver là… Ils se faisaient face, sans bouger, très pâles tous les deux. Potter laissait sans discontinuer échapper des sifflements qui semblaient contenir la vipère qu'il avait fait apparaître… Malefoy était visiblement pétrifié. « Interviens ! »

« Finite Incantem », lança Quirrell d'une voix assez ferme. Les deux garçons sursautèrent et pâlirent un peu plus. « Vos baguettes », ajouta l'homme enturbanné.

Aucun des deux gamins - malgré leur pédigree respectif, n'osa contester son autorité. Quand il s'approcha d'Harry pour le désarmer, Quirrell découvrit qu'un troisième garçon était dans la pièce, collé contre un pilier. L'enfant leva instinctivement vers lui un regard d'abord curieux – qu'une once d'inquiétude finit par voiler.

« Oh, mais qui vois-je ! C'est Monsieur le directeur qui va être content, ses deux fils contre le jeune Monsieur Malefoy », lança Quirrell.

Le regard de Cyrus alla sur Harry qui grimaça mais ne dit pas un mot.

« Ils m'ont attaqué », commença Malefoy plaintivement.

« Menteur, TU m'as attaqué et Harry m'a défendu ! » , gronda Cyrus immédiatement.

Quirrell vit Harry lui lancer un regard d'avertissement. « Débarrasse-toi du plus jeune », ordonna son Maître.

« Il a jeté un serpent sur moi ! » - insista le jeune Serpentard.

Ignorant ses jérémiades, Quirrell se tourna vers Harry pour lui demander :
« Alors comme ça, vous êtes fourchelangue M. Potter-Lupin ? »

« Oui », admit simplement Harry.

Son cœur battait dans ses oreilles. Malgré l'intervention de Quirrell, il se sentait victorieux ! Un mois et demi ! Il avait tenu un mois et demi avant de se battre contre Malefoy… Il avait l'impression d'avoir établi un record…Vu les provocations constantes qu'il avait du avaler… Et il avait eu le dessus !

« Et votre père le sait ? »

Harry tourna la tête vers lui avec surprise : « Bien sûr ! »

Le professeur le dévisagea longuement sans qu'Harry puisse décider ce qu'il semblait en penser.

« Et c'est lui qui vous a appris des sortilèges aussi… aussi intéressants ? » Comme les mots venaient facilement quand son maître les lui soufflait. Comme Quirrell se sentait puissant à ces moments-là ! Envolée sa timidité maladive ! Envolée son indécision !

Harry grimaça. C'était exactement la limite de sa victoire, il le savait bien. Il doutait que Remus apprécierait son choix. Il n'avait pas fait que se défendre, il avait attaqué… avec un sortilège pour lequel il disposait d'une écrasante supériorité puisqu'il pouvait diriger le serpent créé ! Son père voudrait aussi savoir comment il avait appris une chose pareille, et il devrait avouer avoir fouillé dans les livres de la Réserve en se servant de sa connaissance intime du château et à des heures où il aurait dû dormir… Non, ça ne serait pas une conversation facile…

« Non, monsieur ». Pas la peine d'ajouter un mensonge à la liste déjà trop longue de ce qui lui serait reproché…

Quirrell le dévisagea de nouveau sans rien dire, puis se tourna vers Cyrus.
« Vous pouvez partir… Nous allons dire que nous avons là une affaire purement scolaire… »

« Mais… » - commença Cyrus.

« Et vous n'avez pas besoin de raconter cela à quiconque ! » - ajouta sèchement Quirrell.

Malefoy et Harry levèrent la tête en même temps : Quirrell n'allait-il pas les amener à leurs directeurs respectifs ? Pensait-il que Minerva ou Severus tairaient un tel évènement à Lupin ?
Les sourcils froncés, Cyrus ouvrait la bouche pour répondre, mais Quirrell reprit avant qu'il n'ait le temps de dire quoique ce soit…

« Vous aimez bien votre grand frère, n'est-ce pas M. Lupin ? Alors rendez-lui service, faîtes donc ce que je vous demande ! IMMÉDIATEMENT ! »

Avec un dernier regard de doute à tous les protagonistes de cette conversation et un haussement d'épaules fataliste, Cyrus murmura : «Comme vous voudrez, professeur Quirrell...» Comme il allait quitter la pièce, il se retourna néanmoins pour ajouter d'une voix plus forte : « Mais rappelez-vous que c'est Drago qui a commencé ! »

oooo

Je crois que je vais laisser la suite pour plus tard… un méchant cliffhanger…