Entre Lune et Étoile
Disclaimer : Ah, si tout ça était à moi….
Merci à Dina pour la relecture finale...
35 – Cadeaux de Noël
Il avait beau prétendre parfois avoir besoin de s'éloigner, Remus était content d'être de retour à Poudlard. Il était toujours finalement content de revenir à Poudlard. Étaient-ce les vieilles tours tortueuses qui lui manquaient quand il en était loin ? Étaient-ce le lac, la forêt, les élèves, les fantômes, les elfes dévoués? Il n'aurait pas su dire. Mais quelque chose, ici plus qu'ailleurs, l'apaisait et lui donnait conscience de sa force.
Pourtant Remus avait aimé ce séjour à Dublin, ne serait que pour ce temps passé avec Cyrus – il garderait l'image de ses yeux brillants quand il avait cédé à presque tous ses caprices dans la boutique des supporters de l'équipe irlandaise de Quidditch ou quand ils avaient applaudi la victoire de la même équipe dans le stade surchauffé. Des moments partagés, légers, dans arrières pensées, qui donnaient un sens nouveau à leur relation. Père et fils, pour un temps indéfini, mais avec plus de simplicité.
Cette semaine, leurs relations étaient enfin devenues plus simples, plus spontanées… Peut-être parce qu'il n'y avait pas autant de public et que lui, Remus avait un peu baissé sa garde. Mais surtout, parce qu'il avait trouvé une façon de repousser les questions inutiles : «Ce corps s'appelle Cyrus et il a des besoins d'enfant, et je suis le seul père disponible ». Une fois pour toute.
« C'est plus simple sans doute parce que l'identité de Sirius s'efface », disait Severus, moins simplement. Remus sourit un peu tristement. Si ça pouvait lui faire plaisir. Son impression a lui, au contraire, c'est que Cyrus était de plus en plus… Sirius. Il avait remarqué qu'ils ne tenaient presque plus de conversations intérieures. Et lui pensait qu'ils n'en avaient plus besoin, qu'ils pensaient maintenant « à quatre mains », les expériences de leurs deux personnalités s'entremêlant…
Cyrus le considérait comme son père – clairement – ; il avait besoin de lui, mais il avait aussi une connaissance intuitive de ses mécanismes de pensée qui dépassait maintenant celle de Harry… Et Remus y voyait le mélange des besoins de l'enfant et de ce que l'adulte savait du fonctionnement des hommes et d'un certain Lupin en particulier… Sans doute les frontières entre les deux psychés s'amenuisaient mais ce n'était pas au détriment de l'un ou de l'autre… Il en avait l'intime conviction.
Il n'avait pas appris ça à Dublin mais il l'avait accepté, intégré, avait cessé de douter. Ça avait peut-être à voir avec l'étrange lumière de cette ville - quelque chose dans l'air éblouissait et donnait l'impression, qu'à la manière de Venise, elle était construite sur l'eau… C'était peut-être à cause de l'autre personne qui l'avait accompagné à Dublin : Tonks, avec son grand sourire un peu timide, ses changements physiques permanents et l'air professionnel qu'elle prenait pour lui raconter ce qu'ils avaient fait, Cyrus et elle, pendant toute la journée… Par sa seule présence tout semblait plus simple et plus lumineux à Remus, c'était un fait.
Il avait même bien aimé voir Dumbledore négocier le redémarrage de la coopération scolaire magique et y être partie prenante. Non vraiment, il revenait satisfait de ce qu'il avait fait et des perspectives qui s'offraient à lui.
Il avait moins aimé – comme toujours - les questions des journalistes et leur insistance à tout mélanger. Ils commençaient par lui parler du Tournoi des trois sorciers – « Vous ne craignez pas, professeur, que les parents s'inquiètent du redémarrage d'un tournoi si dangereux ? » –, pour poursuivre sur les rumeurs comme quoi Cyrus était le fils de Black – « Excusez-moi, j'ai dû rater une question ? Quel rapport avec la coopération internationale ? » -, quand ce n'était pas son avis sur l'éventuelle, toujours démentie, évasion de Black – « On vous a mal renseigné, Mme Skeeter, je suis le directeur de Poudlard, pas celui d'Azkaban… »
Remus inspira profondément pour chasser l'agacement que lui provoquait ces souvenirs et revint vers le château. Sous ses pieds, la neige rose sous le soleil levant crissait doucement. Il s'était levé avant le soleil, avec le besoin physique de faire le tour de son domaine, de son territoire, comme le loup qu'il était… Poudlard était son territoire, son refuge, son horizon.
Les premiers rayons de l'aube attrapèrent le pin's en forme de trèfle clignotant, l'emblème de l'équipe d'Irlande, que Cyrus avait épinglé avec autorité sur sa cape – et sur celles d'Harry, de Ron, d'Hermione, de Lee, de Fred, de George, de Justin… Le club des amis de Cyrus à Poudlard ! - sourit-il avec bienveillance.
La seule véritable ombre au tableau était l'angoisse palpable et incommensurable d'Harry. Il sentit son cœur se pincer. Quelque chose lui échappait dans cette histoire. Ce n'était pas seulement de la jalousie enfantine. Sans doute un peu mais il savait qu'Harry aimait sincèrement Cyrus pour lui-même. Ce n'était pas seulement la déception de ne pas avoir assisté à une semaine de matchs amicaux entre les meilleures équipes européennes de Quidditch… Il était assez grand pour comprendre qu'il ne pouvait pas l'emmener en pleine année scolaire. Ce n'était pas seulement les piques de Malefoy – Minerva lui avait rapporté que Harry les avait très stoïquement ignorées. Remus s'arrêta et regarda la tour de Gryffondor.
C'était étonnant qu'Harry et Malefoy n'aient pas encore fait plus que s'affronter verbalement. Il ne pouvait pas dire qu'il était déçu – Harry se retenait sans doute à cause de lui, et la conversation avec Lucius aurait été aussi agréable qu'à l'ordinaire… Non, il n'était pas pressé mais cette confrontation lui semblait dans l'ordre des choses, dans le caractère d'Harry comme dans celui de Drago… Oui, Harry lui échappait… De tout ce trimestre, il n'avait eu que des conversations de couloir avec lui, superficielles ou formelles… Presque à chaque fois qu'Harry était venu le voir un dimanche après-midi, il était arrivé accompagné de Ron et Hermione. Remus avait ainsi découvert, avec une affection mêlée d'un peu de crainte, l'intelligence aiguë de la jeune fille née moldue. Il avait aussi senti et apprécié la loyauté sans faille de Ron. Mais il avait regretté, après coup, que Harry n'ait pas été seul parce qu'il avait eu la désagréable impression que son fils se cachait derrière ses camarades. Minerva lui avait confirmé qu'il était très secret - très populaire, très sociable mais très réservé sur ses sentiments. Severus avait reconnu qu'il n'avait pas eu une conversation, seul à seul, avec lui – «J'ai failli l'autre jour le mettre en retenue pour arriver à lui parler… et puis je n'ai pas trouvé de motif… Ne ricane pas bêtement, Lupin ! Il ne me donne même pas une mauvaise raison de lui parler ! »
Ce n'était peut-être qu'une crise de croissance, une bouffée d'adolescence, un besoin de recul et de liberté… c'était peut-être plus grave….
« Ce soir », murmura Remus, comme une promesse à Harry, «ce soir, ce sont les vacances!»
oo
« Ils vont te manquer, hein ? », souffla une voix à l'oreille de Harry alors que le Poudlard Express disparaissait de sa vue.
« Quoi ! Oh, Papa… Tu m'as fait peur ! », sursauta Harry en se retournant vers son père.
Remus se contenta d'un sourire amusé et passa son bras sur ses épaules – la première fois depuis des mois en fait, songea brusquement son fils.
« Eh bien, moi, je suis content de t'avoir un peu pour moi et d'arrêter de faire semblant de ne pas te voir », avoua l'adulte doucement
« Tu fais ça bien, faut dire ! », répondit Harry. Mais la boutade sonna plus amère qu'il l'aurait voulu.
« Hum… ferai-je ça trop bien ? », demanda très sérieusement Remus qui s'était instantanément raidi.
Harry haussa les épaules.
« On n'a pas vraiment le choix… » - commenta-t-il prudemment.
« Sérieusement, Harry, tu sais que tu peux… »
« Ça va, Papa, ça va… La plupart du temps, ça va », l'interrompit vivement son fils qui ne tenait pas vraiment à cette discussion.
Remus prit son temps pour répondre, et Harry eut tout de suite la certitude qu'il n'allait pas laisser tomber. Quand il réfléchissait comme ça, on pouvait être sûr qu'il n'allait pas laisser tomber. De fait, il se tourna vers lui et lui prit les épaules pour plonger son regard dans les yeux d'Harry.
« Bien. Minerva a donc raison», constata-t-il. «Harry, je m'excuse de ne pas avoir pris le temps de t'écrire depuis Dublin. Je suis sincèrement désolé si Malefoy et sa bande ont insinué que je pouvais préférer Cyrus à toi - Bravo d'ailleurs d'être resté si calme ! D'autres ne l'auraient pas été… Sincèrement, je n'avais même pas pensé aux proportions que ça allait prendre… aux journalistes, et tout ça…»
Harry hocha la tête, tenté par le sourire. Remus ne changerait jamais. Jamais il ne prendrait quoique ce soit à la légère. Juste après la tentation fut forte de poser tout à trac toutes les questions qu'il avait accumulées sur le troisième étage, la pierre philosophale et la soi-disant expérience secrète en cours… De demander où étaient les livres sur Flamel et pourquoi Quirrell semblait tellement en dehors de l'équipe de Poudlard, aussi…De se libérer de ce poids et de se laisser convaincre par les explications claires et tranquilles de Remus.
Mais il aurait fallu raconter trop de choses qu'il espérait encore secrètes – il avait bien noté que Minerva avait prévenu Remus de son humeur… L'avait-elle informé d'autres choses ? Savait-elle d'autres choses ? Harry préféra donc se taire et retrouver ses veilles habitudes : coller son front sur l'épaule de son père – pour la première fois, remarquèrent-ils tous les deux, il devait baisser sa tête pour le faire ! Lupin répondit en le serrant très fort dans ses bras.
« Je sais que tu n'aurais jamais pu m'emmener… Je sais que tu ne préfères pas Cyrus à moi... J'ai juste pensé, un instant, quand vous ne rentriez pas, que vous aviez retrouvé…le Rat… » - reprit doucement Harry, après un moment.
« Jamais, tu entends jamais, je n'aurais omis de te prévenir si cela était arrivé », affirma très sérieusement Remus. Harry le gratifia de son premier sourire.« Allez viens… Cyrus doit nous attendre quelque part ! ».
Ils retournèrent en marchant vers Poudlard, parlant assez légèrement du trimestre qui venait de s'écouler, de la colère de Severus contre les jumeaux - qui avaient enchanté les craies du cachot pour que les lettres des mots s'emmêlent entre elles. Ça durait depuis une semaine et Remus confia à Harry qu'il avait du intervenir personnellement – ce qu'il faisait rarement pour des histoires de discipline - pour qu'ils ne soient pas renvoyés. « Heureusement que j'ai réussi à les convaincre de lever leur charme ! », conclut-il en souriant. Ils parlèrent encore de Noël qu'ils passeraient à Poudlard, des excellentes notes d'Harry, d'Hermione et Ron qui étaient les meilleurs amis du monde… Ils arrivèrent ainsi à la grille du parc, où la haute stature de Hagrid les accueillit avec un signe de la main. Harry distingua tout de suite la frêle silhouette de Cyrus à ses côtés.
« En voila un qui brûlait de vous rejoindre ! » - commenta le garde-chasse quand ils furent à portée de voix.
« Merci, Hagrid » - commenta en souriant Remus. « Cyrus a toujours un peu de mal avec les limites… »
Harry pouffa quand son petit frère fit la moue - sans protester néanmoins, nota-t-il. Il pensa pour la première fois qu'il savait peu de choses de l'évolution des relations entre Cyrus et Remus ces derniers mois. Mais il n'eut pas le temps de s'interroger plus.
« Allez, venez tous les deux, nous avons de bagages à faire ! » - continua le directeur de Poudlard avec bonne humeur.
« Mais je croyais qu'on devait rester ici toutes les vacances ! » - s'étonna immédiatement Cyrus. Et Harry fut honteusement content de sa surprise - son petit frère avait beau écouter aux portes et partager le quotidien de Remus, il ne savait pas tout !.
« Disons que j'ai usé de mon charme et de mon autorité pour faire accepter de Severus et Minerva, une escapade de quatre jours qui commencent ce soir ! », répondit Remus léger et souriant. Deux paires d'yeux brillants accueuillirent ces paroles qui promettait un Remus disponible et de vraies vacances. « J'ai pensé que comme je n'avais pas encore tous mes cadeaux de Noël, nous pourrions retourner à Dublin chercher cette broche qui plaisait tant à Tonks… »
« Tonks était avec vous à Dublin ? » - s'étonna Harry, moins content d'apprendre cette nouvelle précision sans savoir pourquoi.
« Pour son entraînement pratique, elle est garde du corps de grand-père maintenant », expliqua assez fièrement Cyrus.
« Et je l'ai invitée à passer Noël avec nous… » - ajouta, un peu rapidement peut-être, Remus.
« On pourra retourner à la boutique de l'équipe d'Irlande ? », l'interrompit immédiatement Cyrus. «Harry l'a pas vue ! »
Lupin hocha la tête en riant. « Quelle question ! »
ELEoELEoELEo
« Tu a vu comme elle a aimé son cadeau ! »
« Qui ça ? »
« Eh b'en Tonks ! », répliqua Cyrus avec un geste d'agacement.
Harry leva les yeux de l'énorme Véritable et Unique Encyclopédie Magique Universelle, un somme de références que venait de lui offrir Minerva – un des ennuis de grandir était qu'on recevait beaucoup plus de livres que de jeux ! - avait-il pensé en déballant ses cadeaux ce soir là. Mais il n'avait pas moins pas lâcher l'Encyclopédie depuis qu'il l'avait ouverte.
« Tu as fait un cadeau à Tonks ? »
« Non… J'aurais pu d'ailleurs ! Heureusement qu'elle était là à Dublin… avec tous ces vieux croûtons ! Mais je parle du cadeau de Papa ! »
Harry fronça les sourcils en essayant de se rappeler. Tonks avait visiblement paru touchée de l'attention de Lupin. Ses cheveux avaient pris immédiatement une couleur écarlate « jurant horriblement avec les délicates pierres violettes de ce remarquable bijou », avait remarqué Dumbledore avec ce calme moqueur qu'il affectait parfois.
Une telle remarque n'avait pas aidé la jeune femme à se reprendre, et ses cheveux avaient encore pris douze nuances de rouge avant de revenir à leur noir nuit qu'elle avait choisi ce soir-là. Remus avait toussé légèrement. Mais bon, Tonks pouvait changer instantanément d'apparence, tout le monde le savait, et Harry ne voyait pas ce qu'il y avait à ajouter.
« Je ne comprends pas. »
«Enfin, Harry !», répliqua le plus jeune les yeux au ciel. «Et quand je pense que c'est toi l'aîné!»
L'interpellé étudia longuement son jeune frère avant de reprendre avec précaution.
« Qu'est-ce que tu essayes de me dire, Cyrus ? »
« Moi ? Rien… visiblement, tu ne comprendrais pas »
« Attends, tu veux dire que Pap… »
« Écoute, Harry, j'y avais déjà pensé l'été dernier à Londres, je les ai observés pendant une semaine à Dublin et… »
« Et quoi ? »
« Et Sirius est d'accord avec moi », souffla le jeune garçon.
Harry déglutit péniblement. Cyrus invoquait rarement l'avis de son double adulte et en la matière c'était tout de même le meilleur jugement auquel ils pouvaient avoir accès.
« Il…il pense que c'est… sérieux ? » - balbutia Harry, levant un peu nerveusement la tête pour vérifier que tous les adultes s'étaient bien éloignés du sapin.
« Sérieux ? Mais qu'est-ce que t'es pénible, toi, dis donc ! Est-ce que tu vois Papa être autre chose que sérieux quand il offre à une fille un bijou qui coûte 400 galions d'or ? »
Harry ne sut pas quoi répondre. Cyrus semblait très excité par l'idée. Et si lui aimait bien Tonks, sa légèreté et sa loyauté, il avait du mal à l'imaginer en adulte à part entière. Il se souvenait encore trop bien de l'élève un peu garçonne et rebelle à Poudlard... Il avait du mal aussi à imaginer Remus amoureux... Heureusement, constata-t-il, l'attention de Cyrus s'était déjà détournée de cette étrange conversation.
« Hé Harry, c'est quoi ce paquet qui reste sous le sapin ?»
« Quel paquet ? »
« Là... à coté de toi…. un petit paquet vert !
« Ah, c'est vrai ! »
Harry qui était le plus près de l'arbre tendit la main et saisit un petit paquet plat, étrangement lourd vu sa taille. Le papier vert métallisé qui le protégeait avait des reflets qui formaient presque des serpents, pensa-t-il un instant. Il retourna le paquet et vit s'envoler un bristol blanc qui portait un nom calligraphié avec soin : Cyrus. Pas de signature, rien, qui puisse authentifier l'auteur.
« C'est pour toi », murmura Harry.
«Pour moi ?» Très excité, son frère vint le rejoindre en un bond. «Fais voir ? Qui ça peut-être?»
Harry haussa une fois de plus les épaules – Minerva, Albus, Tonks, Severus, et Lupin se tenaient de l'autre coté du salon, des verres de cherry à la main et discutaient paisiblement. Nul doute que personne de cette petite bande n'aurait oublié de donner un de ses cadeaux… Mais Cyrus déchirait déjà le papier révélant un petit miroir en argent, dont le cadre était orné de serpents entrelacés très précisément ciselés. L'objet paraissait très ancien, très coûteux. Dès qu'il fut dégagé de son emballage, les serpents se mirent à grouiller. Harry se demanda pourquoi il avait l'impression de les avoir déjà vus.
« Qu'est-ce que c'est ce truc ? », bougonna Cyrus, un peu déçu visiblement.
« Une admiratrice qui voudrait que tu te peignes mieux » essaya Harry.
« Parles pour toi ! Hé ! Mais, on voit quelque chose dedans »
« C'est un miroir, Cyrus ! »
« Mais regarde, Harry, regarde ! » Il tourna le miroir vers son frère, sans le lâcher, et Harry put voir apparaître dans le cadre l'intérieur d'une maison qu'il ne connaissait pas. On aurait dit un château ou un manoir. Les plafonds étaient très hauts, les tentures semblaient très anciennes et elles étaient elles aussi ornées de Serpents. « C'est sûrement un miroir magique ! » ajouta le plus jeune.
L'expression déclencha un signal d'alarme dans la tête d'Harry.
« Il ne faut pas toucher un objet magique dont on ne connaît pas la provenance, Cyrus ! »
« Arrête un peu ta parano, tu veux ! Hé, regarde, y'a quelqu'un qui vient ! »
Harry se leva pour venir derrière son frère et il vit comme lui une femme s'approcher. Elle était couverte de voiles noires et on ne pouvait pas distinguer ses traits.
« Harry, Harry », souffla tout d'un coup Cyrus d'une voix précipitée « Sir…us… dit qu'il faut que je le lâche…tout de suite ! »
« Eh bien, fais-le ! »
« Peux pas », articula péniblement l'enfant, ses mains crispées sur le cadre du miroir tremblaient, mais semblaient incapables de se décoller de l'objet. Harry essaya frénétiquement sans succès de lui arracher des mains.
« Papa ! Papa ! Vite ! » - cria-t-il affolé.
Dans le miroir, la femme continuait d'avancer. Elle sembla coller son visage à la surface comme s'il s'était agi d'une vitre et qu'elle pouvait les voir au travers comme eux la regardaient. Elle releva alors très doucement ses voiles noirs. Un visage fin mais ridé apparut. Son nez était busqué, ses cheveux étaient blancs mais elle… Harry en eut un haut le cœur, elle partageait avec Cyrus un air de famille indéniable.
« Papa ! Papa ! » - insista-t-il en continuant d'essayer de décoller les mains de Cyrus du cadre. Du coin de l'œil, il vit Lupin tourner la tête vers eux, faire un pas, puis revenir vers Tonks qui expliquait quelque chose à grands renforts de geste. « Vite ! PAPA ! A l'aide ! »
Mais avant que Remus n'ait traversé la pièce - en soupirant par avance que les enfants auraient pu se déplacer ! -, une voix terrible se fit entendre.
« Enfin, enfin, je te vois. Le fruit de ma chair, le sang de mon sang. Moi qui croyais que j'étais maudite et que tout était terminé… Je te vois et je te reconnais. Nul doute n'est possible. Tu dois venir à moi, Cyrus, tu le dois. J'ai de grands projets pour toi, tu ne seras pas déçu. Viens, viens!»
« Non ! », hurlèrent en même temps Harry et Remus quand Cyrus tendit sa main droite - mystérieusement libérée - vers l'image qui animait le miroir. Harry réussit à l'arrêter avant que la main ne touche la surface du miroir et il sentit Cyrus frissonner. Il vit ensuite ses yeux se révulser et son frère perdre connaissance. Ceci sembla finir de le libérer de l'attraction du miroir qui tomba avec un bruit lourd sans se briser pour autant.
Les autres convives étaient accourus, et Dumbledore se penchait sur Cyrus qui reposait dans les bras de Remus.
« Il respire normalement… Rien d'inquiétant… Nous allons le transporter dans sa chambre », dit le vieil homme à Lupin, livide, qui acquiesça seulement.
Personne ne fit un seul geste tant que la porte ne se fut pas refermée sur eux. Severus fut le premier à se secouer et à s'approcher – prudemment – de l'objet. Il s'accroupit et l'observa en silence. Tonks vint le rejoindre sa baguette à la main. Elle murmura un sort de lévitation et le miroir se retourna sur lui-même.
«C'est signé », déclara-t-elle avec une certaine satisfaction. Tous la dévisagèrent. « Toujours pur», lut-elle à haute voix. « Cet objet appartient à la famille Black »
« De la magie noire… à Poudlard », souffla Minerva visiblement ébranlée.
« Pas vraiment… Ce sont des Miroirs de l'âme - ils permettent de communiquer à deux personnes où qu'elles soient… C'est une spécialité de la famille Black depuis des siècles… Si quelqu'un d'autres que Cyrus l'avait ouvert, il n'aurait vu qu'un miroir », expliqua l'Auror.
« Mais j'ai vu les serpents bouger », lâcha Harry, « et j'ai vu la maison ! »
« Mais c'est Cyrus qui le tenait et lui donnait son énergie », insista Tonks. « Regardez ! »
Avant que quiconque n'ait pu l'en empêcher elle s'était emparée du petit miroir et les serpents qui formaient son cadre s'étaient remis à grouiller. La voix s'éleva de nouveau.
« Nymphadora Tonks, infâme rejeton de ma non moins infâme nièce ! Lâche cet objet qui ne t'est absolument pas destiné ! Et rends-moi mon petit-fils ! »
Avec un petit rire méprisant, Tonks relâcha le cadre de l'objet et la voix – qui continuait de réclamer Cyrus et de la vouer aux gémonies, se fit moins forte.
« Qu'est-ce que je vous disais ? Cet objet est réservé et reconnaît les Black ! Il aurait pu attirer Cyrus à Grimmault place si Harry n'était pas intervenu, mais uniquement lui… Pour tout autre, c'est quasiment inoffensif… Et, il suffit de le placer dans un seau d'eau pure pour laver sa mémoire… »
Joignant le geste à la parole, elle s'empara d'un vase en cristal qui ornait un meuble, jeta les fleurs qu'il contenait par terre et plongea immédiatement l'objet dans l'eau. Harry songea qu'il ressemblait maintenant à une sorte de monstrueux poisson brillant.
« Mais qui a l'autre ? », murmura Minerva.
« Quelqu'un qui a trop l'habitude de voir les autres se plier à ses caprices », soupira Rogue en levant les yeux vers Tonks.
« J'ai toujours pensé que vous adoriez Narcissa, Professeur », confirma celle-ci.
oELEooELEo ELEoo
« Ah, tu es là ! »
Un livre à la main, Harry sursauta comme s'il était en train de toucher un artefact interdit.
« Cyrus ! Tu m'as fait peur ! Tu ne devrais pas te lever, Papa a dit... »
« Papa ! Papa ! Ça fait trois jours que je suis au lit ! Ça commence à bien faire ! » - grommela Cyrus en se laissant tomber dans le fauteuil du bureau. « Et toi, hein, tu devais pas me tenir compagnie ? »
« Je… » Harry haussa les épaules avant de proposer une assez faible excuse selon Cyrus. «Tu dormais…Ça va mieux ? »
« Hum… Si on fait abstraction des hurlements de Sirius contre sa famille, je suppose… »
« Il est furieux ? », s'enquit Harry avec curiosité - qu'est-ce qu'on faisait d'un adulte dans sa tête quand on avait neuf ans et demi ? Ça dépassait un peu sa capacité d'imagination.
Cyrus lui lança un regard qui disait clairement combien la question était stupide, et Harry choisit de rire. « Il est furieux contre toi ! » - comprit-il.
« Hum… Il dit que j'écoute rien… qu'avec moi, on récolte toujours les ennuis… que Remus est trop gentil avec moi… Pfff… Ça lui va bien, tiens ! »
Harry rit de nouveau et se retourna vers la bibliothèque qui couvrait les trois murs de l'alcôve du salon où Remus avait mis son bureau. Oui, plus ça allait, plus il se disait que Cyrus ou Sirius étaient bien une seule et unique personne, juste pondérée par des expériences différentes. Ils s'intéressaient aux mêmes choses – ou presque – ils fonctionnaient de la même manière, avec les mêmes impulsions. Et finalement ils se heurtaient aux mêmes écueils – et c'était sans doute ça qui agaçait Sirius. Pour la première fois depuis longtemps, il fut convaincu que son père aurait partagé ses conclusions.
« Tu faisais quoi ? », demanda son frère adoptif avec un bâillement sonore.
« Je cherche des livres. » Et je suis bien content que Quirrell se trompe, ajouta Harry mentalement. Quirrel est juste jaloux… Faut que j'arrête de penser qu'il peut avoir raison…
« Des livres ? », s'intéressa mollement Cyrus. « Pour tes devoirs ? »
« Non… Des livres… des livres qui ont disparu de la bibliothèque… Hermione et moi, on veut juste comprendre pourquoi », ajouta Harry en cherchant à minimiser l'intérêt de la chose.
« Quels livres ? », questionna assez sèchement Cyrus.
Jamais il n'avait paru si sérieux, pensa Harry un peu surpris.
« Des livres… sur Nicolas Flamel » - lâcha-t-il avec un peu de réticence.
« Une dizaine de volumes ? », demanda après un instant Cyrus avec son regard curieux et sûr de lui qui le caractérisait.
« J'en sais rien… Pourquoi ? »
« Je crois que je sais où ils sont tes livres… »
« C'est vrai ? »
Alors il avait cherché en vain depuis des semaines et Cyrus savait ? Harry eut un léger vertige. Car si Cyrus savait, Quirrell avait sans doute raison…
« Oui. » Aucune hésitation dans le voix de Cyrus mais ses grands yeux calmes et curieux cherchaient à percer ses intentions profondes.
« Alors ? » Harry n'était pas sûr que sa voix tremblât de curiosité ou d'exaspération. S'il savait, qu'il le dise !
« Alors ? », répondit très calmement son petit- frère, « Alors, va falloir tout me raconter mon vieux! »
oooooo
Ce coup-ci, c'est promis, les trolls arrivent, j'entends d'ici trembler les murs de Poudlard….
Mais seulement si vous m'écrivez que vous voulez les voir !
