Le dixième anneau

            6 – Avant les Orcs…

Les Rohirrims qu'Ethelyn accompagnait finirent par arriver.  Elle était toujours à son poste.  Des guetteurs l'avaient rejoint, surveillant l'horizon en vue d'une éventuelle attaque.  Ils lui avaient suggéré de retrouver les autres femmes mais elle avait refusé, montrant son épée, ses flèches et son arc.  Elle savait se battre, comme toutes les femmes du Rohan.  Les femmes étaient initiées à l'art de l'escrime.  Ethelyn n'avait pas été exclue et elle avait eu un excellent professeur, Eomer.  L'anneau, Lumya, était caché dans son corsage. 

Les hommes qui étaient avec elle depuis plusieurs heures finnirent par descendre, remplacés par d'autres.  Ils ne dirent rien à la jeune femme soucieuse qui ressemblait à une statue de pierre, les pieds se balançant dans le vide.

Ethelyn descendit en bas, voir Eowyn.  Elle avait été seule assez de temps, et elle était fatiguée.  En plus de tout ça, le soleil allait se coucher environ trois heures plus tard, mais elle était tannée d'être assise à la même place depuis environ cinq heures et elle avait faim.  Elle descendit donc rapidement.  Eowyn était aux écuries avec d'autres femmes.  La Dame du Rohan l'accueillit avec soulagement en prenant ses mains dans les siennes.

- J'ai cru que tu avais été tuée, dit-elle.

- Mais je suis bien vivante.

- Oui.  Maître Gimli me l'a dit.  Mais je ne savais pas où te trouver…  Mais, heureusement, tu étais en sécurité!  Te revoir me rend heureuse.  J'étais si inquiète!

- Mais ce n'a pas été le cas d'Aragorn, dit Ethelyn en regardant avec tristesse Gayne qu'Eowyn était en train de brosser.  Il est mort.

Ethelyn baissa ses yeux et elle prit la brosse qu'Eowyn avait en main afin de s'occuper de son cheval d'elle-même.  Son cœur lui semblait moins lourd en brossant le poil dru de l'animal.  Le cheval semblait dormir sous les caresses.  Ethelyn brossa sa crinière ébène et tout fut fini.  Eowyn avait prit place sur un tabouret derrière son amie.

- Allez, viens là, dit-elle en désignant le sol devant elle.

Ethelyn s'y agenouilla et Eowyn entreprit de lui tresser les cheveux. 

La jeune Rohirrim devait-elle aller voir Legolas et Gimli pour leur assurer qu'elle allait bien?  Peut-être pas.  D'ailleurs, cela n'intéresserait que Gimli.  Le nain était sympathique et distrayant pour elle.  Il la faisait rire avec ses tresses dans sa barbe rousse et sa grosse voix.  Il avait des rides autour de ses petits yeux noirs et un sourire bienveillant sous son épaisse moustache, lorsqu'il ne se battait pas contre les Orcs.

Mais Legolas…  C'était un elfe désagréable et froid.  Peut-être ne lui faisait-il pas confiance, mais, elle, elle avait confiance en lui, au même titre que Gimli.  La confiance qu'Ethelyn avait pour Aragorn était presque sans limite car il avait été le premier à montrer une amitié.  Une nouvelle amitié humaine parmi les amitiés elfiques.

Les yeux dans le vague, Ethelyn regardait droit devant elle.  Les doigts fins d'Eowyn rassemblaient des mèches de cheveux blonds pour en faire une longue natte.  À environ quatre ou cinq mètres apparut Legolas.  Un homme vint à sa rencontre.  Il avait des cheveux sombres et il avait des vêtements rapiécés et sales.  Eowyn, derrière elle, se leva.  Ethelyn l'imita.  Aragorn!  Il était là!  Il était vivant!

Eowyn et elle se précipitèrent.  Mais Ethelyn sentit Eowyn stopper sa course en voyant Legolas remettre le pendentif d'Arwen dans la main du rôdeur.  Ethelyn n'en eut cure ; elle se jeta dans ses bras.  Il sentait le sang séché et la boue.  Il était vivant…

- Je croyais que vous étiez mort! s'exclama-t-elle alors que les bras d'Aragorn se refermaient sur elle.  Je suis si heureuse!  Je croyais que vous étiez mort!

Aragorn sourit en la berçant doucement.

- Où est-il? rugit une voix.  Où est ce chenapan?

Gimli apparut et il se jeta sur les trois compagnons.

- Ah, ça!  Vous êtes l'homme le plus insensé et le plus chanceux que je connaisse! s'exclama le nain en s'adressant à Aragorn, qui sourit.

- Je prends cela pour un compliment, répondit-il, j'ai eu de la chance d'être encore en vie.

Aragorn serra son pendentif elfique.  Ethelyn comprit alors.  Arwen.  C'était Arwen qui l'avait sauvé.  Elle lui était sûrement apparut en songe et l'avait ramené à la réalité!  Elle pria pour la belle elfe.  Merci, merci, merci! songea-t-elle.  Elle pressentait que l'Havenstar l'entendait.

- Je dois aller voir le roi, dit Aragorn.

- Pourquoi?

- Il y a une armée.  Elle devrait bientôt arriver.

Aragorn échangea un regard avec Ethelyn.  Un regard d'avertissement.  Ethelyn soutint son regard et il partit.

- Qu'a-t-il? demanda Legolas en la regardant.

- Rien, rien…

Ethelyn tourna les talons et elle rejoignit Eowyn. 

- Tu n'es pas allée voir Aragorn?  Pourquoi tu t'es arrêtée?

- Pour rien, répondit Eowyn en évitant son regard.

- Allez!  Tu peux tout me dire!

- Ce collier…  Tu n'avais pas faim, toi?

- Oui!

Ethelyn courut à la suite d'Eowyn qui était déjà partie.  Eowyn n'avait pas voulu dire le fond de sa pensée à Ethelyn, mais ce n'était pas bien grave.  Elle le lui dirait peut-être plus tard.

Ethelyn mangeait avec Eowyn lorsqu'on sonna un cor.  On proclamait dans la forteresse que tous les hommes qui étaient en âge de manier l'épée étaient demandés.  Ethelyn sentit le regard grave d'Eowyn sur elle.  Elle leva les yeux, telle une enfant prise en faute.

- Quoi?

- Ne fais pas encore de folies, l'avertit Eowyn.

Ethelyn croisa les doigts derrière son dos.  Elle ne pouvait rien ne lui promettre.  Je suis désolée Eowyn, songea Ethelyn en continuant son repas.  Une fois qu'elle eut fini, elle se leva et elle quitta la pièce.  Eowyn resta assise.  Ethelyn devait faire quelque chose.

- C'est une armée constituée dans un seul but.  Détruire le monde des hommes.  Ils seront là au coucher du soleil.

Ethelyn était appuyée contre la porte légèrement entrouverte.  Les gardes, de bords et autres des portes, ne lui prêtaient pas attention.  La jeune femme écoutait aux portes.  D'accord, ce n'était pas poli, mais elle devait savoir.

Il y eut un long silence.  Ethelyn sut qu'il n'y aurait pas de suite.  Elle se leva et elle courut à l'autre bout du couloir.  Elle s'enferma dans une pièce.  C'était la pièce d'armements.  Les hommes la dévisagèrent un instant.

- Je ne fais que passer, dit-elle d'une voix confiante.

Les hommes haussèrent les épaules et ils recommencèrent la distribution des armes et des armures.  Ethelyn marcha au travers d'eux et elle ramassa une petite cotte de maille et une armure.  Elle ressortit, silencieusement, tel une ombre parmi les hommes.

Ethelyn, debout devant un miroir ovale, finit de se tresser les cheveux.  Elle les enroula ensuite dans un bandeau de lin blanc.  Elle enleva le reste de sa robe et, par-dessus une longue chemise de soie, mit sa cotte de mailles.  La cotte lui arrivait au milieu des cuisses car la jeune Rohirrim n'était pas très grande.  Ethelyn sortit Lumya et elle l'observa encore un moment avant de glisser l'anneau à son majeur, l'air déterminé.  Elle allait découvrir ce que l'anneau allait lui apporter.  Sa baguette reposait sur le bureau devant elle, de même que Lumne, dans son fourreau, son carquois de flèches, son arc elfique, tout comme les flèches, et un long poignard à la lame effilée.

Ethelyn prit Lumne et fit des moulinets avec elle le long de la pièce, rapides et lents mais toujours efficaces.  Elle sentit une présence à l'autre bout de la pièce.  Elle s'arrêta.  Elle avait comprit!  Lumya faisait s'accroître ses sens.  Ceux qu'elle ne contrôlait pas bien.  Le maniement d'une arme, ça, elle le savait. 

Ethelyn se tourna vers la présence.

- Qui est là? demanda-t-elle en pointant son épée vers l'ombre.

- Du calme, ce n'est que moi, demoiselle.

Ethelyn posa son épée sur le bureau.  Ce n'était que Hama.

- Que voulez-vous?

- Que faites-vous?

- Cela ne vous regarde pas.

- Alors je vous retourne la réponse.

Il n'y avait pas d'ironie dans sa voix.  Que de l'amusement !  Le conseiller du roi leva les yeux au ciel. 

- Je fais un tour du propriétaire.

- Bonne réponse, répondit Ethelyn lui tournant le dos.  Et vous n'êtes pas sans savoir qu'il est très impoli de déranger une femme pendant qu'elle se change, Hama.

- J'ignorais que vous vous trouviez dans cette pièce, demoiselle.  Je vous conseille fortement de descendre dans les cavernes pour vous protéger.  Nous allons être attaquer.

- Je ne l'ignore point.  Veuillez me laisser.

Hama s'inclina et il sortit.  Ethelyn souffla.  Qu'il était curieux, cet Hama!

- PAPA!!!

- Ethelyn!  Non! 

Ethelyn, les bras maintenus derrière son dos par des gardes de Langue de Serpent, hurlait.  Sa mère, Ilana, également prisonnière des hommes, regardait, impuissante, son mari.

- PAPA!!!

Un garde la gifla.

- Tais-toi, petite sotte, intima-t-il, ou tu le paieras de ta vie.

Ethelyn secoua la tête.  Les larmes lui piquaient les yeux un filet de sang s'écoulait de la coupure que le soldat lui avait faite.  Ses longs cheveux blonds étaient tirés en arrière par le garde.  Elle serrait les dents.

- PAPA!!!  hurla-t-elle à nouveau.  NON!  PAPA!  EOMER!  EOWYN!  QUELQU'UN!  À L'AIDE!  ILS VONT LE TUER!  OH MON DIEU!  ILS VONT LE TUER!  THÉODRED!  ILS VONT LE TUER!  PAPA!

Deux gardes avaient accroché Yabeb, le père d'Ethelyn, au mur de leur petite maison.  Et il servait de cible vivante.  Ethelyn regardait le spectacle macabre qui se déroulait devant elle.  Le garde la gifla de nouveau.  La joue de la jeune femme était déchirée et le sang coulait abondamment.  Mais elle ne ressentait pas la douleur de cette blessure.  Sa mère la regardait, consternée.  Ethelyn savait qu'elle était insolente.  Mais si cela préservait son père…

L'homme, d'âge déjà avancé, était couvert de sang.  Une lance était enfoncée bien profondément dans son avant bras, une dague dans chacun de ses pieds nus.  Il avait les yeux vitreux, emplis de douleur et de terreur.  Son regard voilé était dirigé vers sa fille qui, impuissante face aux puissants hommes qui la retenaient –  car il y en avait deux, Ethelyn était une véritable tigresse, un seul homme n'aurait pas suffit – le regardait, les joues barbouillées de sang et de larmes salées. 

- Papa…  murmura-t-elle à nouveau, tout doucement.  Papa…   Non…  Je suis désolée…

Elle baissa la tête.  Un garda lança une nouvelle lance sur son père.  L'ultime lance.  Le « bout de bois » fendit l'air et atterrit en plein cœur du pauvre Rohirrim, qui mourut.  Les soldats qui retenaient Ethelyn ne la lâchèrent pas pour autant.

- Et si on s'amusait un peu?

Les soldats qui se vouaient corps et âme à Langue-de-Serpent étaient aussi vils et sans scrupules que lui.  Ethelyn était figée d'horreur.  Elle avait deviné leurs intentions, loin d'être réjouissantes.  Elle hurla à nouveau, malgré sa joue qui la faisait souffrir.  On enferma sa mère dans une chambre de la maison.

« Théodred!  Pourquoi tu es partit? »

Quelqu'un entra de force dans la maison.  Ethelyn ne savait pas qui car elle était de dos au visiteur.  Mais une chose était sûre, les gardes la lâchèrent et s'enfuirent en courant.  Ethelyn se laissa tomber au sol, tremblante, hagarde et fiévreuse.

- Mon Dieu, Ethelyn!  Arrêtez-les!  Ces…  Je ne trouve pas de jurons assez forts pour décrire ces vils hommes.  Ethelyn, c'est moi, Eomer.  Je suis là.  On va aller rejoindre Eowyn.

Ethelyn levait la tête alors que sa mère passait devant elle, escortée par les cavaliers d'Eomer.  Elle était aussi tremblante que sa fille.

Ethelyn se sentit soulevée par Eomer et posée sur un destrier pour aller au château, où des soins lui furent administrés par Eowyn.  Peu après, le roi envoya Eomer explorer les plaines du Riddermark.  Il enferma Eowyn dans sa chambre et il chassa Ethelyn sous peine de mort. 

Après plusieurs heures de route, la jeune femme avait rencontré l'elfe Yute et elle était allée s'installer en Lorien.

 

Ethelyn courut sur le front, le visage masqué d'un foulard de lin.  Des elfes venaient d'arriver.  La jeune femme aperçut Aragorn, debout et grand, sur les créneaux…  Le soleil faisait disparaître ses derniers rayons dorés.  Au loin apparaissait une masse noire et informe.  Les Orcs…  Ils arrivaient…

Réponse aux reviews :

Kristaline : Merci!

Eryna Khan : Merci!  Pour la fin, aucune idée de ce que ça va donner!

Titre et extrait :

Chapitre 7 : La bataille du gouffre de Helm

Ethelyn vit Aragorn survoler leur petite armée du regard.  La jeune femme baissa les yeux et la tête pour échapper à son regard scrutateur.  Théodred lui avait souvent répété que ses yeux étaient tellement brillants qu'ils illuminaient les ténèbres de la nuit.  Eowyn et Eomer avaient confirmé, joyeux.

- Prêts à tirer ! ordonna un des commandants elfique dans le langage commun.

Ethelyn banda son arc.  Plus personne ne bougea.  Au dehors, les Orcs faisaient de grands fracas.  Soudain, plus rien.  Quelqu'un jura dans les rangs.  Un Orc hurla.  Aragorn cria quelque chose en elfique, que l'un des commandants traduit.

- TIREZ !

 

Au prochain chapitre!

Bye!