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N/A-T : A vous tous, qui suivez cette histoire avec plaisir, nous vous remercions de la lire, et de la reviewer avec tant de gentillesse. Puisque vous paraissez apprécier beaucoup celle-ci, je vous enjoins (et c'est la traductrice qui parle) à lire une autre fic du même auteur, Amarië and Haldir : les Chemins de la Destinée qui vient juste d'être terminée. Bien entendu, le bébé est encore en version originale, mais nous pouvons tous espérer que ses deux talentueuses auteurs (meuh non, je ne fais pas de lèche) me laisseront la traduire également. En attendant, vous n'avez plus qu'à vous remettre à l'Anglais sérieusement... Bonne lecture.
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Chapitre Quatrième : l'Appel
Je demeurai en ville, puisque je n'avais nulle part ailleurs où aller, rien pour me raccrocher sinon des souvenirs, et des phrases étranges qui pénétraient mon esprit aux moments les plus inattendus. Il m'arrivait de penser quelquefois qu'elles émanaient vraiment de lui, mais à d'autres moments je me persuadais qu'elles n'étaient que le pur produit d'une imagination avide et créative, née d'un désir inassouvi. Et pourtant, souvent j'en venais à m'interroger. Tout récemment, j'avais pu m'apercevoir que le mot « bientôt » traversait très souvent mon esprit.
Si cela avait un sens, quel était-il donc ? Bientôt, quoi ?
L'hiver et ses neiges étaient venus puis repartis, et la plaine qui encerclait la cité blanche était verte et luxuriante à nouveau. La brise tiède de l'été faisait flotter haut les étendards, et la tour étincelait dans le soleil matinal.
Aragorn vint à moi un beau matin, alors que j'étais à califourchon sur le mur, à contempler les champs et au-delà, le souvenir des tentes elfiques aux multiples couleurs encore vif en ma mémoire. Le Roi s'approcha et vint s'asseoir à mon côté, s'accoudant au mur, suivant mon regard, partageant peut-être les mêmes souvenirs. « Une faveur, » sollicita-t-il. Que moi seule pourrait lui accorder. Viendrais-je jusqu'à la tour ? Il avait quelque chose à me montrer. Ce serait pour aujourd'hui.
Il était certain que ne pouvais me permettre d'opposer un refus au Roi.
Lorsque j'arrivais, ils étaient deux à m'attendre, et Arwen et lui. Aragorn se leva, me saluant d'un sourire courtois comme je m'inclinai devant eux deux. Il tenait une lettre à la main, apportée le jour-même par un groupe d'Elfes en voyage. Elle était encore close, mais il en avait reçu une toute semblable, comme il me l'apprit, ainsi savait-il ce que la mienne contenait. Toutes deux étaient de la main-même de Galadriel.
Je baissai le regard sur la lettre, qui tressaillait dans ma main - je tremblais moi-même. Je posai longuement les yeux sur mon mot, tracé d'une écriture élégante, et lui répondit que je n'osais pas l'ouvrir. Je pense qu'il savait très bien pourquoi, et de qui je me languissait, car son regard s'emplit de compassion ; il me prit délicatement la lettre des mains, puis brisa le sceau à ma place. Il la parcourut rapidement, et me la tendit avec douceur.
Je la repris, et me détournai, ; mes genoux se dérobèrent sous moi et je m'effondrai lentement au sol, ayant réalisé d'un coup l'implication de tout ce qu'elle m'y demandait. Aragorn se laissa tomber à mes côtés tandis que je commençai de me balancer d'avant en arrière, secouant la tête, aveuglée par les larmes. Elle avait besoin de moi, me dit-il. Elle savait ce dont j'étais capable. Oserais-je refuser la requête de la Reine des Elfes de Lothlórien ?
Mais je trouvai un plus grand secours dans les paroles d'Arwen, qui me parla avec gentillesse, la main sur le bras, ayant pris la place de son époux auprès de moi. « L'amour d'un mortel et d'un Elfe peut être le plus doux de tous, » murmura-t-elle. « Un tel amour est un don des Valar. Ayez confiance en ma grand-mère, Keara. Elle est plus âgée et plus sage que vous ne pouvez l'imaginer. Elle sait ce qu'elle demande. Elle ne désire infliger de peine à quiconque, vous ou lui. »
Je ne me souciai pas de savoir comment elle avait appris, mais je hochai la tête sans rien dire. J'avais accepté, enfin. C'est ainsi que je me retrouvai sur les routes, en chemin durant de longues nuits et d'interminables jours, escortée par un contingent des hommes d'Aragorn le long de la Grande Rivière qui s'écoulait vers le Nord. C'est par une nuit illuminée d'étoiles que je posai, pour la première fois, les yeux sur la Lothlórien.
Nous établîmes notre campement à peu de distance de bois cette nuit-là, mais son image m'ôta tout espoir de repos. Je me demandai de quelle manière je serais accueillie ; serait-il là ou enverrait-il d'autres à sa place ? Avait-il pensé à moi tous ces mois durant ? Si tel était le cas, irait-il me le dire ? Entourée des gardes d'Aragorn, j'avais l'impression d'être assise seule auprès du feu, le visage offert aux étoiles tandis que les heures passaient avec une lenteur accablante.
Sur le matin, nous pénétrâmes le Bois d'Or. Je resserrai ma cape autour de moi, jetant les yeux de tous côtés avec émerveillement sur les arbres gigantesques qui nous entouraient. La lumière était plus diffuse dans la forêt, et le bruissement des feuilles, le gémissement du vent m'apportaient un léger malaise tandis que nous nous frayions un chemin dans ce qui nous semblait être la bonne direction.
Mes compagnons étaient tout aussi peu rassurés, bien que se sachant attendus. L'un d'entre eux me saisit l'avant-bras dans une étreinte sécurisante tandis que nous plongions plus avant dans les bois. Je lui demandai jusqu'où nous devrions aller, mais il se contenta de secouer la tête en réponse. Il ne le savait pas.
Nerveuse, je jetai des coups d'?il rapides aux environs à la recherche d'un signe, lorsque mon pied heurta une racine et je trébuchai. Les gardes se tournèrent vers moi, détournant leur attention durant une fraction de seconde, mais cela suffisait. Lorsque je relevai les yeux, les Elfes étaient là.
Le garde qui me tenait toujours le coude siffla quelque malédiction entre ses dents, et me tira violemment en arrière. Je ne les avais ni entendu, ni senti venir, mais ils avaient dû être là une grande partie du temps depuis notre arrivée. Ils étaient cinq à nous observer en silence, flèche encochée mais l'arc tourné vers le sol. Je ne reconnu aucun d'entre eux, mais à présent qu'ils s'étaient montrés je m'aperçus que je n'avais plus peur. Je sus que mon garde était loin d'être aussi rassuré, car il resserra davantage sa prise sur mon bras comme Haldir se laissait tomber avec légèreté sur la terre ferme depuis les hauteurs inconnues.
J'écarquillai soudain les yeux, et ma respiration devint erratique ; celui qui avait hanté tous mes rêves s'avançait vers moi. Son regard parcourut l'assistance des gardes qui m'entouraient avec un air de moquerie hautaine, et c'est presque avec dédain qu'il leur annonça qu'ils ne pourraient aller plus loin. Sa voix portait la menace de ce qui pourrait leur arriver si jamais ils s'aventuraient à le défier, et je sursautai lorsque le garde qui m'avait retenu jusqu'alors me poussa en avant avec brusquerie. Je manquai tomber, mais Haldir me rattrapa juste à temps et m'attira à lui.
« Ce n'est pas ainsi que l'on traite une femme, » lâcha-t-il avec un mépris évident. Les yeux froidement fixés sur le garde d'Aragorn, il me tira contre lui avec une certaine possessivité. Il était tout aussi arrogant et dominateur que dans mon souvenir, et je fus prise d'une envie inexplicable d'éclater de rire.
Je pouvais le sentir tendu tandis qu'il me portait, la voix coupante quand il donna l'ordre à mon escorte de quitter les bois sans attendre. J'entendis quelques Elfes ricaner en voyant les hommes tourner les talons sans demander leur reste, à moitié courant dans leur hâte de laisser les bois de la Lórien derrière eux au plus vite. L'un d'entre eux se déchargea du maigre balluchon qui contenait mes effets personnels, y compris la robe rouge que je chérissais par-dessus tout, et un Elfe s'avança pour le récupérer. Puis la troupe fit demi-tour, leurs rires légers s'estompant comme ils prenaient de l'avance sur nous, me laissant un moment seule avec Haldir. J'eus la bouche sèche soudainement, lorsque je me tournai pour lui faire face.
Le coin de ses lèvres s'incurva en un mince demi-sourire, ses yeux gris glissant sur mon visage dans une évaluation pénétrante. « Bienvenue en Lothlórien, Keara. Vous avez fait un long voyage. » Il m'étudia encore un moment. « Je suis heureux que vous soyez venue, » ajouta-t-il, et quelque chose qui passa dans ses yeux me donna l'espoir de lui avoir manqué.
Agrippant les bords de ma cape, je forçai un sourire sur mes lèvres, mais demeurai incapable de lui répondre, car la voix me faisait soudain défaut. Par bonheur, il ne semblait pas en attendre autant de moi, et prit mon bras avec autant de fermeté que le garde avant lui, mais avec bien plus de douceur.
Il me conduisait au plus profond des bois, sa troupe lui emboîtant le pas en silence derrière nous. Je n'avais toujours pas parlé, ne trouvant rien à lui dire, et les bois immobiles paraissaient respecter notre silence. Puis enfin, il s'enquit de mon voyage et je finis par lui répondre ; mais ce faisant, mon esprit devenait de plus en plus confus, dérivant à mesure que ma fatigue augmentait. Nombreuses avaient été les nuits où j'avais gési sans repos, obsédée par la pensée que nous approchions peu à peu de celui que jamais je n'avais cru revoir un jour. Comment allait-il réagir ? Que dirait-il ? Ces questions m'avaient gardée de tout sommeil tout au long de notre voyage.
Il fit halte brusquement en plein milieu de sa course, ayant senti d'une manière ou d'une autre à quel point l'épuisement me gagnait. Il me mena jusqu'à une petite clairière où quelques rayons de soleil filtraient à travers la canopée des arbres immenses, au-dessus de nous. Il m'offrit de m'asseoir et me reposer, ce que j'acceptai avec gratitude, me laissant tomber avec délice au creux de l'herbe fournie et douce, m'appuyant, fourbue, contre le tronc d'un arbre. Un autre Elfe s'approcha, une coupe remplie d'eau à la main, qu'il me tendit et que je reçus avec un sourire de remerciement. Il me le rendit, et son sourire plissa ses yeux bleus ; la pensée traversa mon esprit que lorsque l'on en venait à l'apparence, chacun des Elfes que j'avais rencontrés surpassaient en beauté physique tous les Hommes que j'avais pu connaître. Peut-être que le fait qu'il ne voyageassent pas si souvent de par le monde ne représentait qu'un moindre mal ; car alors la file des coeurs brisés qu'il eussent laissés en arrière eût été fort longue.
J'observai Haldir comme il s'engageait plus avant dans le sentier, et je réalisai dans un sursaut qu'il parlait à son frère. Rúmil paraissait accablé, et je pouvais voir depuis ma place que sa cape et sa tunique étaient raidies par le sang. Haldir tendit le bras pour toucher l'épaule de son frère, où s'élargissait une tache de sang, mais Rúmil le repoussa et continua de parler, ponctuant ses dires de gestes expressifs de ses mains élégantes. Derrière lui, un groupe d'Elfes attendaient en silence, l'air sombre et abattu.
Ma lassitude devait être bien plus grande que je l'avais cru au premier abord, car je m'aperçus à peine qu'il me soulevait de sous mon arbre. Lorsque je repris conscience, j'étais blottie dans ses bras et transportée à travers les bois sans toucher terre, la tête emplie de son odeur mâle et la joue pressée contre la laine grise et douce de sa tunique. Cela ressemblait à un rêve, je me sentais comme au milieu d'un rêve, un pur moment de bonheur absolu, et pendant quelques secondes je me permis de m'y noyer. Puis je prononçai son nom et il baissa le regard sur moi, mais sans me lâcher ainsi que je m'y étais attendue.
« Je suis réveillée, » fis-je remarquer, le rouge qui me montait aux joues répandant une chaleur qui gagna ma nuque.
Il esquissa un sourire en coin. « C'est ce que je vois. »
« Cela veut dire que vous pouvez me déposer, » soulignai-je, commençant à me tortiller. J'étais stupéfaite par la douceur avec laquelle il réussissait à me porter, en dépit de la rapidité de ses pas.
« Bien entendu, » répliqua-t-il, « du moins je le pourrais si tel était mon désir. Mais ce n'est pas le cas. J'ai attendu plusieurs longs mois de vous tenir dans mes bras, et bien que j'avoue que ce n'est pas précisément ce que j'avais à l'esprit, cela fera l'affaire pour le moment. »
Je battis des cils, n'en croyant pas mes oreilles. Je l'avais imaginé en train de me dire un certain nombre de choses, mais certainement pas celle- ci. « Vous prenez bien des libertés, » lui rétorquai-je sèchement. « Je vous ordonne de me lâcher. »
Il gloussa. « Vous êtes sous mon autorité à présent, Keara. Je suis le Gardien des Frontières et je peux agir ici comme bon me semble. De plus, je trouve cela très plaisant. »
Sidérée, je restai bouche bée à ces paroles, incapable de croire qu'il voulût bien l'admettre. « Ce n'est pas parce que je suis plus faible que vous avez le droit de vous sentir obligé d'avoir à redire sur mes agissements ! »
Il émit un petit reniflement et me tint encore plus fermement. Je me consultai un moment sur la légitimité de risquer ce qu'il pouvait me rester de dignité dans un combat que j'étais tout à fait sûre de perdre. « Haldir, » dis-je enfin, « je ne pense pas que vous être en train de devenir émotif. Il n'y a aucune raison de me porter. Je suis tout à fait capable de me porter toute seule. »
« C'est précisément la raison pour laquelle cela me plaît. D'ailleurs, cela vous plaît tout autant, » ajouta-t-il, perfide. « Et je suis présentement en train de faire montre d'une retenue admirable. » Comme pour souligner ses paroles, la main qui se tenait près de mes hanches exerça une infime pression sur mes fesses.
Derrière nous, je pus entendre plusieurs petits rires, qui me prouvèrent que les autres Elfes avaient compris au moins l'essentiel de notre conversation, ce qui me causa le plus vif embarras. A présent écarlate et brûlante, je fermai les yeux de toute mes forces, et je perçus le gloussement léger d'Haldir qui riait sous cape. Il me rétablit un peu plus dans es bras comme nous gravissions une petite colline, mais les efforts qu'ils devait déployer pour me porter semblaient si minimes qu'ils en devenaient insignifiants.
Je dus sombrer de nouveau dans le sommeil en fin de compte, et je me demandai par la suite jusqu'à quel point il avait senti l'étendue de ma fatigue. Lorsque j'ouvris les yeux la fois suivante, nous avions presque atteint la cité, et il me déposa sur la terre ferme. Il m'invita à regarder. Ses yeux ne quittèrent pas mon visage au moment où je contemplai, émerveillée, la cité sylvestre de Caras Galadhon, construite sur les hauteurs des arbres gigantesques aux feuilles d'or que l'on appelaient les mallornes. Avec une immense fierté, il m'expliqua que son peuple, les Elfes Sylvains, qui vivaient en pays de Lórien, se nommaient les Galadhrim, ce qui signifiait « peuple des arbres » ; et que le Seigneur et sa dame régnaient en ces lieux depuis bien plus de mille années.
Il me guida jusqu'au bas de la vallée, et c'est à la nuit tombée que nous atteignîmes les portes de la ville d'arbres. Les brumes se levaient et la nuit était fraîche, et je frissonnai tout en le suivant pas à pas, le long des chemins qui serpentaient entre les arbres. Loin au-dessus de moi, enroulées autour des troncs énormes, des allées aériennes et filigranées montaient en spirale, les branches d'arbre s'entremêlant aux ponts et plate- formes pour se perdre dans les ombres bleutées.
Il me conduisit à l'un des escaliers, et je contemplai avec fascination le travail délicat des ornements artistiques qui avaient créé une cité vivante parmi les majestueux branchages. Au-delà, je pouvais apercevoir un grand bâtiment tissé entre les branches, ses murs faits d'un lacis de dentelle entrelacée en une création poétique, qui répandait une douce et chaude lumière, dont le scintillement semblait me prier de le rejoindre.
Lorsque enfin nous fûmes arrivées au sommet, nous fîmes une halte devant la montée qui menait à la source de la lumière entr'aperçue auparavant. Je savais que je me tenais là où bien peu d'humains l'avaient osé, et l'anxiété fit son retour. Nerveuse, je resserrai les pans de ma cape comme s'il se fût agi d'une ancre. C'est alors que deux apparitions faites d'or glissèrent à ma rencontre, et je les regardai venir avec un émerveillement sans borne. La luminescence radieuse de leur éclat rayonnant dissimulait leurs silhouettes, et je cillai comme ils se matérialisèrent auprès de moi, en ces deux créatures élégantes et familières que j'avais rencontrées parmi les tentes au pied de la cité blanche.
Emplis de toute la sagesse et de la connaissance que leur avaient conférés les âges, les yeux bleus de la Reine s'emparèrent de moi, qui m'y noyai, fascinée. A la différence de la dernière fois, je sentis son esprit effleurer le mien comme elle tentait de lire en moi, mais avait-elle réussi ou échoué, je ne puis dire. Chacun d'eux, elle et Celeborn, me souhaitèrent la bienvenue en leur pays, et je m'inclinai, encore désorientée de me trouver ici.
Elle s'enquit uniquement de mes voyages, son regard allant à Haldir comme pour quérir quelque information, mais je ne pus deviner ce qu'il lui apprit. Il se chargerait de me montrer où j'allais demeurer, et je devrais me reposer avant que nous parlions à nouveau. J'hésitai un instant, impatiente de connaître la raison de ma présence ici, mais Haldir, me saisissant vigoureusement par le coude, m'entraîna plus loin pour me conduire au bas des marches.
Tandis qu'il guidait mes pas, mes pensées prenaient une tournure de plus en plus chaotique. Que voulait-elle de moi ? Qui étais-je pour proposer mes services ? Mon inquiétude et ma curiosité étaient assez grands pour que je m'enquisse auprès d'Haldir de ce qu'il pouvait connaître. A ma surprise, il fronça les sourcils et refusa de me répondre, se contentant de m'affirmer que je saurais bien assez tôt. Toute trace d'espièglerie l'avait à présent déserté, remplacée par une humeur sombre qui me rappela son comportement à l'époque où il était souffrant et dans l'attente de mes soins. Ce changement brutal me troubla, et je fus tentée de le taquiner afin de briser l'hypothétique barrière qu'il avait pu installer depuis un moment.
Il me guida jusqu'à une petite pièce construite entre les branches d'un arbre ; pour tout dire, elle semblait en faire partie intégrante, avec ses murs entrelacés avec les branches, et son plancher recouvert de tapis moelleux. Le lit, placé dans un coin, jouxtait une fenêtre tendue de rideaux qui ondulaient sous la brise. On y avait déposé mes affaires, placées sur une chaise de bois près d'une petite table.
Il s'était déjà détourné et s'apprêtait à partir lorsque je trouvai enfin le courage de lui parler. « Haldir, qu'est-ce qui ne va pas ? »
Il se tourna pour me considérer, ses sourcils sombres levés en signe d'interrogation. « Pourquoi cette question ? »
« Votre comportement paraît changé, » balbutiai-je, en proie à un trouble intérieur dont la cause était les yeux qui me vrillaient maintenant. Avais- je été la victime d'un malentendu quant à l'intérêt qu'il avait pu me porter ? Son esprit s'était-il déjà tourné vers d'autres préoccupations ? Si tel était bien le cas, il ne manquerait pas de trouver ma question impertinente et stupide.
Il se rapprocha de moi, le regard légèrement altéré. « Devinerais-je un quelconque intérêt personnel dans votre interrogation ? Ne niez-vous plus désormais vos sentiments pour moi ? »
J'ouvris la bouche, puis la refermai, confondue par sa franchise. « Ce n'est pas une question de les nier, » répondis-je après quelques instants. « C'est une question de... d'aspect pratique. »
Il parut amusé. « Vous trouvez cela pratique de ne pas quitter la Cité Blanche pendant tous ces mois ? Vous trouvez cela pratique de nier ce que vous savez être votre plus cher désir ? » Il resta devant moi à me scruter, si près que je pouvais sentir son souffle, la chaleur de son corps.
Décomposée, je baissai les yeux. « Je sais que vous me pensez faible... »
« Faible ? » Il se saisit de mes deux mains, qu'il pressa entre les siennes, la voix vibrant d'une note étrange. « Keara, vous n'êtes pas faible. Personne mieux que moi ne sait ce dont vous avez le courage. Il est suffisamment difficile de supporter sa propre douleur, et prendre la douleur d'un autre tout entière sur soi n'est pas une preuve de faiblesse. Vous êtes parmi les plus forts et les plus braves que j'aie jamais connus. Je vous admire grandement. »
C'étaient des mots que j'avais toujours voulu entendre et je ne le savais pas. Cela me plongea dans un profond embarras, mais mes yeux se remplirent de larmes, et comme s'il avait lu mon c?ur, il me prit dans ses bras pour m'offrir son réconfort. Tandis que je sanglotais contre sa poitrine, il m'ôta ma cape et le jeta de côté, murmurant des mots d'Elfique à voix basse, que je n'étais pas en mesure de comprendre mais qui m'apaisèrent tout de même. Nous demeurâmes ainsi jusqu'à ce que je fusse calme de nouveau.
« Nous parlerons plus tard, » dit-il. « A présent vous êtes lasse et devez vous reposer. » C'était le retour de sa voix autoritaire, mais cette fois je ne lui dis pas qu'il était dominateur, car je sentis ses lèvres effleurer mes cheveux avant qu'il ne se retirât. Il me quitta, et avant même que j'eusse le loisir de me retourner, fut aussitôt remplacée par une Elfe.
Elle m'avait apporté de la nourriture, et je la remerciai d'un sourire aussi bien qu'avec des mots. Elle répondit en Langue Commune, d'une voix douce et mélodieuse qui caressa mes oreilles. Puisque des vêtements et quelques autres objets élémentaires avaient été apportés, elle n'avait plus qu'à me demander si je désirais autre chose ; je lui répondis par la négative, et que je n'avais besoin de rien, mais elle répliqua fermement. Je devais accepter ce qui m'avait été offert. Je fus surprise par son insistance, et m'interrogeai sur l'hypothèse envisageable qu'Aragorn eût parlé à Galadriel de ma réticence manifeste à recevoir les cadeaux.
Dès qu'elle fut partie, je quittai la robe grise que j'avais portée pour le voyage et rinçai la saleté des chemins grâce à la bassine d'eau que j'avais trouvée dans la table de nuit. Après cela, je me sentais bien mieux, assez pour dévorer la nourriture qu'elle avait laissé ; puis je grimpai jusqu'au lit qui m'enveloppa d'une douce chaleur, délicieuse et efficace contre les frissons de froid qui me parcouraient. Je sombrai très vite dans un sommeil profond, qui avait bien pu être aidé par une once de magie elfique.
***
Je m'éveillai avant le lever du soleil, consternée à l'idée de l'avoir manqué. Pourtant, je quittai mon lit, sachant qu'il me serait impossible de dormir davantage, et revêtit une robe que j'avais trouvée dépliée au pied du lit. D'où elle pouvait bien venir, je n'en avais aucune idée, mais je n'osai pas refuser de la porter. Elle glissa sur moi dans un bruissement doux et soyeux, ses nuances de bleu m'évoquant la couleur des yeux de Galadriel.
Je sursautai comme un léger grattement retentit à la porte, car l'aube était à peine entamée et le matin ne commencerait que dans une petite heure. J'ouvris la porte pour trouver Haldir appuyé nonchalamment au chambranle. Mon c?ur s'agita fébrilement devant la façon dont ses yeux brillants me parcoururent dans une appréciation muette, pour se poser sur mon visage. J'ignore comment, mais j'eus l'impression de pouvoir ressentir son émotion, et qu'elle était pareille à la mienne.
Il avait pensé que j'aimerais voir le lever du soleil ;et je me demandai comment il avait bien pu le savoir. Je le regardai sans rien dire, dévorée par l'envie de le suivre, et craignant pourtant le pouvoir qu'il détenait sur mes émotions. Lorsque j'acceptai enfin, je vis sourire s'élargir devant le temps que j'avais mis à répondre. Saisissant ma main, il prit le chemin des hauteurs par une volée de marches qui menaient plus près de la cime des arbres. Il ne souffla mot, me serrant à peine la main, mais j'étais bien plus consciente de la chaleur de son toucher que des lumières scintillant alentours.
Nous atteignîmes enfin les dernières marches, et je ne pus que me taire, tournant sur moi-même pour admirer la vue imprenable qui s'étalait devant moi. Nous nous tenions au plus haut sommet de la cité, et cette plate-forme - un flet que les Elfes nommaient talan - nous permettait de contempler le bois d'or dans toute sa splendeur, de quelque côté que l'on se tournât. Au- dessus de nous, les étoiles piquetaient le ciel empourpré de la nuit, les premiers rayons de l'aurore commençant à peine à nuancer le lointain horizon.
Immédiatement, je sus qu'il venait ici souvent, et le vis sourire de ma surprise. Appuyée à la balustrade, je m'offris à la douce brise qui faisait voler mes cheveux sur mon visage et se prenaient dans mes cils. Il s'avança derrière moi, et drapa sa cape autour de nous, son corps pressé intimement contre le mien. En dépit du rythme effréné que maintenait mon c?ur, je n'émis pas la moindre objection, car d'une certaine manière il semblait naturel et parfait que nous admirions tous deux, l'un contre l'autre, ce lever de soleil fabuleux, au matin de ce jour extraordinaire.
De toutes les aubes que j'avais contemplées, celle-ci demeurerait à jamais dans ma mémoire. Ensemble, nous vîmes les premiers rayons mordorés effleurer la cime des arbres, qu'ils nimbaient de vert et d'or. Puis le ciel s'éclaircit, les couleurs se fondant, le nuançant d'or et de rose, tandis que le pourpre s'estompait jusqu'au bleu. Les brumes, qui montaient des profondeurs de la forêt en contrebas, réfléchissaient la lumière de telle sorte qu'elle éclatait dans un arc-en-ciel de couleurs prodigieuses. Cette vue féerique me donna soudain l'envie de pleurer. Sans penser, je me tournai vers lui, incapable de parler tant l'émotion me serrait la gorge. Du pouce, il essuya une larme qui coulait sur ma pommette, puis continua son chemin sur la joue jusqu'à mes lèvres. Nos regards s'entrelacèrent, le soleil et le ciel oubliés en un instant, lorsque sa bouche approcha la mienne.
Ce fut le moment où il m'embrassa, notre premier baiser, un baiser très doux, l'union de nos lèvres étant la plus délicieuse chose que j'eusse jamais connue jusqu'alors. Ses lèvres brûlaient d'impatience, mais d'une manière inexplicable je sentais qu'il faisait preuve d'une grande réserve. Sous la surface, je pouvais sentir sa tension vibrante, une passion inassouvie plus profonde que ce que j'avais jamais imaginé. Tout ce dont j'avais besoin était le courage de l'accepter. Et je sus également qu'il me l'avait laissé comprendre de son plein gré, et de manière intentionnelle ; il me donnait un avant-goût de ce que je pourrais avoir, si seulement je me laissais le désirer. Il m'offrait un choix, presque un défi. Mais je n'étais pas encore prête, pas courageuse à ce point.
Une heure plus tard, j'étais mandée par Galadriel.
A suivre.... --------------------
N/T : Evidemment, j'ai beaucoup ri en traduisant ce passage. Surtout que je pensais très fort à certaine scène tordante de Shrek où... enfin bon, je ne suis pas censée tenir de tels propos devant une assemblée constituée de gens raisonnables ^^ J'espère que la lecture a été bonne, et je vous souhaite de la continuer bientôt. Merci à tous de suivre notre travail à toutes les trois, et amitiés elfiques !
Mélusine.
N/A-T : A vous tous, qui suivez cette histoire avec plaisir, nous vous remercions de la lire, et de la reviewer avec tant de gentillesse. Puisque vous paraissez apprécier beaucoup celle-ci, je vous enjoins (et c'est la traductrice qui parle) à lire une autre fic du même auteur, Amarië and Haldir : les Chemins de la Destinée qui vient juste d'être terminée. Bien entendu, le bébé est encore en version originale, mais nous pouvons tous espérer que ses deux talentueuses auteurs (meuh non, je ne fais pas de lèche) me laisseront la traduire également. En attendant, vous n'avez plus qu'à vous remettre à l'Anglais sérieusement... Bonne lecture.
~*~
Chapitre Quatrième : l'Appel
Je demeurai en ville, puisque je n'avais nulle part ailleurs où aller, rien pour me raccrocher sinon des souvenirs, et des phrases étranges qui pénétraient mon esprit aux moments les plus inattendus. Il m'arrivait de penser quelquefois qu'elles émanaient vraiment de lui, mais à d'autres moments je me persuadais qu'elles n'étaient que le pur produit d'une imagination avide et créative, née d'un désir inassouvi. Et pourtant, souvent j'en venais à m'interroger. Tout récemment, j'avais pu m'apercevoir que le mot « bientôt » traversait très souvent mon esprit.
Si cela avait un sens, quel était-il donc ? Bientôt, quoi ?
L'hiver et ses neiges étaient venus puis repartis, et la plaine qui encerclait la cité blanche était verte et luxuriante à nouveau. La brise tiède de l'été faisait flotter haut les étendards, et la tour étincelait dans le soleil matinal.
Aragorn vint à moi un beau matin, alors que j'étais à califourchon sur le mur, à contempler les champs et au-delà, le souvenir des tentes elfiques aux multiples couleurs encore vif en ma mémoire. Le Roi s'approcha et vint s'asseoir à mon côté, s'accoudant au mur, suivant mon regard, partageant peut-être les mêmes souvenirs. « Une faveur, » sollicita-t-il. Que moi seule pourrait lui accorder. Viendrais-je jusqu'à la tour ? Il avait quelque chose à me montrer. Ce serait pour aujourd'hui.
Il était certain que ne pouvais me permettre d'opposer un refus au Roi.
Lorsque j'arrivais, ils étaient deux à m'attendre, et Arwen et lui. Aragorn se leva, me saluant d'un sourire courtois comme je m'inclinai devant eux deux. Il tenait une lettre à la main, apportée le jour-même par un groupe d'Elfes en voyage. Elle était encore close, mais il en avait reçu une toute semblable, comme il me l'apprit, ainsi savait-il ce que la mienne contenait. Toutes deux étaient de la main-même de Galadriel.
Je baissai le regard sur la lettre, qui tressaillait dans ma main - je tremblais moi-même. Je posai longuement les yeux sur mon mot, tracé d'une écriture élégante, et lui répondit que je n'osais pas l'ouvrir. Je pense qu'il savait très bien pourquoi, et de qui je me languissait, car son regard s'emplit de compassion ; il me prit délicatement la lettre des mains, puis brisa le sceau à ma place. Il la parcourut rapidement, et me la tendit avec douceur.
Je la repris, et me détournai, ; mes genoux se dérobèrent sous moi et je m'effondrai lentement au sol, ayant réalisé d'un coup l'implication de tout ce qu'elle m'y demandait. Aragorn se laissa tomber à mes côtés tandis que je commençai de me balancer d'avant en arrière, secouant la tête, aveuglée par les larmes. Elle avait besoin de moi, me dit-il. Elle savait ce dont j'étais capable. Oserais-je refuser la requête de la Reine des Elfes de Lothlórien ?
Mais je trouvai un plus grand secours dans les paroles d'Arwen, qui me parla avec gentillesse, la main sur le bras, ayant pris la place de son époux auprès de moi. « L'amour d'un mortel et d'un Elfe peut être le plus doux de tous, » murmura-t-elle. « Un tel amour est un don des Valar. Ayez confiance en ma grand-mère, Keara. Elle est plus âgée et plus sage que vous ne pouvez l'imaginer. Elle sait ce qu'elle demande. Elle ne désire infliger de peine à quiconque, vous ou lui. »
Je ne me souciai pas de savoir comment elle avait appris, mais je hochai la tête sans rien dire. J'avais accepté, enfin. C'est ainsi que je me retrouvai sur les routes, en chemin durant de longues nuits et d'interminables jours, escortée par un contingent des hommes d'Aragorn le long de la Grande Rivière qui s'écoulait vers le Nord. C'est par une nuit illuminée d'étoiles que je posai, pour la première fois, les yeux sur la Lothlórien.
Nous établîmes notre campement à peu de distance de bois cette nuit-là, mais son image m'ôta tout espoir de repos. Je me demandai de quelle manière je serais accueillie ; serait-il là ou enverrait-il d'autres à sa place ? Avait-il pensé à moi tous ces mois durant ? Si tel était le cas, irait-il me le dire ? Entourée des gardes d'Aragorn, j'avais l'impression d'être assise seule auprès du feu, le visage offert aux étoiles tandis que les heures passaient avec une lenteur accablante.
Sur le matin, nous pénétrâmes le Bois d'Or. Je resserrai ma cape autour de moi, jetant les yeux de tous côtés avec émerveillement sur les arbres gigantesques qui nous entouraient. La lumière était plus diffuse dans la forêt, et le bruissement des feuilles, le gémissement du vent m'apportaient un léger malaise tandis que nous nous frayions un chemin dans ce qui nous semblait être la bonne direction.
Mes compagnons étaient tout aussi peu rassurés, bien que se sachant attendus. L'un d'entre eux me saisit l'avant-bras dans une étreinte sécurisante tandis que nous plongions plus avant dans les bois. Je lui demandai jusqu'où nous devrions aller, mais il se contenta de secouer la tête en réponse. Il ne le savait pas.
Nerveuse, je jetai des coups d'?il rapides aux environs à la recherche d'un signe, lorsque mon pied heurta une racine et je trébuchai. Les gardes se tournèrent vers moi, détournant leur attention durant une fraction de seconde, mais cela suffisait. Lorsque je relevai les yeux, les Elfes étaient là.
Le garde qui me tenait toujours le coude siffla quelque malédiction entre ses dents, et me tira violemment en arrière. Je ne les avais ni entendu, ni senti venir, mais ils avaient dû être là une grande partie du temps depuis notre arrivée. Ils étaient cinq à nous observer en silence, flèche encochée mais l'arc tourné vers le sol. Je ne reconnu aucun d'entre eux, mais à présent qu'ils s'étaient montrés je m'aperçus que je n'avais plus peur. Je sus que mon garde était loin d'être aussi rassuré, car il resserra davantage sa prise sur mon bras comme Haldir se laissait tomber avec légèreté sur la terre ferme depuis les hauteurs inconnues.
J'écarquillai soudain les yeux, et ma respiration devint erratique ; celui qui avait hanté tous mes rêves s'avançait vers moi. Son regard parcourut l'assistance des gardes qui m'entouraient avec un air de moquerie hautaine, et c'est presque avec dédain qu'il leur annonça qu'ils ne pourraient aller plus loin. Sa voix portait la menace de ce qui pourrait leur arriver si jamais ils s'aventuraient à le défier, et je sursautai lorsque le garde qui m'avait retenu jusqu'alors me poussa en avant avec brusquerie. Je manquai tomber, mais Haldir me rattrapa juste à temps et m'attira à lui.
« Ce n'est pas ainsi que l'on traite une femme, » lâcha-t-il avec un mépris évident. Les yeux froidement fixés sur le garde d'Aragorn, il me tira contre lui avec une certaine possessivité. Il était tout aussi arrogant et dominateur que dans mon souvenir, et je fus prise d'une envie inexplicable d'éclater de rire.
Je pouvais le sentir tendu tandis qu'il me portait, la voix coupante quand il donna l'ordre à mon escorte de quitter les bois sans attendre. J'entendis quelques Elfes ricaner en voyant les hommes tourner les talons sans demander leur reste, à moitié courant dans leur hâte de laisser les bois de la Lórien derrière eux au plus vite. L'un d'entre eux se déchargea du maigre balluchon qui contenait mes effets personnels, y compris la robe rouge que je chérissais par-dessus tout, et un Elfe s'avança pour le récupérer. Puis la troupe fit demi-tour, leurs rires légers s'estompant comme ils prenaient de l'avance sur nous, me laissant un moment seule avec Haldir. J'eus la bouche sèche soudainement, lorsque je me tournai pour lui faire face.
Le coin de ses lèvres s'incurva en un mince demi-sourire, ses yeux gris glissant sur mon visage dans une évaluation pénétrante. « Bienvenue en Lothlórien, Keara. Vous avez fait un long voyage. » Il m'étudia encore un moment. « Je suis heureux que vous soyez venue, » ajouta-t-il, et quelque chose qui passa dans ses yeux me donna l'espoir de lui avoir manqué.
Agrippant les bords de ma cape, je forçai un sourire sur mes lèvres, mais demeurai incapable de lui répondre, car la voix me faisait soudain défaut. Par bonheur, il ne semblait pas en attendre autant de moi, et prit mon bras avec autant de fermeté que le garde avant lui, mais avec bien plus de douceur.
Il me conduisait au plus profond des bois, sa troupe lui emboîtant le pas en silence derrière nous. Je n'avais toujours pas parlé, ne trouvant rien à lui dire, et les bois immobiles paraissaient respecter notre silence. Puis enfin, il s'enquit de mon voyage et je finis par lui répondre ; mais ce faisant, mon esprit devenait de plus en plus confus, dérivant à mesure que ma fatigue augmentait. Nombreuses avaient été les nuits où j'avais gési sans repos, obsédée par la pensée que nous approchions peu à peu de celui que jamais je n'avais cru revoir un jour. Comment allait-il réagir ? Que dirait-il ? Ces questions m'avaient gardée de tout sommeil tout au long de notre voyage.
Il fit halte brusquement en plein milieu de sa course, ayant senti d'une manière ou d'une autre à quel point l'épuisement me gagnait. Il me mena jusqu'à une petite clairière où quelques rayons de soleil filtraient à travers la canopée des arbres immenses, au-dessus de nous. Il m'offrit de m'asseoir et me reposer, ce que j'acceptai avec gratitude, me laissant tomber avec délice au creux de l'herbe fournie et douce, m'appuyant, fourbue, contre le tronc d'un arbre. Un autre Elfe s'approcha, une coupe remplie d'eau à la main, qu'il me tendit et que je reçus avec un sourire de remerciement. Il me le rendit, et son sourire plissa ses yeux bleus ; la pensée traversa mon esprit que lorsque l'on en venait à l'apparence, chacun des Elfes que j'avais rencontrés surpassaient en beauté physique tous les Hommes que j'avais pu connaître. Peut-être que le fait qu'il ne voyageassent pas si souvent de par le monde ne représentait qu'un moindre mal ; car alors la file des coeurs brisés qu'il eussent laissés en arrière eût été fort longue.
J'observai Haldir comme il s'engageait plus avant dans le sentier, et je réalisai dans un sursaut qu'il parlait à son frère. Rúmil paraissait accablé, et je pouvais voir depuis ma place que sa cape et sa tunique étaient raidies par le sang. Haldir tendit le bras pour toucher l'épaule de son frère, où s'élargissait une tache de sang, mais Rúmil le repoussa et continua de parler, ponctuant ses dires de gestes expressifs de ses mains élégantes. Derrière lui, un groupe d'Elfes attendaient en silence, l'air sombre et abattu.
Ma lassitude devait être bien plus grande que je l'avais cru au premier abord, car je m'aperçus à peine qu'il me soulevait de sous mon arbre. Lorsque je repris conscience, j'étais blottie dans ses bras et transportée à travers les bois sans toucher terre, la tête emplie de son odeur mâle et la joue pressée contre la laine grise et douce de sa tunique. Cela ressemblait à un rêve, je me sentais comme au milieu d'un rêve, un pur moment de bonheur absolu, et pendant quelques secondes je me permis de m'y noyer. Puis je prononçai son nom et il baissa le regard sur moi, mais sans me lâcher ainsi que je m'y étais attendue.
« Je suis réveillée, » fis-je remarquer, le rouge qui me montait aux joues répandant une chaleur qui gagna ma nuque.
Il esquissa un sourire en coin. « C'est ce que je vois. »
« Cela veut dire que vous pouvez me déposer, » soulignai-je, commençant à me tortiller. J'étais stupéfaite par la douceur avec laquelle il réussissait à me porter, en dépit de la rapidité de ses pas.
« Bien entendu, » répliqua-t-il, « du moins je le pourrais si tel était mon désir. Mais ce n'est pas le cas. J'ai attendu plusieurs longs mois de vous tenir dans mes bras, et bien que j'avoue que ce n'est pas précisément ce que j'avais à l'esprit, cela fera l'affaire pour le moment. »
Je battis des cils, n'en croyant pas mes oreilles. Je l'avais imaginé en train de me dire un certain nombre de choses, mais certainement pas celle- ci. « Vous prenez bien des libertés, » lui rétorquai-je sèchement. « Je vous ordonne de me lâcher. »
Il gloussa. « Vous êtes sous mon autorité à présent, Keara. Je suis le Gardien des Frontières et je peux agir ici comme bon me semble. De plus, je trouve cela très plaisant. »
Sidérée, je restai bouche bée à ces paroles, incapable de croire qu'il voulût bien l'admettre. « Ce n'est pas parce que je suis plus faible que vous avez le droit de vous sentir obligé d'avoir à redire sur mes agissements ! »
Il émit un petit reniflement et me tint encore plus fermement. Je me consultai un moment sur la légitimité de risquer ce qu'il pouvait me rester de dignité dans un combat que j'étais tout à fait sûre de perdre. « Haldir, » dis-je enfin, « je ne pense pas que vous être en train de devenir émotif. Il n'y a aucune raison de me porter. Je suis tout à fait capable de me porter toute seule. »
« C'est précisément la raison pour laquelle cela me plaît. D'ailleurs, cela vous plaît tout autant, » ajouta-t-il, perfide. « Et je suis présentement en train de faire montre d'une retenue admirable. » Comme pour souligner ses paroles, la main qui se tenait près de mes hanches exerça une infime pression sur mes fesses.
Derrière nous, je pus entendre plusieurs petits rires, qui me prouvèrent que les autres Elfes avaient compris au moins l'essentiel de notre conversation, ce qui me causa le plus vif embarras. A présent écarlate et brûlante, je fermai les yeux de toute mes forces, et je perçus le gloussement léger d'Haldir qui riait sous cape. Il me rétablit un peu plus dans es bras comme nous gravissions une petite colline, mais les efforts qu'ils devait déployer pour me porter semblaient si minimes qu'ils en devenaient insignifiants.
Je dus sombrer de nouveau dans le sommeil en fin de compte, et je me demandai par la suite jusqu'à quel point il avait senti l'étendue de ma fatigue. Lorsque j'ouvris les yeux la fois suivante, nous avions presque atteint la cité, et il me déposa sur la terre ferme. Il m'invita à regarder. Ses yeux ne quittèrent pas mon visage au moment où je contemplai, émerveillée, la cité sylvestre de Caras Galadhon, construite sur les hauteurs des arbres gigantesques aux feuilles d'or que l'on appelaient les mallornes. Avec une immense fierté, il m'expliqua que son peuple, les Elfes Sylvains, qui vivaient en pays de Lórien, se nommaient les Galadhrim, ce qui signifiait « peuple des arbres » ; et que le Seigneur et sa dame régnaient en ces lieux depuis bien plus de mille années.
Il me guida jusqu'au bas de la vallée, et c'est à la nuit tombée que nous atteignîmes les portes de la ville d'arbres. Les brumes se levaient et la nuit était fraîche, et je frissonnai tout en le suivant pas à pas, le long des chemins qui serpentaient entre les arbres. Loin au-dessus de moi, enroulées autour des troncs énormes, des allées aériennes et filigranées montaient en spirale, les branches d'arbre s'entremêlant aux ponts et plate- formes pour se perdre dans les ombres bleutées.
Il me conduisit à l'un des escaliers, et je contemplai avec fascination le travail délicat des ornements artistiques qui avaient créé une cité vivante parmi les majestueux branchages. Au-delà, je pouvais apercevoir un grand bâtiment tissé entre les branches, ses murs faits d'un lacis de dentelle entrelacée en une création poétique, qui répandait une douce et chaude lumière, dont le scintillement semblait me prier de le rejoindre.
Lorsque enfin nous fûmes arrivées au sommet, nous fîmes une halte devant la montée qui menait à la source de la lumière entr'aperçue auparavant. Je savais que je me tenais là où bien peu d'humains l'avaient osé, et l'anxiété fit son retour. Nerveuse, je resserrai les pans de ma cape comme s'il se fût agi d'une ancre. C'est alors que deux apparitions faites d'or glissèrent à ma rencontre, et je les regardai venir avec un émerveillement sans borne. La luminescence radieuse de leur éclat rayonnant dissimulait leurs silhouettes, et je cillai comme ils se matérialisèrent auprès de moi, en ces deux créatures élégantes et familières que j'avais rencontrées parmi les tentes au pied de la cité blanche.
Emplis de toute la sagesse et de la connaissance que leur avaient conférés les âges, les yeux bleus de la Reine s'emparèrent de moi, qui m'y noyai, fascinée. A la différence de la dernière fois, je sentis son esprit effleurer le mien comme elle tentait de lire en moi, mais avait-elle réussi ou échoué, je ne puis dire. Chacun d'eux, elle et Celeborn, me souhaitèrent la bienvenue en leur pays, et je m'inclinai, encore désorientée de me trouver ici.
Elle s'enquit uniquement de mes voyages, son regard allant à Haldir comme pour quérir quelque information, mais je ne pus deviner ce qu'il lui apprit. Il se chargerait de me montrer où j'allais demeurer, et je devrais me reposer avant que nous parlions à nouveau. J'hésitai un instant, impatiente de connaître la raison de ma présence ici, mais Haldir, me saisissant vigoureusement par le coude, m'entraîna plus loin pour me conduire au bas des marches.
Tandis qu'il guidait mes pas, mes pensées prenaient une tournure de plus en plus chaotique. Que voulait-elle de moi ? Qui étais-je pour proposer mes services ? Mon inquiétude et ma curiosité étaient assez grands pour que je m'enquisse auprès d'Haldir de ce qu'il pouvait connaître. A ma surprise, il fronça les sourcils et refusa de me répondre, se contentant de m'affirmer que je saurais bien assez tôt. Toute trace d'espièglerie l'avait à présent déserté, remplacée par une humeur sombre qui me rappela son comportement à l'époque où il était souffrant et dans l'attente de mes soins. Ce changement brutal me troubla, et je fus tentée de le taquiner afin de briser l'hypothétique barrière qu'il avait pu installer depuis un moment.
Il me guida jusqu'à une petite pièce construite entre les branches d'un arbre ; pour tout dire, elle semblait en faire partie intégrante, avec ses murs entrelacés avec les branches, et son plancher recouvert de tapis moelleux. Le lit, placé dans un coin, jouxtait une fenêtre tendue de rideaux qui ondulaient sous la brise. On y avait déposé mes affaires, placées sur une chaise de bois près d'une petite table.
Il s'était déjà détourné et s'apprêtait à partir lorsque je trouvai enfin le courage de lui parler. « Haldir, qu'est-ce qui ne va pas ? »
Il se tourna pour me considérer, ses sourcils sombres levés en signe d'interrogation. « Pourquoi cette question ? »
« Votre comportement paraît changé, » balbutiai-je, en proie à un trouble intérieur dont la cause était les yeux qui me vrillaient maintenant. Avais- je été la victime d'un malentendu quant à l'intérêt qu'il avait pu me porter ? Son esprit s'était-il déjà tourné vers d'autres préoccupations ? Si tel était bien le cas, il ne manquerait pas de trouver ma question impertinente et stupide.
Il se rapprocha de moi, le regard légèrement altéré. « Devinerais-je un quelconque intérêt personnel dans votre interrogation ? Ne niez-vous plus désormais vos sentiments pour moi ? »
J'ouvris la bouche, puis la refermai, confondue par sa franchise. « Ce n'est pas une question de les nier, » répondis-je après quelques instants. « C'est une question de... d'aspect pratique. »
Il parut amusé. « Vous trouvez cela pratique de ne pas quitter la Cité Blanche pendant tous ces mois ? Vous trouvez cela pratique de nier ce que vous savez être votre plus cher désir ? » Il resta devant moi à me scruter, si près que je pouvais sentir son souffle, la chaleur de son corps.
Décomposée, je baissai les yeux. « Je sais que vous me pensez faible... »
« Faible ? » Il se saisit de mes deux mains, qu'il pressa entre les siennes, la voix vibrant d'une note étrange. « Keara, vous n'êtes pas faible. Personne mieux que moi ne sait ce dont vous avez le courage. Il est suffisamment difficile de supporter sa propre douleur, et prendre la douleur d'un autre tout entière sur soi n'est pas une preuve de faiblesse. Vous êtes parmi les plus forts et les plus braves que j'aie jamais connus. Je vous admire grandement. »
C'étaient des mots que j'avais toujours voulu entendre et je ne le savais pas. Cela me plongea dans un profond embarras, mais mes yeux se remplirent de larmes, et comme s'il avait lu mon c?ur, il me prit dans ses bras pour m'offrir son réconfort. Tandis que je sanglotais contre sa poitrine, il m'ôta ma cape et le jeta de côté, murmurant des mots d'Elfique à voix basse, que je n'étais pas en mesure de comprendre mais qui m'apaisèrent tout de même. Nous demeurâmes ainsi jusqu'à ce que je fusse calme de nouveau.
« Nous parlerons plus tard, » dit-il. « A présent vous êtes lasse et devez vous reposer. » C'était le retour de sa voix autoritaire, mais cette fois je ne lui dis pas qu'il était dominateur, car je sentis ses lèvres effleurer mes cheveux avant qu'il ne se retirât. Il me quitta, et avant même que j'eusse le loisir de me retourner, fut aussitôt remplacée par une Elfe.
Elle m'avait apporté de la nourriture, et je la remerciai d'un sourire aussi bien qu'avec des mots. Elle répondit en Langue Commune, d'une voix douce et mélodieuse qui caressa mes oreilles. Puisque des vêtements et quelques autres objets élémentaires avaient été apportés, elle n'avait plus qu'à me demander si je désirais autre chose ; je lui répondis par la négative, et que je n'avais besoin de rien, mais elle répliqua fermement. Je devais accepter ce qui m'avait été offert. Je fus surprise par son insistance, et m'interrogeai sur l'hypothèse envisageable qu'Aragorn eût parlé à Galadriel de ma réticence manifeste à recevoir les cadeaux.
Dès qu'elle fut partie, je quittai la robe grise que j'avais portée pour le voyage et rinçai la saleté des chemins grâce à la bassine d'eau que j'avais trouvée dans la table de nuit. Après cela, je me sentais bien mieux, assez pour dévorer la nourriture qu'elle avait laissé ; puis je grimpai jusqu'au lit qui m'enveloppa d'une douce chaleur, délicieuse et efficace contre les frissons de froid qui me parcouraient. Je sombrai très vite dans un sommeil profond, qui avait bien pu être aidé par une once de magie elfique.
***
Je m'éveillai avant le lever du soleil, consternée à l'idée de l'avoir manqué. Pourtant, je quittai mon lit, sachant qu'il me serait impossible de dormir davantage, et revêtit une robe que j'avais trouvée dépliée au pied du lit. D'où elle pouvait bien venir, je n'en avais aucune idée, mais je n'osai pas refuser de la porter. Elle glissa sur moi dans un bruissement doux et soyeux, ses nuances de bleu m'évoquant la couleur des yeux de Galadriel.
Je sursautai comme un léger grattement retentit à la porte, car l'aube était à peine entamée et le matin ne commencerait que dans une petite heure. J'ouvris la porte pour trouver Haldir appuyé nonchalamment au chambranle. Mon c?ur s'agita fébrilement devant la façon dont ses yeux brillants me parcoururent dans une appréciation muette, pour se poser sur mon visage. J'ignore comment, mais j'eus l'impression de pouvoir ressentir son émotion, et qu'elle était pareille à la mienne.
Il avait pensé que j'aimerais voir le lever du soleil ;et je me demandai comment il avait bien pu le savoir. Je le regardai sans rien dire, dévorée par l'envie de le suivre, et craignant pourtant le pouvoir qu'il détenait sur mes émotions. Lorsque j'acceptai enfin, je vis sourire s'élargir devant le temps que j'avais mis à répondre. Saisissant ma main, il prit le chemin des hauteurs par une volée de marches qui menaient plus près de la cime des arbres. Il ne souffla mot, me serrant à peine la main, mais j'étais bien plus consciente de la chaleur de son toucher que des lumières scintillant alentours.
Nous atteignîmes enfin les dernières marches, et je ne pus que me taire, tournant sur moi-même pour admirer la vue imprenable qui s'étalait devant moi. Nous nous tenions au plus haut sommet de la cité, et cette plate-forme - un flet que les Elfes nommaient talan - nous permettait de contempler le bois d'or dans toute sa splendeur, de quelque côté que l'on se tournât. Au- dessus de nous, les étoiles piquetaient le ciel empourpré de la nuit, les premiers rayons de l'aurore commençant à peine à nuancer le lointain horizon.
Immédiatement, je sus qu'il venait ici souvent, et le vis sourire de ma surprise. Appuyée à la balustrade, je m'offris à la douce brise qui faisait voler mes cheveux sur mon visage et se prenaient dans mes cils. Il s'avança derrière moi, et drapa sa cape autour de nous, son corps pressé intimement contre le mien. En dépit du rythme effréné que maintenait mon c?ur, je n'émis pas la moindre objection, car d'une certaine manière il semblait naturel et parfait que nous admirions tous deux, l'un contre l'autre, ce lever de soleil fabuleux, au matin de ce jour extraordinaire.
De toutes les aubes que j'avais contemplées, celle-ci demeurerait à jamais dans ma mémoire. Ensemble, nous vîmes les premiers rayons mordorés effleurer la cime des arbres, qu'ils nimbaient de vert et d'or. Puis le ciel s'éclaircit, les couleurs se fondant, le nuançant d'or et de rose, tandis que le pourpre s'estompait jusqu'au bleu. Les brumes, qui montaient des profondeurs de la forêt en contrebas, réfléchissaient la lumière de telle sorte qu'elle éclatait dans un arc-en-ciel de couleurs prodigieuses. Cette vue féerique me donna soudain l'envie de pleurer. Sans penser, je me tournai vers lui, incapable de parler tant l'émotion me serrait la gorge. Du pouce, il essuya une larme qui coulait sur ma pommette, puis continua son chemin sur la joue jusqu'à mes lèvres. Nos regards s'entrelacèrent, le soleil et le ciel oubliés en un instant, lorsque sa bouche approcha la mienne.
Ce fut le moment où il m'embrassa, notre premier baiser, un baiser très doux, l'union de nos lèvres étant la plus délicieuse chose que j'eusse jamais connue jusqu'alors. Ses lèvres brûlaient d'impatience, mais d'une manière inexplicable je sentais qu'il faisait preuve d'une grande réserve. Sous la surface, je pouvais sentir sa tension vibrante, une passion inassouvie plus profonde que ce que j'avais jamais imaginé. Tout ce dont j'avais besoin était le courage de l'accepter. Et je sus également qu'il me l'avait laissé comprendre de son plein gré, et de manière intentionnelle ; il me donnait un avant-goût de ce que je pourrais avoir, si seulement je me laissais le désirer. Il m'offrait un choix, presque un défi. Mais je n'étais pas encore prête, pas courageuse à ce point.
Une heure plus tard, j'étais mandée par Galadriel.
A suivre.... --------------------
N/T : Evidemment, j'ai beaucoup ri en traduisant ce passage. Surtout que je pensais très fort à certaine scène tordante de Shrek où... enfin bon, je ne suis pas censée tenir de tels propos devant une assemblée constituée de gens raisonnables ^^ J'espère que la lecture a été bonne, et je vous souhaite de la continuer bientôt. Merci à tous de suivre notre travail à toutes les trois, et amitiés elfiques !
Mélusine.
