Auteur :      Zorca

Titre :          Le tango de…

Base :          GW

Genre :        Yaoï, UA, song-fic, sap v.v, le tube de grand-mère… (rhaaa dans mon jeune temps MDR !)

Rating :       PG-15 pour une scène assez heu… passionnée ? (du moins j'ai essayé ^^;;) dans cette partie

Disclaimer : 'sont pas à moi… 'sont à eux… et je leur rends dès que j'ai fini de faire mumuse avec.

                     'Le tango de Manon' est interprété par Georgette Plana et appartient à ses auteurs.

Chapitre :   C'était un one-shot mais il est trop long… donc le voici en trois parties.

Coupling :   Particulier c'est pour cela que je l'ai fait en U.A. : 13x4…

Pitit mot :    Ca va commencer ici… ^__^… enfin peut-être ^^

Avertissement : Celui-ci se complètera par un avertissement final important (donc à lire SVP !) : 'L'abus d'alcool est dangereux pour la santé'.

Dédicace spéciale : Toujours pour toi ma Mithynette que j'aime ^__^

                              Grand merci à toi Leïliel et à ma Luna coupine à moi ^__-

                              Kissous ^___^

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Le tango de…

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Partie 2 : Les secrets merveilleux…

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Fragile… Si fragile…

Quelle que soit son apparence…

Femme fleur, une rose à peine épanouie qui cachait sous le secret de ses pétales un parfum enivrant et qui portait en elle des épines acérées comme les dents d'un cerbère…

Homme enfant, un jeune Apollon sur les rives de son île déserte qui tremblait face aux Dieux qui le harcelaient et qui dans un regain de rage profonde mettait à mort le serpent…

Belle… Si beau…

Derrière des tissus taillés à même sa peau qui mettaient en valeur son corps en cachant ses trésors…

Robes cintrées au col montant, sage pour une fleur impudique, envolées de jupons lyriques, éventail-pétale, envoûtant, dérobant aux yeux avides le velouté de ses lèvres, corolles vermeilles.

Costumes cintrés sur une chemise à jabot, écrins satinés de couleurs pâles qui caressaient des courbes ensorcelantes contre lesquelles les corps voulaient se presser tout en perdant leur éclat face à la soie de la peau.

Presque tous étaient sous le charme et les cœurs aveugles qui y échappaient s'étouffaient dans le désir…

Tous…

et parmi cette foule le Prince des fleurs était son plus fervent prétendant.

Il faisait à l'androgyne une cour assidue. Chaque soir de fête il déposait sur son siège une rose d'un rouge vif, d'un rouge sang, d'un rouge en fusion, passionné comme pouvait l'être son désir pour le chevalier d'Eon.

La première fois il la lui avait remise en personne avec corporellement la raideur toute aristocratique que semblait lui imposer son éducation.

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« Permettez moi de vous offrir cette rose, même si elle est une offense à votre beauté… car nulle fleur dans nul jardin, quelque soit le soleil qui l'ait nourrie, ne serait être plus éblouissante que celle qui s'offre à ma vue. »

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La comtesse de Beaumont lui avait souri. Elle avait pris la rose délicatement dans ses doigts fins et l'avait portée à son nez pour la respirer avec langueur. Puis elle l'avait quitté sur un silence qui, loin d'être méprisant, avait gonflé le cœur du Prince d'une bouffée de chaleur.

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Treize était un homme romanesque… Prénom étrange pour un jeune homme de bonne famille ? Certes. Mais le Prince le chérissait… d'autant plus qu'il avait croisé le regard du chevalier d'Eon pour la première fois un samedi treize. Son père, Maître Krushrenada, avait la manie des chiffres. Il aimait à jouer avec, à leur trouver des significations de cause à effet et ce chiffre là était pour lui un porte bonheur… Alors il le lui avait offert en prénom… 'pour que tu aies éternellement de la chance' lui avait-il dit… et même si sa mère les avait prématurément quittés lors de la guerre, Treize devait bien s'avouer qu'il avait gardé près de lui son père… et donc sa chance.

Il avait eu une enfance heureuse et dorée, une éducation poussée… En bref son père avait fait de lui une sorte de nabab à la différence près qu'il avait la tête sur les épaules… bien que son corps soit souvent dans les nuages.

Treize avait un grand sens de la famille et de l'honneur. C'était un être passionné qui s'enflammait autant sur des sujets d'actualités, des causes perdues que sur l'art, qu'il soit peinture, opéra ou poème.

Il avait brillé dans une école militaire et était parti, officier, à la guerre… mais heureusement pour son père et malheureusement pour son tempérament de feu, il était resté loin du front des batailles.

A la fin du conflit il était revenu vivre dans la maison familiale. Il n'avait pas d'épouse en vue et ne se sentait pas le désir de vivre loin de son père, d'autant plus que ce dernier vieillissait. Ils recommencèrent donc, à deux, une vie rythmée par les obligations de la vie et l'insouciance des fêtes, une vie douce dans laquelle naquit pourtant une tension passagère.

Un Samedi 13, le Prince des fleurs croisa le regard d'un nouveau convive, un nouvel invité de son père… le chevalier d'Eon.

Etait-ce une femme ou était-ce un homme ? Il n'aurait su le dire mais connaissait celui qui pouvait lui offrir l'information. C'était donc confiant qu'il l'avait demandé à son père… sans se douter le moins du monde qu'il se verrait opposer une fin de non recevoir.

Il lui en avait voulu, comme on peut en vouloir quand on se sent lésé.

Après des dizaines de combats vains pour obtenir la réponse, il avait décidé de passer outres le désir de son père de préserver le mystère de la fête en le suivant dans ses déplacements… mais il s'était arrêté avant de violer le secret des Dieux. Treize était un homme passionné certes, mais romanesque aussi et le mystère ne faisait qu'étayer sa faim de connaissance.

Il s'était alors mis à observer le chevalier d'Eon durant les fêtes mais rien dans le comportant de ce dernier ne trahissait son identit

Rien dans les rares partenaires qu'il choisissait ne trahissait une réelle préférence…

Rien n'avait préparé le Prince des fleurs à l'étincelle qui allait embraser son être.

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Charles de Beaumont hantait son esprit. Il fermait les yeux pour voir des pétales vermeils s'étirer sur un sourire féroce, pour voir des lagons paisibles qui caressaient les âmes.

Il était perdu dans des pensées contradictoires… Il ne se ressemblait plus. Il voulait être proche, si proche de la comtesse de Beaumont… il voulait se fondre en elle. Mais d'un autre côté, il voulait s'en éloigner, le plus possible, ne plus approcher cette rose au parfum envoûtant qui risquait de lui faire perdre son âme… qui lui avait déjà fait perdre son identité, ses certitudes… Car voila, Treize n'éprouvait aucun attrait pour l'homosexualité. Ce qu'il considérait d'ailleurs comme une déviance le rebutait et il ne savait absolument pas comment il réagirait s'il s'avérait que sa comtesse soit pourvue des mêmes armes que lui.

Il avait donc fui sa proximité alors que son corps hurlait de désir. Il l'avait fui d'une façon quasi désespérée, essayant de détourner les yeux quand il l'apercevait, tentant de retrouver ne serait-ce que le dixième de l'attrait qu'il éprouvait pour l'androgyne chez une autre convive de la fête… Mais rien n'y avait fait et les images dans son esprit n'en étaient devenues que plus appétissantes.

Puis son père était mort.

La douleur fut étourdissante, étouffante. Il avait eu l'impression de ne plus pouvoir respirer. Il l'avait pleuré, il avait souffert, il l'avait appelé. Il n'avait déjà plus de mère, mais la chance lui avait laissé son père… et dans ces jours de deuils il avait appris la solitude… mais surtout le plus jamais. Il avait appris que ceux qui l'entouraient pouvaient disparaître et inconsciemment ce fut cela, qui quelques semaines plus tard, le poussa à débuter sa cour à la comtesse de Beaumont.

La première fois qu'il lui offrit une rose il crut mourir. Il était tendu à l'extrême et si son corps n'avait pas autant été crispé, il était sûr qu'il aurait tremblé comme Echo face à Narcisse. Il avait attendu qu'elle soit en femme, identité qu'il espérait de tout cœur être la sienne.

Les semaines s'écoulèrent et Treize apprit à ne plus détourner la tête quand le comte de Beaumont apparaissait. Il apprit à lui adresser les mêmes sourires, il apprit à redessiner du regard cette même stature frêle… et il commença à éprouver le désir, celui-là même qui lui dévorait les entrailles quand, lors d'un tourbillon sur la piste de danse, les jupons de la comtesse de Beaumont s'envolaient pour laisser transparaître l'éclat laiteux d'une de ses chevilles fines.

Qui que soit l'androgyne, le Prince des fleurs avait appris à le désirer, avec autant de force, sans aucune retenue et il lui fallut un grand recul pour l'accepter car lui qui n'avait jamais désiré un homme se sentait prêt à faire du chevalier d'Eon son amant même s'il en était un.

Treize avait fini par être en paix avec ses sentiments… à être en paix avec lui-même… mais pas avec les autres. Il avait beau pouvoir de temps en temps inviter le chevalier d'Eon à prendre son bras lors d'une danse, il n'en restait pas moins qu'il n'était pas le seul à avoir ce privilège et que la situation commençait à lui peser. Il avait de plus en plus de mal à circonscrire son tempérament de feu. Il lui fallait même aller parfois prendre l'air pour éviter de s'enflammer quand il voyait une bouche désireuse tenter de happer les lèvres vermeilles de l'androgyne.

Il avait donc décidé de mettre un terme à ses tourments cette soirée-là, et quand il vit le comte de Beaumont s'éloigner pour se rendre dans la pièce d'eau après une danse, il le suivit pour jouer la scène finale.

Treize appela deux des domestiques pour qu'ils bloquent l'accès au couloir qui menait aux commodités sous n'importe quel prétexte et s'engouffra dans le passage. Il marchait avec retenue alors qu'il avait envie de courir… Pour aller plus vite ? Pour faire demi tour ? Il n'en savait rien alors il avançait, l'esprit empli de phrases vides. Il poussa la porte et stoppa, le souffle court.

Le chevalier se tamponnait de l'eau sur le visage, comme il le faisait toujours après un tango fiévreux. Il se redressa et s'essuya sommairement. Puis il se tourna vers lui et de lui adressa un sourire de complaisance.

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Manon, tes yeux profonds reflètent la nuit brune.

Tes pâles cheveux d'or sont un rayon de lune.

Tes lèvres de corail ont l'air d'un fruit vermeil.

Ton sourire éclatant éclipse le soleil.

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Treize inspira fortement et s'avança légèrement.

« Je n'ai pas eu le temps de vous saluer ce soir, chevalier d'Eon. »

L'interpellé hocha la tête lentement.

« Bonsoir Prince des fleurs. Merci pour la rose coutumière. »

« Bonsoir chevalier. Merci à vous d'illuminer la soirée. »

Tétras lui sourit calmement et se mit en mouvement pour sortir. Il était à deux mètres de Treize, face à lui, quand celui-ci lui demanda de s'arrêter.

« Attendez chevalier. »

Quatre stoppa et l'interrogea du regard. Ses lèvres s'étiraient sur un sourire cynique.

« Dîtes moi votre prénom et votre nom de famille… »

Le jeune homme ne put s'empêcher d'éclater d'un rire fin, sans âme, avant de se reprendre. Combien de fois lui avait-on posé cette question ? De si nombreuses qu'il aurait eu du mal à en tenir le compte s'il l'avait souhaité. Il n'avait plus de temps à perdre à présent avec les hommes, il avait une promesse à honorer et le Prince des fleurs n'obtiendrait pas de réponse au nom de son père. La voix de Quatre se fit lente, doucereuse, vipérine pour renforcer le rictus ironique qui étirait ses lèvres tentatrices.

« Souhaitez-vous en fonder une ? »

Treize s'y était attendu, d'une certaine manière, à tant de froideur, de hauteur. Il s'était attendu à devoir mener un combat. Il l'avait vu danser déjà, il savait qu'avec l'androgyne il fallait se battre pour gagner sur le moindre pas, pour la moindre étreinte, si furtive, si brûlante. Alors il décida de jouer son rôle et d'apprivoiser cet ange fauve par une voix calme, douce, par un regard sincère.

« Avec vous oui… dîtes le moi… »

Quatre eut une moue contrariée. Il aimait la séduction, la provocation. Il aimait les rapports de force. A contrario il n'appréciait que très peu ce genre de scène où face à lui se tenait un prétendant tout aussi chevaleresque qu'honorable qui tentait de le lier à lui par des serments d'éternité... et Quatre détestait ce terme aussi sûrement qu'il haïssait la guerre. Il savait qu'il n'y avait pas de mot plus mensonger que l'éternité.

« Un rêve ne se nomme pas… sinon il disparaît. »

Le Prince des fleurs tiqua sur la moue et vit qu'il faisait fausse route. Trop de douceur avait l'air de nuire à la séduction pour le comte de Beaumont… Alors il redeviendrait en partie ce qu'il était réellement, un homme de décision. L'officier qui sommeillait toujours en lui se réveilla.

« Alors accordez moi un rendez-vous. Voyons nous cette semaine. »

« Une semaine a sept jours… »

Le ton de Tétras s'était fait fatigué, mais la lueur désapprobatrice avait quitté son regard. Treize continua donc sur un ton décisif.

« Donc voyons nous mardi. »

Quatre retrouva sur le coup son apparence habituelle. Un sourire taquin étira ses lèvres alors qu'il répondait, sur une intonation semblant amusée.

« Le second jour pour n'être qu'à deux ? »

Treize s'inclina, théâtral :

« Oui, pour n'être que vous et moi chevalier. »

Le Prince des fleurs était ravi. La discussion paraissait lui être redevenue propice… pourtant il ne se laissa pas aller et prit sur lui pour rester sur ses gardes quand il vit l'expression de son interlocuteur. Quatre avait légèrement baissé la tête sur le côté gauche, séducteur, tentateur même. Son sourire s'était fait enjôleur et son regard, habituellement doux, semblait le provoquer. Il donnait l'impression qu'il menait la discussion à sa guise, qu'il allait l'emmener sur un terrain des plus glissants et que sa guise était de mettre fin au débat.

« Ainsi vous tenez le pari que je suis une femme ? »

Treize lui offrit un sourire charmeur, il était en alerte.

« Non, je tiens celui d'être un homme. »

Tétras s'avança. Son dessein était facilement compréhensible. Il allait dire le mot de la fin et sortir.

« Et si je tenais le même, me provoqueriez en duel pour assouvir votre honneur ? »

Pensait-il réellement qu'avec cette phrase il aurait pu le mettre en déroute ?

Il y avait de cela quelques mois certes, cette question aurait suffi à le mettre en échec, mais le chevalier avait mal avancé ses pièces sur leur échiquier et l'officier était prêt à faire face. Il attrapa donc la main du comte alors qu'il le dépassait sans lui adresser un regard et avec autant de force que de délicatesse, l'adossa au mur. Il se baissa légèrement et baisa sa main en susurrant sa réponse.

 « Très certainement chevalier… »

Si Quatre fut étonné, il n'en laissa rien paraître. Il avait même l'air plutôt amusé alors qu'il se redressait pour tenter de se dégager de la prise légère.

« Oh… et quelle serait votre arme ? »

Treize attrapa sa seconde main et la maintint fermement contre le mur. Maintenant qu'il avait bloqué le chevalier, il n'avait pas l'intention de facilement le laisser s'échapper. Cette proximité le rendait fiévreux, il avait envie de le dévorer. Il sentait le feu de son tempérament s'attiser.

« Armes à feux ou épée ?… Cela ne reviendrait-il pas au même pour notre duel ? »

Tétras eut un sourire cynique, sûr d'avoir trouvé une nouvelle solution pour sortir de la salle d'eau.

« Et si j'étais une femme ? »

Le sourire que lui adressa le Prince des fleurs en retour l'ébranla. Treize Krushrenada le provoquait en l'avertissant que la discussion serait bientôt close car il en était le seul juge. Ce que Quatre avait cru contrôler n'était qu'apparence. Son adversaire avait mené l'engagement d'une poigne de fin stratège.

« Je craindrais de devoir tout de même vous provoquer en combat singulier… »

Le chevalier d'Eon se fit enjôleur et prit le parti de gagner un peu de temps. Il demanda donc, taquin.

« Oh… et quel serait votre motif ? »

Et il vit dans le regard du Prince qu'il venait de perdre le combat.

« Le même…

La voix s'était faite rauque de désir et Quatre eut un frisson involontaire alors que le Prince s'inclinait légèrement pour souffler doucement sur le dos de sa main avant d'y déposer un baiser, à la fois sage et charnel.

Le désir de vous juger pour mon asservissement…

Il retourna sa main lentement et en entrouvrit la paume du bout des doigts pour la regarder cinq secondes. Puis il releva les yeux et fixa d'un  regard prédateur le chevalier.

Je veux assouvir mon corps…

Il embrassa la paume lentement avant de la chatouiller délicatement avec le bout de sa langue.

Tetras trembla légèrement. Le feu qui habitait son vis-à-vis commençait à l'enflammer et Treize le sentit.

Il se redressa, tête basse, sans lui lâcher la main qu'il maintenait fermement et se colla contre son corps en le plaquant plus encore sur le mur. Ses yeux brillaient de désir.

Je veux assouvir votre corps.

Le chevalier trembla encore. Il sentit la fièvre l'envahir en percevant sur son ventre le sexe dur du prince des fleurs… Ce dernier baissa un peu plus la tête pour l'embrasser mais Quatre dans un dernier soubresaut de rébellion la tourna. Par cette action il lui offrit inconsciemment accès à son cou que Treize se mit à embrasser légèrement, puis à suçoter délicatement avant de le mordiller avec envie… Tétras gémit et le Prince en profita pour prendre possession de sa bouche dans un ardent et fougueux baiser avant de se décoller légèrement, le laissant à bout de souffle, à bout de force, alors que lui n'était qu'aux prémices de sa détermination. Il l'observa quelques secondes avant de commencer à embrasser son visage, ses paupières closes, la commissure de ses lèvres entrouvertes qui quémandaient à présent un baiser…

Qui que vous soyez je vous veux.

… ses pommettes, sa maxillaire…

Homme ou femme.

… son front, ses joues…

Vous me brûlez de l'intérieur.

Il continua en lui embrassant les lèvres de temps en temps et en couvrant son visage de baisers dévorants comme pouvait l'être sa passion.

Prenez moi pour amant chevalier d'Eon…

Il s'arrêta alors et colla son front contre celui de Tétras. Son souffle était court et dans sa voix transparaissait l'urgence et…

… et garde moi. »

Quatre avait perdu la bataille. Il était perdu dans l'envie qui voulait naître en lui… Alors il murmura un oui résigné et Treize se recula de quelques dizaines de centimètres pour lui enlever sa perruque d'un geste impérieux.

Le Prince l'observa quelques secondes, son visage aux traits fins, ses lèvres entrouvertes, ses cheveux d'or, ses cheveux de soleil, magnifiques, brillants, luisants, scintillants…

Il avait les cheveux courts…

Il avait la coiffure d'un homme.

Treize tenait un homme dans ses bras…

Un autre homme…

Il était dans le secret des Dieux.

Certains secrets n'étaient pas faits pour être divulgués, ils détruisaient bien plus de choses qu'ils n'en construisaient… Cela aurait pu être le cas. Treize s'en fit distraitement la remarque avant de s'abîmer, noyé volontaire, dans l'océan ravagé des prunelles de Quatre.

Il le désirait, toujours autant, toujours aussi fort et peut-être même encore plus, son androgyne égaré…

Il paraissait toujours aussi fragile et peut-être même encore plus alors qu'il s'interrogeait sur sa réaction. Il était vrai que pour le chevalier, il n'y avait aucune certitude. Pour lui Treize n'était qu'un homme qui était venu le prendre dans ses bras en espérant qu'il était une femme… mais le Prince des fleurs savait à présent qu'il était surtout un homme qui ne regrettait pas le moins du monde d'en tenir un autre dans ses bras.

Il se pencha alors lentement et murmura contre son cou.

« Quel est ton nom ? »

Quatre frissonna. Le souffle qui caressait sa peau était brûlant.

« Je ne le dis à personne. »

Treize embrassa légèrement la peau veloutée sous son oreille.

« Dis le moi. »

Et le chevalier d'Eon perdit la guerre.

« Tétras de Sable. »

Quatre n'eut pas le temps de savoir ce qui était en train de lui arriver… il n'en eut pas la moindre envie non plus. En quelques secondes le calme apparent de Treize s'évapora et il se retrouva soulevé par deux bras puissants qui le plaquèrent de nouveau contre le mur. Son souffle se coupa sous l'impact qui sans être violent fut saisissant et le Prince des fleurs ne lui offrit pas le luxe de le récupérer. Sa bouche, demandeuse, vint clore la sienne de baisers désireux avant de le dévorer, avide… et Quatre voulait être dévoré encore. Il ceintura les hanches de Treize de ses jambes. Le Prince se frotta contre lui avec passion, avec force, avec désir et ce qui restait encore de raison dans leur esprit fut consumé dès que leurs érections se pressèrent.

Treize le caressait, essayait désespérément de toucher la peau sous son costume en conquérant sa bouche avec ardeur, encore et encore, se frottant et dévorant, encore et encore. Quatre augmenta leur contact, la pression, prit possession des baisers, passionné. Ils gémissaient en en demandant encore. Ils savaient qu'il fallait s'arrêter mais continuaient. La possession, le désir, le plaisir se mêlaient et les entraînaient, les évaporaient, les essoufflaient, encore et encore, plus fort…

S'arrêter, continuer.

Où était le corps ?

Sous le tissu.

Encore.

Désir.

Où était le corps ?

Sous le tissu.

Encore.

Plaisir.

Où était le corps ?

S'arrêter pour le sentir,

Pour le découvrir,

trop d'envie,

continuer,

encore

et encore,

plus fort, plus de contact, pas assez, baisers dévorants, enflammés comme le gouffre des enfers où les plongeait la déraison, désespérés comme s'ils s'attendaient à être frappés par la fatalité... Leurs corps ne pouvaient plus s'arrêter. Les murmures devenaient râles, devenaient urgence et Quatre mordit les doigts que Treize avait présentés à sa bouche alors qu'ils perdaient leur souffle sur un dernier gémissement étouff

.

.

'Manon prends moi, prends moi, je te veux car je t'aime.'

Lui dit son amoureux dans un élan suprême.

'Viens près de moi, je sais des secrets merveilleux

Qui t'ouvriront les yeux sur un au-delà mystérieux.'

.

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Ils restèrent de longues minutes serrés l'un contre l'autre à reprendre leur respiration, lentement. Ils ne parlèrent pas. Les choses importantes pour ce soir avaient été dites et faites et Quatre remercia mentalement Treize de ne pas partir dans une envolée lyrique pleine de serments aussi faux que dérangeants.

Le Prince des fleurs ne desserrait pas son étreinte et ne semblait même pas penser à le lâcher un jour… Pourtant le silence fut rompu quand de ses lèvres humides s'échappa un léger rire éreinté.

« Nous n'avons pas été très sages… Qu'en dites-vous cher Chevalier ? »

Quatre le repoussa par les épaules pour reprendre plus aisément sa respiration encore erratique.

« Il semblerait, Prince des fleurs. »

Treize sourit légèrement. La réponse sur un ton lointain le peinait même si au vu de ce qu'il venait de se passer elle était naturelle. Il avait réussi à conquérir son corps mais la guerre n'était pas finie. Le territoire de son âme était bien mieux gardé et Treize se fit la promesse de défaire cette dernière forteresse.

Il observa Tétras quelques instants alors que les sensations et images de ce qu'ils venaient de faire lui revenaient en mémoire… Le chevalier d'Eon était un homme… Il remua la tête imperceptiblement en remettant son introspection à plus tard, rassuré de voir que ces pensées ne lui laissaient pas un goût âpre dans la bouche. Il fixa alors de nouveau son amant avant de rire de bon cœur, frappé par l'apparence de l'androgyne. Il murmura, attendri.

« Tu as une mine défaite Tétras. »

Quatre tourna la tête vers lui pour ancrer dans le sien un regard encore un peu perdu.

« Vous aussi. »

Treize lui sourit avant de lâcher sur un ton entraînant :

« Alors, rendons-nous présentables afin de retourner parmi les convives. »

Et ils s'y attelèrent, pendant les minutes qui suivirent, chacun de leur côté, pour essayer d'estomper l'inconfort de leur débordement.

Treize fut prêt le premier et attendit patiemment que Quatre jugea son apparence acceptable pour le prendre par le bras. Ils retournèrent dans la salle qu'ils traversèrent sans s'arrêter. Le Prince arborait un sourire vainqueur alors que le comte semblait éreinté. Les invités de la fête les détaillèrent sur leur passage et si rien dans leur apparence ne trahissait ce qui venait d'avoir lieu, beaucoup se doutèrent que le chevalier d'Eon avait fait une autre victime… Beaucoup envièrent le chanceux Prince des fleurs qui allait à coup sûr pouvoir se plonger dans le secret des Dieux.

Les rares personnes qui savaient que Tétras était un homme furent étonnés de comprendre que le Prince des fleurs aimait les duels à armes égales mais ne dirent rien. Ils ne pouvaient rien dire, il en était ainsi. Le chevalier d'Eon était une sorte d'institution dans la fête. Il faisait parti d'une réglementation sine qua non à laquelle on adhérait pour pénétrer ce lieu dans lequel tous les secrets devaient être à jamais tus.

Les interrogations cessèrent alors que le pseudo couple entrait dans l'alcôve des boutons d'or et le Prince y fit s'installer son prisonnier de guerre après l'avoir introduit comme il se devait auprès des autres convives.

Pas de questions.

Pas d'indiscrétions.

Pas de jugement.

La discussion resta légère, agréable et Treize y prit immédiatement place. Quatre aurait pu en faire tout autant vu que le groupe, bien loin de l'exclure, était ravi de l'accueillir en son sein… Les groupes étaient souvent ravis d'accueillir ceux qu'ils appelaient 'les jeunes gens en fleurs' parmi eux. Ils essayèrent donc de l'inclure, mais ses réponses restaient évasives et son esprit distrait. Quatre était fatigué.

Au bout de quelques minutes de silence de sa part, le Prince des fleurs lui tapota l'épaule pour attirer son attention.

« Tenez cher chevalier. Buvez, cela vous rendra d'humeur joyeuse. »

Pendant qu'il lui parlait il avait ôté une cuillère perforée du dessus d'un verre pour lui tendre en souriant. Tétras avait suivi ses gestes sans s'interroger et le remercia d'un sourire encore un peu perdu avant de porter à sa bouche le breuvage vert liquoreux. L'odeur était fortement sucrée et anisée, tout comme le goût. La texture était épaisse et soyeuse en bouche mais l'alcool piquait très vite la langue et la gorge quand on l'avalait.

Quatre toussota. Il n'avait pas l'habitude de boire de la liqueur aussi forte et le champagne suffisait amplement à embrumer son esprit. Il trouva cela bon pourtant. Le goût qui persistait dans la bouche était indéfinissable, un mélange de menthol et d'herbes aromatiques, sucré et pourtant amer, indéniablement interpellant.

« Aimez-vous chevalier ? », lui demanda un homme d'une trentaine d'années qu'il identifia sous le nom du Duc Blanc.

Tétras reporta la liqueur verte à ses lèvres et en reprit une gorgée apaisante.

« Oui. Qu'est-ce ? »

Le Duc Blanc lui sourit avec un air de connivence en lui répondant, comme si Quatre aurait dû comprendre quelque chose. Mais ses paroles ne le heurtèrent pas le moins du monde.

« De l'herbe de Saint-Jean, illustre chevalier d'Eon. »

« Alors béni soit-il. »

Le comte de Beaumont finit son verre d'une traite et le reposa sur la table. Il se sentait léger. Il avait envie de rire d'un seul coup et toute impression de fatigue l'avait quitté. Il reporta son attention sur la desserte pour essayer de détailler la cuillère perforée qu'il avait entraperçue tout à l'heure. Elle avait l'air d'être en argent massif et était finement ajourée. Les dessins qui la parcouraient, semblaient former des arabesques orientales mais bizarrement ils ondulaient, comme la mer sous l'effet du vent. C'était magnifique. Un des convives attablés la prit pour la déposer au-dessus de son verre et Quatre observa, comme hypnotisé, l'utilisation qu'il en faisait.

Il y déposa un sucre sur lequel il versa la liqueur verte. Elle coulait doucement en scintillant, comme si elle envoyait des flashs de lumière dans toutes les directions…

« Chevalier ?... »

Elle était un phare scintillant sur l'océan ondoyant de la cuillère, océan dans lequel semblait se répercuter en ondes de choc l'écoulement lent et rythmé du breuvage.

Les arabesques paraissaient se contorsionner pour devenir des vagues dételées, c'était féerique.

Le chevalier d'Eon observa la scène, fasciné, jusqu'à ce que le flux de liquide qui l'alimentait cesse.

« Chevalier !?... »

Quatre fit couler ses yeux le long du verre, déçu que la féerie soit rompue, avant de tomber sur un spectacle plus saisissant encore. La liqueur brillante s'était opacifiée dans la coupe. Elle semblait renfermer des brumes… des brumes mouvantes… des brumes dansantes… des esprits magiques qui jouaient à se rattraper, à se fondre dans les autres. Tétras pouvaient presque entendre leurs rires cristallins, oui, il les entendait.

« Chevalier ! »

Treize l'avait saisi par l'épaule pour le remuer, et même si son mouvement paraissait délicat et tout en retenue, il lui avait inculqué assez de force pour le sortir une bonne fois pour toute de ses rêveries.

Tétras releva vers lui des yeux étonnés dont l'expression changea progressivement pour devenir amusés et le chevalier d'Eon éclata de rire.

Il avait entendu la voix de Treize l'appeler mais elle était étrange, comme passée sur un xylophone à la limite de l'asphyxie.

Il avait alors redressé la tête, étonné… et d'autant plus encore quand il le vit. Son visage se déformait en ondoyant. Son nez se gonflait lentement comme un ballon de baudruche avant de se dégonfler rapidement et l'air qui le quittait allait grossir ses joues… tellement… tellement… Treize finissait par ressembler à un hamster qui avait fait dans ses bajoues ses provisions de nourriture pour l'hiver… Et Quatre le trouvait si mignon avec son petit nez frétillant, ses petites oreilles toutes rondes et poilues, ses petits yeux tout brillant… Si mignon, tellement drôle !

Il ne pouvait plus s'empêcher de rire, il en pleurait.

Il tenta tant bien que mal de lui caresser sa joue ronde mais son bras était si lourd.

« Que vous êtes mignon Prince des rongeurs ! »

Il l'avait haleté dans un rire avant de ne plus pouvoir s'exprimer que par des onomatopées et Treize haussa un sourcil aristocratique avant de sourire avec douceur.

« Je crois que notre chevalier ne connaissait pas ce breuvage Prince des fleurs. »

« Je le crains fort, cher Duc Blanc, mais cela ne rend le chevalier d'Eon que plus attendrissant encore. »

Car ce que Tétras ne pouvait pas savoir, était que la passion commune de ce groupuscule là était la dégustation de l'absinthe. Elle avait été interdite de vente et de consommation en 1915, mais quand on possédait une telle fortune, les frontières n'étaient que d'immenses portes largement ouvertes. On l'appelait la fée verte, la boisson qui rendait fou. Elle avait été à l'origine d'une grande polémique jusque dans l'assemblée où ses détracteurs avaient fait face à ses apologistes. On disait d'elle qu'elle était une drogue dure soumise à dépendance, qu'elle provoquait des crises d'épilepsie, d'hallucinations, de délires, voir même de violence. Elle fut donc interdite en France après l'avoir été en Suisse pour des raisons de santé publique. Mais dès que le décret fut passé, des réseaux de contrebande se mirent en place pour continuer à l'acheminer. Les personnes d'influence purent ainsi continuer à s'offrir la muse des artistes maudits.

L'âme de Quatre était caressée par les doigts de cette fée. Il avait passé les heures suivantes à rire. Il s'était levé et avait regardé la piste de danse, ébahi, avant de s'y rendre en courant. Et là il avait tourné et virevolté comme s'il essayait d'attraper des milliers de papillons multicolores qui jouaient avec lui.

Puis il était revenu se rasseoir en riant, éreinté, échevelé avant de s'allonger en boule sur les cuisses du Prince et de s'y endormir en souriant.

Treize avait alors murmuré à son oreille :

« Je vais passer ma vie à prendre soin de toi cher Tétras et plus jamais tu ne cacheras ton rire d'ange derrière un sourire de démon. »

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'Manon, prends avec moi le poison de folie

Qui charme et vous étreint, qui grise ma jolie.

A nous aimer d'amour, nous passerons la vie.'

C'est le ciel oui, Manon, ouvre le magique poison.

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A suivre avec la dernière partie : Brisez vos archets.

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Avertissement final : L'absinthe d'origine est toujours interdite en France et ce même si elle est en vente libre dans d'autre pays. Ses possession, production, consommation sont répréhensibles et passibles d'amendes et de peines de prison.

Je ne fais bien évidement pas dans ce texte et ce en aucun cas (la fille qui insiste ^^;;;) l'apologie de sa consommation. Cet alcool est interdit donc point barre.

Pour information 1 : D'un point de vue 'scientifique' ou pour ceux qui se demanderaient 'mais pourquoi l'absinthe faisait cet effet l ?' : En résumant au maximum (malheureusement pour moi je n'ai pas la science infuse, juste un minimum de culture G et quelques recherches sur le sujet derrière moi.) : La distillation des fleurs d'absinthe produisait du méthanol contrairement aux autres alcool qui eux sont formés d'éthanol. Son ingestion provoquait donc des lésions neuronales permanentes, ce qui n'est pas le cas pour l'éthanol. Une consommation régulière et importante d'absinthe provoque donc des troubles irréversibles, troubles qui peuvent apparaître immédiatement chez les personnes sensibles.

Pour information 2 : De nos jours en France de l'alcool appelé absinthe est en vente libre mais il n'y a plus de fleurs d'absinthe dans sa production. Il est fabriqué à base d'anis, de fenouil, d'aneth, de menthol et de diverses plantes aromatiques pour se rapprocher le plus possible du goût d'origine. Celui-ci est bien évidement légal.

Pour information 3 : Dans mes pérégrinations sur le net j'ai trouvé différentes dates pour la prohibition de l'absinthe en France. J'ai mis 1915 car il fallait bien en mettre une, mais j'ai aussi trouvé 1902 et 1908.

Bye ^.^