** Chapitre 9 **

Il avait d'abord senti un bruissement d'ailes. Ensuite, lorsqu'il avait ouvert les yeux, il avait vu l'oiseau. Il avait souri. Revigoré par son contact, il avait renoncé à partir pour de bon. Il avait eu l'impression qu'une immense main l'emportait à travers le ciel.

Il poussa un profond soupir et ouvrit les yeux. Il y avait du carrelage au dessus de sa tête. Il fronça les sourcils et sentit soudain leur présence.

Tornade s'était précipitée vers lui, lorsqu'il avait soupiré. Tout comme Scott ou Logan, il avait eu l'air désorienté. Il tourna la tête et lui fit un sourire :

« J'ai encore fait un cauchemar, Tornade ? »

Mal à l'aise, elle jeta un coup d'œil en arrière. Suivant son regard, il découvrit Malicia, Scott, Logan, Kurt.

« L'infirmerie ? Mais… pourquoi ? »

« Vous ne vous souvenez plus ? »

Il lui fit signe de l'aider à se redresser. Elle s'assit à côté de lui, comme elle l'avait fait pour Scott, et le laissa s'appuyer contre elle. Il semblait plongé dans ses pensées :

« Eh bien… J'ai fait ce cauchemar qui t'a fait voler à mon secours… puis je me suis rendormi. Et je me suis réveillé ici. Quelle heure est-il ? »

« Presque 6 heures. » dit-elle. « Vous êtes sûr que vous ne vous rappelez de rien ? »

« Tu veux dire, de mon cauchemar ? »

« De tout, professeur, de tout. Scott et Logan ont vécu quelque chose de… spécial. Vous ne vous rappelez vraiment de rien ? »

« Puisque je te dis que non ! M'expliqueras-tu à la fin ? »

Surprise par la colère du professeur, elle sursauta. La scène du bureau lui revint en tête. Se pouvait-il qu'il leur cache quelque chose ?

« Professeur… Si vous aviez des ennuis, vous nous le diriez, n'est-ce pas ? »

« Tornade… s'il te plaît. »

Il passa la main sur son front. Elle guetta sa réaction, mais il ne parut pas surpris de la blessure qu'il sentit sous ses doigts.

Elle regarda d'abord Kurt, puis Scott et Logan, suppliante.

Elle sentit tout à coup le professeur trembler avant de murmurer :

« J'ai froid… j'ai tellement froid… »

« Ah oui ? Vous êtes sûr que vous ne tremblez pas pour une autre raison ? Par exemple, la peur que nous ne réalisions que vous avez cherché à tous nous tuer... » Le ton était froid, plein de reproche, plein de rage aussi. C'était Scott qui venait de parler. Derrière ses lunettes, il regardait fixement Charles Xavier.  Au réveil du professeur il s'était remémoré des images qu'on avait dû vouloir lui faire oublier...mais à présent que le produit n'avait plus d'effet, il revoyait le Professeur, une seringue à la main, s'approcher de lui. C'était quelques jours plus tôt, dans son bureau... « Pourquoi avez-vous fait cela, Charles ? Pourquoi vouloir me supprimer ? Je vous faisais confiance... » dit Scott, d'un ton accusateur. Il avait le sentiment d'avoir été trahi. Celui qu'il considérait comme son père...avait voulu le tuer ! C'en était trop. Scott se leva de son lit et se rua vers la porte.

Charles Xavier regarda Cyclope quitter la pièce, sans dire un mot. Tornade évitait de le regarder, elle savait que Scott disait vrai, elle le sentait. Mais pourquoi ? Elle préféra s'éloigner du Professeur qui fit un geste pour la retenir. Elle rejoignit Kurt, les larmes aux yeux. Et s'il avait raison ? S'ils s'étaient tous trompés ? Elle n'osait pas regarder l'homme qui l'avait élevée… elle ne pouvait pas…

Kurt sentit que Tornade n'allait pas pouvoir supporter tout cela très longtemps. Il la prit par les épaules et, doucement, la conduisit vers une chaise.

Un lourd silence régnait à présent dans l'infirmerie. Ce fut Logan qui le brisa. « Scott a raison », dit-il, « moi aussi je vous ai vu. C'est vous qui injectiez cette...cette chose dans sa nuque tout à l'heure, juste avant que votre complice ne s'amuse à me filer un coup de massue...Et je suppose aussi que, de la même façon, c'est vous qui avez injecté le produit à Malicia pour qu'elle me liquide. Pourquoi, Charley ? Pourquoi est-ce que vous voulez vous débarrasser de nous ? Est-ce que vous avez fini par devenir comme votre copain Erik ? Un dingue ?» Son ton était agressif, mais il au fond de lui il était surtout très inquiet. Au fond de lui il savait que le professeur Xavier était incapable d'un tel acte. Il devait y avoir une explication...

Il paraissait étourdi.

« Je… non, non, c'est impossible. Impossible. »

Il n'osait pas plonger dans son esprit, il avait peur. La même peur que lorsqu'il avait abandonné la lutte face à Jason.

« Je ne me souviens de rien, absolument rien. »

Il avait baissé la tête. Lorsqu'il la releva, il avait les yeux brillants de larmes :

« Je vous jure, je vous jure que je n'aurais jamais fait cela de mon plein gré… Je dois me concentrer, voir ce qui est vraiment arrivé… Logan, peux tu m'aider à rejoindre mon fauteuil ? »

Tornade se pencha sur Kurt et chuchota :

« Kurt, je crois qu'il a peur… mais je ne pourrais pas dire si c'est par ignorance, ou parce qu'il sait exactement ce qu'il se passe… Il… Non, rien. »

Kurt lui prit la main et lui sourit mais ne dit rien. Il savait à quel point il était difficile pour Tornade d'accepter tout ce qui arrivait, et il voulait lui montrer qu'elle n'était pas seule, que lui était et serait toujours là pour elle, pour l'aider à surmonter ces événements.

Logan regarda le Professeur d'un air de défi. « Navré Charley, mais je suis incapable de me lever. A cause de vous ... Alors quand bien même je voudrais vous aider, je ne pourrais pas ! » Il regarda Charles Xavier droit dans les yeux, attendant une réaction.

Le Professeur Xavier soutint son regard, plongeant ses yeux dans ceux de Logan alors que la rage de Wolverine le transperçait comme l'auraient fait ses griffes.

« Soit. » dit finalement Charles Xavier d'une voix triste. « Il ne me reste qu'à rester ici et tirer cette histoire au clair. »

Il se recoucha et sentit qu'il se remettait à trembler. Il croisa les mains sur sa poitrine, prit une profonde inspiration et ferma les yeux. Visiter son propre esprit n'était jamais une partie de plaisir, mais en faire profiter les autres était une véritable torture.

Tornade pâlit et mit les mains sur ses tempes, avant d'expliquer à ceux qui étaient encore présents ce qui arrivait :

« Le professeur, je crois qu'il est en train de regarder ce qu'il lui est arrivé, et il a lié son esprit aux nôtres. Nous verrons tout ce qu'il voit, nous saurons tout, en même temps que lui. »

« Scott, peux-tu venir dans mon bureau ? »

« Je pense avoir trouvé un antidote qui garantira ta sécurité. Fais-moi confiance. Ta cicatrice te brûlera pendant quelques jours, mais ce n'est que passager. »

Il se revit, lui, injecter le produit dans le cou de Scott. L'image fut remplacée par l'infirmerie, Scott étendu sur le lit. Il se revit, près de lui. Il vit la seringue.

« Malicia, occupes-toi de Logan, veux-tu ? »

La jeune fille. Il avait pris le contrôle de son esprit pour faire du mal à Logan.

Il ressentit la douleur de Logan, celle de Scott. Et vit un homme debout à côté d'eux. C'était lui. Debout. Il vit son double pointer le doigt sur lui, et le visage se déforma peu à peu pour prendre les traits de Jason. Il se revit dans le bureau. La bouteille. Il ne buvait pas, ou si peu.

« Jason, que fais-tu ? »

« Vous ne devinez pas Professeur ? Ils vont mourir, vous serez le dernier. Vous les verrez quitter ce monde parce que vous les tuerez de votre main. »

Mais ce n'était pas la voix de Jason. Il ne parlait plus. Il n'était plus. Impossible.

Il rouvrit les yeux alors qu'il comprenait toute l'étendue du désastre.

Tornade était debout à côté du professeur. Il était livide et ses yeux étaient cernés, enfoncés dans leurs orbites. Il claquait des dents, et ne parvenait plus à contrôler les tremblements qui l'agitaient.

La jeune femme se souvint de ce que lui avait dit Jean. L'expérience était peu agréable, éprouvante, et surtout, elle imaginait ce que pouvait ressentir l'homme qui était allongé là.

Elle posa les mains sur celles du professeur qui la regarda, épouvanté.

« Ne vous en faites pas, nous allons trouver une solution. Nous allons trouver qui est derrière tout cela. »

Il ouvrit la bouche, mais aucun son n'en sortit.

« Tornade… dis à Malicia, dis lui de me mettre hors d'état de nuire, elle le peut. Je ne serai plus une menace pour vous. »

La jeune femme fit comme si le message télépathique ne lui était jamais parvenu. Elle embrassa le professeur sur le front avant de lui injecter un calmant. Puis, elle rejoignit les autres.