-Heero est un vampire? s'écria Wufei, stupéfait.

Duo était toujours sous le choc de cette révélation. Même la lumière du jour ne parvenait pas à le dissiper tandis qu'il partageait le terrible secret d'Heero avec le reste de sa bande.

-Je n'arrive pas a y croire, murmura-t-il, sentant la nausée le gagné. La minute d'avant, nous étions en train de nous embrasser, et soudain... (Il se tourna vers Trowa. ) Un vampire peut-il être quelqu'un de bien?

Le français était le tact incarné, mais jamais il ne leur avait menti. Pour autant qu'ils le savaient.

Sil n'existe qu'un cas au monde et que je suis tombé dessus, je pourrais vivre avec, songea-t-il.

Trowa confirma ses craintes.

-Techniquement, un vampire n'est même pas " quelqu'un ". Il possède les souvenirs et même la personnalité du corps qu'il habite, mais au fond, il reste un démon. Il n'y a pas de demi-mesure.

Wufei se tourna vers Duo

-Je suppose que ça veut dire non...

Le natté secoua la tête

-Dans ce cas, comment expliques-tu son comportement? Pourquoi a-t-il été gentil avec moi? Parce que ça faisait partie des plans d'Oz? Ça na pas de sens!

Et puis, ce serait trop horrible...

Découragé, Duo se laissa tomber sur un banc. Quatre, qui avait gardé le silence jusque là, s'assit près de lui.

-On a un problème sur les bras... et pas un petit, résuma-t-il. Calmons-nous et tachons de le considérer de manière objective.

Duo hocha la tête et attendit que quelqu'un trouve une solution. Celle-ci ne se fit pas attendre.

-Heero est un vampire, donc un ennemi. On doit l'éliminer, je crois que c'est clair, dit Wufei.

Non, songea Duo, désespéré. Il leva la tête vers Quatre, qui soupira.

-Wufei a raison.

-Je sais que tu éprouves des sentiments pour ce type, reprit le chinois, mais ce n'est pas comme si tu étais amoureux de lui, pas vrai?

Duo eut beau garder le silence, il lut la réponse sur son visage.

-Tu es amoureux d'un vampire, s'exclama-t-il, outré. Tu as perdu la tête ou quoi?

-Quoi?

Debout derrière Wufei, Cordélia Chase en resta bouche bée. Le jeune homme se mordit la lèvre.

-Enfin, enchaîna-t-il sévèrement, tu devrais arrêter de lire toutes ces fictions gothiques. Lestat n'existe pas tu sais!

Les narines de Cordélia frémirent comme celles d'un taureau sur le point de charger... mais plus délicatement.

-Où a-tu acheté ça? Demanda-t-elle.

Duo et les autres la virent fondre sur une fille qui traversait le campus, vêtue de la même robe qu'elle. Une petite chose noire ornée d'un motif pop coloré.

-C'est une Todd Oldham. Tu sais combien elle coûte? cria Cordélia.

La fille tenta de s'enfuir, mais elle l'attrapa par le cou pour lire l'étiquette du vêtement.

-Je parie que c'est une imitation...

La fille se débattit encore, mais Cordélia, reine de la brigade de la mode n'allait pas la laisser s'en tirer à si bon compte.

-Une vulgaire copie! cracha-t-elle. Voilà ce qui arrive quand on signe des accords de libre-échange!

La foule engloutit les deux lycéennes.

-Et moi qui croyait avoir des problèmes, lâcha Duo.

* * *

Heero longeait le couloir qui conduisait à son appartement. La porte était ouverte.

Alors qu'il tendait une main vers l'interrupteur, il sentit une présence et se figea.

-Qui est là?demanda-t-il, nullement effrayé, mais sur ses gardes.

-Une amie.

Il se retourna. C'était Darla qui émargeait des ombres, un sourire aux lèvres, ravie de le mettre si mal a l'aise.

-Salut, dit-elle. Ça fait un bout de temps...

-Une éternité acquiesça Heero sans se départir de son calme.

-Ou deux. Mais quand on aime, on ne compte pas, répliqua Darla.

Heero la détailla.

-Tu as adopté l'uniforme des lycéennes catholiques? La dernière fois que je t'ai vue, tu étais dans ta période kimono...

-Et la dernière fois que je t'ai vu, tu ne t'intéressais pas aux lycéens.

Darla ne pouvait pas comprendre à quel point sa remarque blessait Angel. Il revoyait encore l'expression horrifiée de Duo quand il avait découvert son vrai visage. Jamais il ne l'oublierait ; elle était gravée en traits de feu dans son esprit.

-Ça ne te plaît pas? minauda Darla. Tu te souviens de Budapest, au début du siècle? Tu étais un si mauvais garçon à l'époque du tremblement de terre...

Elle se dirigea lentement vers lui, comme si elle s'apprétait à lui bondir dessus.

Le souvenir de ses propres actions maléfiques remplit Heero d'une honte brûlante.

-Toi aussi, tu as fait pas mal de dégâts.

Darla gloussa tout bas et le regarda par en dessous d'un air coquin.

-Existe-t-il chose plus merveilleuse que les catastrophes naturelles? Toute cette panique, ces gens qui couraient dans les rues... C'était comme cueillir du raisin directement sur la vigne.

Elle fit le tour de l'appartement d'Heero en examinant ces affaires. Le lit, en particulier, lui arracha une grimace.

-Ben voyons... Tu vis à la surface, tout comme eux. Toi et tes nouveaux amis nous attaquez, comme eux. Mais devine quoi? Tu n'es pas l'un deux.

Sans crier gare, elle tira sur la ficelle d'un store et lentrouvrit. Un rayon de soleil atteint Heero comme un arc de feu.

Tandis que la douleur se répandait dans ses veines, il poussa un cri et s'effondra sur le sol.

-N'est-ce pas?railla Darla.

Il se releva avec difficulté et serra les dents, bien déterminé a ne pas montrer la moindre faiblesse devant elle.

-Non, mais je ne suis pas non plus l'un d'entre vous.

-Ça c'est toi qui le dis.

Darla se dirigea vers le frigo et l'ouvrit. À l'intérieur reposaient des poches de sang étiquetées. Du sang froid et mort, qu'on ne pouvait prendre aucun plaisir à consommer. Mais Heero était prêt à payer ce prix pour se distinguer des autres vampires.

-Tu ne te nourris pas exactement de hamburgers, fit remarquer Darla.

Elle se rapprocha de lui.

-Tu sais aussi bien que moi de quoi tu as besoin. Ce que tu désires.Pas de quoi en avoir honte : c'est ce que nous sommes, ce qui rend l'éternité plaisante à vivre.

Elle posa une main sur la poitrine d'Heero et le caressa. Sentant qu'il se tendait, elle lui adressa un sourire suggestif.

-Tu ne peux pas supprimer ta véritable nature. Je sens quelle se débat sous la surface, et j'espère être dans les parages le jour où elle la crèvera.

-À ta place, je prierais au contraire pour me trouver le plus loin possible, répondit Heero d'une voix chargée de menace.

-Je n'ai pas peur de toi. Mais ton ami, ou plutôt ton petit ami, si, je parie.

Darla laissa retomber sa main et se dirigea vers la porte.

-À moins que je ne le sous-estime. Parle lui. Raconte lui la Malédiction. Peut-être qu'il comprendra. Et s'il ne te fait toujours pas confiance après ça, tu sais ou me trouver.

Elle franchit le seuil et disparu.

Heero resta immobile, le regard fixé sur la porte. Comme il haïssait Darla!Comme il haïssait encore plus la vérité qu'elle venait de lui révéler!ET comme il haïssait l'expression horrifiée de Duo quand il lui avait révélé son vrai visage...

Parfois les mensonges étaient préférables à la vérité.Par exemple celui qu'il s'autorisait à croire depuis de nombreuses années : ça avait de l'importance qu'il se repentisse sincèrement pour toutes les horreurs perpétrées au fil des siècles.Ça rachetait ses péchés ; ça le faisait redevenir humain.

Il se demandait si Duo et ses amis allaient le chasser maintenant. Et si oui, comment il réagirait.