Chapitre 1 : De plus Sombres Ténèbres
Tout était calme dans la maison du 4, Privet Drive. Au premier étage, Dudley ronflait avec un bruit de ballon de baudruche qui se dégonfle, échappant à tout contrôle. Et effectivement, pensa Harry, Dudley pouvait tout à fait être comparé à un ballon de baudruche rose, bien qu'il ne se dégonflât jamais. Il était en effet devenu si gros au cours de l'année précédente qu'il faisait trembler les murs de la maison à chaque fois qu'il se retournait dans son lit et qu'il avait déjà cassé trois lattes de son sommier depuis le début de la nuit. Dans la chambre opposée, Mr et Mrs Dursley, l'oncle et la tante de Harry, émettaient respectivement le son d'une moto au pot d'échappement bouché et le sifflement d'une bouilloire asthmatique.
Allongé sur le dos au pied de son lit, Harry écoutait ces ronflements. Ils ne le dérangeait pas. Il s'y était habitués depuis qu'il s'était installé dans cette chambre, quatre ans auparavant. Bien qu'émis par des personnes qu'il avait en horreur, ces bruits familiers, associés aux mille grincements, grésillements, vibrations , cliquètements de la maison endormie rassuraient Harry : isolé dans la semi-obscurité de sa chambre, allongé sur le tapis à contempler les étoiles par la fenêtre ouverte, Harry avait le délicieux sentiment d'être la seule âme vivante dans un univers d'ombres et de silence.
Ténèbres. Le mot le fit tressaillir. Dans l'esprit de chaque Sorcier, il était associé à une personne : le terrible mage noir, Lord Voldemort, qui avait resurgi un mois auparavant, au cours d'une nuit de sinistre mémoire dans laquelle Harry avait largement été impliqué.
Douleur. Le garçon porta la main à son front. Là, sous ses doigts, il sentait le relief de la cicatrice sur le plat de sa peau. La douleur sourde l'irradiait, la même douleur avec laquelle il avait appris à vivre depuis maintenant un mois. Il pouvait sentir les pulsations qui animaient la marque en forme d'éclair. Ça n'était pas les battements de son cœur. C'était autre chose. Comme le rythme de fond d'une musique lancinante qui aurait répété sans cesse : " Il est là, il te cherche, il est en vie, il te cherche, il sait ce que tu fais, il te trouvera… ".
Une ombre traversa la portion de ciel que voyait Harry. Cela se rapprochait. Il aurait reconnu cette forme entre mille : c'était un sorcier sur un balai. Harry se demanda comment quelqu'un pouvait oser se montrer ouvertement dans le ciel au-dessus d'une ville pleine de Moldus, avec tous les risques que cela impliquait. Seule une situation d'extrême urgence pouvait justifier cela.
Mais à mesure que le sorcier approchait, il devenait de plus en plus évident qu'il se dirigeait vers le 4, Privet Drive. Plus précisément, vers la fenêtre à laquelle se tenait Harry, à présent debout, penché à l'extérieur, scrutant la nuit de tous ses yeux.
Mur. Le bourdonnent était devenu si familier à ses oreilles que Harry l'avait oublié. Il se souvint brusquement et voulut crier, mais trop tard. Le mystérieux visiteur avait percuté la barrière invisible, érigée par Dumbledore tout autour de la maison, afin de protéger Harry de l'intrusion de qui que ce soit qui puisse lui vouloir du mal — ou du bien.
Il y eut un cri de douleur et le Sorcier tomba de son balai, qui dériva lentement pour aller se poser un peu plus loin. Harry savait que toutes les personnes susceptibles de lui rendre une visite amicale connaissaient l'existence de la barrière. Par conséquent, l'inconnu ne pouvait être qu'un intrus, ou pire, un serviteur de Voldemort envoyé par ce dernier.
Néanmoins, Harry voyait mal une personne qui lui voudrait du mal se présenter à sa fenêtre, en balais, avec aussi peu de discrétion, et lui demander poliment de le laisser entrer afin de pouvoir le tuer plus aisément. Aussi il doutait que son visiteur soit animé de mauvaises intentions.
Soudain, il reconnut la voix qui gémissait depuis le sol où l'homme s'était écrasé. Une voix grave, à l'accent traînant, et qui pour l'instant geignait dans une langue étrangère.
Harry Potter enjamba le rebord de la fenêtre et saisit la branche la plus proche du saule qui poussait là. L'escapade par ce saule, qui n'avait atteint une hauteur suffisante que très récemment, était un art dans lequel il était passé maître depuis le début des grandes vacances .
Passant de branche en branche, Harry atteignit le sol par un saut qui lui fit un peu mal à la jambe gauche. Boitant légèrement, il s'avança vers l'endroit où gisait son visiteur : Viktor Krum.
Ce dernier était agité de convulsions et son visage, déformé par la douleur il débitait une suite de mots sans signification aux oreilles de Harry.
Au moment où il allait atteindre Krum, il se cogna à son tour au sortilège qui protégeait sa maison. Il était prisonnier. Il hésita un instant. Deux devoirs se heurtaient dans sa tête : d'un côté, Dumbledore lui avait fait jurer qu'il ne tenterait pas de quitter la protection magique sauf si le danger à l'intérieur était plus grand qu'à l'extérieur, ce qui selon le professeur était hautement improbable. De l'autre, Krum nécessitait des soins urgents et était dans l'incapacité de se les prodiguer lui-même, ce qui obligeait Harry à lui venir en aide. De plus, la rue était calme. Rien ne pouvait lui arriver. Il prit sa décision : murmurant le mot clé qui annulait le sortilèges quelques secondes, il franchit la limite autrefois solide et sortit du jardin des Dursley.
Viktor Krum s'était tu. Haletant, le visage tordu par la douleur, il guettait chaque geste de Harry. Celui-ci tenta de le soulever mais, n'y arrivant pas et ayant l'interdiction formelle d'user de magie au cours des vacances, il se résigna bientôt à le faire rouler. Un instant plus tard, ils étaient tous deux à l'abri du sortilège de protection, réactivé. Harry était content de voir que la peur de Voldemort n'était pas fondée, d'autant que sa cicatrice, telle les instruments de détection de Maugrey Fol'Œil, l'auraient averti si Voldemort s'était trouvé à proximité.
Pas un instant, Harry ne s'était demandé s'il n'agissait pas précisément comme l'aurait souhaité Voldemort…
Arrivé au pied de la maison, Harry hésita : il ne pouvait pas laisser Krum dans le jardin, mais comment le hisser jusqu'à sa chambre ? Il décida de remonter par les branches du saule. Une fois dans sa chambre, il prit sa cape d'invisibilité et son balai, se couvrit de la première, enjamba le second et descendit doucement jusqu'au jardin.
- Potterrr… Harry Potterrr…geignait Krum.
- Je suis là, répondit Harry en ôtant sa cape. Je vais vous mettre devant moi sur mon balai. Accrochez-vous bien !
Ce ne fut pas simple, mais il y parvint. Haletant, trempé de sueur, Harry finit par décoller et voleter jusqu'à sa fenêtre. Il était obligé de tenir fermement Krum, car celui-ci était inerte, comme endormi, et n'avait pas l'air de comprendre ce qui lui arrivait.
- Ouch !
Ils avaient atterri durement sur le plancher de la chambre. Pendant que Harry se massait le pied, Krum sembla se réveiller et rampa jusqu'au lit où il s'étendit en gémissant. Un peu inquiet, Harry tendit l'oreille, mais rien ne bougeait dans la maison.
- Potterrr… Potterrr…
- Quoi ? Je suis là ! répondit Harry.
- Potter… prrrends garrrde à…
Le garçon attendit impatiemment. Krum semblait éprouver de grandes difficultés à garder ses esprits.
- Durmstrang… la porte noire… le loup d'argent… la grande porte noire cache…
- Quoi ? que cache la porte ?
- Hermione…Celui-dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom… Hermione…disparue…
Soudain, il se redressa, comme saisi par un terrible souvenir. Il regarda Harry. Ses yeux étaient effrayants, convulsés, comme prêts à sortir de leurs orbites. Il poursuivit :
- Le Seigneurrrr des Ténèbrrrres te veut, Potterrr… Un duel… tu n'as pas le choix… Hermione est son otage… elle souffre…
- Quoi ! oubliant toute prudence à l'égard des Moldus, Harry avait crié. Il a enlevé Hermione ? Comment a-t-il osé…
Puis il s'effondra. Voldemort avait parfaitement calculé. Son amie, Hermione Granger, la personne la plus chère à son cœur après Ron, une fille de Moldus qui plus est… pas étonnant que le Seigneur Ténébreux l'ait choisie, elle… Harry se sentait terriblement coupable. Par sa faute, à l'heure qu'il était, elle devait endurer mille tourments. Peut-être même avait-elle dû subir le sortilège Doloris… non. Harry ne voulait pas y penser. Il essuya des larmes de rage et releva la tête.
Sur le lit, Viktor Krum semblait encore plus mal en point qu'auparavant. Il avait le teint verdâtre et les yeux recouverts d'un voile de douleur. Son corps était agité de spasmes et sa respiration difficile. Harry se demanda soudain s'il n'était pas occupé à mourir et cela le décida : même si Hermione courait un grave danger, il avait le devoir de s'occuper d'abord du blessé qu'il avait en face de lui.
Mais comment faire ?
Il sortit de sa chambre le plus silencieusement possible et descendit les escaliers en catimini, posant ses pieds tout au bord des marches pour ne pas les faire craquer. Le silence qui pesait comme une menace sur toute la maison lui donnait envie de hurler, de se dégager de toute la tension qui l'habitait. Mais il n'osait pas réveiller les Dursley, surtout à présent qu'un champion de Quidditch bulgare agonisait sur son oreiller. Harry était certain que la tante Pétunia n'aurait jamais laissé rentrer Krum dans sa maison, même si elle avait su qu'il était le plus jeune champion de Quidditch de toute l'histoire, et encore moins si elle l'avait vu cracher du sang sur le parquet. Harry s'amusa à imaginer sa réaction afin d'occuper son esprit pour l'empêcher de penser à Hermione.
Ce faisant, il était parvenu en bas de l'escalier sans faire le moindre bruit propice à tirer Dudley de son profond sommeil. Il marcha jusqu'au salon. Les Dursley avaient réinstallé un feu électrique après la bruyante destruction du premier une année auparavant, lorsque la presque totalité de la famille Weasley avait voulu emprunter le réseau de la Poudre de Cheminette et s'était retrouvé bloqué dans la cheminée des Dursley. Le nouveau feu électrique était plus perfectionné, plus coûteux et aussi beaucoup plus laid que le premier. Heureusement, Harry avait déjà entrepris quelques escapades nocturnes et maîtrisait parfaitement le coup de tournevis (emprunté à l'atelier de Vernon) nécessaire à desceller le faux feu. Environ dix minutes plus tard, il avait devant lui une cheminée comme il y en avait chez tous les sorciers, à l'exception que celle-ci était dépourvue de toute trace de suie : la maniaquerie de la tante Pétunia envers toute trace de poussière s'étendait même à ce qui était hors de vue.
Sur le linteau de la cheminée trônait un affreux gentilhomme du XIXe siècle en porcelaine délavée. Harry le souleva, fourra ses doigts dans l'intérieur creux du bibelot et en retira un sachet de papier. Ce sachet contenait un peu de poudre de Décapitête, envoyée par Sirius au début des vacances en prévision de l'isolement qu 'allait devoir subir Harry après l'installation du mur magique. Le garçon avait ainsi appris que cette façon de parler entre sorciers ne faisait pas partie des Usages Abusifs de la Magie proscrits par le Ministère en période de vacances scolaires. Ainsi, il avait pu converser avec Sirius et Ron. Malheureusement, son parrain n'avait pas de logis fixe et les chances pour que le Réseau de Décapitête le trouve étaient faibles.
Harry fit tout de même l'essai : il alluma un feu (il avait fait un stock de bois en prévision des futures conversations avec son parrain) et quand les flammes furent assez hautes et endurantes, il lança une pincée de la poudre marron en murmurant " Sirius Black " À sa grande surprise, et aussi son grand soulagement, le Réseau découvrit immédiatement son interlocuteur. La tête sans corps de Sirius se matérialisa au milieu des flammes Harry savait que de son côté, le Sorcier voyait son filleul de la même manière. Harry ouvrit la bouche pour parler et s'arrêta, très surpris : en face de lui, il distinguait vaguement la pièce derrière Sirius. Elle ressemblait comme deux gouttes d'eau à… la cuisine des Weasley !
Sirius, inquiet du silence de son filleul, prit la parole :
- Oui, Harry ? Que se passe-t-il ?
- Sirius…tu es chez Ron !
- Oui, en effet. Vois-tu, Arthur s'est laissé convaincre par son fils et par Dumbledore de mes bonnes intentions. Ils m'ont accueilli avec une grande gentillesse. Je ne suis ici que de passage. Il va me falloir repartir dès demain, car on m'a signalé l'apparition d'un homme qui semble être Queudver dans le Nord de l'Ecosse. Je me repose ici pour une nuit seulement.
- On a aperçu Queudver ? c'est fantastique Sirius ! s'écria Harry avec moins d'enthousiasme qu'il ne l'aurait voulu.
- Tout va bien, Harry ? s'inquiéta le sorcier, peu dupe de la préoccupation de son protégé .
- Eh bien… pas du tout, en vérité, avoua celui-ci. J'ai un gros problème qui dort dans mon lit là-haut, et un autre encore plus gros, en Bulgarie pour être précis.
- Bulgarie ? Hermione a des ennuis ? s'alarma la tête du sorcier dans la cheminée.
- Il paraît qu'elle est prisonnière de Voldemort.
Le visage de Sirius se contracta en ce qui ressemblait plus ou moins à de la colère, ou à de la douleur. Mais c'était quelque chose de plus profond, comme si Sirius voyait resurgir les douze années passées à Azkaban, prisonnier des terribles Détraqueurs.
- Que sais-tu d'autre ? et commet le sais-tu ? dit-il avec brusquerie.
- Eh bien…Harry hésitait à révéler l'imprudence de ce qu'il avait commis. C'est là mon autre problème… Viktor Krum s'est heurté au mur magique qui protège ma mai…
- Oui ? le pressa Sirius. Et il est gravement blessé, il est tombé de son balai. Je l'ai secouru, j'y était obligé… dit précipitamment Harry en voyant l'œil furieux de son parrain. Je l'ai monté dans ma chambre et il est en train de se vider de son sang sur mon oreiller…
- Tu as ouvert le mur ? fit abruptement l'homme.
- Oui. Je n'avais pas le choix !
- Tu as sans doute fait là la plus belle erreur de ta vie, Harry Potter… grogna Sirius.
Le garçon baissa les yeux. L'estime de son parrain était la chose à laquelle il tenait le plus au monde, avec son Éclair de Feu et la confiance qu lui accordait Dumbledore.
- …mais je te l'accorde, tu n'avais pas le choix, continua Sirius avec une expression un peu moins sinistre. Maintenant, fais-moi passer de ton côté.
Il tendit une main que Harry tira. De l'autre côté, alerté par les murmures, Ron venait de pénétrer dans la cuisine . Il entrevit Sirius qui disparaissait, le visage de son ami… il cria :
- Harry…
Mais celui-ci n'entendit pas la suite. Les flammes s'estompèrent et moururent. Il aurait souhaité très fort que Ron vienne aussi, au moins pour lui parler. À cause du mur qui l'isolait du monde des Sorciers, Harry ne recevait aucun courrier de ses amis. Il se sentait vraiment très seul depuis le début des vacances., et il n'avait rien d'autre à faire que de ruminer de sombres pensées au sujet de Voldemort. Et aussi échapper à son cousin Dudley, mais c'était plus facile que d'oublier le retour du Mage Noir.
- Ron, marmonna-t-il, frustré de la présence de son meilleur ami.
- Il ne valait mieux pas qu'il vienne, Harry. J'ignore ce que Krum fait là-haut, mais ce type-là n'est pas très clair. Je préfère m'en méfier.
- Hmf, grogna Harry.
Il n'avait pas revu son parrain en chair et en os depuis plus d'un mois, mais celui-ci ne semblait pas du tout mesurer combien il était en manque de… de sourires, d'affection, de tout ça, quoi! En des instants comme celui-ci, où il se sentait mal, où sa cicatrice le lançait et où ses oreilles bourdonnaient, il y avait un grand vide dans son ventre, juste en dessous du cœur, et Harry ignorait comment le combler. Il n'avait jamais eu de père pour le complimenter, ni de mère pour le serrer dans ses bras en des moments pareil.
- C'est par où ? intervint Sirius. Suis-moi.
Harry le guida à l'étage et pénétra le premier dans la chambre.
- Mais… la stupéfaction le saisit.
Sur le lit, évanouie se tenait bien une personne. Mais ça n'était pas du tout Viktor Krum.
- Harry, chuchota Sirius. Qui est cette fille ? Tu m'avais parlé du Champion de Durmstrang. Où est-il ?
- Mais… je ne comprends pas…
Harry s'approcha de la fille. Elle semblait plus comateuse qu'évanouie. Il y avait de plus en plus de sang sur l'oreiller. Un filet de sang séché reliait le coin de ses lèvres blanches à sa nuque. Elle était dans l'ensemble d'une blancheur cadavérique. Elle portait la même robe verte au col gris, plutôt masculine, que Harry avait notée sur Krum.
Il se pencha, glissa ses doigts dans la poche gauche. Rien. Mais un rapide examen de la poche droite lui fit découvrir une petite bouteille ronde, d'une gorgée, comme celles qui contenaient les ingrédients précieux dont les élèves de Poudlard se servaient en cours de Potion. Harry la tendit à Sirius, qui la débouchonna et la renifla.
- C'était du Polynectar, avant d'être vidée , trancha-t-il.
- Mais pourquoi Krum a-t-il bu du Polynectar ? Je l'ai vu sous sa forme originelle, ça ne sert plus à rien !
- Tu n'y es pas du tout. À mon avis, ceci est la forme originelle de ton visiteur. Elle a dû vider la bouteille peu avant d'arriver chez toi.
- Mais pourquoi ?
- Pour que tu lui fasses confiance en tant que Viktor Krum et, aveuglé, que tu te jettes dans les griffes de son maître ne te précipitant à Durmstrang pour sauver Hermione. Qui, soit dit en passant, doit être bien à l'abri chez elle.
Harry regarda son parrain avec angoisse. Il aurait aimé que cela soit vrai. Il aurait tellement souhaité pouvoir y croire.
C'est alors qu'il prit conscience d'une quatrième présence dans la pièce.
Le Mangemort qui avait suivi la fille sous l'aspect d'une corneille venait de reprendre forme humaine.
Severus Rogue avançait dans un paysage de désolation. Le ciel était gris-verdâtre au-dessus de sa tête. Des turbulences, des nuages de suie noire et des ombres mouvantes étaient visibles d'un horizon à l'autre, mais aucun soleil n'apparaissait. Seule, une lumière sale et tamisée suintait de toutes les directions à la fois, éclairant le sol par intermittence, anéantissant les ombres et les reliefs à mesure qu'elle les créait. Le résultat était un étrange balai de couleurs. Rogue croyait voir clignoter et se déplacer les formes de la plaine, selon un schéma impénétrable, et qui pourtant ne semblait pas dû au jugé des cieux. Il y avait là une logique, une organisation de ce qui paraissait chaotique au premier regard. Mais Rogue ne parvenait pas à comprendre cette logique. Il était étranger à ces lieux. Sa place n'état pas ici. Pris d'une secousse de panique incontrôlable, il se mit à courir. La terre sous lui changea et la surface où il devait poser son pied disparut. Severus Rogue s'enfonça jusqu'à la cuisse dans une boue noirâtre et visqueuse. Avec un gémissement de douleur et de frayeur, il s'extirpa du trou. La boue rendait tout son corps glissant et collait ses vêtements à sa peau. Il se releva en tentant d'ignorer les élancements de douleur dans son dos, sa jambe et sur son avant-bras. Péniblement, il se remit en route, plus lentement cette fois. À chaque pas, sa robe se collait à sa jambe, de l'eau sortait de ses chaussures et ses semelles émettaient un bruit de succion très éprouvant pour ses nerfs irrités.
Rogue regarda tout autour de lui avec une confusion totale. La plaine s'étendait d'un horizon à l'autre, infinie. Quelques plantes décharnées s'efforçaient de sortir du sol, mais aucune ne dépassait la hauteur d'un buisson, et elles n'avaient en guise de feuilles que de cruelles épines. Rien dans le ciel ou sur la terre ne pouvait servir de point de repère ou d'orientation, et chaque choses visible à l'œil était en constante mouvance. Rogue plongea la main dans sa poche et en retira une carte magique. Une petite flèche rouge lui indiqua la direction à suivre. Il s'était détourné de son chemin depuis plusieurs kilomètres. Avec un grognement, il reprit l'orientation correcte après quoi il replia la carte et la rangea soigneusement au fond de sa poche. Elle constituait son seul espoir de survie dans cet univers d'obscurité et de désolation.
Le Mangemort dissimulé dans l'ombre de la porte tenait sa baguette braquée sur Harry et Sirius. Il fit un pas en avant et fut alors éclairé par le lampadaire qui diffusait sa lumière jusque dans la chambre. Le sorcier portait une longue robe vert foncée aux larges manches, et dont les revers étaient cousus d'une fourrure blanche tachetée, probablement du lynx. Il avait un visage froid et peu expressif, mais ses yeux luisaient d'une cruauté perverse. Ses traits étaient ceux d'un homme d'âge mur, probablement quarantenaire, et indubitablement étranger. Harry avait fréquenté suffisamment d'élèves de Durmstrang pour deviner que ce sorcier était bulgare.
- Ainsi, exulta le Mangemort, j'ai devant moi le charmant petit Harry Potter et son fameux protecteur, Sirius Black. Et c'est moi qui les tiens au bout de ma baguette. Quel honneur !
- Qui êtes… commença Harry.
Il fut interrompu par Sirius, dont le visage était marbré par la colère.
- Comment es-tu entré, ignoble personnage ? cria-t-il.
Curieusement, l'esprit de Harry se porta à cet instant sur les Dursley, qui dormaient au même étage. Si son parrain continuait à crier, ils n'allaient pas tarder à arriver, furibards. Dans un soucis purement diplomatique, il ne pouvait s'empêcher de s'inquiéter de ce que penseraient son oncle et sa tante en voyant trois inconnus, très clairement des Sorciers, dans leur maison à une heure du matin.
- Sirius, mon vieil ami… susurra le Bulgare dans un anglais presque dépourvu d'accent. Comment te portes-tu depuis la dernière fois ?
Il eut un regard ironique sur les cheveux longs et sales de Sirius, sur sa barbe de trois jours au milieu d'un visage émacié par sa vie de clandestin.
- Je vois que ton escapade de prison t'a été utile, dis-moi. Tu portes toujours la même robe depuis trois ans ou tu en changes de temps en temps ?
- Je te déconseille de me parler sur ce ton, Schrakov. Les traîtres et les assassins ne devraient pas avoir le droit de parler. Surtout ceux dans ton genre qui ne regrettent rien.
Harry ne comprenait pas ce qui se passait entre les eux Sorciers. Schrakov, lui, avait l'air de très bien comprendre. Il rejeta sa tête en arrière et explosa de rire. Tout se passa alors très vite.
Il y eût un remue-ménage dans la chambre à côté et le couinement d'un lit dont s'extirpe une personne quelque peu corpulente. Des bruits de pas furieux se firent entendre et la tête furibarde de l'oncle Vernon s'encadra dans la porte.
- QU'EST-CE QUE TU FAB…
Il ne termina pas sa phrase, car un jet d'étincelles jaune avaient jailli de la baguette du Mangemort. Le Moldu le reçut en pleine poitrine. Son corps s'immobilisa, les traits de son visage se figèrent dans son expression présente : celle d'un bouledogue mal réveillé. Son teint vira au gris tacheté et sa moustache se durcit.
Vernon Dursley avait été transformé en statue de granit.
Harry voulut se précipiter vers son oncle, mais le Mangemort le tenait toujours en joue.
Amusant, n'est-ce pas ? exulta-t-il. Pour ne revenir à notre petit échange, je suis très flatté de tes compliments, Black. Ne rien regretter fait en effet partie de mes attributions. C'est l'un des nombreux bienfaits dispensés par notre Maître… Assassin ignoble… grommela Sirius. Harry aurait bien aimé saisir l'ensemble de la conversation. Vois, s'enflamma le Mangemort, comme je suis à nouveau propre et bien vêtu. Je n'ai pas su m'enfuir, moi, mais j'ai survécu à Azkaban bien plus longtemps que les autres. J'étais réduit à un spectre d'homme, mais j'existais. Ce qui m'a maintenu en vie pendant ces longues années, c'est la confiance. Je savais que notre Maître était là, quelque part. Il viendrait nous chercher. Un jour ou l'autre, il serait là, et tout redeviendrait comme avant, et je serais loué comme personne ne le fût jamais. Et c'est ce qui est arrivé. Je figure maintenant parmi les plus proches du Seigneur Noir, et dans quelques minutes je vais lui livrer Harry Potter. Quelle victoire !
À cet instant précis, Sirius se jeta sur Schrakov avec un hurlement de bête blessée. Harry perçut le bruit caractéristique de Dudley qui blottissait ses cent vingt kilos tout au fond de son lit. Sans vraiment réaliser ce qu'il percevait, son cerveau l'informa que Sirius s'était écroulé en plein saut comme une marionnette à laquelle on a coupé les fils. Il enregistra encore le regard de folie du Mangemort, et maudit sa propre négligence. L'homme n'avait pu entrer qu'au moment où le bouclier était désactivé. Il songea à ce que penserait Dumbledore, quand il apprendrait que son protégé avait réduit à néants tous les efforts de protection de nombreuses personnes. Puis il ne songea plus à rien, parce qu'il entendit crier " Stupéfix ! " et sombra dans l'obscurité.
Il ne savait pas depuis combien de temps il marchait. Il n'avait pas faim, pas soif, pas de notion du temps. Il était dans un état au-delà de l'épuisement. Mais il marchait encore. Il n'y avait rien d'autre à faire dans cette désolation : marcher. Jusqu'à où ? Jusqu'à quand ? Il ne savait pas. Et puis il n'y avait pas de où ni de quand dans ce monde, juste du toujours : toujours gris, toujours plat, toujours pareil et différent à la fois. Toujours peur, toujours mal, toujours froid. Avancer, sans départ ni arrivée, mais marcher toujours. Ou mourir.
Le paysage lui jouait des tours. Il s'était encore détourné de sa route alors qu'il aurait juré marcher droit. Le sol qu'il foulait s'évanouissait parfois, lui faisant perdre l'équilibre. Mais il continuait. Il n'avait plus rien d'autre à faire. Avancer.
Le plus effrayant n'était pas ce chaos apparent. Ça n'était pas non plus l'inexistence de tout espoir d'arriver quelque part. Ce qui terrifiait Severus Rogue, c'était l'absence de toute sensation. Aucun vent ne lui balayait le visage, aucune odeur, fusse-t-elle celle d'un marais, ne lui emplissait les narines, aucun son ne parvenait à son cerveau. Il était sourd et incapable de proférer un son. Confiné dans un silence irréel. Maléfique. Il n'avait pas faim non plus, et ce point l'inquiétait plus que tout : si il n'avait plus besoin de manger, était-il toujours en vie ? Devenait-il un spectre dans un monde de spectres ? Était-il condamné à errer dans ces terres, à ne jamais revoir la lumière du soleil ?
Ne pas faiblir. Il ne devait pas. Faiblir. Il avait une mission. Une mission qui justifiait tout. La mort, la souffrance, la terreur et le désespoir, le passage à l'état de spectre. Rien ne devait l'arrêter. Il devait lutter jusqu'au bout, même s'il n'y avait pas d'issue visible, mais il devait lutter. Avancer.
Harry mit longtemps à émerger. Ses yeux lui renvoyaient l'image floue du plafond à la peinture écaillée. Juste devant le plafond, assez près pour être nette, il distinguait une tête rousse aux yeux inquiets.
Ron !
Il avait la bouche pâteuse. Le reste du corps n'était pas tellement mieux.
Il tourna la tête vers la droite, ce qui lui arracha un gémissement. À côté de lui, Sirius reprenait vie aussi. Harry avait la nuque trop raide pour la tourner suffisamment, mais il apercevait le haut du corps de son protecteur.
Ils étaient toujours dans la maison du 4, Privet Drive.
Avec un effort peu agréable, il s'assit. Son corps reprenait vie peu à peu, mais il avait des fourmillements dans chaque membre.
Ron, marmonna-t-il. Qu'est-ce que tu fais là ? J'ai suivi Sirius par la cheminée. Ça faisait trop longtemps que je ne t'avais pas vu ! s'excusa-t-il rapidement. Tu m'as manqué, en fait… Ça n'était pas très poli de me suivre, mais je dois te remercier, gamin, grogna Sirius, qui se massait la mâchoire.
Sa chute stupéfixée avait été quelque peu douloureuse.
Bon, il faudrait peut-être que tu nous explique qui est ce type, Sirius, lança Harry .
Le Mangemort était étendu à terre, stupéfixé par Ron.
Hum, grogna Sirius de plus belle, peu enchanté. Je l'ai… je l'ai connu au collège, comme beaucoup dans son genre. Il était mon correspondant bulgare en septième année. Mais… pourquoi tu l'as traité d'assassin ? demanda Harry. Tous les Mangemorts sont des assassins , lâcha Sirius un peu vite.
Harry et Ron échangèrent un regard. Ils ignoraient encore quelque chose. Mais si leur ami désirait garder un secret, ça ne les regardait pas.
Ron changea de sujet en lançant :
Au fait, on devrait peut-être lui sauver la peau, si on compte apprendre ce qu'elle fiche ici !
Il désignait du pouce la fille qui continuait à gémir, inconsciente.
Sirius se releva en grognant et se pencha au-dessus d'elle. À cet instant, comme si elle avait perçu une présence derrière ses yeux clos, elle se réveilla en sursaut et se mit à hurler :
NE ! NE ! NE MARDAH DOLORIS !
Elle se recroquevilla en chien de fusil, les mains sur le visage, et sanglota :
- Te nablijavam ne ! March ottouka…
Harry, Ron et Sirius s'entre-regardèrent .
C'est du bulgare, ça ? demanda Ron. Je crois, oui, articula Sirius, ses yeux exorbités fixés sur la fille.
Celle-ci s'était mise à gesticuler de plus en plus fort :
- Ne me zakatchai…
À ces mots, Harry sentit soudain la lame qui lui vrillait le crâne se réveiller. Sous la douleur, il se jeta dos au mur, avant de glisser à genoux, les doigts crispés sur son front en feu. Il ne connaissait que trop bien cette douleur elle l'attaquait chaque fois que Voldemort tuait quelqu'un ou lançait un sortilège Doloris.
- Harry ! Harry ! ça ne va pas ? s'écria Sirius en s'agenouillant à côté de lui.
Il fit lentement non de la tête. Il devait crisper violemment les mâchoires pour s'empêcher de hurler.
Sirius lança un regard paniqué à Ron.
- On ne peut rien faire, expliqua celui-ci. Même Dumbledore ne sait pas quoi faire. Il faut attendre que ça cesse.
- Mais ça ne cesse jamais, intervint Harry.
La douleur s'était calmée, réintégrant le seuil habituel. Sur le lit, la fille s'était tue.
- Elle est toujours là, tapie, continua amèrement Harry. Elle guette le moment idéal pour me prendre par surprise.
Il se releva. Son regard sombre ne quittait pas la jeune fille évanouie, mais c'était à son ami et à son parrain qu'il s'adressait.
- C'est un duel. Un duel à mort.
À ce moment, il releva la tête et les toisa fièrement.
- Et je le gagnerai.
- Tu délires, marmonna son parrain.
Il était plus bouleversé qu'il ne voulait l'admettre.
- Sirius, je t'en prie, intervint Ron en s'agenouillant près du lit. Pour l'instant, c'est elle qui a besoin de nos soins.
Il prit son poignet entre ses doigts et chercha le pouls.
- C'est étonnant… je n'y connais pas grand chose mais je crois que son cœur bat très vite.
Sirius se pencha à son tour vers elle. Il dégagea doucement son visage de ses mains crispées et le tâta.
- Elle a de la fièvre. Elle est en sueur. Et ce rythme cardiaque… c'est comme si elle venait de recevoir…
- Un sortilège Doloris, complétèrent Harry et Ron en même temps que lui.
- Elle a dit " Doloris " tout à l'heure, expliqua Ron en rougissant un peu. J'ai reconnu le mot.
- Le problème, dit Sirius, et sa voix trahissait son inquiétude, c'est que je ne suis pas Médicomage.
- Tu ne connais aucun sort qui puisse la sauver ? s'écria Harry. Si elle meurt, c'est notre seule chance de sauver Hermione qui disparaît !
- Quoi ! s'exclama Ron. Hermione a des ennuis ?
- Oui, expliqua Harry. Cette fille a baragouiné des trucs. Qu'Hermione était à Durmstrang. Prisonnière.
- Je sais ! dit Sirius. Harry, tu dois bien avoir de quoi faire une potion de Ravigorance ?
- Heu… ça dépend, il te faut quoi ?
- Du feu, un chaudron, des racines de bégonia séchées, des lamelles de pied-de-mouton, des tiges d'astragale, une langue de fourmilier, des fleurs de camomille en poudre, du suc d'ortie, et si je me souviens bien…
- Oui ? l'encouragèrent les deux garçons.
- … du miel, compléta Sirius .
- Du miel ? s'étonna Ron.
- Oui, du miel. Tu peux me trouver tout ça, Harry ?
- Mes ustensiles de potion sont dans le placard, en bas. Mais je n'ai ni miel, ni camomille.
- Je descends avec toi, proposa Ron. On va fouiller la cuisine de tes Moldus.
Finalement, Sirius vint les aider à ouvrir le placard à l'aide d'une formule magique. Pendant ce temps, Ron et Harry ouvraient tous les tiroirs de la cuisine et soulevaient tous les couvercles. Harry découvrit le pot de miel caché hors de portée de Dudley et de son régime, mais ce fut Ron qui trouva deux sachets de tisane à la camomille.
En repassant sur le palier du premier étage, Harry tendit la main vers Ron pour lui faire signe de s'arrêter.
- Attends ! tu n'entends rien de bizarre ?
- Non, la maison est silencieuse.
- Justement. Il manque les ronflements.
Il ouvrit doucement la porte de la chambre de Dudley. Celui-ci n'était pas dans son lit.
Le jeune sorcier pénétra dans la chambre à pas de loup. Un rayon de lune à travers les épais rideaux éclairait un étrange spectacle…
Des dizaines de jouets abandonnés. Des peluches éventrées. Des petites voitures écrasées. Des soldats de plomb démembrés. Des playmobils décapités. Des montagnes de kaplas brisés, de puzzles éparpillés, de crayons de couleur cassés, de feutres déchiquetés, de fléchettes plantées dans tous les murs, meubles, au plafond et surtout dans la tranche des rares livres survivants sur les étagères cribouillées de dessins enfantins. Par terre, d'autres livres, écornés, déchirés, coincés sous des meubles en guise de cale-pied ou tout simplement répandus en pauvres pages arrachées aux quatre coins de la pièce.
Des maquettes. Des avions de guerre, des tanks, des cuirassés, réduits en mille morceaux, reliefs d'une guerre sans merci livrée par Dudley contre les Communistes, les Talibans, les Irakiens, les Anarchistes ou tout autre nom qu'il avait entendu dans ses James Bond favoris. Une télé, sa deuxième, éventrée par une Playstation. Un VTT crevé dont le cadre gisait à deux mètres des roues voilées. Un petit robot en forme de chien suspendu au plafonnier par sa laisse. Un pouf, écrasé sous le poids de jeune mammouth de Dudley, dont les billes de polystyrène recouvraient la moquette. D'autres billes, e, verre celles-là, calots, baleines, chinoises, tachetées, irisées, transparentes ou œil-de-chat, répandues sous le lit, sous les meubles, dans les coins, partout où la femme de ménage renonçait à les traquer. Des cassettes vidéos et audios dépouillées de leurs emballages, la moitié d'entre elles ouvertes et leurs bandes magnétiques dévidées, tendues entre les meubles comme des toiles d'araignées.
Au milieu de tout cela, Harry finit par apercevoir le gros derrière de Dudley qui dépassait hors du placard dans lequel le garçon cachait ses réserves infinies de tartes, gâteaux, petits pains, brioches, pâtisseries et sodas en tous genres que les enfants du quartier se voyaient contraints de lui offrir sous peine de se faire rouer de coups par sa bande de copains.
Les fesses éléphantesques de Dudley n'étaient malheureusement pas parvenues à rentrer avec l'ensemble de leur propriétaire dans le placard où il tentait de se cacher, et à présent elles tremblaient violemment de peur d'être découvertes et changées en quelque chose de pas naturel. Harry s'en approcha et dit d'une voix moqueuse :
- Ooooh ! Dudley, comme tu es bien caché !
Et il lui envoya un retentissant coup de pied dans le derrière. Mais le garçon n'eût aucune réaction, excepté que ses fesses tremblèrent plus violemment encore. Depuis tout petit, Dudley avait une peur panique de toute forme de magie, peur superstitieuse inculquée par ses parents, qui haïssaient la magie et tout ce qui s'y rapportait, à savoir Harry. Dudley était donc terrorisé par son cousin depuis que celui-ci était entré à Poudlard. Mais surtout, il avait peur du noir, et, la nuit, était pris d'accès de frayeur quand il entendait des bruits dans la maison. C'est pourquoi l'affrontement entre son père et l'inconnu ayant fait irruption dans le domaine familial avait terrorisé Dudley. Celui-ci s'était précipité tête la première dans le placard. C'était toujours là qu'il se cachait, petit, pour échapper à sa mère lorsqu'elle évoquait le bain. Le placard était resté un lieu de sécurité, malheureusement l'entrée avait nettement rétréci. À moins que ce ne fut Dudley qui ait grossi ?
" En tout cas, il n'a pas grandi, pensa Harry, du moins pas mentalement. " Il tira sans ménagement sur les pieds de Dudley, aidé par Ron, jusqu'à, l'extirper de sa cachette. Le teint blanc, les yeux exorbités, Dudley tremblait des oreilles aux orteils. Son regard allait de Ron à Harry et de Harry à Ron sans parvenir à décider duquel il devait avoir le moins peur.
- Eh bien, rigola Ron, il a pas bonne mine ton cousin !
- Tu parles ! il est tout blanc. Tu vas bien, Dudley ? railla Harry. Tu veux un petit coup de main ? On pourrait peut-être t'aider à rentrer dans ton placard un peu plus intégralement…
- Oui ! s'exclama Ron, à coups de pieds…
- Ou avec un bon sortilège de Réduction… proposa Harry.
Mais tout à coup il n'eût plus envie de se moquer de son cousin . Devant cet être méprisable, il ne ressentait plus de haine, juste de la pitié… et il n'aimait pas la pitié.
- Viens, dit-il à Ron, on le laisse dans sa crasse. Il finira peut-être par découvrir le bouton de la lumière.
Mais Dudley le bouscula et s'enfuit en courant. Il alla se réfugier dans la chambre de sa mère celle-ci espionnait silencieusement tout ce qui se passait dans la maison part sa porte entrebaîllée. Elle laissa entrer son fils et claqua la porte derrière lui avec un bruit sec.
Harry et Ron se regardèrent et éclatèrent de rire. Cela fit au garçon un choc : il n'avait plus ri depuis bien longtemps , depuis même avant le début des vacances. Il avait complètement oublié quel effet cela faisait de se débarrasser de ses préoccupations le temps d'un fou rire avec son meilleur ami.
En rentrant dans sa chambre, Harry eut un coup d 'œil non dépourvu d'appréhension pour son oncle figé dans son cri. Même s'il le haïssait, il espérait que Vernon Dursley ne resterait pas éternellement une statue de granit.
Son attention fut détournée par des voix. Dans la chambre, Sirius était assis et parlait à la fille… qui lui répondait !
Sur un feu magique, la potion bouillonnait gentiment dans un chaudron.
- Mais, Sirius… bafouilla Harry. Je croyais que tu avais besoin des ingrédients que nous t 'apportons…
- Ah, Harry. En fait, pour la potion de Guérison, il y avait tous les ingrédients qu'il me fallait dans ton placard.
La fille était assise sur le lit et ne semblait plus du tout souffrante.
- Mais alors, intervint Ron, on a fait tout ça pour rien ?
- Eh bien, la camomille et le miel feront une très bonne tisane. Et puis, ça vous a un peu occupés pendant que je me concentrais.
Il prit une louche d'eau chaude qu'il versa dans un bol, puis il jeta un sachet de camomille dedans. Il trouve aussi une cuillère en bois dans les ustensiles de potion de Harry il s'en servit pour prélever une grande cuillérée de miel, l'ajouta dans le bol et tendit le tout à la jeune fille.
- Merci, dit celle-ci.
Elle avait une voix grave, pas désagréable. En l'entendant parler, Harry se souvint soudain de la nouvelle qu'elle était venue apporter.
- Qu'est-il arrivé à Hermione ? demanda-t-il brusquement.
Elle frémit. Elle était tendue, malgré la potion apaisante.
- Calme-toi, Harry, tempéra Sirius. Laisse notre jeune amie reprendre des forces. Elle n'a même pas eu le temps de se présenter. Je te promets qu'elle nous dira tout ce que nous voulons apprendre.
Elle regarda avec appréhension le sorcier au visage tourmenté. C'était lui qui l'avait soignée, et à présent il la défendait, mais malgré la peur évidente que Harry lui inspirait, elle semblait sentir qu'elle avait bien plus à craindre du criminel en fuite. Et il était vrai que Sirius, avec son regard sombre, ses mâchoires crispées, ses cheveux sales et hirsutes, évoquait pas mal un terrifiant molosse.
- Je m'appelle Morgane Wakewage, dit la fille.
Cela n'évoqua strictement rien à Harry, mais il crut voir une lueur dans les yeux de son parrain. Mais il aurait été bien incapable de la déchiffrer.
- Tu es Harry Potter, n'est-ce pas ? enchaîna-t-elle en le regardant timidement.
Apparemment, elle voulait inciter les autres à se présenter. Ce qu'il firent.
- Je suis Oliver Knight, dit Sirius avec un regard éloquent aux deux garçons. Et voici Ron Weasley. - Où est Hermione ? demanda aussitôt Ron.
Wakewage soupira, épuisée ou bien accablée, Harry n'aurait sut le dire.
- Elle est en Bulgarie, bien sûr. À Durmstrang. C'est de là que je viens.
- Tu en viens ? Tu n'as quand même pas volé de Durmstrang à ici en balai ? s'étonna Harry.
- Si, dit-elle simplement.
Il était estomaqué. Cela représentait une distance énorme à ses yeux, et il comprenait mieux l'état d'épuisement de Wakewage.
- Pourquoi ?
Un instant, le visage de Morgane Wakewage se fractura et elle sembla sur le point d'éclater en sanglots. Mais à la seconde suivante, c'était passé et Harry se demanda s'il ne l'avait pas imaginé. Elle baissa les yeux, rougit légèrement.
- Hermione est mon amie, murmura-t-elle.
Son regard s'attarda sur le coin de la couverture qu'elle triturait nerveusement. Harry faillit perdre son sang-froid. Il était fatigué, il était anxieux, une inconnue installée dans son lit jouait avec leurs nerfs à tous les trois, son oncle figé en statue gisait dans le couloir et un Mangemort stupéfixé était étendu sur son plancher. Et surtout, Harry avait peur, il avait terriblement peur car sa meilleure amie était entre les mains de son ennemi mortel. Les pires scénarios défilaient dans sa tête, sur un fond de rire glacé surgi tout droit de sa mémoire. Il avait très envie d'attraper Wakewage par le col et de la secouer jusqu'à ce qu'elle crache tout ce qu'elle savait, mais il se contint à temps.
- Qu'est-il arrivé à Hermione ? demanda-t-il sèchement. Où est-elle ? Dans quel état ? Comment sais-tu tout ça ? Pourquoi es-tu venue ici ? Que veux-tu ? Parle !
Elle croisa le regard de Harry et parut terrifiée par ce qu'elle y lisait. Elle recula légèrement, prit une grande inspiration et commença :
-Je m'appelle Morgane Wakewage. J'ai fait mes études à Durmstrang, en Bulgarie. Mes parents adoptifs sont bulgares. Ils s'appellent Boris et Anja Shrakow.
Sirius émit un grognement sourd. Harry et Ron retenaient leur respiration.
- J'ai rencontré Viktor Krum au collège. Il avait trois ans de plus que moi, mais son petit frère Olaf était mon meilleur ami. C'est en rendant visite à Olaf cet été que j'ai rencontré la petite amie de Viktor. Elle m'a dit s'appeler Hermione Granger et Olaf a tout de suite précisé qu'elle était la meilleure amie du célèbre Harry Potter.
Cette fois, ce fut au tour de Harry de grogner.
- Je me suis liée d'amitié avec Hermione. Elle a été adorable avec moi. Elle a compris que j'avais quelques problèmes à la maison et m'a fourni un prétexte pour passer mes journées entières chez les Krum. De toute façon, depuis la fin du mois de juin, mon père était de plis en plus souvent absent… Donc, j'ai passé toutes les vacances avec Olaf, Viktor et Hermione. Seulement, ça a mal tourné.
Elle tourna la tête face au mur. Quand elle reporta ses yeux sur ses interlocuteurs, elle avait l'air terriblement désespérée. La voix cassée, elle reprit :
- C'est un enfer chez nous. Les Mangemorts sont partout. Vous, vous vous croyez perdus il y a quatorze ans, lorsqu'une trentaine de mages noires faisaient des raids de temps en temps, tuaient les gens et cassaient les bâtiments. En Bulgarie, l'oppression et constante. Ça ne sont pas justes de quelques Mangemorts enhardis qui provoquent le gouvernement . C'est dans la rue, dans les boutiques, à l'école. On est sans cesse surveillés. On ne peut faire confiance à personne. Le gouvernement et les forces de police elles mêmes sont corrompus, vendus à la solde de l'Ennemi. Les Impurs, les Sang-de-Bourbe ont déserté de longue date, et ceux qui ne l'ont pu vivent dans la misère, esclavagés au service des puissants, quand ils n'ont pas simplement été tués.
Elles se tut un long moment, mais personne ne brisa le silence. La tension était à son comble lorsque Wakewage reprit en fin la parole :
- C'était il y a trois jours. La nuit tombait, j'étais avec Olaf et Hermione. Lorsqu'on n'a frappé à la porte, j'ai pensé que c'était mon père qui venaient me récupérer. J'ai pris peur, je me suis caché dans le grenier. Celui-ci n'étaient accessibles que par une trappe au plafond et j'ai remonté l'échelles, de manière à ce que rien ne soit soupçonnable d'en bas. Olaf est allé ouvrir la porte.
Elle voulut continuer mais une boule dans sa gorge l'en empêcha. Elle se laissa aller contre l'oreiller. Elle avait les yeux rouges, les cheveux en bataille à force de passer nerveusement sa main dedans. Son égarement fit frissonner Harry, qui imaginait les pires suites à l'histoire de Wakewage.
En lui jetant un coup d'œil, il vit que son parrain n'avait pas la même compassion à l'égard de la fille, même s'il partageait les inquiétudes de Harry. Parmi les expressions qui mitigeaient son visage, le garçon crût reconnaître de l'angoisse, de l'irritation, ou peut-être seulement une grande lassitude. Un instant, il eut l'impression que Sirius était désireux de frapper la fille : il crispait ses poings et retroussait ses lèvres supérieures comme un chien aurait montré ses crocs. Mais en reportant son regard sur la pauvre créature dont les souffrances attiraient la pitié, Harry décida qu'il avait confondu la tension qui habitait Sirius à l'évocation des Mangemorts avec de la haine à l'égard de Wakewage.
- Morgane, appela Ron.
Elle leva sur lui un regard d'espoir.
- Morgane, on a besoin de savoir ce qui est arrivé à Hermione. Tu as fait un très long chemin pour venir nous prévenir et nous t 'en sommes reconnaissants. Maintenant, on doit absolument apprendre la suite si on veut avoir un chance de la sauver.
- C'est Vous-Savez-qui qui la tient captive, dit-elle en frissonnant. Une aile de Durmstrang lui sert de résidence. C'est là qu'il reçoit les visites de ses serviteurs et distribue les ordres. C'est là aussi que doit être Hermione dans un cachot ou dans une cellule en hauteur.
- Comment le sais-tu ? demanda Sirius sans douceur.
- C'est ce qu'ont dit les Mangemorts qui étaient dans la maison.
- Que s'est-il passé exactement ?
- Quand Olaf a ouvert la porte, raconta Wakewage, il y a eut des voix agressives. Je n'ai pas compris ce qu'elles disaient, mais c'était clairement des menaces. Les Mangemorts sont entrés en forçant le passage. Ils sont tombés sur Hermione et Viktor. Ça s'est passé juste en dessous de ma cachette. Les chef des Mangemorts a reconnu votre amie. Viktor s'est placé devant elle pour la protéger, mais avant même que le Mangemort ait pu jeter un sort, Viktor a crié : " ne tirez pas ! nous nous rendons ! " Hermione a dit " Viktor ! " d'un ton choqué et elle a voulu l'écarter pour attaquer le Mangemort, mais il a résisté.. Je crois qu'il l'a embrassée, en tout cas il a dit " Je t'aime " et il est allé se placer parmi les ennemis. Hermione a tenté de se battre, sans aucune chance. Ils l'ont prise dans un sortilège de Ligotement. Là, j'ai entendu crier " Viktor, espèce de traître ! ". C'était Olaf. Il a lancé deux Expelliarmus et quelques autres sorts, jusqu'à ce qu'un Mangemort le frappe d'un Doloris. C'était affreux. J'ai déjà entendu des gens endoloris, mais jamais si proche, jamais un ami. Je me suis mise à pleurer et à trembler violemment, j'avais l'impression que tout le monde pouvait m'entendre. Puis quelqu'un a dit un mot, je n'ai pas saisi quoi, mais je sais très bien ce qu'il voulait dire. Un coup de vent m'a glacé jusqu'aux os, et une porte a claqué en bas. Olaf a cessé de hurler. Il a cessé de vivre pour toujours…
Un rossignol émit une trille pour saluer l'aube, un autre lui répondit. Un merle s'envola des branches d'un arbre et éveilla le matin de son chant haut perché. À l'horizon, derrière le dôme magique qui encerclait la maison, derrière toutes les maisons de Privet Drive, le soleil darda ses tous premiers rayons.
Les oiseaux lui firent bon accueil et soudain les rayons partirent tout droit, tels des flèches ignées, et conquirent toute la voûte, chassant les dernières étoiles attardées. Les nuages moutonnants quittèrent leur manteaux brumeux pour revêtir le tutu rose vif qui leur donnait l'air embarrassé. Les rayons du petit matin tombèrent jusqu'à cette chambre, au premier étage du, Privet Drive, où quatre personnes n'avaient pas dormi de la nuit.
- Les garçons, disait Sirius, je vais transplaner pour Durmstrang. Restez ici et ne…
- Attendez! s'écria Wakewage. Vous aurez besoin de moi pour retrouver Hermione. Je connais bien l'école.
- C'est vrai, Oliver, on devrait l'emmener, dit Ron.
Il avait eu la présence d'esprit de nommer Sirius par le pseudonyme qu'il s'était donné. Celui-ci eut un regard reconnaissant.
- Venez, tous les deux. Je dois vous parler.
Ils sortirent de la chambre et refermèrent la porte derrière eux. En passant, Harry vit son oncle et sa tante pétrifiés et de nouveau se sentit gêné. Mais il ne dit rien et rejoignit Ron et Sirius au bout du couloir.
- Je ne crois pas qu'on doive l'emmener, disait son parrain. Cette gamine a quelque chose de louche. Elle sait trop de choses. Comment a-t-elle pu trouver cette maison, par exemple. C'est bizarre.
- Moi je crois qu'elle est sincère, dit Ron. Elle semblait tellement désespérée… on ne peut pas simuler une telle détresse.
- Hmm. Tu as peut-être raison.
Mais il n'avait pas l'air convaincu.
- Sirius, dit Harry, le coupant dans le cours de ses réflexions. Qu'allons-nous faire de Shrakow? On ne peut pas le laisser stupéfixé, sinon il va finir par mourir de faim.
- Ça ne serait peut-être pas plus mal… mais tu as raison, Harry. On ne peut pas le laisser comme ça.
- Et si on appelait un membre du Ministère de la Magie pour l'arrêter? proposa Ron.
- Surtout pas! gronda Sirius. Je te rappelle que je suis recherché par le Ministère.
- Et moi, je ne suis pas censé utiliser de magie pendant les vacances, compléta Harry. Mais au fait! poursuivit-il, je n'ai pas reçu de hibou, et pourtant il y a eu un duel dans ma maison, et nous avons confectionné une potion! comment ça se fait?
- Comment, tu n'es pas au courant? s'étonna Ron, un peu bougon de s'être fait rabrouer par Sirius. Les locaux du Service des Usages Abusifs de la Magie ont été réduits en cendres il y a cinq jours. Le service n'a pas encore été réouvert, car la plupart des Sorciers qui y travaillaient sont morts.
- Encore une pierre à l'édifice de chaos et de destruction qu'a entrepris de construire Voldemort, ajouta sombrement Sirius.
- À moins que ce ne soient des élèves de Poudlard qui en avaient marre d'être privés de magie pendant les grandes vacances! lança Ron dans une tentative désespérée d'humour. D'ailleurs, Maman a même soupçonné Fred et George, jusqu'à ce qu'on apprenne le nombre de morts et qu'elle décide que ses chers fils n'auraient jamais fait ça.
- Eh, mais au fait! s'écria Harry en se frappant le front de la main, ça signifie qu'on peut faire de la magie!
- En effet… dit Sirius.
- Donc on peut aller délivrer Hermione tous les quatre!
- Il n'en est pas question, dit le Sorcier d'un ton sans appel. Je ne veux pas que tu risques ta vie. Je vais me charger d'Hermione tout seul.
- Mais tu n'y arriveras pas! supplia Harry. Tu ne sais pas où elle est enfermée. Et qu'est-ce que je vais devenir, moi, si Voldemort te tue? Je ne vais pas te laisser risquer ta vie pour mon amie à ma place.
- Écoute-moi bien. C'est comme ça, un point c'est tout. Il se trouve que tu as un rôle très important à jouer dans l'avenir. Tu n'en as peut-être pas conscience, et je n'ai moi-même que quelques idées très vagues sur ce rôle, mais les instructions de Dumbledore sont claires: tu ne dois pas sortir de cette maison. Regarde ce qui a failli t'arriver lorsque tu as ouvert le dôme l'espace d'une minute: un Mangemort s'est aussitôt infiltré pour te capturer! Non, Harry, tu n'es en sécurité nulle part et c'est encore ici le moins dangereux, alors j'entends bien que tu y restes.
Harry baissa la tête, frustré et plus inquiet que jamais pour deux des personnes auxquelles il tenait le plus au monde. Comment Sirius pouvait-il lui interdire de porter secours à sa meilleure amie?
- Harry, je comprends ce que tu ressens. Mais je peux me débrouiller, même face à Voldemort lui-même. Ne t'inquiète pas. Au moindre danger, je transplanerai ici.
- Tu ne pourras pas, marmonna amèrement Harry. On ne peut pas transplaner à l'intérieur du dôme.
- Alors je transplanerai chez les Weasley, ou chez un ami. Ce ne sont pas les alliés qui manquent.
Comme son filleul ne répondait pas, il ajouta:
- Si je t'interdis de m'accompagner, c'est parce que j'ai peur que ce ne soit un piège. Même si Morgane Wakewage est sincère, il est très possible que Voldemort ait été au courant de son entreprise et qu'il s'attende à te voir arriver d'un instant à l'autre. Après tout, elle a bien été suivie par son père jusqu'ici.
- Tu ne veux pas au moins écouter la fin de son récit? supplia Harry.
Mais Sirius avait déjà transplané.
Dans les yeux de Ron, il vit la même crainte que lui-même ressentait. Quelque chose allait de travers.
- Suis-moi, dit-il.
Ils trouvèrent Wakewage debout devant le petit miroir de Harry, occupée à tenter de démêler la touffe de cheveux hérissés sur sa tête.
Wakewage, dit Harry d'un ton sans réplique, que s'est-il passé après la mort d'Olaf?
Elle le fixa gravement à travers le miroir.
- Les Mangemorts sont partis, et moi je suis rentrée chez moi. J'ai pris mon balai et un flacon de Polynectar qu'on avait en réserve. J'ai dit au revoir à ma mère, qui est gravement malade, et je me suis mise en route.
- Comment as-tu trouvé ma maison?
- Le dôme qui la protège est un sort très puissant, si puissant qu'on peut le pister de Bulgarie. J'ai fait une recherche sur le sortilège qui m'intéressait. Une fois exclus ceux qui protègent la plupart des écoles de sorcellerie, il n'en restait que trois. Et un seul était assez grand pour couvrir une maison. J'ai retrouvé ce sort-là et je l'ai pisté jusqu'ici.
- Pisté? comment ça? s'étonna Harry, mais il fut coupé par Ron.
- Attends, attends, ça ne marche pas! comment tu savais que Harry était protégé par un tel sort?
Elle se concentra à nouveau sur son reflet dans le miroir et attendit un peu avant de répondre. Ses cheveux étaient affreusement emmêlés.
- Je vis chez des Mangemorts. Je sais tout sur Harry, ses amis, Dumbledore et la plupart des membres du Ministère anglais. La tête de Harry Potter est mise à prix par Vous-Savez-Qui.
- Alors, lança ironiquement Ron, si tu es au courant de tout ça, c'est que ton père et Tu-Sais-Qui te traitent comme une des leur?
Il y eut un craquement sinistre. Elle avait tiré d'un coup sec sur la brosse, arrachant une pleine poignée de cheveux.
À travers le miroir, elle lança un regard haineux au garçon roux.
- Crois ce que tu veux, cracha-t-elle. Je suis là pour vous aider.
Il y eut un moment de silence pesant que seul troublait le tic-tac du réveil.
- Au fait, dit Wakewage sur un ton plus léger, où est votre ami? L'homme, là, Oliver Knight?
- Il a transplané à Durmstrang.
Mais elle eût une réaction tout à fait inattendue : Elle paniqua.
- Il va se faire laminer! C'est un piège!
- QUOI? rugit Harry.
- C'est toi que le Seigneur des Ténèbres veut, Harry Potter! Si ton ami Knight arrive à ta place, Tu-Sais-Qui va le tuer!
Harry la saisit par le col et se mit à hurler comme un dément :
- Tu nous a attirés dans un piège! Depuis le début, tu nous mens pour nous attirer dans un piège!
- Lâche-moi! cria Wakewage d'une voix aiguë.
- Tu es une traîtresse! hurlait Harry sans même l'entendre. Une Mangemorte!
Il la projeta en arrière. Elle tomba durement sur le sol et il lui sauta dessus, l'immobilisant à terre.
- Harry, arrête! criait Ron à son tour.
- Je suis sûr que c'est une Mangemorte, regarde!
Il lui attrapa le bras droit et remonta sa manche d'un coup sec.
La peau de l'avant-bras était parfaitement blanche.
- Tu me fais mal, gémit Wakewage.
- C'est bon, je m'excuse, dit-il en se relevant. Tu n'es pas Mangemorte. Maintenant, dis-nous tout ce que tu sais qui puisse nous aider à sauver Si… Oliver.
- Je t'ai dit tout ce que je savais, geignit-elle en se relevant. Je ne peux rien pour Oliver. Par contre, il reste un espoir pour Hermione…
- Lequel? fit-il avec violence.
- On peut se rendre à Durmstrang et la retrouver.
- Super! génial, ironisa Harry.
Il se mit à faire les cent pas en prenant le plafond à témoin. Il agitait les mains en parlant.
- Dans trois jours, on arrivera frais comme des gardons à Durmstrang…
- Des quoi? fit Ron.
- … et on demandera à Voldemort: "Excuse-moi, tu n'aurais pas vu Sirius et Hermione? Parce qu'on doit leur sauver la vie, là…"
- Sirius? s'étonna Wakewage.
- Et puis, en passant, on lancera un petit Avada Kedavra sur Voldemort, comme ça, pour rire! Qu'est-ce que tu en penses? On vous a appris Avada Kedavra à l'école?
- NE RIGOLE PAS AVEC CES CHOSES-LÀ! cria la fille.
Cela suffit pour ramener Harry à lui-même.
- Ok, ok. Alors, tu n'as rien de mieux?
Wakewage le jaugea froidement. Son regard se porta sur Ron, immobile près de la porte, et revint sur Harry.
- Si, dit-elle. Donnez-moi vos mains.
— fin du chapitre 1 —
Alors, la petite chronique de Ona-chan. À toutes les personnes qui liraient ce chapitre avant la parution des suivants, je tiens à vous précisez : courage ! la suite viendra très vite ! les 6 premiers chapitres sont déjà écrits ! malheureusement, ils sont en manuscrit, alors il me faut un peu de temps pour les recopier et les expédier sur le Net. Mais ne vous inquiétez pas, l'histoire se poursuit, elle va même se densifier. Bien sûr, la page de pub habituelle, n'hésitez pas à m'écrire des reviews, même si c'est pour ne rien dire, ça fait toujours plaisir de savoir que quelqu'un a trouvé ma fic dans la jungle de fanfiction.net.
Et pour les passionés, il y a le jeu-surprise ! il y a dans ce chapitre deux citations de la plus grande saga de tous les temps (en dehors de HP, évidemment) ainsi qu'un clin d'œil à la meilleure potterfiction de tout le Net (non non, ça n'était pas du plagiat -) ). Les avez-vous repérés ?
À bientôt pour de nouvelles — terribles— aventures dans le Saint des Saints : Durmstrang !
Ona
