Chapitre 4 : Feux et flammes

Sans bien savoir pourquoi, Harry avait transplané au Terrier. Ils apparurent au milieu de la cuisine des Weasley, sales, épuisés, affamés. Toute la famille était là, réunie autour d'un petit déjeuner copieux. Leur arrivée fut saluée d'un profond silence incrédule. C'est alors que Harry remarqua que tous les Weasley avaient des têtes d'enterrement, et que leurs assiettes étaient vides, malgré la montagne de pancakes et de chocolat chaud qui fumait sur la table.

- Ron ! s'écria Mrs Weasley en se précipitant sur eux. Harry !

Et elle étouffa les deux garçons de son étreinte maternelle. Puis ce fut au tour de Mr Weasley, puis de tout le reste de la famille, de se jeter dans leurs bras.

- Tu nous a fait une sacrée frayeur, fiston, s'écria Arthur.

- Maman était terrifiée, rigola Fred (à moins que ce ne fut Georges ?).
- Il y a de quoi ! se récria Mrs Weasley d'un air sévère. Vous avez vu l'horloge comme moi, non ?

C'est alors que Harry remarqua l'horloge familiale : l'aiguille attitrée de Ron venait de sauter sur " à la maison ". Il comprit qu'elle avait indiqué " en danger de mort " peu avant.
- Et Ginny a pleuré, renchérit Georges (ou Fred) incapable de garder son sérieux.
- Eh ! se défendit cette dernière.

Mais elle avait effectivement les yeux rouges.

Harry sentit une ombre passer devant ses yeux. Le poids es deux terribles sorts qu'il avait lancés sans trop savoir comment lui pesait, ajoutés à sa nuit blanche et à sa fringale. Il attrapa une chaise et s'y assit jusqu'à ce que l'ombre passe. Il espérait juste ne pas se montrer trop malpoli.

- Les pauvres petits ! Ils sont épuisés ! s'écria Mrs Weasley. Je manque à tous mes devoirs. Asseyez-vous ! Et Mr Black, dans quel état est-il ? Fred, Georges, allez l'allonger dans le lit de la chambre d'amis. Et Hermio

Mais elle s'arrêta net. Elle venait de voir que ça n'était pas du tout Hermione.

- heu, votre amie, là, elle est blessée ? Il faut la soigner !

- Elle est juste épuisée, Maman, je crois, soupira Ron en se laissant tomber sur une chaise.

- D'accord, d'accord. Ginny, pourrait-tu aider Percy à la monter au premier ? On va la mettre dans la chambre de Charlie tant qu'il n'est pas rentré.

Puis elle se tourna vers les garçons :

- Mangez, mangez les enfants ! Il faut reprendre des forces !

A présent, il n'y avait plus que Mr Weasley à la table. Pendant que sa femme s'attelait à enchanter les poêles à frire et le bacon, il se pencha vers Harry et Ron.

- Maintenant, racontez-moi tout ce qui s'est passé cette nuit. Où étiez-vous ?

Un seul regard échangé avec Ron suffit à Harry pour savoir ce qu'il pensait : ils ne pouvaient pas mentir à Mr Weasley.

Alors ils se lancèrent dans leur récit.

Derrière la porte de la cuisine, Fred, Georges et Ginny se battaient en silence pour obtenir le trou de la serrure, tandis que Percy hésitait entre les dénoncer ou écouter avec eux. Pour finir, il se jeta dans la course à la serrure.

Il faisait nuit, mais Harry ne pouvait trouver le sommeil. Assis sur le muret qui délimitait la propriété des Weasley, il écoutait la nuit. Ses pensées galopaient si vite qu'il ne pouvait les suivre. Mais il savait, il sentait en lui le pouvoir, la magie qu'il avait volé à Voldemort. Elle était là, dans ses veines, dans son cur, dans sa tête. Elle ne demandait qu'à sortir. Pour la première fois, il se sentait puissant, si puissant qu'il aurait pu partir à la conquête de la place qui lui revenait de droit à la tête du pays.

Il secoua la tête, effrayé. Ca n'était pas lui. Pas lui qui avait ces envies de puissance.

" Tu as d'immenses qualités, sais-tu ? je le vois dans ta tête, et Serpentard t'aiderait singulièrement sur le chemin de la grandeur, ça ne fait aucun doute. "

- Non, dit-il à voix haute. Je suis un Gryffondor. Je l'ai choisi. Ce sont nos choix qui font ce qu'on est, c'est le professeur Dumbledore qui l'a dit.

" Il y a une étrange ressemblance entre nous deux, Harry Potter. Même toi tu as dû le remarquer. Nous avons tous les deux du sang moldu, nous sommes tous deux orphelins, élevés par des Moldus. Et probablement les deux seuls élèves de Poudlard qui aient jamais parlé Fourchelangue depuis le temps du grand Serpentard lui-même. Même physiquement, nous nous ressemblons "

- C'est faux, dit Harry. Je ne ressemble pas à Jedusor. Moi j'ai choisi de défendre la liberté et l'amour.

Mais au moment même où il prononçait ces paroles, elles lui semblèrent désespérément creuses.

Alors il se remémora la discussion avec Mr Weasley, devant une bonne pile de pancakes. Ron avait flanché à partir du moment où ils étaient arrivés devant Voldemort, et Harry avait raconté la suite seul. Le père de Ron avait écouté leur histoire attentivement, puis avait demandé des détails. Dans un livre, il avait trouvé une description des Pierres d'Orian. Ces joyaux, dont la plupart étaient perdus, avaient effectivement le pouvoir d'exaucer tous les vux de leur maître. Mais ils n'obéissaient qu'à ceux qui les avaient découvert le premier. Ainsi, en offrant la Pierre à Voldemort, Wakewage l'avait placé devant la Tentation, et il avait été si heureux qu'il avait oublié que la Pierre ne lui obéirait pas. Il avait formulé son souhait dans la forme requise, puis Wakewage avait crié la formule " Pierre, reconnaît ton maître ! " et la Pierre avait puni le Mage Noir d'avoir osé formuler son vu.

Mais pourquoi Morgane avait-elle fait cela ? Que cherchait-elle ? Qui était réellement ? Il l'avait prise pour une espionne, puis pour une alliée, puis pour une traîtresse, et maintenant, il ne savait plus. Tout était tellement mystérieux. Une seule chose sûre : son poing contracté sur sa baguette brûlait de s'en servir pour élucider tous les mystères. Et pour commencer, il voulait en apprendre plus sur ses parents. Trop longtemps, on lui avait caché des vérités. Dumbledore avait beau être puissant, il n'avait pas le droit de garder des secrets qui ne lui appartenaient pas. Harry était en droit de tout savoir.

Des phares percèrent la nuit tout au bout du champ qui entourait la maison. Une voiture pénétra dans l'allée à vitesse réduite. Elle vint se ranger dans la cour et deux hommes en sortirent : le premier était Mr Weasley. Le second, avec sa longue barbe argentée et son chapeau violet brodé de lunes, était indubitablement Albus Dumbledore.

Ce dernier se dirigea droit vers Harry, pourtant invisible à l'ombre des arbres. Mr Weasley s'arrêta, surpris.

- Harry! s'écria Dumbledore. Tu es ici. Parfait.

Le père de Ron s'approcha, aperçut enfin Harry.

- Entre donc, Albus, dit-il poliment. Viens avec nous, mon garçon, le professeur Dumbledore souhaite te parler. C'est une bonne chose que tu ne sois pas couché.

Et alors qu'ils pénétraient dans la maison, le sorcier enchaîna :

- Je suis passé chez tes Moldus, Harry. Ta tante et ton cousin étaient dans un état déplorable, complètement terrorisés. J'ai dû leur effacer la mémoire. A ton oncle aussi, d'ailleurs. Une fois que je lui ai rendu sa texture normale, bien sûr.

Harry lui avait raconté que l'oncle Vernon était toujours figé en statue de granit.

- Et j'ai ramassé le Mangemort stupéfixé. Il est en prison pour l'instant, il sera jugé dans quelques jours. Ca ne fait aucun doute que c'est un serviteur de Tu-Sais-Qui

- Malheureusement pour la justice, ça en fera certainement soupira Dumbledore.

Ca n'était pas du pessimisme, remarqua Harry, c'était une simple constatation. La justice, à l'image du Ministre de la Magie, refusait d'admettre le retour de Voldemort.

- Il y aurait peut-être un moyen commença Mr Weasley, mais il s'interrompit sur un signe de Dumbledore.

- Nous verrons cela plus tard, arthur. Pour le moment, c'est de Harry qu'il me faut m'inquiéter.

- Je vais très bien, dit celui-ci abruptment.

Le vieux sorcier le regarda droit dans les yeux et Harry sentit, comme déjà dans d'autres circonstances, qu'il voyait à travers lui et en lui. Dumbledore se leva de sa chaise et commença à faire les cent pas, entreprise particulièrement délicate dans le séjour surchargé des Weasley. Finalement, il s'arrêta face au garçon :

- Je voudrais que tu me racontes ta rencontre de cette nuit avec Lord Voldemort, s'il te plaît.

Harry s'exécuta en prenant soin de faire un récit le plus descriptif possible il ne voulait pas révéler les sentiments qui s'étaient bousculés en lui, et surtout, surtout pas ce qu'il ressentait maintenant, cette terrible envie de défier Dumbledore et de lui ordonner de révéler tout ce qu'il lui cachait sur ses parents.

Bien entendu, Dumbledore ne fût pas dupe de ses yeux qui fuyaient son regard, de ses épaules crispées et de ses jointures livides à force de serrer les poings. Quand le garçon eût fini son récit, Dumbledore se remit à déambuler, les mains dans le dos. Puis il revint s'asseoir et, se penchant vers Harry, il lui demanda :

- Dis moi, Quand tu as affronté Lord Voldemort, qu'as-tu ressenti ?

Alors il dût bien lui raconter. L'indécision vis-à-vis de Morgane. L'assurance qu'il pouvait gagner. Le bonheur quand il avait entendu les accents de la panique chez Voldemort. La jubilation quand il avait pu bourrer le mage de coups de poing. Le grand bouleversement dans son corps après qu'il eût touché la main de son ennemi. Le sentiment de calme, de confiance en soi quand il avait su qu'il pouvait transplaner, et faire transplaner trois personnes en même temps que lui.

Dumbledore avait tout écouté, une expression indéfinissable sur le visage.

De longues minutes s'écoulèrent.

- Oui ? lança Harry sèchement. Vous pourriez nous faire partager vos pensées ?

Dumbledore fronça les sourcils. Son regard était à présent plus dur que du cristal.

- Je réfléchissais à ce qui peut bien t'arriver. La dernière fois que tu as rencontré Lord Voldemort, tu étais sombre et amer, tu refusais d'en parler. Aujourd'hui, bien peu de temps s'est écoulé et pourtant tu racontes ton aventure sans aucune crainte, et même avec plaisir

- C'est parce que j'ai battu Voldemort, dit Harry en haussant les épaules. Je suis content de moi.

- La dernière fois aussi tu étais sorti vainqueur du duel. Mais cette fois tu te comportes étrangement.

Harry évita le regard du vieux sorcier. Oui, c'était bien ce qu'il avait craint. Dumbledore lisait en lui comme dans un livre ouvert. Mais Harry ne pouvait expliquer ce qui avait changé en lui. Parfois il lui semblait se regarder de très loin et ne pas se reconnaître. Mais cela ne durait que le temps d'un clin d'il, et il redevenait lui même. Le Harry actuel. Qui avait vaincu Voldemort. Et qui en tirait de la fierté.

- Viens ici, s'il te plaît, ordonna Dumbledore.

Il obéit à contrecoeur et vint se placer face au sorcier. Il avait un mauvais pressentiment.

- Détends-toi. Ca ne prendra que quelques instants.

Harry inspira profondément, décrispa les épaules, ferma les yeux. Il sentit que Dumbledore le fixait intensément, avec son regard et avec sa magie. Comment il faisait cela, voilà qui était bien confus pour le garçon. Puis il y eût une secousse dans les ondes magiques et Harry se sentit instantanément submergé par des flots d'informations en provenance de sa propre tête. C'était comme si Dumbledore avait levé un barrage qui retenait une partie de lui-même dans un coin inaccessible de son cerveau.

L'effet en fut immédiat : Harry s'écarta violemment du vieux Sorcier tout en cherchant frénétiquement sa baguette dans toutes ses poches. Dumbledore fit un pas vers lui et le garçon recula aussi loin qu'il pût, en criant :

- N'approchez pas, Fils de Myrrdin ! Ou je vous envoie au Pays des Neuf Plaines ! La Flamme Immaculée ne vous sera plus d'aucune utilité! Reculez!

Et il sortit en courant.

La nuit était claire, la lune à son premier croissant. Harry traversa en courant le pré qui entourait la maison des Weasley. Il courait comme un fou, la tête en feu et ses pieds se posaient à peine sur le sol avant de décoller à nouveau. Il courut jusqu'au petit bois. Il savait que Dumbledore courait derrière lui. Il avait éveillé le Mage Blanc.

Au centre du bois était une clairière qui usuellement servait de terrain de Quidditch aux frères Weasley. Harry la traversa et s'immobilisa à l'autre bout. Cela ferait une parfaite arène.

Le spectacle allait commencer.

Quand Dumbledore pénétra à son tour dans la clairière, il n'y avait plus âme qui vive. Du moins en apparence. Mais le vieil homme savait, grâce à la magie, que son adversaire l'attendait.

Il s'arrêta, dos contre un arbre, et prit soin de paraître essoufflé. Il avait tout de suite localisé Harry, magiquement caché à une dizaine de mètres. La clairière formait un parfait terrain de bataille.

" c'est donc un duel que tu veux, pensa Dumbledore. Fort bien. Nous verrons enfin qui de nous deux est le plus fort. "

Il sourit intérieurement. Il ne s'était pas mesuré à un mage noir depuis plus de treize ans. Il était vieux, mais il n'avait rien perdu de sa puissance. Il connaissait sa force. Il savait évaluer celle de son adversaire. Pour toutes ces raisons, il était en mesure de présager l'issue du combat.

Le spectacle pouvait commencer.

Harry leva soudainement son sort d'invisibilité et concentra toute sa puissance dans une boule de feu qui jaillit vers Dumbledore. Celui-ci leva simplement la main et la boule se contracta et s'assombrit, jusqu'à disparaître. Des étincelles blanches crépitaient au bout des doigts du Sorcier. Ses yeux brillaient d'une lumière irréelle. Il passa sa main le long de sa baguette, et celle-ci se métamorphosa, dans une explosion de flammes d'or, en un long sceptre de bois sculpté. Il le tint au dessus de sa tête, et le sceptre luisait d'une flamme si blanche qu'elle en était insoutenable : la Flamme Immaculée.

Harry savait ce qu'il avait à faire : il passa sa main chargée de magie brute le long de sa propre baguette. Et le bois devint métal, et la baguette se transforma. Il tenait à présent une épée à la poignée de métal dur et noir comme le charbon la garde avait la forme d'un dragon, de profil, et de sa gueule ouverte jaillissait une lame longue et large, de forme légèrement plus large au milieu que à chaque bout. Cette lame semblait faite d'une flamme orange, rouge et noire, et ses tranchants étaient imprécis, mouvants.

Harry leva son épée vers le ciel. Un sentiment de puissance enivrante le submergea lorsque les nuages noirs accoururent à son appel, déversant des flots de pluie grise et tiède. Un roulement de tonnerre gronda, puis un deuxième plus proche. L'éclair suivant se précipita à la rencontre de la terre et, dédaignant les arbres qui s'offraient à lui, il vint frapper de plein fouet la lame offerte de Harry. Le garçon ressentit la violence de l'énergie reçue. Sans mêm prendre le temps de l'assimiler, il pointa son épée sur Dumbledore et restitua toute la puissance de l'éclair.

Dumbledore se protégea de son bâton. Les millions de volts d'électricité se heurtèrent à son bouclier avec des hurlements bien pires que le tonnerre lui-même. L'air s'emplit d'une odeur d'ozone. Puis tout s'éteignit. La pluie redoubla.

Dumbledore était intégralement intact. Son bouclieravait enduré une violence terrifiante avec la facilité d'une falaise face à l'océan impétueux. Sa garde n'avait même pas faibli.

Sans lui laisser le temps de la renforcer encore plus, Harry enchaîna une troisième attaque. Il donna un coup d'épée de haut en bas qui fendit l'atmosphère en deux, puis fit un cercle sur lui-même, épée tendue à l'horizontale. Celle-ci dessina un cercle igné tout au long de son trajet. Lorsque Harry eût fini son tour, le cercle de flamme à hauteur de sa poitrine descendit doucement au sol. Là, il augmenta en intensité. Les flammes montèrent jusqu'aux épaules du Sorcier. Il traça des signes magiques dans les airs et les flammes se déplacèrent et s'étendirent. Il était à présent debout au centre d'une figure de feu représentant un cercle dans un pentacle. Un geste de la main, et des flammes noires s'élevèrent dans chaque pointe de son pentacle. Tout était prêt.

Il déchaîna les Ténèbres.

De son côté, Dumbledore avait lui aussi préparé ses attaques et fortifié son périmètre. Seulement, il n'éprouvait aucune affection pour ces démonstrations grandiloquentes de puissance. Il aimait jouer dans la finesse, et le première des finesses était de ne jamais révéler à son ennemi sa véritable force.

Si l'on avait observé la scène à travers un Révéliroir ou tout autre item magique montrant l'apparence des sortilèges utilisés, on aurait pu voir une figure blanche et bleue claire, à peu près similaire à celle de Harry, entourant Dumbledore. Mais au lieu des flammes, cela s'élevait plus comme des voiles opaques au ras du sol et qui s'élèveraient en s'éclaircissant. La puissance des sorts évoqués faisait voler les robes, les cheveux et la barbe de Dumbledore. Ses yeux étaient animés d'un feu effrayant.

Harry termina sa mise en scène spectaculaire. Il leva les bras. Dumbledore se raidit, sachant d'avance ce qu'allait faire son adversaire. Il ne s'y attendait pas. Pas ça. Pas si tôt.

Il sembla que le temps était suspendu quand tous les nuages du ciel se rassemblèrent au-dessus de la tête du Sorcier. Un formidable mugissement surgit du fond de la terre. Celle-ci s'ébranla.

Grâce à sa magie, Dumbledore percevait ce qui se passait au-delà du rideau des arbres. Une crevasse fendit la terre, longue de plusieurs dizaines de mètres. Un nuage fétide s'éleva, ainsi qu'une vague de chaleur. Et dans un tourbillon de terre et de feu jaillit du sol un monstre. Il était grand comme une maison, et au moins aussi large. Sa tête aplatie était celle d'un buffle, et ses formidables cornes s'enroulaient sur elles-mêmes. Son corps était celui d'un dragon, avec les piques le long de l'échine, les ailes de chauve-souris d'une envergure démesurée et la longue queue terminée en pointe de flèche qui se balançait lourdement. Mais la créature avait aussi des mains, de terribles mains, accrochées à de longs bras musclés, qui tenaient chacune une flamme.

Harry Potter avait invoqué une Chimère.

Jamais Dumbledore n'aurait attendu cela. Le combat venait à peine de commencer. Son adversaire employait une étrange tactique en faisant appel à une Chimère si tôt. Etait-ce un aveu de faiblesse ? Ou bien Potter voulait-il le lui faire croire ?

Mais Dumbledore était soulagé. Quelles que soient les ruses de Potter, cela l'arrangeait de combattre la Chimère. Une fois vaincu le monstre, il aurait gagné le duel et ce sans tuer celui qu'il considérait malgré tout comme son élève.

Il ferma les yeux la concentration était plus aisée lorsque la vision magique n'était pas troublée par la vision de surface. Lorsque la perception de l'espace autour de lui fut suffisamment nette, il étendit ses tentacules magiques dans toutes les directions. Les arbres, la terre et le ciel lui confièrent la puissance qu'il requérait. Les nuages s'inclinèrent et se rassemblèrent au-dessus de sa tête. Les arbres se penchèrent vers lui. Les graines endormies dans la terre germèrent et soudain les pieds de Dumbledore furent entourés d'une forêt de pousses, feuilles et fleurs jeunes et tendres dont les plus hautes montèrent jusqu'à ses genoux. Toute la puissance confiée par la nature s'accumula dans ses mains par le biais du sceptre, dont le rôle était de canaliser et d'amplifier la magie. De là, il répartit les ondes de puissance dans tout son corps, des orteils au cerveau, et il s'harmonisa à elle. Dès qu'il sentit que chacune de ses cellules était prête à répondre à ses ordres instantanément, il sut que son harmonie était totale. Il était prêt à se battre avec toute la force, l'intelligence et la célérité dont étaient capables les plus puissants Mages Blancs.

La Chimère était prête, elle aussi. Dans un rugissement de tonnerre, elle se lança sur Dumbledore. Celui-ci para les coups de ses puissants poings simplement en levant son sceptre devant lui. La créature, ne parvenant pas à briser le bouclier, changea d'attaque. Elle rapprocha ses deux mains aux griffes de deux mètres de long et les flammes bleues qu'elles contenaient se fondirent en une plus grande. La Chimère rouvrit ses mains, et la flamme flotta au-dessus des deux mains en coupe, plus vive et plus grande qu'auparavant. Elle souffla alors dessus avec toute la force de ses poumons de taureau et un déluge de feu déferla sur Dumbledore. Mais il le para d'un simple sort d'Etouffe et envoya sa riposte sans plus tarder. La Chimère fut frappée au torse, d'une longue estafilade d'où s'échappa une lumière blanche quelques instants, jusqu'à ce que le sang se mette à couler. Le hurlement de la bête fut terrifiant. Il résonna longtemps aux oreilles du Sorcier. Puis elle se pencha en avant, ses grandes ailes caoutchouteuses battant l'air frénétiquement, et d'un formidable coup de poing elle fendit la terre et la roche, si profondément que du magma jaillit et commença à se répandre. Dumbledore fut forcé de battre en retraite à l'extrémité de la clairière, et même là la lave restait suffisamment dangereuse pour qu'il ait à déployer toute sa puissance à la contenir. Heureusement, l'attaque magique de la Chimère ne pouvait durer très longtemps, et la lave finit par se résorber et la terre par se reformer. Alors Dumbledore porta un nouveau coup de son épée de magie pure, et le monstre fut presque amputé d'un bras. Sans même attendre de riposte, le Sorcier enchaîna par plusieurs sortilèges d'une puissance effrayante. La Chimère tenta encore quelques coups de ses griffes ou du tranchant de sa queue, mais elle avait nettement le dessous. Finalement, malgré les ordres du Sorcier Noir qui l'avait invoquée, elle fit volte-face et retourna à l'abîme qui l'avait vu surgir. Le sol se referma sur elle et le silence retomba.

Il pleuvait toujours. Harry était mortifié. Son invocation n'avait pas suffi. L'Ennemi avait su appeler à lui l'aide de la nature, et il était toujours détnteur de la Flamme Immaculée. Il n avait même pas subi de blessures physiques ni de lésions dans ses défenses magiques.

Techniquement, Harry avait perdu le combat. Mais il n'allait pas se laisser faire.

- Tu ne me vaincras pas, Flamme Blanche ! cria-t-il. Je t'enverrai au royaume de Géhenne avant !

- Rends-toi, Mage Noir ! dit calmement Dumbledore, mais sa voix porta comme s'il s'était tenu juste à côté de Harry.

- La mort me serait plus douce que la reddition ! ricana le garçon avec un rire de dément.

Dumbledore fit un pas vers lui et Harry leva son épée. Mais le Sorcier fit un nouveau pas sans en tenir compte. Une vingtaine de pas les séparait à présent.

- Mais je ne peux mourir, compléta Harry.

Il n'avait pas dit ça par insolence ou par défi. C'était une simple constatation. Il savait être allé plus loin que quiconque sur le chemin de l'immortalité.

- C'est ce qui te trompe, déclara Dumbledore avec un nouveau pas. Tu n'es pas Voldemort. Tu as volé une partie de son être, mais tu restes un garçon de 15 ans, inexpérimenté et vulnérable. Tu es mortel, Harry Potter.

- Non ! s'alarma Harry.

Etait-il possible que sa puissance ne soit qu'un rêve éveillé ? Mais il avait bien réussi à changer sa baguette en épée, et à invoquer une antique Chimère.

- Je détiens le Feu Sombre, s'écria-t-il, soulagé de s'en convaincre lui-même.

- Et depuis quand le détiens-tu ? questionna Dumbledore, à présent à dix pas de lui. Te rappelles-tu avoir appris à le maîtriser pendant de longues années ? Te souviens-tu l'avoir utilisé avant ce soir ?

Harry dût convenir que sa mémoire jouait contre lui : il ne se souvenait pas de l'apprentissage de la Magie Noire. Tout au plus de vagues impressions imprimées dans sa tête, des sensations surgies d'une autre époque, et déposées en lui au hasard. Ca n'étaient pas ses souvenirs à lui.

- C'est impossiblemarmonna-t-il, égaré.

Mais soudain il se reprit. Il n'y eût plus rien d'autre que le Sorcier Blanc juste devant lui. Il voulait sa mort.

Il se jeta en avant avec un cri de bête blessée, l'épée prête à frapper. Dumbledore para de son sceptre et des étincelles jaillirent lorsque le fer rencontra le bois. La lame aux tranchants voilés de feu et d'ombre laissait dans son sillage un large faisceau orange, tandis que Harry frappait, frappait et frappait encore. Coup de pique, revers, coup de taille, fente, revers, coup d'estoc, les attaques et les parades s'enchaînaient comme s'il n'avait fait que de l'escrime de toute sa vie. La violence et la rapidité des coups portés n'avaient d'égale que la magie déployée dans ce but.

Dumbledore bloquait chaque attaque de son sceptre et de son bouclier de magie, mais ne bronchait même pas lorsque Harry portait un coup à côté de sa cible, accidentellement ou dans l'espoir de le leurrer. Il ne ripostait jamais, laissant son adversaire s'épuiser.

Tous deux formaient un ballet complexe, le bâton qui projetait un lumière bleue claire, et l'épée rouge et noire, engagés dans un duel dont la rapidité défiait l'il humain. Bientôt, ils furent pris au centre d'un tourbillon de lumière qu'eux-même créaient au fur et à mesure. Cela dura dix, peut-être quinze minutes. Il leur était impossible de le savoir. Leur perception du temps était distordue, tout comme la fatigue qui tardait à venir.

Mais elle vint. Les coups de Harry se firent moins vifs, moins précis. Dumbledore le laissa ralentir ses attaques, sans toutefois en profiter pour le frapper à son tour. Enfin le garçon s'arrêta, écumant, le souffle court, l'épée baissée. Il ne pouvait pas. Dumbledore, le Sorcier protecteur des Moldus, ami des Sang-de-Bourbe, défenseur des faibles et des opprimés, le mage Blanc, descendant de Myrrdhin, Dumbledore que tous s'accordaient à considérer comme le plus grand Sorcier de son époque, Dumbledore était indestructible. Sa magie faisait partie intégrante de son être, en parfaite harmonie avec son corps tout entier. Harry comprenait à présent pourquoi Voldemort n'avait jamais pu l'éliminer.

Il ne savait plus que faire. Pouvait-il se donner la mort? C'était préférable à la fuite ou à la reddition. Il avait perdu le combat, mais il ne voulait admettre que sa situation était sans issue. Et puis Dumbledore n'allait pas rester là, à attendre qu'il prenne toutes les initiatives. Il finirait bien par bouger.

Il bougea.

Il fit un ample mouvement de son bâton, et des liens surgis de nulle part ligotèrent Harry solidement. Son épée lui échappa. À peine tombée à terre, elle redevint l'honnête baguette dont un coin de sa mémoire se souvenait encore.

Puis Dumbledore entreprit un grand rituel. Pour la seconde fois, il invoqua l'aide de la nature, et elle la lui donna volontiers. Des déluges de magie brute s'abattirent sur et dans Harry. Il ne vit plus rien, n'entendit plus rien. Il se débattit comme un dément en hurlant des injures et des malédictions dont il n'avait même pas conscience qu'elles fussent dans sa tête. En même temps, une part de plus en plus grande de lui-même décida de se rebeller et prit le parti du vieux Sorcier, tandis que l'autre partie de son cerveau continuait à lutter contre la magie qui l'exhortait à s'enfuir. Finalement, la tête sciée en deux morceau belliqueux, le corps déchiré par ces deux courants opposés, il s'évanouit.

– fin du chapitre 4 –

Hi hi hi, voici un quatrième chapitre en ligne. L'auteur (moi !*) s'arroge le droit de prendre ces quelques lignes pour faire un petit commentaire.

Voilà ce que j'ai à dire : patience ! Je sais que je mets du temps à éditer mes nouveaux chapitres, mais s'il y en a qui ne sont pas heureux ils n'ont qu'à penser au travail que ça représente de taper des textes écrits à la main. Pour information, le 4e chapitre terminait mon premier cahier (clairefontaine 24x32 96 pages de couleur jaune), c'est à dire qu'il ne m'en reste plus qu'un (clairefontaine 21x29,7 96 pages violet) : j'en ai fait la moitié ! Mais à côté de ça, j'ai énormément écrit pour me détendre entre les contrôles et les conseils de classe, et j'en suis maintenant au 17e chapitre. Courage ! C'est les vacances, c'est-à-dire que je vais pouvoir me consacrer à ma fic !

Enfin, pour clore ce petit chapitre, bijou de l'art romanesque du XXI siècle, je voudrais dire : un énorme gros merci à ma chère Amarante, qui s'est farcie le tapage (je sais pas comment on dit) des 5/6e de ce chapitre ! Un grand merci à elle qui est en train d'attaquer le chap 5 (heu, tu l'as commencé, j'espère, mis ? ? ?). Puisqu'il ne faut pas faire de jalouses, un grand merci aussi à Epayss qui me soutient courageusement chaque jour de cette sombre routine lycéenne (je veux lire ton 9e chapitre ! ! !).

À dans plus très longtemps,

Ona

Ps : pour ceux qui auraient lu notre fic à toutes les trois, éditée sous mon nom, et qui s'appelle " De l'autre côté des mots ", là aussi : patience ! La suite arrive, il faut juste que je l'écrive ! tout va bien !

Pps : et mille mercis pour vos reviews ! vous êtes tous géniaux !

Ppps : ouh là, il faut que je me calme.

Tchao !