Chapitre 12: Premier pas

Hermione se réveilla au son du réveil de la chambre des filles. La nuit avait été agitée. Elle avait fait un rêve bizarre. Malheureusement, elle ne se souvenait de rien, juste l'impression d'étrangeté que ça avait laissé.

Elle s'étira, se frotta les yeux. Immédiatement, une partie de son cerveau toujours en alerte lui rappela de ne se les frotter que d'une main, de ne s'étirer que d'une main. Le bras droit restait obstinément sous les couvertures.

Après l'accident, elle avait révisé magiquement tous ses habits, allongeant les manches jusqu'au bout des doigts, rajoutant des dentelles ou donnant de la raideur au tissu pour masquer l'abscence de sa main. Malgré tout, elle vivait dans l'angoisse constante que quelqu'un ne découvre son secret. Notamment en cours, quand elle réalisait si mal les exercices alors qu'elle avait toujours été la première de la classe. Ou quand elle faisait tout de travers à cause de la malhabilité de sa main gauche. Heureusement, personne ne lui avait fait de remarque. Pour l'instant.

Après s'être lavée et habillée, elle descendit dans la Grande Salle, seule. Elle ne parlait jamais avec les filles de sa classe, et Harry ne l'attendait en général pas pour descendre manger. L'un et l'autre savait qu'ils pouvaient se retrouver en bas, et voilà qui expliquait la solitude usuelle d'Hermione. Mais ce matin-là était particulier, parce qu'elle s'était disputée avec Harry, et que Ron serait absent, comme toujours depuis ce qui lui semblait une éternité.

Pourtant, ce jour-là, des pas sonnèrent derrière elle et une Gryffondor la dépassa à toute allure, avant de s'arrêter pour l'attendre.

C'était Ana Casona.

Hermione n'avait rien contre cette fille. Pas plus qu'elle n'avait quoi que ce soit pour. En fait, elle lui avait paru simplement banale. Mais ça, c'était avant l'accident de Ron, avant qu'Ana prenne la place du garçon roux dans les rangs de l'équipe de Quidditch.

Et pourtant, Ana Casona n'était pas très loin de ce qui aurait pu être une amie pour Hermione: ni inintéressante, ni trop particulière, elle était le portrait même d'une Gryffondor: désinvolte, souriante, elle ne se cachait pas sous la timidité habituelle des nouveaux. Elle avait même réussi à garder sa dignité, alors qu'elle vivait seule dans Poudlard: pas de vieux amis espagnols comme elle, et pas d'élèves anglais qui se soient intéressés à elle. Et pourtant, elle marchait droit, la tête levée, pas excessivement fière, mais pas timide pour un rien. En fait, on aurait dit qu'elle attendait son heure.

Hermione, elle, aurait dit qu'elle attendait autre chose. Du genre, l'heure de se démasquer et d'affirmer à la face du monde qu'elle uvrait en secret pour Voldemort, quelque chose dans ce goût-là.

Mais Hermione avait des tendances nettement paranoïaques depuis qu'elle n'avait plus de main droite.

Ana Casona, elle, souriait.

- On fait la route ensemble? proposa-t-elle avec son joli petit accent.

Hermione haussa les épaules, puis se souvint qu'un semblant d'humanité avait jadis vécu sous cette coque dure. Alors elle s'obligea à sourire et s'entendit répondre:

- Si tu veux

Un joli sourire éclaira le joli visage de la jeune fille. C'était ça qui dérangeait Hermione. Tout était joli, chez elle. Rien qui cloche. Mais rien de très original non plus. En fait, Ana Casona aurait très bien pu rentrer dans le groupe Parvati Patil - Lavande Brown, si elle avait eu l'esprit midinette, les gloussements et le retard mental d'au moins trois ans.

- Tu n'est jamais avec tes amis? questionna Ana d'une voix innocente.

- Hein? s'insurgea la jeune fille.

- Ben oui, fit l'autre avec un parfait dénuement de jugement. Ton ami, là, Harry Potter. Vous n'êtes jamais ensemble? Je te vois toujours seule dans les couloirs.

- Ah, fit Hermione, qui n'était pas sûre de saisir le bon sens de la question. Eh bien non, on n'est pas toujours ensemble. Il se lève très tôt en général, et le soir il a ses propres activités. On est surtout ensemble en cours.

Ana sourit d'un air compatissant, et la jeune fille eut immédiatement envie de la frapper.

- Tu es sympa, s'autorisa-t-elle à déclarer. J'aime bien Harry Potter aussi. Il a l'air d'un ami très

- Eh, arrête là! intima Hermione. Tu cherches à te faire des amis, pas vrai?

Ana prit l'air surprise:

- Bien sûr. C'est ce que nous cherchons tous, non?

- Ça dépend qui est le "tous", marmonna la Gryffondor.

- Je suis nouvelle ici, c'est normal que

- Tu connaissais des gens en arrivant. Alejandro, Isabel Belén, Joaquín Araceli, Sebastian Piñera Pourquoi tu n'es jamais avec eux?

Hermione avait conscience de tenir des propos d'extrémiste. C'était plus fort qu'elle. Ana Casona loucha vers sa voisine.

- Ce ne sont pas mes amis! s'indigna-t-elle. J'ai le droit, non? Je ne leur parlais jamais avant de me retrouver ici. Et si tu tiens vraiment à le savoir, mon meilleur ami a été envoyé à Beauxbâtons, sans qu'on lui demande son avis, et moi je me retrouve ici avec pour tout camarade de classe ce crétin d'Alejandro, et vous êtes tous aussi bornés les uns que les autres dans cette école de de

Ana fulminait, incapable de retrouver ses mots. Finalement, elle lâcha un vague juron qu'Hermione soupçonna être de l'espagnol, et partit à grands pas.

- Attends! dit celle-ci en lui courant après. Je ne voulais pas te chasser. Excuse-moi. Je suis incapable de bien me comporter, tu sais ce que c'est reviens!

Ana s'immobilisa. Hermione fit de même, deux pas derrière. Elle se demandait comment la jeune espagnole allait réagir, à présent.

- C'est un genre de test, c'est ça? questionna froidement Ana.

Prise de court, la jeune fille blonde ne put que bredouiller:

- Hein? heu non. Un test?

- Oui, fit l'autre en se retournant, à nouveau souriante. Un test pour me mettre à l'épreuve. Alors, j'ai réussi?

- Heu

- C'est cool. Tu viens? On va être en retard pour le petit déjeuner.

Et Hermione la suivit, encore étonnée par cet étrange caractère.

- Dis, fit-elle en rattrapant l'autre dans l'escalier. Tu parles drôlement bien anglais

- Oh, sourit Ana. Oui, on l'apprend très tôt chez nous.

- Tu n'as presque pas d'accent

- Ah, tu trouves?

Son ton désinvolte mit la puce à l'oreille de son interlocutrice. Mais elle n'ajouta rien. Elles venaient d'entrer dans la Grande Salle, et elle chercha Harry des yeux.

Elle ne le trouva pas. Elle fit une deuxième tentative.

Personne. Troisième balayage radar.

Mais qu'est-ce qui lui arrivait? Il était toujours le premier levé

- Salut, Ginny, fit Hermione en s'asseyant aux côtés de la petite demoiselle rousse. Tu n'as pas vu le héros ce matin?

- Nooooon, bâilla celle-ci, toujours aussi prompte au démarrage. Elle avait les yeux à demi fermés de sommeil et les cheveux en bataille. Hermione y passa une main affectueuse. Elle aimait bien les beaux cheveux flamboyants de la petite Weasley, si fins et souples comparés aux siens propres qui tenaient plus de la forêt de ronces que de la chevelure de reine.

- Il a peut-être déjà fini de manger, suggéra Ana, installée en face d'Hermione.

- Ou i' est a''é voi' "on, suggéra Ginny dans un formidable baîllement.

Hermione la considéra du coin de l'il. Curieusement, la petite Gryffondor ne paraissait pas si perturbée que ça de l'abscence de son frère, elle qui était d'ordinaire si fragile. Sans doute Fred, Goerges et Madame Pomfresh s'étaient-ils ligués pour lui faire entendre que Ron était tiré d'affaire, qu'il avait simplement besoin de repos. C'est aussi la version à laquelle avait eu droit Hermione, mais elle était assez raisonnable pour en douter. Si Ron avait été si bien que ça, il ne serait pas resté onze jours à l'infirmerie. "Ce soir, ça en fera douze" songea-t-elle anxieusement.

Les cours commençant à neuf heures, il restait une demi-heure à Hermione après avoir fini son déjeuner. D'ordinaire, elle la mettait à profit pour réviser ses leçons et exercer (encore et encore) sa main gauche. Mais exceptionnellement, elle décida de se lancer à la recherche de Harry.

Il n'était pas à l'infirmerie, et Madame Pomfresh ne l'avait pas vu. En passant, la Gryffondor demanda des nouvelles de son ami et fut enchantée d'apprendre que Ron s'était réveillé la veille au soir.

Il n'était pas à la bibliothèque non plus, mais ça n'étonna que moyennement Hermione. Elle tenta les cuisines, le jardin et le cloître, où poussait une végétation luxuriante dans l'enceinte même du château. Harry n'était nulle part. Il n'était pas plus à la fauconnerie, ni dans les toilettes de Mimi Geignarde ( mais aussi, qu'est-ce qu'il aurait pu fabriquer là?), ni dans la Salle Commune de Gryffondor. En désespoir de cause, Hermione attrapa Dean à sa sortie du dortoir (toujours en retard!) et lui demanda:

- Harry est encore là-haut?

- Ouais, répondit le garçon. Il ne veut pas se lever. On a tout essayé pour le réveiller, pas moyen. Il est cloué à son lit.

Elle fronça les sourcils, intriguée. Qu'est-ce qui lui prenait? Était-ce à cause de leur dispute? Il ne ferait quand même pas la tête à ce point-là?

Décidée, elle grimpa les marches de l'escalier des garçons, ignorant les sarcasmes en provenance des Gryffondors présents dans la Salle Commune.

Elle poussa la porte du dortoir et tomba sur un champ de bataille, dans un désordre indescriptible. Seul Alejandro Belén était encore là, en train de faire son sac de classe. Il la regarda d'un il surpris, mais elle ne fit pas attention à lui et traça tout droit vers la grosse bosse qui occupait le lit du milieu, et qui respirait régulièrement.

- Harry?

Un ronflement lui répondit.

- Harry, ce n'est pas la peine de faire semblant. Dis-moi ce qui ne va pas, qu'on en discute, mais c'est vraiment stupide de faire la tête! Surtout de cette manière...

(Rrrrrrrrr pshhhhhhh)

- Harry, réponds-moi s'il-te-plaît.

Prise d'un doute, elle arracha l'oreiller des mains du garçon et le retourna sur le dos. Pas de réaction. Elle lui envoya deux baffes retentissantes. Elle le secoua de toutes ses forces. Elle souleva ses paupières.

Il dormait profondément.

Si profondément qu'il aurait pu être mort, à vrai dire.

Elle rajouta quatre baffes, tira les couvertures d'un geste sec. Elle prit sa baguette et murmura "Enervatum ". Harry remua.

Et il remua de façon concluante: il gémit sourdement, se redressa à demi, se retourna sur le ventre et retomba dans le sommeil profond.

La rage d'Hermione commença à faire place à de la peur: se pouvait-il qu'on lui ait jeté un sort? Mais qui? Comment? Et surtout, pourquoi?

Absorbée par sa fougue à tirer Harry de son lit, elle ne vit pas l'élève espagnol s'approcher par derrière. Elle sursauta avec un petit cri quand il lui posa la main sur l'épaule.

- Tu m'as fait peur! protesta-t-elle, gênée.

- Excuse-moi, fit Alejandro Belén. Je peux t'aider, non? (il désigna Harry du menton) Il ne veut pas se réveiller, n'est-ce pas?

- Quel pouvoir de déduction! railla-t-elle tout bas, mais elle gratifia Alejandro d'un sourire engageant et hocha la tête.

- Oui, si tu connais un moyen de tirer les belles au bois dormant de leur sommeil.

- Tu devrais peut-être l'embrasser? suggéra malicieusement le garçon.

Elle se recula, choquée.

- Je rigolais! fit-il.

- Hm. Donc. Tu as une idée? On doit être en cours dans cinq minutes.

- J'ai appris un sort qui coupe l'envie de dormir. Je me disais que ça pourrait marcher.

- Vas-y.

- D'accord, dit Alejandro avec son bel accent espagnol. "Endormitum finicante ".

L'effet fut plus concluant que l'Enervatum. Harry gémit, marmonna quelques phrases incompréhensibles, puis ouvrit les yeux.

Il les referma aussitôt.

- Réveille-toi! ordonna Hermione en secouant son ami. On a cours!

- Mmmm grogna Harry.

- Debout ! fit-elle d'une voix aiguë en tirant de toutes ses forces sur le bras du garçon.

Alejandro Belén quitta la chambre en riant doucement. Elle ne le remarqua même pas. À force de tiraillements et de coups dans les côtes, elle finit par obtenir un Harry debout, les yeux à peine ouverts et les cheveux plus en bataille que jamais. Elle quitta la chambre, le temps qu'il s'habille, et se précipita en cours.

Harry ne se montra pas de la matinée.

À midi, tout le monde était attablé quand il émergea enfin. Il entra dans la Grande Salle en traînant les pieds et se laissa tomber auprès d'Hermione:

- Ah bravo, enfin levé! grogna celle-ci. Tu es fier de toi?

- Hein? fit le Gryffondor.

- Tu as raté quatre heures de cours! Maintenant, il va falloir les rattraper! Heureusement que je suis là pour te prendre des notes!

- M'rci Rmione.

- Qu'est-ce qui t'as pris de dormir comme ça? râla-t-elle. On a tout essayé pour te réveiller! Même un sortilège pour couper le sommeil! Rien! Tu es un ours! Tu hibernes!

-

- Tu pourrais t'agiter au moins! Tu as vu l'heure? Ça fait quatorze heures que tu dors!

- J'fait un rêv'bizarr', marmotta Harry.

- Quoi?

- J'ai fait un rêve bizarre, répéta-t-il un peu plus clairement.

- Ah.

Hermione était troublée. Quoi qu'elle ait pu reprocher à son ami, son sommeil n'était pas naturel. D'autant plus que Harry parlait comme s'il avait eu un chameau dans la bouche, et qu'il était actuellement en train de se verser de la sauce du poulet dans son verre.

- Heu Harry?

- Ç'p'rlait d'magie. Et d'Poudl'rd. Et d'V'ld'm'rt.

- Hm hm.

- Et y'avait M'rg W'kw'ge.

- Harry? Je n'ai rien contre le fait de boire la sauce au verre, mais tu es sûr que

Mais trop tard. À sa grimace, elle sut qu'il avait reprit pied sur la terre des basses choses quotidiennes. Comme le goût de la sauce quand on s'attend à de l'eau, par exemple.

- Hermione, murmura Harry. Je me suis souvenu de quelque chose.

Elle ouvrit de grands yeux réprobateurs. Ils étaient en cours de Sortilèges. La classe, impeccablement silencieuse, observait attentivement Flitwick faire pousser les cheveux de Lavande, désignée volontaire. Le professeur leva les yeux en entendant murmurer, mais ne fit aucun commentaire.

- Plus tard, chuchota la jeune sorcière à son ami.

Mais il ne l'entendait pas de cette oreille. Il se saisit de sa plume, déchira un bout de parchemin et griffona: "Je me rappelle un truc à propos de mon rêve."

Hermione lut le message, asquiesça discrètement et reporta son attention sur Flitwick. Agacé, Harry récupéra aussitôt le papier et y ajouta: "J'ai vu Poudlard en ruines. "

Cette fois, elle réfléchit un instant à l'importance de cette révélation, mais elle décida encore une fois que le cours était plus important, d'autant plus que Lavande venait de pousser une exclamation apeurée en constatant qu'elle se marchait sur les cheveux. Dean et Seamus n'en pouvaient plus de rire, alors que Parvati était béate devant la chevelure de rêve de son amie. Pour Hermione, ça méritait surtout une bonne coupe. D'autant que Lavande n'avait pas de très beaux cheveux. À ce stade de ses réflexions, elle reçut un coup de coude dans les côtes et un petit papier dans sa trousse. Elle le déplia, agacée: "Wakewage était dans mon rêve. " Elle trempa sa propre plume dans l'encre et répondit: "Ah ".

Mais toutes ses tentatives pour décourager Harry étaient inutiles, puisque le papier lui retomba immédiatement sur la tête (où il s'accrocha dans ses cheveux): "Il y a quelque chose de pas net avec cette fille, Hermione. Elle était dans mon rêve, j'en suis sûr. Je n'ai pas rêvé d'elle, c'est elle qui s'est invitée. "

Mais il fut forcé de reporter la discussion à plus tard, car Flitwick passait dans les rangs en attendant des élèves qu'ils reproduisent le sortilège qu'il venait de démontrer. De toute façon, Hermione avait confisqué le papier.

Mais en sortant de classe, il retomba immédiatement sur son amie:

- Je te jure, Hermione. Ce n'était pas naturel.

- Ah, fit-elle.

- Je ne sais pas comment elle s'y est prise, mais elle est rentrée dans mon rêve.

- D'accord, marmonna Hermione, occupée à tenter d'aplatir l'énorme touffe que son ami lui avait fait pousser sur le crâne pendant la séance de travaux pratiques.

Harry, quant à lui, avait les cheveux longs jusqu'aux épaules. Elle n'avait pas obtenu de résultats très fulgurants sur lui. Mais aussi, elle visait extrêment mal avec sa main gauche. Elle avait même offert un système pileux à l'armoire qui se trouvait derrière Harry au moment où elle visait la tête du garçon. Flitwick avait rasé la barbe de l'armoire en un coup de baguette, mais il avait clairement affiché sa surprise. Personne n'était habitué à voir Hermione lancer son sort à côté de la cible.

- Tu ne m'écoutes pas, pas vrai? fit Harry.

- Non, dit-elle abruptement.

- Ça tombe bien. Je racontais n'importe quoi.

- Ah? Tu n'as pas rêvé de Morgane Wakewage?

- Non. Pas du tout. C'était juste pour voir si tu m'écoutais.

Peut-être le ton du garçon aurait-il pu lui faire lever la tête, mais elle était si absorbée par son propre mal-être qu'elle n'entendait rien.

Ça explique en partie pourquoi elle s'étala tout à coup face contre terre.

L'autre partie de l'expliquation réside dans le fait que les dalles du couloir venaient de se muer en mousse.

Mais pas une mousse du genre mousse qu'on voit sur les arbres. Plutôt une mousse, du genre dans laquelle on s'enfonce jusqu'aux genous, et en-dessous de laquelle il y a trente centimètres de marécage.

De la mousse exotique, quoi. Typique forêt vierge. Exactement le genre de mousse qu'on s'attendait à trouver partout, sauf à Poudlard.

Et, parce qu'il fallait bien confirmer cette attente, quand Hermione leva les yeux, elle n'était plus à Poudlard.

Ce qui est logique, quand on y pense. Qu'est-ce qu'un marais de mousse aurait été faire à Poudlard?

- Qu'est-ce que ça fait à Poudlard, ça? fit Harry.

Ça, c'était la forêt vierge dans laquelle ils baignaient jusqu'aux genoux. Devant, derrière, autour et au-dessus d'eux, de grands arbres exotiques et un végétation dense était apparue comme par magie.

Le garçon aida son amie à se relever. Elle avait des lentilles d'eau dans les cheveux. Il les essuya tant bien que mal.

- Merci, fit Hermione. Bon, on fait demi-tour ou on s'attarde plus avant dans cette stupide réalité parallèle?

- Demi-tour dit le Sorcier à mi-voix.

Mais évidemment, toute trace du couloir qu'ils venaient d'emprunter avait disparu. Où aurait été l'intérêt de créer des dimensions parallèles dans Poudlard, si on avait pu s'en réchapper aussi facilement?

- Évidemment, dit Hary, sarcastique.

- Quoi?

- Rien, je parlais au narrateur.

- Ah, approuva Hermione.

Elle se questionna tout à coup sur la rapidité à laquelle on pouvait attraper des fièvres tropicales. Harry était-il déjà en train de délirer?

- Bon! s'exclama le garçon. On sort d'ici!

- Pas de problème, acquiesça la jeune fille.

- En route.

- Bien sûr. Où est la sortie?

Regard noir.

- C'est toi la pro, Hermione. Tu dois bien savoir comment on sort de ce genre de para-réalité débile, non?

Elle se gratta la tête, ce qui eût pour tout effet de faire tomber des lentilles d'eau.

- À vrai dire, je n'ai jamais rien lu à part dans la littérature moldue, évidemment, mais

- Et merde! pesta Harry en envoyant un grand coup de pied dans la mousse humide. Je hais ce genre de scénario. Dans cinq minutes, un tyrannosaure rex va nous tomber dessus et on devra le combattre à main nues.

- Ou lui échapper

- Ouais. Puis ce sera un arbre au sommet duquel il faudra monter pour délivrer la princesse. Après ça, je devrai choisir entre trois vierges prisonnières

- Hein?!

- et passer devant le dragon qui les garde, en sachant que les deux que j'abandonnerai seront dévorées dans d'atroces souffrances

- Hein? répéta Hermione.

- et on me demandera encore une fois de sauver le monde et MERDE À LA FIN, FICHEZ-MOI LA PAIX TOUS UN PEU! Et arrêtez de me faire faire des trucs dont j'ai pas envie! D'abord dans les rêves, maintenant dans la vie réelle! Je ne peux pas être un peu tranquille!?!

Des oiseaux dérangés par ses cris s'envolèrent des hautes branches. Les arbres qui composaient la forêt étaient immenses et abritaient un fouillis de lierres, mousses, lichens et parasites en tous genres. On entendait les multiples bruits des habitants de la forêt, oiseaux, rongeurs, reptiles et insectes, et même les arbres qui bruissaient et grinçaient.

- Comment est-ce qu'on sort d'ici? questionna Hermione quand la colère de son ami fut un peu retombée.

- On attend que Wakewage apparaisse et nous explique en quoi consiste l'épreuve, je suppose.

- Wakewage? s'étonna Hermione. Je croyais que c'étaient des bêtises, ce que tu m'as dit sur ton rêve.

Harry secoua la tête avec irritation:

- Je t'ai menti, parce que tu n'étais pas en état de m'écouter. Elle s'est bien introduit dans mes rêves, et je suppose que là elle va surgir à nouveau et nous parler d'une épreuve débile.

Mais ce ne fut pas Morgane Wakewage qui apparut. Ce ne fut même pas un tyrannosaure rex.

Ce fut Ron.

- Harry? Hermione? s'étonna-t-il.

- Ron! s'écria la jeune Sorcière en l'apercevant à l'autre bout du marécage.

- Mais qu'est-ce que vous faites là? entendirent-ils de loin.

- Et toi, On te croyait à l'infirmerie. Toi aussi tu es tombé dans ce monde?

- Les araignées! cria Ron dans le lointain. Elles manigancent quelque chose!

- Tu es guéri? hurla Harry dans le vent. Tu n'es plus à l'infirmerie?

- ais pas de quoi tu par', entendirent-ils, avant que le reste des mots ne soit emporté par le vent.

- Ron ! s'époumona Hermione, tandis que le garçon roux s'éloignait à toute vitesse sans faire un pas.

Le paysage s'accéléra. La forêt vierge défilait à toute vitesse autour des deux Gryffondor, faisant voler leurs cheveux longs (car Harry n'avait toujours pas coupé les siens). Puis elle s'éclaircit, s'estompa, et les adolescents, toujours immobiles, pénétrèrent à reculons dans un tout autre paysage: ils étaient à présent dans une grande ville futuriste, pleine de lumières et de néons, et les gens marchaient au travers d'eux sans les voir, et la ville avançait toujours tandis qu'ils restaient à la même place. Puis l'illusion s'estompa et ils se retrouvèrent dans le couloir de Poudlard dont ils étaient partis.

Plus une seule trace de Ron.

- Il s'est passé quoi? fit Hermione en se recoiffant (disons, en plaquant du mieux possible sa chevelure rebelle contre son crâne).

Harry jeta un objet imaginaire par-dessus son épaule, pour exprimer le désintérêt qu'il portait au phénomène.

- C'est classique. Un simple tour de passe-passe. Comme dans mes rêves. D'ailleurs, je me demande si je me suis vraiment réveillé ce matin. Peut-être que je suis encore dans mon lit.

- C'est ça. Et moi, je suis le papillon qui rêve qu'il est un homme.

- Quoi?

- Laisse tomber.

Harry haussa encore une fois les épaules et s'aventura hors du périmètre où ils avaient atteri. Le sol avait l'air bien réel. En fait, il ressemblait exactement aux dalles qui pavaient le château de Poudlard.

- Je pense qu'on est à Poudlard, dit-il prudemment.

- Bravo, se moqua Hermione. Moi, j'aurais dit qu'on était dans les rues de Londres. Ou peut-être dans la forêt amazonienne.

- Ne te moques pas. On ne sait jamais quand ça s'arrête.

Quelque chose dans le ton du garçon lui coupa l'envie de faire des sarcasmes.

- Ok, soupira-t-elle. Si on rentrait à la Salle commune? J'ai une foule de devoirs en retard.

Hermione soupira et referma son livre dans un claquement sonore. Elle était fatiguée. Et elle en avait sa claque d'apprendre des sortilèges irréalisables.

Ce n'était pas qu'ils soient durs.

Elle avait choisi un livre de troisième niveau. Elle était au cinquième.

Non, ces sortilèges étaient parfaitement accessibles. C'est sa baguette qui lui jouait des tours. Elle refusait de se plier à la volonté de sa main gauche.

Elle jeta des regards furtifs autour d'elle. La Salle Commune était déserte. Il y avait un grand jeu de rôles sorcier organisé par les septièmes années, et tous les Gryffondors y étaient. Ça se passait dans une pièce attenante à la Salle Commune. De là où elle était, elle entendait les cris et les rires.

Une partie d'elle-même aurait voulu être avec eux, mais une autre partie préférait s'user à répéter des sortilèges stupides qu'elle maîtrisait depuis deux ans. Et pour l'instant, c'était cette partie-là qui gagnait.

Et puis il y avait cette idée qu'elle avait eu.

Ça lui était venu en ouvrant par hasard un livre à la bibliothèque.

Dans la mesure où le hasard existe.

Toujours est-il qu'elle avait ouvert ce livre. Et qu'elle l'avait lu.

Dès la première page, elle savait que ça n'était pas le livre qu'elle cherchait. Mais c'était le livre qui l'avait trouvé. Ce qui est parfois beaucoup mieux.

Parfois.

Voilà ce que disait la première page du livre:

"Traysté de Vyeislle magie "

Et le sous-titre stipulait:

"Ou comment les fonsdateurs de la magie moderne domynaient les ésléments "

Et voilà. Ça avait suffi pour qu'elle s'embarque dans cette histoire délirante.

Elle avait entrepris d'apprendre la vieille magie, alors qu'il n'existait aucun livre qui en parle clairement et quasiment aucun sorcier actuel qui la maîtrise.

Elle était folle.

Ça la faisait sourire.

"Des recherches récentes ont permys d'éstablyr avec une quasi-certitude que les tous premyers Sorciers à maystriser la magie n'utilisaient pas de baguettes, sceptres ou autres artefacts. Avec pour tout instrument leurs sens, ils apprenaient, au pryx de longues et fastydieuses études, à ressentyr la magie au-travers de leurs corps. Dès son plus jeune asge, l'apprenti-sorcier éstayt choysi par l'un des maystres de la sorcellerie, qui l'ésduquait dans les lois de l'art masgique et le formayt pensdant de lonsgues années. Cela explyque le nombre restreint de Sorcyers, mays aussi le fait que tous ecssellaient dans leur art."

Voilà qui faisait réfléchir. Hmm Hermione ferma les yeux. Les sens? Qu'est-ce que ça voulait dire? Comment pouvait-on faire de la magie avec ses sens? Les sens, c'était des outils pour percevoir l'environnement, pas pour agir sur lui.

Mais peut-être que la réponse était là, justement. Peut-être que l'important n'était pas de vouloir agir, mais de vouloir ressentir la magie. Alors, une fois qu'on résonnait en harmonie avec elle, peut-être pouvait-on la manipuler tout doucement, sans l'effrayer. L'apprivoiser, quoi.

Là. Un genre d'étincelle. Qu'elle voyait malgré ses yeux fermés. C'était ça, la magie? Un petit feu follet au coin de la paupière, qui dansait à la limite du champ de vision? Qui disparaissait dès qu'elle tentait de le voir de plus près?

Elle changea de tactique, décida de le laisser approcher. "Petit petit! viens voir maman Hermione! Qu'il est beau le petit feu follet!". Évidemment, l'étincelle se fit désirer et accomplit l'acte équivalent à celui, pour un chien, de s'assoir et de se lécher la patte en attendant de voir jusqu'où ira la patience de la vieille mamie gâteuse.

Mais elle avait tout son temps. Ça ou autre chose, de toute façon elle ne pouvait pas aller s'amuser avec les autres, alors

Hop! À peine s'était-elle lamentée sur son sort que l'étincelle disparut.

"Et zut!" grogna Hermione ne serrant les dents. Elle refit une tentative.

Cette fois, elle réussit à garder sa concentration sur le vide, tandis que la magie approchait tout doucement.

Quand elle fut à peu près en face d'Hermione, celle-ci étendit le bras pour l'attraper.

Elle la sentit filer enre ses doigts, entendit même un petit grésillement de cristal, qui évoquait curieusement un ricanement.

Elle ouvrit les yeux et essuya la sueur qui coulait sur son front. Troisième tentative. Elle réussirait, coûte que coûte.

Cela prit plus de temps que jamais pour la magie d'arriver. La jeune Sorcière était fatiguée, et puis la magie se méfiait.

Mais elle arriva. Et quand elle fut juste devant Hermione, à portée de doigts magiques

elle ne fit pas un geste.

La magie sourit. Ou quelque chose comme ça. Elle donna l'impression de sourire. Elle se rapprocha jusqu'à toucher la jeune fille.

Celle-ci eût un petit sursaut. Elle n'avait jamais rien ressenti d'aussi étrange. C'était comme si mille étincelles crépitantes lui avaient passé sur le corps, mais elles étaient aussi douces que le pelage de mille souris, et aussi picotantes que leurs griffes. Et ça ne dura que le temps d'un frisson.

Le petit feu magique se retourna (pour rester dans la métaphore, car on voit difficilement comment il aurait pu se retourner) et fit de petits bonds sur place en appelant ses copains. Peu à peu, des dizaines, puis des centaines de petites étincelles magiques sortirent de l'ombre en piaillant à qui-mieux-mieux.

- Hermione?

Celle-ci sursauta et revint brutalement à la réalité.

- Excuse-moi, fit Ginny, penaude.Tu avais des étincelles au bout des doigts.

La jeune fille s'essuya le front. Ses pupilles dilatées avaient du mal à se réadapter à la soudaine lumière de la Salle Commune.

- J'étais loin, murmura-t-elle.

- Ah? fit Ginny. Où ça?

- Je ne sais pas, avoua Hermione. Quelque part dans moi-même, je crois. Et en même temps bien au-delà.

Et voilà. Voilà où elle en était. En résumé, la vie d'Hermione Granger n'était qu'un vaste bordel.

Elle songeait à cela en regardant le soleil se lever dans le lac. Il ne se levait pas vraiment, juste dans le lac. C'est une chose dont la Sorcière s'était aperçue après maintes incompréhensions: pourquoi le lac se trompait-il toujours de reflet? Quand le ciel était bleu, le lac montrait des nuages gris. Quand il pleuvait, l'eau affichait le reflet d'un soleil resplendissant. Et la nuit, il montrait toutes sortes de levers de soleil.

Mais c'est parce que le lac montrait toujours ce qui allait arriver. Il n'était autre qu'un miroir de l'avenir. Quant à savoir comment il faisait pour ne jamais se tromper

Voilà pourquoi Hermione observait un lever de soleil à minuit passé. Elle était assise sur le rebord d'une des hautes fenêtres de la Salle Commune. Elle attendait, sans bien savoir quoi.

Sans doute n'aurait-elle rien vu si elle avait fixé quelque chose. Mais son regard était dans le vague, ce qui fit qu'elle l'aperçut.

Ça n'était pas une chose. Tout au plus était-ce une ombre. Si furtive que seul un regard totalement asbent pouvait l'entrevoir. Elle traversa le ciel étoilé pour disparaître immédiatement dans les nuages. Hermione chercha à la revoir, à savoir de quoi il s'agissait. Peine perdue. Elle décida que c'était une chauve-souris, ou alors un fruit de son imagination.

Mais soudain, un chant s'éleva auprès d'elle, et il était si doux et si triste qu'Hermione oublia immédiatement tout ce qui avait occupé son esprit auparavant pour ne plus penser qu'à la tristesse de ce chant et à la beauté de la voix qui le lui offrait:

- Ai! Laurië lantar lassi súrinen,

Yéni unotimë ve rámar aldaron!

Yéni ve lintë yuldar avánier

m ioromardi lisse-miruvóreva

Andúnë pella, Vardo tellumar

nu luini yassen tintilar i eleni

omaryo airetari-lirinen.

Ginny se tut, essouflée et toute rouge de gêne. Elle s'approcha doucement de son amie, assise devant la fenêtre. Hermione ouvrit la bouche, mais la referma aussitôt.

- Oh, excuse-moi! fit la petite Weasley, confuse. Je t'ai dérangée. Je suis désolée

- N

Les mots s'étouffèrent dans sa gorge et son cur chavira. Elle se retourna et serra Ginny dans ses bras.

- Mais tu pleures? paniqua celle-ci. Je t'ai rendue triste, excuse-moi!

- Non, surtout pas! C'était si beau, Ginny. Tu ferais pleurer n'importe qui quand tu chantes cette chanson. C'était Tu as la plus belle voix que je connaisse.

- Oh

Elle rougit très fort. Hermione relâcha son étreinte et attira son amie auprès d'elle.

- Viens, assied-toi, dit-elle en lui faisant une place. Tu ne dors pas?

- Toi non plus. Tu j'ai pensé que ça n'allait pas, alors

Hermione sourit. Ginny était la personne la plus gentille du monde. Pas valeureuse pour deux sous, mais quand il s'agissait d'aider les autres, ou au moins de les comprendre sa force de caractère dépassait alors toutes les formes de courage rencontrées à Gryffondor. Hermione comprenait pourquoi le Choixpeau l'avait envoyée dans cette maison.

- Pour ta main, chuchota la petite Weasley. J'ai eu une idée. Mais je ne sais pas si

- Oui?

- Je crois que tu devrais demander conseil à Oriane Slight. Elle est dans ma classe, c'est pour ça que bref, elle et ses surs font de la magie à la demande des gens. Elles sont très puissantes, à elles quatre.

- Les surs Slight dit pensivement Hermione. Oui, j'en ai entendu parler. C'est de la magie vaudou, non?

- Oh! oui, c'est ce qu'on dit. Elles sont originaires d'un pays d'Afrique, et je crois qu'elles connaissent des techniques de là-bas enfin, tu vois, d'un style différent du nôtre. Je pense qu'elles pourraient au moins t'apprendre s'il existe une forme de magie qui puisse te rendre ta main.

- Merci beaucoup. J'irai les voir.

Pauvre Ginny! elle ne savait pas ce qu'elle proposait! Les surs Slight étaient connues dans toute l'école pour leurs pratiques occultes. Leurs charmes rendaient service aux gens, mas ils frisaient souvent la magie noire. Et les rendez-vous qu'elles donnaient à leurs clients dans des salles désertes du château, largement après le couvre-feu, étaient formellement interdits. D'ailleurs, au moins l'une des quatres surs était à Serpentard, ce qui n'était pas pour les rendre sympathiques à Hermione. Malgré tout, elle hocha la tête et répéta:

- Merci Ginny.

Dans le miroir du lac, un orage silencieux montait à l'assaut du lendemain.

- Hermione?

Celle-ci sursauta et revint brutalement à la réalité.

- Excuse-moi, fit Ron, penaud.Tu faisais tu te concentrais, non?

Hermione ouvrit de grands yeux incrédules.

- Ron? Ron? balbutia-t-elle.

- Hé! oui, c'est moi, fit celui-ci, avec un demi-sourire gêné. Je suis désolé de vous avoir fait peur je crois que vous vous êtes inquiétés, non?

- Ron! cria Hermione en lui sautant au cou. Tu nous a fait une de ces peurs! Je suis tellement heureuse que tu sois là.

Elle le relâcha un peu, s'écarta pour le contempler de la tête aux pieds, sans pour autant lâcher sa main.

- Tu vas bien? Tu es complètement guéri?

- Complètement, confirma-t-il. Je me demande même pourquoi ça a pris autant de temps. Je suppose que j'ai loupé plein de choses, pas vrai?

- Tu parles! Tu as surtout loupé douze jours terriblement morbides. Je suis contente que tu sois là, Ron.

Le garçon commencait à être embarassé, aussi lui lâcha-t-elle la main. Mais elle continua néanmoins à le dévisager, plus heureuse qu'elle ne l'avait été depuis des semaines.

- Alors, lança-t-il pour donner le change, je vais avoir plein de cours à rattraper, je suppose? Tu m'aideras?

- Quand tu veux. Mais pour l'instant, tu dois être impatient de voir les autres, non?

Il sourit, soulagé de voir qu'elle n'allait pas le coller au turbin immédiatement. Hermione rassembla ses affaires dans un coin de la table, enfouit le traité de Vielle Magie sous sa robe. Puis elle entraîna son ami vers la salle où s'étaient rassemblés les Gryffondors.

Ils surgirent dans une grande effervescence. Le jeu de rôles, version sorcier, se jouait sur un terrain de jeu grandeur nature, avec costumes magiques et dés géants à l'appui.

Il y eut un silence soudain quand Ron entra. Les uns après les autres, tous les élèves tournèrent la tête et aperçurent le revenant. S'en suivit un brouhaha joyeux, tandis que Fred, Georges, Ginny, les élèves de cinquième année et les membres de l'équipe de Quidditch se précipitaient pour acceuillir Ron. Et bien sûr, Harry accourut, depuis le coin où il s'était assis pour observer l'action. Il se jeta sur son ami et le serra fugitivement dans ses bras, avant de laisser la place à Fred, qui lui colla une grande claque dans le dos, à Georges, qui lui ébouriffa les cheveux, à Ginny, qui l'étreignit joyeusement, à tous les autres

Hermione s'était reculée, passive. Elle avait été heureuse de retrouver Ron, mais déjà on lui volait la compagnie de son ami.

Harry se rapprocha d'elle:

- Ça va mieux?

Elle hocha la tête.

- Je n'en reviens pas de le voir ici, déclara Harry. Ça fait tellement longtemps!

- Il va falloir faire une fête en son honneur, murmura Hermione. Demain, c'est son anniversaire.

- Oui. C'est merveilleux qu'il soit remis à temps.

- Et ensuite?

- Quoi, ensuite? fit Harry.

- Quand tu devras lui apprendre qu'il n'a pas été sélectionné? Tu sais qu'il s'est entraîné tout l'été.

Elle s'était efforcée de masquer le soupçon de reproche dans sa voix. Le garçon n'en fut pas dupe, bien sûr. Tout au plus fit-il semblant de ne rien remarquer.

- Je ne sais pas, avoua-t-il.

À ce moment, Hermione aurait voulu le serrer dans ses bras. Mais elle n'osait pas, et lui non plus de toute façon. Ils étaient comme deux enfants égarés qui ne comprennent pas pourquoi ils sont heureux, et c'était bien comme ça.

La Tour de Gryffondor résonna longtemps des éclats de rire des compagnons enfin réunis.

Dans le ciel nettoyé de ses nuages, la pleine lune brillait joyeusement.

Quelque part, une ombre passa en battant des ailes. Mais sans doute n'était-ce qu'un hibou.

– fin du chapitre 12 –