Chapitre 17: Main vivante

Après le bal de Noël, de nombreux élèves quittèrent l'école pour aller retrouver leurs familles, par Poudre de Cheminette ou par Portoloin. Peu à peu, les couloirs se dépeuplèrent. Dans le parc, la neige tombait de plus en plus drue, et personne n'était pressé de reprendre les cours en extérieur.

Hermione passa les deux semaines de vacances assise sur sa chaise favorite, à mi-chemin de la fenêtre et de la cheminée. Pattenrond sur les genoux, elle travaillait ses sortilèges tout en guettant l'arrivée de son hirondelle, car elle s'inquiétait pour elle, en raison de la neige.

La jeune fille continuait à s'entraîner intensivement pour dompter sa baguette avec sa seule main gauche, mais rien à faire: l'objet magique sentait que la main qui le tenait n'était pas la bonne. Tout ce qu'elle arrivait à faire, c'était des sortilèges de troisième niveau, parfois quatrième, et elle visait extrêment mal: un jour qu'elle avait voulu faire pousser des poils à son crayon, c'est toute la table qui s'était retrouvée couverte d'un duvet fin. Malheureusement, le sort n'avait pas duré plus de cinq secondes.

Alors en parallèle, Hermione exerçait sa concentration, avec l'aide du manuel qu'elle avait découvert à la bibliothèque, le "Traysté de Vyeislle magie". Elle avait une idée précise derrière la tête. Mais pour l'instant, elle n'en avait parlé à personne. Sauf à Pattenrond, qui écoutait tout, ses grands yeux attentifs fixés sur elle. Elle craignait trop qu'on la prenne pour une folle.

Elle ferma les yeux, tentant de repousser le souvenir désagréable de la soirée de Noël: Anthony, son cavalier, avait voulu lui prendre la main et avait découvert son secret. Heureusement, elle était parvenue à le faire taire avant qu'il n'alerte tout le monde. Elle ne voulait pas! Elle ne voulait pas qu'on sache. Elle ne voulait pas être la cible des railleries ou, pire, de la pitié.

Soudain, un bruit de tapotement lui fit lever les yeux. De l'autre côté de la vitre, il y avait une petite hirondelle qui cognait contre le montant, une grosse lettre accrochée à sa patte. Le vent froid lui soulevait les plumes.

- Salcilia! s'écria Hermione en allant ouvrir.

L'oiseau lui sauta dans la main et lui picora la peau.

- Tu as faim, pas vrai? Je t'amène à la volière.

Elle détacha la lettre et la fourra dans sa poche, puis elle se rendit à la tour qui abritait les oiseaux. Là, l'hirondelle put se restaurer, dans la mangeoire qui contenait de la nourriture pour les insectivores. Hermione n'avait jamais eu le courage de demander comment était préparée cette mixture.

Elle quitta la volière, car il y faisait froid, et s'installa dans un coin de couloir pour lire la lettre.

"Chère Hermione,

Comme tu me l'as demandé, j'ai fais des recherches sur Morgane Wakewage. Ce que je t'avait dit est confirmer: elle est née en Angleterre, elle y a vécut dix ans avec sa mère, et son père n'es sortis de prison que en juin dernier.

Mais il y a du neuf: je m'ai demandé pourquoi elle ne portait pas le nom de ses parents adoptif. J'ai chercher la généalogie des Wakewage. Je n'ai rien trouver, rien du tout. Il n'y a jamais eu aucun Wakewage, ni en Angleterre, ni en Bulgarie, ni nulle part ailleurs en Europe et en Amérique. Je suis en train de continuer les recherches en Asie. Mais je crois que ce est clair: elle porte un faut nom. Pourquoi? Soit parce que elle à quelque chose à cacher, soit parce que on lui a cacher quelque chose. Mais d'après l'État civil de la ville où elle est née, elle s'appelait Morgane Shrakow dès la naissance. Ce est après que elle a changer de nom, et ce est pour ça que je crois elle cache son vrai nom exprès.

D'autre part, je ai une bonne nouvel! J'ai passé mon permis de transplaner! Je vais pouvoir te venir voir dans ton école. Renvoie-moi Salcilia avec la date et le lieu où nous pouvons nous retrouver.

Je te embrasse,

Viktor "

Hermione soupira en repliant doucement la lettre.

Ainsi, Morgane Shrakow dissimulait son vrai nom. Pourquoi?

Il était temps qu'elle fasse un petit tour à la bibliothèque.

Les rangées d'étagères s'étendaient, hautes et larges. Hermione marchait entre elles, le nez en l'air, quêtant un intitulé qui lui paraisse convenir. Un dos rouge attira son attention: "Mille Sorciers un peu connus mais pas trop ". Elle le tira, l'ouvrit à la première page. Le sous-titre disait: "Ou les mille Sorciers dont vous aurez forcément besoin de connaître la biographie au moment le plus inattendu de votre vie ". Elle regarda à l'index, fit courir son doigt le long des noms triés par ordre alphabétique.

- Shrakow, murmura-t-elle en mettant le doigt dessus.

Il y en avait quatre, à quatre époques différentes. Elle opta pour le plus ancien. Un tiers de page lui était consacré: on donnait ses dates et lieux de naissance et de mort, les circonstances de cette dernière (dans un duel) et les enchantements qu'il avait légués à la communauté des Sorciers. Hermione passa au suivant.

Il n'était pas tellement plus détaillé: il avait vécu au XIVe siècle, s'était fait une renommée pour avoir fait travailler en esclavage des dizaines de Moldus dans ses mines de charbon. Il était l'inventeur d'une vague potion, sensée accélérer le temps pour celui qui la buvait.

Le troisième était plus intéressant: détaillées sur une double page, on pouvait lire le menu de ses travaux en matière d'envoûtement d'autrui. Comme son ailleul, il s'était illustré par ses cachots remplis de Moldus, sur lesquels il testait ses enchantements.

Enfin, Zacharie Shrakow, 1894-1967, avait fait connaître son nom dans la presse bulgare pour posséder la bibliothèque de livres de magie noire la plus fournie jamais découverte par la police. L'homme avait fini ses jours en prison, mais les livres n'avaient jamais été retirés de la circulation, car le vieux Zacharie avait ensorcelé sa bibliothèque pour qu'elle change chaque jour de place, et lui seul savait comment la retrouver. Du coup, les recherches n'avaient jamais rien donné.

Hermione referma le livre d'un coup. Puis elle le rouvrit, parce q'une idée lui était venue. Elle prit l'index, chercha à J. Mais il n'y avait pas trace de Tom Elvis Jedusor. Alors elle chercha à V: pas de Voldemort non plus, mais une note renvoyait à un autre tome de la collection pour les personnes célèbres.

Elle ferma à nouveau le livre. La date était sur la couverture: 1989. Elle le rouvrit à P. Pas de Harry Potter. Mais quelque chose la surprit. Ça n'était pas une intuition, non, pas son instinct non plus. C'était comme si la magie l'avertissait: c'était extrêmement diffus. Et c'était au niveau de sa main droite.

Elle prit sa baguette et tapota la ligne intermédiaire entre "Potier" et "Povrame". Évidemment, rien ne se produisit. Elle recommença en murmurant: "Revelatum".

Rien.

Elle se concentra encore plus fort, assura sa prise sur sa baguette et répéta: "Revelatum".

Quelque part, une barrière céda. Un flot de lettres envahirent la page, s'insérant entre les noms prééxistants:

Potter

Potter

Potter

Potter

Potter

Potter

Potter

Potter

Et ainsi de suite, plus d'une dizaine en tout. En même temps, le volume s'épaississait dans la main d'Hermione, comme si on lui rajoutait des pages.

Fébrilement, elle releva le numéro de page du premier Potter et s'y rendit.

- Oh, non!

La page était vierge. Pareil pour le second Potter. Et pour tous les suivants. En tout, plus de trente pages vierges.

Elle retenta le Revelatum sur une page au hasard, plusieurs fois de suite. Impossible. Le contenu des pages était scellé bien plus fermement que l'index.

La question qui se posait était évidente: qui avait intérêt à dissimuler toute information sur la famille Potter?

Et Hermione n'avait pas la prétention de pouvoir y répondre. Même si elle avait quelques soupçons. Elle agita sa baguette et le livre retourna à son emplacement, sans accroc.

C'est alors qu'elle réalisa ce qu'elle venait de faire et qu'elle ouvrit de grands yeux effarés. La baguette tomba au sol avec un petit claquement sec et roula sous un meuble.

Mais Hermione ne la ramassa pas tout de suite. Elle regardait sa main. Puis elle regarda le livre, puis sa main à nouveau, puis sa baguette par terre.

Depuis le début, elle avait tenu sa baguette de la main droite.

De petits fantômes, des enfants de onze ou douze ans, regardaient Rogue tracer ses cercles magiques dans un coin de la Grande Salle.

- À quoi ça va servir? demanda un petit garçon.

- À vous libérer, expliqua Rogue en faisant un gros effort pour garder sa patience.

- Pourquoi?

- Mais t'es bête? fit une fille. Tu veux rester ici pour toujours? Moi j'en ai marre de cet endroit. Je veux retrouver mes parents.

- Ils doivent être morts, depuis le temps, dit une autre fille.

- Justement, je pourrai les revoir.

- J'y crois pas, dit le premier garçon. On a toujours été ici depuis qu'on est morts. Le monde des morts, c'est ce château.

- Faux, dit Rogue. J'en viens, du monde des morts. Ce château n'est qu'une prison où on vous tient enfermés. Et je vais découvrir pourquoi.

- Tu es qui, toi? demanda un autre enfant. C'est vrai que t'es vivant?

- Aux dernières nouvelles, oui, grommela le Sorcier.

- C'est quoi tes histoires d'armée?

- Les vivants ont besoin de votre aide. Vous pouvez nous aider à emmener un être qui devrait déjà être parmis vous. Mais il s'accroche à la vie de toutes ses griffes. Mon chef pense que vous seuls pouvez le faire décrocher.

Il avait fini les sept cercles, et s'attaquait au pentacle en leur centre. Malheureusement, il manquait un peu de bougies sacrées, d'encensoirs et de pierres polarisées. Mais il faudrait faire avec les moyens du bord.

- Voldemort, pas vrai? dit une petite fille.

Rogue sursauta:

- Vous connaissez son nom?

- Tu l'as pensé.

- Vous lisez mes pensées? Mais vous êtes morts! Vous n'avez aucun pouvoir.

- On ne lit pas tes pensées, dit une autre. C'est toi qui deviens comme nous; tu as de plus en plus de mal à garder ton esprit fermé. Il se disloque.

Quoi?

- Oh, pas la peine de paniquer, ajouta un enfant. Tu sais, ça n'est pas si terrible de mourir.

Comment?

- Oh, si, tu vas mourir, renchérit un autre. Comment pourrais-tu y réchapper? Tu as déjà fait le premier pas.

Rogue se mit les mains sur la tête, affolé et égaré. Ses pensées s'échappaient-elles à une telle vitesse?

- Tu es le seul à ne pas les entendre, expliqua une fillette. Elles résonnent dans toute la salle.

- Laisse tomber, conseilla un petit fantôme. Le processus est inéluctable.

Rogue secoua la tête. Il devenait vraiment urgent de sortir d'ici.

Hermione signa la lettre et la mit dans l'enveloppe, dont elle colla le bord. Puis elle confia la lettre à Salcilia et redescendit.

C'était le lundi de la rentrée. Les cours reprenaient dans une heure. Elle s'était levée tôt pour avoir le temps d'envoyer sa lettre à Viktor.

Elle descendit dans la Grande Salle pour attendre ses amis. D'ordinaire, Harry était le premier levé, mais ce jour-là il n'y était pas. Elle entama son petit déjeuner. Elle fut rejointe un peu plus tard par Ana Casona, dont elle ne rejetait plus tellement la compagnie, depuis que l'espagnole s'était révélée une bonne camarade. Ces derniers temps, Hermione s'était même surprise à se confier à elle.

Elles parlèrent de choses et d'autres, jusqu'à ce que Harry apparaisse dans l'encadrement des grandes portes. Il tenait Cho Chang par la main. Hermione détourna les yeux, vaguement gênée.

- Ils sont mignons, non? fit Ana.

- Tu trouves? Heu, je veux dire: oui, c'est vrai.

- Mais tu voudrais être à sa place? questionna doucement Ana.

- Moi? s'étonna Hemrione. Tu rigoles. J'ai déjà un petit ami.

- Je suppose que oui Tu ne le vois pas souvent. Ça doit être dur.

- Pas tellement. On s'écrit. Il est adorable dans ses lettres. Et il m'a réinvité pour l'été prochain, même si

- Même si quoi?

Mais Hermione ne répondit pas, parce que révéler que sa dernière visite en Bulgarie ne s'était pas très bien terminée, c'était révéler tout un tas de choses parmis lesquelles Voldemort, Durmstrang et sa main.

Là-bas, Harry et Cho se séparaient sur un dernier baiser.

- Hé ben! siffla Hermione. Il s'est drôlement dévergondé.

- Boh, fit Ana. C'est de notre âge. S'il ne le fait pas maintenant, il ne le fera jamais.

- Oui, mais devant tout le monde, ça ne lui ressemble pas.

- Ah? Je ne sais pas. Je ne suis pas bien placée pour savoir. Mais j'ai l'impression qu'il attendait ça de longue date, tu vois? Se révéler à la face du monde comme un être humain, et pas que comme Harry Potter, le Survivant, tout ça enfin, c'est mon avis.

Hermione ouvrit de grands yeux surpris:

- Tu t'es fait une telle réflexion sur quelques mois, là?

- Depuis que je suis à Poudlard, oui. Quatre mois.

Hermione était étonnée.

Au même moment, Harry arriva et s'installa en face des deux filles.

- Bien dormi? lança-t-il joyeusement.

- Oui oui, dit distraitement Hermione.

- Pas assez, répondit Ana. C'est dur de reprendre les cours.

- Bah, on va bien s'amuser! fit le garçon. On a Flitwick ce matin!

Hermione était estomaquée. Quel changement chez son ami! D'où lui venait cette bonne humeur? Elle ne l'avait jamais vu comme ça depuis eh bien, au moins depuis le 24 juin, mais même avant incroyable, ce changement.

Sur ces entrefaits, Ron arriva dans la Grande Salle. Curieusement, il ne vint pas s'assoir à côté d'Ana mais fit le tour de la table pour se placer près de Harry.

Mais la jeune fille ne parut pas s'en formaliser et continua de sourire. Elle souriait presque toujours. Hermione n'avait jamais compris comment elle s'y prenait pour garder l'air content comme ça. On aurait dit que Ana était heureuse de la vie, que ça lui suffisait.

Peu après, ils partaient pour le cours de Sortilèges. Celui-ci se déroula à peu près bien pour tout le monde, sauf pour Hermione qui ne réussit aucun des exercices. Heureusement, personne ne s'en rendait compte autour d'elle, pas même Harry et Ron, très concentrés.

Cependant, ça ne pouvait durer éternellement. Ce jour-là, alors que tous les élèves sortaient de la classe, Flitwick appela:

- Miss Granger, restez cinq minutes je vous prie.

Ses deux amis firent mine de rester avec elle, mais le petit professeur agita sa baguette, comme on agite un bâton, en disant:

- Non non, juste Miss Granger.

Harry et Ron sortirent avec un regard d'excuse à leur amie.

Celle-ci s'approcha du bureau, inquiète.

- Miss, dit Flitwick, vous n'avez réussi aucun des sortilèges demandés, je me trompe?

- Non, c'est vrai professeur, fit-elle, la mort dans l'âme.

- Et c'est le cas depuis le début de l'année.

- En effet.

- Je ne vous ai rien dit jusqu'à présent, Hermione. Je vous faisais confiance. J'ai supposé que ce n'était qu'une gêne passagère, peut-être une période de doute. Mais je n'ai pu m'empêcher de remarquer: vous tenez votre baguette de la main gauche.

- Oui.

- Mais depuis quand?

Le professeur Flitwick était tout sauf quelqu'un d'autoritaire, et il faisait de gros efforts pour maintenir son ton de professeur. Sa petite voix aiguë ne cessait de dérailler.

- Depuis que j'ai une baguette, professeur, mentit Hermione. Je suis gauchère.

"Aïe" songea-t-elle. Le regard de Flitwick était sans équivoque: il n'en croyait pas un mot.

- Faites moi voir votre baguette?

Il prit l'objet magique, le fit tourner entre ses doigts. Il l'agita un peu de la main gauche, puis de la main droite. Il ne se passa rien la première fois, mais à la seconde des étincelles jaunes et mauves grésillèrent.

Flitwick la lui rendit. Puis il s'assit sur son bureau, l'air songeur, et joignit les mains l'une contre l'autre, à la manière d'un supérieur consciencieux qui enguirlande son employé pour le bien de l'entreprise.

- Vous avez toujours été ma meilleure élève, dit-il après un temps de réflexion.

- Oui, dit Hermione tout bas.

- Aucun sortilège ne vous résistait. Vous voir faire de la magie était un ravissement pour tout professeur.

- Oui, répéta-t-elle pour combler le silence.

- Mais, miss Granger, quoi que vous en disiez, vous avez toujours été droitière.

Cette fois, elle ne répondit pas.

- Votre baguette est faite pour un droitier, cela ne fait aucun doute. Quand bien même vous pouriez l'utiliser avec votre main gauche, car après tout il n'y a pas tant de différence que ça entre les deux mains, c'est la baguette qui s'y refuse.

- Heu c'est-à-dire?

- Ça me paraît évident, miss. Pas à vous? Oh, pardon. Je disais donc: votre baguette refuse de se laisser apprivoiser par votre main gauche, parce qu'elle ne comprend pas pourquoi vous êtes prise de cette lubie. Et moi non plus, à vrai dire.

- Ce n'est pas une lubie, bafouilla Hermione. Je suis gauch

Mais en voyant les yeux tristes du professeur, elle perdit toute envie de mentir, car le petit homme avait vraiment l'air désolé. Elle comprit que ça lui faisait mal au cur, pour de vrai, de voir sa meilleure élève perdre tout talent du jour au lendemain. En même temps, elle était confuse, car elle réalisait que si Flitwick ne l'avait pas appréhendée plus tôt, c'est parce qu'il lui faisait confiance pour résoudre ses problèmes toute seule. Mais là, le problème la dépassait.

- D'accord, fit-elle. Je n'arrive plus à faire de magie et j'en ai horriblement marre. Vous pouvez m'aider, professeur?

- Faites voir votre main droite, dit Flitwick.

Là, elle hésita. Pas seulement par pudeur ni par peur du blâme, mais aussi à cause de ce qui s'était produit dans la bibliothèque. Elle avait tenu sa baguette dans un fantôme de main recréé par magie, inconsciemment. Elle savait qu'elle était proche du but.

Néanmoins, elle souleva sa manche et exposa le moignon aux yeux du petit homme. Celui-ci parut surpris, mais pas autant qu'elle s'y attendait.

- Et vous dissimulez ceci depuis la rentrée? fit-il en l'examinant. Vous n'avez mis personne au courant? Mme Pomfresh, Dumbledore?

- Non, avoua Hermione en rougissant.

Flitwick posa doucement ses doigts sur le bras. La jeune fille frémit, mais ça n'était pas si douloureux. C'était surtout très troublant, parce qu'elle avait l'impression qu'on passait une main à l'intérieur de son bras. Son corps et son esprit ne s'étaient pas encore remis de la disparition de la main.

- Mais! s'exclama Flitwick. Vous avez posé un enchantement dessus?

- Oui, avoua-t-elle d'une voix aiguë.

- Un enchantement de Détournil, n'est-ce pas? Particulièrement puissant, qui plus est.

- Oui.

- Comment l'avez-vous réussi?

- Sans ma baguette, expliqua-t-elle. J'ai tracé les cinq cercles de Maurdre au sol, avec la structure en soleil du Détournil au centre. C'est comme ça que je fais quand je dois réussir un sort à tout prix, mais ça prend plus de temps qu'avec une baguette.

- Hm. C'est de la magie un peu trouble, ça, mademoiselle. Enfin, je suppose que vous n'aviez pas le choix.

Elle hocha la tête, soulagée. Le professeur n'avait toujours pas lâché son bras, et ça la faisait frémir de tous ses nerfs.

- Et vous n'avez pas été soignée pour votre bras? Ça se fait repousser, un membre. Ça prend du temps, mais c'est une opération bien maîtrisée.

- Impossible, dit-elle sombrement.

- Comment cela?

Alors elle lui raconta: la lame ensorcelée, le mauvais sort qui s'était fixé sur son bras, plus collant qu'une sangsue, les médicomages impuissants

- De la magie noire répéta Flitwick pour lui-même. Montrez voir votre main.

Il sortit d'un tiroir de son bureau un genre de grosse loupe, et Hermione reconnut l'objet: c'était un Sortilographe, du même genre que celui offert par Ginny à Harry, qui permettait de voir tous les sortilèges utilisés à un endroit donné, et ce avec une intensité croissante selon l'âge et la puissance du sort.

- Oh! s'exclama Flitwick en passant l'objet au-dessus du bras mutilé. Mais vous c'est mais c'est incroyable vous?

- Quoi? s'enquit-elle.

- Hermione, fit le professeur en la regardant dans les yeux. Répondez-moi franchement: qu'est-ce que vous avez fabriqué avec votre main?

- Heu à quel niveau?

Elle commençait à se sentir gênée. Se pouvait-il qu'il ait découvert ça?

- Au niveau de la Vieille Magie.

Elle baissa la tête. Les ennuis arrivaient. Elle ne pensait pas que ça serait aussi visible. Pourtant, elle avait fait des efforts! Elle avait travaillé toutes les vacances, renforçant son potentiel, dans un seul but. Est-ce que c'était blâmable? Allait-elle recevoir une grosse punition? Allait-elle se faire renvoyer?

- Non, je ne vais pas vous punir, la rassura Flitwick. Mais montrez-moi où vous en êtes.

- Je ne peux pas, murmura-t-elle.

- Pourquoi?

- Je n'y arrive pas consciemment. Parfois, ça vient par surprise, mais je ne m'en rends pas compte.

- Faites un effort. Montrez-moi comment vous vous concentrez.

Elle obéit: elle s'assit en tailleur sur une table, sa baguette posée en évidence devant elle. Elle ferma les yeux.

Comme la première fois où elle avait accompli cette action, la magie se fit désirer. Lentement, pas à pas, elle arriva par la porte de derrière et toqua trois fois. Hermione ne fit pas un geste pour ouvrir et la magie, rassurée, se glissa confortablement par la serrure. La Sorcière sentit toutes les étincelles de magie brute crépiter sur et dans sa peau, dans son esprit, dans sa main droite. Elle la sentait, elle était là, sa main. Aussi invisible que si elle n'existait pas, mais plus consistante qu'un millier de choses au monde, à commencer par l'acier et le béton. Et pourtant, elle savait que si elle esquissait le moindre geste avec sa main de magie, tout serait cassé. Les étincelles s'envoleraient en piaillant à qui-mieux-mieux. Aussi elle attendit. Qui, quoi, elle l'ignorait. Puisqu'elle avait réussi dans la bibliothèque, elle espérait que cette fois-ci ça viendrait plus facilement.

Mais un feulement lui fit ouvrir les yeux. Là, juste devant elle, un immense tigre aux dents de sabre, surgi de la nuit des temps, s'apprêtait à bondir sur elle.

Aussitôt, elle était prête. Sans prendre le temps de réfléchir, elle saisit sa baguette, lui fit faire trois moulinets à vitesse supra-luminique, cria "Inoffenso! " et visa la bête prête à bondir.

Il y eût un petit couinement ridicule, et le tigre se retrouva réduit à l'état d'une peluche, qui tomba à terre dans un bruit mou.

Flitwick applaudit. Hermione avait complètement oublié sa présence.

- Le tigre marmonna-t-elle. C'était vous?

- Vous sembliez avoir besoin d'un petit coup de pouce. Je vous ai donné quelque chose à quoi vous raccrocher l'esprit, pendant que votre main faisait le reste.

À peine avait-il évoqué cette dernière que la baguette tomba au sol avec un tintement. Au bout du coude d'Hermione, il y avait à nouveau un grand trou froid et vide.

La jeune fille était sidérée. Flitwick lui tapota l'épaule dans un geste paternel.

- Je pense que vous devriez en parler au professeur Dumbledore, Hermione. Je ne suis pas un spécialiste en Vieille Magie. Mais elle me fait peur. Ce que vous avez fait là (il secoua la tête, stupéfait) c'était un sort puissant. Et vous avez réagi à une vitesse étonnante. Mais la Vieille Magie n'est pas innocente. Elle peut se retourner contre le Sorcier à chaque instant.

- Je comprends, professeur, mais je j'aimerais éviter que mon histoire se répande.

- Vous devez mettre au courant Dumbledore. Pas les autres, si vous ne le voulez pas, mais le directeur, si. Si vous ne le faites pas, je serai obligée de lui en toucher un mot.

À ce moment, un élève de deuxième année passa la tête par la porte.

- Ah, vous êtes là, professeur! Excusez moi, mais avec les copains on se demandait si il y avait cours ou pas ça a sonné depuis dix minutes.

- Oui, oui, bien sûr! Allez, miss Granger, en cours! Et songez à ce que je vous ai dit. Vous avez un potentiel énorme. Je suis très heureux de vous voir faire de la magie à nouveau.

- Merci, professeur, dit-elle en sortant.

- Oh! n'oubliez pas votre trophée!

Il lui tendit la peluche. Hermione referma la porte pour se retrouver parmis une nuée de deuxièmes années piaillants. Harry et Ron l'attendaient toujours, un peu plus loin.

- Enfin! dit Ron. On a cru qu'il t'avait mangée.

- De quoi vous avez parlé si longtemps? s'enquit Harry.

- Oh, fit Hermione. De tout et de rien.

Ferme les yeux. Là, c'est bien. Ne pense pas. Si tu penses, si tu réfléchis trop, ils vont s'en aller. Laisse-les venir.

Tu les vois, là? Ils viennent peu nombreux, parce qu'ils ne t'accordent pas encore leur confiance. Mais ils sont beaucoup, beaucoup plus que ça. Ils sont cachés pour l'instant. Ils vont venir, ne t'en fais pas. Ne pense à rien.

Ne pense à rien, mais détache-toi. Ton corps est une prison. Affranchis-toi. Décolle. C'est facile, tu vas voir. Écarte les bras non, pas ceux-là, tu n'es pas un oiseau! Écarte les bras de ton esprit et décolle. Tu t'éloignes de ton corps, c'est normal. C'est bien. Ton corps est trop réel pour faire tout ce que tu peux faire sans lui. Ton esprit, lui, est juste à la limite du réel et de ce qu'il y a après.

Tu vois ton corps en dessous de toi? Parfait. Oui, il a l'air fragile. C'est un corps vulnérable, mais ton esprit l'est encore plus. Prends garde lors de ton voyage. N'oublie pas de revenir.

Tu montes, tu montes encore. Plus haut. Tu traverses le plafond. Au-dessus, il y a les combles, poussiéreux et plein d'araignées qui se chamaillent. Puis plus haut: tu sors à l'air libre.

Le ciel est rose et indigo: c'est le soir. Le soleil est déjà couché. À ta droite, derrière les montagnes, il fait encore jour. Monte dans le ciel. Vole.

Là, tu rencontres un courant chaud. Il te fait monter: ouvre grand tes ailes, écartes toutes les plumes, augmente ta portance. Tu montes sans effort. Monte encore: tu atteinds les nuages. Monte plus haut. Tu es dans un brouillard gris. Si tu agites tes ailes, tu fais des tourbillons de goutelettes, c'est amusant. Maintenant, tu surgis de l'autre côté du plafond nuageux. Tu es dans un grand champ de crème chantilly rose vif, qui s'étend à l'infini.

Incline une aile: tu vires à gauche. L'autre maintenant: hop! à droite. Tu sens le vent dans tes plumes. C'est grisant. Tu peux aller loin, comme ça. Tu peux aller au bout du monde si tu le veux.

D'accord, tu n'es pas là pour ça. Maintenant, concentre-toi. Ne penses pas à ton corps: tu l'as laissé en bas. Pense à toutes ces étincelles qui crépitent autour de toi. Oui, elles sont encore là. Mais ici, elles sont moins farouches. Elles te connaissent à présent: tu es montée jusqu'à elles.

Tu l'as compris, la magie est présente ici. S'il fallait venir dans les nuages, te détacher de ton corps, c'était pour que tu ressentes la Vieille Magie, comme tu l'appelles, mais elle devrait porter un autre nom: Magie Unique. Elle est la seule, la vraie. Elle est pure, elle est sans souillure. Elle est la dernière chose que les humains n'ont pas réussi à dénaturer.

Et toi, tu t'es fondue en elle, tu y as puisé la force de te détacher de ton corps. Tu l'as comprise, et elle t'as accepté. Redescends, maintenant. Regagne ton corps. Tu as réussi.

Retraverses les nuages, respire une dernière fois l'air pur de l'altitude, sens encore les rayons du soleil couchant sur tes plumes imaginaires, ouvre la bouche pour goûter l'air du soir. Tournoie, bats des ailes. Pique vers le sol. La Tour Ouest se rapproche de toi: ouvre les ailes, tu freines. Abandonne tes ailes et laisse-toi glisser doucement. Tu entres dans la tour, tu traverses les combles. Là, juste sous toi, c'est ton corps que tu vois. Il est toujours là, il respire. Il t'attends. Glisse-toi dedans sans le troubler.

Oui, les étincelles sont là. Elles virevoltent, elles ne sont plus timides. Elles t'ont acceptée. Ouvres-leur ton esprit: elles entrent à flots. Elles piaillent de joie. Elles crépitent dans ta tête, dans ton bras

Ouvre les yeux. Tu es rentrée.

Harry revenait de son entraînement de Quidditch, plus frigorifié que jamais. L'air au-dehors était froid et humide, et à l'intérieur des couloirs il ne valait guère mieux. Consultant sa montre magique, offerte par Sirius, il lut 11h15. Les entraînements finissaient à des heures pas possibles. Il n'avait plus le temps d'aller voir Cho, elle devait dormir; il faudrait qu'il en touche un mot à Angelina, le capitaine de l'équipe.

- Mot de passe? s'enquit pompeusement la grosse dame rose.

- Fanfreluche.

Le portrait pivota en silence. Harry entra, baissant la tête pour passer dans le petit couloir étroit. Il s'attendait à trouver la Salle Commune déserte, mais à son étonnement Ron était là, ainsi qu'Hermione. Cette dernière leur tournait le dos, assise à sa table favorite, comme tous les soirs. Quant à Ron, il l'observait, fasciné. Intrigué, Harry ouvrit la bouche pour demander à son ami ce qu'il regardait avec tant d'attention. Mais le garçon roux se tourna vers lui, un doigt sur la bouche, avec une figure si expressive que Harry obéit. Il observa à son tour leur amie. Elle était en train d'agiter sa baguette, et elle produisait plein d'étincelles vertes, bleues et or. Surpris, le Sorcier se déplaça de côté pour mieux voir.

C'est alors qu'il comprit ce qu'il y avait d'incroyable.

Il ouvrit de grands yeux ronds, estomaqué.

C'était le bras droit qu'Hermione agitait.

Au bout de son moignon, il y avait bien un vide. Et pourtant, la baguette obéissait, comme si elle était tenue par une main. Mais une main invisible.

Le temps resta encore suspendu pendant quelques étincelles. Puis la baguette retomba et Hermione s'afaissa, épuisée. Curieusement, les lumières de la pièce retrouvèrent aussitôt une intensité normale. Harry n'avait pas réalisé comme il faisait sombre jusqu'alors.

Lui et Ron coururent vers leurs amie, qui se redressait lentement. Elle se tourna vers eux, les yeux pleins de larmes, mais c'étaient des larmes de joie. Et elle souriait.

- Hermione! s'écria Harry en la serrant dans ses bras.

Elle s'y raccrocha de toutes ses forces. Ron se joignit à eux.

- J'ai j'ai retrouvé ma main, balbutia-t-elle, sanglotante.

- C'est fantastique, Hermione, dit Harry. Je suis heureux pour toi. Tu es incroyable, tu sais.

Elle se détacha de ses deux amis, pour leur montrer son bras. À l'emplacement de la main, l'air semblait palpable, il crépitait: il était gonflé de magie à bloc.

Hermione explosa à nouveau en sanglots nerveux. Toute la tension accumulée depuis de trop nombreux mois se relâchait.

- Tout va bien, dit Harry en s'agenouillant près d'elle. Tout est fini. Tu as réussi. Ça va aller mieux maintenant.

Ron avait un grand sourire bête sur le visage, et il examinait son amie, ravi.

Ils restèrent longtemps ainsi, serrés les uns contre les autres, partageant leur joie d'être ensemble, et d'être heureux à nouveau. Derrière les grandes fenêtres, nulle ombre ne planait dans le ciel, sauf peut-être une ou deux chauve-souris en quête de leur dîner. La neige scintillait à la lueur de la lune.

Hermione ferma la porte du dortoir derrière elle et s'agenouilla près de son lit. En s'aidant de sa main invisible, elle tira sa grosse valise à l'air libre et l'ouvrit.

Il y avait là un tas de choses resurgies d'un passé enfoui. Elle tira d'abord une boîte de sous un vêtement: rectangulaire, la boîte contenait une épaisse pile de photos: photos de Harry et Ron, photos de ses parents, de sa maison, de son jardin, toutes les choses qu'elle avait prises quand elle avait découvert les tirages sorciers. Photos de Poudlard aussi, avec les nuages qui défilaient dans le ciel et quelques élèves dans le parc qui se promenaient.

Elle posa la boîte de côté, sortit le tigre en peluche que Flitwick lui avait rendu, ôta la pile de livres, sorciers et moldus confondus, ainsi que le carton à chaussures renfermant sa collection de cailloux, du temps où elle ne fréquentait pas la magie quotidiennement. Cette valise était une mine de souvenirs de l'époque moldue: un livre de photos fixes, une jeu de tarot purement banal, une jean, qu'elle ne pouvait pas porter dans l'école à cause de l'uniforme, mais qu'elle gardait parce qu'elle tenait à ses droits de femme libérée, une boîte de pansements, dont elle ne s'était jamais servi depuis son entrée à Poudlard, un agenda datant de l'école primaire, où toutes ses amies Moldues lui avaient écrit des petits mots plein de tendresse et d'enfantillages: Hermione en relut quelques uns avec un sourire nostalgique: avec ses amies, elles s'étaient promis d'aller au même collège, et au même lycée, et de faire toutes leurs études ensemble, et le sort en avait décidé autrement, sous la forme d'une lettre à l'encre verte délivrée par un étrange hibou, un jour de juillet.

Hermione repoussa tous les objets de son enfance, pour s'attarder sur les souvenirs de ces dernières années: les Multiplettes offertes par Harry, l'uf doré de Viktor, qu'il lui avait donné après la deuxième tâche, son appareil photo sorcier, qui avait pris tant de beaux souvenirs, son matériel pour enchantements, craies, bougies, cristaux semi-précieux et encensoir, la petite bouteille contenant du sang de Re'em Finalement, ses doigts se posèrent sur une boîte en fer, qu'elle n'avait pas sortie depuis bientôt un an.

Émue, elle l'ouvrit. Dedans, les quelques Mornilles gagnées par la S.A.L.E. et tous les badges qu'elle avait fait fabriquer et qu'elle n'avait jamais vendus.

Les Elfes de Maison il y avait bien longtemps qu'elle n'y avait pensé Elle avait fini par se laisser convaincre par Hagrid et par Sirius que la S.A.L.E. n'était pas la bonne solution, mais elle voulait encore les aider.

Tiens, peut-être qu'un petit visite à Dobby et aux autres serait bienvenue. Maintenant qu'elle avait résolu le problème de sa main, elle pouvait de nouveau s'intéresser aux autres. De plus, Harry était à son entraînement de Quidditch, et Ron filait Wakewage, alors elle n'avait rien à faire pour le moment.

Elle descendit jusqu'au couloir du rez-de-chaussée, où se trouvait le tableau à la corbeille de fruits. Elle chatouilla le poire et entra par l'ouverture.

Une bonne odeur lui monta aux narines: le repas du soir s'annonçait prometteur. Les Elfes de Maison s'agitaient en tous sens, cuisant, découpant, hachant, éminçant, battant, étalant, pesant, séparant, mélangeant, chauffant, nettoyant, lavant, essuyant, rangeant,et toutes autres actions pratiquées dans une cuisine. De gigantesques poëles, d'un mètre de diamètre, chauffaient sur les fourneaux, des baquets entiers de légumes bouillonaient gentiment, une cinquantaines de poulets rôtissaient sur des broches démesurées, tournant au-dessus d'un feu géant. Sur les cinq tables jumelles de celles de la Grande Salle, des couverts et des plats commençaient à s'ammonceler. Des Elfes couraient d'une table à l'autre, portant des plats deux fois plus grands qu'eux.

Soudain, l'un d'eux se précipita vers Hermione en criant:

- Mademoiselle Hermione!

Il se jeta sur elle et lui enserra les jambes de ses petits bras vigoureux. Ses grands yeux verts étaient tout humides, et il portait les mêmes chaussettes dépareillées que la dernière fois qu'elle l'avait vu.

- Bonjour Dobby, dit joyeusement Hermione. Contente de te revoir!

- Mademoiselle est revenue voir Dobby! Mademoiselle est la meilleure amie de Harry Potter. Est-ce que Monsieur Harry Potter va bien, Mademoiselle?

- Oui, Dobby, il va bien.

- Vous désirez quelque chose, Hermione Granger, Mademoiselle? Nous pouvons vous donner tout ce que vous désirez!

- Donne-moi juste un verre de jus de betterave, s'il-te-plaît.

- Avec plaisir, Mademoiselle! Dobby est ravi de servir à Poudlard, Mademoiselle, et c'est un honneur pour lui que de recevoir l'amie de Monsieur Harry Potter dans sa modeste cuisine!

Sur ces mots, il partit en courant chercher un pichet de jus et un verre. Hermione s'installa sur un banc en l'attendant. Ce n'est qu'une fois assise qu'elle remarqua qu'elle était à la table de Serpentards.

- Comment allez-vous, Mademoiselle Hermione? s'enquit Dobby en posant le jus de betterave à portée de sa main. Nous n'avons pas eu de vos nouvelles depuis bien longtemps, Hermione, Mademoiselle!

- J'ai été occupée, Dobby. Hmm, délicieux, ce jus de betterave! Vous êtes toujours aussi doués en cuisine.

Le visage de l'Elfe s'illumina.

- Dis-moi, Dobby, fit Hermione. Est-ce que certains des Elfes ici présents auraient envie d'être payés, à ton avis? Il y en a à qui ton exemple a fait effet?

La créature baissa la voix, comme toujours lorsqu'il parlait de sujets qui faisaient remonter en lui les pulsions occasionées par une grande tradition d'esclavage.

- Dobby préfère ne pas trop en parler, Mademoiselle. Il a du mal à s'intégrer s'il parle trop de son argent. Les autres Elfes, Mademoiselle, ils ont ils ont peur de l'argent. L'argent a toujours été un traître pour les Elfes de Maison.

Puis il bomba fièrement le torse.

- Mais Dobby est fier de gagner sa vie! Dobby a des vacances, et il peut s'acheter des vêtements! Dobby ne regrette pas, Mademoiselle! Il est toujours immensément reconnaissant à Harry Potter pour l'avoir libéré.

- Je vois, fit Hemrione. Si tu veux mon avis, Harry t'est aussi reconnaissant. Tu lui as sauvé la vie le jour de la deuxième tâche.

Les yeux de Dobby se remplirent de larmes de gratitude en s'entendant complimenter.

Soudain, une idée vint à Hermione. Elle n'était pas venue ici dans ce but, mais ça lui paraissait très important tout à coup. Peut-être que si

- Dis-moi, Dobby, dit-elle lentement. Vous autres, les Elfes de Maison, vous avez de grands pouvoirs, non?

Il recula un peu, ses yeux papillotants, ses oreilles aplaties.

- Oh, oui, Mademoiselle Hermione. Mais il nous est interdit de les utiliser. Un Elfe ne se sert de ses pouvoirs que pour défendre son maître.

- Pourtant, chez Harry, il y a trois ans tu n'as pas fait léviter un gâteau? Et la barrière du Poudlard Express que tu as bloquée? Et le Cognard ensorcelé? Tu t'en sers, de tes pouvoirs. Et quand tu as arrêté Mr Malefoy?

Mais elle y était allée trop fort: Dobby se prit les oreilles entre les mains et les tira très fort, puis il se mit à se frapper le haut du crâne contre le coin de la table, en poussant des petits cris. Mais avant même qu'Hermione ait pu l'arrêter, il se força à se calmer, luttant contre deux courants divergents dans son être.

- Ça va? s'inquiéta la Sorcière.

- Dobby–a–utilisé–ses–pouvoirs–pour–une–bonne–cause, articula l'Elfe avec difficulté. Dobby–n'aurait–pas–dû,–mais–il–n'avait–pas le choix!

- D'accord, d'accord! Je ne te gronde pas, au contraire!

- Les Elfes doivent obéissance à leur maître, Mademoiselle, dit-il en levant ses grands yeux vers elle. Si notre maître nous ordonne de le défendre, nous le faisons au péril de notre vie. S'il nous ordonne de sauter du haut du château nous le faisons aussi. C'est notre nature.

- Je comprends. Mais toi, tu travailles pour le professeur Dumbledore.

- Oui, approuva Dobby, inquiet de savoir où elle voulait en venir.

- Donc tu dois défendre Poudlard au péril de ta vie.

- Le professeur Dumbledore, pas Poudlard.

- Mais qui te paye? Ce n'est pas Dumbledore, c'est l'école! Et tu travailles pour l'école! Tu sers tous les élèves, pas que le directeur.

Il hocha la tête, difficilement.

- Donc si Poudlard est attaqué, tu le défendras, pas vrai?

- Oui, Mademoiselle.

- Et tous les Elfes qui sont ici, pareil!

- Oui Mademoiselle.

- Merci, Dobby. C'est tout ce que je voulais savoir.

- Je vous raccompagne, Mademoiselle?

- Avec plaisir. Dis-moi, Winky est toujours ici?

- Oui, Mademoiselle. Elle se remet un peu. Elle boit moins de Bièraubeurre.

Il la raccompagna jusqu'au portrait de l'entrée, puis la laissa.

- Aurevoir, Mademoiselle Hermione! Revenez nous voir quand vous voudrez!

- Merci Dobby. Je repasserai bientôt.

Et elle referma le portrait derrière elle. Elle avait encore la tête bourdonnante de l'activité incessante des cuisines.

- Bon sang! murmura-t-elle pour elle-même.

Elle se frappa la paume avec le poing, et fut toute surprise d'entendre le claquement de la peau contre la peau, signe que sa main était là, même si elle n'était pas visible. Elle remonta rapidemment à la tour, et rejoignit Ron au moment où il donnait le mot de passe à la grosse dame.

- Ron! ça s'est bien passé?

- Absolument pas, bougonna celui-ci. Je suis encore tombé dans un de ces fichus mini-mondes parallèles. j'ai dû me battre contre une saleté d'araignée géante. Heureusement, j'ai réussi à lui faire peur avec un sort d'Artifice.

Ce n'est qu'alors qu'Hermione remarqua sa robe déchirée et brûlée en quelques endroits, et les égratignures qu'il portait.

- Alors tu n'as pas réussi à voir où Wakewage se rendait?

Il haussa les épaules, de mauvaise humeur:

- Non, je te dis. Les mini-mondes semblent abonder aux alentours de son repaire. À mon avis, c'est elle qui les crée pour se protéger.

- Impossible, dit Hemrione, catégorique.

- Pourquoi pas?

- C'est beaucoup trop puissant! Aucun Sorcier de quinze ans ne serait capable de fabriquer de tels enchantements, réfléchis!

- Réfléchis toi-même! Je te rappelle qu'elle a gardé la Pierre d'Orian.

Hermione se mordit les lèvres, parce qu'elle avait perdu. Ron avait parfaitement raison.

Elle allait parler de son idée à propos des Elfes de Maison, mais tout à coup ça n'était plus tellement d'actualité, et elle se demanda si elle ne s'était pas monté la tête.

- Oh, zut! s'exclama-t-elle en se frappant le front du plat de la main.

- Quoi?

- J'ai oublié mon rendez-vous chez Dumbledore! Il est quelle heure?

Ron consulta sa montre:

- 18h40.

- Je file. On se retrouve au dîner!

Et elle partit en courant. Elle savait où était l'entrée du bureau, mais elle ne connaissait pas le mot de passe. Heureusement, elle avait pris rendez-vous, et quand elle parvint à la gargouille en forme de griffon, celle-ci était ouverte. Elle prit pied sur l'escalier, qui l'emmena à l'étage en douceur. Là, elle frappa à la porte.

- Entrez, Miss Granger.

Elle obéit. Le bureau du directeur dégageait une quiétude presque trop calme, avec tous ses tableaux de vieux Sorciers endormis. Ils donnaient envie à Hermione de leur flanquer un bon coup de balai pour les faire s'animer. Près de la porte, la cage de Fumseck le phénix était vide.

- Asseyez-vous, je vous en prie, dit galament Dumbledore en désignant une chaise.

Elle s'y installa. Dès qu'elle fut prise dans le feu du regard du vieux mage, elle se sentit affreusement gênée. L'heure était venue d'avouer ce qu'elle avait fait tant d'efforts pour cacher. Elle avait peur.

- Le professeur Flitwick m'a parlé de votre main, révéla Dumbledore d'entrée de jeu. Il a pensé que cela vous ôterait un poids. Il a bien fait?

- Euh oui, je suppose, hésita-t-elle. Alors vous êtes au courant de tout?

- Pas de tout, j'en ai peur. Je sais que vous avez perdu une main dans le conflit qui vous a opposé à Lord Voldemort, au mois de juillet dernier.

- Oui. Enfin, pas pendant le conflit. C'est lorsque Harry m'a sortie de ma prison que c'est arrivé. J'étais enfermée dans un carrelage enchanté, et c'est au moment d'en sortir qu'il y a eu cet accident. C'est ce qu'on m'a raconté, puisque moi je n'étais pas consciente.

- Je vois. Puis-je examiner votre main?

Elle remonta la manche et tendit le bras au-dessus du bureau. Dumbledore le prit entre ses doigts, et à nouveau elle ressentit ce malaise profond, cette impression qu'on fouillait à l'intérieur de sa chaire. Le vieux Sorcier plissait les yeux, très concentré.

Finalement, il la lâcha et la regarda par-dessus ses lunettes en demi-lunes.

- Je sens encore la trace du maléfice posé par la lame. Il était extrêment puissant. Je crains que ses effets ne se réduisent jamais suffisamment pour que vous puissiez vous faire repousser une main.

Elle encaissa l'information, imperturbable. Il y avait bien longtemps qu'elle s'était faite à cette idée.

- En revanche, fit Dumbledore, je vois là de grandes marques de magie d'un autre genre. Des marques qui, curieusement, évoquent la forme d'une main.

- Le professeur Flitwick ne vous a pas tout dit, n'est-ce pas?

- Il vous en a laissé l'initiative.

- D'accord. (Hermione prit une grande inspiration) J'ai réussi à recréer un fantôme de ma main.

- Vraiment? Je suis curieux de voir cela. Sauriez-vous me faire une démonstration?

Pour toute réponse, elle hocha la tête et se concentra un instant. À peine avait-elle fermé les yeux que les étincelles de magie affluaient, fidèles au poste. Elle leva alors son bras droit, et la baguette décolla dans les airs. Elle fit des moulinets du poignet, et la baguette suivit, flottant dans le vide à l'endroit où aurait dû se trouver sa main.

- Je vois, approuva Dumbledore. Pourriez-vous produire quelques étincelles? Juste pour voir.

Aussitôt, elle secoua la baguette. C'était le geste banal, celui que faisaient faire tous les marchands de baguettes du monde pour que leur client trouve l'objet qui lui convenait. Mais à peine l'eût-elle esquissé qu'un véritable geyser de feu bleu, vert et or jaillit dans les airs. Des étincelles retombèrent doucement, voletant gentiment avant de s'éteindre.

Sous la surprise, Hermione relâcha la pression, et la baguette tomba sur le bureau. Dumbledore hocha la tête.

- Eh bien, dit-il. Je vous remercie, Miss Granger.

C'était le signal du départ, et Hermione était trop bien élevée pour ne pas obéir. Pourtant, elle mourait d'envie de poser une question au directeur, mais cela était d'ordre privé.

Néanmoins, elle se retourna sur le pas de la porte et demanda:

- Professeur? Il y a quelque chose que je voudrais vous demander.

- Je vous écoute.

- À la bibliothèque, j'ai feuilleté un livre. Un livre sur les Sorciers dont le nom avait marqué l'Histoire.

- C'est tout à fait autorisé, et même encouragé, la taquina Dumbledore. Je n'ai rien à y redire.

- Et dans l'index, j'ai trouvé la trace d'un sort de dissimulation. J'ai fait un Revelatum, et des noms se sont rajoutés. Une liste de noms. Tous les même.

Elle observait attentivement le jeu des expressions de Dumbledore, mais il ne laissa rien transparaître.

- Et quel était ce nom? s'enquit-il tranquillement.

- Potter. Il y en avait plein.

Il hocha la tête, l'air grave.

- Et, avez-vous lu leurs biographies?

- Je n'ai pas pu, fit-elle en secouant la tête. Les pages étaient blanches. Mais je me demandais pourquoi aurait-on intérêt à cacher les informations sur des Sorciers qui sont morts depuis des années?

- J'ai peur, Miss Granger, que ce secret ne m'appartienne pas.

- Mais il concerne Harry! Ça lui ferait tellement de bien de connaître son histoire! Pourquoi est-ce qu'on la lui dissimule?

- Malheureusement, je ne peux vous en parler. Il l'apprendra un jour, et alors je suis sûr qu'il vous le racontera et que vous pourrez le soutenir. Mais pour l'instant, je ne peux me permettre de lui révéler certaines choses qui pourraient le déstabiliser.

Hermione regagna la porte, bien décidée en secret à forcer les défenses du livre.

- Je comprends, mentit-elle. Aurevoir, professeur. Excusez-moi de vous avoir dér

Mais elle fut surprise, car Fumseck venait de passer à travers la porte, comme si elle n'avait pas de consistance. Il vola rapidement à travers la pièce et lâcha un morceau de parchemin sur le bureau de Dumbledore. Puis, dans un cri perçant, désespéré, il se laissa tomber à terre où il s'enflamma.

- Oh! Votre phénix! Qu'est-ce qui lui est arrivé?

- Il a dû être blessé, dit tranquillement Dumbledore.

Il déplia le parchemin qui Fumseck lui avait lancé. Mais Hermione n'avait d'yeux que pour le tas de cendres sur le plancher.

- Comme sa mort était triste! Il a dû souffrir!

- Je ne crois pas. C'est allé vite. Et des cendres, un feu s'éveillera.

- Je vous demande pardon? fit-elle, concentrée à guetter la réapparition du bébé phénix.

- Des cendres, un feu s'éveillera, répéta obligeamment Dumbledore.

Et effectivement, la petite tête de l'oiseau, couverte de duvet jaune-orangé, perça à travers les cendres. C'était un spectacle si touchant qu'Hermione se sentit fondre. Mais il était temps de partir, alors elle salua le directeur et quitta la pièce, sur un dernier regard à Fumseck. Celui-ci salua son départ d'un piaillement affectueux.

S'amusant à faire courir sa main invisible sur les murs, se délectant de ces sensations depuis trop longtemps perdues, Hermione descendit les escaliers pour rejoindre ses amis.

Un monde qu'elle avait cru fermé pour l'éternité venait de se rouvrir à elle.

Tout en marchant, elle sifflotait.

– fin du chapitre 17 –

Tadadadammmm! qui c'est qui vient de clore un nouveau chapitre? c'est bibi! qui c'est qui a passé deux journées entières devant son écran? encore bibi! qui c'est qui ferait mieux de réviser l'oral du bac? oups encore bibi.

Aïe, mes notes de l'auteur deviennent vraiment lamentables. Mais l'auteur (qui a reprit son sérieux, un peu) tient à préciser à ses lecteurs (qui n'ont rien d'autre à lire en attendant le chapitre 18, donc qui vont bien être obligés de m'écouter, niêrk niêrk) qu'elle est heureuse et fière d'avoir clôt ce petit chapitre! Les scènes où Hermione affronte Flitwick et où elle recrée sa main, je les avais prévues de trèèès longue date. Tellement longue qu'elles me paraissaient évidentes, et que quand j'ai dû les exprimer par écrit ça a un peu coincé. Je regrette de n'avoir pas pu rendre le passage avec Harry et Ron (quand ils voient leur amie tenir sa baguette de la main droite) aussi émouvant que je l'aurais voulu, mais ça nuisait trop à la compréhension. C'est que la détresse d'Hermione teintait toute la vie en gris, et que là elle est rescussitée! Alors comprenez l'émotion de ces messieurs!

Ah, un petit détail: l'envolée de l'esprit hors du corps, le voyage dasn les nuages etc, ça vient d'un livre de Bernard Werber, "Le livre du voyage", écrit tout comme ça, à la deuxième personne. Le livre lui-même n'est pas transcendant, parce que c pas facile de se détacher de son corps tout en continuant à lire et à tourner les pages, mais la technique qu'il propose, on peut la réutiliser par soi-même, n'importe quand. Et c'est ce que je fais, depuis que j'ai découvert ça. Quand je ne peux pas m'endormir, ou pour ôter le stress avant un examen, je ferme les yeux, je décolle et je fais le tour de lieux imaginaires c'est une expérience inoubliable, et je l'ai fait partager à ma tite Hermione j'espère que ça lui a plu!

Bon, c'est tout pour aujourd'hui. Dans le prochain chapitre, je vous promets le retour de Morgane (et pas de Wakewage, cette fois) ainsi qu'un brin de Matrix! Et peut-être aurons-nous l'honneur de retrouver Siiiiiiiiiiiiiiiiriiiuuus!!!!!!!!!!!!!! c'est Harry (et mon amie Epayss, la fan n°1) qui vont être contents! Heu, quoi que pas tant que ça (pardonnez moi!). Enfin, zut, vous verrez bien!

gros bisoux à tous, et mille mercis à mes reviewers! Que les chemins que fouleront vos pieds légers soient couverts de pétales aux parfums envoûtants!

Ona