Merci beaucoup à Kim pour ses mots d'encouragements (yééé ;)).

Chapitre 9

Marguerite était assise au pied d'un arbre. L'endroit était si beau. Coloré, calme, paisible et serein. Il était si éclairé qu'elle était éblouie et qu'elle avait du mal à lever les yeux. Elle plaça sa main au-dessus de son front pour se protéger de la source lumineuse qui ressemblait au soleil.

Une femme lui parlait tout bas et elle ne comprenait pas. Le son ne lui parvenait pas aux oreilles.

En se concentrant, elle finit par capter quelques bribes. Elle ne voyait pas, étant trop éblouie, mais elle écoutait.

« Elle sera si belle… Un don… Une vie… Une bénédiction… Intelligente… »

Au petit matin, elle avait oublié son rêve. Mais elle était convaincue que quelque chose de bien s'en venait.

Roxton, assis à côté d'elle, la regardait paisiblement. Elle avait repris ses couleurs et son sommeil semblait léger, heureux. Elle était si belle. Elle respirait au rythme du vent qui soufflait à l'extérieur.

Puis, elle s'éveilla lentement, mettant fin aux semaines d'amnésie et aux quelques jours de tortures.

Elle se souvenait de presque tout. Son passé, sa personnalité, les membres du Tree House étaient clairs comme de l'eau roche en elle. Sa chute à l'eau aussi. Mais la semaine qu'elle avait passée seule était floue. Puis les quatre semaines chez les Brijikés plus claires, mais tout de même embrouillées par endroit. Elle n'avait pas le souvenir d'avoir joué avec une vessie de porc en guise de ballon ou encore d'avoir appris à cuisiner un des plats traditionnels. Mais elle se souvenait comment tresser un panier, comment les confectionner.

Et elle avait oublié qu'elle avait été enceinte.

Elle s'assit dans son lit et fit face à Roxton. Elle sourit. Lui souriait depuis qu'elle avait ouvert les yeux.

- Bonjour.

- Bonjour, répliqua celle-ci.

- Vous m'avez vraiment fait peur. J'ai eu peur de vous perdre, de ne plus jamais vous revoir.

- Je suis bien vivante…

À ce moment, ils furent interrompus par Challenger et Véronica. Et toute la journée, ils n'eurent pas un moment de répit, l'homme de science étant trop inquiet pour Marguerite. Ce fut la nuit tombée qu'ils sortirent en douce du Tree House pour enfin se retrouver.

Étendus sur l'herbe molle, près d'un lac qui laissait les vagues d'eau faire un bruit apaisant contre le sable, ils regardaient le ciel étoilé. Roxton reprit la phrase qu'il avait tentée de prononcé le matin, mais qui avait été interrompue par Challenger.

- Je ne veux pas te perdre, répéta-t-il, cinq semaines sans toi ont été une torture. Je ne savais pas où tu étais ni si tu étais en danger. Je suis heureux que tu sois en pleine forme.

Elle sourit. Après un moment de réflexion, elle déclara :

- Je ne me souvenais de rien. Mais je n'avais qu'une certitude : Quelqu'un m'attendait. Quelqu'un m'aimait. Je ne savais pas qui, mais moi aussi je voulais me retrouver à ses côtés. Et me voil

Il y eut un moment de silence. Roxton sourit malicieusement et se tourna vers sa dulcinée.

- Alors, tu avoues que tu m'aimes ?

- Quoi ? Noooon, moi ? Vous rêvez, Lord Roxton ! s'exclama-t-elle en riant, tous deux sachant pertinemment le contraire.

- Dommage ! fit celui-ci en retournant sa tête vers la lune.

- Comment ça ? demanda-t-elle, toujours en riant et en s'accoudant pour voir les yeux de son bien-aimé.

Il la regarda dans les yeux et eut un air astucieux.

- Parce que je suis fou de toi. Je t'aime.

Elle aborda alors un air plus sérieux, mais pas moins amoureux. Le cœur battant jusque dans les tempes, elle le laissa s'approcher d'elle et l'embrasser. C'était bizarre. Cinq semaines s'étaient écoulées sans qu'ils ne s'embrassent, qu'ils ne se voient…

Maintenant, leurs corps et esprits se rendaient compte à quel point ils étaient dépendants l'un de l'autre, aussi indépendants qu'ils se disaient et qu'ils disaient aimer être.

Leur baiser, au début tendre, s'enflamma bien vite et ils se laissèrent porter par la passion et l'amour. Parmi les baisers et les caresses, ils se retrouvaient enfin comme ils s'étaient laissés, s'aimant sûrement encore plus.

Cette nuit-là, ils eurent la certitude que jamais rien ne les séparerait. Ils s'aimaient trop pour vivre éloignés l'un de l'autre.

Bref, les semaines passèrent tout de même plus ou moins normalement. Véronica qui semblait troublée au début se calma assez vite, poussée par Challenger et Malone. Si juste Véronica était bouleversée, ils préféraient ne pas prendre de risques et ne pas annoncer à Marguerite ce qui s'était produit chez les esclavagistes.

Puis, un matin de décembre, Marguerite, étendue dans son lit, fut éveillée par un mouvement un peu au-dessous de son abdomen. Elle ouvrit les yeux, surprise.

« Impossible ! » pensa-t-elle.

Pour qu'elle ressente cela, c'était qu'elle était enceinte, non ? Et pas qu'un peu ! Elle se mit sur ses pieds et porta ses mains à son ventre. Il n'avait pas encore beaucoup changé. Mais assez pour qu'elle le remarque.

- Comment ai-je fait pour ne pas m'en rendre compte… Il me semble que…

Puis, un flash lui vint. Malone. Il savait. En quatrième vitesse, elle s'habilla et se rendit dans la cuisine où seuls Malone et Véronica étaient. En colère noire, elle tira Malone par la chemise et le plaqua au mur, sous les yeux ahuris de Véronica.

- Marguerite ! Qu'est-ce que vous…

- Mais vous auriez pu m'avertir bon sang ! Ou au moins vous assurez que je me souvenais d'une chose si importante, non !?

- Quoi ? s'étonna Malone.

- Que je suis enceinte !

Véronica poussa un gémissement de surprise et pâlit soudainement. Ça n'échappa pas à Marguerite qui libéra Malone.

- Quoi ?

- C'est que…

- Vous étiez au courant aussi ?

- Je…

Malone secoua la tête et l'héritière se fâcha.

- Ça suffit !

- Que se passe-t-il, fit Challenger en arrivant, attiré par les cris.

- Je suis enceinte, et ils étaient au courant sans que je le sache !

- Vous… mais… attendez voir…

- Ne me touchez pas ! Vous le saviez aussi ! Forcément, vous êtes médecin !

- Comment êtes-vous sûre que vous l'êtes ?

- Je l'ai sentit !

- Vous avez sentit l'enfant ? répéta l'homme de science abasourdi.

- Oui !

Un grand sourire éclaira le visage de Challenger et il regarda Véronica.

- Minimum quatre mois, dit-il. Faites le calcul.

Marguerite haussa un sourcil. Véronica calcula rapidement et ne cliqua pas tout de suite.

- C'était avant qu'elle ne tombe à l'eau… alors… oh ! C'est merveilleux !

- Quoi !? s'énerva Marguerite, qui perdait la conversation et qui paniquait légèrement à devoir à faire avec ce genre d'information sur le moment.

- Je vous conseille de vous asseoir, fit Malone, plus gravement.

Marguerite les tuerait en apprenant qu'elle avait frôlé la fausse couche et qu'ils n'avaient même pas daigné lui en glisser un mot. Elle s'exécuta et les trois autres firent de même, visiblement mal et perdant leur sourire. C'est Challenger qui commença :

- Quand nous vous avons retrouvé, vous étiez très mal en point. Et vous avez beaucoup saigné les jours suivants votre arrivée ici. Selon ce que Véronica et Malone me dirent, aucun des signes ne pouvaient nous tromper. Vous aviez fait une fausse couche. C'est du moins ce que je pensais. Marguerite, c'est un vrai miracle. Vous êtes tombée d'une falaise, vous avez risqué la noyade, souffert d'amnésie, de mal-nutrition et de maltraitance et votre enfant est en vie…

Marguerite les considéra quelques secondes et baissa les yeux, maintenant mi-colérique, mi-triste. Elle serra les dents, les larmes aux yeux. Elle ne voulait pas pleurer. Elle voulait être forte. Mais elle se sentait hautement trahie, humiliée. Ils avaient voulu lui cacher qu'elle portait un enfant et qu'elle l'avait presque perdu.

Quand elle les regarda de nouveau, son visage était imprégné de douleur.

- Vous ne comptiez vraiment pas me l'annoncer ? Vous ne croyez pas que je me dois de savoir une telle chose ?

- Nous ne voulions pas vous faire souffrir. Vous ne vous souveniez même plus que vous étiez enceinte !

- Ah, bien sûr.

Elle inspira profondément. Véronica la regarda un instant et annonça, très calmement :

- C'était dur. Mais je me disais que tant qu'à savoir que mon enfant est mort avant même de naître, j'aurais préféré ne pas le savoir. Nous croyions prendre la bonne décision. Notre objectif était celui de ne pas vous blesser. Pas de vous faire mal. Vous comprenez ?

- Oui.

- Pensez un peu. J'imagine que c'est moi qui serait venu vous l'annoncer. Retournez quelques semaines dans le passé. Vous vous imaginez peut-être ? Je viens de vous annoncer; « Marguerite, j'ai quelque chose de grave à vous dire. Vous avez fait une fausse couche. » Comment l'auriez-vous pris ?

- Mal.

Il y eut une pause silencieuse.

- Mal. Mais j'aurais tout de même préféré le savoir. Je sais que j'ai souffert. Mais c'est le genre de vérité dont il ne faut pas se cacher.

- Je suis désolée. Nous avions peur de votre réaction.

Cette fois, ce fut une gêne qui fut la responsable du silence. Marguerite sourit timidement.

- Enfin, maintenant, il est là.

Véronica sourit de toutes ses dents, un peu moqueuse.

- Maintenant, il y a une dernière personne pour qui il est obligatoire d'être au courant, vous voyez ce que je veux dire ?

- Très drôle, marmonna Marguerite sous les rires des deux autres hommes.

- Qu'est-ce qu'il y a ? fit Roxton en entrant.

- Oups, moi on m'appelle au loin, fit Véronica en partant, suivie des deux autres.

Roxton les regarda partir, en levant un sourcil. Il se retourna ensuite vers Marguerite, le regard interrogateur.

- John, j'ai quelque chose à te dire…