Chapitre 3 : les yeux brillants de l'Inconnu.
Elle n'avait pas fermé l'œil de la nuit, comme tant de fois auparavant mais cela ne la dérangeait pas outre mesure : malgré son jeune âge, elle se sentait étrangement résistante au manque de sommeil.
Heureusement, son « père adoptif » (il lui était difficile de l'appeler ainsi, mais comment aurait-elle pu le qualifier alors qu'il ne cessait de lui rappeler qu'elle lui devait la vie ?...) la croyait plus vulnérable qu'elle ne l'était vraiment, sinon, ses corvées déjà nombreuses se seraient multipliées !
Un petit tapotement la tira de ses pensées.
Perché à la fenêtre, son oiseau frappait au carreau pour attirer son attention. Elle sourit.
« Bonjour ! Tu es bien matinal !
Elle ouvrit la fenêtre pour laisser l'oiseau se nicher sur son épaule, et s'assis sur le rebord. Le jour naissait à peine, et peu de gens risquaient de la surprendre ainsi.
-Que me racontes tu aujourd'hui ?
Tu sais, hier, deux hommes bizarres sont venus à mon secours alors que Parigas voulait encore me faire du mal !
Etait-ce encore à cause de tes oreilles ?
-Oui ! Il m'appelait sans cesse petit démon et m'a comparée à un orc… C'est quoi, un orc ? tu en as déjà vu ?
Non. Mais si tu ressembles à un orc, alors ce doit être de jolies créatures !
Il lissa les plumes de ses ailes grises d'un air songeur.
-Tu crois ? Il a dit qu'il leur faisait du mal pendant la guerre de l'anneau…c'est quoi la guerre de l'anneau ?
L'air indécis, il entrepris de lisser les plumes de son autre aile, puis l'étira avec délectation.
Une fois qu'il eut finit, il pointa sa petite tête vers elle.
Je suis trop jeune pour t'éclairer sur ce point. Et qui étaient ces deux hommes ?
-Eh bien… »
Un léger bruit fit frémir l'oreille exercée du nain. Ces quelques années passées auprès de Legolas lui avaient en effet appris à affiner ses sens, et même s'ils n'égalaient pas ceux de son ami, ils surpassaient ceux d'un humain ou d'un nain aguerri.
Il ouvrit un œil et surpris l'archer, une main sur la poignée de la lourde porte de bois, qui le regardait à présent d'un air coupable.
Il fronça les sourcils.
« Allons, Maître Elfe, le jour pointe à peine le bout de son nez, laissez à cette pauvre gamine le temps de se reposer, tout de même !
Legolas s'intéressa soudain à ses pieds. La contemplation dura un bon moment, et Gimli crut s'être endormi lorsque l'elfe lui répondit :
-Si cette enfant est celle que je crois être, alors elle est fraîche et dispose, ami.
-Je ne…
-Pourquoi ne vous reposeriez vous pas ? Vous, les Nains, êtes moins habitués que les Elfes au manque de repos, et dieu sait que vous en avez manqué, ces derniers temps !
Un léger sourire effleura les lèvres de l'elfe. Il adorait taquiner le nain, qui le lui rendait souvent au centuple.
Mais cette fois-ci, le nain devait admettre qu'il avait raison, et c'est avec un grognement qu'il retourna dans son lit.
-Après tout, ce sont vos affaires et non les miennes !... »
Il attendit néanmoins que l'elfe soit parti pour retourner au pays des songes.
-J'ai ma fierté, après tout !...Idiot d'elfe ! »
Arrivé devant l'auberge, Legolas s'immobilisa, soudain indécis. Les liens qu'il avait avec cette enfant étaient incertains, et s'il s'avérait que ce soit elle…
Il entortilla nerveusement un coin de sa cape de sa main droite, puis cessa aussitôt, presque honteux du stress dont il faisait preuve. Peu importait, au fond, que l'enfant soit ou non celle qu'il recherchait depuis des mois. Celle-ci était mal traitée par celui qui l'hébergeait, et ce serait un service immense à lui rendre que de l'ôter des main de ce…ce…
Un rire aussi léger qu'un papillon lui fit tourner la tête.
Un rire d'enfant.
Puis des murmures, et de nouveaux rires.
Il fit le tour de l'auberge, pour apercevoir enfin la petite fille d'hier, assise sur le rebord de sa fenêtre, située pourtant à une hauteur respectable (l'auberge faisait trois étages et elle se trouvait au second) semblant aussi à l'aise que si elle s'était trouvée dans un fauteuil bien moelleux.
Il sourit franchement lorsqu'il aperçut la petite forme avec laquelle elle conversait.
La petite forme, d'apparence silencieuse, mais avec laquelle elle semblait communiquer comme si elle était en train de lui parler…
Je t'ai enfin trouvée, petite fille… Ma chère et tendre petite…
Quelqu'un te regarde, Cerise !
« -Quoi ?
Elle tourna la tête et sursauta lorsqu'elle se rendit compte que son petit ami avait raison.
-C'est l'homme dont je t'ai parlé tout à l'heure, tu t'en souviens ?
Ce n'est pas un homme, Cerise.
-Que dis tu ? »
Pas un homme…
L'oiseau se détourna d'elle pour s'envoler vers le voyageur masqué par sa capuche. Il se posa sur la main d'apparence délicate que l'homme avait tendue vers lui dans un geste gracieux; et elle crut entendre l'inconnu lui murmurer de tendres paroles dans une langue inconnue.
Mais…qui est-ce ?
Elle se réfugia craintivement dans son lit lorsqu'elle vit qu'il la regardait à nouveau, décelant au passage un regard étincelant.
chapitre 4
